La justice pénale : justice imposée, justice participative, justice consensuelle ou justice négociée ?
p. 529-579
Texte intégral
Introduction
1Le titre de cette contribution traduit d'emblée, et sans détour, les interrogations multiples que le sujet suscite. Une première réaction au thème général de cet ouvrage consacré au droit négocié pourrait être de le juger sans pertinence pour la matière pénale. Dans la représentation traditionnelle du droit pénal, celui-ci paraît en effet bien étranger à toute forme de concertation, de concession ou de compromis. D'un côté, le caractère unilatéral de l'édiction de la norme pénale traduirait en quelque sorte sa transcendance : elle s'impose comme un donné en tant qu'elle défend des valeurs sociales fondamentales. D'un autre côté, l'application de la loi par ses exécutants s'apparente à un syllogisme. Bref, pour reprendre les termes de R. Castel, la loi pénale serait de l'ordre des déterminations et non de l'ordre des interactions1. Sous l'influence conjuguée de plusieurs courants de pensée qui se sont développés tant en droit qu'en criminologie (l'interactionisme, la théorie de l'acteur social, le paradigme du jeu), cette vision monolithique du pénal, qui a longtemps dominé les discours et les représentations, s'est progressivement transformée. La loi pénale est, elle aussi, l'enjeu d'un processus et résulte d’un choix provisoire entre des revendications et des solutions diverses où se mêlent valeurs et intérêts. Quant à la mise en oeuvre de la loi, elle est aussi l'exercice d'une rationalité dialectique qui « joue » entre des pôles antagonistes. C'est dans un contexte théorique de cet ordre que le thème du droit négocié peut prendre sens en droit pénal et nous pensons qu'il était important de le rappeler.
2Toutefois, dans le cadre nécessairement limité de cette étude, nous avons choisi de ne pas aborder la question de la négociation au niveau de la criminalisation primaire mais de nous attacher seulement à la criminalisation secondaire, c'est-à-dire à la mise en oeuvre de la loi pénale. C'est ce que traduit le terme de justice pénale que nous avons retenu dans la première partie du titre. Outre que le processus de création de la loi et le rôle des différents acteurs nous semblent avoir déjà fait l'objet de nombreuses études2, le thème de la négociation se présente de manière sensiblement différente dans ces deux ensembles.
3Dans le procès pénal sur lequel nous nous centrons, ce qui nous a surtout frappés en tentant d'y repérer les traces ou les marques de ce que l'on appelle, un peu rapidement à notre avis, le droit négocié ou les procédures négociées, c'est moins un modèle unique qu'un modèle pluriel, c'est moins un modèle pur qu'un modèle mixte. Comme pour donner corps à l'hypothèse de la justice négociée, on l’oppose traditionnellement à ce qui devrait être son contraire, à savoir la justice imposée. Or, aucun de ces deux modèles ne nous semble véritablement rendre compte des situations que l'on rencontre dans le procès pénal et qui sont plus nuancées, plus complexes. Entre les formes extrêmes de la justice imposée et de la justice négociée, il y a tout un dégradé de tons qui passe, notamment, par les formes plus subtiles de la justice participative ou de la justice consensuelle. La justice imposée fait une large place à la participation, tandis que la prétendue justice négociée n'est souvent rien d'autre qu'une forme de justice consensuelle. A contrario, la mise en évidence de cette pluralité de modèles tend à révéler la place limitée qu'occupe, en définitive, le droit négocié proprement dit.
4Au niveau de la méthode, nous avons choisi une approche déductive. Comme le contenu et les contours des concepts de justice imposée, de justice participative, de justice consensuelle ou de justice négociée sont mal définis et qu'ils sont souvent employés les uns pour les autres, nous avons pensé que la première démarche utile était de clarifier les choses. A partir d'une typologie des différents modèles concevables de justice pénale et de ce qui les caractérise essentiellement, nous examinons successivement les objets sur lesquels ces différents modèles sont susceptibles de porter, l'identité des acteurs qui sont en cause et les phases du procès où ils se manifestent. Ce découpage entraînera nécessairement certains recoupements, voire des répétitions, car les matières sont largement enchevêtrées ; en outre, les parties seront de longueur fort inégales. Nous l'avons néanmoins retenu car il présente l'avantage de « déplier » la problématique et de suggérer, selon différents paramètres retenus, d'autres développements. Notre perspective est principalement orientée vers le droit belge, avec quelques incursions de droit comparé, là où les exemples étrangers peuvent, soit par contraste, soit par identité, éclairer la situation. Sur la procédure particulière du plea bargaining, qui paraît le prototype du droit négocié, nous devrons évidemment nous fonder sur les droits étrangers. Enfin, dans les conclusions, nous tenterons de pointer certains enjeux que l'ensemble de cette problématique nous paraît soulever en termes d'évolution ou de transformation de la justice pénale.
Section 1. Ebauche d'une typologie
5Un premier modèle de justice pénale est celui d'une justice imposée3. Considérée comme une atteinte exclusive à l'intérêt public, l'infraction pénale est, dans cette perspective, à la fois recherchée, poursuivie et condamnée par des organes exclusivement étatiques dont les décisions, adoptées unilatéralement, s'imposent de manière autoritaire à leurs destinataires. A la différence du procès civil qui est d'ordre privé, le procès pénal est d'ordre public4. Aucune personne privée, qu’elle soit victime, prévenue ou simplement « intéressée », n'est censée jouer un rôle actif et déterminant dans le déroulement du procès. A fortiori, aucun consentement n'est requis et aucune forme de négociation n'est concevable. Si le prévenu lui-même peut sans doute être considéré comme « partie » au procès, c'est dans un sens considérablement affaibli par rapport au procès civil, le contentieux qui l'oppose à la société ayant un caractère « objectif » et non « subjectif »5 et la place qu'il occupe étant davantage celle d'un « objet » d'accusation que d'un « sujet » de droits. Enfin, le caractère inquisitoire de la procédure pénale donne sans doute à ce modèle de justice imposée sa forme la plus achevée : exclusivement unilatérale, la procédure est censée produire la vérité en l'absence de toute participation active du prévenu, celui-ci étant réduit tout au plus à un « sujet passif du procès, sans accès à la parole autre qu'à l'aveu »6. Le secret de l'instruction en est, sans doute, l'effet le plus marquant et le plus significatif7.
6S'il est probable qu'aucun système pénal n'a jamais consacré un modèle de justice imposée à l'état pur, il est plus vraisemblable qu'il en ait combiné les traits essentiels avec ce qu'on pourrait appeler un modèle de justice participative. Selon ce deuxième modèle, la justice pénale perd son caractère exclusivement étatique et unilatéral en admettant, à des degrés divers, la participation active d'agents privés dans le déroulement du procès, qu'il s'agisse du délinquant, de la victime ou d'une autre personne. Au niveau des poursuites, le système de l'accusation privée — émanant de la victime ou de ses héritiers — et de l'accusation populaire — émanant de tout citoyen quelconque —, en constituent l'illustration par excellence. A un degré moindre, cependant, le mécanisme de la constitution de partie civile, de même que l'existence de « délits de plainte » aboutissent également à reconnaître à la victime un rôle essentiel, qu'il s’exerce de manière positive ou négative. Au niveau de la preuve, la consécration partielle ou totale du caractère « accusatoire » de la procédure, et de son corollaire le caractère contradictoire, aboutit également à assurer la participation active, non seulement, le cas échéant, de l'accusateur privé, mais encore du prévenu sous la forme de l'exercice des droits de la défense.
7Un troisième modèle de justice pénale accentue encore le rôle actif, tantôt de la victime, tantôt de l'auteur de l'infraction : celui d'une justice consensuelle8. Par là, nous visons un modèle qui accorde une place plus ou moins importante au consentement des intéressés, que ce soit sous la forme positive d'une acceptation ou sous la forme négative d'une absence de refus. Sans doute, le mécanisme traditionnel des voies de recours judiciaires constitue-t-il déjà une forme minimale de consécration d’un tel modèle. L'absence d’exercice de ces voies de recours traduit, en effet, dans le chef de la personne condamnée ou dans le chef de la partie civile, sinon l'acceptation du jugement prononcé, du moins l'absence de refus de celui-ci. Il est cependant frappant de constater que les systèmes pénaux contemporains ont tendance à multiplier les situations dans lesquelles un tel consentement se trouve requis. Ainsi, le recours à certaines procédures alternatives au procès pénal, telles que la transaction, le prononcé de certaines mesures ou peines alternatives, telles que les travaux d'intérêt général, ou encore certaines décisions relatives aux modalités de la peine, telles que le sursis à l'exécution, la suspension de la condamnation, la probation ou la libération conditionnelle, sont-ils généralement soumis au consentement de l’auteur de l'infraction. Il en va de même dans le domaine de l'aide aux jeunes.
8Enfin, un dernier modèle de justice pénale ne se contente pas de reconnaître aux particuliers le pouvoir d'accepter ou de refuser des propositions dont le contenu échappe entièrement à leur maîtrise. Ce modèle, qu'on peut qualifier de justice négociée, reconnnaît à ces mêmes particuliers un pouvoir de discussion dont l'exercice est susceptible, par le biais de concessions réciproques, d'affecter au moins partiellement le contenu de ces propositions et d'aboutir ainsi à un véritable accord négocié. Si ce modèle trouve déjà une illustration dans certaines formes de transaction qui ne se ramènent pas à de simples « contrats d'adhésion », il se concrétise plus clairement encore dans l'institution des procédures de médiation et dans celle du plea bargaining. Dans ce cas, comme dans le cas précédent, on peut parler de justice contractuelle ou, plus exactement, d'une certaine forme de contractualisation de la justice pénale, étant entendu cependant que le degré d'autonomie de la volonté reconnu aux particuliers diffère évidemment dans les deux cas, comme il diffère dans un contrat d’adhésion et un contrat de gré à gré.
Section 2. L'objet visé
9Sans prétendre être exhaustifs, nous tenterons de repérer les différents modèles de justice dont nous avons ébauché la typologie, à savoir la justice imposée, la justice participative, la justice consensuelle et la justice négociée, dans ce qui nous paraît constituer les trois objets principaux du procès pénal : l'action pénale, la preuve et le prononcé de la sanction.
§ 1. L'action pénale
10Le premier objet visé par les différents modèles de justice évoqués réside dans l'action pénale et son mode d'exercice qui concerne aussi bien l'intentement et la mise en oeuvre des poursuites que leur extinction.
A. Justice imposée
11Un modèle de justice pénale imposée conforte l’idée que l'Etat, par le biais de ses représentants, constitue le dépositaire exclusif de cette action. L'action pénale réside, dans cette perspective, dans une accusation exclusivement publique. Qu'il ait l'obligation de l'exercer à l'égard de toute infraction dont il prend connaissance (principe de légalité des poursuites) ou qu'il ait le pouvoir d'apprécier lui-même la suite qu'il convient de lui réserver (principe d'opportunité des poursuites), l'organe public chargé des poursuites (le ministère public ou, le cas échéant, certains agents administratifs habilités à cet effet) jouit, à cet égard, d'un pouvoir de décision unilatéral et indépendant de toute intervention des particuliers et de la victime de l'infraction. En découle notamment une distinction tranchée entre l'action publique dont l'objet est de « punir les atteintes portées à l'ordre social » et l'action civile dont l'objet est « la réparation du dommage que le délit a causé », selon la formule consacrée par le Code français du 3 brumaire an IV. En découle également le fait que « l'exercice de l'action publique n'est subordonné ni à l'existence ni à l'exercice de l'action civile et vice versa »9. Dans une telle perspective, la victime n'est pas considérée, dans le cadre du procès pénal, comme une « partie », mais tout au plus comme un « témoin »10.
12Telle est, très exactement, la situation en droit allemand11. Toutefois, et ceci montre bien l'enchevêtrement des modèles, malgré le fait que la victime ne se voit pas reconnaître le statut de « partie » au procès, elle peut néanmoins « s'immiscer dans la procédure » dans certains cas. Ainsi, lorsqu'il s'agit d'infractions de faible gravité ou qui touchent à l'intimité de la personne, la poursuite ne peut être déclenchée que sur la plainte préalable de la victime (§ 77 StGB et 158 al. 2 StPo) ; lorsqu'il s'agit d'infractions de faible gravité, limitativement énumérées par la loi, la victime « peut porter plainte contre l'auteur de l'infraction et mener l'accusation contre lui à la place du ministère public » (Privatklage), l'intérêt d'une telle action étant surtout d'obliger une procédure de conciliation12 ; ou encore, lorsque le ministère public a décidé d'engager des poursuites pour des infractions graves, la victime peut agir par voie d'intervention en se constituant « plaignant accessoire » (Nebenklage)13.
B. Justice participative
13Un modèle de justice participative, en revanche, consacre plus ou moins largement l'idée que les particuliers sont appelés à participer à la poursuite des infractions pénales14. Selon les cas, cette participation peut emprunter deux voies, une voie large et une voie plus étroite.
1. La voie large
14A cet égard, il ne fait pas de doute que les deux systèmes qui réservent à cette participation la plus large place sont ceux de l'accusation privée et de l'accusation populaire.
15L'accusation privée est un système dans lequel la poursuite de l'auteur d'une infraction peut être exercée par la victime seule ou ses héritiers dans leur propre intérêt, et non dans l'intérêt de la société. Elle suppose, dès lors, l'existence d'un régime où l'idée de réparation absorbe en quelque sorte celle de répression et où la protection des intérêts de la victime domine celle de l'intérêt social. Un tel système se retrouve dans des législations — attique, romaine et germanique, notamment — où tout ou partie des infractions pénales sont considérées comme des « délits privés »15. Il existe encore, sous une forme atténuée, en droit anglais actuel, dans la mesure où la victime a le droit de saisir directement les tribunaux. S’il « est rare en pratique que la victime déclenche seule les poursuites », observe B. Deleuze, en revanche, « il n'est pas exceptionnel de voir des associations soutenir les victimes qui engagent les poursuites, ou exercer elles-mêmes les poursuites »16.
16L'accusation populaire, quant à elle, constitue un système dans lequel « tout citoyen a le droit de demander au nom de la société une peine contre le coupable »17, même s'il n'est pas personnellement victime de l'infraction. A la différence de l'accusation privée, elle suppose une certaine forme de dissociation entre les idées de répression et de réparation, ainsi qu'entre l'intérêt social et l'intérêt particulier de l'accusateur, dans la mesure où le droit d'accusation est reconnu, dans ce cas, à d'autres individus qu'à la personne lésée. Un tel système, qui se trouvait consacré par les législations attique et romaine en ce qui concerne les « délits publics »18, existe encore aujourd'hui en Angleterre19, même si ce droit est rarement exercé20.
2. La voie étroite
17Si ces deux formes radicales de participation des particuliers à l'exercice de l'action pénale sont étrangères au droit belge, il convient cependant de citer plusieurs phénomènes qui consacrent cette participation, même si ce n'est que sous une forme plus limitée et indirecte.
a) Une indépendance dépendante
18A cet égard, on peut tout d’abord rappeler que si l'exercice de l'action publique est, en principe, indépendant de l'attitude des particuliers, elle peut en dépendre, en fait et en droit, de différentes façons.
19D'entrée de jeu, l’on ne peut évidemment minimiser l'importance de la collaboration des particuliers en ce qui concerne la connaissance des infractions. Qu'ils interviennent sous forme de plainte comme victimes ou sous forme de dénonciation comme témoins, ils assurent ainsi le « renvoi » de l'infraction au système pénal qui, n'étant guère « self starter », comme le soulignent les travaux récents de sociologie criminelle21, n'aurait souvent pas été à même d'entamer spontanément des poursuites en l'absence de telles informations22. Si la dénonciation est un pouvoir reconnu à toute personne, dans certains cas, elle devient une obligation, même si celle-ci n'est pas sanctionnée pénalement. Ainsi, l'article 29 du Code d'instruction criminelle impose aux fonctionnaires et aux officiers publics de dénoncer au procureur du Roi les crimes et délits dont ils ont connaissance, tandis que l'article 30 du même code impose à toute personne qui aura été témoin d'un attentat contre la sûreté publique, la vie ou la propriété d’en donner avis au procureur du Roi. La plainte, quant à elle, peut, selon les systèmes juridiques, rester une démarche distincte et séparée de la constitution de partie civile. Tel est le cas, par exemple, en Italie23.
20Selon les pratiques d'« auto-régulation » développées par le ministère public dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité des poursuites24, ensuite, on ne peut ignorer non plus l'importance de l'attitude des victimes, ainsi que l'attitude spontanée de l'auteur de l'infraction à leur égard. Le fait, en particulier, que les victimes s'estiment l'objet d'un dommage dont elles demandent réparation ou, au contraire, qu'elles se soient désistées de leur demande, moyennant éventuellement un dédommagement spontané, constituera souvent un critère justifiant l'intentement ou l'abandon des poursuites25. La procédure pénale allemande consacre, partiellement tout au moins, le rôle de la victime par rapport au pouvoir du ministère public en matière de poursuites. La « procédure sur demande forcée » (Klageerzwingungsverfahren) permet à la victime de saisir le tribunal régional supérieur d'un recours contre une décision de classement du ministère public. Le tribunal peut soit rejeter la demande, soit enjoindre au ministère public de poursuivre26. Cette « logique de la contrainte » à l'exercice de l'action publique qui, d'une certaine manière, vise à revaloriser le rôle de la victime à l'intérieur de l'action du ministère public, se retrouve également en Italie où la personne lésée peut faire opposition à la requête de classement que le ministère public soumet au juge27.
