De la philosophie au mythe
À propos des lambeaux de légendes rassemblés dans Le Politique de Platon
p. 207-225
Texte intégral
Ὁ δ’ ἀπορῶν καὶ ϑαυμάξων οἴεται ἀγvoεῖν. διò ϰαὶ φιλóμυϑος ὁ φιλόσοφóς πώς ἐστιν ὁ γάϱ μῡϑος σύγϰειται έϰ ϑαυμασίων.
ARISTOTE, Méta., Α2, 982b 17-19.
1« Celui qui aperçoit une difficulté et s’étonne, reconnaît, dit Aristote, sa propre ignorance. C’est pourquoi l’ami de la sagesse est aussi, en quelque sorte, ami du mythe ; car le mythe est un assemblage de merveilleux ».
2Introduisant le mythe des différents cycles de l’univers dans Le Politique, l’Etranger d’Elée, porte-parole de Platon dans ce dialogue, tient tout d’abord à souligner les merveilles qu’il rapporte. Tirées des anciennes légendes d’Atrée, de Cronos et des Autochtones, elles sont toutes plus étonnantes (ϑαυμαστότεϱα) les unes que les autres1. Mais, ajoute l’Etranger, c’est d’une manière dispersée que la tradition les a livrées, alors qu’en fait elles se rapportent à un phénomène précis, dont personne n’a encore parlé2. Aussi est-ce ce phénomène qu’il s’agit d’expliciter3.
3Comme les pages qui y sont consacrées développent un mode d’exposition assez sinueux, nous croyons qu’il est utile, au regard des interprétations diverses auxquelles elles ont donné naissance4, d’en rappeler schématiquement le contenu.
4Selon la légende d’Atrée, Zeus aurait interverti le lever et le coucher du soleil et des autres astres, introduisant ainsi leur cours actuel5. Ce prodige, témoignant de la faveur du dieu à l’égard d’Atrée dans la querelle qui l’opposait à son frère Thyeste, n’est nullement, comme l’expose l’Etranger d’Elée, invraisemblable.
5En effet, « conserver toujours le même état, les mêmes manières d’être et demeurer identique, convient uniquement aux êtres supérieurs à tout »6, c’est-à-dire aux formes intelligibles7. « La nature corporelle, elle, n’est pas de cet ordre. Or, l’être que nous nommons ciel et monde, tout en ayant été comblé de nombreux dons bienheureux par Celui qui l’a engendré, n’en participe pas moins au corps ; ce qui fait qu’il ne saurait être entièrement exempt de changement »8.
6Est-ce à dire, pour autant, que cet être pourrait se mouvoir, tantôt dans un sens, tantôt dans l’autre ? Non. Le mouvement qu’il a reçu en partage est un mouvement de rotation circulaire9. Commandant à tout ce qui se meut, ce mouvement — le plus proche de l’identité propre aux « êtres supérieurs à tout » que sont les formes intelligibles — ne peut se dérouler que dans un sens10.
7Comment alors expliquer le prodige rapporté dans la légende d’Atrée ? Serait-il dû à « un dieu », voire à « deux dieux aux intentions contraires »11 ?
8Imprimer au monde des mouvements de révolutions « alternatives et contraires »12 est une activité qui va à l’encontre de l’immutabilité de dieu13. Et imaginer des querelles entre les dieux est incompatible avec la non diversité de la divinité14.
9Dès lors, la seule explication qui peut être donnée du prodige raconté dans la légende d’Atrée est que « tantôt le monde se trouve conduit par une cause étrangère et divine, acquérant à nouveau la vie et recevant de Celui qui en est l’ouvrier une immortalité restaurée, et que tantôt, laissé à lui-même, il se meut sous sa propre impulsion, après avoir été abandonné dans des circonstances opportunes lui permettant de cheminer en sens inverse pendant des milliers de périodes, parce que, étant très grand et parfaitement équilibré, il va en marchant sur un pied très petit »15.
10Au premier mouvement de rotation du monde, mouvement guidé par dieu, se rapportent les merveilles du règne de Cronos chantées par Hésiode16. L’ordre idyllique des choses qu’elles décrivent, n’a rien à voir avec le spectacle qu’offre le monde aujourd’hui17. Si son mouvement circulaire général se trouve toujours placé sous le commandement et la vigilance du dieu qui le composa18, sous le règne de Cronos il en allait de même pour toutes ses parties19. Les animaux, « répartis par genres et par troupeaux », étaient confiés à des génies divins20 ; gouvernés et nourris par eux, ils ne connaissaient ni la sauvagerie, ni l’allélophagie, ni la guerre, ni les querelles21. Les hommes, eux, étaient gouvernés directement par dieu lui-même22, si bien qu’ils n’avaient pas besoin de constitutions politiques23. Enfin, les femmes et les enfants n’étaient la propriété de personne24 ; ce qui est à mettre en rapport avec les légendes des Autochtones25 rapportées par nos premiers ancêtres ou par les premiers hommes appartenant au monde que nous connaissons26. Selon ces légendes, les hommes du temps jadis naissaient de la terre ; y retournant en semence à la mort, ils en renaissaient un nombre déterminé de fois, « sans garder aucun souvenir de leurs vies antérieures »27. Celles-ci se déroulaient sans histoire. Comme tout naissait spontanément pour l’usage des hommes28, ces derniers n’avaient pas à travailler29. Quant aux saisons, elles étaient si bien tempérées, qu’ils ne pouvaient en souffrir et n’avaient à se soucier ni du gîte, ni du vêtement30.
11Peut-on conclure que les hommes de cette époque étaient plus heureux que les hommes d’aujourd’hui ? Disposant d’« un trésor commun de sapience »31, c’est plus que probable32. Mais il faudrait un interprète capable de dire si, avec ce trésor, les hommes du règne de Cronos connaissaient le désir de s’instruire et de philosopher33.
