D’un traitement psychiatrique l’autre : les jeunes et les droits de l’homme
p. 93-128
Texte intégral
Introduction
1Les droits de l’homme constituent la référence privilégiée de notre propos et il nous est apparu important de préciser d’emblée la signification que nous donnons à cette notion. Cette précision liminaire a aussi pour but d’éviter toute méprise sur le sens de notre intervention et de mieux faire comprendre le point de vue que nous avons adopté.
2Les droits de l’homme auxquels nous nous référons empruntent une forme juridique, ce qui ne signifie pas pour autant qu’il s’agisse d’une problématique exclusivement juridique. Nous pensons que les droits de l’homme ont de toute évidence besoin du droit pour exister concrètement ou, plus précisément encore, qu’ils soient consacrés en droit positif. Par le biais de cette médiation, ils deviennent concrets et peuvent donc être mis en œuvre dans les rapports sociaux.
3Ainsi, nous conduirons notre réflexion à partir des dispositions contenues dans la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 par les pays membres du Conseil de l’Europe et adoptée en droit belge par la loi du 13 mai 1955.
4La Convention est d’application directe en Belgique, c’est-à-dire : « susceptible d’être invoquée devant les tribunaux nationaux, soit au titre d’un droit ou d’une obligation propres, soit en vue de faire constater l’illégalité d’une mesure — qu’elle soit d’origine privée ou publique — incompatible avec elle »1.
5Nous venons d’évoquer très brièvement l’importance de la forme juridique des droits de l’homme. Il importe toutefois de souligner que ceux-ci procèdent d’une idée plus fondamentale qui est en réalité d’ordre politique.
6La liberté de l’individu a été consacrée comme l’un des principes directeurs de l’organisation sociale à la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle. A cet effet, la souveraineté du droit a été affirmée contre celui de la souveraineté d’un homme ou d’un groupe. Une idée originale et neuve, révolutionnaire même pour l’époque, traverse ce courant de pensée : le droit et le pouvoir ne sont plus des notions qui se confondent mais qui, au contraire, doivent être nettement distinguées. Ainsi, pour être considéré comme légitime, le pouvoir doit être conforme au droit dont il ne détient pas le principe. Ce principe relève de la démocratie2 qui, selon Cl. Lefort, pourrait se caractériser comme « une société accueillant le conflit des opinions et le débat sur les droits, parce que se sont dissous les repères de certitude qui permettaient aux hommes de se situer d’une manière déterminée les uns par rapport aux autres. Autrement dit, à la notion d’un régime réglé par des lois, d’un pouvoir légitime, la démocratie moderne nous invite à substituer celle d’un régime fondé sur la légitimité d’un débat sur le légitime et l’illégitime - débat nécessairement sans garant et sans terme... » et dans lequel « nul n’occupe la place de grand juge, c’est-à-dire ni un homme investi d’une autorité suprême, ni un groupe, fût-il la majorité »3.
7Le respect des droits de l’homme doit notamment permettre à chacun de prendre effectivement part à un tel débat démocratique. Ils constituent, en définitive, les conditions d’existence de la citoyenneté.
8L’on observera, enfin, que la traduction concrète des droits de l’homme en termes de droit positif n’échappe pas, elle aussi, au débat démocratique.
9Cette traduction ne doit évidemment pas se confondre avec l’instauration d’une loi intangible et immanente à l’ordre social. Elle demeure, par excellence, l’occasion de la discussion, de l’échange, voire de la contestation.
CHAPITRE I. La restriction de liberté des mineurs en raison de leur état mental
10Il apparaît des différentes contributions présentées à l’occasion de ces journées d’étude que les mineurs peuvent faire l’objet d’une mesure privative de liberté en raison de leur état mental notamment en vertu de la loi du 18 juin 1850 sur le régime des aliénés ou bien encore de l’article 43 de la loi du 8 avril 1965 relative à la protection de la jeunesse Nous montrerons, tout d’abord, dans ce chapitre qu’une mesure ne peut se concevoir et être décidée uniquement que sur la base de ces deux dispositions. Ensuite, il conviendra de s’interroger sur la conformité de ces dernières à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
11Ce sera aussi l’occasion de préciser les principes fondamentaux gouvernant les garanties qu’elle consacre en notre matière.
Section 1. La Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales
A. Le principe
12Elle énonce en son article 5 § 1 un principe général : « nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales... ». Cela revient à dire que pour tout individu, qu’il soit majeur ou mineur, peu importe, la liberté est la règle et l’enfermement l’exception.
13La Cour européenne des droits de l’homme dans un arrêt Winterwerp4 a eu l’occasion de préciser que l’objet et le but de l’article 5 § 1 étaient d’assurer que « nul ne soit arbitrairement dépouillé de sa liberté ». La Cour s’est également prononcée en ce qui concerne plus particulièrement le champ d’application de cette disposition, consacrant un « droit à la liberté ». Il faut entendre par là que l’article 5 vise « la liberté individuelle dans son acceptation classique, c’est-à-dire la liberté physique de la personne... Il ne concerne pas les simples restrictions à la liberté de circuler lesquelles relèvent de l’article 2 du protocole no 4 »5. Le droit de circuler, au sens où le protocole visé l’entend, porte sur un tout autre objet que celui qui nous occupe et nous ne l’examinerons donc pas. Nous noterons également que la Commission, pour sa part, a déclaré que l’article 5 § 1 s’appliquait également à une privation de liberté de courte durée6.
14Enfin, dans son arrêt du 28 mai 1985, la Cour a fait observer que « la distinction entre privation et restriction de liberté n’est qu’une distinction de degré ou d’intensité, mais pas de nature ou d’essence »7.
B. Les exceptions
15L’article 5 de la Convention prévoit, en ce qui concerne notre sujet, deux exceptions au principe général qu’il énonce, à savoir :
s’il s’agit de la détention régulière d’un mineur, décidée pour son éducation surveillée ou sa détention régulière, afin de le traduire devant l’autorité compétente (alinéa d) ;
s’il s’agit de la détention régulière d’une personne susceptible de propager une maladie contagieuse, d’un aliéné, d’un alcoolique, d’un toxicomane ou d’un vagabond (alinéa e) ;
16La première exception ne concerne qu’accessoirement notre propos et nous en avons donc limité les développements. En revanche, la deuxième doit de toute évidence faire l’objet d’un examen plus particulier.
1. L’exception visant les aliénés
17Nous noterons, tout d’abord, que cette exception concerne tous les aliénés, qu’ils soient majeurs ou mineurs. Aucune distinction n’existe dès lors à ce niveau.
18Cette exception a donné lieu à une décision importante de la Cour européenne des droits de l’homme : l’arrêt Winterwerp déjà cité8.
19Des précisions remarquables ont été ainsi apportées par la Cour en ce qui concerne deux notions figurant à l’article 5 § 1, e) : il s’agit, d’une part, de « la détention régulière d’un aliéné » et, d’autre part, de la « détention décidée selon les voies légales ».
a) La détention régulière d’un aliéné
20La Cour a souligné que l’adjectif régulier doit nécessairement englober à la fois la procédure et le fond. Le but poursuivi est ainsi d’éviter qu’une détention arbitraire puisse jamais passer pour régulière. Il s’en déduit donc, pour cette haute juridiction, qu’on ne saurait enfermer quelqu’un comme aliéné sans des preuves médicales révélant chez lui un état mental propre à justifier une hospitalisation forcée. Pour priver quelqu’un de sa liberté sur la base de l’article 5 § 1 de la Convention, il faut donc que son état d’aliénation ait été établi de manière probante. La nature même de ce qu’il faut démontrer devant l’autorité nationale compétente, un trouble mental réel, appelle une expertise médicale objective. En outre, le trouble doit revêtir un caractère ou une ampleur légitimant l’enfermement. Qui plus est, ce dernier ne peut se prolonger valablement sans la persistance de pareils troubles.
b) La détention selon les voies légales
21Selon le prescrit de la Convention, la détention d’un aliéné doit être non seulement régulière mais également décidée selon les voies légales.
22La Cour européenne des droits de l’homme dans l’arrêt Winterwerp a estimé que les mots « selon les voies légales » se réfèrent pour l’essentiel à la législation nationale et il convient donc de suivre la procédure fixée par celle-ci, c’est-à-dire par la loi du 18 juin 1850 et l’article 43 de la loi relative à la protection de la jeunesse. Toutefois, il faut que le droit interne se conforme lui-même à la Convention, y compris les principes généraux énoncés ou impliqués par elle. Il s’agit de la notion de procédure équitable et adéquate et l’idée que toute mesure privative de liberté doit émaner d’une autorité qualifiée, être exécutée par une telle autorité et ne pas revêtir un caractère arbitraire. De surcroît, devant une telle autorité, il faut que les droits de la défense puissent s’exercer dans toute leur plénitude à l’occasion, notamment, d’un débat contradictoire effectif.
2. L’exception visant les mineurs
23Cette exception vise de manière explicite la notion d’éducation surveillée et se justifie en fonction des nécessités de celle-ci. Elle se distingue donc clairement de la première exception que nous avons examinée et qui concernait l’aliénation. Ainsi, il ne conviendrait pas, sous prétexte de poursuivre l’éducation surveillée d’un mineur, de le priver de sa liberté pour en définitive le traiter, par exemple, dans un établissement psychiatrique fermé. Ce serait, pensons-nous, se livrer à une véritable perversion des termes utilisés par la Convention. L’on connaît, en substance, l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme rendu le 29 février 1988 à propos de l’article 53 de la loi sur la protection de la jeunesse9. Cette disposition a été déclarée contraire à l’article 5 § 1 de la Convention notamment pour le motif suivant : « Dès lors que l’État belge a choisi le système de l’éducation surveillée pour mener sa politique en matière de délinquance juvénile, il lui incombe de se doter d’une infrastructure appropriée adaptée aux impératifs de sécurité et aux objectifs pédagogiques de la loi de 1965, de manière à pouvoir satisfaire aux exigences de l’article 5 § 1, d) de la Convention européenne des droits de l’homme. Les placements répétés (9 fois en un an) d’un jeune homme dans une maison d’arrêt (prison de Lantin), en régime d’isolement virtuel et sans l’assistance d’un personnel qualifié, ne sauraient être considérés comme tendant à un but éducatif quelconque ».
24Ainsi, à l’occasion de cette affaire, la Commission et la Cour, se sont accordées, notamment, pour reconnaître « l’exigence » de la conformité de toute privation de liberté au but explicite poursuivi par l’article 5 : « protéger l’individu contre l’arbitraire ». Ainsi, sur ce plan, il a été retenu que l’application d’un tel principe suppose aussi, ainsi que le précise également l’article 18 de la Convention, la conformité au but des restrictions imposées par l’article 5 § 110.
Section 2. La loi du 18 juin 1850 sur le régime des aliénés
A. Une législation contestée
25Cette législation a fait l’objet de vives critiques et le parlement semble actuellement vouloir la réformer entièrement11.
26Il n’est pas inutile de rappeler les tenants de cette législation afin de mieux en comprendre les critiques. Selon les travaux préparatoires de la loi du 18 juin 1850, le but de cette législation était triple :
protéger les citoyens contre les accidents que peuvent occasionner les aliénés laissés en liberté ;
garantir la liberté individuelle en prévenant les séquestrations fondées sur une aliénation mentale supposée ;
pourvoir au traitement et aux soins que réclame la guérison des aliénés12.
27Le premier objectif que s’était assigné cette loi faisait écho à une préoccupation antérieure : assurer l’ordre public. En effet, un décret des 16-24 août 1790, toujours d’application d’ailleurs, dispose « qu’il appartient aux corps municipaux d’obvier ou de remédier aux événements fâcheux qui pourraient être occasionnés par les insensés ou les furieux laissés en liberté, et par la divagation des animaux malfaisants ou féroces ». Ce texte sera repris d’ailleurs in extenso dans l’article 95 de la loi communale.
