Les femmes dans la magistrature belge : la loi et les faits
p. 175-196
Texte intégral
INTRODUCTION
1“Le sexisme n’est pas mort, le féminisme non plus”1. Si l’on ne peut plus affirmer aujourd’hui que les femmes demeurent les grandes exclues de notre société, force est de constater que le combat pour les droits de la femme est loin d’être terminé. Certains diront même qu’il ne fait que commencer car il se situe chaque fois dans un champ différent.
2Il est vrai que le féminisme d’hier et celui d’aujourd’hui n’ont sans doute plus les mêmes objectifs, qu’ils ne s’expriment plus dans les mêmes termes. S’il est vrai aussi que personne n’oublie que les acquis essentiels dont bénéficient les femmes actuellement, elles les doivent à la première génération de féministes, on a par contre tendance à croire trop souvent qu’aujourd’hui, tout est fait. C’est loin d’être le cas. Si l’on est très loin des discours masculins sur la tendre incapacité des femmes, le sexisme des années quatre-vingt-dix est beaucoup plus insidieux. En effet, il existe encore dans certains milieux professionnels, et ce, en dépit des efforts réalisés pour en ouvrir l’accès, des “poches” d’un conservatisme certes suranné mais pourtant réel. Tel est le cas de la magistrature.
3L’objet de cette contribution est donc de donner un aperçu de la position des femmes dans la magistrature belge2 au regard de l’actuel système de nomination. Un tel sujet nécessite bien évidemment une incursion dans l’histoire de l’émancipation féminine afin d’appréhender les conditions de base dans lesquelles s’est exercée la lutte des femmes pour l’accès à la profession.
4Mais avant d’envisager l’étude sous son aspect diachronique, il nous semble indispensable d’éclairer le lecteur sur le processus général de nomination des magistrats en Belgique, et sur un aspect plus particulier et inhérent à ce processus : la politisation.
5Politisation... Voilà un mot connu et honnis de tous, et qui est pourtant une réalité, une véritable institution. Il nous faudra donc nous attarder quelque peu sur cette pratique, quasiment institutionnalisée, en donner une définition et en apprécier les conséquences.
6Après ce chapitre relativement technique, mais indispensable à la compréhension de notre système de recrutement, nous pourrons aborder l’objet essentiel de notre étude : la place réservée aux femmes dans la magistrature et les conséquences de la loi de 1991 sur son recrutement.
LA POLITIQUE DE NOMINATION DES MAGISTRATS
La situation avant 1991 : les lacunes du système
7Dans son ouvrage Droit Judiciaire Civil, Cyr Cambier définit la nomination comme l’action de “pourvoir à un état de besoin que les cadres de chaque juridiction, préalablement établis, définissent”3. De manière générale, l’on peut dire que les règles de nomination et de recrutement des magistrats se trouvent consacrées dans deux sources importantes : la Constitution et les lois.
8Il s’agit avant tout d’un principe constitutionnel. Le principe de nomination des magistrats se trouve en effet défini aux articles 151 et 153 de la Constitution coordonnée du 7 février 19934.
9Sur le fond, ces articles n’ont jamais été modifiés depuis leur rédaction en 1831. Les seuls aménagements apportés résultent de l’adaptation de notre système aux exigences du fédéralisme, bien qu’il ne touche pas les institutions judiciaires.
10L’essentiel des dispositions en la matière se trouve défini dans le Code Judiciaire aux articles 58 à 352, articles qui ont fait l’objet de nombreuses modifications depuis l’entrée en vigueur de la première loi d’organisation judiciaire du 4 août 18325.
11Pendant de nombreuses années, la “charte organique du recrutement judiciaire6 était la loi du 18 juin 1869 (sous réserve de certaines lois spécifiques, telles que celles qui ont réglé le recrutement des magistrats du Conseil d’Etat7). Cette loi ne contenait que très peu de dispositions effectives quant au processus de nomination : tout au plus, elle imposait aux juges de paix l’âge minimum de 30 ans et la possession du diplôme de docteur en droit, tandis que les juges, les présidents et vice-présidents des tribunaux de première instance devaient attester d’une pratique du barreau suffisante.
12Pour le surplus, “sa nomination dépendait beaucoup de sa fortune politique”8. Aucune formation préalable à l’entrée dans la magistrature n’était dispensée.
13Depuis lors, la question a fait l’objet de multiples débats et le législateur est intervenu à plusieurs reprises9.
