1250 Notamment la théorie allemande du Droit libre et, dans une moindre mesure, les Critical Legal Studies.
1251 M. Weber, Sociologie du droit, op. cit., p. 196.
1252 Voy. notamment l’ordonnance de Villers-Cotterets et les Institutes de Loisel.
1253 Voy. le plaidoyer de Leibniz en faveur d’un droit clair, certain et connu… du législateur et des interprètes officiels de la loi.
1254 H. Kelsen, Théorie pure du droit, op. cit., p. 83-84.
1255 A. Papaux, Introduction à la philosophie du « droit en situation », op. cit., p. 18 ; F. Ost et M. van de Kerchove, De la pyramide au réseau ?, op. cit., p. 367 ; H. Kelsen, Théorie pure du droit, op. cit., p. 19.
1256 G. Bachelard, Le Nouvel Esprit Scientifique, 10e éd., P.U.F., 1968, p. 11 (« La vérité scientifique est une prédiction, mieux une prédication »). Dans le même sens, voy. H. Cairns, The Theory of Legal Science, op. cit., p. 56 ; J.M. Keynes, A Treatise on Probability, MacMillan, Londres, 1921, p. 277 ; S.L. Hurley, « Coherence, Hypothetical Cases and Precedent », O.J.L.S., 1990, vol. 10, p. 233.
1257 F. Ost et M. van de Kerchove, De la pyramide au réseau ?, op. cit., p. 367 : « Régler la conduite humaine par des règles est donc faire le pari (ou prendre le risque) de la liberté ».
1258 Voy. supra, no 164.
1259 Il est vrai qu’il considère que l’éthique et le droit constituent des exceptions dès lors qu’ils fonctionnent conformément au principe d’imputation mais il reconnaît que, si on admet que l’essence de la causalité consiste dans la possibilité de prévoir des événéments futurs, il pourrait être considéré que les lois juridiques sont identiques aux lois de la nature (Théorie pure du droit, op. cit., p. 78-94).
1260 En ce sens, voy. notamment Fr. Müller et O. Jouanjan, « Présentation » op. cit., p. 13-14. ; F.A. Hayek, Law, Legislation and Liberty, op. cit., p. 15-16.
1261 Fr. Müller et O. Jouanjan expliquent ce phénomène par le complexe nourri par les sciences humaines à l’égard des sciences exactes (« Présentation », op. cit., p. 12-13).
1262 Voy. également A. Lalande, Vocabulaire technique et critique de la philosophie, PUF, « coll. Quadrige », 2002, v° Loi : « Si l’on considère Dieu comme créateur ou comme architecte de l’univers, on est amené à se représenter les régularités de la nature comme l’effet de règles qu’il lui prescrit. D’où l’idée de « lois de la nature » conçues d’abord comme des décrets impératifs de Dieu […] » (p. 583). Descartes semble clairement considérer Dieu comme étant l’auteur des lois de la nature (Discours de la méthode, op. cit., p. 29-30). Sur l’ambiguïté du mot « loi » chez Hobbes, Grotius et Pufendorf, voy. A. Dufour, Droits de l’homme, droit naturel et histoire, op. cit., p. 111-124). Sur les points communs entre lois scientifiques et juridiques, voy. A. Papaux, Introduction à la philosophie du « droit en situation », op. cit., p. 157 ; P. Moor, Pour une théorie micropolitique du droit, op. cit., p. 175-176.
1263 Voy. sa citation in extenso, supra no 210.
1264 W. Rumble critique cette conception précisément en ce qu’elle opérerait une confusion fondamentale entre lois scientifiques et juridiques, les règles produites par les organes de l’État n’étant pas des prédictions mais des normes (« American Legal Realism… », op. cit., p. 73). Voy. les critiques de Kelsen et Hart, supra, no 265.
1265 M. Weber, Rudolf Stammler et le matérialisme historique, op. cit., p. 148-155. Selon C. Didry, cette causalité sociale spécifique du droit consiste un des apports principaux de Weber. Si le droit peut être considéré comme un facteur causal des actions humaines, il fonde également « une attente de garantie publique dans l’exécution des engagements entre particuliers » (« Droit, histoire et politique dans la sociologie de Max Weber », in La légitimité de l’État et du droit. Autour de Max Weber, M. Coutu et G. Rocher (dir.), Les Presses de l’Université Laval, 2006, p. 91-96). Dans le même sens, Ch. Grzegorczyk écrit que, ce qui est constitutif de la norme, « c’est l’introduction dans le monde d’un certain courant de causalité artificielle […], le groupe dans lequel la norme fonctionne reconnaît que cette causalité introduite par la volonté humaine modifie les choix individuels et provoque ainsi les sentiments d’obligation chez les sujets » (La théorie générale des valeurs et le droit. Essai sur les prémisses axiologiques de la pensée juridique, L.G.D.J., 1982, p. 264).