21Par ailleurs, il convient de rappeler que, « dans des cas limitativement fixés par la loi, le législateur a subordonné l'intentement des poursuites à l'existence d'une plainte »28 ou d'une dénonciation. Il en va notamment ainsi en cas d'atteinte à l'honneur et à la considération des personnes, à l'exception de la dénonciation calomnieuse (art. 450 du Code pénal), en cas d'outrage à un membre des Chambres législatives, sauf le cas de flagrant délit (art. 275, al. 3 du Code pénal)29 ou envers les corps constitués (art. 277 du Code pénal), en cas d'injure ou de calomnie commise par la voie de la presse (art. 10 du décret du 20 juillet 1831 sur la presse), en cas d'atteinte au droit de réponse (art. 16 de la loi du 23 juin 1961 relative au droit de réponse), en cas de chasse sur le terrain d'autrui (art. 26 de la loi du 26 février 1882 sur la chasse), en cas de pêche non autorisée par le titulaire du droit de pêche (art. 34 de la loi du 1er juillet 1954 sur la pêche fluviale), en cas de contrefaçon en matière de marques de fabrique et de commerce (art. 14 de la loi du 1er avril 1879 concernant les marques de fabrique et de commerce), ainsi qu'au cas où un employeur s'abstient de fournir à temps les renseignements nécessaires pour calculer le montant des cotisations en matière d'allocations familiales pour travailleurs salariés (art. 158, al. 4 des lois coordonnées du 19 décembre 1939 relatives aux allocations familiales pour travailleurs salariés)30. Dans ces différentes hypothèses, dès lors, la mise en mouvement de l'action publique est légalement tributaire de l'attitude qu'adopte la personne lésée par l'infraction. En l'absence de plainte de celle-ci, les poursuites ne peuvent être intentées ; inversement, son désistement, avant tout acte de poursuite, arrête la procédure (art. 2 de la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale). Toutefois, le caractère obligatoire de la plainte pour engager des poursuites ne signifie pas que le ministère public doit nécessairement poursuivre31. Une fois saisi, le ministère public est maître de la poursuite : un retrait de la plainte après l'intentement de l'action reste d'ailleurs sans effet. C'est en ce sens que l'on peut parler du « pouvoir de blocage » de la plainte, dans la mesure où elle opère seulement comme condition d'intentement des poursuites, partant de l'idée que, pour certaines infractions, « il n'est pas souhaitable que la poursuite se déclenche hors d'une expression de volonté de la victime supposée »32.
22Il convient, enfin, de rappeler que la procédure d’extinction de l'action publique moyennant le paiement d'une somme d'argent que constitue la transaction pénale, sur laquelle nous reviendrons, exige en principe que le dommage éventuellement causé à autrui ait été entièrement réparé avant qu'elle puisse être proposée. Ici encore, dès lors, l'attitude qu'adopteront tant la victime que l'auteur de l'infraction, en rapport avec le dommage causé, aura une influence déterminante, non pas en tant que condition suffisante, mais en tant que condition nécessaire du recours à une telle procédure.
b) La constitution de partie civile
23Inversement, si l'exercice de l'action civile possède, en principe, une finalité exclusivement réparatrice et n'a, sous réserve de ce qui vient d'être rappelé, aucune incidence sur l'exercice de l'action publique, il est certain que le mécanisme de la constitution de partie civile déroge partiellement à ce principe. Consistant dans le procédé par lequel « l'action civile est portée devant la juridiction répressive »33, la particularité la plus importante de la constitution de partie civile réside dans le fait que, à la différence de l'action civile introduite devant le juge civil, elle met l'action publique elle-même en mouvement34, à condition que la victime d'un crime ou d'un délit le fasse devant le juge d'instruction ou que la victime procède à une citation directe du prévenu devant le tribunal correctionnel ou devant le tribunal de police. Or, s'il ne fait pas de doute qu'un tel procédé renforce les chances de la victime de voir son dommage réparé, il est généralement admis qu'il poursuit également une finalité répressive35, tant du point de vue de la société qui bénéficie ainsi d'un indispensable « correctif au pouvoir du procureur du Roi de classer la plainte sans suite »36 et voit dans la partie civile à la fois un « concurrent »37 et un « auxiliaire du ministère public »38, que du point de vue de la victime, dont un des mobiles peut résider dans la répression même de l'infraction39. C'est en cela que réside ce que certains ont appelé « le double visage » de l'action civile exercée devant la juridiction répressive40.
C. Justice consensuelle
24Si ces différents phénomènes confirment, au moins partiellement, la présence, en ce qui concerne le mode d'exercice de l’action pénale, de certains traits relevant d'un modèle de justice participative, il en est d'autres qui sont susceptibles d'illustrer la présence de traits relevant d'un modèle de justice consensuelle. Au rang de ceux-ci, nous évoquerons différents modes d'extinction de l'action publique prévus pour certaines infractions, moyennant la réalisation de certaines conditions qui doivent nécessairement être acceptées par l'auteur de l'infraction et qui s'articulent autour des procédures qualifiées de transaction, voire de médiation. Il convient toutefois de rappeler, sur le plan des principes, que la transaction « qu'on le veuille ou non, contredit le principe selon lequel ministère public ne peut pas transiger » puisque l'action publique appartient à la société qui seule a le droit de punir41. Dans les différents modèles de transaction proposés, modèles originaux ou copies conformes, ce sont surtout des considérations pratiques liées à la rapidité et à l'efficacité de la gestion de contentieux de masse qui sont avancées pour justifier le recours à ce type de procédure. Il n'est dès lors pas étonnant, dans la mesure où les motifs sont largement identiques, que la médiation pénale se soit organisée, dans notre pays, « à l'ombre de la transaction »42 et qu'elle s'inscrive dans les textes en même temps que la procédure accélérée (art. 216 quater du Code d'instruction criminelle). Loin de la vision idéalisée de ce qui est présenté comme une alternative à la justice imposée, il ne s'agit pas de moins réagir mais de mieux réagir, de manière plus rapide, plus simple et surtout plus visible.
1. La transaction pénale
25Le premier mode d'extinction qu'il convient d'évoquer réside dans le mécanisme traditionnel, qualifié par la doctrine de « transaction pénale », qui consiste dans le fait que le ministère public invite l'auteur de l'infraction à verser une somme d'argent, dont le paiement librement accepté par lui, éteint de plein droit l'action publique.
26Exception légale au principe de l'indisponibilité de l'action publique, « symbole d'une justice imposée »43, la transaction pénale proprement dite a été introduite en Belgique par un arrêté royal du 10 janvier 1935 qui avait pour but le désencombrement des tribunaux44. Ses conditions et son champ d'application ont été successivement modifiés par arrêté royal du 21 juin 1939 modifiant et étendant les dispositions légales relatives à l'extinction de l'action publique moyennant le paiement d'une somme d'argent, les lois du 16 juin 1947, du 7 juin 1949, du 30 décembre 1957, du 28 juin 1984 et du 10 février 199445. A l'exception de la loi du 16 juin 1947, ces modifications ont contribué, d'une façon générale, à assouplir les conditions d'application de la transaction et à élargir son champ d'application.
27Aux termes de l'article 216bis du Code d'instruction criminelle, dans sa version actuelle, la transaction peut être proposée « lorsque le procureur du Roi estime, pour une infraction punissable, soit d'une amende, soit d'une peine d'emprisonnement dont le maximum ne dépasse pas cinq ans, soit de l'une et l'autre de ces peines, ne devoir requérir qu'une amende ou une amende et la confiscation » (§ 1er, al. 1er). Les conditions essentielles auxquelles se trouve subordonnée cette faculté résident dans le fait que le tribunal ne soit pas déjà saisi du fait ou le juge d'instruction requis d'instruire (§ 2) et que « le dommage éventuellement causé à autrui doit être entièrement réparé » ou, tout au moins, que « l'auteur a reconnu par écrit sa responsabilité civile pour le fait générateur du dommage, et produit la preuve de l'indemnisation de la fraction non contestée du dommage et des modalités de règlements de celui-ci » (§ 4).
28Bien qu'elle soit consacrée par une loi particulière, on peut encore citer la transaction pénale prévue par l'article 11 de la loi sur la réglementation économique et les prix qui autorise le procureur du Roi à « faire connaître par lettre recommandée au contrevenant qu'il lui est loisible d'éviter les poursuites… en payant dans un délai déterminé au receveur de l'enregistrement, qui lui sera désigné, une somme déterminée dont le montant pourra dépasser le maximum de l'amende établie ». Les conditions essentielles auxquelles se trouve subordonnée cette faculté sont que « le procureur du Roi… estime ne pas devoir requérir une peine d'emprisonnement », que la juridiction de jugement n'ait pas été saisie de l'infraction et qu'une décision de fermeture provisoire de l'établissement du contrevenant ne soit pas intervenue.
29On citera enfin la faculté de transiger reconnue, par l'article 57 bis, § 3 bis de la loi du 27 mai 1870 contenant le Code pénal militaire, à l'officier du ministère public près les juridictions militaires pour « toute infraction en matière forestière, rurale, de chasse, de pêche et de circulation routière » commise par un militaire à l'étranger. Les conditions d'exercice de cette faculté sont que le ministère public estime « ne devoir requérir qu'une amende ou une amende et la confiscation », que le dommage éventuellement causé par l'infraction à autrui ait été définitivement indemnisé et que la juridiction compétente n'ait pas été saisie de la cause.
30Dans la mesure où la transaction pénale constitue un mode d'extinction de l'action publique, qui suppose une proposition émanant du ministère public et une acceptation de l'auteur de l'infraction, il est légitime d'y voir à tout le moins un moyen « bilatéral » d'extinction des poursuites46 et, par voie de conséquence, une illustration manifeste d'un modèle de justice consensuelle. La question a même été posée de savoir s'il convenait d'y voir un véritable « contrat », comparable, sinon identique à une transaction civile. S'il ne fait pas de doute que la transaction pénale possède des caractères propres qui ne permettent pas de l'assimiler à une transaction civile, on retiendra surtout le fait que les « concessions réciproques » inhérentes à la transaction civile sont, dans le cas de la transaction pénale, strictement limitées par la loi et, pour le reste, déterminées unilatéralement par le ministère public. « Les termes de l'accord… ne sont donc pas l'objet de tractations entre les parties qui les fixeraient de commun accord »47. Si l'analogie reste possible avec un contrat, c'est dès lors tout au plus avec un contrat d'adhésion48, où l'inégalité des parties ne permet à l'auteur de l'infraction que d'adhérer aux conditions qui lui sont proposées ou de refuser en bloc la proposition qui lui est faite. Certains vont cependant plus loin et estiment que l'accord de l'auteur de l'infraction n'est pas requis pour former un contrat au sens du droit civil, mais seulement « pour attester que la décision unilatérale du ministère public n'a pu lui être imposée »49. « Le pouvoir conserve, de la sorte, la maîtrise de ses attributs ; il arrête unilatéralement, dans les limites fixées par la loi, une proposition qu'il soumet au particulier ; le consentement requis de ce dernier tient dans l'agrément qu'il donne, de manière pure et simple, à la proposition qui lui est faite »50. Quelle que soit la solution que l'on adopte, il est clair qu'on ne saurait, dès lors, y voir l'illustration d'une véritable justice négociée, mais seulement d'une justice consensuelle.
2. La transaction administrative
31De cette procédure, on peut rapprocher la transaction, généralement qualifiée d'« administrative »51 qui, historiquement, a précédé la transaction pénale et qui réside dans le fait que certaines administrations se trouvent également habilitées à fixer une somme d'argent dont le paiement volontaire par l'auteur de l'infraction entraîne l'extinction de l'action publique. Si la transaction administrative a été, en France notamment, l'occasion en certaines matières, comme la pollution de l'eau, de développer une véritable politique de négociation avec les industriels concernés52, il semble que les remarques générales qui ont été faites concernant la nature simplement « consensuelle » de la transaction pénale s'appliquent également à la transaction administrative, telle qu'elle est conçue et appliquée en Belgique53.
32On se limitera à rappeler que les conditions et le champ d'application de cette procédure diffèrent partiellement dans chaque cas. Nous en prendrons certains exemples.
33Le mouvement en a été initié en matière de douanes et accises où la transaction n'est admise que par rapport à certaines peines (amende, confiscation, fermeture des fabriques, usines ou ateliers) et à la condition que l'infraction commise en cette matière spécifique « sera accompagnée de circonstances atténuantes, et qu'on pourra raisonnablement supposer que l'infraction doit être attribuée plutôt à une négligence ou erreur qu’à l'intention de fraude préméditée » (art. 263 de l’arrêté royal du 18 juillet 1977 portant coordination des dispositions générales relatives aux douanes et accises, remplaçant l'art. 229 de la loi générale du 26 août 1822 concernant la perception des droits d'entrées, de sorties et des accises).
34En matière de contrôle des changes, la transaction ne peut porter que sur les « peines autres que l'emprisonnement », la seule condition étant que les juridictions de jugement compétentes n'aient pas été saisies de la cause (art. 6 de l'arrêté-loi du 6 octobre 1944 relatif au contrôle des changes).
35Pour certaines infractions commises en matière d'aménagement du territoire et d'urbanisme, une transaction peut intervenir sans condition particulière (art. 65 de la loi du 29 mars 1962 organique de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme). Il en va de même pour les infractions commises en matière de protection de la santé des consommateurs (art. 19 de la loi du 24 janvier 1977 relative à la protection de la santé des consommateurs en ce qui concerne les denrées alimentaires et les autres produits, modifiée par la loi du 22 mars 1989), les infractions commises en matière de pratiques du commerce, d'information et de protection du consommateur (art. 116 de la loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du commerce et sur l'information et la protection du consommateur) et certaines infractions commises en matière de réglementation économique et des prix (art. 11 bis de la loi du 22 janvier 1945 sur la réglementation économique et les prix, modifiée par la loi du 30 juillet 1971).
36On peut également citer la procédure particulière de transaction prévue en matière de roulage par l'article 65, § 1er, al. 3, de la loi relative à la police de la circulation routière. Le recours à cette procédure concerne les infractions au Code de la route qui ne sont pas considérées comme des infractions graves par l'arrêté royal du 7 avril 1976 et le paiement de la somme fixée s'effectue par apposition de « timbres-amendes », sauf si l’auteur de l'infraction n'a pas de domicile ou de résidence fixe en Belgique. Il n'est admis que si le fait n'a pas causé de dommage à autrui (§ 1). Sa particularité essentielle, de notre point de vue, réside dans le fait que le paiement n'éteint pas automatiquement l'action publique, mais uniquement à la condition que le ministère public ne notifie pas à l'intéressé, dans le mois à compter du jour du paiement, qu'il entend exercer cette action (§ 3). Si l'exercice de l'action publique entraîne la condamnation de l'intéressé, la somme perçue est imputée sur les frais de justice dus à l'Etat et sur l'amende prononcée ; l'excès éventuel est restitué (§ 4, 1er).
3. L'amende administrative
37Bien que la terminologie adoptée par le législateur soit différente, on peut enfin rapprocher de la transaction administrative la technique dite de l'« amende administrative », telle qu'elle est utilisée par le législateur dans certains domaines. Tel était le cas de la loi du 30 juin 1971 relative aux amendes administratives applicables en cas d'infraction à certaines lois sociales (modifiée, depuis lors, par la loi du 30 décembre 1988). Tel est encore le cas de la loi du 22 avril 1982 relative à l'expertise et au commerce des viandes, de la loi du 21 juin 1983 sur les médicaments, de la loi du 21 juin 1983 relative aux aliments médicamenteux pour animaux, de la loi du 24 mars 1987 relative à la santé des animaux, ainsi que de la loi du 10 avril 1990 sur les entreprises de gardiennage, sur les entreprises de sécurité et sur les services internes de gardiennage.
38La particularité du système consacré dans ces différents cas réside dans le fait que l'auditeur du travail ou le procureur du Roi, selon le cas, dispose d'un délai pour faire connaître son intention éventuelle d'entamer des poursuites pénales, à défaut de laquelle le fonctionnaire désigné par le Roi peut décider d'infliger une amende administrative du fait de l'infraction avec, pour conséquence, l'extinction de l'action publique. Malgré le caractère unilatéral de cette décision, il est généralement admis qu'elle a, en réalité, la nature d'une « offre de transaction »54, dans la mesure où « la décision du fonctionnaire ne peut sortir ses effets que de la volonté du contrevenant à qui elle est simplement proposée ou à la suite d'une procédure civile qui a pour but l'obtention d'un titre exécutoire »55. En revanche, dans le système de l'amende administrative proprement dite, que la loi du 30 décembre 1988 a notamment consacré désormais en matière sociale, la décision de l'administration « s'impose immédiatement sans intervention préalable d'un juge, le contrôle juridictionnel n'étant exercé qu'a posteriori »56, en cas d'opposition de l'intéressé.