28Un souci identique amènera encore le législateur à prévoir, à l’article 556 du Code pénal de 1867, une contravention de deuxième classe pour le fait d’un particulier « d’avoir laissé divaguer des fous ou des furieux étant sous leur garde ou des animaux malfaisants ou féroces ». Cette disposition, toujours d’application, constitue la base légale sur laquelle les tribunaux de police se fondent toujours pour prononcer des condamnations du chef de « divagation de chien ou de bétail »...
29Quand au second objectif, qui était de permettre la garantie des libertés individuelles, M. van de Kerchove a souligné, à juste titre pensons-nous, qu’il fût le plus négligé. C’est sur la base de telles critiques que la loi du 18 juin 1850 sur le régime des aliénés fait actuellement l’objet d’une mise en cause radicale13.
30Cette remise en question de la loi doit être également considérée par rapport au troisième objectif qu’elle avait initialement consacré et qui a donné lieu à ce que, sommairement, nous pourrions qualifier de « médicalisation de la folie ». Cette tendance qui n’a cessé de s’amplifier a été à l’origine d’un véritable pouvoir médical de fait.
31Ainsi, ce n’est plus tellement l’arbitraire possible d’une collocation comme instrument entre les mains du pouvoir politique ou familial qui est attaqué, mais plutôt la possibilité d’un arbitraire médical s’appliquant à des malades qui doivent être défendus dans leurs droits. Dès lors, lorsque sont dénoncées des collocations qui se sont appliquées à des personnes ne présentant aucun trouble, par exemple, on souligne moins les intérêts malhonnêtes qu’auraient servis de telles collocations que la preuve qu’elles apportent de l’absence de garantie pour les malades eux-mêmes et de l’arbitraire dont ceux-ci peuvent faire l’objet.
B. L’état mental requis
32La loi du 18 juin 1850 dispose que pour être colloqué il faut être aliéné. Le terme « aliéné », selon une jurisprudence déjà ancienne, est employé dans un sens général pour désigner ceux qui ont des facultés intellectuelles oblitérées, qui sont atteints d’égarement d’esprit ou d’aliénation mentale, que leur infirmité soit passagère ou incurable, et quels qu’en soient la cause et le caractère spécial14. Cette conception semble toujours partagée par la jurisprudence actuelle15.
33Il convient de faire observer, cependant, qu’actuellement « le vocabulaire médical et administratif tend à ne plus utiliser ce terme pour désigner les personnes atteintes d’altération de leurs facultés mentales. On lui préfère l’expression malade mental qui a une signification plus générale et répond à la tendance de la psychiatrie qui considère le malade atteint de troubles mentaux comme un malade qui a le droit d’être traité de la même manière que tout autre malade »16.
34Toutefois, le terme « aliéné » a été utilisé à l’article 5 § 1, e) de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Cet article dispose : « Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf les cas suivants et selon les voies légales : (...) S’il s’agit de la détention régulière (...) d’un aliéné (...) ».
35Dans son arrêt du 24 novembre 1989 (affaire Winterwerp), la Cour européenne des droits de l’homme a estimé que ce terme « aliéné » ne pouvait se prêter à une interprétation définitive, étant donné que son sens ne cessait d’évoluer avec les progrès de la recherche psychiatrique, la souplesse croissante du traitement et les changements d’attitude de la communauté envers les maladies mentales, notamment dans la mesure où se répand une plus grande compréhension des problèmes des patients. La Cour a tenu à souligner, qu’en tout cas, on ne saurait considérer qu’une telle exception autorise à détenir quelqu’un du seul fait que ses idées ou son comportement s’écartent des normes prédominant dans une société donnée.
36L’on retiendra également, à ce sujet, que le Comité des ministres des Etats membres du Conseil de l’Europe, dans une recommandation d’octobre 1983 sur la protection juridique des personnes atteintes de troubles mentaux et placées comme patients involontaires, a réaffirmé ce principe en décidant (art. 2) que « les difficultés d’adaptation aux valeurs morales, sociales, politiques ou autres, ne doivent pas être considérées en elles-mêmes, comme un trouble mental ».
37Cette idée fondamentale figure également dans le projet de loi belge relatif à la protection de la personne des malades mentaux17.
38Retenons que le concept d’aliénation est donc susceptible de faire l’objet d’un débat quant à sa signification, sa portée et ce, dans chaque cas d’espèce. Au sens où la Convention européenne des droits de l’homme entend ce terme, il ne peut donc se comprendre uniquement et exclusivement sur le plan médical. L’on observera, enfin, l’aspect idéologique dirions-nous du concept puisque, selon la Cour, il convient aussi de prendre en compte « le changement d’attitude de la communauté » à son égard.
39Nous noterons également une indéniable influence sur les juridictions belges des principes contenus dans la Convention et de l’interprétation qui en a été faite dans l’affaire Winterwerp. Ainsi, le Tribunal civil de Namur a estimé que : « Le placement d’un individu contre sa volonté dans un milieu thérapeutique doit être considéré comme exorbitant de son droit fondamental à la liberté et ne peut donc se concevoir que dans des cas exceptionnels et graves. L’alcoolisme ne constitue pas une maladie mentale de nature à autoriser le placement d’un individu en milieu thérapeutique contre sa volonté, sauf le cas d’une « dangerosité » particulière dans son chef »18.
40C’est encore la même juridiction qui a décidé que : « Le placement d’un individu dans un asile d’aliénés contre sa volonté doit être considéré comme exorbitant de son droit fondamental à la liberté et ne peut se concevoir que dans des cas exceptionnels et graves. Le tribunal ordonnera la remise en liberté de la personne colloquée si l’examen de l’arrêté de collocation et des certificats médicaux ne révèlent ni l’existence d’une maladie mentale grave ni des éléments précis établissant la dangerosité particulière de l’intéressé »19.
41Dans chacune des espèces citées, le tribunal s’est livré à un examen systématique et rigoureux des éléments requis par la loi en vue de vérifier si l’aliénation pouvait être établie de manière réelle et objective. De surcroît, le tribunal a également examiné si l’aliénation supposée impliquait nécessairement une mesure coercitive.
42Dans son ordonnance du 16 septembre 1985, le tribunal de Namur a rappelé également, à juste titre, que l’alcoolisme en tant que tel ne pouvait être considéré comme une maladie mentale.
C. La procédure
1. L’acte de collocation
43Le placement du malade dans un établissement psychiatrique, c’est-à-dire la collocation, peut résulter d’une demande émanant d’un particulier ou encore d’un arrêté pris par l’organe compétent d’un pouvoir public (art. 7 de la loi de 1850). Il s’agit donc d’une procédure administrative.
44Dans tous les cas, une telle demande doit résulter d’un acte écrit indiquant « autant que possible », les nom et prénoms, l’âge, la profession, l’état civil, la filiation, le lieu de naissance et le domicile du malade20.
45De plus, sauf lorsque l’acte émane du tuteur de l’interdit, il doit être accompagné d’un certificat médical constatant l’état mental de l’intéressé et indiquant les particularités de la maladie. Ce certificat doit avoir moins de quinze jours de date. En cas d’urgence, cependant, ce certificat pourra être délivré, au plus tard, dans les vingt-quatre heures du placement du malade21. Le certificat ne peut être délivré ni par un médecin attaché à l’établissement, ni par le mari, parent ou allié en ligne directe ou l’héritier présomptif du malade22.
46Au certificat médical, il est joint un « bulletin confidentiel », sous enveloppe cachetée, qui indique la cause connue ou présumée de la maladie et si des membres de la famille de l’aliéné ont été ou sont atteints de maladie mentale23.
47Notons enfin que si l’acte de collocation s’impose au chef d’établissement, celui-ci n’en a pas moins l’obligation de vérifier sa régularité ainsi que la qualité de la personne dont il émane24.
48Le certificat médical constitue un élément essentiel à la régularité de l’acte de collocation pris par le bourgmestre et de l’acte confirmatif du collège qui l’a suivi25.
49Ce certificat peut être délivré par le bourgmestre, médecin de son état26. Il peut être délivré par le médecin traitant qui est le plus qualifié pour renseigner l’autorité au sujet de l’état du malade, mais pas par un médecin attaché à l’établissement où le malade doit être colloqué27.
50Suivant la réglementation légale relative aux aliénés, le médecin doit, dans le certificat qu’il délivre en vue de l’admission d’un malade dans un établissement pour aliénés, déclarer qu’il a personnellement vu, exploré et interrogé le malade et constaté que celui-ci est atteint de la maladie mentale qu’il précise se caractérisant par tels et tels symptômes. Ce certificat, pour être valable aux fins d’une collocation, doit avoir moins de 15 jours de date28. Il n’est donc pas nécessaire qu’il ait été établi le jour de la collocation. Il suffit qu’il ait moins de 15 jours de date29.
51Ce certificat constitue un faux lorsque, bien que remplissant apparemment toutes les conditions susvisées et n’étant pas par ailleurs contredit en aucun de ses éléments, l’instruction de la cause a révélé, et qu’il est reconnu par le médecin, que celui-ci n’a vu ni exploré ou interrogé le patient au cours des 8 mois ayant précédé la rédaction du certificat30.
52Constitue également une faute civile, le fait qu’un médecin ait attesté, dans un certificat, qu’une personne souffrait d’altération mentale, alors que, personnellement, il ne l’avait ni vue, ni examinée, ni interrogée depuis plusieurs mois. Ainsi, lorsqu’un médecin a délivré un certificat attestant qu’une personne souffrait d’aliénation mentale, sans l’avoir ni vue, ni examinée, ni interrogée personnellement, mais qu’il ressort des circonstances que la collocation qui est intervenue était justifiée, le problème a été posé de savoir si cette faute engageait la responsabilité du médecin. Un jugement l’a admis, en considérant que la privation illégale de liberté de l’intéressé pendant trois mois, lui avait causé un dommage matériel et moral, susceptible d’être évalué ex aequo et bono à 60.000 F31. Ce jugement fut cependant réformé par la Cour d’appel de Bruxelles qui estima qu’il n’y avait pas matière à responsabilité, vu l’absence de dommage32.
2. Qui peut solliciter le placement ?33
53Le placement du malade dans un établissement psychiatrique, c’est-à-dire la collocation, peut résulter d’une demande d’un particulier ou d’un pouvoir public :
54a) Le tuteur de l’interdit est autorisé à cet effet par une délibération du conseil de famille, conformément à l’article 510 du Code civil. Ainsi que nous l’avons déjà indiqué, cette demande ne doit pas être accompagnée du certificat médical prévu à l’article 8 de la loi.
55b) L’autorité locale du domicile de secours d’un aliéné indigent34.
56La demande doit émaner du collège échevinal de la commune où l’aliéné se trouve au moment où l’assistance devient nécessaire. Le collège échevinal, renseigné sur la présence d’aliénés indigents par les « médecins des pauvres », agit par mesure d’humanité35. Sa décision sera communiquée dans les trois jours au procureur du Roi de l’arrondissement du domicile de l’aliéné36. Elle doit être signée par le bourgmestre et l’échevin qui le remplace et contresignée par le secrétaire communal.
57c) Le collège échevinal.
58En cas d’urgence, la décision peut être prise par le bourgmestre ou par l’échevin qui le remplace. Dans ce cas, le collège doit ratifier la collocation lors de la première réunion et, au plus tard, dans le délai de six jours. Des auteurs relèvent que, dans les cas extrêmement urgents, un commissaire de police peut mettre un aliéné « furieux » « hors d’état de nuire », à la condition que la collocation soit immédiatement régularisée par le bourgmestre ou par l’échevin qui le remplace37. Ce faisant, le collège échevinal remplit sa mission légale « d’obvier et de remédier aux événements fâcheux qui pourraient être occasionnés par les insensés et les furieux laissés en liberté »38. Il exerce un pouvoir de police.