1266 Nous démonterons cette affirmation dans le premier chapitre de notre troisième partie.
1267 L. Wintgens, Droit, principes et théories pour un positivisme critique, op. cit., p. 167 (« Il est frappant de constater que les réalistes attribuent le désir de sécurité au désir de la figure perdue du père, tandis que ceux qu’ils critiquent l’attribuent à un désir de survie »). Selon J. Ellul, « dans un monde, de toutes parts imprévisible, l’homme a toujours eu besoin de savoir » (« Sur l’artificialité du droit et le droit d’exception », op. cit., p. 29).
1268 A. Maslow, « A Theory of Human Motivation », in Psychological Review, 1943, p. 372-377). Pour une critique de cette théorie, voy. M. A. Wahba et L.G. Bridwell, « Maslow Reconsidered : a Review of Research on the Need Hierarchy Theory », Organizational Behavior and Human Performance, 1976, p. 212– 240.
1269 J. Carbonnier, Flexible droit, 7e éd., op. cit., p. 172.
1270 Voy. supra, no 223.
1271 J. Lenoble et F. Ost, Droit, mythe et raison, op. cit., p. 4.
1272 Ibidem, p. 151-173 ; 223-251 et 297.
1273 Ibid., p. 227 et 552 : « C’est cela l’efficace de la mytho-logique juridique : traiter des contradictions sociétaires selon les prescriptions de l’ordre. La logique verrouille l’ensemble du texte jurisprudentiel dans l’enclos de la loi que le mythe exhausse à la dignité de vérité bonne en la reportant à son auteur infaillible » (ibid., p. 229). Voy. également le caractère mythique, voire mystique attaché à la loi par la doctrine française (supra, no 237).
1274 Comme l’écrit P. Brunet, « Ce n’est pas l’existence factuelle du désordre qui justifie la sécurité juridique mais bel et bien la volonté d’y remédier, au nom de la représentation classique selon laquelle un ordre « véritablement juridique » doit être clair, ordonné, cohérent, en un mot, prévisible ! » (« La sécurité juridique : nouvel opium des juges », op. cit., p. 248).
1275 Le philosophe A. W. Watts écrit que nommer, c’est séparer et que le langage et la pensée créent un conflit entre l’homme et la nature : « Plus nous essayons de vivre dans le monde des mots, plus nous nous sentons isolés et seuls, plus toute l’allégresse et la vitalité des choses sont troquées contre davantage de certitude et de sécurité […]. (L)a maladie particulière de l’homme civilisé pourrait être décrite comme un blocage ou une cassure entre son cerveau […] et le reste de son corps » (Éloge de l’insécurité, trad. par B. Guérif, Petite Bibliothèque Payot, 2003, p. 51-55 et 64).
1276 Comme le relève A.-J. Arnaud, la philosophie libérale pense l’homme dans un rapport de séparation par rapport à la nature. L’homme est souverain de lui-même mais tout le reste est étranger et potentiellement source de danger. Cette conception de la liberté « objective tout ce qui n’est pas elle sous le sceau général de l’insécurité » (Dictionnaire encyclopédique de théorie et de sociologie du droit, v° Sécurité, p. 544).
1277 Cette rencontre explique, selon Kelsen, l’émergence du principe de causalité nécessaire.
1278 K. Popper, L’univers irrésolu, op. cit., p. 4.
1279 Voy. supra, no 172.
1280 M. Gauchet, La condition historique, op. cit., p. 167-196.
1281 Ibidem, p. 15-18.
1282 Sur la question, voy. K. Popper, L’univers irrésolu, op. cit., p. 4-5.
1283 Comme le résume O. Hattaway : « ‘stare decisis et non quieta movere’ : let the decision stand and do not disturb things which have been settled » (« Path Dependence in the Law : The Course and Pattern of Legal Change in a Common Law System », Iowa L. Rev., 2000-2001, p. 622).
1284 Jusqu’à la fin du Moyen-âge, la loi ne joue qu’un rôle minime par rapport à la coutume (K. Benyekhlef, Une possible histoire de la norme, op. cit., p. 446).
