1 Le Code civil comprend plus de quarante occurrences de ce concept dans des hypothèses diverses. Relevons ainsi que le concept d'usage intervient, par exemple, dans la définition du droit de propriété (article 544), dans la définition des prérogatives des copropriétaires (article 577 bis, § 5), dans l’exposé du régime de l'usufruit et du droit d'usage (articles 590 et suivants, 625 et suivants), dans le régime des servitudes (articles 637, 643, 644, 686, 688...) ou celui des choses communes (article 714). Le régime contractuel recourt également à ce concept en précisant qu'il peut être l'objet d'un contrat (article 1127), qu'il intervient dans les obligations de délivrance et de garantie pour vice caché du vendeur (articles 1615 et 1641), dans les obligations d'entretien et de garantie pour vice caché du bailleur (articles 719, 721), dans les obligations de jouissance du locataire (articles 1728,1729), dans la définition de la société particulière des apports (articles 1841 et 1851) ou le régime du prêt à usage (articles 1874 et suivants) et du prêt de consommation (article 1892).
2 Lexique des termes juridiques, Dalloz, v° « Usage ».
3 M. REMOND-GOUILLOUD, Du droit de détruire - Essai sur le droit de l'environnement, P.U.F., 1989, p. 128.
4 De surcroît, comme « l'habitation est, somme toute, la petite soeur de l'usage qui n'est lui-même que le petit frère de l’usufruit », les règles inhérentes à celui-ci sont applicables aux deux premières institutions sauf dérogation expresse (J. HANSENNE, Chronique de jurisprudence (1982-1988) : les biens, in R.C.J.B., 1990, p. 443, no 91).
5 PAUL, Digest, 7.1, de usufructu 1.
6 F. ZENATI, Pour une rénovation de la thérorie de la propriété, in R.T.D. civ., 1993, p. 305.
7 R. DEKKERS, Précis de droit civil belge, Bruxelles, Bruylant, 1954, no 1186.
8 Comme nous l'avons déjà relevé, la définition du Code civil (article 578) ne met pas en évidence cette caractéristique de l'usufruit. Le Code civil précise cependant clairement les deux modes principaux par lesquels l'usufruit prend normalement fin : la mort de l'usufruitier ou l'expiration du terme (article 617, al. 2 et 3). Le caractère temporaire de l'usufruit est classiquement lié à la perception du commerce juridique inhérent au Code civil : « L'usufruit désorganise l'exploitation des biens. Il crée une situation désavantageuse au point de vue économique, en paralysant et l'usufruitier, qui ne peut jouir et exploiter librement, et le nu-propriétaire, qui ne peut plus exploiter du tout » (H. DE PAGE et R. DEKKERS, Traité élémentaire de droit civil, t. III, no 195, 3°). Cette justification classique n'est que partielle. Elle permet de rendre compte du caractère temporaire de l'usufruit, d'exclure l'usufruit perpétuel mais non point de fonder son caractère viager. Le fondement de ce caractère viager est lié à la finalité même de l'institution et en particulier à son origine alimentaire. L'usufruit est toujours institué dans l'intérêt personnel de son bénéficiaire. Son utilité disparaît dès lors avec la mort de celui-ci.
9 En ce qui concerne « l'usufruit qui n'est pas accordé à des particuliers », l'article 619 du Code civil précise que celui-ci « ne dure que trente ans ».
10 Il convient de ne pas confondre cette aliénation avec la cession du droit d'usufruit.
11 F. ZANETI, Les biens, P.U.F., 1988, p. 319.
12 Idem, p.46.
13 Nous examinerons plus loin le régime spécifique des « choses dont on ne peut faire usage sans les consommer » ou « qui se détériorent peu à peu par l’usage ».
14 POTHIER, Oeuvres, t. VIIII, p. 103.
15 Ibidem ; la conversion « en pire — de la terre labourable à la friche — emporte également la violation d'exercer ses droits en bon père de famille.
16 Dans la logique économique de l'usufruit, le respect de la destination n'exclut cependant pas un mode d'exploitation conforme à l'usage des lieux.
17 Précisons qu'en aucune manière la référence à un usage irrationnel ou une gestion négligente du propriétaire antérieur ne permet d'exonérer l'usufruitier de ses obligations propres. Il se voit ainsi astreint à une prudence qui ne s'impose pas au propriétaire lui-même...
18 H. DE PAGE et R. DEKKERS, op. cit., no 333.
19 Les Pandectes belges, t. 129, v° « Usufruit et Usages (en général) », Bruxelles, Larcier, 1936, no 2382 sq. ; Répertoire pratique de droit belge, v° « Usufruit », Bruxelles, Bruylant, 1961, no 559, cité par la suite R.P.D.B.
