Les « Souliers » de Van Gogh et l’« Origine de l’œuvre d’art »
p. 391-399
Texte intégral
1On connaît les pages célèbres de Heidegger sur les Souliers de Van Gogh1 : le philosophe en fait surgir l’être de la production, l’être du bringen comme venue en présence à partir du stellen comme fabrication. Nous y trouvons la typique démarche en retrait, le Schritt zurück, qui mène de la chose à l’œuvre, à partir de l’œuvre comme chose, selon le circuit du procès de la vérité. Or, une lecture attentive de ce passage — de la page 24 à la page 27 environ — permet peut-être d’y découvrir un petit glissement, à peine perceptible, qui va du tableau à son référent, aux souliers mêmes ; glissement qui entretiendrait une certaine équivoque entre l’art comme avènement de présence et l’art comme représentation. Et cette équivoque ne serait vraiment levée que vers la fin de la troisième partie de la conférence, qui porte en sous-titre « La vérité et l’art » (p. 45), lorsque la poésie se révèle comme art premier, comme archi-art, fondant la possibilité même de l’art. Cette poésie-là serait dès lors le Logos comme nomination essentielle.
2Il est révélateur que l’« Origine de l’œuvre d’art » soit contemporaine de la conférence « Hölderlin et l’essence de la poésie » (1936), dans laquelle Heidegger cherche déjà le lieu de la rencontre de l’art et du langage.
3Le texte de l’« Origine... » a l’allure d’un enfantement douloureux. On y suit les péripéties du combat « de » la vérité, qui n’est ni sujet ni objet de son combat, mais qui est combat, en tant que laisser-advenir de ce qui est (Sein-lassen). Texte bousculé, inconfortable, dérangeant. Heidegger nous presse de faire le Saut qui apparaît dans le titre (Ur-Sprung), il nous jette au dehors de l’habituel et du familier, vers l’atmosphère raréfiée, l’im-mensité désertique de l’alêtheia. Il nous entraîne dans le renversement (Kehre), ce chemin qui tourne sur lui-même, qui ne mène « nulle part » (Holzweg), celui que suit l’âme des poèmes de G. Trakl2 qui erre comme une étrangère (ein Frondes) sur cette terre. Chemin qui est aussi celui de Kant dans son étonnante proposition sur la finalité sans fin qui caractériserait le Jugement esthétique. Heidegger veut pousser l’aventure de ce chemin, il veut, comme il le dit dans Kant et le problème de la métaphysique3, aller vers ce qui a fait reculer Kant, jusqu’à la ruine du Fondement, l’abîme ouvert sous la métaphysique, le point de fuite où se rencontrent le phénomène et le noumène, et qui trace entre les deux premières Critiques un pont audacieux et fragile.
4D’entrée de jeu, le texte nous fait tourner en rond. Il n’y a pas d’accès à l’œuvre d’art ; si on veut la définir, en dessiner le contour, elle s’évanouit à notre approche arrogante : comme œuvre, elle renvoie à l’artiste, l’artiste nous renvoie à l’œuvre, l’une et l’autre à l’art, l’art à l’artiste et à l’œuvre d’art. C’est sans issue. A moins d’appeler art ce qu’il est convenu d’appeler comme tel.
5Cette tentative de penser l’art par la causalité, c’est celle de la métaphysique. Comme étant, l’œuvre doit être expliquée par un autre étant. L’œuvre, Werk, est une production. Dans la Métaphysique4 d’Aristote, c’est l’objet fabriqué — la coupe d’argent — qui sert d’exemple pour illustrer les quatre formes de la causalité : matérielle, formelle, finale, efficiente. L’œuvre d’art est alors appréhendée par le biais de sa fabrication ; cependant, ce qui reste, la chose qui est fabriquée, demeure un mystère : qu’est-elle elle-même, mise à part sa fabrication ? Comment penser la chose comme chose ?
6On perçoit la chose, c’est un aisthêton, on peut donc la définir subjectivement par la multiplicité des sensations qui la rendent perceptible ; ou encore objectivement, comme un noyau de qualités sensibles, sumbébêkota ; ou encore comme une matière qui reçoit une certaine forme. Le composé matière et forme a servi, à travers toute la tradition, à définir l’œuvre d’art. Cependant, ce schéma conceptuel ne ressortit pas originairement de l’art, puisque tout étant est un composé de matière et de forme. On n’arrivera pas à penser l’art à partir d’autre chose que lui ; ces distinctions conceptuelles ne nous font croquer la noix que pour la trouver vide.