59L’autorité communale agit dans l’intérêt de l’ordre public : elle ne peut intervenir que dans la mesure où le comportement de l’aliéné dans la commune est de nature à constituer un « danger », soit pour lui-même, soit pour l’ordre et la sécurité publics. L’arrêté de collocation sera transmis dans les trois jours au procureur du Roi de l’arrondissement du domicile de l’aliéné.
60La doctrine considère que le chef de l’établissement, s’il n’est pas en possession d’une décision du collège échevinal, doit informer le bourgmestre que le malade sera libéré le matin du septième jour39. Cependant, si le malade présente un « danger » pour lui-même ou pour autrui, il pourra être reçu, c’est-à-dire, en fait, maintenu dans l’établissement, sur demande de tout intéressé et donc, du chef de l’établissement lui-même. D’autre part, même si le malade est déclaré non aliéné par les médecins de l’établissement, il devra être fait application de la procédure relative à la sortie de l’aliéné de l’établissement40. On peut s’interroger sur la légalité de ces décisions entérinées par la pratique administrative, qui aboutissent à confirmer un excès de pouvoir de l’autorité communale. Aucun texte ne rend obligatoires des constatations personnelles du Collège des bourgmestre et échevins quant au fait que la personne à colloquer était insensée ou furieuse41.
61d) Toute personne intéressée
62La pratique administrative donne à ce concept l’acception la plus large. Ainsi, il est admis qu’un créancier est intéressé à demander la collocation de son débiteur. Il a été notamment décidé qu’est une personne intéressée au sens de cette disposition, le notaire qui est chargé de la liquidation d’une succession à laquelle est intéressé un héritier atteint d’aliénation mentale, alors que cet officier ministériel, personnellement responsable de la régularité des opérations de la liquidation, agit en outre sur mandat des proches parents de cet héritier42.
63La demande d’admission doit être revêtue du visa du bourgmestre, qui ne l’apposera que s’il a fait constater que l’aliéné se trouve bien sur le territoire de sa commune et il est fait mention de cette circonstance à la suite du visa. Le bourgmestre peut exiger la production préalable du certificat médical requis et refuser le visa s’il estime qu’il n’y a pas lieu à collocation43. La doctrine considère, en outre, que le bourgmestre pourrait refuser son visa si la demande ne lui paraissait pas justifiée44.
64e) La députation permanente du conseil provincial
65Le Gouverneur, en sa qualité de président du collège provincial et chargé de l’instruction des affaires soumises à ce collège, peut provoquer un arrêt de collocation. Il peut même, en cas d’urgence, prendre seul la décision qu’il soumettra cependant à la Députation permanente lors de sa première réunion.
66L’autorité provinciale n’intervient qu’à titre supplétif. Ce n’est qu’après avoir constaté la carence de l’autorité locale ou des parents du malade, que la Députation permanente est appelée à prendre une mesure inspirée par des principes d’humanité ou par les exigences de la sécurité publique45. Le Gouverneur fait, en outre, les diligences nécessaires en vue de s’assurer si, dans la province, il se trouve des aliénés qu’il y aurait lieu de colloquer46.
67Les arrêtés de collocation de la Députation permanente seront également transmis dans les trois jours au procureur du Roi de l’arrondissement du domicile de l’aliéné.
D. Les recours
68Le tribunal de première instance est seul compétent pour connaître d’un recours relatif au contrôle de l’état mental et au maintien d’une personne dans un établissement d’aliéné (art. 17 de la loi de 1850).
Section 3. La Conformité de la loi du 18 juin 1850 à l’article 5, §1, c) de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales
69Nous avons déjà eu l’occasion de rappeler l’énoncé de cet article 5 §1, c) et d’indiquer l’important arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme auquel il avait donné lieu le 24 octobre 1979 (Affaire Winterwerp). Cette décision a précisé, notamment, ce qu’il fallait entendre par la « détention régulière d’un aliéné ». La Cour européenne des droits de l’homme a souligné aussi l’importance d’une intervention médicale à ce niveau, en jugeant que pour priver l’intéressé de sa liberté, on doit, sauf les cas d’urgence, avoir établi son « aliénation » de manière probante, ce qui appelle une expertise médicale objective.
70Toujours selon le prescrit de la Convention, la détention d’un aliéné doit non seulement être régulière mais également être décidée selon « les voies légales ». Dans l’arrêt Winterwerp, la Cour a estimé que, par la notion de voies légales, il s’agissait de la législation nationale et des procédures instaurées par celle-ci. Toutefois, il faut évidemment que le droit interne soit conforme à la Convention, y compris les principes généraux énoncés ou impliqués par celle-ci. C’est ainsi que les procédures consacrées par le droit interne doivent permettre la tenue d’un procès « équitable » et « adéquat » et que toute mesure privative de liberté doit émaner d’une « autorité qualifiée », être exécutée par une telle autorité et ne pas revêtir un caractère arbitraire.
71La loi du 18 juin 1850 n’instaure aucune procédure préalable à la collocation qui puisse être l’occasion d’apprécier, de manière probante et objective, sur la base d’une expertise médicale, un état d’aliénation nécessitant un enfermement. En effet, l’article 8 de la loi n’a prévu qu’un « certificat » médical à joindre à la demande, sollicité de manière unilatérale par celui qui poursuit la mesure. De plus, aucun débat n’a été prévu avant l’adoption de cette dernière et au cours duquel l’intéressé aurait pu être entendu.
72De surcroît, il est permis de se demander si la collocation, selon le droit actuel, est bien décidée par une « autorité qualifiée ». Par autorité qualifiée, il ne faut pas entendre nécessairement un tribunal. Cette exigence n’est certainement pas requise dans l’arrêt Winterwerp qui paraît, sur ce point, faire écho à l’article 4 d’une Recommandation du comité des ministres aux États membres du Conseil de l’Europe d’octobre 1983, selon laquelle une décision de placement pourrait être prise « par un organe judiciaire ou toute autre autorité appropriée désignée par la loi ».
73Le Collège des bourgmestre et échevins, instance administrative, pourrait-il être considéré comme une autorité qualifiée au sens de la Convention ?47 Remarquons d’emblée que si telle était la loi, force serait de constater que la loi du 18 juin 1850 n’a prévu aucune procédure régulière à la suite de laquelle cette instance devrait prendre ses décisions. Il s’ensuit donc que la loi belge, sur ce point viole, assurément la Convention.
74Nous nous permettons cependant de douter que le Collège des bourgmestre et échevins puisse être en toute circonstance considéré comme une autorité qualifiée et appropriée. En effet, ce serait particulièrement le cas lorsque cette instance poursuit, de son propre chef, le placement d’un malade en vue d’exécuter ses obligations particulières en matière d’ordre public. En effet, elle serait à ce moment juge et partie dans l’affaire dont il aurait à connaître.
75Il va de soi qu’en ce qui concerne les personnes visées par l’art. 7,5° de la loi du 18 juin 1850, c’est-à-dire les tiers intéressés, l’on pourrait difficilement admettre qu’elles puissent être considérées comme « des autorités qualifiées », ce qui pourrait passer, en définitive, comme particulièrement incongru
76Enfin, nous ne considérons pas que la loi du 18 juin 1850 pourrait être exempte de tout reproche au regard d’une violation de l’article 5, §1, c, de la Convention parce que cette législation aurait instauré en un article 17, un recours judiciaire a posteriori libellé comme suit : « Toute personne retenue dans un établissement d’aliénés, ou toute autre personne intéressée pourra, à quelque époque que ce soit, se pourvoir devant le tribunal du lieu de la situation de l’établissement qui, après les vérifications nécessaires, ordonnera, s’il y a lieu, la sortie immédiate ».
77La décision sera rendue en chambre du Conseil, sur requête signée par la partie ou par son fondé de pouvoirs, et qui sera, au préalable, communiquée au ministère public et, par celui-ci, au fonctionnaire ou à la personne qui aura provoqué la séquestration. Le tuteur de l’interdit sera, dans tous les cas, entendu par le tribunal. Il sera statué dans la même forme sur l’appel, qui pourra être interjeté, dans le délai de cinq jours, tant par la personne colloquée que par celle qui a provoqué la collocation et par le tuteur de l’interdit ».
78En effet, pourrait-on admettre que, durant le temps nécessaire à la mise en œuvre d’un tel recours, l’intéressé soit privé de sa liberté sans que les garanties instaurées par la Convention aient pu opérer d’emblée en sa faveur ? L’économie générale de la Convention et les principes qui l’inspirent commandent selon nous d’adopter cette dernière solution, le recours judiciaire n’empêchant pas, en définitive, que dans l’attente de la décision ne survienne une détention arbitraire, ce que la Convention paraît avoir prohibé en tout état de cause48.
Section 4. L’article 43 de la loi relative à la protection de la jeunesse
79Cet article dispose :
80« Lorsque, en raison de l’état mental du mineur, son séjour dans un établissement psychiatrique est nécessaire, le tribunal de la jeunesse peut, après expertise psychiatrique et par décision motivée, ordonner sa collocation. Dès que celle-ci a cessé d’être indispensable, le chef de l’établissement en donne avis au ministère public près le tribunal de la jeunesse et il est procédé pour le surplus, comme il est dit à l’article 13 de la loi du 18 juin 1850 sur le régime des aliénés, modifiée par la loi du 28 décembre 1873 ».
A. L’état mental requis
81L’on observera que l’article 43 ne vise pas l’aliénation comme condition requise pour provoquer la collocation d’un mineur. La loi se borne à utiliser l’expression « en raison de son état mental ». Il ne faudrait donc évidemment pas donner à celle-ci une interprétation plus large que celle retenue par la Cour européenne dans l’affaire Winterwerp en ce qui concerne la notion d’aliénation au sens de l’article 5 §1, c) de la Convention49.
B. La procédure
82a) La décision est prise par le juge de la jeunesse. Elle est donc judiciaire à la différence de la collocation qui est une mesure administrative. L’on soulignera tout particulièrement que le législateur a prévu qu’une telle décision doit être motivée et est précédée d’une expertise psychiatrique50.
83Elle peut faire l’objet d’un appel contre lequel est ouvert un pourvoi en cassation.
84b) L’exécution de la décision suivra le cours d’une procédure de collocation ordinaire. Nous reviendrons sur cette question lors de l’examen que nous ferons des conditions de traitement d’un aliéné colloqué au regard des droits de l’homme51.
Section 5. Conformité de l’article 43 de la loi relative à la protection de la jeunesse à l’article 5, §1, c) de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales
85L’article 43 de la loi sur la protection de la jeunesse est, pensons-nous, conforme à la Convention. En effet, la décision de collocation est prise par une autorité judiciaire qui peut être considérée comme « qualifiée » au sens où cette notion a été précisée à l’occasion de l’arrêt Winterwerp. Toutefois, il convient de veiller à ce que devant cette instance judiciaire les règles qu’implique un débat contradictoire soient respectées. Cette condition, l’on s’en souviendra, constitue l’une des exigences fondamentales de la Convention pour permettre la tenue d’un procès équitable qui suppose l’impartialité du juge et l’exercice effectif des droits de la défense52.
Section 6. Les pratiques non fondées sur l’article 43 de la loi relative à la protection de la jeunesse ou la loi du 18 juin 1850 et leur conformité avec l’article 5 de la Convention
86Il convient de s’interroger sur certaines pratiques qui se sont développées au cours de ces dernières années et qui ont eu pour résultat de maintenir des mineurs dans un établissement psychiatrique fermé en vue de les soumettre à une thérapie appropriée sans recourir pour autant à l’application de ces dispositions.