14Il faut attendre la loi du 8 avril 1971 créant le stage judiciaire pour voir se constituer une ébauche partielle de réforme10. Mais les insuffisances de cette législation restent nombreuses et les résultats décevants.
15Un espoir résidait alors dans l’institution d’un groupe de travail, investi par le ministre de la Justice de la mission “d’étudier la formation, le recrutement, la promotion et la formation permanente des magistrats”11. Cette Commission était présidée par l’avocat général à la Cour de Cassation, le Professeur J.E. KRINGS qui déposa le rapport des activités du groupe de travail en 1976.
16Selon ce rapport, dont il n’y eu pas de suites au plan politique, le recrutement des magistrats doit s’effectuer par une double voie :
la voie d’un stage judiciaire spécifique
la voie de la promotion de candidatures dites extérieures, ou recrutement sur titres, c’est-à-dire un accès direct. Cette voie doit être réservée aux candidats justifiant d’une expérience professionnelle certaine.
17L’appréciation et le choix des candidats sont effectués par le ministre de la Justice, aidé par un Comité national d’avis, chargé d’éclairer et d’informer le ministre sur la valeur des candidats, mais dont la mission n’est que consultative.
18Le problème de la politisation des nomination dans la magistrature n’est pas neuf et a été soulevé à maintes reprises. En témoigne le nombre d’articles et de réflexions à ce sujet parus dans le Journal des Tribunaux. Citons entre autres A. FETTWEISS, en 1960 : “(...) il faut procéder à la sélection attentive de ceux auxquels on les confie [les fonctions judiciaires] (...). L’entrée dans la carrière n’est soumise qu'à des conditions insuffisantes (...). Ces obligations banales n’offrent aucune garantie sérieuse et ne permettent pas d'espérer une amélioration du recrutement”12.
19Il réitère ses craintes en 1975 et, constatant que la situation n’avait toujours pas changé, trace les grandes lignes d’un avant-projet susceptible d’améliorer le système. Il aborde entre autres, le problème de la rémunération et de la politisation, prescrit un contrôle renforcé et l’instauration d’une Commission nationale du stage13.
20En 1970, le procureur général J. MATHIJS prononçait à l’audience solennelle de rentrée de la cour d’appel de Gand, une mercuriale emprunte d’amertume face “à la diminution considérable et régulière du nombre de candidats aptes à exercer l’une ou l’autre fonction judiciaire de premier degré. La régression est telle qu’il s’avère impossible (...) de trouver des candidats qui offrent les garanties élémentaires que l’on doit exiger d’un futur magistrat (...)”14.
21En 1973, c’est au tour du procureur général GANSHOF VAN DER MEERSCH de dénoncer les lacunes du système judiciaire belge, dans la mercuriale prononcée lors de la séance solennelle de rentrée de la cour de Cassation. Il insiste également sur le fait que “la Belgique est l’un des très rares pays d’Europe où la nomination du magistrat est abandonnée sous la seule réserve des conditions de l’âge, du diplôme et d’une brève pratique du barreau, à la volonté de l'exécutif qui contrôle l’ouverture de la carrière judiciaire sans que celle-ci soit soumise à des critères objectifs de formation et de valeur”15.
22A cette liste de griefs, ajoutons ceux de J. VAN COMPERNOLLE qui estime que “la prise en considération de la pratique professionnelle antérieure conçue comme une “formule de remplacement” d'un stage de magistrat s’avère totalement inadéquate car n’offrant aucune garantie sérieuse de formation et de qualification des candidats”16.
23Enfin, s’il est encore nécessaire de convaincre que cette question est débattue depuis fort longtemps, voici l’édifiante réflexion d’un notaire parue en 1846 dans La Belgique judiciaire. Il était question d’apporter une solution au problème de la nomination des magistrats, afin de mettre à couvert la dignité du gouvernement en matière de distribution des emplois dans l’ordre judiciaire : “ce moyen, qui n'est autre que l'introduction du système du concours, aurait, d’après nous, ce double avantage, d’abord de favoriser le véritable mérite, en empêchant la médiocrité et l’intrigue de s’emparer des récompenses dues au talent et au travail, ensuite de donner ainsi aux ministres l’occasion de se débarrasser des persécutions des solliciteurs sans titres réels”17 . Et l’auteur de conclure : “un long laps de temps s’écoulera, sans doute, encore, avant que cette idée ne soit accueillie par nos gouvernants”18 .