1285 G. Timsit évoque ainsi la « loi héritière de la Parole divine » (Les noms de la loi, op. cit., p. 11). M. Villey écrivait que la philosophie juridique moderne était « sortie de la théologie » (« Torah-Dikaion I (Patristique et Haut Moyen-âge) », in Critique de la pensée juridique moderne (douze autres essais), op. cit., p. 20). Encore avant lui, Kantorowicz écrivait que le xxe devait encore écarter tout esprit théologique de la science juridique rajeunie (« The Battle for Legal Science », op. cit., p. 2021 et 2024 (« However, jurisprudence has thus far waited in vain for the man who would feel the force within himself to become its Luther »). Frank luimême avait envisagé ce lien : « It is arguable that in law, as everywhere else, this religious impulse is operative ; it drives men to postulate a legal system touched with the divine spirit and therefore free of the indefinite, the arbitrary and the capricious » (Law and the Modern Mind, op. cit., p. 211). Sur l’influence de l’idéologie chrétienne sur le droit continental et la dimension mystique de l’État moderne, voy. K. Benyekhlef, Une possible histoire de la norme, op. cit., p. 454-456 et 508-523. Selon C. Schmitt, « (t) ous les concepts prégnants de la théorie moderne de l’État sont des concepts théologiques sécularisés » (Théologie politique, trad. par J.-L. Schlegel, Ed. Gallimard, Paris, 1988, p. 46). K.J. Arrow souligne le passage d’autorité qui s’est opéré, lors des révolutions anglaise et américaine des xviie et xviiie siècles, d’entités ou d’individus sacrés vers des principes impersonnels (The Limits of Organization, Norton & Company, New York-London, 1974, p. 65).
1286 R. Von Jhering, Law as a Means to an End, op. cit, p. 288-289. Au début du xxe siècle, le juriste français Emmanuel Lévy écrivait déjà que le droit n’était « qu’un substitut pratique de la religion » (L'affirmation du droit collectif, Société nouvelle de librairie et d'édition, Paris, 1903, p. 23).
1287 J.-P. Puissochet, « Des traités et des juges : la fonction de la jurisprudence dans l’élaboration du droit communautaire », in Problèmes d'interprétation – A la mémoire de C. N. Kakouris, C. G. Rodriguez Iglesias e. a. (dir.), Sakkoulas-Bruylant, Athènes-Bruxelles, 2004, p. 306 ; O. Jouanjan, « Faillible droit », op. cit., p. 61. Il paraît plus honnête de dire que le vide angoisse l’être humain. On relèvera l’expression de « déni de justice », comme renvoyant au déni inconscient des lacunes ou au fantasme de la complétude.
1288 Sur ces postulats, voy. infra no 325.
1289 Sur l’importance de la prévisibilité pour l’économie, voy. les développements supra, no 242, et notamment ceux de Weber. Gauchet reconnaît le mérite de l’analyse wébérienne en termes de rationalisation de la société mais lui reproche de « masquer la source métaphysique de la dynamique occidentale », c’est-à-dire ce qui pousse la raison en avant mais n’est pas de l’ordre du rationnel (La condition historique, op. cit., p. 191). Il en va de même de la réflexion relative à la sécurité juridique.
1290 Comme le fait remarquer F. Ost, le temps benthamien est tourné vers le futur, gradualiste et continuiste : « Qui dit calcul utilitariste, dit anticipation de probabilités prévisibles » (« Codification et temporalité dans la pensée de J. Bentham », op. cit., p. 217. Voy. également J. Bentham, Traités de législation civile et pénale, t. III, op. cit., p. 209 : « Si l’on trouvait un moyen de se rendre maître de tout ce qui peut arriver à un certain nombre d'hommes, de disposer tout ce qui les environne, de manière à opérer sur eux l'impression que l'on veut produire, de s'assurer de leurs actions, de leurs liaisons, de toutes les circonstances de leur vie, en sorte que rien ne pût échapper ni contrarier l'effet désiré, on ne peut pas douter qu'un moyen de cette espèce ne fût un instrument très énergique et très utile que les gouvemements pourraient appliquer à différents objets de la plus haute importance. »)
1291 M. Gauchet, La condition historique, op. cit., p. 374-375. Tel est précisément le sens de la « condition historique », qui est « d’être en transit entre des dimensions impossibles à tenir ensemble » (ibid., p. 376).