87Les initiateurs de telles pratiques ont tenté de les justifier notamment, en soutenant que les diverses mesures prévues par la loi relative à la protection de la jeunesse étaient susceptibles de recevoir des applications variées et souples, compte tenu de l’esprit ayant présidé à l’élaboration de cette législation53.
88Les travaux préparatoires de la loi précisent, en effet, que « dans l’économie générale du projet, il est bien entendu que toutes les mesures, quelles qu’elles soient, doivent être prises en s’inspirant de l’intérêt de l’enfant »54.
89Cette notion paraît dominer l’entièreté du contenu de la loi que le législateur a voulu, à cet effet, très souple, et notamment, dans des domaines « fluctuants de par la conjoncture économique et en vue de permettre une adaptation automatique à toute nouvelle forme de thérapie »55.
90Ainsi, en jurisprudence, il est très rapidement apparu que pour apprécier l’intérêt de l’enfant, il convenait en définitive de s’en remettre « à la conscience du juge »56.
91Cette manière de concevoir l’application des nombreuses dispositions contenues dans la loi sur la protection de la jeunesse explique, selon nous, les interprétations parfois très larges qui en ont été données.
92Si nous pouvons certes admettre que le placement d’un mineur puisse être décidé par le juge de la jeunesse chez un particulier ou dans un établissement privé, par exemple, en vue d’y subir une thérapie appropriée à son état mental, nous pensons toutefois que ce placement ne se conçoit qu’en régime ouvert. Si la thérapie nécessite le placement en régime fermé, l’on ne pourrait faire l’économie de l’application de la loi du 18 juin 1850 ou l’article 43 de la loi sur la protection de la jeunesse.
93Deux raisons juridiques commandent, selon nous, l’adoption de cette stricte interprétation.
94Les garanties reconnues par la Convention en ce qui concerne l’enfermement des aliénés et que nous avons déjà examinées57, bénéficient tant aux majeurs qu’aux mineurs et aucune distinction ne peut être faite à cet égard.
95Il s’ensuit que l’application de ces garanties et de la loi qui les met en œuvre, ne pourront jamais, dans aucunes circonstances, fussent-elles dramatiques ou particulièrement graves, être suspendues ou différées au nom de « l’intérêt de l’enfant » et quelles que soient les conclusions dégagées en « conscience » par un juge à cet égard. La loi belge n’a, de surcroît, prévu de possibilité d’exécuter une mesure de placement en régime fermé que dans des établissements spécifiques, les établissements de l’État (Mol et Braine-le-Château). Ainsi, tout placement effectué dans un autre milieu, chez un particulier ou dans un établissement privé par exemple, devra toujours s’effectuer en régime ouvert.
96De plus, il convient de souligner que si, dans un but thérapeutique, une mesure privative de liberté venait à être décidée conformément à la Convention et à la loi, encore faudrait-il s’interroger sur la spécificité du lieu où s’exécutera la décision.
97La Cour européenne des droits de l’homme58 a, en effet, posé la question de savoir jusqu’à quel point l’expression « détention régulière d’un aliéné » devait être entendue. Elle a rappelé que cette notion vise non seulement le fait de priver de liberté le malade mental mais aussi les modalités d’exécution de l’internement, telles que le lieu, le cadre, le régime de celui-ci.
98La Cour a ainsi considéré que pour que la « détention » du malade mental soit régulière au regard de l’article 5 de la Convention, elle doit se dérouler dans un établissement approprié en vue de prodiguer à l’intéressé les soins que requiert son état, tels une clinique ou un hôpital par exemple.
CHAPITRE II. Le droit au traitement
Section 1. La notion de santé et le droit au traitement
A. La santé
99La santé constitue de toute évidence une donnée fondamentale pour déterminer, le cas échéant, la mesure la plus adéquate à adopter en vue de préserver l’intérêt d’un mineur à l’instar de quiconque d’ailleurs. Si l’on n’y prend garde, il est à craindre, cependant, que la notion de santé puisse se concevoir de manière fort large et, en définitive, revêtir des sens multiples selon les circonstances et les fins poursuivies. Nous citerons à titre d’exemple :
le 4e Congrès des Nations unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants qui a déclaré que la santé concernait non seulement le bienêtre physique ou mental mais aussi social59 ;
l’article 25 de la Déclaration universelle des droits de l’homme des Nations unies qui mentionne les soins médicaux parmi les moyens d’assurer à la personne « un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé » ;
une décision récente de la Cour d’appel de Bruxelles a reconnu aux proches riverains d’un site pollué le droit à agir en justice au nom de leur « droit à la santé »60.
B. Le traitement
100Le droit au traitement constitue le corollaire de la conception large et très englobante que peut revêtir la notion de santé. Un tel droit a d’ailleurs été reconnu dans des instruments juridiques internationaux qui exercent une réelle influence sur les politiques mises en œuvre par les autorités nationales61.
101Ainsi, le préambule de la constitution de l’OMS et l’article 12 du Pacte international des Nations unies se réfèrent au « meilleur état de santé que la personne soit capable d’atteindre », comme droit fondamental qui implique le droit au traitement, au sens large du terme...
102L’article 13 de la Charte sociale européenne énonce le droit « à l’assistance sociale et médicale » et va dans le même sens.
103La Charte du malade usager de l’hôpital, adoptée par le comité hospitalier de la Communauté économique européenne, lors de sa 20e assemblée plénière tenue à Luxembourg du 6 au 9 mai 1979, se réfère aux droits du malade d’accéder aux « services hospitaliers adéquats à son état ou à sa maladie » ainsi qu’à la prestation des soins médicaux. Cette charte énonce, à son tour, le droit au traitement. Ce droit figure également dans la déclaration des droits du déficient mental et dans la déclaration des droits des personnes handicapées. C’est ainsi que le « déficient mental a droit aux soins médicaux et aux traitements physiques appropriés »62. Dans un sens plus large, tout handicapé physique ou mental « a droit au traitement médical, psychologique et fonctionnel »63.
104Il s’ensuit que l’on peut parler, à cet égard, d’un véritable droit au traitement énoncé dans le cadre de l’obligation générale des États d’assurer la protection de la santé de leur population. Cette notion de droit au traitement, à l’instar de ce que nous avons décrit pour celle de santé, pourra également prendre des sens divers et multiples selon les circonstances.
105Ainsi, le caractère impératif, voire absolu de ce droit, aura pour conséquence de conférer une légitimité toute particulière aux mesures prises par la personne ou l’autorité chargée de veiller à l’intérêt d’un mineur en vue de lui faire subir un traitement tenu pour indispensable.
106Sur le plan juridique, il y a lieu, toutefois, d’assigner à cet impératif certaines bornes.
107A cet effet, il convient de se reporter, d’une part, aux principes classiques qui gouvernent l’intervention médicale et, d’autre part, aux droits du patient, notion nouvelle dont le contenu ne cesse d’ailleurs de s’affiner au fil du développement des sciences médicales.
Section 2. Les principes juridiques classiques gouvernant l’intervention médicale lors d’un traitement
A. Le droit pénal
108Traditionnellement, l’on considère que l’acte médical doit être assorti d’une justification. Sinon il pourrait constituer une infraction. Ainsi, l’acte médical n’est pas nécessairement légitime parce qu’il serait déclaré comme tel. S’il n’était pas justifié, cet acte pourrait être tenu pour un coup, une blessure par exemple, au sens où le Code pénal entend ces termes.
109Rappelons ici, très brièvement, que les notions de coups et blessures peuvent, en droit pénal, recevoir une large signification. Il pourrait s’agir d’une lésion, fût-elle minime, à la suite d’une piqûre par exemple64. Le Code pénal n’a pas énoncé les causes de justification d’un acte médical. Elles sont précisées par une législation spécifique, la jurisprudence et la doctrine65.
110Pour être justifié, un acte médical doit :
être posé par une personne autorisée à exercer l’art médical (art. 2 de l’A.R. no 78 du 10 novembre 1967) ;
poursuivre un but curatif ou préventif (art. 1 du même A.R.) ;
présenter un caractère de nécessité suffisante ;
observer une proportion entre les bénéfices escomptés et les risques encourus.
111L’on relèvera tout particulièrement que l’une de ces justifications porte sur la nécessité d’un but curatif. Selon la doctrine66, ce dernier doit s’entendre de manière restrictive, c’est-à-dire comme visant le rétablissement de la santé altérée.
112Il conviendra donc de demeurer attentif à ce qu’implique concrètement, dans un cas d’espèce, le but curatif poursuivi, de même que sa nécessité. La démarche médicale s’expose donc à la critique et à l’explicitation des moyens mis en œuvre pour aboutir aux objectifs qui lui sont assignés.
113Cette critique s’imposera d’autant plus, nous semble-t-il, que la notion de santé, ainsi que nous l’avons souligné, est susceptible de revêtir un sens large et, de ce fait, entraîner « l’érosion »67 d’une indispensable justification de l’acte médical, à savoir son but curatif.
B. Le droit civil
114L’on s’accorde à considérer que les relations médecin-malade procèdent d’un contrat basé sur le consentement libre et éclairé des parties en vue de maintenir ou de rétablir l’état de santé du malade68. Sur cette base, il est unanimement admis que le médecin doit informer son patient au sujet des affections décelées et des soins qui s’imposent. Il s’agit, l’on s’en aperçoit, d’une condition essentielle en vue de permettre au malade de donner son accord pour la mise en œuvre et la poursuite de la thérapie préconisée par son médecin.
115Traditionnellement, l’on rappelle également qu’il appartiendra aux représentants légaux d’un mineur de donner leur accord en lieu et place de ce dernier avant de lui administrer des soins.
116L’on peut toutefois s’interroger sur le caractère quelque peu fictif d’une relation médecin-patient procédant d’un contrat et entraînant pour les parties les conséquences que nous venons brièvement d’évoquer.
117Ainsi, il a été relevé de manière fort pertinente dans la pratique l’idée que la meilleure garantie de la personne du malade réside dans la conscience du médecin, compte tenu, notamment, du progrès scientifique et de la haute technicité que celui-ci a développés.
118Pour X. Dijon, il sera de plus en plus difficile « d’admettre que l’acte médical est un contrat entre le médecin et le patient, ce qui suppose, d’une part, une certaine égalité de force entre les deux contractants et, d’autre part, la possibilité pour le patient de consentir de façon libre et éclairée à ce qui lui est médicalement proposé »69.
119Cet auteur en a conclu que l’on assistait à l’émergence d’un modèle d’intervention médicale qui s’apparentait davantage à un « ministère » qu’à un « véritable contrat ».
120Nous pensons toutefois qu’il est indispensable de maintenir dans la pratique toute l’effectivité du modèle contractuel et nous ne voyons pas quelle autre figure imaginer pour rendre compte de la relation médecin-malade. En effet, traduire cette dernière en la forme d’un contrat constitue le seul moyen pour le malade de préserver sa libre disposition sur son corps et, de ce fait, de n’être point réduit à une seule dimension de malade ou de patient, c’est-à-dire, en définitive, à un objet.
Section 3. Les droits fondamentaux des patients à l’occasion d’un traitement
A. Leur contenu
121Aucune législation spécifique ne définit les droits du patient.
122a) Il convient, tout d’abord, de se référer à un ensemble de textes émanant d’instances internationales qui, s’ils ne sont pas toujours consacrés comme tels dans notre droit positif, constituent cependant autant de lignes directrices ou des standards minimaux que les Etats nationaux sont invités à transcrire dans leur législation.
123Nous nous bornons à rappeler le texte le plus complet qui a été rédigé actuellement sur ce sujet. Il s’agit d’un document de synthèse intitulé « Charte des droits du malade usager de l’hôpital » adoptée à Luxembourg le 9 mai 1979 par le comité hospitalier de la CEE et qui énonce :
le droit d’être soigné dans le respect de sa dignité humaine ;
le droit d’accepter ou de refuser toute prestation de diagnostic ou de traitement ;
le droit d’être informé de ce qui concerne son état et d’être complètement informé à l’avance des risques que peut présenter toute prestation inhabituelle en vue du diagnostic ou du traitement ;
le droit à la protection de la vie privée, au respect et à la reconnaissance de ses convictions religieuses ou philosophiques ;
le droit de déposer une réclamation, de voir celle-ci examinée et d’être informé des suites données.