7Où se cache l’art ? Quel est le lieu de son recel ? Si ce n’est la chose même, qu’on violente quand on tente de s’en saisir du dehors d’elle-même, par un concept (capere). L’art se tient caché dans le tableau du musée que la femme de ménage époussète le soir5, dans l’édition de Sophocle rangée dans la bibliothèque.
8L’arrivée de l’Etre se produit alors en coup de théâtre, selon le style heideggérien. Les écailles nous tombent des yeux. Dans la conférence qui nous occupe, cela se produit vers les pages 24-25, tandis que nous regardons un tableau de Van Gogh, les Souliers. Nous étions dans la détresse du non-savoir ; et c’est alors que, tout d’un coup, l’Etre arrive à sa manière fulgurante et en une sorte de mutation, nous délivrant de notre cécité. Cherchant la chose, nous croyions la trouver dans le produit. Et voilà que laissant le produit reposer en son être-produit, la chose se révèle en son être chose : telle est l’œuvre de l’œuvre, quand elle est à l’œuvre comme révélation, qu’elle est mise en œuvre de l’être de l’étant, qu’elle est avènement de vérité.
9Mais cependant, ne nous retrouvons-nous pas dans l’idéalisme-réalisme métaphysique, lorsque nous disons que le Beau est le Vrai ? Non, car le tableau de Van Gogh n’est pas beau en tant que reproduction fidèle de chaussures ; pas plus que le temple grec n’imite l’Idée de temple en général ; pas plus que l’hymne de Hölderlin « Le Rhin » ne représente le fleuve de ce nom.
10Revenons cependant aux Souliers de Van Gogh. C’est ici qu’apparaîtrait subrepticement une certaine équivoque, que nous avons suggérée au départ. Comment l’être de ce produit, la toile de Van Gogh, s’est-il révélé ? Comment l’avons-nous trouvé ? « Non pas au moyen de la description ou de l’explication d’une paire de chaussures réellement présentes ; non pas par un rapport de processus de fabrication des souliers ; non pas par l’observation de la manière dont ici ou là, on utilise réellement des chaussures... Dans la proximité de l’œuvre, nous avons été soudainement portés ailleurs que là où nous avons coutume d’être »6. Et qu’en est-il de cet être tableau des Souliers ? Heidegger dit : « La toile de Van Gogh est l’ouverture de ce que le produit, la paire de souliers de paysan, est en vérité »7.
11Autrement dit, nous avons été exposés à une révélation de l’être souliers comme à un monde qui serait celui du paysan, monde de labeur, de fatigues accumulées au fil des jours, à la cadence des saisons8. Nous ne pensons plus à l’usage des souliers, à ce en quoi ils servent le paysan. Nous voici donc ici dans le cadre de pensée d’une projection de monde, d’une Weltanschauung, mais révélée à partir des souliers même. Il en est de même lorsque Heidegger nous place devant le temple grec9 : posé là, le temple organise le chaos, dessine un cosmos et établit ainsi les dimensions du monde grec. Ne sommes-nous pas — du moins dans ce passage de l’Origine — en pleine anthropologie phénoménologique ?
12Il ne faut pas l’oublier : depuis Schiller, et avant lui Shaftesbury, la Beauté-Vérité a alimenté tout l’idéalisme allemand, qui culmine dans la métaphysique de Hegel. Même si l’art commence à prendre conscience de son autonomie ; même si, dès avant Kant, les préromantiques s’efforcent d’intérioriser le signifié par rapport au signifiant, annonçant l’auto-télisme de l’œuvre. Souvenons-nous de la notion de « nature » de cette époque, celle que Heidegger « répétera » par un retrait vers la physis grecque. Même quand l’art ne se veut plus imitation passible d’un référent extérieur, mais libre création imitant le dynamisme de la nature, il est conçu comme projection d’une subjectivité se représentant un monde. La mimêsis-poïêsis continue à osciller entre la Présence comme apparaître et la Présence comme représentation. Peut-être même encore dans l’Origine chez Heidegger...