12Toutefois, « lorsque le temps assigné à toutes ces choses fut révolu, (...) chaque âme ayant accompli son compte de renaissances et étant retombée en semence dans la terre autant de fois que l’exigeait sa propre loi, (...) le pilote de l’univers, lâchant, pour ainsi dire, les commandes du gouvernail, retourna s’enfermer dans son poste d’observation »34. Le monde laissé à lui-même, ne s’arrêta pas, car il avait reçu, dès l’origine, de Celui qui le composa la vie et l’intelligence35 c’est-à-dire, comme l’enseigne le récit cosmologique du Timée, une âme automotrice orientant son mouvement et connaissant la substance, ainsi que les propriétés des formes intelligibles et des choses sensibles qui y participent36. Mais le mouvement qui lui était propre, mouvement de rotation circulaire, s’inversa37.
13Les secousses liées à cette volte-face furent violentes. La mort ravagea le monde humain et animal38. L’accident le plus étrange et le plus insolite fut l’arrêt du cours des générations, puis son renversement39. Tout ce qui survivait de mortel se mit à croître non en vieillesse, mais, à rebours, en jeunesse. « Les cheveux blancs de vieillards se mirent à noircir, les joues de ceux qui avaient de la barbe redevinrent lisses ; ce qui reconduisait chacun au temps où approche la fleur de l’âge ; quant aux adolescents, leur corps devenant moins modelés et diminuant de taille chaque jour et chaque nuit, ils retombèrent à l’état de l’enfant nouveau-né et finirent par y ressembler tant dans leur âme que dans leur corps ; après quoi, continuant dans cet état à régresser, ils finirent par disparaître tout à fait »40, c’est-à-dire par retomber en semence dans la terre pour en renaître41.
14Lorsque les secousses provoquées par le renversement du mouvement de l’univers furent passées, ce dernier poursuivit sa révolution en sens inverse d’une manière ordonnée, « veillant et commandant en maître aux choses qu’il renferme, aussi bien qu’à lui-même, se remémorant, dans la mesure du possible, l’enseignement qu’il avait reçu de Celui qui en était l’ouvrier et le père. Au début, (...) il mettait cet enseignement en pratique avec assez d’exactitude, mais, vers la fin, avec de moins en moins de force. La cause de cet état de choses, pour lui, résidait dans ce que le mélange qui le constitue comporte de corporel, de nourri à sa primitive nature ; car celle-ci comportait beaucoup de désordre avant de parvenir à son état actuel d’organisation42. En effet, c’est de celui qui l’a composée qu’elle a reçu tout ce qu’il y a de beau, tandis que c’est de sa condition antérieure que provient tout ce que le monde contient de souffrance et d’irrégularités »43. Prenant le pas sur l’ordre établi par dieu, elle rendit les biens rares, n’engendrant que des maux44. Craignant que le monde ne se détruise lui-même en « s’abîmant dans l’océan sans fond de la dissemblance »45, le dieu, qui dès l’origine le composa et l’organisa, se rassit à son gouvernail. Redressant tout ce qui, dans le cycle parcouru sans guide, avait été endommagé et disloqué, il restaura le monde, le rendit « immortel, impérissable » et en renversa le mouvement46.
15Ce renversement ne restaura pas l’âge d’or du règne de Cronos. Il donna naissance au règne de Zeus, c’est-à-dire au monde que nous connaissons47. Ni directement guidé par dieu, ni totalement abandonné par ce dernier, c’est en maître de lui-même et de ce qui le peuple qu’il vit, imité en cela par ses parties qui ont à concevoir, enfanter et à se nourrir elles-mêmes, selon leurs propres moyens48. Les débuts de ce dernier et troisième cycle, furent, pour toutes ses parties très durs. Privés du soin des génies divins, les animaux devinrent sauvages49. Les hommes en étaient la proie50. « Sans industrie et sans art », ils vivaient dans des conditions pénibles, confrontés à de nombreuses difficultés51, jusqu’au jour où, selon d’autres légendes, les dieux leur firent don du feu, des arts, des semences et des plantes52. Avec ces dons se développa l’existence autarcique que nous connaissons, soumise, à l’instar du monde, à deux orientations contraires : celle de la raison, de l’ordre, du bien et de la beauté dus à sa cause divine, et celle de la non-raison, du désordre, du mal et des irrégularités dus à sa nature corporelle.
16Ces deux orientations, présentées séparément d’abord, sont le phénomène précis auquel se rapportent, pour l’Etranger d’Elée, les merveilles racontées, indépendamment les unes des autres, dans les lambeaux des légendes d’Atrée, de Cronos et des Autochtones.
17Dans le cours du dialogue où ces dernières sont rassemblées, leur agencement a un but précis : faire comprendre au tout jeune interlocuteur de l’Etranger d’Elée —le Jeune Socrate à peine sorti de l’enfance, ainsi que le fait remarquer ironiquement l’Etranger53 — que la définition, probablement pythagoricienne54 de l’homme politique comme pasteur d’hommes55 appartient à un autre âge56. Dans le règne de Zeus, l’homme politique ne peut se contenter d’être le τῆς ἀγέλης τϱοφός57, le nourricier du troupeau que constituent les hommes. Confronté à un monde qui n’est ni purement soumis à la raison, comme dans le règne de Cronos, ni purement soumis au tumulte et à la dissemblance, comme dans le règne de la nature corporelle, il doit unir les hommes, par la loi, dans un même tissu et y entrelacer leurs différences58, imitant en cela l’ordre primitif imprimé par dieu au monde.
18Mais si telle est, d’une manière obvie, la leçon que le Jeune Socrate est appelé à tirer de la structuration qui lui est proposée des légendes d’Atrée, de Cronos et des Autochtones, on peut se demander si le mythe nouveau qui en résulte a une vertu purement didactique, s’il se trouve développé uniquement en raison du jeune âge de l’interlocuteur auquel il s’adresse, sans nécessité philosophique. Cette question en implique d’abord une autre : est-ce que l’ami de la sagesse, censé faire usage, à la différence d’avec les enfants, de la raison et de l’argumentation, peut avoir recours au mythe ou en être « en quelque sorte » l’ami, comme le donne à entendre Aristote ?