20 H. DE PAGE et R. DEKKERS, op. cit., p. 337.
21 A. RIEG, v° « Usufruit », Jurisclasseur de droit civil, Dalloz, p. 342.
22 Cass, (fr.), 10 juillet 1963, Rev. Not., 1964, p. 305.
23 Cass., 22 janvier 1970, Pas., 1970, I, 428. La disparition par cas fortuit n'implique cependant pas la responsabilité de 1'usufruitier (cf. les articles 607, 615 et 616 du Code civil).
24 A. WEILL, Fr. TERRE et Ph. SIMLER, Droit civil - les biens, Précis Dalloz, 1985, no 757.
25 Cass. (fr.), 21 mai 1930, J.T., 1930, p. 748.
26 L'usufruitier dispose incontestablement du droit d'exercer les actions qui garantissent l'existence de son droit (action confessoire d'usufruit, action confessoire et négatoire de servitude...) et son exercice (action possessoire, action en responsabilité pour trouble de voisinage,... cf. J. HANSENNE, Chronique de jurisprudence (1960-1964) : les biens, in R.C.J.B., 1966, p. 330, no 77). Traditionnellement, on estime qu'il ne dispose que des actions tendant à la préservation de ses droits et non celles relatives aux prérogatives du propriétaire. Certes, la protection de sa jouissance emportera généralement celle des droits du nu-propriétaire, mais en l'absence de trouble à sa propre jouissance, l'usufruitier n'aurait d'autre droit et d'autre devoir que de dénoncer au nu-propriétaire les atteintes aux prérogatives de ce dernier (article 614).
27 A. RIEG, v° « Usufruit », Jurisclasseur de droit civil, no 117. Cf. « Une récolte est un fruit, car la terre peut la fournir sans perdre de sa force productive ; mais la houille, en principe, n'est pas un fruit car son extraction épuise la terre (...). C'est dans ce sens que la notion des fruits s'encadre dans celle de l'usufruit, le droit de jouir des choses à la charge d'en conserver la substance (article 578). » (H. DE PAGE et R. DEKKERS, op. cit., no 270).
28 En droit romain, le quasi-usufruit s'effectuait par une translation de propriété accompagnée d'une promesse à terme de restitution (F. GIRARD, Manuel de droit romain, Paris, E. Duchemin, 1978, p. 390). L'usufruitier devenait propriétaire des biens consomptibles affectés à l'usufruit. Nonobstant le fait que sur ce point, les rédacteurs du Code civil ont suivi les thèses de DOMAT et de POTHIER qui abondaient dans la solution romaniste, le texte de l'article 587 ne parle ni de translation de propriété ni même de quasi-usufruit. Au contraire, l'article 587 qualifie expressément les droits de l'usager-consommateur comme un droit d'usufruit. Il est vrai que l'on peut dire que le quasi-usufruit « équivaut au droit de propriété » (Pandectes, op. cit., no 944), que l'usufruitier « devient pratiquement propriétaire » (H. DE PAGE et R. DEKKERS, op. cit., p. 276) dans la mesure où il a l’avantage de pouvoir disposer des choses consomptibles et qu'il en supporte les risques — c'est-à-dire la perte par cas fortuit — comme le propriétaire lui-même. Mais en réalité, cette situation n'est pas le but poursuivi par les parties — constituer un usufruit. Et l'on retrouve la spécificité de celui-ci dans les obligations du (quasi)-usufruitier : l'obligation de restituer l'équivalent et l'obligation de jouissance en bon père de famille.
29 Comparer avec la modification de l'article 587 du Code civil français par la loi no 60-464 du 17 mai 1960 (Dalloz, 1960, 194) qui précise que l'usufruitier rend « soit des choses de même quantité et qualité, soit leur valeur estimée à la date de la restitution ». Dans cette nouvelle version, l'article 587 est généralement interprété comme ouvrant à l'usufruitier l'option entre restituer l'équivalent en nature ou en valeur (A. WEILL, Fr. TERRE et Ph. SIMLER, op. cit., no 782 ; contra H. MAZEAUD et L. CHABAS, Leçon de droit civil, Montchrestien, t. 2, vol. 2, no 1683, qui subordonne l'option à une autorisation inscrite dans l'acte constitutif).
30 H. DE PAGE et R. DEKKERS, op. cit., no 440 ; contra R.P.D.B., no 861.
31 R. DEKKERS, op. cit., no 1252.
32 H. DE PAGE et R. DEKKERS, op. cit., no 341.
33 « L'usufruitier doit s'abstenir... de tout acte qui diminuerait pour l'avenir la force productive de la chose soumise à l'usufruit » (Namur, 9 mars 1931, J. Liège, 1931, p. 133).