39De manière générale, dans cette « répression sans jugement » où le rôle de l'administration se trouve accru aux dépens de l'intervention du juge57, A. De Nauw montre bien les questions qui peuvent faire problème, notamment par rapport à la Constitution et à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, tant en ce qui concerne le droit matériel (principe de la légalité, de la non-rétroactivité, de la culpabilité, de la proportionnalité) que le droit formel (exigence d'indépendance et d'impartialité, garanties procédurales)58. On rappellera, en particulier, que si la renonciation par une partie à se prévaloir de son droit à un procès équitable, selon la Cour européenne des droits de l’homme, « ne se heurte pas en principe à la Convention », cette partie n'en perd pas le bénéfice « par cela seul qu'elle a souscrit à un arrangement parajudiciaire », mais seulement à la condition de « l'absence de contrainte »59.
4. La médiation pénale
40A ces différentes procédures qui illustrent, à des degrés divers, des formes de justice consensuelle, s'ajoutent encore deux procédures nouvelles consacrées par la loi du 10 février 1994 organisant une procédure de médiation pénale60. Malgré le terme unique de « médiation pénale » utilisé par le législateur pour les qualifier, il convient de distinguer nettement les deux procédures différentes qu'elle met en réalité sur pied, même si la seconde s'insère en fait dans la première. La première se situe sur le terrain de la justice consensuelle et participative ; la seconde, que nous évoquerons au point suivant, peut être considérée comme une illustration de la justice négociée.
41En premier lieu, il s'agit, par l'insertion dans le Code d'instruction criminelle d'un nouvel article 216 ter, de créer une nouvelle procédure spécifique de transaction pénale dont la particularité réside dans le fait que l'extinction de l'action publique peut se trouver subordonnée à d’autres conditions que le paiement d'une somme d'argent.
42Une telle possibilité avait, il est vrai, déjà été prévue, en matière de réglementation économique et des prix, par l'arrêté-loi du 22 janvier 1945 qui autorisait le procureur du Roi à inviter l'auteur de l'infraction à exécuter diverses prestations, autres que le paiement d'une somme déterminée. La procédure mise sur pied par la loi du 10 février 1994 a cependant une portée beaucoup plus générale. Le procureur du Roi peut en effet y recourir pour toute infraction pénale, pour autant que le fait ne paraisse pas de nature à devoir être puni d'un emprisonnement correctionnel principal de plus de deux ans ou d'une peine plus lourde.
43Les conditions prévues, qui peuvent être proposées isolément ou cumulativement, sont au nombre de trois. La première consiste dans l'indemnisation ou la réparation dûment prouvée du dommage causé par l'infraction. La deuxième réside dans le fait de suivre un traitement médical ou toute autre thérapie adéquate et d'en fournir périodiquement la preuve durant un délai qui ne peut dépasser six mois, lorsque l'auteur de l'infraction invoque comme cause de l'infraction la circonstance d'une maladie ou d'une assuétude à l'alcool ou aux stupéfiants. La troisième, enfin, réside dans le fait d'exécuter un travail d'intérêt général ou de suivre une formation déterminée d'une durée de 120 heures au plus (art. 216 ter, § 1er, al. 1er, 2 et 3). Ces conditions nouvelles, comme c’était déjà le cas pour le paiement d'une somme d'argent, doivent être « acceptées » par l'auteur de l'infraction (art. 216 ter, § 4). En ce sens, elles participent, autant que la procédure ancienne, d'une logique consensuelle.
44A la différence des procédures traditionnelles de transaction, cependant, la procédure nouvelle prévoit la convocation obligatoire de l'auteur de l'infraction et la convocation facultative de la victime (art. 216 ter, § 1er). On peut y voir, dès lors, en même temps une volonté d'élargissement d'une justice participative consistant dans « l’organisation légale de l'exercice contradictoire des compétences du ministère public que, jusqu'à présent, il exerce de manière inquisitoire et administrative »61.
D. Justice négociée
45De manière générale, on peut encore voir dans l'article 216ter du Code d'instruction criminelle l'amorce d'une justice négociée dans la mesure où l'invocation de la circonstance d'une maladie ou d'une assuétude à l'alcool ou aux stupéfiants est exclusivement tributaire du choix posé par l'auteur de l'infraction lui-même et où la convocation obligatoire de l'auteur de l'infraction permet « un contact personnalisé entre le prévenu, le magistrat du parquet et éventuellement la victime »62 et fournit l'occasion, quant aux conditions proposées, « de les déterminer de manière encore plus individualisée »63.
46La seconde procédure organisée par cet article consacre une procédure de médiation proprement dite : « Le cas échéant, le procureur du Roi convoque également la victime et organise une médiation sur l'indemnisation ainsi que sur ses modalités » (art. 216 ter, § 1er, al. 1er, in fine). Dans la mesure où l'accord qui sera éventuellement obtenu n'est en aucune façon prédéterminé, mais le résultat de discussions susceptibles d'entraîner des concessions de la part des intéressés, cette procédure est évidemment susceptible a priori d'illustrer un modèle de justice négociée. Il convient cependant d'en apercevoir les limites, étant donné que cette négociation a comme objet spécifique les conséquences civiles découlant de l'infraction, et non ses conséquences pénales. Celles-ci, en effet, échappent à toute négociation et sont entièrement fixées par la loi. De plus, si la loi prévoit que l'action publique est éteinte « lorsque l'auteur de l'infraction a satisfait à toutes les conditions, acceptées par lui » (art. 216 ter, § 4), se pose la question délicate de savoir si le ministère public ne pourrait pas, après avoir obtenu un accord sur l'indemnisation, inviter encore l'auteur de l'infraction à payer une somme d'argent, dont seule l’exécution intégrale entraînerait l'extinction de l'action publique64. Rien n'exclut, par ailleurs, que le procureur du Roi ait invité l'auteur de l'infraction à remplir d'autres conditions que la seule indemnisation de la victime, auquel cas l'action publique ne serait évidemment éteinte que lorsque ces conditions supplémentaires seraient elles-mêmes exécutées.
47Au niveau de l'action pénale, force est de reconnaître, par défaut en quelque sorte, que, sous réserve des formes limitées de justice négociée que nous venons d'évoquer, nous n'en trouvons guère d'autres traces, tout au moins dans les textes. Nous n'aborderons pas ici, mais au point suivant, les procédures de plea bargaining, que nous ne connaissons pas officiellement en droit belge mais qui se développent officieusement, dans la mesure où leur objet principal concerne, à notre avis, la preuve ou, plus exactement, la dispense de preuve.
§ 2. La preuve de l'infraction
48Le champ de la preuve est, par excellence, celui où les différentes formes d'intervention des parties, publiques ou privées, sont susceptibles de se manifester. Au coeur du procès pénal, l'objet de la preuve est la démonstration des faits et de la responsabilité, tandis que sa fonction est la conviction du juge ou des jurés. L'ensemble de cette matière est aujourd'hui dominée par le droit au procès équitable, tel qu'il est garanti par l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dans les pays continentaux, l’obligation de la preuve subsiste, même si le prévenu ou l'accusé reconnaît qu'il est coupable. En revanche, dans les pays de common law, si l'accusé plaide coupable (guilty plea), le tribunal peut le condamner sans procès et, à la limite, sans preuve.
A. Le débat contradictoire
49Comme le souligne M. Chiavario, « on ne saurait nier que la forme la plus visible de la participation des parties privées à leur procès est représentée par la contradiction des arguments »65. Il s'agit, poursuit l'auteur, « de toutes les possibilités qui s’ouvrent à une personne (notamment à l'accusé) de faire écouter les raisons qui viennent à l’appui de sa propre cause devant toute juridiction, personnellement et/ou par le biais du défenseur »66. Sous cette forme, il est certes très juste d'observer que ce besoin de contradiction des arguments traverse la procédure tout entière, tout au moins dès que la défense est admise à jouer son rôle67. A cet égard, la contradiction s'identifie avec les droits de la défense.
50En toute rigueur, le modèle de justice imposée postulerait, à toute les étapes du procès pénal, l'absence de toute contradiction quant à la preuve. En d'autres termes, la charge de celle-ci incomberait entièrement à la partie poursuivante, sans intervention aucune de l'inculpé, ni de la victime. Ce modèle coïnciderait avec un système inquisitoire pur, dont on peut d'ailleurs se demander s'il a jamais existé en tant que tel, même dans la fameuse Ordonnance criminelle de 1670 qui consacre, en France, les principes de la procédure inquisitoire, critiquée par les publicistes du siècle des Lumières. Dès 1791, la législation révolutionnaire introduisit, partiellement, le système accusatoire qui devait déboucher sur le fameux système mixte où la première phase du procès, l'instruction, est inquisitoire tandis que la phase de jugement adopte le modèle accusatoire.
51En Belgique, la phase d'information et d'instruction est, en principe, de nature inquisitoire, avec les caractères qui y sont associés, à savoir une procédure secrète, écrite, unilatérale. Il s'agit, en quelque sorte, d'un résidu de modèle de justice imposée. Toutefois, l'évolution des idées68 et des textes69, appuyée par les exigences européennes du procès équitable, tend à atténuer la rigueur du principe et à le faire évoluer vers une certaine forme de justice participative, notamment en levant les obstacles à l'exercice de la contradiction. Nous nous limiterons à en signaler ici certains indices en droit positif, réservant à un point ultérieur l'examen des propositions de réforme de la Commission pour le droit de la procédure pénale qui s'orientent délibérément vers une participation accrue de l'auteur de l'infraction lors de l'instruction préparatoire70. Ainsi, suite à l'arrêt Lamy de la Cour européenne des droits de l'homme du 20 mars 1989 qui condamne la Belgique, sur base de l'article 5.4 de la Convention, pour l'absence de communication du dossier à l'inculpé ou à son avocat lors de l'instruction préparatoire, la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive prévoit que le juge d'instruction doit, avant de décerner un mandat d'arrêt, « interroger l'inculpé sur les faits mis à sa charge et entendre ses observations » (art. 16, § 2, al. 1er) et que « le dossier sera mis à la disposition de l'inculpé et de son conseil pendant le dernier jour ouvrable avant la (première) comparution » en chambre du conseil qui doit avoir lieu dans un délai de cinq jours (art. 21, § 3). La jurisprudence s’engage dans le même sens : la possibilité effective pour l'inculpé de consulter le dossier de l'instruction est une garantie fondamentale du respect des droits de la défense dont l'absence vicie radicalement toute prolongation éventuelle de sa détention71.
52Dans la phase de jugement, qui adopte le système accusatoire, le principe du contradictoire, bien souvent rappelé par la Cour européenne des droits de l'homme72, domine le débat judiciaire. Le contradictoire est une illustration, presque paradigmatique, d’un modèle de justice participative. A l'audience devant la juridiction de jugement, l'examen des preuves se réalise, en principe tout au moins, de manière contradictoire, en ce sens que les parties au procès peuvent contredire et contester les éléments de preuve qui sont apportés par l'accusation. La réserve tient au fait que, dans un système fondé sur la libre appréciation de la preuve par le juge (art. 342 du Code d'instruction criminelle), c'est-à-dire sur l'intime conviction, rien n'interdit à celui-ci de fonder sa conviction sur des éléments recueillis de manière secrète et non contradictoire durant l'information et l'instruction. Avec la généralisation de la phase préliminaire du procès pénal, la garantie du contradictoire deviendrait, selon certains auteurs, une garantie formelle plutôt qu'une garantie concrète73.
53Dans le domaine de la preuve, la contradiction joue à la fois sur la preuve et pour la preuve74. Dans le premier cas, le droit à la contradiction « consiste notamment dans le droit pour chacune des parties de prendre connaissance de toutes les pièces qui seront soumises au juge pour former sa conviction et de les contredire »75. Dans le second cas, les parties contribuent elles-mêmes à la formation des moyens de preuve, par exemple par l'aveu ou les témoignages. L'article 6.3 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales le prévoit expressément en ce qui concerne les témoins : « Tout accusé a droit notamment à :… d) interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge ». Dans l'affaire Vidal c. Belgique, le requérant invoquait la violation de cette disposition, estimant qu'à défaut d'entendre quatre témoins à décharge qu'il proposait, le tribunal l'avait privé de l'unique moyen d'établir son innocence. Dans l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme du 22 avril 1992, la Cour rappelle sa jurisprudence relative à la notion de témoin qui, dans la Convention, doit être interprétée de manière autonome76, ainsi que le but de l'article 6.3, d) qui n'exige pas la convocation ni l'interrogation de tout témoin mais vise une « complète égalité des armes » (§ 33). En l'espèce, la Cour estime que le silence de l'arrêt sur la demande d'audition de témoins à décharge « ne cadre pas avec l'idée de procès équitable » (§ 34) et elle conclut à la violation de l'article 677. L'arrêt Saidi c. France du 20 septembre 1993 statue dans le même sens, en rappelant que le droit de faire interroger des témoins représente un aspect du droit au procès équitable : en dépit de ses demandes, le requérant ne fut pas confronté avec les témoins qui l'identifièrent, ni pendant l'instruction, ni en première instance ni en appel78. De manière générale, la Cour européenne des droits de l'homme a certainement contribué, dans l’élaboration de la notion de procès équitable, à clarifier le rôle respectif des parties et du juge dans la recherche et l’établissement des preuves.
54Inversement, le droit de participer à la preuve implique aussi son contraire, le droit au silence, le droit de ne pas être obligé de témoigner dans sa propre cause et de ne pas contribuer à sa propre incrimination. L’arrêt Funke c. France du 25 février 1993 de la Cour européenne des droits de l’homme le rappelle expressément79, tandis qu’en Belgique l'arrêt Transnuklear en est une confirmation récente.
55Dans l'administration de la preuve, la forme la plus visible de participation des parties dans le débat judiciaire s'observe dans la procédure d’interrogatoires et de contre-interrogatoires des témoins, sur le modèle du droit anglo-américain (examination, cross-examination, re-examination) que l’on connaît, notamment, devant la Cour d'assises.
56Enfin, le degré de participation des parties dans l'administration de la preuve se manifeste encore, en négatif, dans la question des nullités. Dans la majorité des systèmes continentaux, les nullités sont invoquées à la diligence des parties qui y ont un intérêt et elles sont admises lorsqu'elles portent atteinte aux droits de la défense. Le droit anglais ne permet toutefois pas de soulever la question des nullités de procédure avant l'audience de jugement.
57Nous ne pouvons, toutefois, quitter ce thème sans évoquer un certain paradoxe lié à l’évolution du procès pénal. Si, d'un côté, comme nous l'avons vu, la phase préliminaire tend à devenir plus contradictoire et se rapproche d'un modèle de justice participative, d'un autre côté, la phase de jugement tend, dans certains cas, à devenir plus unilatérale et se rapproche d'un modèle de justice imposée. En effet, le développement des procédures simplifiées, que l’on connaît notamment en France et en Italie, implique bien souvent, comme l’observe M. Chiavario, « des renonciations forcées à la contradiction »80. Le « coût » du développement du contradictoire a suscité, dans une logique d'économie de la justice, la multiplication des procédures spéciales qui contournent le procès. Ainsi, dans le decreto penale, le juge peut condamner sur le seul fondement d'un dossier monté par la police et le parquet, sans écouter personne (art. 459 du Code de procédure pénale).
B. Punir sans juger
58Lorsque la commission d'une infraction donne lieu à un règlement extrajudiciaire, se pose de manière spécifique le problème de la preuve de cette infraction et du degré de participation de l'auteur de l'infraction à cette opération.
59En ce qui concerne la transaction pénale, on a pu dire qu’elle constituait en réalité une « condamnation sans débats »81, expression qui souligne clairement l'absence de participation de l'auteur de l’infraction à la question de la preuve. Quant au fait de savoir si l'acceptation même de la transaction constitue un aveu et vaut « reconnaissance de responsabilité », il est traditionnellement répondu par la négative82, bien que l’on tienne, par ailleurs, « pour vrais les faits que la transaction constate »83. La loi du 10 février 1994 a précisé, à cet égard, que, lorsque la victime fait valoir ses droits devant le tribunal compétent, « l'acceptation de la transaction par l'auteur constitue une présomption irréfragable de sa faute » (art. 216bis, § 4, in fine du Code d'instruction criminelle)
60Si les procédures prévues en matière de transaction administrative n'accordent, en général, pas davantage de place au débat contradictoire, il convient de signaler l'exception que constitue la loi du 30 juin 1971 relative aux amendes administratives applicables en cas d'infraction à certaines lois sociales qui a prévu, dès sa version initiale, que le fonctionnaire compétent devait, avant de décider éventuellement d’infliger une amende administrative, « avoir mis l'employeur en mesure de présenter ses moyens de défense » (art. 7). Il en va de même de la loi du 24 mars 1987 relative à la santé des animaux qui prévoit que le fonctionnaire désigné par le Roi doit, avant de décider éventuellement de proposer une amende administrative, « avoir mis l'intéressé en mesure de présenter ses moyens de défense » (art. 27, § 3). Un arrêté royal du 20 avril 1990 précise les modalités de cette procédure en prévoyant notamment que « si le dossier administratif… contient des pièces autres que le procès-verbal et la notification éventuelle du procureur du Roi », l'intéressé est informé de ce qu’il « peut venir consulter le dossier ». En outre, le fonctionnaire compétent « peut convoquer l'intéressé afin que ce dernier fournisse des renseignements complémentaires ou transmette des pièces justificatives complémentaires » et « d'autres fonctionnaires ou d'autres personnes peuvent également être invités à assister à l'entretien ou à être entendus ultérieurement… en présence de l'intéressé ou du moins après que celui-ci eût été dûment convoqué ».