19Au regard des considérations expresses développées par Platon au sujet du mythe, la réponse à cette dernière question semble, en première instance, devoir être négative. Dans son étude sur le mythe chez Platon, L. Brisson écrit : « En Grèce ancienne, le sens de μῦϑος s’est modifié en fonction des transformations qui ont affecté le vocabulaire du « dire » et de la « parole » au cours d’une évolution historique dont le terme est Platon »59. Décrivant le mythe comme « ce discours par lequel est communiqué tout ce qu’une collectivité donnée conserve en mémoire de son passé et transmet oralement d’une génération à une autre, que ce discours ait été élaboré par un technicien de la communication comme le poète, ou non »60, Platon en entreprend aussi la critique dans un but précis : « briser le monopole ”du mythe” pour imposer le type de discours qu’il entend développer, c’est-à-dire le discours philosophique, à qui il reconnaît un statut supérieur »61. Pour cela, Platon a dû « réorganiser le vocabulaire de la ”parole” en Grèce ancienne. Car si μῦϑος peut être assimilé à λόγος entendu comme ”discours” en général, il doit cependant être opposé à λόγος pris dans le sens de ”discours vérifiable” »62. Autrement dit, le mythe pour Platon a deux défauts. Rapportant des faits dont il est seul à avoir gardé la mémoire et présentant les êtres immortels qui y interviennent sous des apparences sensibles, il est invérifiable. Du Passé très éloigné63 auquel renvoient les légendes d’Atrée, de Cronos et des Autochtones, nul n’a fait l’expérience, que ce soit par le biais des sens ou de l’intellect. Sa connaissance relève uniquement de la tradition64. Quant aux apparences sensibles sous lesquelles dieu y est présenté, apparences d’un pilote et d’un observateur, nul n’en a davantage fait l’expérience, que ce soit par le biais des sens ou de l’intellect, car dieu ne revêt aucun trait des mortels65.
20Faut-il dès lors conclure au caractère auto-référentiel du mythe, au fait qu’il n’est tributaire que de l’imaginaire qu’il développe et ce, d’autant plus librement, qu’il n’a aucun souci de l’argumenter ou de l’expliquer ? Le phénomène auquel se rapportent les légendes d’Atrée, de Cronos et des Autochtones, « personne n’en a parlé », comme le rappelle l’Etranger d’Elée66 ; ce qui définit le second défaut du mythe : son caractère non argumentatif à partir duquel on peut comprendre que la dispersion de ses éléments soit aisée, leur enchaînement étant purement contingent.
21Si le mythe n’avait d’autre référent que l’imaginaire qu’il développe, il se situerait par-delà les valeurs du vrai et du faux. Or, dans le Cratyle67 et dans plusieurs passages de La République68, le mythe est désigné comme un discours faux, même s’il comporte quelques vérités69. Au premier abord, cette désignation est problématique, car dans Le Sophiste Platon précise que pour recevoir les valeurs du vrai et du faux, le discours doit porter sur des réalités accessibles aux sens ou à l’intellect70 ; ce qui n’est pas le cas du mythe. Dès lors, sur quelle base peut-on lui attribuer les valeurs du vrai et du faux, valeurs conférant à son référent un caractère réel ?
22Pour approcher cette base, il faut s’arrêter aux textes de la fin du second livre de La République. Dans ces textes consacrés à l’éducation des gardiens dans la cité idéale et au rôle qu’y jouent, dans les premières années, les récits mythiques, Platon, par la voix de Socrate, précise que les récits d’Homère et d’Hésiode sont faux, parce qu’ils présentifient les dieux et les héros d’une manière erronée « par rapport à ce qu’ils sont »71. Et d’ajouter que, pour savoir « ce qu’ils sont », c’est aux « traits » (τύποι) qui leur sont prêtés par le discours philosophique qu’il s’agit de se référer72, eux seuls fournissant les normes de la vérité pour tout discours73.
23En ce qui concerne dieu, quels sont les « traits » auxquels tout discours, mythique ou autre, doit se référer et se conformer pour pouvoir être dit vrai ?
24Ces « traits » sont la bonté et la perfection de dieu, perfection dont découlent son immutabilité et sa véridicité.
25De dieu, il faut dire qu’il est « essentiellement bon »74 et, en tant que tel, la cause uniquement de ce qui est bon75. En effet, ce qui est bon n’est pas nuisible ; ce qui n’est pas nuisible ne produit aucun mal et ce qui ne produit aucun mal ne peut être la cause du mal76. Par conséquent, il faut rejeter les propos d’Homère faisant de Zeus l’auteur des biens et des maux77. Essentiellement bon, « dieu n’est pas la cause de tout, comme le disent la plupart ; il n’est la cause que d’une petite partie des choses qui arrivent aux hommes »78, c’est-à-dire des biens « beaucoup moins nombreux que les maux »79. Pour ces derniers, « il faut chercher d’autres causes que dieu »80.
26Ces « autres causes » sont révélées dans le mythe des différents cycles de l’univers développé par l’Etranger d’Elée. Se conformant au discours cosmologique du Timée81 et au rôle qui y est dévolu à dieu, il apprend que la source du mal réside dans la non soumission de la nature corporelle à l’ordre de la raison qui lui a été imprimé par dieu, voire plus fondamentalement encore, dans le désordre caractérisant la constitution primitive de la nature corporelle, constitution ne relevant pas de dieu. En effet, loin d’être tout puissant, créateur ex nihilo du monde, dieu n’est que l’informateur du monde, le νοῦς ordonnant ce dernier pour le meilleur82, à partir de la vision des formes intelligibles.