1292 En 1953, le behavioriste américain B.F. Skinner écrivait encore que la science n’était pas qu’une description des événements mais qu’elle tendait à découvrir un ordre afin de permettre la prévision des événements afin de contrôler le futur. Dans le domaine des affaires humaines, cela revenait à postuler que le comportement est déterminé et qu’il est possible, lorsque les conditions de l’action humaine sont connues, d’anticiper celle-ci (Science and Human Behavior, Macmillan, New York, 1953, p. 6-7).
1293 On se souviendra de Gény qui écrivait ne pas vouloir « sacrifier à une chimère d’inflexibilité et d’égalité abstraites toute idée d’adaptation individuelle des principes généraux », tout en voulant maintenir « comme un desideratum absolu, la stabilité et la certitude du droit » (supra, no 256).
1294 Sur la question, voy. infra, no 391.
1295 C.J.U.E., 8 février 2007, Groupe Danone, C-3/06P, pt 28. En fait, le dilemme est biaisé par le point de départ, qui consiste à conserver la logique cartésienne de la sécurité juridique (voy. infra, la troisième partie).
1296 Dans un sens comparable, P. Popelier explique le peu de succès du principe de sécurité juridique par le fait que sa violation est un motif de responsabilité extra-contractuelle et qu’un constat excessif de violation risquerait de paralyser le législateur (« Five Paradoxes on Legal Certainty… », op. cit., p. 65). Selon F. Hubeau, « si une violation du principe de la confiance légitime était largement et facilement admise sans discernement, tous les autres principes de droit seraient mis en échec et l’insécurité règnerait » (« Le principe de la protection de la confiance légitime… », op. cit., p. 161).
1297 Gauchet situe la naissance de l’individu au tournant axial, avec des penseurs comme Confucius, les philosophes grecs, les prophètes d’Israël et Bouddha (La condition historique, op. cit., p. 115).
1298 A. Dufour, « Le discours et l’événement… », op. cit., p. 415).
1299 Gauchet, qui définit la personne comme l’individu en tant qu’il est doté de réflexivité, de présence à lui-même, écrit que « les sociétés modernes changent le statut des personnes de l’extérieur en les constituant en individus de droit » et que, parallèlement le processus de sortie de la religion transforme les individus de l’intérieur en les érigeant en « sujets » (La condition historique, op. cit., p. 252-253).
1300 On se souvient cependant des ambiguïtés de traduction chez Grotius, entre droit (law) et droits (rights).
1301 Il est important de rappeler que la notion même d’obligations dans le chef du prince envers ses sujets, qui constitue la racine du principe de légalité, est nettement antérieure au xviie siècle. Voy. supra, no 165 et 171.
1302 Dans le contexte du paradigme cartésien, littéralement en « connaissance de cause » serait-on tenté d’écrire.
1303 Voy. les observations de Menissier sur la sécularisation du contrat social (supra, no 740).
1304 Pour Prigogine, « la démocratie et les sciences modernes sont toutes deux les héritières de la même histoire, mais cette histoire mènerait à une contradiction si les sciences faisaient triompher une conception déterministe de la nature alors que la démocratie incarne l’idéal d’une société libre » (La fin des certitudes, op. cit., p. 15).
1305 Comme le relève K. Benyekhlef, les attributs du droit moderne « marquent une idéologie statocentrique » (Une possible histoire de la norme, op. cit., p. 399).
1306 Sur cette question, voy. infra, nos 441-443.
1307 Cette dualité au sein de la sécurité juridique, P. Pescatore la met en évidence involontairement, lorsqu’il définit la sécurité juridique comme « une idée d’ordre philosophique, découlant d’une certaine conception de philosophie sociale qui voit dans l’ordre et la paix une condition essentielle de l’existence humaine ». Elle signifie « plus concrètement » que chacun puisse connaître la loi « pour qu’il puisse régler en conséquence ses actes et ses comportements » (Introduction à la science du droit, Luxemburg, 1960, p. 415). On voit clairement le glissement de l’idéal politique de paix et de stabilité, qui en se concrétisant s’identifie à l’exigence subjective de prévisibilité du droit.
1308 Voy. supra, nos 29 et 86.
1309 Voy. supra, nos 63 et 144.
1310 Voy. notamment les arrêts Riva, Cantina et la jurisprudence TWD, supra nos 58, 103, 138 et 143.
1311 Voy. l’arrêt Emmott et comp. notamment les arrêts Heininger et Palmisani (supra, nos 140-141).
1312 Voy. l’arrêt Brescia, supra no 149.