13Le commentaire des Souliers nous paraît tout particulièrement illustratif de cette hésitation qui entretient l’équivoque. Heidegger passe si subrepticement du tableau aux souliers dans les pages que nous avons relevées, que c’est à peine si nous nous en rendons compte si nous n’y prenons pas garde. Mais dès que nous y sommes attentifs, le tableau prend l’allure d’une représentation. Car ce qui instaure le « monde du paysan », grâce à la représentation qu’offre le tableau, ce n’est pas le tableau, mais les souliers eux-mêmes auxquels le tableau renvoie10. Dans ce passage, le tableau n’est pas pour lui-même, mais il fait signe à autre chose que lui, son signifié lui est encore extérieur ; il n’est pas pensé dans son être signe, comme processus d’apparaître, comme révélation de son être sensible ; mais il renvoie à un monde pour un sujet créateur ou spectateur.
14Tout ce début de l’Origine, jusque vers la page 45, est d’ailleurs empreint d’une sorte de tourment pour échapper à l’idéalisme dont l’auteur reste toujours dans une certaine mesure l’héritier ; et c’est ce qui rend le texte à la fois si difficile et si attachant. Qui, d’autre part, oserait prôner la possibilité d’une « répétition » absolue de la métaphysique ?
15Cependant la troisième partie de la conférence intitulée « La Vérité et l’Art » marque une étape nouvelle, elle annonce l’œuvre future. En effet la pensée du langage, qui deviendra le thème central de la pensée heideggerienne, s’y trouve déjà en germe, par le biais de la pensée de l’art.
16Qu’est-ce qui est art dans l’œuvre d’art ? C’est la chose, dont l’être est de révéler. L’art est ainsi le processus de révélation comme tel. Il n’est pas un ajout, un ornement adventice à la chose ; mais bien « ornement », « parure » (l’heureux mot français !), donc apparaître. Le cosmos révélé est l’émergence à partir du chaos. De sorte que l’art est forme, c’est-à-dire paraître de la chose, qui devient alors « belle », formosa. Le Beau est le scintillement de la présence de la chose. Dans le Phèdre, il est dit : to ekphanestaton, le comble du paraître11. Et le paraître se tient, se retient au bord du caché, comme surgissement, risque extrême, éclaircie : c’est pourquoi les Grecs l’ont appelé a-lêtheia.
17Il n’en reste pas moins que l’œuvre d’art est faite (Werk) ; l’art est un schaffen, une production. Mais si nous avons su opérer le Saut, alors nous pourrons penser l’essence de ce faire. Elle se cachait encore sous la technê grecque, dont le sens a été obnubilé selon le destin de l’Etre. Que pouvons-nous encore entendre dans la notion de technê ? Qu’elle faisait signe sans doute vers un savoir-faire, une habileté ; mais aussi vers un savoir tout court, puisé dans un avoir-vu, oida ayant la même racine que eidon, oraô ; un accueil de ce qui s’offre à voir, les apparences de ce qui apparaît, la présence de ce qui vient en présence.
18L’être de l’œuvre repose dans ce processus de révélation, dans cet avènement d’un monde comme déploiement d’apparaître. Si la technique moderne a pu oublier son essence, c’est justement parce qu’elle s’en nourrit. Elle est art car elle trouve en lui son fondement caché. (Nous disons encore : l’art de la guerre, l’art des fortifications...) Le savoir-faire se tient dans la relation qui fonde tous les rapports des étants entre eux, celle de l’arrivée de l’Etre dans l’étant. Se tenant dans cette relation, c’est à partir d’elle que la technique nous permet la main-mise sur les objets, sur leurs relations, leur utilisation en vue d’aménager un monde où l’Etre se révèle en se cachant dans l’étant.
19C’est pourquoi tout phénomène culturel — si on arrive à le penser dans son essence — manifeste l’instauration de la vérité. Notons ici à nouveau chez Heidegger une certaine appartenance à la phénoménologie néo-kantienne, à l’égard de laquelle il avait pourtant pris ses distances dès 1929, lors des entretiens de Davos avec E. Cassirer. Ce qui provoque — momentanément au moins — un certain nivellement au sein duquel l’art et le langage perdent leur spécificité par rapport aux autres phénomènes de la culture. En effet, page 48, Heidegger nous propose divers « mondes » qui seraient autant de manières pour la vérité de se dévoiler : le monde du politique dans la fondation de la cité, en tant qu’il opère le dépassement de l’ordre naturel ; le monde du mystique en tant qu’il permet à l’homme d’atteindre l’Etant suprême ; le monde du héros en tant que la moralité l’élève au-dessus de l’ordre biologique ; le monde du philosophe, en tant qu’il pense l’Etre comme distinct des étants (l’Etre est-il pensé ici comme autre par rapport à l’Etant suprême du mystique, ou sommes-nous encore dans l’onto-théologie que dénoncera Identité et Différence en 1957 ?).