27A ce premier « trait » de dieu qu’est la bonté, trait excluant la toute-puissance, s’en ajoute un second : la perfection. De dieu il faut dire qu’il est absolument parfait83, voire par là-même, absolument simple et véridique. La perfection n’étant susceptible ni de plus ni de moins84, dieu est immuable85. « Etant le plus beau et le plus parfait », c’est « toujours absolument dans la forme qui est la sienne qu’il demeure »86. Par conséquent, il faut tenir pour faux les propos d’Homère disant que « les dieux sous les apparences de voyageurs étrangers, revêtant toutes sortes de formes, parcourent les villes »87. Non seulement dieu ne revêt aucune forme inférieure ou mortelle, mais il répugne au mensonge, que ce soit en actes ou en paroles88 : procédant principalement de l’ignorance, le mensonge est incompatible avec dieu89. Absolument simple, parfait et, par la même, omniscient, dieu parle et agit toujours d’une manière véridique. Il n’égare autrui ni par des fantômes, ni par des paroles, ni par des signes envoyés aussi bien dans la veille que dans le sommeil90.
28Respectant la bonté, l’immutabilité et la simplicité de dieu, le mythe des différents cycles de l’univers narré dans Le Politique comporte quelques vérités. Mais, dans la mesure où il prête des traits sensibles à dieu, il a un aspect mensonger.
29A certains égards, la philosophie n’a pas à déconsidérer cet aspect, car il est difficile d’amener le grand nombre des hommes à l’exercice de la raison. Aussi, lorsque le mythe ne s’éloigne pas trop de la vérité ou des considérations développées par la philosophie au sujet des réalités dont il parle — qu’il s’agisse de dieu, des héros ou de l’âme91 — il est un instrument de vulgarisation de la sagesse infiniment précieux92. Présentifiant sur un mode sensible ce qui ne l’est pas, il s’adresse aux parties inférieures de l’âme et, par son enseignement, les soumet à la raison93.
30Mais en dehors de toute préoccupation didactique, est-il permis à l’ami de la sagesse d’avoir recours au mythe dans ses propres recherches ? Ne doit-il pas bannir tout mensonge, même s’il s’approche de la vérité ?
31Il est un domaine dans lequel l’ami de la sagesse ne peut se dispenser d’avoir recours au mythe. Ce domaine est celui de la cosmologie. Appelé à y envisager la constitution du monde sensible, seul reflet du monde intelligible, c’est sur un état de choses antérieur au monde que nous connaissons qu’il doit se prononcer, état qui ne peut être vérifié. D’où la désignation du récit de la constitution du monde dans le Timée comme μῦϑος εἰϰός94, récit vraisemblable de la constitution du monde, même si, à la différence d’avec le mythe des divers cycles de l’univers dans Le Politique, il s’appuie davantage sur des considérations mathématiques que sur des éléments merveilleux.
32Dans les autres domaines, l’ami de la sagesse doit éviter d’avoir recours au mythe. D’après la hiérarchie des différentes formes de la connaissance établie au VIIe livre de La République, le mythe représente le niveau le plus bas de la connaissance : le niveau de l’εἰϰασία, de la simulation ou de la conjecture95. « Ne pouvant appréhender l’objet lui-même, le connaître par une saisie directe (eidenai), l’eikasia, selon la définition concise qu’en donne J.P. Vernant, doit s’appuyer sur tout ce qui paraît susceptible d’avoir avec l’objet quelque ”semblance” afin de l’imaginer de son mieux »96. Or, le propre de la démarche philosophique est l’abandon des semblances dans la quête de la réalité même de l’objet envisagé97. Ainsi, en ce qui concerne dieu, il ne s’agit pas, dans la démarche philosophique, de s’attacher au modèle des apparences sensibles prêtées par le mythe à dieu ; c’est de la réalité ou de la forme intelligible du dieu qu’il faut partir pour en rechercher l’essence et les propriétés.
33Cette recherche, nous en connaissons le résultat. De dieu il faut dire qu’il est essentiellement bon et parfait. Quant aux propriétés liées à son essence, nous savons qu’elles sont l’immutabilité et la véridicité. Comme le souligne E. Chambry dans sa traduction de La République98, « avant Platon, Xénophane, Pindare et les poètes dramatiques avaient proclamé la bonté morale de la divinité». Mais que cette bonté exclue la toute-puissance de dieu « est probablement dû à Platon « lui-même »99. Dans Les Mémorables, Xénophon fait dire à Socrate : « crois-tu que les dieux auraient mis dans l’esprit des hommes l’idée qu’ils sont capables de faire du bien et du mal, s’ils n’en avaient pas le pouvoir ? »100. A cette croyance, nous savons qu’il faut substituer, pour Platon, une argumentation précise établissant que dieu ne saurait être la cause du mal.
34Cette argumentation refusant toute dérivation du mal à partir de son contraire, le bien, est d’un intérêt non négligeable. Elle libère l’esprit de ce qu’il lui est odieux de concevoir : un être transcendant, auteur non seulement du bien, mais du mal.
35Toutefois, cette épuration rationnelle de la conception de dieu oblige, en son terme et en son principe, à avoir recours au mythe. En effet, affirmer que dieu est uniquement la cause de ce qui est bon soulève non seulement la question des causes du mal, mais du rôle de dieu dans la constitution du monde. Ce rôle, seul un discours cosmologique, c’est-à-dire un discours mythique permet de l’expliciter. Mais, pour l’affirmer, sur quelle base s’appuyer ? Si, comme le soutient Platon dans le Timée, le fait d’octroyer un rôle à dieu dans la constitution du monde est vraisemblable, il n’en demeure pas moins qu’il peut être contesté, parce que l’affirmation même de l’existence de dieu est contestable.