124Ces dispositions procèdent d’une rationalité commune : la personne humaine doit demeurer hors d’atteinte d’une appréhension totale ou d’une subversion intégrale. Elle doit conserver, à cet effet, une sphère d’existence propre et intangible, suffisamment autonome par rapport à quiconque.
125b) En droit belge, l’on relèvera également un ensemble de dispositions qui procèdent du même esprit et ayant pour but de protéger l’intégrité de l’individu quelle que soient les circonstances.
1261. La Convention européenne des droits de l’homme, qui a des effets directs en droit interne, consacre à cet effet de véritables normes :
les droits à l’intégrité physique : le droit à la vie (art. 2), l’interdiction de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (art. 3) ;
les droits à l’intimité : le droit au respect de la vie privée (art. 8), le droit au respect de la vie familiale (art. 8), le droit au respect de la correspondance (art. 8) ;
les droits intellectuels : le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion (art. 9) ;
les droits à la sûreté de la personne : le droit à la liberté et à la sûreté en général et le droit de n’être privé de liberté que dans certains cas et selon les lois légales (art. 5, § 1er).
1272. De tels droits, qualifiés encore de fondamentaux, se retrouvent également énoncés dans la Constitution, et sont même protégés par des dispositions inscrites dans le Code pénal :
le droit à la vie et à l’intégrité physique (art. 434 à 437) ;
la liberté des cultes (articles 142 à 146) ;
le secret des lettres (articles 460 et 460 bis) ;
la liberté d’association (article 20 de la Constitution et loi du 24 mai 1921).
128Selon K. Rimanque et P. Peeters, l’utilisation du concept de « droit fondamental » est récente70. Il est emprunté à la littérature allemande (die Grundrechte) et a fait l’objet, par la suite, d’une traduction littérale en Hollande (grondrecht) pour être enfin reçu en Belgique où l’expression « droit fondamental » semble fréquemment utilisée. Ces auteurs posent notamment la question de savoir ce qui entraîne le passage d’un droit subjectif au niveau d’un droit fondamental. La réponse ne leur semble pas évidente compte tenu non seulement des enjeux politiques sous-jacents, mais aussi à la suite d’un usage véritablement inflatoire du concept.
129Sans entrer dans de plus amples détails, nous considérons que, sur le plan formel, les droits fondamentaux sont des droits subjectifs consacrés par la Constitution et les traités. Quant au fond, ces droits subjectifs sont reconnus et garantis parce qu’ils sont considérés politiquement comme des valeurs essentielles de la société qui s’imposent impérativement à quiconque. Ainsi, la protection de ces droits fondamentaux donne lieu à des normes supérieures, constitutives de « l’ordre public »71.
130Ce dernier point devrait retenir tout particulièrement notre attention, car il s’ensuit, nous semble-t-il, que :
les exigences de cette protection transcendent les relations contractuelles et l’on ne pourrait y renoncer. Ainsi, les clauses d’un contrat médical ou d’hospitalisation qui porteraient atteinte à ces droits fondamentaux pourraient être déclarés nulles sur la base des article 6, 1131 et 1133 du Code civil72.
la violation d’un droit fondamental ne doit pas être nécessairement réprimée sur la plan pénal pour constituer un acte illicite générant une faute au sens des articles 1382 et 1383 du Code civil73. On observera à cet égard que seules les conséquences d’une atteinte à un droit fondamental sont susceptibles de faire l’objet d’une réparation, bien que cette violation en tant que telle, dans certaines circonstances, puisse entraîner un préjudice moral74.
B. L’étendue et la portée de la protection légale conférée aux droits fondamentaux des patients
a) La Constitution belge
131L’article 20 de la Constitution de 1831 avait pour but évident de protéger la liberté d’association contre les emprises des pouvoirs publics, c’est ce qui explique, notamment, que l’exercice de cette liberté ne pouvait être soumise à aucune mesure préventive. Il s’agissait d’une conception essentiellement libérale selon laquelle il importait, avant tout, de prémunir les citoyens contre l’État. À cette fin, des possibilités de lui résister leur furent concédées en consacrant dans la Constitution des droits et des libertés intangibles par le pouvoir politique75.
132Au cours des premières décennies du XXe siècle, on s’aperçut que ces protections étaient insuffisantes et qu’il convenait de les compléter. Ainsi, l’on remarqua, pour la liberté d’association, qu’elle ne risquait pas seulement d’être sérieusement contrariée par l’Etat, mais aussi entravée et même paralysée par le mauvais vouloir des particuliers76. Cet objectif fut par exemple atteint, en Belgique, par la loi du 24 mai 1921 garantissant la liberté d’association.
133À cet égard, l’on parlera de l’application « horizontale et interindividuelle des droits fondamentaux » par opposition à l’application dite « verticale », c’est-à-dire dans les relations entre l’individu et l’État que consacrait seulement la Constitution de 183177.
134Nous noterons aussi que la protection dite « horizontale » d’un droit fondamental est effectivement assurée dans la mesure où une loi le consacre en tant que tel. Ce sera, par exemple, le cas des dispositions reprises dans le Code pénal et qui concernent le droit à la vie et à l’intégrité physique, la liberté des cultes, le secret des lettres78.
b) La Convention européenne des droits de l’homme
135La question se pose également en ce qui concerne l’étendue de la protection que confère la Convention européenne des droits de l’homme aux libertés fondamentales qu’elle consacre. En effet, il n’est pas apparu évident que la Convention avait institué une protection juridique spécifique pour les individus victimes d’une violation de ces libertés à l’occasion de leurs relations privées. En effet, le texte de la Convention ne compte aucune disposition explicite à ce sujet et le recours aux travaux préparatoires ne permet pas de tirer des conclusions pertinentes pour résoudre la question
c) La doctrine
136Pour Μ. A. Eissen, cependant, l’interprétation de deux clauses générales de la Convention permettrait malgré tout de prétendre que la protection des droits consacrée par la Convention s’applique également aux relations interindividuelles79.
137— L’article 17 :
138« Aucune des dispositions de la Convention ne peut être interprétée comme impliquant pour un État, un groupement ou un individu, un droit quelconque de se livrer à une activité ou d’accomplir un acte visant à la destruction des droits et libertés reconnus dans la Convention ou à des limitations plus amples de ces droits et libertés que celles prévues à la dite Convention ».
139Si c’est à tout quiconque que l’article 17 dénie le droit de perpétrer l’acte qu’il prohibe, ne pourrait-on pas en déduire que cette disposition impose à chacun le devoir de respecter les droits de l’autre et « d’utiliser sa liberté à des fins compatibles avec la liberté » ?
140— L’article 13 :
141« Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la... Convention ont été violés, a droit à l’octroi d’un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l’exercice de leurs fonctions officielles ».
142Toujours pour Μ. A. Eissen, si ce texte a spécifié que les victimes d’atteintes aux libertés protégées doivent disposer d’un recours effectif devant une instance nationale, alors même que ces atteintes seraient imputables à des personnes investies de fonctions officielles, l’article 13 admettrait dès lors implicitement, mais nécessairement, que les violations de la Convention peuvent émaner de particuliers et, ajoute cet auteur, « on ne conçoit pas de violation sans une obligation préexistante »80.
143Afin de démontrer que la Convention donne naissance à des obligations individuelles à côté des obligations étatiques, Μ. A. Eissen avance également un troisième argument à partir du « mode de formulation des droits et libertés reconnus ».
144La plupart des articles pertinents de la Convention débutent par les mots « nul ne peut » ou « toute personne a droit à ». Ainsi, l’accent serait mis davantage sur les droits subjectifs plutôt que sur les obligations correspondantes en manière telle que ces droits valent « erga omnes à l’égard des personnes physiques et morales relevant de la juridiction des Etats contractants aussi bien qu’à l’égard des États eux-mêmes »81.
d) La Cour européenne des droits de l’homme
145Toutefois, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme ne semble pas s’être inspirée de manière systématique de la subtile argumentation développée par Μ. A. Eissen.
146Tout en ne réservant pas de manière absolue l’application des dispositions de la Convention aux seuls rapports entre les individus et l’État, elle n’en n’a pas pour autant déduit de manière explicite que celles-ci concernaient aussi les rapports privés. Ainsi que nous aurons l’occasion de le montrer, la Cour. a préféré adopter à cet égard une démarche empirique et pragmatique dans chaque cas d’espèce qui lui était soumis.
147Ainsi, la Cour a prononcé à cet égard plusieurs arrêts importants concernant, notamment, la liberté d’association82.
148Nous n’en retiendrons qu’un, à savoir l’arrêt Young, James et Webster du 13 août 1981 qui nous a semblé constituer un exemple significatif de la position adoptée par la Cour en vue de répondre à la question qui nous occupe.
149Les faits de la cause peuvent se résumer succinctement comme suit. MM. Young, James et Webster travaillaient à la Société des chemins de fer britanniques. En 1975, cette dernière conclut avec trois syndicats un accord de « closed shop » subordonnant désormais pareil emploi à l’affiliation à l’un de ces derniers. Faute de remplir cette condition, les requérants furent renvoyés en 1976 et se prétendirent victimes de violation des articles 9, 10, 11 et 13 de la Convention ; pour l’essentiel, nous noterons qu’un « closed shop » est une entreprise ou un atelier dans lesquels, à la suite d’un accord ou arrangement entre un ou des syndicats et un ou des employeurs ou associations d’employeurs, les salariés d’une catégorie déterminée sont, en pratique, obligés d’appartenir ou d’adhérer à un syndicat désigné. Il s’agit d’une situation reconnue par la loi britannique qui n’astreint pas les employeurs à recueillir directement le consentement ou avis de chaque salarié avant de donner effet à de tels accords ou arrangements. L’arrêt a porté en réalité sur la liberté de ne pas s’associer et il s’agit de savoir si, dans cette hypothèse, l’article 11 de la Convention s’applique à l’aspect négatif de ce droit.
150De toute évidence, la Cour ne répond pas de manière explicite à la question posée. Après s’être interrogée en tout premier lieu sur « l’existence d’une responsabilité de l’Etat défendeur »83, elle relèvera cependant plus loin que « la substance » même de la liberté d’association comprend une certaine liberté de choix et que l’aspect négatif de celle-ci ne sort pas complètement « du domaine de l’article 11 », malgré les termes des travaux préparatoires84.
151Selon la Cour : « A interpréter l’article 11 comme autorisant n’importe quelle sorte de coercition en matière d’appartenance syndicale, on toucherait à la substance même de la liberté qu’il entend garantir »85. Ainsi, pour celle-ci, « à supposer que l’article 11 ne garantisse pas l’élément négatif de cette liberté à l’égard de l’élément positif, contraindre quelqu’un à s’inscrire à un syndicat déterminé ne peut pas se heurter toujours à la Convention »86.
152La Cour, tout en insistant particulièrement sur le fait qu’elle ne doit prendre en compte que les circonstances propres au cas concret dont elle est saisie, estime toutefois que cette contrainte ne l’empêche pas de relever les atteintes les plus manifestes à la liberté d’association que révèle le cas d’espèce. À cet effet, elle adopte une méthode qui consiste à déterminer si le tort infligé aux requérants « se révèle supérieur à ce qu’exigeait la réalisation d’un juste équilibre entre les différents intérêts en présence. En l’espèce, conclut-elle, on ne saurait le considérer comme proportionnel aux buts poursuivis »87, car « les restrictions litigieuses n’étaient pas nécessaires dans une société démocratique au sens du § 2 de l’article 11 ».
