Conclusions
p. 290-291
Texte intégral
1Dans son état actuel, le droit régional bruxellois offre un certain nombre de mécanismes susceptibles d’être utilisés pour assurer la protection des sites semi-naturels. Néanmoins, chacun de ces mécanismes présente des limites en raison de l’angle particulier sous lequel ils appréhendent l’espace semi-naturel.
2Une mise en œuvre cohérente et rigoureuse de tous ces mécanismes permettrait néanmoins une protection efficace de la richesse écologique que représentent les espaces semi-naturels dans une région fortement urbanisée. Mais la difficulté de mener à bien une politique de protection de l’espace naturel est exacerbée non seulement par l’existence de contraintes juridiques mais surtout par l’absence d’une volonté politique dans le chef de la majorité des acteurs et le manque de moyens financiers au niveau des pouvoirs publics. Le degré relativement faible de protection des espaces semi-naturels bruxellois semble donc devoir être imputé à une mise en œuvre parcimonieuse des règles de protection existantes.
3Force est de constater que bon nombre de citadins conçoivent les espaces semi-naturels comme un “patrimoine” qu’il conviendrait de conserver pour des raisons à la fois sociales, scientifiques et esthétiques. Pour d’aucuns, ces sites vont jusqu’à mériter une qualification nouvelle de “patrimoine commun” du fait de leur appropriation collective.
4Il convient de souligner qu’à la différence du droit français où plusieurs législations consacrent la notion de patrimoine naturel (telle la loi du 10 juillet 1976 sur la protection de la nature qui énonce que “la protection des espaces naturels et des paysages (...) est d’intérêt général. Il est du devoir de chacun de veiller à la sauvegarde du patrimoine naturel dans lequel il vit” ou le Code de l’urbanisme qui précise “le territoire français est le patrimoine commun de la nation”), le droit positif belge n’a encore jamais tenté d’intégrer un tel concept. Une telle lacune n’empêche pas que l’on s’interroge sur le bien-fondé de l’introduction de ce concept dans notre ordre juridique. Il reste encore à examiner si une telle consécration est appropriée pour la problématique que nous traitons.
5Relevons d’emblée que l’identification des sites semi-naturels ne s’opère pas au regard de critères stables comme l’exigerait la sécurité juridique. Au contraire, ceux-ci se distinguent en fonction de critères mouvants se rapportant à une gradation dans le temps et à une perception d’ordre psychologique. Les sites semi-naturels bruxellois pourraient donc apparaître rétifs à toute définition globale. L’on pourrait donc conclure que l’imposition d’un statut juridique commun à cette gradation, s’inscrivant entre le naturel et l’artificiel, relève de la gageure.
6En l’espèce, l’étude démontre que, d’une part, certains sites ont pratiquement perdu leur caractère semi-naturel (Cf. Neerpede), et que, d’autre part, les sites étudiés présentent d’importantes divergences d’un point de vue écologique. Ces données factuelles peuvent expliquer en partie les difficultés d’application des instruments juridiques exposés ci-dessus. Il serait de prime abord difficile de conclure qu’un statut juridique unique puisse s’appliquer à l’ensemble des sites semi-naturels bruxellois.
7Ces dernières considérations n’empêchent cependant pas d’imaginer des concepts plus appropriés à la conservation des espaces naturels. Des embryons de statut existent déjà tant en droit interne qu’en droit international. Nous pensons ici aux sites spéciaux d’intérêt scientifique (SSSI) désignés par le Nature Conservancy Council en Grande-Bretagne ou aux zones spéciales de conservation devant être désignées par les États membres au titre de la directive de la Communauté européenne du 21 mai 1992 concernant la protection des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages.
8Dans le cas d’une région fortement urbanisée, l’on pourrait également dégager un certain nombre de critères spécifiques aux sites semi-naturels (importance de la diversité biologique, rareté de certaines espèces de la faune et de la flore, caractère spectaculaire de certaines espèces, absence de toute zone verte, intérêt social et pédagogique...). En fonction de ces différents paramètres, il serait envisageable de sélectionner, sur une base scientifique, les sites les plus pertinents pour la conservation du patrimoine naturel de la région concernée et de tenter d’élaborer un régime de protection adéquat.
9Il reste que, dès aujourd’hui, les sites semi-naturels bruxellois exigent une attention renforcée et qu’il revient à chacun, citoyens et acteurs politiques, de mettre en œuvre l’ensemble des ressources existantes pour préserver une certaine richesse naturelle en milieu urbain.
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