61Quant aux deux procédures que la loi du 10 février 1994 qualifie de médiations pénales, il apparaît clairement que l’obligation qui est imposée au ministère public de convoquer l'auteur de l'infraction et, le cas échéant, la victime, ainsi que le droit, pour ceux-ci, de se faire assister par un avocat, n'ont pas pour but de susciter un débat contradictoire sur la responsabilité de l'intéressé, mais de l'éclairer davantage sur la portée des conditions auxquelles il est susceptible de donner son accord. Par ailleurs, en cas d'aboutissement de ces procédures, le législateur a expressément prévu que, vis-à-vis des personnes subrogées dans les droits de la victime ainsi que des victimes qui n'ont pas été associées à ces procédures, « la faute de l'auteur de l'infraction est présumée irréfragablement ». En cas d'échec de ces procédures et de reprise des poursuites, en revanche, il a été affirmé, au cours des travaux préparatoires de la loi, que « le procès-verbal dans lequel les aveux sont actés n'aura qu'une valeur informative », sans qu'il y ait présomption irréfragable de faute84.
C. Renoncer au procès
62La justice négociée trouve son expression la plus achevée dans les procédures de plea bargaining ou de guilty plea que l'on connaît depuis longtemps aux États-Unis85 et que certains auteurs n'hésitent pas à qualifier de véritable contrat86. Dans le modèle américain, le guilty plea, c'est-à-dire l'offre de plaider coupable, est généralement précédé d'un plea bargaining, c'est-à-dire (littéralement) une négociation quant au choix du système de ce qui sera plaidé. Les termes de la négociation peuvent être soit la peine (sentence bargaining), soit les chefs d'inculpation (charge bargaining). Dans le premier cas, il s'agit d'une négociation verticale dans la mesure où l'accord donné par l'organe de poursuite lie le juge du fond ; dans le second cas, il s'agit d'une négociation horizontale qui se déroule entièrement au niveau de la poursuite entre l'inculpé et le ministère public qui peut disqualifier ou requalifier les faits87.
63Ces procédures ont fait, aujourd'hui, une entrée remarquée sur la scène pénale dans de nombreux pays européens. Selon qu'il s'agit d'une négociation horizontale ou verticale, elles se situent soit au seul niveau de la poursuite, soit au double niveau de la poursuite et du jugement. L'enjeu de ces procédures ? Négocier la solution du conflit ou prouver les faits. Telle est la raison pour laquelle nous envisageons le plea bargaining dans le contexte de la preuve, même si cette matière, qui se trouve au croisement des différentes catégories que nous avons envisagées, pourrait aussi bien se lire à travers la mise en oeuvre de l'action pénale, le choix de la sanction, le rôle des acteurs ou les phases de la procédure.
64La Recommandation R (87) 18 du 17 septembre 1987 du Conseil des ministres du Conseil de l'Europe sur la simplification de la justice pénale a sans doute joué un rôle moteur en cette matière. Elle suggère expressément la procédure de guilty plea (l'offre de plaider coupable) dans la perspective de l'accélération de la justice. Lorsque le prévenu reconnaît volontairement les faits, il ne doit pas rester trop longtemps dans l'incertitude quant à la peine. Dans ce cas, il convient de simplifier les règles du procès88. En l'espèce, la simplification porte essentiellement sur la question de la preuve des faits qui ne doit plus être rapportée, ce qui offre pour la justice le double avantage de décharger les organes de poursuite, d'instruction et de jugement, et d’accélérer l'issue du procès qui se limite au prononcé de la peine. En échange, le prévenu peut compter sur une réduction de peine, soit prévue par la loi, soit accordée par le juge. Un régime que l'on pourrait qualifier de compensation en échange de l'abandon du droit d'être jugé au fond qui, dans certains pays, est un droit constitutionnel. Le guilty plea est, à ce titre, le résultat d'un accord entre parties qui « disposent » en quelque sorte de la procédure.
65Simplicité, rapidité, efficacité sont les thèmes qui dominent le débat. Si certains pays semblent privilégier le guilty plea pour accélérer la procédure, d'autres paraissent surtout chercher, par ce moyen, à renforcer l'efficacité du système89, le « dénominateur commun étant l’aspiration à une justice moins gaspilleuse de ses énergies et de ses ressources, en relation avec le grand courant de la diversion »90. Ajoutons une nuance à ce constat : la rigueur de la règle de l'exclusion de la preuve, qui existe dans certains pays et qui tend à s'imposer dans d'autres, n'est pas étrangère à une certaine volonté de renoncer, surtout dans les matières complexes, à la charge de la preuve.
66En Allemagne, le principe de l'instruction (Instruktionsmaxime), qui impose aux autorités le devoir de rechercher la vérité, s'oppose, théoriquement, au principe de la négociation (Verhandlungsmaxime)91. En dépit de sérieuses objections doctrinales92, le plea bargaining est néanmoins une pratique de plus en plus largement utilisée93, notamment dans le but d'accélérer la procédure. Des arrangements informels (informelle Absprachen) interviennent, surtout dans les affaires complexes, à la suite de discussions entre l'avocat, le ministère public et le tribunal. Dans la négociation, la reconnaissance de certains faits par l'accusé entraîne une promesse par le juge, désormais dispensé de l'établissement de la preuve, d’une réduction de peine94. Les cours et tribunaux, et même la Cour constitutionnelle95, reconnaissent implicitement cette stratégie, en veillant à « encadrer » la procédure et à la soumettre à certaines conditions afin que soient respectés les droits de la défense, l'égalité des citoyens ou la présomption d'innocence96.
67En Angleterre, le système de justice pénale ne pourrait fonctionner sans le guilty plea de la majorité des accusés, ce qui dispense le tribunal de l'établissement de la preuve97. Différents incitants sont, dès lors, prévus afin d'encourager les accusés à plaider coupable : soit une réduction des charges, soit une réduction de la peine qui, dans les deux cas, fait l'objet de négociations entre les parties. Tel est, selon les cas, le double objet du plea bargaining98. Si, officiellement, celui-ci n’a pas de place en droit anglais, des pratiques en ce sens se développent néanmoins informellement et l'on assiste aujourd'hui à une « superposition… plus franchement reconnue que jadis de certaines pratiques de "plea bargaining" dans l'ancienne institution du "guilty plea" »99. Les dangers de ces procédures sont très généralement soulignés : danger pour le coupable d'échapper à la peine, danger pour l'innocent de plaider coupable « de force », contre les faits100. En outre, elles posent des problèmes à la fois sociaux et moraux101, notamment en termes de discriminations en raison de la race102. En ce qui concerne les inculpations, la question n'est plus de savoir si l'accusation a des preuves suffisantes pour établir la culpabilité mais si elle a des éléments suffisants pour induire une offre de plaider coupable.
68La France ne connaît pas davantage le système du guilty plea. Dans son rapport préliminaire (1989), la Commission justice pénale et droits de l'homme rappelle que ce système soulève des réticences très fortes103. Dans son rapport final (1990), la Commission estime toutefois souhaitable que le « choix effectué par l'accusé de "plaider coupable" ou "non coupable" soit pris en considération dans la procédure dont il fait l'objet »104. Elle suggère, dès lors, trois propositions qui ont comme point commun un jugement plus rapide. La première proposition concerne une simplification de la mise en état du dossier : le fait de plaider coupable entraîne un assouplissement de la procédure, en ce sens que les investigations seraient limitées à l'enquête de personnalité. La deuxième proposition porte sur l'institution d'un classement judiciaire des poursuites : pour des infractions mineures et lorsque l'accusé reconnaît les faits, le ministère public pourrait requérir du juge l'arrêt des poursuites lorsque le trouble causé par l'infraction a cessé et que le dommage est réparé ou est susceptible de l'être. Dans ce cas, le juge déclare l'action publique éteinte et, le cas échéant, il donne force exécutoire à l'accord civil intervenu. La troisième proposition est un jugement immédiat par le juge, moyennant certaines conditions105.
§ 3. La sanction et ses modalités
69Il ne fait pas de doute qu'un système pénal qui consacrerait des peines absolument fixes quant à leur nature, leur taux et leurs modalités d'application constituerait, du point de vue du choix de la sanction, l'illustration par excellence d’un modèle de justice imposée. Même si la procédure pénale qui l'accompagne consacrait pleinement le principe du contradictoire, le rôle du prévenu se limiterait, dans ce cas, à tenter de démontrer l'inexistence de l'infraction, sans pouvoir exercer la moindre influence sur le choix de la peine et de ses modalités. Entièrement déterminées par la loi, celles-ci seraient simplement prononcées par le juge, sans que celui-ci ne puisse non plus exercer le moindre pouvoir d'appréciation. Si un tel système aurait pu répondre aux aspirations de certains représentants de la pensée pénale classique, tels que Beccaria, il semble qu'aucune législation, pas même le Code pénal français de 1791, ne l'ait jamais consacré d'une manière absolue106.
70Dans la mesure où la plupart des systèmes pénaux contemporains se trouvent caractérisés par une individualisation de plus en plus marquée des peines et de leurs modalités, il apparaît clairement que le principe du contradictoire permet au prévenu de participer de plus en plus activement au débat relatif au choix de la sanction qui lui sera appliquée, même si la décision elle-même lui échappe. En ce sens, la justice pénale apparaît, de ce point de vue également, comme une justice de plus en plus participative, voire même, dans certains cas, consensuelle. Nous en donnerons des illustrations dans différentes directions.
A. Les mesures de sûreté
71Dans ce que l'on appelle le droit quasi pénal ou le droit para-pénal, où les peines sont remplacées par des mesures, la participation des personnes intéressées est prévue à des degrés divers et sous différentes formes. Tout comme pour la libération conditionnelle, le sursis et la probation, que nous envisagerons au point suivant sous le titre des modalités de la peine, mais qui partagent avec les mesures de sûreté une histoire et une philosophie communes, nous pouvons suggérer l'hypothèse que la participation des individus à la procédure qui les concerne traduit les exigences du modèle thérapeutique et de l'idéal de réhabilitation.
72Nous évoquerons, tout d'abord, les mesures d'internement prévues par la loi du 1er juillet 1964 de défense sociale à l'égard des anormaux et des délinquants d'habitude, où une certaine participation de l'inculpé ou de l’interné est prévue, aux différentes étapes du processus, notamment sous la forme de l'introduction de requêtes. Dans le premier chapitre de la loi qui concerne la mise en observation des inculpés, l'article 2 prévoit que la mise en observation peut être ordonnée, à toutes les phases de la procédure, notamment sur la requête écrite et motivée de l'inculpé. Ce dernier peut aussi « recevoir la visite de médecins de son choix et produire leur avis sur l'opportunité du placement en observation » (art. 3). En outre, « si l'inculpé le demande, la publicité des débats est ordonnée, sous réserve de l'application de l'article 96 (149) de la Constitution » (art. 5, al. 2). Au cours de l'observation, « l'inculpé peut transmettre aux experts… les avis des médecins choisis par lui sur lesquels les experts devront se prononcer dans leur rapport avant de conclure… » (art. 6, al. 5). Dans le chapitre II, qui concerne les décisions d'internement des inculpés en état de démence, débilité ou déséquilibre mentaux, « les juridictions d'instruction peuvent, comme les juridictions de jugement,… ordonner… à la demande de l'inculpé et de son avocat l'audition de témoins ou d’experts » (art. 9, al. 1er). « Sauf dans les cas où la publicité est jugée dangereuse pour l’ordre et les moeurs, l’audience des juridictions d’instruction est publique si l'inculpé le demande » (art. 9, al. 2). Inversement, « devant les juridictions de jugement où la publicité est la règle, la juridiction de jugement peut ordonner le huis clos si l'inculpé le demande et que le ministère public ne s'y oppose pas » (art. 9, al. 2, in fine). Devant la Cour d’assises, l'accusé ou son avocat peut proposer des questions subsidiaires au jury sur les faits et sur l'état mental (art. 10, al. 1er). Dans l'exécution de la décision d'internement (chapitre IV), l'interné peut demander à la commission de défense sociale son transfèrement dans un autre établissement (art. 15, al. 1er). Pour décider du choix de l'établissement ou du transfert dans un autre établissement, l'interné peut se faire examiner par un médecin de son choix et produire l'avis à la commission de défense sociale (art. 16, al. 2). Enfin, en ce qui concerne la mise en liberté des internés organisée par le chapitre V, ceux-ci peuvent la demander à la commission de défense sociale (art. 18, al. 1er).
73Nous évoquerons, ensuite, la mesure de la mise à la disposition du gouvernement et d'internement des récidivistes et des délinquants d’habitude qui fait l'objet du chapitre VII de la loi du 1er juillet 1964 de défense sociale à l'égard des anormaux et des délinquants d’habitude. « Après un an de privation de liberté fondée exclusivement sur une décision d'internement prise conformément à l'article 25 bis, le récidiviste ou le délinquant d'habitude interné peut demander au Ministre de la justice d'être remis en liberté » (art. 25 quater, al. 1er). Cette demande peut être renouvelée d'année en année (art. 25 quater, al. 2). Par ailleurs, « les récidivistes et les délinquants d'habitude, mis à la disposition du gouvernement en vertu des articles 22 et 23, peuvent demander d'être relevés des effets de cette décision » (art. 26, al. 1er). La demande est, dans ce cas, adressée au procureur du Roi près le tribunal qui a prononcé la mesure et c'est la chambre du conseil qui prendra la décision : « Sauf dans les cas où la publicité est jugée dangereuse pour l'ordre ou les moeurs, l'audience de la chambre du conseil est publique si le requérant le demande » (art. 26, al. 1er, in fine).
74Enfin, même si le domaine de l'aide à la jeunesse ne relève plus, stricto sensu, de la justice pénale, il entretient néanmoins avec le pouvoir judiciaire, et notamment avec le tribunal de la jeunesse, certains liens. C'est dans cette perspective qu'il peut être intéressant d'évoquer, comme illustration d'une forme de justice consensuelle, l'article 7 du décret de la Communauté française du 4 mars 1991 relatif à l'aide à la jeunesse, aux termes duquel « aucune décision d'aide individuelle ne peut être prise par le conseiller sans l'accord écrit du jeune bénéficiaire s'il a atteint l'âge de quatorze ans ou, s’il n'a pas atteint cet âge, des personnes qui assument la garde en fait du jeune ». Il s'agit, certes, d'une intervention administrative mais qui est susceptible, dans deux cas, de déboucher sur l'intervention du tribunal de la jeunesse. Dans le premier cas, le tribunal connaît des contestations relatives à l'octroi, au refus et aux modalités d'application d'une mesure d'aide individuelle et il y met fin en obtenant l'accord des parties (art. 37). Dans le second cas, le défaut d'accord joint à une situation de danger grave permet, sur réquisitions du parquet, l'intervention contraignante du tribunal de la jeunesse (art. 38).
B. Les modalités de la peine
75Si les peines prévues par la loi ne doivent, en principe, pas être « acceptées » pour être prononcées, il en va de plus en plus souvent autrement des modalités qui l'accompagnent et qui sont susceptibles, dans certains cas, de les remplacer. Se développent ainsi également certaines formes de justice « consensuelle ».
76Le processus de la libération conditionnelle est relativement significatif à cet égard. En Belgique, lorsque le détenu a subi le tiers de sa peine ou les deux tiers en cas de récidive (art. 1er de la loi du 31 mai 1888 établissant la libération conditionnelle dans le système pénal), son admission à la libération conditionnelle est de droit, en ce sens qu'il n'a pas de demande à formuler : la libération conditionnelle est la mise en oeuvre d’un régime progressif d'exécution des peines et non une faveur pour récompenser la bonne conduite. En revanche, lorsque la libération est proposée, le détenu doit l'accepter et doit surtout accepter les conditions dont celle-ci est assortie. Lors de la lecture de l'arrêté ministériel qui ordonne la mise en liberté, « l'attention de l'intéressé sera attirée spécialement sur les conditions qu’il aura à observer ; il sera invité à déclarer qu'il accepte les conditions » et un procès-verbal en sera dressé (art. 8, al. 2, de l'arrêté royal du 17 janvier 1921 contenant les mesures d'exécution de dispositions de la loi du 31 mai 1888 modifiée, concernant la libération conditionnelle des condamnés civils et militaires). Ce n'est que lorsque « l'intéressé aura déclaré accepter la libération conditionnelle et fait connaître, s'il y a lieu, la localité où il compte se fixer à sa sortie de prison », qu'il lui « sera délivré, au moment de sa mise en liberté, un permis de libération » (art. 9, al. 1er). A contrario, la libération conditionnelle ne peut donc être imposée au détenu, et ceci s'explique par le fait que le système se fonde sur une logique de réadaptation, de resocialisation. La situation est identique en France « où le condamné a la faculté de refuser son admission à la libération conditionnelle et les conditions qu'elle comporte ne peuvent s'appliquer sans son consentement » (art. D.531 du Code de procédure pénale)107. Inversement, comme l'observe R. Roth en Suisse, lorsque la procédure de libération conditionnelle ne vise pas à donner une chance mais à évaluer les risques liés à une libération anticipée, le condamné n'a pas le droit de refuser sa libération108.
77La suspension du prononcé de la condamnation, introduite par la loi du 29 juin 1964 concernant la suspension, le sursis et la probation, qui cherche à réduire les inconvénients inhérents au prononcé d'une condamnation et à favoriser l'amendement, ne peut être ordonnée, par les juridictions de jugement ou d'instruction, que de l'accord de l'inculpé (art. 3, al. 1er)109. Si cet accord est une formalité substantielle qui doit marquer l'esprit de coopération de l'inculpé, il n’implique pas nécessairement l'aveu de celui-ci110. Dans ce même esprit, la suspension peut être demandée par l'inculpé (art. 3, al. 3). L'accord du condamné est également requis pour le sursis probatoire qui implique « l'engagement par le condamné de respecter les conditions de probation que la juridiction détermine » (art. 8, § 2).