153Ainsi, bien qu’il faille parfois subordonner les intérêts des individus à ceux d’un groupe, la démocratie ne se ramène pas à « la suprématie constante de l’opinion d’une majorité ; elle commande un équilibre qui assure aux minorités un juste traitement et qui évite tout abus d’une position dominante »88.
154Le raisonnement adopté par la Cour procède essentiellement d’une démarche relevant davantage d’une politique judiciaire que de considérations théoriques ou doctrinales aux termes desquelles seraient énoncées des conclusions péremptoires et dogmatiques. Cette politique judiciaire est menée à partir d’un postulat qui pourrait être résumé comme suit : quand bien même la Convention ne protège que la liberté d’association à l’occasion des relations entretenues entre les individus et l’État, par exemple, il n’en demeure pas moins que pareille protection risque d’être insignifiante si l’on ne prend pas en compte ce qui constitue la « substance » d’une telle liberté ; à cet effet, rien n’empêche d’avoir égard à des relations juridiques différentes de celles auxquelles s’applique la Convention sensu stricto. Dans un tel cas, la Cour se fixe comme objectif non seulement de déterminer ce qui constitue, en l’espèce, cette notion de « substance ». Elle se réserve également la faculté d’opérer sur cette base les équilibres qui s’imposent entre les diverses nécessités relevées en vue d’assurer l’efficience des libertés et droits fondamentaux que la Convention consacre. Ce modèle de politique judiciaire pourrait également servir de référence en vue de résoudre les conflits concernant la protection des libertés fondamentales d’un patient face au médecin à l’hôpital, voire aux personnes ou aux autorités chargées de veiller à son intérêt s’il est mineur ou malade mental.
155Il s’agira, dans chaque cas d’espèce, de fonder les impératifs qu’implique nécessairement l’exercice des droits fondamentaux litigieux en effectuant les compromis qui s’imposent. Une telle méthode exclut de toute évidence une prise de position dogmatique a priori et, dirions-nous, l’esprit de système.
Section 4. La mise en œuvre du traitement des malades mentaux privés de liberté et le respect de leurs droits fondamentaux
A. L’exécution forcée des traitements
156Dans la mesure où un aliéné a été privé de sa liberté et qu’il incombe de le soigner dans un établissement approprié à son état, il va de soi que des traitements peuvent lui être prodigués sous la contrainte. Cette dernière constitue en quelque sorte le prolongement de la décision initiale de privation de liberté. Le principe ne semble pas devoir être contesté. En revanche, il n’implique pas que l’on puisse imposer n’importe quel traitement et qu’il convient, en tout état de cause, de respecter les conditions décrites dans la section suivante.
B. Les conditions d’exécution des mesures privatives de liberté des malades mentaux
157A l’occasion de l’examen de l’article 5 de la Convention, nous avions tenté de préciser la signification de la notion de « détention régulière d’un mineur ou d’un aliéné »89.
158Nous avions signalé à cet égard qu’il convenait d’appliquer le principe général selon lequel la régularité de la détention d’un mineur ou d’un aliéné imposait la conformité au but des restrictions autorisées par l’article 5.
159Ce principe est d’ailleurs énoncé à l’article 18 de la Convention qui dispose : « Les restrictions qui, aux termes de la présente Convention, sont apportées aux dits droits et libertés ne peuvent être appliquées que dans le but pour lequel elles ont été prévues ». Ainsi, à l’occasion de l’affaire Winterwerp90, la Cour a souligné tout particulièrement que la régularité d’une détention d’un aliéné devait exister tant au niveau de l’adoption de la mesure, ce que nous avons examiné au chapitre I, mais aussi lors de son application, ce qui va retenir plus particulièrement notre attention à ce stade de notre rapport.
a) Le lieu de l’exécution de la mesure
160L’arrêt Winterwerp mentionne « qu’il faut un certain lien entre, d’une part, le motif invoqué pour la privation de liberté autorisée et le lieu de détention ». Ainsi, la détention d’un malade mental pourra être considérée comme régulière si elle se déroule dans un hôpital ou une clinique.
161De surcroît, le simple fait d’être retenu dans un établissement psychiatrique n’est pas encore nécessairement suffisant pour que l’on puisse conclure à la régularité de la détention d’un aliéné. Encore faut-il qu’il y soit effectivement traité. Sur ce point, nous pensons que la Cour européenne des droits de l’homme a consacré de manière explicite un véritable droit au traitement d’un aliéné privé de sa liberté. C’est ainsi que dans un arrêt Ashingdane91, déjà cité, la Cour a nettement affirmé que : « L’enfermement d’un malade mental a pour but le traitement en vue d’une guérison, en même temps que la protection des tiers contre les malades vraiment dangereux. La tâche et le devoir de l’Administration sont donc avant tout de concourir au traitement médical et de rechercher les meilleurs moyens d’assurer la guérison... ». Enfin, il convient de rappeler que l’arrêt Winterwerp a retenu également comme une des conditions de la régularité de la détention d’un aliéné, l’interdiction de la prolonger valablement sans la persistance constante du trouble qui a justifié son adoption. Autrement dit, il convient qu’à tout instant de l’exécution de la mesure, il puisse être prouvé que le trouble continue à revêtir un caractère et une ampleur légitimant l’internement.
b) Le régime de l’exécution de la mesure
162Nous venons d’évoquer la nécessité d’exécuter la mesure de privation de liberté d’un aliéné dans un établissement approprié, c’est-à-dire dans un lieu où il soit effectivement soigné compte tenu de son état. Cependant, encore faut-il s’interroger sur les conditions du séjour du malade dans un tel établissement et la manière dont il importe de lui prodiguer les soins qu’il requiert, ce qui constitue le régime de sa détention.
1631. L’obligation d’informer le malade des raisons de sa privation de liberté.
164L’on sait que la loi du 18 juin 1850 n’a rien prévu à cet égard et la personne colloquée ne doit pas être obligatoirement informée de la mesure qui la frappe. En ce qui concerne une mesure de collocation prise sur la base de l’article 43 de la loi sur la protection de la jeunesse, la situation est toute différente. En effet, s’agissant d’une décision judiciaire, elle suppose une citation préalable de l’intéressé et, une fois rendue, sa communication officielle à celui-ci en vue de lui permettre d’exercer, le cas échéant, les voies de recours d’opposition ou d’appel. L’on pourrait toutefois s’interroger sur l’existence dans la Convention d’une obligation d’informer le malade des raisons de sa privation de liberté. En effet, de prime abord, le texte de l’article 5 § 2 qui porte sur une telle obligation vise une hypothèse différente de celle qui nous occupe : « Toute personne arrêtée doit être informée dans le plus court délai et dans une langue qu’elle comprend, des raisons de son arrestation et toute accusation portée contre elle... ».
165Cette disposition paraît de toute évidence concerner exclusivement le droit pénal et non point la privation de liberté d’un aliéné.
166Toutefois, à l’occasion d’une affaire X contre Royaume-Uni, la Commission a tenté de préciser le champ d’application de cet article 5 § 292. Elle a estimé sans ambage, que les malades mentaux ne devaient pas faire exception à cette règle. Elle a cependant précisé que : « Les modalités de l’information pouvaient varier en fonction des circonstances de l’espèce ». Quant aux personnes auxquelles il incombait de fournir cette information au malade, la Commission a précisé qu’il ne s’agissait pas obligatoirement des policiers, mais des médecins. Ce devoir doit être exécuté « promptement », c’est-à-dire au plus tard à l’arrivée du malade à l’hôpital
167Par la suite, dans son arrêt X contre Royaume-Uni, la Cour ne reprendra pas telle quelle la position adoptée par la Commission93. En réalité, elle ne se prononcera pas sur cette question, sinon que de manière incidente, estimant que, compte tenu du cas d’espèce, il ne lui appartenait pas de le faire. Elle se bornera à rappeler qu’il convient de donner la possibilité à « quiconque » d’introduire un recours sur la légalité de sa détention et pour ce faire qu’il importait évidemment de lui révéler « dans le plus court délai et à un degré suffisant, les faits et les règles juridiques invoqués pour le priver de sa liberté. Le terme « quiconque » est suffisamment général, pensons-nous, pour nous permettre de conclure qu’il vise également les aliénés privés de leur liberté ».
1682. Les conditions de séjour d’un aliéné privé de sa liberté dans un établissement approprié94.
169Divers textes, élaborés dans le cadre des institutions des Nations unies et du Conseil de l’Europe, consacrent le principe du respect de la dignité de la personne humaine, notamment celui de sa vie privée, dans tout milieu thérapeutique L’on y insiste aussi sur la nécessité de recevoir les malades dans des conditions de vie satisfaisante, permettant de vivre dans la dignité et le bien-être95.
170Citons également la déclaration de Hawaï selon laquelle le « respect dû à la dignité à laquelle ont droit tous les êtres humains » constitue une condition de la thérapeutique susceptible d’être appliquée.
171Traditionnellement, cette question se règle, en droit, par l’adoption d’un règlement d’ordre intérieur au sein de l’établissement.
172À la suite de la loi du 18 juin 1850, un arrêté royal du 1er juin 187496 modifié par l’arrêté royal du 23 octobre 196497 ont prévu que tous les établissements psychiatriques destinés à recevoir des aliénés colloqués devaient adopter un règlement d’ordre intérieur portant sur les points suivants : le service économique, la surveillance et les permissions de sortie des aliénés, l’organisation du travail, du service religieux, les distractions, les moyens de contrainte, les punitions, la correspondance et les visites que les aliénés peuvent recevoir.
173L’article 30 de l’arrêté royal du 1er juin 1874, prescrit également la tenue « d’un registre de contrainte » coté et parafé par le procureur du Roi. Ce registre doit mentionner :
les cas de « séquestration absolue, de punitions ou de contrainte » et leur durée ;
le visa quotidien du médecin ;
les observations éventuelles du médecin.
174Par la suite, des circulaires ministérielles « recommanderont » de fouiller les malades et, particulièrement, de leur enlever leur carte d’identité, dès l’entrée dans l’établissement98.
175Il faudra attendre l’arrêté royal du 12 janvier 1970 pour que soit imposée aux établissements psychiatriques la liberté pleine et entière d’opinion, philosophique, religieuse et politique.
176L’on remarquera tout particulièrement que la loi du 18 juin 1850 avait expressément garanti en son article 35 l’exercice du droit de plainte. Des circulaires ministérielles de 1872 et 1930 prescrivent même le placement d’une boîte aux lettres destinée à recevoir les missives adressées par les colloqués à l’extérieur ainsi qu’aux autorités.
177Si, toutefois, la libre correspondance n’est pas explicitement garantie, il convient d’observer que la loi ne prévoit aucune exception à cet égard et, de ce fait, ce seront les articles 22 de la Constitution belge et 8 de Convention qui s’appliqueront. Autrement dit, sur la base de ces dispositions, le respect de la libre correspondance du malade avec l’extérieur doit être absolu.
178Enfin, en ce qui concerne les visites, le principe instauré par l’arrêté royal du 12 janvier 1970 est que les visites ne peuvent être systématiquement interdites mais simplement réglementées. Le projet de loi relatif à la protection de la personne des malades mentaux, actuellement discuté au sein de la Commission de la justice du Sénat99, prévoit en son article 32 les conditions dans lesquelles un aliéné privé de sa liberté doit être traité et hébergé dans un établissement approprié. Ces conditions s’inspirent, tout d’abord, de ce qui existe déjà actuellement. Ainsi, si le projet est définitivement voté, ce sera donc une loi qui mentionnera ce qui, jusqu’à présent, n’était réglementé que par des arrêtés royaux ou des circulaires ministérielles. Cependant, le projet consacre également de nouvelles garanties en vue, par exemple, d’assurer « l’épanouissement culturel du malade ». Il est également prévu que le « malade peut recevoir la visite de son avocat, du médecin de son choix et, conformément au règlement d’ordre intérieur, de la personne de confiance ou, sauf contre-indication médicale, de toute autre personne ».
