Avant-propos
p. 7-9
Texte intégral
1Les textes réunis dans ce volume livrent les résultats d’une recherche collective qui fut menée de 1990 à 1993 par le Séminaire interdisciplinaire d’études juridiques des Facultés universitaires Saint-Louis sur le thème Images et usages de la nature en droit.
2Créé en 1974, le Séminaire a pour principal objectif de favoriser une recherche critique et interdisciplinaire sur le phénomène juridique envisagé dans ses différentes dimensions. C’est dans cette perspective qu’il publie, depuis 1978, la Revue interdisciplinaire d’études juridiques et qu’il a consacré ses travaux de recherche antérieurs aux thèmes successifs de l’interprétation en droit1, de l’évolution de la fonction juridictionnelle2, de l’actualité de la pensée juridique de Jeremy Bentham3, et, enfin, des rapports entre les notions de droit et d’intérêt4.
3Pour introduire le présent volume, l’on se contentera dans cet avant-propos d’évoquer le contenu des cinq parties dont il est composé.
4Ayant choisi d’étudier cette fois les relations entre la nature et le droit, le Séminaire ne pouvait manquer d’aborder la problématique du droit de l’environnement. Les auteurs dont les textes sont regroupés dans la première partie du volume évoquent, principalement sous un angle normatif, les relations entre l’homme et la nature qui pourraient servir de justification au droit de l’environnement. Les analyses ici proposées éclairent également les voies par lesquelles ce droit nouveau construit son objet afin d’en assurer la protection.
5La protection de la nature, conçue comme environnement terrestre, cadre de vie de l’espèce humaine, est par ailleurs assurée par le droit pénal auquel sont consacrés les textes rassemblés dans la deuxième partie du livre. L’exemple du droit pénal de l’environnement révèle cependant que l’enjeu de cette protection consiste dans l’ajustement d’un ensemble d’intérêts sociaux divergents. Par ailleurs, le droit pénal illustre le fait que la notion de nature peut désigner en droit un modèle rationnel, un ensemble de principes normatifs supérieurs, susceptibles de justifier les règles du droit positif. Comme en témoignent les études ici présentées, relatives à la naturalisation des peines et des incriminations, la nature reflète à cet égard les croyances d’une époque dont elle est censée garantir l’objectivité. Mais, par un juste retour des choses, la nature nous permet ainsi de saisir quelques avatars de l’imagination juridique.
6Lorsqu’elle n’est pas mobilisée à des fins de légitimation, la nature se prête à d’autres usages. Conçue comme un enchaînement de phénomènes matériels dont les régularités donnent prise au savoir scientifique et à la maîtrise technique, la nature offre un ensemble de ressources dont l’appropriation ne laisse pas le droit indifférent. Les contributions rassemblées dans la troisième partie du présent volume examinent, à travers la problématique des droits intellectuels, les formes les plus avancées des modes juridiques d’appropriation de la nature.
7Les textes qui forment la quatrième partie de l'ouvrage concernent une autre signification de l’idée de nature. Celle-ci peut en effet servir à désigner les caractères spécifiques qui permettent de définir l’homme. Les contributions proposées à ce sujet développent une réflexion sur la part respective de la biologie et de la culture dans la fixation de la nature humaine.
8Enfin, la cinquième et dernière partie du présent volume débute par un texte d’Alain Renaut qui, faisant la transition avec les textes précédents, défend une conception de la nature humaine en termes de subjectivité. L’on a précédemment évoqué, à propos du droit pénal, la fonction de légitimation que peut exercer la nature lorsqu’elle est conçue comme un ensemble de principes rationnels. Cette fonction est assurée par les théories du droit naturel. A ce sujet, les contributions de Denys de Béchillon et d’Anne-Marie Dillens illustrent les controverses que peuvent susciter l’interprétation et les ambitions du droit naturel. Renouant le fil de la réflexion sur les relations de l’homme avec son environnement, Christine De Bauw met en lumière, à la faveur d’un commentaire de l’histoire biblique de Noé, certains schèmes culturels qui déterminent la résurgence actuelle de la préoccupation envers la nature.
9Enfin, moyennant une réflexion sur les exigences fondamentales auxquelles doit répondre le droit, Henri Declève évoque les dispositifs par lesquels le droit pourrait arbitrer les conflits suscités par les prétentions excessives de l’homme et la puissance incommensurable de la nature.
Notes de bas de page
1 L’interprétation en droit. Approche pluridisciplinaire, sous la direction de M. van de Kerchove, Bruxelles, 1978.
2 Fonction de juger et pouvoir judiciaire. Transformations et déplacements, sous la direction de Ph. Gérard, Fr. Ost et M. van de Kerchove, Bruxelles, 1983.
3 Actualité de la pensée juridique de Jeremy Bentham, sous la direction de Ph. Gérard, Fr. Ost et M. van de Kerchove, Bruxelles, 1987.
4 Droit et intérêt, sous la direction de Ph. Gérard, Fr. Ost et M. van de Kerchove, volume I : Approche interdisciplinaire ; volume II : Fr. OST, Entre droit et non-droit : l’intérêt ; volume III : Droit positif, droit comparé et histoire du droit, Bruxelles, 1990.
Auteur
Professeur aux Facultés universitaires Saint-Louis. Juriste et philosophe.
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