LA LOI DU 18 JUILLET 1991 ET LA LUTTE CONTRE LA POLITISATION
24Confronté à d’évidentes lacunes, le système de recrutement dans l’ordre judiciaire devait donc subir d’inévitables modifications. Chacun y allant de ses propositions, il ne fut pas facile d’établir d’emblée un système efficace et durable. Le législateur va élaborer le nouveau texte légal à partir des différentes propositions de lois suivantes :
la proposition du député Piron qui entendait favoriser la technique d’un examen professionnel préalable au recrutement19 ;
la proposition de la députée Ryckmans-Corin visant à accroître la qualité du recrutement de la magistrature en faisant de l’avis des chefs de corps une condition de nomination20 ;
la proposition du sénateur Poullet visant à améliorer et à dépolitiser le recrutement des magistrats en instituant un Conseil supérieur de la Magistrature21 ;
la proposition des sénateurs Cerexhe et Weckx visant à constituer un Centre National de la Magistrature et lui confier plusieurs missions légales, dont celle de donner des avis sur tout ce qui concerne l’organisation et le fonctionnement de la justice22 ;
la proposition de loi du député Covelier également relative à la création d’un Centre national de la magistrature, ainsi que sur un révision du stage judiciaire23 ;
la proposition du sénateur Henrion visant à modifier les conditions de nominations des juges de paix et des juges au tribunal de police et, d’autre part, de modifier celles requises pour les membres des tribunaux de première instance, du travail et du commerce, ainsi que les magistrats du ministère public près ces tribunaux24.
25De cette synthèse naîtra la loi du 18 juillet 199125. Elle apporte des modifications profondes et établit un processus de recrutement et de nomination assez homogène. Elle constitue une véritable innovation, dans la mesure où elle institue pour la première fois un certain filtrage objectif des candidatures.
26Dans sa déclaration du 10 mai 1988, le gouvernement s’était en effet engagé à réformer les modes d’accès à la magistrature “dans le sens d’une plus grande objectivité et dans le souci d’améliorer la formation des magistrats”26.
Les principes de la nomination des nouveaux magistrats
27A cet effet, trois nouvelles institutions sont créées par la loi. Elles figurent au Code Judiciaire sous les articles 259bis, ter, quater.
28Le collège de recrutement des magistrats (art. 259bis) :
29Il est composé de 22 membres parmi lesquels 10 magistrats, 6 professeurs d’université et 6 avocats. Les membres sont désignés pour quatre ans par le Sénat afin “d’assurer un équilibre politique au sein du collège”27 et de “donner à l'institution du collège tout le prestige souhaitable”28.
30Le collège sera constitué de deux jurys (francophone et néerlandophone) chargés de faire passer l’examen d’aptitude professionnelle. Le fonctionnement du collège devra être défini par arrêté royal délibéré en Conseil de Ministre.
31Les comités d’avis (art. 259ter) :
32Ils sont créés dans chaque ressort et constitués de magistrats-chefs de corps et d’avocats. Ces comités ont comme mission principale de rendre un avis motivé sur les nominations de magistrats et de désigner les maîtres de stage et de surveiller le déroulement du stage.
33Le stage judiciaire (art. 259quater) :
34L’admission au stage est subordonnée à deux conditions : avoir accompli un stage d’au moins un an au barreau et avoir réussi le concours d’admission organisé annuellement pour chaque régime linguistique.
35Grâce à ces organes, la loi peut assurer un système de recrutement cohérent et efficace qui repose sur les principes de l’information et de la sélection objective.
36D’une part, la loi veut assurer une meilleure information du ministre de la Justice. A cet effet, elle institue les comités d’avis “qui éclairent le ministre sur les divers aspects de l’aptitude du candidat, notamment sur le plan des qualités humaines”29.
37Ensuite, et c’est son principal objet, la loi prévoit deux types d’accès à la magistrature : le premier pour les candidats sans expérience professionnelle préalable ; le deuxième pour les candidats ayant déjà une expérience professionnelle dans le domaine juridique.
1° Le recrutement des candidats sans expérience professionnelle
38Ce recrutement se fait via un concours et un stage judiciaire.
39Le concours : Son organisation est confiée au collège de recrutement. Il est envisagé comme “une vérification des qualités de raisonnement, l’esprit de synthèse, la rapidité, la maturité et la motivation du candidat”30. Les lauréats sont nommés dans l’ordre de réussite aux épreuves, ce qui constitue “une garantie d'impartialité étant donné que l’autorité qui a le pouvoir de nomination ne peut avoir égard à d’autres critères que celui du résultat aux épreuves”31.