20Néanmoins la Kebre est déjà manifeste. Bientôt — page 50 — nous voyons ces divers modes d’œuvrer la vérité comme pris à rebours vers le terminus a quo12 : c’est le Schritt zurück. Si le « faire » de toute œuvre culturelle est un Sein-lassen, si elle est cet événement, cette irruption dans l’Eclaircie, alors c’est qu’elle se tient dans une origine qui n’est autre que l’advenir de la vérité. Or cet advenir est le Poème au sens premier, celui que Heidegger entendra plus tard dans le Logos des Grecs. L’essence de l’art est le Poème en tant que « projet dévoilant » (page 57), expression qui nous rappelle Sein und Zeit.
21Mais que veut dire cette proposition, que tout art est Poésie ? Que ce soit la musique, l’architecture, la peinture, la sculpture ? Alors que la poésie ne désigne habituellement qu’un art parmi d’autres, qu’un mode parmi d’autres de « projet dévoilant » de la vérité ? C’est ici, semble-t-il, que se noue l’articulation fondamentale qui va lever l’équivoque qui demeurait peut-être entre l’anthropologie phénoménologique et la pensée de l’Etre comme Logos. Pour une première fois — comme dans « Hölderlin et l’essence de la poésie » — le langage surgit comme langage de l’Etre, en deçà de la distinction entre génitif objectif et subjectif, comme pur procès de l’alêtheia. Le langage est le Poème. Dans ce qui précédait, on ne voyait pas bien comment tout phénomène culturel est fondé dans le langage comme dans sa condition de possibilité. Le langage pouvait encore apparaître comme un phénomène de la culture parmi d’autres. Maintenant la poésie, langage de l’Etre, langage en son cœur, devient l’art éminent, fondant la possibilité même de l’art.
22L’origine, Ur-sprung, de l’œuvre d’art, c’est donc... l’art comme origine ; puisque l’art est toujours poème, poïêsis, un « faire » qui est, toujours déjà, un laisser-être l’étant en son être. Comme poème, le langage est la fondation de l’art, et la poésie est le mode d’œuvrer de l’œuvre d’art ; elle est donc l’art originaire. Car le signe du langage nous situe dans le procès du faire-signe, et ainsi du faire de tous les signes que sont les œuvres d’art. Le langage instaure l’ouverture, l’éclaircie où se joue le rapport de l’Etre à l’étant. Le langage dit, montre (deiknumi) : cela veut dire qu’il se déploie de lui-même à lui-même comme signe de ce qu’il signifie, rapport circulaire et inachevable de l’apparaître et de ce qui apparaît. C’est dans l’ouverture du langage à lui-même, qui se dit comme ouverture, que se loge l’art comme avènement de la vérité.
23Peut-être était-ce cela que pressentait Saussure, quand il répétait avec insistance dans son Cours, cherchant obstinément l’objet de la linguistique, que le langage est une forme et non une substance.
24Mesurons à présent la distance qui sépare l’origine des Souliers de Van Gogh comme instauration d’un monde et l’essence de l’art comme Poème originaire.
25Le « monde » aménagé par l’œuvre d’art surgit lorsque l’être œuvre de la chose se déplie ; lorsque nous pensons et respectons son recel, hors du rapport habituel aux objets ; lorsque nous accueillons sa venue ; alors advient sa vérité. Mais de quelle chose s’agit-il dans le tableau de Van Gogh ? Il semblerait qu’ici deux choses soient superposées, collées, si l’on nous permet l’expression : la chose tableau et la chose-souliers. Et qu’il faille attendre le décollement de ces deux choses, dont la première, le tableau, disparaît dans la seconde, les souliers, pour que fulgure l’éclaircie, l’Etre en son poème, l’a-lêtheia dans le langage fondateur de l’art.
26Certains passages de l’Origine font apparaître l’art comme projet de monde et même avec cette prédilection de Heidegger pour le monde rural ; il serait évidemment court et simpliste de ramener ces vues heideggériennes à une espèce de nostalgie de la nature, héritée du romantisme. S’il y a incontestablement chez lui un fond paysan, il se défend, et à juste titre, d’une attitude « écologiste » avant la lettre13 ; ses admirables méditations sur la physis sont d’ailleurs suffisamment éloquentes là-dessus.