34 Pandectes, no 1011 ; R.P.D.B., no 205.
35 Pandectes, no 2485 ; R.P.D.B., no 209 et 820.
36 Pandectes, no 2485 à 2495.
37 Pandectes, no 1448 ; R.P.D.B., no 320.
38 A. RIEG, op. cit., no 255.
39 D. FIORINA, L'usufruit d'un portefeuille de valeurs mobilières, in R.T.D. civ., 1995, p. 43 sq.
40 H. DE PAGE et R. DEKKERS, op. cit., no 306. C'est sans doute ces auteurs qui insistent le plus lourdement sur cette distinction (cfr. encore no 308, 324, 341,...) ; cf. R. DEKKERS, op. cit., no 1227.
41 C'est pour cette raison que la même doctrine répond par la négative à l'obligation d'assurer les biens grevés d’usufruit. « L'usufruitier a-t-il intérêt à assurer les biens grevés d'usufruit ? Oui, mais uniquement dans la mesure de son droit de jouissance, et aussi pour couvrir sa responsabilité en cas de restitution défectueuse. Assurance personnelle, on le voit, utile sans doute, mais non obligatoire. Si l'usufruit s'assure contre les pertes dues non seulement à sa faute mais aussi à des cas fortuits, il dépasse le cadre de son assurance personnelle, il assure l'intérêt du nu-propriétaire. Pareille assurance n'est pas davantage obligatoire. En effet, l'usufruitier n'est pas le mandataire du nu-propriétaire ; il ne doit, ni s'ériger en gérant d'affaire, ni stipuler pour autrui. L'usufruitier ne sera tenu d'assurer l'intérêt du nu-propriétaire, c'est-à-dire la perte par cas fortuit, que si l'acte constitutif le lui impose » (H. DE PAGE et R. DEKKERS, no 340 ; R.P.D.B., no 576 sq. ; cf. également H. MAZEAUD et L. CHABAS, t. II, vol. 2, no 1681 ; A. WEILL, Fr. TERRE et Ph. SIMLER, no 757). La radicalité de cette position a été critiquée en raison de l'obligation de jouissance en bon père de famille et de l'obligation d'entretien qui pèse sur l'usufruitier. En relevant que l'assurance était devenue « pour tout propriétaire précédent, une charge normale de la propriété », une doctrine, certes minoritaire, a soutenu que l'usufruitier, tenu de jouir comme le propriétaire lui-même, devrait être obligé à contracter une telle assurance (M. PLANIOL et G. RIPERT, Traité pratique du droit civil français, t. III, no 833).
42 Oudenaerde, 15 avril 1936, R.W., 1936-1937, p. 1187.
43 C. AUBRY et C. RAU, Droit civil français, Libraires techniques, II, § 233, note 1.
44 C. AUBRY et C. RAU, t. III, no 855 ; H. DE PAGE et R. DEKKERS, op. cit., no 366 et 391 ; R.P.D.B., no 756 et 757.
45 M. REMOND-GOUILLOUD, op. cit., p. 134 qui, citant Fr. ZENATI, (Les biens, P.U.F., 1988, p. 253), précise que « c'est pourquoi l'usufruitier acquiert moins de droit que le propriétaire n'en perd ».
46 A. REIG, op. cit., no 420.
47 A. WEILL, Fr. TERRE et Ph. SIMLER, op. cit., no 725 et 746 ; H. DE PAGE et R. DEKKERS, op. cit., no 394 et 395.
48 A. RIEG, op. cit., no 435 B.
49 Encore faut-il rappeler que ce champ d'application s'est continuellement étendu partant de la species corporelle pour déboucher sur les universalités de fait, sur les usufruits de droits de créance ou de droits intellectuels. Actuellement, à titre d'exemple, l'usufruit du fonds de commerce est une des applications les plus importantes tant au niveau juridique qu'au niveau économique de l'institution.
50 J. DABIN, Le droit subjectif, Paris, Dalloz, p. 179.
51 « Il était soutenu, pour la copropriété, que celle-ci impliquait contradiction in terminis : chacun des copropriétaires n'a plus l'appartenance et la maîtrise de la chose puisqu'il partage cette appartenance-maîtrise avec ses co-indivisaires. "Qui a compagnon a maître". Donc personne n'est plus maître ; la chose a cessé d'être propre puisqu'elle est maintenant commune » (J. DABIN, op. cit., p. 178).
52 Ibidem, p. 179.
53 M. REMOND-GOUILLOUD, Ressources naturelles et choses sans maître, in L'homme, la nature et le droit, Bourgeois Editeur, 1993, p. 233.
54 Est partition, le partage d'un ensemble en parties non vides, toutes disjointes l'une de l'autre et dont la réunion reconstitue cet ensemble.