78Se rattachant à la probation, on rappellera encore que la loi du 10 février 1994 modifiant la loi du 29 juin 1964 concernant la suspension, le sursis et la probation, a prévu que les conditions particulières accompagnant la suspension ou le sursis pourront désormais consister en l'obligation d'exécuter des travaux d'intérêt général ou de suivre une formation déterminée (art. 1er, al. 2). Bien que la loi ne le précise pas, il ressort de l'exposé des motifs que ces conditions ne peuvent être décidées qu'avec l'accord du prévenu, « étant donné que ceci découle déjà de l'article 3 de la loi du 29 juin 1964 en ce qui concerne la suspension du prononcé de la condamnation et parce que la nécessité d'un consentement découle de la nature même de la nouvelle mesure, laquelle est vouée à l'échec si l'intéressé doit la subir contre son gré ; de plus, personne ne peut être forcé à exécuter un travail contre sa volonté »111. Plus radicalement, on pourrait soutenir qu'un travail d'intérêt général qui serait imposé serait un travail forcé incompatible avec l'article 4 de la Convention de sauvegarde des droit de l'homme et des libertés fondamentales112. En outre, la loi prévoit expressément que « le travail d'intérêt général comme la formation peuvent être proposés par le prévenu ou par le probationnaire ». Justice participative et justice consensuelle se trouvent dès lors ici étroitement associées. Bien que le travail d'intérêt général ne soit considéré ainsi en Belgique que comme une condition particulière d'une mesure probatoire (ou, ainsi que nous l'avons déjà rappelé, comme une condition spécifique d'extinction de l'action publique), on ne doit pas perdre de vue le fait qu'il constitue, dans de nombreux pays comme la France et l'Angleterre, une véritable « peine alternative »113. Dans ce cas également, il est cependant symptomatique que le consentement de l'intéressé soit généralement considéré comme une exigence essentielle114. Ainsi, en Angleterre, la s. 14 (2) du Powers of Criminal Courts Act 1973 prévoit que la Cour ne peut pas prescrire un Community Service Order si l'intéressé n'y consent pas. En France, le nouveau Code pénal français dispose que « la peine de travail d'intérêt général ne peut être prononcée contre le prévenu qui la refuse » (art. 131.8).
79Enfin, en ce qui concerne le droit pénitentiaire, on observe que l'admission au régime de la semi-liberté requiert l'adhésion expresse du bénéficiaire à ce type de régime. De manière plus générale, A. Perrodet observe que « la conception autoritaire de l’exécution des peines semble perdre du terrain, en même temps que se dessine un mouvement général de judiciarisation »115.
C. Les sanctions dites alternatives
80En ce qui concerne les différents modes d'extinction de l'action publique moyennant le paiement d’une somme d'argent ou la réalisation d'autres conditions particulières, il convient tout d'abord de préciser qu'ils ne peuvent juridiquement être assimilés à une « condamnation pénale »116, puisqu'ils sont précisément acceptés pour éviter un procès pénal et une éventuelle condamnation à l'issue de celui-ci117. Il n'en reste pas moins vrai que, malgré l'absence de reconnaissance de la culpabilité de l'intéressé, la somme d'argent ou la prestation exigées peuvent être considérées comme la « sanction » des faits qui lui sont reprochés. A une peine « imposée » se trouve ainsi substituée une sanction alternative « acceptée »118.
81Enfin, la médiation proprement dite, en cas d'aboutissement favorable, suppose non seulement l'existence d'un « accord » entre la victime et l'auteur de l'infraction quant à l'indemnisation et ses modalités, mais encore une véritable possibilité de discussion préalable de celles-ci. La « sanction » alternative qui a fait l'objet d'un tel accord illustre, dès lors, une forme au moins partielle de justice négociée.
D. La réduction des peines
82Si, en principe, en droit belge comme en droit français d’ailleurs, la décision sur la peine n'appartient pas aux parties, sous réserve de la faculté pour l'inculpé d'invoquer devant les juridictions d'instruction et les juridictions de jugement des circonstances atténuantes qui auront pour effet de réduire le taux de la peine, il n'en va pas nécessairement de même dans d'autres systèmes. Nous évoquerons deux situations qui existent en Angleterre et en Italie, où une réduction de peine peut être obtenue par un accord entre les parties concernées et qui sont susceptibles de se dérouler sur le triple registre de la justice participative, consensuelle et négociée.
83En Angleterre, afin de susciter les offres de plaider coupable (guilty plea) qui sont devenues, comme nous l'avons vu, indispensables à la survie du système, la Royal Commission on Criminal Justice suggère d'introduire officiellement le sentence bargaining dans le système pénal anglais119. Il s'agit d'organiser sur des bases plus claires, dès la phase préliminaire, le système de réduction de peine (sentence discount) afin d'éviter les cracked trials, c'est-à-dire les procès ajournés le jour même de l'audience parce que l'accusé ne plaide coupable qu'à ce moment. Juges, experts, témoins, etc. sont convoqués inutilement puisqu'il n'y aura pas de débat sur la culpabilité. La recommandation proposée est, dès lors, un « changement d'approche » : à sa demande, dès les premières étapes de la procédure, le juge devrait pouvoir donner à l'avocat de l’accusé des indications sur la peine qu'il prononcerait dans l'état du dossier. Ce sentence canvass devrait être proposé en présence de toutes les parties et consigné par écrit120. En dépit des critiques sévères dont cette proposition a fait l'objet121, le Criminal Justice Public Order Act 1994 reconnaît le principe d'une réduction de peine en échange d'un guilty plea, dans la mesure où l'article 48 dispose « que le juge prendra en compte, dans la détermination de la peine, les étapes antérieures de la procédure au cours desquelles l'accusé a manifesté son intention de plaider coupable ».
84En Italie, le nouveau Code de procédure pénale de 1988122 a introduit deux procédures qui « se fondent sur la reconnaissance légale de certains effets à l'accord conclu entre le parquet et l'accusé »123. Il s'agit, dans un système qui reste dominé par le principe de la légalité de la poursuite124, de procédures fondées sur le consentement des parties. En l'espèce, l'accord porte non pas sur la décision de poursuivre mais sur la mesure de la peine et/ou la forme du procès. L'objectif poursuivi semble surtout celui d'accélérer la procédure en raison, notamment, des nombreuses condamnations de l'Italie par la Cour européenne des droits de l'homme pour violation du délai raisonnable (art. 6.1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales).
85D'un côté, le code a officialisé une procédure qui existait depuis la loi du 24 novembre 1981, à savoir l'application de la peine sur la requête des parties (applicazione della pena su richiesta delle parti). Il s'agit de ce que l'on appelle, dans le langage courant, le patteggiamento. Pour les infractions qui sont susceptibles d'une peine de deux ans de détention au maximum, l'accusé et le ministère public demandent au juge d'appliquer la peine sur laquelle ils se sont mis d'accord. En d'autres termes, ils demandent au juge de sceller leur accord qui, en l'espèce, porte sur le choix d'une peine réduite. Le patteggiamento peut intervenir soit durant la phase préliminaire, soit pendant la phase de jugement. Si la procédure est acceptée, elle débouche sur un jugement qui pourrait encore, mais l'hypothèse serait rare, acquitter le prévenu. En cas de condamnation, sous réserve du contrôle de légalité de la procédure par le juge prévu par l'article 27, al. 3, de la Constitution, ce dernier prononce la peine réduite, sans que la réduction puisse être supérieure à deux tiers125. Aucune autre peine complémentaire ne sera prononcée contre l'accusé qui, en outre, ne sera pas tenu aux frais du procès. En échange, il renonce à son droit de contester les charges de l'accusation et d'interjeter appel. En d'autres termes, il y a, implicitement, admission de la culpabilité. Toutefois, si le juge refuse de sceller l'accord des parties et que la procédure se poursuit, la requête de l'accusé ne pourra être assimilée à un aveu. Si, en droit, cette nuance est importante, en fait, elle nous semble difficile à maintenir.
86D'un autre côté, le nouveau code a organisé, à côté du patteggiamento, une autre forme de justice consensuelle : le jugement abrégé (giudizio abbreviato). Cette procédure est applicable pour toutes les infractions, quelle que soit leur gravité et sans limitation quant au taux de la peine, à l'exception toutefois de l'emprisonnement à vie126. Ici, l'accord porte sur le choix d'une procédure abrégée par rapport à la procédure de jugement ordinaire. Dès la phase préliminaire, le juge peut accueillir la requête de l’inculpé d'être jugé « en état »127. Si le parquet marque son accord (ce qui l'empêche alors de modifier les charges), l'affaire sera jugée, non pas par le juge du fond, mais par le juge de l'enquête préliminaire, en l'état (allo stato degli atti), sur base du dossier de la poursuite et sans la publicité du procès. Les termes du jugement « abrégé » sont soit un acquittement, soit une condamnation à une peine qui sera réduite, en principe, d'un tiers. En outre, la condamnation ne figurera pas au casier judiciaire. L'accusé renonce à son droit de faire appel, mais non pas de se pourvoir en cassation128. En revanche, il échappe aux effets d'une recherche de preuve plus approfondie qui pourrait déboucher sur de nouvelles charges.
Section 3. L'identité des intervenants et la phase du procès pénal concernée
87Par rapport à un modèle de justice imposée qui, à toutes les phases du procès pénal, serait caractérisé par l'intervention exclusive d'organes étatiques, il convient d'apercevoir quels sont les particuliers auxquels les autres modèles de justice confèrent un rôle plus ou moins actif selon le cas, à quelle phase de déroulement du procès pénal cette intervention se réalise, et avec quel(s) organe(s) s'établit cette relation.
88Quant à l'intervention des particuliers, il convient évidemment de distinguer nettement les situations dans lesquelles l'auteur de l'infraction est appelé à jouer un rôle actif dans le déroulement du procès pénal et celles où ce rôle est rempli par la victime, voire par un tiers. Dans certaines situations, toutefois, l'auteur et la victime sont appelés à jouer un rôle ensemble. Dans d'autres cas, le rôle des particuliers modifie la répartition des rôles avec les organes publics. Nous l'évoquerons également.
§ 1. L’auteur
89L'intervention de l'auteur de l'infraction peut s'envisager à différents stades et sous des formes diverses.
90A un stade informel, préalable à la phase des poursuites, l'auteur de l'infraction est susceptible de participer volontairement à la réparation du dommage subi par la victime, que ce soit d'une manière spontanée, à la demande de la victime elle-même, ou à la suggestion de certains organes, tels que la police. Par ailleurs, au niveau de la police, la personne appréhendée ou suspectée peut aussi accepter un accord qui prend la forme d’une « intervention suspendue » à certaines conditions (restitution ou dédommagement, engagement de bonne conduite et non récidive, communication d'informations, etc.). En Angleterre, il s'agit d'une négociation sur les charges qui s'effectue entre la police et l'intéressé129. Ce premier cercle de la justice participative ou consensuelle, selon les cas, est sans doute, quantitativement, le plus large mais, qualitativement, le plus méconnu. Il se déploie entièrement sur le registre de l'informel, de l'invisible et même du non dit, car il n'y a pas de qualification particulière pour nommer cette justice de première ligne, celle du quotidien et du commissariat. D'emblée, apparaît la double question de l'inégalité des positions et de la loyauté de l'accord. A cet égard, une décision judiciaire anglaise récente est significative, dans la mesure où elle reconnaît l'existence de ces « négociations » policières et en tire les conséquences précisément sur le terrain constitutionnel du due process. En l'espèce, la police avait donné des assurances à un jeune inculpé qu'il ne serait pas poursuivi dans une affaire de meurtre s'il aidait la police et acceptait de témoigner pour l'accusation. En dépit de cette promesse, il fut néanmoins poursuivi. Tout en admettant que l’engagement de la police n'était pas autorisé, la High Court of Justice annule la procédure, car elle estime que poursuivre quelqu'un après lui avoir promis qu'il ne serait pas poursuivi constitue un abuse of process130.
91Dans le cadre de l'information et de l'instruction, l'auteur de l'infraction ou l'inculpé est également susceptible de jouer un rôle plus ou moins actif sur le terrain de la preuve, selon le degré de consécration du principe du contradictoire à ce stade de déroulement du procès pénal. Traditionnellement, ce rôle est extrêmement limité en Belgique, puisque le Code d'instruction criminelle ne reconnaît pas, formellement, à l'inculpé le droit de demander au juge d'instruction des actes complémentaires d'instruction131. Toutefois, il tend progressivement à se développer, ainsi qu'en témoignent les travaux de la Commission pour le droit de la procédure pénale qui montrent que, dans les faits, « certains juges d'instruction donnent suite à une demande (informelle) d'un inculpé d'accomplir un acte d'instruction complémentaire »132. La pratique révèle donc « une certaine flexibilité qui comble les lacunes de la loi », mais « cette situation laisse néanmoins à désirer, car le juge d'instruction n'est pas tenu de répondre ou de faire droit à la demande et le requérant ne dispose d'aucun recours en cas de carence ou de refus du juge d'instruction »133. Dans le double but de renforcer les droits de la défense et l'efficacité de l'instruction, la commission suggère, dès lors, de faire « de la demande de mesures d’instruction complémentaires un droit fondamental, avec la possibilité d'interjeter appel devant la chambre des mises en accusation »134. Tel est le sens de l'article 11 de l'avant-projet de loi relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction proposé par la Commission et soumis par le Conseil des ministres au Conseil d'Etat le 31 mars 1995, qui introduit un pouvoir d'intervention active : « Article 61 quinquies. § 1er. L'inculpé et la partie civile peuvent demander au juge d'instruction l'accomplissement d'un acte d'instruction complémentaire. § 2. La requête est motivée… Le juge d'instruction statue dans le mois du dépôt de la requête. § 3. Le juge d'instruction peut rejeter cette demande, s'il estime que la mesure n'est pas nécessaire à la manifestation de la vérité ou est, à ce moment, préjudiciable à l'instruction. § 4. L'ordonnance du juge d'instruction n'est pas susceptible de recours. § 5. Si le juge d'instruction n'a pas statué dans le délai prévu…, le requérant peut saisir la chambre de mises en accusation… § 6. Le requérant ne peut déposer de requête ayant le même objet avant l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la dernière décision »135. Si, d'un côté, ce texte est légèrement en retrait par rapport aux motifs qui le sous-tendent, notamment en ce qui concerne le droit de recours, ce qui montre bien la position de compromis qu'il occupe entre un modèle inquisitoire et un modèle accusatoire, d'un autre côté, il renoue avec une longue tradition puisque, comme le rappelle la Commission Franchimont, des propositions en ce sens se retrouvent déjà dans les projets antérieurs de réforme de la procédure pénale, celui de van den Heuvel en 1902 et celui du Centre d'étude pour la réforme de l'Etat en 1939136. L'article 11 de l'avant-projet est complété par l'article 16 qui remplace l'article 127 du Code d'instruction criminelle et qui prévoit que lorsque l'instruction est terminée et que le dossier est communiqué au procureur du Roi, « l'inculpé et la partie civile peuvent demander au juge d'instruction… l'accomplissement d'actes d'instruction complémentaires, conformément à l'article 61 quinquies »137. Si ces dispositions traduisent, au niveau de l'instruction, une forme de justice participative, l'article 15 de l'avant-projet illustre une forme de justice consensuelle : « Hors les cas d'infraction flagrante ou réputée telle, et le cas où la personne majeure donne son consentement écrit, l'exploration corporelle ne peut être ordonnée que par le juge d'instruction et par le tribunal ou la cour saisis de la connaissance du crime ou du délit »138. Notons, enfin, l'article 21 de l'avant-projet qui dispose que « l'inculpé peut interjeter appel contre les ordonnances de renvoi prévues aux articles 129 et 130 du Code d'instruction criminelle en cas d'irrégularités, omissions ou nullités affectant : 1° un acte d'instruction, 2° l'obtention de la preuve, 3° ou l'ordonnance de renvoi »139.
92Dans la phase des poursuites, la participation de l'auteur de l'infraction est de plus en plus souvent sollicitée, comme on l'a vu, sous la forme d'un consentement donné au paiement d’une somme d'argent ou à l'exécution de certaines prestations conditionnant l'extinction de l'action publique. A ce stade également, il peut être appelé à une véritable négociation sur le principe et les modalités d'indemnisation de la victime dans le cadre d'une procédure de médiation. Dans le cadre de la médiation pénale, telle qu'elle a été introduite en France par la loi no 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale140, il a également été souligné que la procédure ne peut être réalisée qu'avec l'accord de la victime et du délinquant, accord qui doit être maintenu à toutes les étapes de la médiation.