179De telles dispositions sont manifestement édictées en vue de sauvegarder les relations sociales de la personne privée de sa liberté et l’exercice effectif de ses droits de défense. Dans ce dernier ordre d’idée, il est prévu que « le médecin choisi par le malade et son avocat peuvent se faire présenter le registre prévu à l’article 10100. Ceux-ci peuvent obtenir du médecin du service tous renseignements utiles de nature à apprécier l’état du malade. En outre, le médecin choisi par le malade peut prendre connaissance du dossier médical en présence du médecin du service.
180L’ensemble des garanties que nous venons d’évoquer peuvent, de toute évidence, être revendiquées tant par un majeur qu’un mineur colloqué. Rappelons que la loi de 1850 vise les aliénés sans établir de distinctions à cet égard. Il en va de même, avons-nous souligné, des droits fondamentaux consacrés par la Constitution belge, la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales et le projet de loi relatif à la protection de la personne des malades mentaux.
181Nous pensons que le respect scrupuleux de ces dispositions fondamentales doit ainsi constituer l’une des conditions de tout agrément d’un établissement psychiatrique en vue de recevoir des aliénés privés de leur liberté. Quand bien même cet acte d’agrément ne le mentionnerait-il pas, l’on pourrait soutenir, croyons-nous, que de telles dispositions y sont contenues implicitement. Il en irait de même, par exemple, en l’absence d’un règlement d’ordre intérieur d’une institution.
182Actuellement, l’agrément est délivré sur la base de l’article 1 de la loi du 18 juin 1850. Ce sont essentiellement des problèmes matériels relatifs aux locaux dans lesquels séjournent les malades qui sont pris en compte (dimensions des chambres, nombre de lits, température, installations sanitaires etc...)
183Si, effectivement, ces questions sont importantes et relèvent de la nécessité d’aménager pour le malade un cadre de vie conforme à la dignité humaine, il n’en demeure pas moins qu’elles doivent demeurer Tunique souci de l’autorité chargée de délivrer l’acte d’agrément. Il importe également de veiller à permettre le fonctionnement d’un établissement susceptible d’exécuter la « détention régulière » d’un aliéné, ce qui implique, avons-nous écrit, également et nécessairement la garantie du respect de tous ses droits fondamentaux.
C. Les modalités d’administration des traitements
a) L’obligation d’informer le malade privé de sa liberté au sujet du traitement qu’il va subir.
184Nous ne pensons pas que cette obligation viendrait à disparaître par le seul fait qu’un aliéné a été privé de sa liberté. Nous estimons, tout au contraire, qu’une telle situation est sans aucune incidence. C’est ainsi que le principe général inscrit à l’article 29 du Code de déontologie médicale subsiste : « le médecin doit s’efforcer d’éclairer son malade sur les raisons de toute mesure diagnostique ou thérapeutique proposée ».
185Bien plus, nous soutenons que ce devoir d’information est d’autant plus prégnant que la personne est privée de sa liberté et par voie de conséquence dans une situation de dépendance toute particulière. La seule question qui se pose est de déterminer la ou les personnes, les autorités le cas échéant, qu’il convient de contacter en vue de leur exposer les tenants et aboutissants de la thérapeutique envisagée. S’il s’agit d’un mineur, le médecin veillera tout particulièrement à s’adresser à ses représentants légaux ou à l’instance judiciaire compétente (juge de la jeunesse, parquet).
186Ce devoir d’information au sujet du traitement est d’autant plus indispensable lorsque des thérapeutiques importantes ou risquées sont prévues. Un tel devoir perdure, pensons-nous, tout au cours de la mise en œuvre du traitement et se traduit alors, plus concrètement, par l’obligation pour le médecin de répondre aux questions qui lui seraient posées à ce sujet.
187La justification de ce devoir d’information découle de l’exigence générale de régularité que doit nécessairement revêtir la détention d’un aliéné. Nous avons souligné que la notion de régularité devait s’apprécier par rapport aux buts poursuivis. Il doit s’agir, notamment, de la mise en œuvre de soins appropriés en vue de guérir l’aliéné privé à cet effet de sa liberté101.
188Cet objectif étant central et prioritaire, sa détermination, de même que sa réalisation, doivent demeurer transparentes et connues de la part du malade lui-même si possible ou, à défaut, de ses représentants légaux. Ainsi, le manquement à ce devoir d’information pourrait être tout particulièrement retenu à l’occasion d’une mise en cause de la responsabilité professionnelle du médecin chargé de soigner le malade privé de sa liberté.
b) La notion de traitement inhumain et dégradant
189L’article 99 du Code de déontologie médicale contient un principe fondamental autour duquel s’articule la matière : « le médecin doit respecter les droits imprescriptibles de la personne humaine ». Nous avons déjà eu l’occasion de préciser ce qui, en droit, constituaient les données de ces droits imprescriptibles102.
190Ainsi, quelles que soient les nécessités d’un traitement d’un aliéné privé de sa liberté, elles ne pourront jamais autoriser des atteintes à sa vie privée, son intimité, ses convictions philosophique, ses croyances religieuses, c’est-à-dire à tous les droits fondamentaux garantis par la Convention, la Constitution et les lois belges particulières.
191Nous pensons que si tel était le cas, ces traitements pourraient être considérés comme inhumains au sens de l’article 3 de la Convention qui dispose que : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ».
192L’on a souligné à juste titre le caractère absolu de cette disposition, ne comportant aucune exception et ne souffrant aucune dérogation, y compris en cas de guerre103.
193La Commission a eu l’occasion de préciser au sujet de la notion de traitement inhumain et dégradant qu’elle était susceptible de s’appliquer « isolément à des situations différentes et très diversifiées ». Il ne devrait donc pas nécessairement s’agir de violences physiques mais pourrait porter sur toute pratique qui tendrait par exemple « à créer chez des individus des sentiments de peur, d’angoisse ou d’infériorité propres à les humilier, à les avilir et à briser éventuellement leur résistance physique morale »104.
194La notion de pratique utilisée par la Commission mérite également d’être précisée. Ainsi, pour la Cour, il pourrait s’agir « en une accumulation de manquements de nature identique ou analogue, assez nombreux et liés entre eux pour ne pas se ramener à des incidents isolés ou à des exceptions et pour former un ensemble du système »105.
195Certes, des aménagements peuvent être trouvés selon les circonstances et les cas d’espèce. L’on se souviendra, à cet égard, de la manière dont la Cour a estimé devoir procéder dans chaque situation particulière à l’évaluation d’équilibres qui s’imposent entre les diverses nécessités relevées en vue d’assurer l’efficience des libertés et droits fondamentaux par rapport aux buts poursuivis106. Cette méthode a pour objectif essentiel d’éviter en définitive, que ne soit porté atteinte à la « substance » même de ceux-ci.
Conclusions
196Les mesures restrictives de la liberté d’un mineur en raison de son état mental ne peuvent se décider juridiquement que dans le respect des garanties consacrées par la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales signée à Rome le 4 novembre 1950 et adoptée en droit belge par la loi du 13 mai 1955. À cet égard, avons-nous souligné, il n’existe d’ailleurs aucune différence particulière à faire entre les mineurs et les majeurs.
197Il nous est apparu important de démontrer que les principes consacrés par la Convention ne méconnaissaient certainement pas la spécificité ou le particularisme de la maladie mentale, source de confrontation voire d’affrontement, ce qui explique, peut-être, en grande partie la complexité de cette dernière.
198En effet, la maladie mentale met en cause des principes, fondamentaux contradictoires, tel le droit à la liberté individuelle, y compris celui d’être ou non soigné sans son consentement. Elle implique aussi le droit à la protection sociale contre le danger, l’insécurité causés par autrui mais également par soi-même et pour soi-même. Ainsi, la maladie mentale « engendre des perspectives qui s’opposent selon que la défense de l’individu ou de la société occupe la première place, selon que la sauvegarde de la liberté ou le traitement du malade constitue la préoccupation primordiale »107.
199Ce que l’application des dispositions de la Convention que nous avons étudiées permet d’éviter en tout premier lieu, c’est, nous semble-t-il, une approche univoque de la maladie mentale.
200C’est ainsi qu’aucune des multiples nécessités qu’elle est susceptible de générer ne peut être érigée en impératif absolu, tel par exemple, celui de l’aspect curatif. Il en irait également de même pour la liberté d’aller et de venir qui, en soi et a priori, ne pourrait se concevoir comme intangible et sans possibilité aucune de limitations. Sur ce point, l’esprit de la Convention est à l’opposé de celui de système, ou d’un quelconque dogmatisme.
201L’on aura donc compris la raison toute particulière pour laquelle nous avons insisté sur l’importance que revêtait, dans un tel contexte, l’idée de « débat » qui devait présider préalablement à toute adoption de restrictions de liberté et celle « d’autorité qualifiée » apte à prendre une telle mesure.
Notes de bas de page
1 Cf. M. WAELBROECK, Portée et critères de l’applicabilité directe des traités internationaux, note sous Cass., 21 avril 1983, in R.C.J.B., 1985, pp. 34 et s.
2 Cf. F. OST, Le concept de « démocratie », dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, in Journal des procès, 1988, no 124, pp. 113-19.
3 Cl. LEFORT, Les droits de l’homme en question, in Les droits de l’homme dans la crise de l’Etat-Providence, R.I.E.J., 1984, no 13, p. 40.
4 Affaire Winterwerp, 24 octobre 1979, p. 16, par. 37.
5 Affaire Engel, 8 juin 1976, p. 25.
6 Décisions et Rapports de la Commission européenne des droits de l’homme, no 18, p. 154 et 156.
7 Affaire Ashingdane, 28 mai 1985, p. 19, par. 41.
8 Cf. supra, p. 95.
9 Affaire Bouamar. 28 février 1988, p. 22, par. 52. Cet arrêt fait d’ailleurs largement référence à l’arrêt Winterwerp, op. cit., supra, p. 95.
10 Ibidem, p. 21, par. 50.
11 Cf. Projet de loi du 12 mars 1969 relatif à la protection de la personne des malades mentaux, in Doc. Parl, Sénat, 1968-1969, no 253 ; Commission de la Justice du Sénat, document de travail, in Doc. Parl., Sénat, 1981-1982, no 292/4 ; Projet de loi relatif à la protection de la personne des malades mentaux. Rapport fait au nom de la Commission de la justice par Mme Hermann-Michielsen, in Doc. Parl., Sénat, 1988-1989, no 733/2, ce sera ce dernier projet auquel nous nous référons dans la suite de notre exposé.
12 M. van de KERCHOVE, Le juge et le psychiatre. Evolution de leurs pouvoirs respectifs, in Fonction de juger et pouvoir judiciaire. Transformations et déplacements, sous la direction de Ph. Gérard, F. Ost et M. van de Kerchove, Bruxelles. 1983, p. 332 et références citées, notamment : Doc. Parl, Chambre, 1848-1849, no 215, p. 4.
13 Ibidem.
14 Cass., 19 janvier 1894, Pas., 1894, p. 118.
15 Corr. Nivelles, 15 mars 1962, Rev. dr.pén., 1961-1962, p. 890.
16 P. MARCHAL, Les incapables majeurs, in Répertoire notarial, t. I, Les personnes, Bruxelles, 1984, p. 170, no 268.
17 Cf. supra, p. 98.
18 Civ. Namur, 16 septembre 1985, J.L., 1985, p. 642, Observations, J.-M. Dermagne.
19 Civ. Namur, 16 décembre 1985, Rev. rég. dr., 1986, p. 145.
20 A.R. du 1er juin 1874, art. 35.
21 Loi du 18 juin 1850, art. 8.
22 A.R. du 1er juin 1874, art. 36.
23 Le certificat médical et le bulletin annexé doivent être dressés d’après le modèle fixé par arrêté ministériel : A.M. des 25 août 1885 et 23 octobre 1902 : le médecin doit certifier avoir personnellement vu, exploré et interrogé le malade. Le chef d’établissement pourrait cependant admettre le malade malgré une mauvaise rédaction des documents administratifs. Cf. à cet égard la circulaire ministérielle du 22 décembre 1928.