55 M. REMOND-GOUILLOUD, Du droit de détruire, op. cit., p. 134.
56 A. LEBRUN, Le droit civil d'usage sur les 'res', éléments vitaux de l'environnement, in Droit de l'environnement - développements récents, vol. II, Story- Scienlia, 1989. p. 389; F. OST, Le patrimoine, un concept dialectique adapté à la complexité du milieu, in Fédération royale des notaires de Belgique, Het milieu-l'environnement, Turnhout, 1993, p. 13 sq.; M. REMOND-GOUILLOUD. Du droit de détruire, op. cit., et Ressources naturelles et choses sans maître, Dalloz, 1985, chron. p. 27; B. JADOT, L'environnement n'appartient à personne et l'usage qui en est fait est commun à tous. Des lois de police règlent la manière d'en jouir, dans le présent ouvrage; F. OST, La nature hors la loi, l'écologie à l'épreuve du droit. La découverte, 1995, p. 295 sq et 306 sq.
57 Sur l'application de ce concept à cette interaction, voir l'analyse de F. OST, Le patrimoine..., op. cit., en particulier p. 41 et sv.
58 B. JADOT, op. cit., no 10 et références citées.
59 L’on a pu également référer l'obligation d'inventaire aux procédures d'évaluation des incidences sur l'environnement : « Quant à l'inventaire qui, suivant l'article 600 du Code civil, précède nécessairement l'entrée en jouissance de l'usufruitier, les ressources naturelles en font de plus en plus souvent l'objet : l'étude d'impact, imposée pour tous travaux et aménagements susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement, implique une analyse de l'état initial du site portant notamment sur les richesses naturelles » (R. REMOND-GOUILLOUD, Ressources naturelles..., op. cit., p. 234). Analogiquement, l'analyse n'est correcte que sur un des aspects de l'évaluation des incidences : la connaissance préalable de ce qui est, avant de faire quelque chose. Mais l'état ou l'inventaire s'arrête là, à la connaissance. Il ne comporte pas d'autre contrainte, telle celle de la prudence, principe essentiel du droit de l'environnement sur lequel nous reviendrons.
60 Ibidem, p. 234-235.
61 Cf. N. de SADELEER, La planification en matière de déchets, in L’entreprise et la gestion des déchets, Bruxelles, Bruylant, 1993, p. 79 et La planification en matière d'environnement et d'aménagement du territoire, numéro spécial de la revue Aménagement-Environnement, Kluwer, 1994.
62 Sous réserve encore, dans ce dernier cas, de son obligation de remplacement pour certaines universalités de fait, tel le troupeau.
63 M. REMOND-GOUILLOUD, op. cit., p. 234.
64 B. JADOT, op. cit., no 12 ; cf. M. REMOND-GOUILLOUD, Du droit de détruire, op. cit., p. 263 et sv. ; F. OST, Les études d'incidence : un changement de paradigmes ?, in L'évaluation des incidences sur l'environnement, un progrès juridique ?, Bruxelles, F.U.S.L., 1991, p. 7.
65 H. DE PAGE et R. DEKKERS, op. cit., no 394.B.
66 M. REMOND-GOUILLOUD, A la recherche du futur. La prise en compte du long terme par le droit de l'environnement, R.J.E., 1992, p. 5.
67 M. REMOND-GOUILLOUD, Du droit de détruire..., op. cit., p. 128.
68 F. OST, La nature hors la loi, οp. cit., p. 326.
69 F. OST, Après nous le déluge ? Réflexions sur la responsabilité écologique à l'égard des générations futures, in Variations éthiques. Mélanges J. Dabin, Bruxelles, F.U.S.L., 1994, p. 389 et spécialement 409 et sv.
70 C'est sur le plan du droit international que le concept de « générations futures » a pris le plus de contenu, au travers des concepts d’« humanité » et de « patrimoine commun » sans cependant encore franchir la barre de la reconnaissance juridique : « en consacrant le concept d'humanité, le droit international se réfère aux intérêts communs de tous les hommes, au bien commun universel qui est celui des générations actuelles et futures (...). Ainsi, l'idée apparaît-elle clairement — mais le droit positif ne la consacre pas — que le patrimoine commun de l'humanité doit profiter équitablement à tous et pas seulement à ceux qui sont en mesure de l'exploiter effectivement. Certes, le concept de patrimoine commun de l'humanité n'est pas juridique : il n'est pas vraiment consacré en droit positif, la consistance du patrimoine en question est incertaine et l'humanité n'est pas dotée de la personnalité juridique qui lui permettrait de faire valoir des droits. Mais cette notion, qui appartient à l'imaginaire des nations, est peut-être un mythe prophétique (selon l'expression du Professeur Dupuy) qui pourra servir, à l'avenir, de fondement des constructions juridiques qui reconnaîtront et organiseront la destination universelle des biens » (J. TOUSCOZ, Droit international, P.U.F., 1993, p. 297 et 298).
71 B. JADOT, op. cit., no 8.
72 « Il est des choses qui n'appartiennent à personne et dont l'usage est commun à tous ».