27Seulement il y a autre chose : quand Heidegger voit l’origine du tableau, son lieu, dans l’ouverture aménageante du monde du paysan, en réalité, il dit que le tableau sert à modifier notre regard vers les souliers du paysan, à les voir autrement que sous leur aspect quotidien d’étant disponible. Et voilà que ce sont les souliers qui deviennent l’œuvre d’art en tant que vus par l’artiste, et non le tableau. Regard qui s’apparente au « pop art », dans lequel l’ustensile délaissé devient la chose dérisoire, pathétique, angoissante, voire même menaçante, selon le spectateur. Mais alors le tableau que sont les Souliers n’est plus qu’un médiat, une représentation de monde ; il n’existe plus comme tableau, la chose-tableau est oubliée, repliée.
28Et c’est seulement quand l’œuvre d’art se reconnaît comme langage que s’ouvre l’être-chose du tableau. Car il se distancie alors immensément de l’objet représenté : tout son être-tableau tient en effet dans le ne-pas-être ce qu’il représente14. Alors et alors seulement l’œuvre « œuvre », elle se déploie en son être, comme dire, comme rayonnement inépuisable de son apparaître hors du caché, comme brillance de ses dokounta ; on rejoint ici les commentaires du poème parménidien.
29La Kehre heideggérienne est ponctuée de sauts, de mutations, dont l’Origine nous paraît particulièrement exemplative. Ceci tout en maintenant que sa démarche n’accomplit jamais un dépassement de la métaphysique qui se prétendrait absolu. Un tel dépassement serait infidèle à la pensée la plus intime du philosophe : un terme absolu n’annulerait-il pas le chemin ? L’être du dépassement est le dépasser même. L’originalité profonde de la pensée de Heidegger, l’impossibilité de la ramener à une méta-métaphysique, de lui faire dire autre chose que ce qu’elle dit, est peut-être à ce prix.
Notes de bas de page
1 L’Origine de l’œuvre d’art dans Chemins qui ne mènent mille part, trad. W. Brokmeyer, Paris, Gallimard, 1962.
2 Commenté par Heidegger, notamment dans La parole dans l’élément du poème, dans Acheminement vers la parole.
3 Cf. pp. 270-271 (Paris, Gallimard, 1953).
4 A, 3 ; cf. ARISTOTE, La métaphysique, trad. J. TRICOT, Paris, Vrin, 1966, pp. 21 sqq. ; passage rappelé par Heidegger dans Die Frage nach der Technik (dans Vortrage und Aufsätze, pp. 15-16).
5 Voir aussi Einführung in die Metaphysik, p. 27.
6 Chemins..., p. 26.
7 Chemins..., p. 27. C’est nous qui soulignons la paire de souliers. Notons que le tableau dont il est question ici et qui représente des souliers de paysan n’est pas une paire, mais deux souliers gauches. Plus haut, p. 24, il s’agissait bien d’une paire, mais de bottines de paysanne.
8 Ibidem, p. 25.
9 Ibidem, p. 32.
10 Evoquant la controverse sur les Souliers entre Schapiro et Heidegger, J. Derrida rappelle ce passage de l’article de M. Schapiro (La nature morte comme objet personnel, dans Macula no 3) : « Le professeur Heidegger sait bien que Van Gogh a peint plusieurs fois de telles chaussures, mais il n’identifie pas le tableau qu’il a en vue, comme si les différentes versions étaient interchangeables, présentant toutes la même vérité ». Et Derrida d’ajouter : « Schapiro a raison, il n’a que trop raison. Heidegger ne cherche pas à préciser de quel tableau il s’agit. Il se précipite dans la référence... (Nous soulignons ; cf. J. DERRIDA, La vérité en peinture, Paris, Flammarion, 1978, p. 352).
11 Cf. La doctrine de Platon sur la vérité, dans Questions II, p. 155 (Paris, Gallimard, 1957).
12 Expression utilisée par Heidegger lorsqu’il voulait indiquer à Cassirer que sa pensée allait en sens inverse de la visée anthropologique, orientée vers les phénomènes de la culture (terminus ad quem).
13 Voir Hebel, dans Questions III.
14 On se souvient du tableau de Magritte : « Ceci n’est pas une pipe ».
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