36Certains, dit Platon dans Les Lois101, nient l’existence de dieu et, pour beaucoup même, cela passe pour la fine pointe de l’intelligence. A les en croire, tout serait le produit, tantôt de la Nature (φύσις), tantôt du Hasard (τύχη), tantôt de l’Art (τέχνη). Le feu, l’eau, la terre et l’air existeraient en vertu de la Nature et du Hasard. De ces éléments absolument dépourvus d’âme ou d’intelligence et de leur mélange hasardeux seraient nés la terre, le soleil, la lune, les astres, le ciel tout entier et tout ce qu’il contient, les saisons, les animaux et les plantes. Enfin l’Art, produit d’une action tardive de la Nature et du Hasard, aurait engendré 1° des œuvres ne possédant aucune vérité, telles celles de la peinture et de la musique, purs simulacres ; 2° des œuvres possédant quelque sérieux, telles celles de la médecine, de l’agriculture et de la gymnastique, au service des forces de la nature ; 3° des œuvres qui, tout en ne possédant aucune vérité, sont néanmoins au service des forces de la nature : celles de la législation102.
37Ces propos développant une vision irrationnelle et mécaniciste du monde se trouvent aussi évoqués par Platon dans Le Sophiste103 et le Philèbe104. Comme l’a montré W. de Mahieu, les auteurs auxquels renvoie leur inspiration profonde sont Empédocle, Anaxagore et Démocrite105. Si la conception irrationnelle et mécaniciste du monde développée par ces auteurs conduit à l’athéisme sur le plan physique, pour Platon, cette conception ne peut conduire, sur le plan éthique et politique, qu’au relativisme et à l’arbitraire défendus par les Sophistes. Non contents, dit Platon, d’enseigner que le monde ne résulte d’aucune opération divine, qu’il n’est régi par aucune pensée, les tenants de l’inexistence de dieu invitent aussi à considérer comme un produit de l’Art, non seulement dieu lui-même, mais le bien et la justice. Réduisant leur contenu à la diversité des lois qui, dans chaque société, l’institut, ils finissent par faire accroire, comme Calliclès dans le Gorgias106, que ce qui est beau d’après la nature, ce n’est pas le respect d’autrui, ainsi que le proclament certaines lois, mais le droit du plus fort107.
38Ces considérations relevant, comme y insiste Platon, « d’une ignorance tout à fait déplorable, laquelle passe pour la plus grande sagesse »108, comment les réfuter ?
39En montrant, dit l’Athénien, porte-parole de Platon dans Les Lois, que « la cause première de la génération et de la corruption de toutes choses est cela même que les doctrines qui ont façonné les âmes de ces hommes impies ont déclaré être né non en premier, mais ultérieurement et que ce qui est né ultérieurement, c’est ce qu’elles ont déclaré être premier »109. Autrement dit, pour réfuter les propos des athées, il faut montrer que ce qu’ils appellent la Nature n’est pas premier, mais l’œuvre de ce qui pour eux est ultérieur : l’Art, étant entendu que l’Art dont procède la nature n’est pas un art humain, mais divin110. Sans cet Art divin, source de ce qui est bon, ordonné et reflet de l’intelligence, tout dans l’univers, comme le rappelle l’Athénien, « irait follement et sans ordre »111.
40Ainsi, au discours cosmologique des tenants de l’inexistence de dieu, c’est un autre discours cosmologique qu’il s’agit d’opposer : celui du Timée affirmant que « dieu112 a voulu que toutes choses fussent bonnes, que rien dans la mesure du possible113 ne fut mauvais et qu’ainsi, prenant en main tout ce qui était visible et qui ne connaissait aucun repos, mais se mouvait sans ordre114, il l’amena du désordre à l’ordre, ayant estimé que ce dernier vaut infiniment mieux que le désordre. Or, il n’était permis, ni ne l’est, à l’être le meilleur de faire autre chose que ce qui est le plus beau. Après avoir réfléchi, il trouva que des choses visibles par nature il ne pourrait jamais sortir un tout dépourvu d’intelligence qui fut plus beau qu’un tout pourvu d’intelligence et que, par ailleurs, l’intelligence ne peut naître en nulle chose si on la sépare de l’âme. En vertu de ces considérations, c’est en mettant l’intelligence dans l’âme115 et l’âme dans le corps116, qu’il façonna le monde afin d’en faire une œuvre qui, par nature, fut la plus belle et la meilleure. De cette façon donc, il faut dire qu’en vertu de ce raisonnement vraisemblable (λόγον τόν εἱϰότα), ce monde qui est véritablement un être vivant, pourvu d’une âme et d’une intelligence, est né grâce à la providence de dieu »117.
41Si ce raisonnement relatif à la constitution du monde est vraisemblable, n’en va-t-il pas de même pour celui des athées ? Par-delà le mouvement régulier des astres et des planètes, mouvement qui peut être allégué comme preuve que sur l’univers veille une âme on ne peut plus excellente118, il y a les irrégularités de la nature et les maux dont Socrate lui-même, dans l’élaboration de la théologie orthodoxe au second livre de La République, précise qu’ils sont plus nombreux que les biens. Quant au mythe des différents cycles de l’univers dans Le Politique, n’enseigne-t-il pas que les débuts du monde que nous connaissons furent durs pour toutes ses parties, que les animaux y étaient sauvages et que les hommes, « sans industrie et sans art », y étaient confrontés à de nombreuses difficultés ?
42Dès lors, qu’est-ce qui rend le raisonnement relatif à la constitution du monde dans le récit mythique du Timée, raisonnement s’appuyant sur l’affirmation de l’existence d’un dieu bon, auteur du monde que nous connaissons, plus vraisemblable que celui des athées ?