93En ce qui concerne la phase du jugement, la représentation traditionnelle du procès pénal où l'inculpé ne dispose pas de la procédure qui paraît lui être entièrement imposée, de manière unilatérale, s'estompe devant une réalité plus nuancée. En Belgique, si l'inculpé ne choisit pas, en principe, le tribunal appelé à le juger, il dispose toutefois de la faculté d'invoquer, devant les juridictions d'instruction, des circonstances atténuantes qui auront pour effet, si elles sont admises, de le renvoyer, selon les cas, devant le tribunal correctionnel ou le tribunal de police (art. 2 et 4 de la loi du 4 octobre 1867 portant attribution aux cours et tribunaux de l'appréciation des circonstances atténuantes), ce qui constitue une forme relative de justice participative. En France, la pratique de la correctionnalisation judiciaire peut même impliquer une certaine marge de négociation implicite, puisque cette procédure requiert nécessairement l'accord de toutes les parties ainsi que du juge. Dans ce même pays, la procédure des flagrants délits introduit une forme de justice consensuelle puisque, depuis la loi du 10 juin 1983, le prévenu doit accepter d'être jugé dans l'urgence. Le président du tribunal doit d'ailleurs l'avertir qu’il ne peut être jugé le jour même qu'avec son accord (art. 397 du Code de procédure pénale). Cette procédure, observe M. Delmas-Marty, « a le mérite d'introduire l'ébauche d'un consensualisme dans un domaine où les institutions étatiques (police, parquet) imposaient de façon unilatérale le rythme qu'elles avaient choisi seules »141. La situation est encore plus franche en droit anglais, où l'accusé peut exercer un véritable choix quant au mode de procédure. Pour les infractions mixtes, c'est-à-dire les infractions qui peuvent être jugées soit par les magistrate's courts, soit par la Crown Court, l'accusé peut accepter la procédure sommaire ou exiger son renvoi devant la Cour. Il peut même revenir sur son choix mais avec l'accord de la Crown Court (art. 25 du Magistrates' Courts Act 1980)142. Pour le surplus, la participation de l'inculpé ou de l'accusé lors du jugement se déploiera plus largement sur le terrain de la preuve de l'infraction comme sur celui de la peine applicable, corrélativement à la consécration à part entière du principe du contradictoire à ce stade de déroulement du procès. Son consentement sera également requis pour que puissent être adoptées certaines mesures, telles que la suspension de la condamnation ou l'adoption d'une mesure probatoire pouvant impliquer notamment que l'intéressé exécute des travaux d'intérêt général ou une formation déterminée. Le jugement, une fois prononcé, fait encore appel à une forme minimale d'acceptation de sa part, consistant dans l'absence éventuelle d'exercice des voies de recours disponibles.
94Enfin, au stade de l'exécution des peines prononcées, on rappellera que le consentement de la personne condamnée à une peine d'emprisonnement est requis pour que puisse être décidée sa libération conditionnelle.
§ 2. La victime
95L'intervention de la victime, quant à elle, est également susceptible de se manifester à différents stades143. Considérée traditionnellement comme un sujet passif de l'infraction, il est évident que le rôle de la victime s'est considérablement développé ces dernières décennies. Nous en prendrons un exemple qui est rarement évoqué. La nationalité de la victime est désormais susceptible de constituer un cas de compétence extra-territoriale : « Pourra être poursuivi en Belgique l'étranger qui aura commis hors du territoire du Royaume… 5° un crime contre un ressortissant belge si le fait est punissable, en vertu de la législation du pays où il a été commis, d'une peine dont le maximum dépasse cinq ans de privation de liberté » (art. 10, 5° de la loi du 17 avril 1878 contenant le titre préliminaire du Code de procédure pénale). Cette disposition, qui a été introduite par la loi du 12 juillet 1984, consacre le principe de la personnalité passive qui a pour effet d'identifier les intérêts privés des nationaux aux intérêts de l'Etat. Notons, toutefois, que dans les pays qui connaissent et utilisent le système du plea bargaining, sur les charges ou sur la peine, la victime n'occupe pas une place en tant que telle et est même souvent ignorée144.
96Dans le champ du procès pénal, à un stade informel, la victime est susceptible d'adopter une attitude plus ou moins bienveillante à l'égard de l’auteur de l'infraction, notamment en acceptant ou en refusant, selon le cas, les propositions éventuelles d'indemnisation qui pourraient lui être faites.
97Au stade des investigations, le dépôt éventuel d'une plainte ainsi que les déclarations susceptibles de l'accompagner pourront jouer un rôle déterminant. Certains systèmes juridiques vont plus loin et confèrent un rôle accru à la victime. Ainsi, M. Chiavario observe, dans le droit de la procédure pénale en Italie, la possibilité d'accords extrajudiciaires préalables au dépôt de la plainte. Il y a même des « ouvertures légales » à certaines négociations pendant la procédure elle-même. Pour les infractions dont la poursuite est subordonnée à la plainte de la victime, la remissione della querela (le désistement de la plainte) aura pour effet d'éteindre l'action publique pour autant qu'il y ait acceptation de l'auteur présumé (art. 152 et sv. du Code pénal). Le ministère public peut, dès lors, tenter une conciliation officielle entre le plaignant et l'inculpé, afin d'encourager la conclusion d'un accord (art. 564 du Code de procédure pénale)145.
98Au stade des poursuites, de manière générale, le sort de la victime, et plus particulièrement la réparation du dommage subi par celle-ci, occupe en Belgique une place de plus en plus importante dans la politique du ministère public en matière de poursuites146. Formellement, le fait que la victime ait déposé plainte constitue, dans certains cas, comme on l'a rappelé, une condition même d'exercice de l'action publique. Par ailleurs, même dans le cadre d'un système ignorant l'accusation « privée », la constitution de partie civile ménage à la victime un rôle décisif dans la mise en mouvement de l'action publique et tend à faire de celle-ci, comme on l’a vu, à la fois un auxiliaire et un concurrent du ministère public. Elle aura notamment pour effet de faire obstacle à des procédures extrajudiciaires de règlement du conflit, telles que la transaction pénale, la transaction administrative ou la médiation. Si ce rôle est susceptible d'être rempli par les individus qui ont été victimes d'une infraction pénale, on constate cependant qu'il tend, de manière de plus en plus fréquente, à être exercé par des groupements ayant pour vocation la défense d'intérêts collectifs147. Si la législation belge a fortement limité les cas dans lesquels de tels groupements peuvent se constituer partie civile en cas d'atteinte à l'intérêt collectif qu’ils défendent, cette consécration est beaucoup moins restrictive dans d'autres pays, comme la France par exemple148. Enfin, bien que la loi du 10 février 1994 ait atténué cette exigence, le principe est que la transaction pénale ne peut être proposée que si le dommage causé à autrui a été entièrement réparé, ce qui suppose que la victime ait eu la possibilité de manifester son accord sur ce point. Par ailleurs, la mise sur pied de la procédure de médiation confère à la victime, au même titre qu'à l'auteur de l'infraction, le droit de participer à la négociation relative à son indemnisation.
99Au stade du jugement, il est clair qu'en cas de constitution de partie civile, la victime participe à part entière aux débats relatifs à l'existence de l'infraction qui lui a causé préjudice, ce qui « aggrave la position du prévenu qui se trouve confronté à deux adversaires »149.
100Enfin, dans la procédure de réhabilitation en matière pénale, la chambre des mises en accusation « doit notamment tenir compte dans son appréciation des efforts faits par le requérant pour réparer les dommages résultant des infractions, qui n'auraient pas été établis judiciairement » (art. 624 du Code d'instruction criminelle), ce qui témoigne d'une prise en compte des intérêts de la victime au-delà du jugement de condamnation.
§ 3. Les tiers
101Quant à l'intervention de tiers, en dehors d’un système d'accusation populaire qui leur accorde une place évidemment essentielle, on se contentera de rappeler quatre formes d'intervention non négligeables.
102La première se situe au niveau des investigations et peut prendre la forme aussi bien de témoignages que de dénonciations. Dans ce dernier cas, l'intervention des tiers peut être favorisée, soit en la rendant obligatoire dans certaines circonstances (comme c'est le cas, aux termes de l'article 30 du Code d'instruction criminelle, pour tout attentat soit contre la sûreté publique, soit contre la vie ou la propriété d'un individu, dont une personne aurait été témoin), soit en l'érigeant en cause d'excuse permettant d'atténuer, voire de supprimer, la peine applicable à certaines infractions (comme c'est le cas pour les complots contre la sûreté de l'Etat, aux termes de l’article 136 du Code pénal ; pour la contrefaçon et l'altération des monnaies, aux termes de l'article 192 du Code pénal ; pour l'association dans le but d'attenter aux personnes et aux propriétés, aux termes de l'article 326 du Code pénal ; ou encore pour les infractions commises en matière de trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, désinfectantes ou antiseptiques, aux termes de l'article 6, al. 2, de la loi du 24 février 1921). Par la prime d'impunité qui est accordée au dénonciateur, ce qui pose évidemment un problème d'ordre moral, le législateur vise à empêcher la réalisation d'infractions considérées comme particulièrement graves pour l'ordre social.
103La deuxième forme d'intervention se situe au niveau des poursuites et réside dans le fait que, la plupart du temps, les groupements se constituant partie civile ne se prétendent victimes d'un préjudice propre qu'en vue de satisfaire artificiellement aux exigences légales relatives à la recevabilité de leur action. En réalité, il apparaît clairement qu'une telle action a une finalité « essentiellement répressive »150 et que « le groupement se présente comme légalement qualifié pour mettre en oeuvre une fonction "semi-publique", étant celle de déclencher, dans un intérêt collectif, une action de type répressif »151. On comprend, dès lors, que certains aient jugé souhaitable de mettre fin à cet artifice en reconnaissant ouvertement à ces groupements l'exercice, non plus d'une action civile, mais d'une action publique, concurremment avec le ministère public.
104Une troisième forme d'intervention pourrait s'envisager dans le cadre d'une procédure de médiation pénale où des particuliers joueraient le rôle de médiateurs, soit à titre individuel, soit en tant que membres d'associations fournissant ce type de prestation152. Alors que de telles procédures, accompagnées ou non d'un contrôle judiciaire selon le cas, existent dans de nombreux pays153, aboutissant à ce qu'on a pu appeler respectivement une forme de « justice déléguée »154 ou de « justice réappropriée »155, cette solution a été expressément rejetée en Belgique afin d’éviter « une privatisation de la justice »156.
105Une dernière forme d'intervention des tiers, enfin, réside dans l'éventuelle participation d'associations privées à l'exécution de certaines mesures de remplacement, telles que des mesures probatoires157, un traitement ou toute autre thérapie, des travaux d'intérêt général, des formations158 ou des mesures réparatrices.
§ 4. Une autre répartition des rôles
106Quant aux organes publics en relation avec lesquels ces particuliers sont susceptibles de jouer les différents rôles qui ont été évoqués, il convient de les mentionner dans la mesure où la répartition traditionnelle des rôles entre ces organes se trouve modifiée.
A. L'exigence d'un accord conjoint
107Dans certains cas, l'accord conjoint du prévenu, des organes de poursuite et de jugement est requis. Ainsi, en Allemagne, dans un système qui est pourtant dominé par le principe de la légalité de la poursuite, le ministère public a désormais le pouvoir de classer l'affaire sous condition (Vorläufïges Absehen von Klage). Aux termes du § 153 de la St. Po., ce classement peut être réalisé par le parquet avec le consentement du juge et de l'accusé. Comme l'observe J. Pradel, le consensualisme se présente, en l'espèce, sous une forme triangulaire : juge, parquet, inculpé159. Cette procédure, qui est facultative, s'appliquerait surtout en matière de délinquance économique160. Cette réforme, observe H. Jung, a modifié l'équilibre des pouvoirs et « stimulé le développement d'éléments de négociation dans l'enquête préliminaire »161. K. Tiedeman, quant à lui, parle de « plea bargaining non prévu par la loi et soumis à des limites assez floues par la jurisprudence constitutionnelle »162.
108Dans d'autres cas, le juge ne peut participer à l'accord. Ainsi, en Angleterre, s'il n'y a pas d'obstacle juridique à la conclusion d'accords entre l’organe de poursuite et l'accusé, en revanche, le juge ne peut pas, en principe, y être impliqué. Dans l'arrêt Turner de 1970, qui est considéré comme un arrêt de principe, la cour d'appel rappelle qu'elle désapprouve les discussions entre la défense et le juge qui pourraient donner l'apparence que ce dernier a donné, quant à la peine, des garanties qui le lieraient, quelle que soit l'issue des faits163. Des décisions plus récentes vont dans le même sens164.
B. Un changement de rôle
109On rappellera notamment, à cet égard, que les procédures de transaction pénale et de transaction administrative ont confié respectivement au ministère public et à certains agents de l'administration un véritable pouvoir « juridictionnel », dans la mesure où le règlement du conflit se trouve, avec l'accord de l'auteur de l'infraction, assuré par ces organes plutôt que par un juge. L’importance du rôle confié au ministère public a particulièrement été soulignée, et critiquée par certains, lorsque les conditions proposées consistent dans l'exécution d'un travail d'intérêt général ou le fait de suivre une formation déterminée165. Dans le cas des transactions administratives, on peut encore mesurer l'importance du déplacement des rôles, selon que la loi prévoit l'intervention préalable ou non du ministère public. Ainsi, la loi du 30 juin 1971 relative aux amendes administratives en matière sociale prévoyait-elle une intervention préalable du ministère public par rapport à celle de l'administration dont l’action se trouvait, de ce fait, largement limitée par celle du ministère public. En revanche, la loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du commerce et sur l'information et la protection du consommateur a prévu que le procureur du Roi n'était informé de l’existence de l'infraction que lorsque le contrevenant n'a pas accepté la proposition de transaction dont les agents compétents ont préalablement pris l'initiative. Il est clair que la deuxième procédure déroge davantage que la première aux principes traditionnels. On rappellera enfin que la médiation, telle qu'elle est organisée par la loi du 10 février 1994, est réalisée par l'intermédiaire du ministère public lui-même166 qui, tout en exerçant « un rôle actif », « ne peut intervenir comme arbitre » et qui, tout en pouvant « viser à une conciliation », doit « adopter une attitude de stricte neutralité »167. Dans la mesure, cependant, où son intervention bénéficie de la collaboration de l'assistant de médiation avec lequel s'opère un partage des rôles au niveau de la réalisation concrète de la médiation, on a pu dire que la Belgique avait adopté un système « mixte », au sens où il se situerait « à un stade intermédiaire » entre le modèle d'une médiation « déléguée », où le parquet, tout en gardant la maîtrise du dossier, donne mandat à des professionnels de la médiation d'effectuer le travail de médiation proprement dit, et le modèle de médiation « retenue », où le travail de médiation est assuré exclusivement par le parquet lui-même168.
Conclusions
110Au terme de cette étude inévitablement fragmentaire qui nous a amenés à distinguer et illustrer différents modèles de justice pénale, il convient d'ébaucher, à titre de conclusions, quelques réflexions relatives aux transformations récentes qui ont affecté celle-ci.
111L’image actuelle de la justice pénale qui ressort de cette étude est loin d'être homogène et prend la forme, tantôt d'une justice hybride, tantôt d'une justice plurielle.
112L'hybridation de la justice pénale résulte de greffes successives — qui apparaissent également comme des résurgences d'espèces apparemment disparues — dont chacun de ses organes — police, ministère public, juridictions d'instruction et de jugement — a pu faire l'objet. Sur un modèle de justice imposée, qui constitue toujours l'idéal-type à partir duquel se pense la mise en oeuvre de la loi pénale, se sont greffées des formes diverses de participation active d’agents privés, l'exigence de plus en plus fréquente du consentement de certains d'entre eux et, dans des cas plus rares, le recours à des formes plus ou moins développées de négociation. En ce sens, l'imposition exclusivement autoritaire d'une décision et la négociation complète d'un accord constituent les « deux pôles » extrêmes entre lesquels se situent, sans doute, la plupart des formes concrètes de justice pénale169 qui tout en relevant, ne fût-ce qu'à un degré minime, de ce double processus illustrent davantage des modèles intermédiaires de justice participative et de justice consensuelle.
113Le caractère pluriel de la justice pénale170, par ailleurs, se manifeste dans la diversification croissante des modes de solution des conflits engendrés par la commission d'une infraction pénale, qui tantôt coexistent les uns avec les autres en s'appliquant à des types d’infraction différents, tantôt sont susceptibles de se substituer de manière alternative les uns aux autres, étant applicables à des types d'infraction identiques. Quelles que soient les perspectives novatrices ouvertes par certains de ces modes de solution des conflits, et en particulier ceux qui impliquent une part importante de négociation171, il convient, dès lors, de relativiser considérablement à la fois leur portée et la place concrète qu'ils occupent dans l'ensemble du système. Cette relativisation s'impose d'autant plus que, loin d’aboutir à la suppression des modes d'intervention traditionnels, ils sont généralement conçus en vue d'appréhender une « petite délinquance » qui échappe traditionnellement à ceux-ci, en faisant l'objet d'une politique massive de classement sans suite172. Si l'on peut voir, dès lors, idéalement, dans la justice négociée une forme de justice « alternative » par rapport à une justice « imposée », on ne peut ignorer qu'elle joue davantage, en réalité, le rôle d'une alternative par rapport à une absence radicale d'intervention, l'objectif poursuivi étant avant tout de « réactiver la réaction sociale » là où elle a tendance à s'affaiblir, en s'efforçant à la fois de la simplifier et de l'accélérer173. Nous ne sommes pas loin de la pensée d'un Durkheim pour lequel la fonction de la peine est essentiellement de nature symbolique, à savoir « maintenir intacte la cohésion sociale en maintenant toute sa vitalité à la conscience collective commune »174. Nous persistons à penser que la première voie de l'alternative, en matière pénale, réside dans le choix et le maintien des incriminations qui, elles, ne sont guère encore entrées dans l'ère de la négociation.