24 A.R. du 1er juin 1874, art. 34.
25 Cons. Etat, 5 février 1964, R.A.A.C.E., p. 122 ; Pas., IV, p. 119.
26 Cons. Etat, 5 février 1964, ibidem.
27 Cons. Etat, 10 février 1972, Pas., 1973, IV, p. 42 ; Rev. comm., p. 104 ; R.J.D.A., p 19.
28 Gand, 22 mai 1965, R.W., 1965-1966, col. 38 ; Cons. Etat, 10 février 1972, ibidem.
29 Cons. Etat, 10 février 1972, ibidem.
30 Gand, 22 mai 1965, R.W., 1965-1966, col. 38.
31 Civ. Malines, 26 mars 1969, R.W., 1971-1972.
32 Bruxelles, 24 février 1971, R. W 1971-1972, col. 194.
33 Art. 7 de la loi du 18 juin 1850.
34 Cf. sur ce point P. MARCHAL, op. cit., p. 178 et 179.
35 Rev. adm., 1897, p. 104 et 105.
36 Art. 87 de la loi.
37 V. DE TOLLENAERE, Commentaire de la loi communale, Bruxelles, 1955, p. 959.
38 Cf. art. 95 de la loi communale.
39 P. WOUTERS et M. POLL, Du régime des malades mentaux en Belgique, Bruxelles, 1938, p. 7.
40 Art. 13 et s. de la loi du 18 juin 1850 en vertu de laquelle la personne déclarée guérie ou non aliénée ne sera mise en liberté que cinq jours après l’accomplissement des formalités légales prescrites.
41 Cons. Etat, 10 février 1972, Pas., 1973, IV, p. 42 ; Rev. comm., p. 104 ; R.J.D.A., p. 198.
42 Bruxelles, 3 janvier 1972, Rev. not. b., 1974, p. 327 ; Pas., II, p. 56.
43 A.R. du 1er juin 1874, art. 35.
44 Cf. les nombreuses références citées à cet égard par P. MARCHAL, op. cit., p. 179.
45 V. DE TOLLENAERE, op. cit.. p. 959.
46 A.R. du 1er juin 1874, art. 32.
47 Cf. Affaire De Wilde, Ooms et Versyp, 28 mai 1970, p 40, § 76, qui admet explicitement, par exemple, qu’une mesure privative de liberté puisse être prise par un organe administratif sur la base de l’art. 5, § 4 de la Convention.
48 Cf. supra, p. 95 en ce qui concerne l’application de l’article 5, § 1 de la Convention même aux « courtes détentions ».
49 Cf. supra, p. 99.
50 Cf. la contribution de M. van de KERCHOVE.
51 Cf. infra, p. 110 et s.
52 Ibidem.
53 À propos d’un exemple concret, cf. A. SPIRLET et E. VOGEL-POLSKY, Expertise relative à la légalité des pratiques de l’unité le « détour » de la « petite maison » à Chastres, in Journal du droit des jeunes, 1988, no 10, p. 19 et s.
54 Déclaration du ministre P. VERMEYLEN au cours de la séance du 10 mars 1965 au Sénat, Ann. Parl., p. 966.
55 Cf. Novelles, Protection de la jeunesse, Bruxelles, 1978, no 8 à 9. Cet ouvrage en fournit des illustrations en se référant, notamment aux art. 66, 70 et 73 de la loi relative à la protection de la jeunesse et qui concernent les personnes physiques ou morales ainsi que toute œuvre ou tout établissement s’offrant à recueillir collectivement et de façon habituelle des mineurs et qui ont été agréés à cette fin par le ministre de la justice.
Il est également fait référence à l’art. 31 qui concerne l’assistance éducative à assurer aux personnes qui ont la garde du mineur.
56 Cf. Cass., 18 février 1978, Pas., 1978, p. 664.
57 Cf. supra, p. 95.
58 Cf. suora, p. 97.
59 Cf. Criminalité, évolution sociale. Résumé des conclusions et recommandations du 4e Congrès des Nations unies sur la prévention du crime et le traitement des délinquants, Nations unies, Conseil économique et social, E/CL. 5/469, 1971, p. 11.
60 2 novembre 1989, Journal des procès, 1989, no 161, p. 30 et sv.
61 T. DOURAKI, La Convention européenne des droits de l’homme et le droit à la liberté de certains malades et marginaux, Paris, 1986, p. 330-335.
62 Art. 2 de la Résolution, 2856/XXVI.
63 Art. 6 de la Résolution. 3447 - X.
64 X. DIJON, Le sujet de droit en son corps. Une mise à l’épreuve du droit subjectif, Bruxelles, 1982.
65 Cf. C. HENNAU-HUBLET, L’activité médicale et le droit pénal. Les délits d’atteinte à la vie, l’intégrité physique et la santé des personnes, Paris-Bruxelles, 1987, pp. 41-45 ; P. ARNOU, L’immunité pénale du médecin, in Jura Falconis, 1979-1980, p. 431 et s. ; R. O. DALCQ, La responsabilité civile et pénale du médecin et de ses aides qualifiés à l’égard des patients, in Acta Hospitalia, 1972, Vol. XII, no 3, p. 357 et s. ; E. DANSON, A propos de la responsabilité du médecin, in J. T., 1969, p. 709 et s.
66 X. DIJON, op. cit.
67 Ibidem.
68 Ibidem.
69 Cf. X. DIJON, op. cit., p. 504, note 2.
70 De toepasselijkheid van grondrechten in de betrekkingen. tussen private personen. Algemene probleemstelling, in De toepasselijkheid van de grondrechten in private verhoudingen, Antwerpen, 1982, p. 2-33.
71 W.J. GANSHOF van der MEERSCH, La Convention européenne des droits de l’homme aura-t-elle, dans le cadre du droit interne, une valeur d’ordre public ?, in Les droits de l’homme en droit interne et en droit international, Bruxelles, 1968, p. 155-251 et les nombreuses références citées.
72 K. RIMANQUE et P. PEETERS, op. cit., pp. 28-20.
73 Ibidem, p. 26.
74 Ibidem ; Liège, 24 juin 1933, Pas., 1934, III, p. 38.
75 R. ANDERSEN et J. HARMEL, La liberté d’associations et la fonction publique, in Ann. dr., 1980, pp. 249-254 ; P. van der VORST, La personnalité juridique obligatoire et prête-à-porter pour les syndicats, sa constitutionnalité, sa conformité à nos engagements internationaux, in Liber amicorum F. Dumon, Antwerpen, 1983, t. I, pp. 627-628.
76 Doc. Parl, Chambre, session 1920-1921, no 70, p. 146.
77 Cf. sur ce point : A. BREMCZEWSKI, La Convention européenne des droits de l’homme et les rapports entre particuliers, in Cahiers de droit européen, 1980, no 1, pp. 3-24 ; cf. également : M. A. EISSEN, La Convention et les devoirs de l’individu, in La protection internationale des droits de l’homme dans le cadre européen, Paris, 1961, pp. 168-193 ; Μ. A. EISSEN, La Convention européenne des droits de l’homme et les obligations de l’individu : une mise à jour, in R. Cassin, Amicorum discipulorumque liber, t. III, Paris, 1971, pp. 151-162 ; J. RIVERO. La protection des droits de l’homme dans les rapports entre personnes privées, ibidem, pp. 311-322.
78 Cf. supra, p. 114.
79 La Convention et les devoirs de l’individu, op. cit., p. 175.
80 Ibidem, p. 178.
81 Ibidem.
82 Affaire Syndicat national de la police belge, 27 octobre 1975, no 19 ; Affaire Syndicat suédois des conducteurs de locomotives, 6 février 1976, no 20 ; Affaire Schmidt et Dahlstroem, 6 février 1976, no 21 ; Affaire Le Compte, 1981, p. 622 et note P. Lambert ; Affaire Young, James et Webster, 13 août 1981, no 44.
83 Affaire Young, James et Webster, op. cit., p. 20.
84 Ibidem, pp. 21-22.
85 Ibidem, no 52, p. 22
86 Ibidem, no 55, p. 22. On notera l’opposition marquée entre l’opinion concordante des huit juges qui ont fait la majorité et celle dissidente de trois autres juges. Dans notre conception de l’article 11 (notent les premiers), « l’aspect négatif de la liberté d’association est nécessairement complémentaire, corrélatif et inséparable de son aspect positif », ibidem, p. 27. Quant aux auteurs de l’opinion dissidente, ils estiment qu’« en l’occurence, il n’est pas pertinent de parler de la substance de la liberté d’association... Les libertés dites positives et négatives d’association ne sont pas simplement les deux faces de la même médaille ou, pour s’exprimer comme la Cour, deux aspects de la même liberté. Il n’existe aucun lien logique entre les deux... », ibidem, p. 31.
87 Ibidem, no 65, p. 26.
88 Ibidem, no 63, p. 25 ; cf. également Fr. OST, op. cit., p. 13 et références citées à la note 1.
89 Cf., supra, p. 95.
90 Ibidem, supra, p. 105.
91 Cf., supra, p. 105.
92 Cf. Rapport de la Commission, 1980-1982, no 41, § 65, p. 27.
93 Cf. Affaire X contre Royaume-Uni, 5 novembre 1987, no 4, § 64 et s.
94 Cf. supra, p. 105.
95 Cf. par exemple la Déclaration adoptée par les Nations unies lors de son assemblée générale du 9 décembre 1975 (Résolution 3452/XXX) et celle du 10 décembre 1984 qui a donné lieu à la Convention contre la torture et autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants ; La Déclaration de Stockholm sur l’environnement, adoptée également par la conférence des Nations unies en 1972 ; l’article 3 de la déclaration des droits des personnes handicapées ; La Recommandation (83) no 2 du comité des ministres du Conseil de l’Europe sur la protection juridique des personnes atteintes de troubles mentaux
96 Articles 4 et 29.
97 Cf. l’annexe de cet arrêté.
98 Cf. Circulaires ministérielles des 21 décembre 1923, 4 mars 1927 et 31 janvier 1929.
99 Cf. supra, p. 124.
100 Cet article 10 prévoit la tenue d’un registre dans lequel sont inscrites : l’identité du malade, ses admissions et sorties, les décisions relatives aux mesures de protection dont il fait l’objet et la personne de confiance choisie par lui.
101 Cf. supra, p. 105.
102 Cf. supra, p. 113.
103 G. COTTEN-JONATHAN, La Convention européenne des droits de l’homme, Paris, 1989, p. 286. Cet auteur utilise l’expression « du noyau dur des droits de l’homme » à propos de cet article 3.
104 Affaire Tyrer contre Royaume-Uni, Rapport de la Commission, 14 décembre 1976, no 24, par. 27 et s. ; affaire Hilton contre Royaume-Uni, Rapport de la Commission, du 6 mars 1978, par. 80 et 87.
105 G. COHEN-JONATHAN, Cour européenne des Droits de l’Homme. Chronique de jurisprudence (1978), in Cahiers de droit européen, 1979, p. 462.
106 Cf. supra.
107 Μ. P. CHAMPENOIS et J. SANSOT, La protection de la personne des malades mentaux : application socio-juridique de la loi du 30 juin 1838, Paris, 1977, p. 2.
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Le placement des mineurs en institution psychiatrique
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