43L’opposition et l’extrapolation des conséquences de ces deux raisonnements dans le mythe du Politique qui nous préoccupe, apportent, croyons-nous, la réponse à cette question, et sous la seule forme qu’elle peut revêtir. Se présentant comme un pari pour le sens, pour son triomphe sur le non-sens, cette réponse ne peut être vérifiée. Si elle pouvait l’être, le monde, comme dans le règne de Cronos, serait totalement soumis à la raison. Or, comme le précise l’Etranger d’Elée, les merveilles qui se rapportent au règne de Cronos n’ont rien à voir avec le spectacle qu’offre le monde que nous connaissons. On peut même dire qu’à ses débuts, l’absence de dieu y était plus frappante que sa présence. En dehors de la perfection de son mouvement circulaire général, tout semblait plutôt y témoigner de l’absence de toute pensée. De là à conclure à l’inexistence de dieu et au règne de la nature corporelle, il n’y a qu’un pas. Mais le franchir revient, en dernière instance, à condamner le monde à « s’abîmer dans l’océan de la dissemblance » ou, pour reprendre les termes de l’Athénien dans Les Lois, à aller « follement et sans ordre », c’est-à-dire sans raison et sans fin. Dans un tel monde, les œuvres de l’art, y compris de l’art politique, produits tardifs de la Nature, ne peuvent connaître d’autres buts que l’utilité119 ou la satisfaction des passions120. Ces buts, sans valeur assignable — aucune raison, aucune fin ne permettent d’en juger — n’exprimeraient que l’absurdité de la multiplicité des actions humaines, à l’instar du renversement du cours des générations décrit comme un des phénomènes les plus insolites du règne de la nature corporelle. Contre cette absurdité, on ne peut alléguer l’évidence d’une quelconque raison et fin des actions humaines. Tout ce qu’on peut faire, c’est la conjecturer et parier pour le sens à partir de certains indices : l’ordre du monde, son arrachement à l’« océan de la dissemblance », voire son caractère apparemment impérissable, immortel. Ces indices n’offrent que des probabilités de l’existence d’un être dont l’intelligence, la bonté et la perfection seraient la raison et la fin du monde, ainsi que des existences individuelles qui en sont la réplique121. Mais, contre l’absurdité du règne de la nature et pour arracher les actions humaines aux conséquences éthiques et politiques qui en découlent, est-il possible à l’ami de la sagesse de disposer d’autre chose ? Pour faire de la liberté, de la prééminence de la raison sur les passions et de l’union avec autrui dans la sagesse la fin de toute vie éthique personnelle122 et collective123, peut-il aller plus loin que les conclusions de l’Etranger d’Elée affirmant que, si le monde n’est pas directement guidé par dieu, il n’en est cependant pas totalement abandonné ? Et même, comme le donne à entendre Socrate dans le Cratyle124, si l’ami de la sagesse, le « philosophe » a quelque bon sens, n’est-il pas obligé de reconnaître qu’au sujet des dieux il ne sait rien ?
44Aussi, qu’il parie pour ou contre l’existence de dieu, pour ou contre le sens, dans son ignorance, c’est toujours au mythe que le « philosophe » doit avoir recours et aux merveilles qu’il rapporte, à moins d’accepter, dans une autre démarche que la démarche philosophique, de « battre le nuage de l’inconnaissance »125.
Notes de bas de page
1 268e-269b. Pour les textes de Platon auxquels il est fait référence dans cet article et pour ceux qui y seront cités, nous nous appuyons sur le texte grec établi dans les Œuvres complètes de Platon, éd. Les Belles Lettres.
2 Polit., 269b-c.
3 Ibidem, 269c.
4 P. VIDAL-NAQUET dans Le Mythe platonicien du Politique, les ambiguités de l’âge d’or et de l'histoire, in Mélanges E. BENVENISTE, Paris 1975, écrit p. 383, note 2 :« On a parfois soutenu qu’il y avait dans le mythe platonicien du Politique non pas deux cycles du Cosmos mais trois étapes : âge de Cronos, âge du monde à l’envers, âge de notre monde qui est mixte. Cette interprétation est défendue par A. LOVEJOY et G. BOAS, Primitivism and Related Ideas in Antiquity, Baltimore, 1935, réédition, New York, 1965, p. 158 et indépendamment par L. BRISSON, Le Même et l’Autre dans la structure ontologique du Limée de Platon, Paris, 1974, p. 478-496. Cette hypothèse peut s’appuyer sur des textes comme Politique, 269d où « notre » monde est décrit comme un monde mixte en des termes que ne désavouerait pas le Timée (...) mais elle est rigoureusement incompatible avec une lecture attentive du mythe ». Contrairement à P. VIDAL-NAQUET et à J. BOLLACK, Empédocle, I, Introduction à l’ancienne physique, Paris, 1965, p. 133 et note 1 p. 135, à V. GOLDSCHMIDT, Platonisme et pensée contemporaine, Paris, 1970, p. 104, à P. M. SCHUHL, Sur le mythe du Politique, in La fabulation platonicienne, Paris, 1965, p. 84, à A. KREMER-MARIETTI, Platon et le mythe, in Revue de l’Enseignement philosophique, XXXI, 1981, no 3, p. 51-52 et à J. CHANTEUR, Platon, le désir et la Cité, Paris, 1980, p 122-125, nous croyons avec A. LOVEJOY et G. BOAS, op. cit., L. BRISSON, op. cit., R.S. BRUMBAUGH, Platon and the history of science, in Studium generale, 14, 1961, p. 523 et H. HERTER, Gott und die Welt bei Plato. Eine Studie zum Mythos des Politikos, in Kleine Schriften, 1975, p. 325, qu’une « lecture attentive » du mythe du Politique oblige à y voir la description de trois âges : l’âge de Cronos (271d — 272d), l’âge du monde à l’envers et du règne de la nature corporelle (270d — 271c ; 272e — 273d) dû à une première volte-face du monde (270b-c) et l’âge du monde que nous connaissons ou du règne de Zeus (273e — 274d) inauguré par une seconde volte-face du monde (273e).