114Si la dimension sanctionnatrice des « alternatives » transparaît de manière latente, une des orientations que l'on pourrait tout au plus percevoir, à travers le dégradé des modèles de justice que nous avons observés et surtout ses formes intermédiaires de justice participative et consensuelle, serait un renforcement de la réaction sociale marqué par une certaine forme de privatisation du conflit pénal fondé sur une responsabilisation du sujet, auteur ou victime. Mais le rôle inchangé et même accru du ministère public, qui s'immisce dans tous les compartiments du jeu, contredit partiellement cette image, à moins qu’on ne puisse considérer qu’il la renforce par le rôle d’arbitre qu’il est de plus en plus appelé à jouer.
115C’est sous le bénéfice de ces clarifications, sans doute bien techniques, bien triviales, par rapport à des approches plus englobantes ou plus visionnaires de la justice pénale, mais qui nous ont néanmoins paru indispensables pour disposer d’une assise sérieuse et éviter le piège d’une certaine idéologie, que nous souhaiterions, dans une étape ultérieure de la recherche, analyser la nature, la portée et l’enjeu de ces questions qui sont aujourd'hui fréquemment suggérées dans le discours pénal, telles que celles de la déformalisation ou la procéduralisation du droit et qui évoquent, à des titres divers, les différents modèles de justice que nous avons tentés d'identifier dans le temps et dans l'espace du procès pénal.
Notes de bas de page
1 R. CASTEL, L'application de la loi : l'ordre des interactions et l'ordre des déterminations, in Acteur social et délinquance. Une grille de lecture du système de justice pénale. En hommage à Christian Debuyst, Liège-Bruxelles, 1990, p. 295.
2 Acteur social et délinquance, op.cit., chapitre III. La création de la loi, p. 145-253 ; Ph. ROBERT (sous la direction de), La création de la loi et ses acteurs. L'exemple du droit pénal, Onati, 1991.
3 La notion de justice « imposée » est notamment utilisée, pour l'opposer à la notion de justice « négociée », par Cl. AMIEL et A. GARAPON, Justice négociée et justice imposée dans le droit français de l'enfance, in Annales de Vaucresson, no 27, 1987, p. 17 et s. ; Y. DEZALAY, La justice négociée comme renégociation de la division du travail dans le champ du droit : l'exemple français, in Annales de Vaucresson, no 29, 1988, p. 142 ; D. MONDON, Justice imposée, justice négociée : les limites d'une opposition, l'exemple du parquet, in Droit et société, no 30-31, 1995, p. 349 et s.
4 Fr. TULKENS et M. van de KERCHOVE, Introduction au droit pénal. Aspects juridiques et criminologiques, Bruxelles, 2e éd., 1993, p. 354.
5 Cf. notamment P. ROUBIER, Droits subjectifs et situations juridiques, Paris, 1963, p. 309 où l'auteur rappelle que l'action pénale ne tend pas à la sanction de la violation d'un droit subjectif, mais à la sanction de la violation d'un devoir.
6 D. SALAS, Du procès pénal. Eléments pour une théorie interdisciplinaire du procès, Paris, 1992, p. 76.
7 Fr. TULKENS et M. van de KERCHOVE, op. cit., p. 372.
8 Voy. G.J.M. CORSTENS, Consensualiteit, in Delikt en Delinkwent, 1994, p. 8 et s. Nous tentons de distinguer ici davantage différents degrés de participation des particuliers au déroulement du procès pénal que ne l'ont fait d'autres travaux déjà publiés sur la question. Cf. notamment M. CHIAVARIO, La justice négociée : une problématique à construire, in Archives de politique criminelle, no 15, 1993, p. 29 où les termes de « justice négociée » et de « justice consensuelle » sont utilisés indifféremment ; Fr. TULKENS, La justice négociée, in M. DELMAS-MARTY (sous la direction de), Procédures pénales d'Europe, Paris, 1995, p. 55 et s., où les termes de « justice consensuelle », « justice contractuelle » et « justice négociée » sont utilisés comme synonymes. Par ailleurs, plusieurs études parlent de « consensualisme », en confondant l'intervention du consentement et l’existence d'une véritable négociation. En ce sens, cf. J. PRADEL, Le consensualisme en droit pénal comparé, in Estudo em homenagem ao Prof.Doctor Edouardo Correia, Boletin da Faculdade de direito de Coimbra, numéro spécial, 1988, p. 1 et s. ; J.-P. EKEU, Consensualisme et poursuite en droit pénal comparé, Paris, 1993, p. 2-3. D'autres, enfin, parlent, en termes généraux, d'une « contractualisation » du droit pénal. En ce sens, cf. notamment Ph. SALVAGE, Le consentement en droit pénal, in Rev. sc. crim., 1991, no 4, p. 699, 702 et 715.
9 M. FRANCHIMONT, A. JACOBS et A. MASSET, Manuel de procédure pénale, Liège, 1989, p. 33.
10 J. GITTLER, Expanding the role of the victim in a criminal action : an overview of issues and problems, in Pepperdine law review, vol. 11, 1984, p. 121.
11 R. JUY-BIRMAN, Le système allemand, in Procédures pénales d'Europe, op. cit., p. 76.
12 M. MERIGEAU, La victime et le système pénal allemand, in Rev. sc. crim., 1994, p. 56.
13 R. JUY-BIRMAN, Le système allemand, op. cit., p. 76-77 et 86.
14 A cet égard, cf. notamment P. NOURRISSON, De la participation des particuliers à la poursuite des crimes et des délits. Etude d'histoire et de législation comparée, Paris, 1894.
15 Cf. notamment P. NOURRISSON, op. cit., p. 21-33 ; F. HELIE, Traité de l'instruction criminelle, éd. augmentée par J.S.G. NYPELS et L. HANSSENS, t. I, Bruxelles, 1863, p. 6 et 195.
16 B. DELEUZE, Le système anglais, in Procédures pénales d'Europe, op. cit., p. 133.
17 M. FRANCHIMONT, A. JACOBS et A. MASSET, op. cit., p. 39.
18 F. HELIE, op. cit., p. 192 ; P. NOURRISSON, op. cit., p. 22 et 23.
19 P. DEVLIN, The criminal prosecution in England, Londres, 1958, p. 20 ; P.F. SMITH et S.H. BAILEY, The modem English legal System, Londres, 1984, p. 481.
20 B. DELEUZE, op. cit., p. 133.
21 Cf. notamment Ph. ROBERT et Cl. FAUGERON, Les forces cachées de la justice. La crise de la justice pénale, Paris, 1980, p. 33 ; S. BRAHY, Dénonciation officielle et dénonciation civique, in Rev. dr. pén. crim., 1978, p. 947 : « Le droit pénal repose, pour l'ensemble, sur la dénonciation ».
22 Tel est d'ailleurs l’un des arguments invoqués par ceux qui souhaiteraient renforcer le rôle de la victime dans le procès pénal. A cet égard, cf. notamment J. GITTLER, Expanding the role of the victim in a criminal action, op. cit., p. 145 : « it can be argued that the victim's role should be enlarged in order to increase his or her cooperation in the reporting of crimes and the prosecution of criminal offenders ».
23 M. CHIAVARIO, Les droits des personnes privées, in Procédures pénales d'Europe, op. cit., p. 465.
24 A cet égard, cf. notamment M. van de KERCHOVE, Fondement et limites du pouvoir discrétionnaire du ministère public : aux confins de la légalité, in Sociologie et sociétés, vol. XVIII, no 1, 1986, p. 94-96.
25 Cf. notamment J. van KERCKVOORDE, L'étude criminologique des décisions en matière pénale. Un modèle de recherche et son application, in Rev. dr. pén. crim., 1980, p. 827 et 834 ; G.J.Y. VERHEGGE, Beschouwingen bij het beleid van het openbaar ministerie. Rede uitgesproken op de plechtige openingszitting van het hof van beroep te Gent op 1 september 1982, in R.W., 1983, col. 1352.
26 R. JUY-BIRMAN, Le système allemand, op. cit., p. 86.
27 M. CHIAVARIO, Les droits des personnes privées, op. cit., p. 466.
28 M. FRANCHIMONT, A. JACOBS et A. MASSET, op. cit., p. 56.
29 Dans ce cas, les outrages pourront aussi être poursuivis sur la dénonciation de la Chambre dont le membre fait partie. Sur l'ensemble de cette matière, cf. Fr. HUTSEBAUT, Weerspannigheid, smaad en geweld tegen openbare gezagsdragers, in Bijzonder strafrecht voor rechtspractici, Leuven-Amersfoort, 1990, p. 120 et s.
30 Pour d'autres exemples en matière de droit pénal social, cf. H.-D. BOSLY, Les sanctions en droit pénal social, Bruxelles, 1979, p. 184 et s.
31 A. DE NAUW, Inleiding tot het bijzonder strafrecht, 2de volledig herwerkte uitgave, Deurne, 1992, p. 146, no 284.
32 M. CHIAVARIO, Les droits des personnes privées, op. cit., p. 465-466.
33 M. FRANCHIMONT, A. JACOBS et A. MASSET, op. cit., p. 146.
34 Cf. notamment J. de POULPIQUET, Le droit de mettre en mouvement l'action publique : conséquence de l'action civile ou droit autonome ?, in Rev. sc. crim., 1975, no 1, p. 37 et s.
35 A cet égard, cf. notamment M. van de KERCHOVE, L'intérêt à la répression et l'intérêt à la réparation dans le procès pénal, in Ph. GÉRARD, F. OST et M. van de KERCHOVE (sous la direction de), Droit et intérêt, vol.3, Bruxelles, 1990, p. 89 et s. ; R. MERLE, La distinction entre le droit de se constituer partie civile et le droit d'obtenir réparation du dommage causé par l'infraction (consolidation, mise au point ou fluctuations ?), in Droit pénal contemporain. Mélanges en l'honneur d'André Vitu, Paris, 1989, p. 389 : « Si le législateur autorise la personne lésée par l'infraction à s'immiscer dans le procès répressif, c'est pour lui permettre d'y exercer des prérogatives pénales, un véritable pouvoir de poursuite distinct des droits ordinaires attachés à l'action civile ».
36 M. FRANCHIMONT, A. JACOBS et A. MASSET, op. cit., p. 153.
37 J. GRANIER, Quelques réflexions sur l'action civile, in J.C.P., 1957, I, 1386, no 3.
38 J. VIDAL, Observations sur la nature juridique de l'action civile, in Rev. sc. crim., 1963, no 3, p. 484.
39 F. HELIE, op. cit., p. 225.
40 F. BOULAN, Le double visage de l'action civile exercée devant la juridiction répressive, in J. C.P., 1973, I, 2563 ; J. LARGUIER, Action individuelle et intérêt général (Quelques réflexions sur le juge pénal et l'action civile), in Problèmes contemporains de procédure pénale. Recueil d'hommage à M. Louis Hugueney, Paris, 1964, p. 89.
41 M. FRANCHIMONT, A. JACOBS et A. MASSET, op. cit., p. 72.
42 M. van de KERCHOVE, Médiation pénale et travaux d'intérêt général. Réflexions et commentaires relatifs aux lois du 10 février 1994, in J.T., 1995, p. 61.
43 D. MONDON, Justice imposée, justice négociée : les limites d'une opposition, l'exemple du parquet, in Droit et société, no 30-31, 1995, p. 352.
44 Rapport au Roi, in Pasin., 1935, p. 5.
45 Sur la transaction pénale en droit belge, cf. notamment P. de CANT, La procédure « transactionnelle » en droit pénal belge, in Rev. int. dr. pén., t. 33, 1962, p. 432 ; J. MESSINNE, La nature juridique de la transaction en matière répressive, Note sous Bruxelles, 22 janvier 1970, in R.C.J.B., 1972, p. 56 et s. ; H.-D. BOSLY, Les transactions en matière pénale, Bruxelles, 1985 ; F. CLOSE, La transaction en matière pénale, in Rev. dr. pén. crim., 1986, p. 47 et s. Sur la loi du 28 juin 1984, cf. H.-D. BOSLY, Un projet de loi étendant considérablement le champ d’application de la « transaction » en matière pénale, in J.T., 1983, p. 27 et s. Sur la loi du 10 février 1994, cf. M. van de KERCHOVE, Médiation pénale et travaux d'intérêt général. Réflexions et commentaires relatifs aux lois du 10 février 1994, in J.T., 1995, p. 63 et 64. Sur la transaction pénale en droit français, cf. notamment M. BOITARD, La transaction pénale en droit français, in Rev. sc. crim., 1941, p. 149 et s. ; J.-F. DUPRE, La transaction en matière pénale, Paris, 1977.
46 M. FRANCHIMONT, A. JACOBS et A. MASSET, op. cit., p. 73.
47 C. CAMBIER, Droit judiciaire civil, Bruxelles, 1972-1973, p. 314, note 49.
48 En ce sens, cf. notamment A. BRAAS, Précis de procédure pénale, 3e éd., t. I, Bruxelles-Liège, 1952, no 169 ; J.-F. DUPRE, op. cit., p. 184-185.
49 J. DE GAVRE, Le contrat de transaction en droit civil et en droit judiciaire privé, Bruxelles, 1967, cité par J. MESSINNE, op. cit., p. 68.
50 C. CAMBIER, op. cit., p. 314.
51 Cf. notamment H.-D. BOSLY, Les transactions en matière pénale, op.cit., p. 23 et s. ; A. DE NAUW, Les métamorphoses administratives du droit pénal de l'entreprise, Gand, 1994, p. 90 et s.
52 Cf. notamment A. SUPIOT, Recherche sur l'application des textes relatifs à la pollution de l'eau d'origine industrielle, in La semaine juridique, 1975, I, 2692, no 12. Cf. également E. SERVERIN, P. LASCOUMES et Th. LAMBERT, Transactions et pratiques transactionnelles. Sujets et objets des transactions dans les relations conflictuelles de droit privé et de droit public, Paris, 1987, p. 173 et s., où les auteurs analysent l'activité transactionnelle comme « espace de négociation ».
53 On remarquera cependant que le caractère secret des procédures transactionnelles ne permet pas de contrôler l'existence éventuelle d'« opérations qui les précèdent, notamment... des négociations et des démarches entreprises dans l'ombre » (A. DE NAUW, op. cit., p. 96).
54 J. LIGOT, La sanction administrative en droit belge, in R.J.D.A., 1972, p. 247-248.
55 A. DE NAUW, op. cit., p. 113.
56 Ibidem, p. 114.
57 M. DELMAS-MARTY et C. TEITGEN-COLLY, Punir sans juger ? De la répression administrative au droit administratif pénal, Paris, 1992.
58 A. DE NAUW, op. cit., p. 53 et s.
59 Arrêt Deweer du 27 février 1980, série A, no 35, p. 25-26.
60 A cet égard, cf. notamment M. van de KERCHOVE, Médiation pénale et travaux d'intérêt général, op. cit., p. 61 et s.
61 Exposé des motifs précédant le projet de loi du 17 février 1993 organisant une procédure de médiation pénale, déposé par le Ministre de la Justice, Melchior Wathelet, Doc. parl., Sénat, 1992-1993, no 652/1, p. 4.
62 Ibidem.
63 Ibidem, p. 7.
64 A ce sujet, cf. M. van de KERCHOVE, Médiation pénale et travaux d'intérêt général, op. cit., p. 64 ; L. COLLIN et al., Médiation pénale. Rapport national. Période du 1.11.94 au 21.3.95, Bruxelles, 31 mai 1995 (ronéo).
65 M. CHIAVARIO, Les droits des personnes privées, op. cit., p. 483.
66 Ibid.
67 Ibid.
68 Voy. H.D. BOSLY, D'une procédure unilatérale vers une procédure contradictoire. Propos pour une réforme de l'instruction préparatoire, in Mélanges offerts à Robert Legros, Bruxelles, 1985, p. 13 et s.
69 Commission pour le droit de la procédure pénale, Avant-projet de loi relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction remanié après consultations, Liège, 1995, p. 17-18.
70 Voy. infra, Section 3. L’identité des intervenants et les phases du procès, § 1er. L'auteur.
71 Corr. Namur (ch. cons.), 16 juin 1992, J.T., 1993, p. 72.
72 M. van de KERCHOVE, La preuve en matière pénale dans la jurisprudence de la Cour et de la Commission européenne des droits de l'homme, in Rev. sc. crim., 1992, no 1, p. 1 et s.
73 M. FRANCHIMONT, A. JACOBS et A. MASSET, op. cit., p. 800.
74 R. DECLERQ, La preuve en matière pénale, Bruxelles, 1988 ; Ph. TRAEST, Het bewijs in strafzaken, Gent, 1992.
75 M. FRANCHIMONT, A. JACOBS et A. MASSET, op. cit., p. 808.
76 Arrêt Asch c. Autriche du 26 avril 1991, série A, no 203, § 25.
77 Fr. TULKENS, Chronique des droits de l'homme 1992, in Rev. int. dr. pénal, 1993, 3-4 bis. En Belgique, la jurisprudence ne reconnaît toutefois pas ce droit au stade de l'instruction.
78 Série A, no 261-C.
79 Série A, no 256.
80 M. CHIAVARIO, Aperçus sur la procédure d'audience en Italie entre réforme et « post-réforme », in Rev. sc. crim., 1994, p. 208.