5 Polit., 269a. Sur cet épisode de la Légende d’Atrée cf. EURIPIDE, Electre, 726-744 ; Iphigénie, 193-197, 816 ; Oreste, 1001-1006. Comme le souligne P. FRUTIGER dans Les mythes de Platon, Paris, 1930, p. 241, la légende d’Atrée « est exposée dans tous ses détails par les scoliastes (Schol. in Eur. Orest. 811 et 998 ; Scol. in Horn. II. II, 105) ».
6 Polit., 269d. Sur le sens hyperbolique de l’adjectif utilisé au superlatif dans ce passage, cf. J. VAN CAMP et P. CANNART, Le sens du mot ΘΕΙΟΣ chez Platon, Louvain, 1956, p. 218.
7 Sur la désignation des formes intelligibles comme « êtres supérieurs à tout » ou « réalités les plus divines de toutes », cf. J. VAN CAMP et P. CANNART, op. cit., p. 218.
8 Polit., 269d-e.
9 Ibidem 269e. Cf. aussi Tintée, 34a. Pour les rapprochements qui peuvent être établis entre le mythe des différents cycles de l’univers dans Le Politique et le récit cosmologique du Timée cf. L. BRISSON, op. cit., p. 478-508.
10 Polit., 269e.
11 Ibidem, 269e-270a.
12 Ibidem, 269e.
13 Rép., Il 380d et sv.
14 Ibidem, et 378b-d ; Euthyphron, 6b ; Critias, 109b. Il est à noter avec M.J. GREGORY, Myth and Transcendance in Plato, in Thought, 43, 1968, p. 288, que Platon n’est pas intéressé par le nombre des dieux, mais par leur nature.
15 Polit., 270a. Pour l’image du monde se déplaçant, au moment où il est abandonné de dieu, en sens inverse sur la base d’un pied très petit, P.M. SCHUHL, op. cit., a montré que Platon s’inspire très probablement « d’un appareil représentant les mouvements du ciel, bien équilibré et mobile sur un pivot » (p. 82). Cet appareil que Platon semble aussi avoir en vue dans les textes de La République, X, 617c et du Timée, 40d., « en même temps qu’il repose par le bas sur un pivot, serait suspendu par le haut à un crochet, par l’intermédiaire d’un fil » (p. 83). Mis en mouvement par la main, le fil auquel il est suspendu se tord ; lorsque la main s’en écarte, le fil continue d’abord à se tordre, puis, après un mouvement de trouble, il commence à se détordre et à faire tourner l’appareil en sens inverse.
16 Les travaux et les jours, 109-119. Cf. aussi PLATON, Lois, IV 713b-e ; Critias, 109b-d.
17 Polit., 271d.
18 Ibidem.
19 Ibidem.
20 Ibidem.
21 Ibidem, 271d-e.
22 Ibidem.
23 Ibidem, 272a.
24 Ibidem.
25 Ibidem. Comme le fait remarquer P. FRUTIGER, op cit., p. 235, note 5, cette légende est souvent évoquée par Platon : cf. Lois, II 663 ; Banquet, 191 c ; Protagoras, 320d ; Critias, 113c ; Soph., 247c, 248c. A ces références on peut encore ajouter celles du Ménexène, 237b-238a et de la Rép., III 414c-e, IX 575d. Dans la littérature poétique, on la retrouve chez Pindare, Isthm., VII, 10 et fr.29 ; Eschyle, Sept., 412 ; Euripide, Phén., 666-675, 812-821, et Bacch., 1025 et sv., 1314 et sv. ; Aristophane, Nuées, 853.
26 Polit., 271 a-b.
27 Ibidem, 272a.
28 Ibidem, 271d.
29 Ibidem, 272a.
30 Ibidem.
31 Ibidem, 272c. Nous reprenons cette expression à la traduction du Politique proposée par A. Dies dans l’édition Les Belles Lettres.
32 Polit., 272c.
33 Ibidem, 272d.
34 Ibidem, 272d-e. La traduction de ce texte est reprise à A. DIES, op. cit.
35 Ibidem, 269d.
36 Timée, 37a-c. Cf. aussi L. BRISSON, op. cit., p. 332-352.
37 Polit., 272e, 273a, 269c,d, 270a.
38 Ibidem, 273a, 270c-d.
39 Ibidem, 270d.
40 Ibidem, 270e.
41 Ibidem, 271b-c.
42 Cf. Tintée, 52e-53a. Avant la formation du monde, l’eau, l’air, la terre et le feu se comportaient « sans raison ni mesure ». Sur la description de l’état primitif (= antérieur à la formation du monde) de la nature corporelle, cf. L. BRISSON, op. cit., p. 177-266.
43 Polit., 273a-b.
44 Ibidem, 273c-d.
45 Ibidem, 273d. Nous reprenons la traduction de A. DIES, op. cit. « L’océan sans fond de la dissemblance » dans lequel le démiurge craint que le monde, laissé à lui-même, ne s’abîme, est l’état chaotique, non ordonné et sans configuration déterminée du matériau auquel il a donné forme en créant le monde.
46 Polit., 273e.
47 Ibidem.
48 Ibidem, 274a-b.
49 Ibidem, 274b.
50 Ibidem, 274b-c.
51 Ibidem, 274c. Cette situation de l’homme, au début du monde, que nous connaissons, rejoint celle décrite par Protagoras dans son mythe : cf. Protagoras, 321c.
52 Polit., 274c-d. Cf. aussi Protagoras, 321d-e, 322c.
53 Polit., 268e.
54 Cf. J.B. SKEMP, Introduction to Plato, The Statesman, Londres, 1952, p. 26-66.
55 Polit., 267c, d, 268c.
56 Ibidem, 274e-275a.
57 Ibidem, 268c.
58 Ibidem, 308c et sv.
59 L. BRISSON, Platon, les mots et les mythes, Paris, 1982, p. 12.
60 Ibidem.
61 Ibidem, p. 110.
62 Ibidem.
63 Polit., 269b.
64 Ibidem.
65 Rép., II 381d-e.
66 Polit., 269c.
67 408c.
68 II 377a, d, III 386c, VII 522a.
69 Ibidem, II 377a.
70 259c, 264b.
71 Rép., II 377e.
72 Ibidem, 379a.
73 Ibidem, 380c, 383a, c, 386b, al.
74 Ibidem, 379b. Cf. aussi Phédon, 63b, 80d ; Cratyle, 403e ; Phèdre, 247a.
75 Rép., II 379b, c, 380c. Cf. aussi Timée, 29e, 30a, 48a, 53b, 68e, 69a ; Théét., 176b.
76 Rép., II 379b.
77 Ibidem, 279d. Les propos d’Homère auxquels il est fait référence dans ce texte sont ceux de l’Iliade, XXIV, 527-9.
78 Rép., II 379c.
79 Ibidem.
80 Ibidem.
81 Cf. L. BRISSON, Platon, les mots et les mythes, p. 137 ; note 9, p.4.
82 Limée, 47e-48a, 29a-b. Cf. L. BRISSON, Le même et l’autre dans la structure ontologique du Limée, p. 29-106.
83 Rép., II 381b, c ; Limée, 29a.
84 Rép., 381c.
85 Ibidem, 381b. A. DIES, dans Le cycle mystique. La Divinité, Origine et fin des existences individuelles dans la philosophie antésocratique, Paris, 1909, p. 71, rappelle que l’immutabilité de dieu était déjà défendue par Xénophane, le vrai « fondateur de l’Eléatisme » (p. 70).
86 Rép., II 381c.
87 Ibidem, 381d et HOMERE, Odyssée, XVII, 485-6.
88 Rép., II 382a-383a.
89 Ibidem, 382d.
90 Ibidem, 382e-383a.
91 De son caractère immortel et de son destin cf. Phédon 107d-114d ; Rép., III 386a-387b.
92 Pour le grand nombre des hommes, il joue un rôle similaire à celui des formes intelligibles pour le philosophe : cf. L. BRISSON, Platon, les mots et les mythes, p. 144-151 où tes textes de Platon relatifs à l’utilité du mythe sont analysés d'une manière systématique.
93 Ibidem, p. 93-105.
94 Timée, 29d, 59c, 68d. Cf. L. BRISSON, Le Même et l'Autre dans la structure ontologique du Timée, p. 104-105.
95 511e-534a.
96 J.P. VERNANT, Religions, histoires, raisons, Paris, 1979, p. 128.
97 Rép., VII 533e-534b, al.
98 T. IV des Œuvres complètes de Platon, éd. Les Belles Lettres, p. 83, note 1.
99 Ibidem.
100 I 4, 16. Nous reprenons cette référence et la traduction du texte auquel elle renvoie à E. CHAMBRY, op. cit. p. 83, note 1.
101 X 886a et sv.
102 X 888b-889e.
103 265c.
104 28d.
105 W. de MAHIEU, La doctrine des athées au Xe Livre des Lois de Platon, in Revue belge de philologie et d’histoire, t. XLII, 1964, p. 27-33 ; 46.
106 483a-484c.
107 Lois, X 889e-890b. W. de MAHIEU, op. cit. écrit p. 47 : « le relativisme d’un Protagoras en matière de législation et de justice constitue, sans doute, la trame idéologique de la partie éthique de la Théorie des Athées, mais les conséquences pratiques que la Théorie y rattache sont trop extrémistes pour être attribuées à Protagoras en personne. Elles remontent plutôt à Antiphon, à Thrasymaque et surtout à Calliclès ». Cf. Ibidem, p. 33-43.
108 Lois X 886b.
109 Ibidem, 891e. Cf. aussi 892b.
110 Sophiste, 265e : δήσω τὰ μεv φύσει λεγόμενα ποιἒ ισδαι ϑείᾳ τέχνη.
111 Lois, 897d.
112 « Symbol or personification of the logical abstraction ”intelligent causation” in general », comme le note T.M. ROBINSON, Demiurge and world soul in Plato’s Politicus, in American Journal of Philology, 88, 1967, p. 59, en rapprochant le Timée du mythe des différents cycles de l’univers dans Le Politique. Cf. aussi J.B. SKEMP, Plato’s concept of deity, in Zetesis, Anvers-Utrecht, 1973, p. 121 ; L. BRISSON, Le Même et l’Autre dans la structure ontologique du Timée de Platon, p. 32-33.
113 Car dieu ne fait qu’ordonner l’état primitif de la nature corporelle par la persuasion, cf. Timée, 47e-48a.
114 Cf. note 42, p. 212.
115 Il s’agit de l’âme du monde pourvue d’un-vous par dieu qui est un-vous. Sur l’âme du monde, cf. note 36, p. 211.
116 Il s’agit du corps du monde dont la constitution par dieu est décrite dans le Timée, 31b-34b. Cf. aussi L. BRISSON Le Même et l’Autre dans la structure ontologique du Timée de Platon, p. 357-412.
117 Timée, 30a-c.
118 Lois, X 897c.
119 Cf. Rép., I 338c-339a : La thèse du sophiste Thrasymaque au sujet de la justice.
120 Cf. Gorgias, 491e-492d : les précisions apportées par Calliclès à sa thèse au sujet de la justice.
121 Polit., 274d.
122 Cf. Rép., IV 441c-444a ; al.
123 Cf. Ibidem, 433a-434c ; Polit., 276e et sv. ; Lois, III 693c ; al.
124 40od.
125 Expression d’un mystique anglais anonyme du milieu du XIVe siècle, auteur d’un recueil intitulé Le nuage de l’inconnaissance, Ligugé, 1977, p. 32.
Auteur
Professeur aux Facultés universitaires Saint-Louis.
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