81 J. MESSINNE, op. cit., p. 79.
82 Cf. notamment Bruxelles, 22 janvier 1970, R.C.J.B., 1972, p. 54 et J. MESSINNE, op. cit., p. 57 et 77.
83 J. MESSINNE, op. cit., p. 77.
84 Rapport fait au nom de la Commission de la Justice par M. ERDMAN, Doc. parl., Sénat, 1992-1993, no 652/2, p. 48.
85 Sur l'histoire du plea bargaining aux U.S.A. et en Angleterre, cf. Fr. TULKENS, Le rôle et les limites de la fonction juridictionnelle dans la justice pénale aux Etats-Unis, in Fonction de juger et pouvoir judiciaire. Transformations et déplacements, Bruxelles, 1983, p. 502 et s. et les références citées ; B. DE SMET, De versnelling van de rechtspleging met instemming van de verdachte. Is de invoering van een « guilty plea » naar Angelsaksich model wenselijk ?, in Panopticon, 1994, p. 422-423.
86 R.E. SCOTT et W.J. STUNTZ, Plea bargaining as contract, in Yale Law Review, 1992, p. 1959.
87 B. DE SMET, De versnelling van de rechtspleging met instemming van de verdachte. Is de invoering van een "guilty plea" naar Angelsaksich model wenselijk ?, op. cit., p. 424.
88 Conseil des Ministres du Conseil de l'Europe, Recommandation R (87) 18 du 17 septembre 1987, Exposé des motifs, p. 33.
89 B. DE SMET, De versnelling van de rechtspleging met instemming van de verdachte. Is de invoering van een « guilty plea » naar Angelsaksich model wenselijk ?, op. cit., p. 421.
90 M. CHIAVARIO, La justice négociée : une problématique à construire, op. cit., p. 28.
91 H.H. KÜHNE, Germany, in C. VAN DEN WYNGAERT (ed.), Criminal Procedure Systems in the European Community, London, Butterworths, 1993, p. 145.
92 B. SCGÜNEMANN, Absprachen im Strafverfahren, in Deutscher Juristentag Gutachten, 1990.
93 H. JUNG, Le procès pénal en République fédérale d'Allemagne, in Procès pénal et droits de l'homme. Vers une conscience européenne, op. cit., p. 114.
94 H.H. KÜHNE, Germany, in C. VAN DEN WYNGAERT (ed.), Criminal Procedure Systems in the European Community, op. cit., p. 157.
95 Bundesverfassungsgericht, 27 janvier 1987, Neue Zeitschrift fur Strafrecht, 1987, p. 419.
96 Bundesgerichtshof, 7 juin 1989, NStz, 1989, p. 438 ; Bundesgerichtshof, 4 juillet 1990, Neue Juristiche Wochenschrift, 1990, p. 3030.
97 A.T.H. SMITH, England and Wales, in C. VAN DEN WYNGAERT (ed.), Criminal Procedure Systems in the European Community, op. cit., p. 92.
98 Sur les avantages et les inconvénients du plea bargaining par rapport aux divers acteurs du procès pénal, voy. A. ASHWORTH, The criminal process. An évaluative study, Oxford, 1994, p. 262 et s.
99 M. CHIAVARIO, La justice négociée : une problématique à construire, op. cit., p. 28.
100 J. BALDWIN et M. McCONVILLE, Negotiated Justice, op. cit.
101 Cf. Fr. TULKENS, La justice négociée, in Procédures pénales d'Europe, op. cit., p. 568 et s.
102 R. HOOD, Race and Sentencing, Londres, 1992, p. 125.
103 Commission justice pénale et droits de l'homme, La mise en état des affaires pénales. Rapports, Paris, La documentation française, 1991, p. 67.
104 Ibid., p. 158 ; voy. aussi, p. 119.
105 Ibid., p. 159-160.
106 A cet égard, cf. notamment P. LASCOUMES, P. PONCELA et P. LENOEL, Au nom de l'ordre. Une histoire politique du Code pénal, Paris, 1989, p. 72.
107 A. PERRODET, La participation du délinquant au processus pénal (Angleterre, France, Italie), Paris, 1991-92, p. 70 ; Ph. SALVAGE, Le consentement en droit pénal, op. cit., p. 713.
108 R. ROTH, Profils juridique et pénologique de la libération conditionnelle, in La libération conditionnelle : risque ou chance ? La pratique en 1990 dans les cantons romands, Genève, 1994, p. 22.
109 Cass., 4 janvier 1989, Rev. dr. pén. crim., 1989, p. 426.
110 M.C. BASLER-PIERSON, La probation en Belgique, Bruxelles, 1980, p. 58-59.
111 Exposé des motifs précédant le projet de loi du 17 février 1993 modifiant la loi du 29 juin 1964 concernant la suspension, le sursis et la probation, déposé par le Ministre de la Justice, M. Melchior Wathelet, Doc. pari, Sénat, 1992-1993, no 653/1, p. 10.
112 Ph. SALVAGE, Le consentement en droit pénal, op. cit., p. 712-713.
113 Cf. notamment J. PRADEL, Le travail d'intérêt général en Europe occidentale. Aperçus comparatifs, in Revue pénitentiaire et de droit pénal, no 3, juillet-septembre 1986, p. 114 et s. ; R. SCREVENS, Le travail d’intérêt général, sanction pénale, in Rev. dr. pén. crim., 1992, p. 5 et s.
114 J. PRADEL, ibidem, p. 151-154 ; R. SCREVENS, ibidem, p. 8.
115 A. PERRODET, op. cit., p. 75.
116 Cf. notamment Bruxelles, 22 janvier 1970, R.C.J.B., 1972, p. 54 : « le payement effectué ne peut être assimilé à une condamnation ».
117 A. FETTWEIS, Procédure sommaire en matière répressive. Transaction sur l'action publique ou condamnation sans débats, in Ann. Fac. dr. Liège, 1958, p. 357.
118 En ce sens, cf. notamment J. MESSINNE, op. cit., p. 64 ; J.-F. DUPRE, op. cit., p. 183.
119 The Royal Commission on Criminal Justice, Report, Her Majesty's Stationery Office, July 1993, p. 110-114, no 41 à 58.
120 Ibid., p. 113, no 51.
121 A. ASHWORTH, The Royal Commission on Criminal Justice. Plea, Venue and Discontinuance, in Crim. L. Rev., 1993, p. 830 et s. ; Negotiated Justice. A closer look at the implications of plea bargains, in Justice, London, 1993.
122 Sur la réforme de la procédure pénale en Italie, cf. M. CHIAVARIO, La riforma del processo penale, 2ème éd., Turin, 1990 ; G.D. PISAPIA, Le nouveau code de procédure pénale italien, in Archives de politique criminelle, no 13, 1991, p. 115 et s. ; P. TONINI et S. COLIZZI, Le nouveau code de procédure pénale italien, in Rev. sc. crim., 1989, p. 206 et s. ; J.J. MILLER, Plea bargaining and its analogous under the New Italian Criminal Procedure Code and the United States, in NYU Journal of International Law and Politics, 1990.
123 M. CHIAVARIO, La justice négociée : une problématique à construire, op. cit., p. 29.
124 Ce principe est consacré par l'article 112 de la Constitution. M. Chiavario observe que le Cour constitutionnelle n'a pas, jusqu'à présent, estimé que la justice consensuelle était incompatible avec ce principe.
125 M. CHIAVARIO, Le procès pénal en Italie, in Procès pénal et droits de l'homme. Vers une conscience européenne, op. cit., p. 81-82.
126 Il s'agit d’une restriction raisonnable imposée par la Cour constitutionnelle. Voy. P. CORSO, Italy, in C. VAN DEN WYNGAERT (ed.), Criminal Procedure Systems in the European Community, op. cit., p. 252-253.
127 M. CHIAVARIO, Le procès pénal en Italie, in Procès pénal et droits de l’homme. Vers une conscience européenne, op. cit., p. 82.
128 Ibid.
129 B. DELEUZE, Le système anglais, in Procédures pénales d'Europe, op. cit., p. 168.
130 R. v. Croydon Justices, ex parte Dean, 19 février 1993, Crim. L. Rev., 1993, p. 759-761, Commentary.
131 Ainsi, par exemple, la Cour de cassation n'étend pas au stade de l'instruction le droit d'interroger ou de faire interroger les témoins.
132 Commission pour le droit de la procédure pénale, Rapport de la commission, Liège, 1994, p. 48 et s.
133 Ibid., p. 49.
134 Ibid..
135 Commission pour le droit de la procédure pénale, Avant-projet de loi relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction remanié après consultations, Liège, 1995, p. 17-18.
136 Commission pour le droit de la procédure pénale, Rapport de la commission, op. cit., p. 50.
137 Commission pour le droit de la procédure pénale, Avant-projet de loi relative à l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de l'instruction remanié après consultations, op. cit., p. 22.
138 Ibid., p. 21.
139 Ibid., p. 25.
140 G. BLANC, La médiation pénale, in La Semaine juridique, 1994, I, no 3760, p. 211-215.
141 M. DELMAS-MARTY, Le flou du droit, Paris, 1993, p. 259.
142 B. DELEUZE, Le système anglais, in Procédures pénales d'Europe, op. cit., p. 168-169.
143 Comme nous avons pris le parti de ne pas aborder la criminalisation primaire mais de nous limiter à la criminalisation secondaire, nous n'abordons pas la question de la qualité de la victime comme condition d'existence ou circonstance aggravante de certaines infractions (cf. Fr. TULKENS et M. van de KERCHOVE, Introduction au droit pénal. Aspects juridiques et criminologiques, op. cit., p. 222 et 326).
144 J. GITTLER, Expanding the Role of the Victim in a Criminal Action, op. cit., p. 163 et s. ; J. SHAPLAND, J. WILMORE et P. DUFF, Victims in the Criminal System, Londres, 1985.
145 M. CHIAVARIO, La justice négociée : une problématique à construire, op. cit, p. 27, note 1.
146 Fr. TULKENS et M. van de KERCHOVE, Introduction au droit pénal. Aspects juridiques et crminologiques, op. cit., p. 108 et les références citées à la note 18.
147 A ce sujet, cf. notamment M. van de KERCHOVE, L’intérêt à la répression et l'intérêt à la réparation dans le procès pénal, op. cit., p. 98-108.
148 A ce sujet, cf. notamment O. KUHNMUCH, La défense des intérêts collectifs et l'éclatement des poursuites, in Archives de politique criminelle, no 10, 1988, p. 35 et s. ; Ph. ROBERT, L'action des groupements. Des stratégies évolutives, in Archives de politique criminelle, no 10, 1988, p. 59 et s.
149 M. FRANCHIMONT, A. JACOBS et A. MASSET, op. cit., p. 143.
150 F. BOULAN, Le double visage de l'action civile exercée devant la juridiction répressive, in J.C.P., 1973, I, 2563, no 32.
151 J. VAN COMPERNOLLE, Quelques réflexions sur l'action civile d'intérêt collectif : à propos de deux arrêts récents de la Cour de cassation, in Revue pratique des sociétés, t. LXXXIII, 1984, p. 17.
152 A cet égard, cf. notamment S. ROJARE, Une politique participative : l'exemple de la participation des associations à la variante de médiation, in Archives de politique criminelle, no 11, 1989, p. 107 et s.
153 A ce sujet, cf. notamment Ch. LAZERGES, Essai de classification des procédures de médiation, in Archives de politique criminelle, no 14, 1992, p. 22-22-27 ; J.-P. BONAFE-SCHMITT, La médiation : une autre justice, Paris, 1992, p. 103 et s.
154 Ch. LAZERGES, op. cit., p. 22.
155 J.-P. BONAFE-SCHMITT, op. cit., p. 134.
156 Rapport fait au nom de la Commission de la Justice par M. ERDMAN, loc. cit., p. 19.
157 A ce sujet, cf. notamment M.L. LOPEZ, Le redéploiement et le transfert de la contrainte sociale, du public au privé, dans le traitement des déviants, in Rev. dr. pén. crim., 1979, p. 635 et s.
158 En ce qui concerne ces ceux types de mesure, on rappellera qu'aux termes de l'article 1 bis de la loi du 29 juin 1964 concernant la suspension, le sursis et la probation, ces travaux d'intérêt général peuvent être exécutés et ces formations peuvent être suivies, non seulement « auprès des services publics de l’Etat, des communes, des provinces, des Communautés et des Régions », mais aussi « auprès d'associations sans but lucratif ou de fondations à but social, scientifique ou culturel ». Les associations et fondations visées sont définies par l'article 7 de l'arrêté royal du 6 octobre 1994 portant les mesures d’exécution concernant les travaux d'intérêt général et la formation.
159 J. PRADEL, Le consensualisme en droit pénal comparé, op. cit., p. 12.
160 J. HERRMAN, Diversion and Mediation in Federal Republic of Germany, in Rev. int. dr. pén., 1983, p. 1049.
161 H. JUNG, Le procès pénal en République fédérale d'Allemagne, in Procès pénal et droits de l'homme, op. cit., p. 112.
162 K. TIEDEMAN, Les mouvements de réforme de la procédure pénale et la protection des droits de l'homme. Rapport général, in Rev. int. dr. pén., 1993, p. 822.
163 Turner (1970), 2 Q.B. 321.
164 R. v. Smith (1990), 1 All. E. R., 634 (la cour d'appel estime que les rencontres dans le bureau du juge devraient être rares et limitées au strict nécessaire) ; R. v. Keily (1990), Crim. L. Rev., p. 204.
165 Rapport fait au nom de la Commission de la Justice par M. ERDMAN, op. cit., p. 19 : « La nouvelle procédure a été critiquée à diverses reprises parce que le procureur du Roi prendrait la place du juge. On lui donne, en effet, le pouvoir de prendre des mesures qui peuvent être considérées comme une peine (par exemple, le fait d'imposer un travail d'intérêt général) ».
166 Dans la mesure où le ministère public est partie au procès et est, au moins indirectement, intéressé à l'indemnisation de la victime, dont dépend l’extinction de sa propre action, certains préfèrent voir dans ce type de procédure une « conciliation » plutôt qu'une véritable « médiation » qui suppose l'intervention d’un tiers par rapport aux parties au procès. En ce sens, cf. notamment J.-F. BONAFE-SCHMITT, op. cit., p. 107.
167 Ibidem, p. 33.
168 G. DEMANET, La médiation dans les affaires pénales. Discours prononcé à l'audience solennelle de rentrée de la Cour d'appel de Mons du 1er septembre 1995, p. 46-47.
169 En ce sens, cf. notamment D. MONDON, Justice imposée, justice négociée, op. cit., p. 350.
170 En ce sens, cf. notamment Cl. AMIEL et A. GARAPON, Justice négociée et justice imposée dans le droit français de l'enfance, op. cit., p. 38 où les auteurs parlent de « pluralisme judiciaire ». Il convient cependant de préciser que ce pluralisme, comme on l'a vu, déborde largement le cadre judiciaire proprement dit.
171 A cet égard, cf. notamment J. LENOBLE, Droit et communication. La transformation du droit contemporain, Paris, 1994, p. 20 et s. ; J. DE MUNCK, Le pluralisme des modèles de justice, in A. GARAPON et D. SALAS (sous la direction de), La justice des mineurs. Evolution d'un modèle, Bruxelles-Paris, 1995, p. 107 et s.
172 Cf. notamment J. FAGET, La double vie de la médiation, in Droit et société, no 29, 1995, p. 31.
173 A cet égard, cf. notamment M. van de KERCHOVE, Médiation pénale et travaux d'intérêt général, op. cit., p. 62 ; Médiation et conciliation en droit pénal, in Le contentieux interdisciplinaire (à paraître).
174 E. DURKHEIM, De la division du travail social, 9e éd., Paris, P.U.F., 1973, p. 76.
Auteurs
Juriste et criminologue, professeur ordinaire à l'Université catholique de Louvain
Recteur honoraire et professeur émérite des Facultés universitaires Saint-Louis, Michel Van de Kerchove y a notamment enseigné le droit pénal pendant plus de vingt ans. Coprésident du Séminaire interdisciplinaire d'études juridiques, il a consacré la plupart de ses recherches à une approche critique et interdisciplinaire du droit en général et du droit pénal en particulier. Docteur honoris causa de l'Université de Genève, il a également été professeur au Centre universitaire de Luxembourg et à la Katholieke Universiteit Brussel. Outre de nombreux articles, traductions et directions d'ouvrages, il a publié Le droit sans peines. Aspects de la dépénalisation en Belgique et aux États-Unis (1987), Quand dire, c'est punir. Essai sur le jugement pénal (2005) et Chronique de droit pénal. 2001-2005 (2006). Il a également publié avec Françoise Tulkens Introduction au droit pénal (1991 ; 8e éd., 2007) et Chronique de droit pénal. 1992-1995 (1997) ; avec Yves Cartuyvels Chronique de droit pénal. 1996-2000 (2002) ; et avec François Ost Bonnes mœurs, discours pénal et rationalité juridique (1981), Jalons pour une théorie critique du droit (1987 ; trad, espagnole, 2001)), Le système juridique entre ordre et désordre (1988 ; trad, anglaise, 1994 ; trad, espagnole, 1997), Entre la lettre et l'esprit (1989), Le droit ou les paradoxes du jeu (1992 ; trad, italienne, 1995), De la pyramide au réseau ? Pour une dialectique du droit (2002).
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