40Le stage : il dure trois ans et comporte deux volets : une formation théorique et une formation pratique (15 mois dans un parquet, 6 mois dans un service extérieur, 15 mois dans un tribunal).
41La nomination intervient au terme de ces deux épreuves, en fonction du classement au concours et de la réussite du stage. La compétence de l’autorité est intégralement liée.
2° Le recrutement des candidats ayant une expérience professionnelle préalable dans le domaine juridique
42Le recrutement dans cette catégorie se fait par le biais d’un examen d’aptitude professionnelle. De cette façon, “des titulaires de fonctions juridiques, de valeur indiscutable et d’expérience éprouvée”32 pourront devenir magistrats. Cette sélection, appelée aussi recrutement par accès direct, ne s’accompagne d’aucun classement ni d’aucune appréciation, de telle sorte que l’autorité de nomination garde ici un certain pouvoir discrétionnaire33.
43La procédure de nomination est simple : les candidatures doivent être adressées par lettre recommandée au ministre de la Justice dans un délai de deux mois à partir de la publication de la vacance au Moniteur Belge. Aucune nomination ne peut être faite avant l’expiration de ce délai. Avant toute nomination, le ministre doit recueillir l’avis du Comité dans le ressort duquel la nomination doit intervenir. Cet avis doit faire l’objet d’un procès-verbal motivé et signé par chacun des membres du Comité. Il s’agit d’une formalité substantielle, mais elle ne lie pas le ministre. Cependant, s’il veut nommer un candidat ayant fait l’objet d’un avis formellement négatif, le ministre devra motiver sa décision.
La carrière du magistrat
44Le principe de l’indépendance justifie entre autres l’absence d’une réelle hiérarchie judiciaire34 : “la hiérarchie signifierait l’exercice d’une autorité incompatible avec l’indépendance des juges”35.
45Le magistrat peut-il donc avoir une carrière ?
46La carrière d’un magistrat ne peut pas s’entendre dans le même sens que celle d’un autre agent de la fonction publique. La hiérarchie de l’administration publique étant un système en soi, il est normal qu’un fonctionnaire connaisse un avancement dans son parcours administratif. En effet, l’organisation pyramidale de l’administration explique que chaque niveau de pouvoir soit subordonné à un autre (de telle sorte que la prise de décision s’organise de manière verticale et non pas horizontale). Ces niveaux de pouvoir ne sont pas étanches, si bien qu’il est possible à un fonctionnaire d’accéder à un niveau supérieur soit par son ancienneté soit par la réussite d’un examen. Cette promotion se traduit concrètement par une augmentation salariale et un allégement du lien de subordination.
47Il n’en va pas de même pour les magistrats, qui ne connaissent en principe qu’une “carrière plane”. Le principe de l’indépendance du juge y est pour beaucoup. En effet, le magistrat ne reçoit d’ordre de personne : il juge souverainement. Même lorsque les jugements ou arrêts sont réformés en appel ou cassés, le juge de renvoi n’est nullement contraint de se conformer à la décision de la cour d’Appel ou de la cour de Cassation. Dans les faits cependant, il s’y soumet régulièrement, surtout pour les arrêts de cassation car ils portent non plus sur le fond du droit mais sur la légalité. Le fait d’avoir confié à une juridiction le contrôle de la légalité témoigne donc de la volonté du législateur de faire de la cour de Cassation, une cour suprême.
48De là, il ressort l’existence d’un rang et d’une préséance entre les membres d’une même juridiction et entre juridictions. Il nous est ainsi possible de parler d’une certaine forme de hiérarchie au sein même de chaque juridiction. Elle se traduit au niveau de l’organisation du service, mais aussi dans la discipline et la surveillance. Elle est très perceptible pour le justiciable qui voit dans l’appel et la cassation, des décisions d’une autorité judiciaire supérieure. Notons enfin que la solennité des audiences augmentent lorsque l’on passe du juge de paix, au tribunal de première instance, à la cour d’appel, à la Cour de Cassation.
49Cet aspect de la carrière du juge n’est pris en compte par la loi du 18 juillet 1991 que de manière partielle, voire un peu aléatoire. C’est une des faiblesses de la loi : la question de la promotion laisse subsister une partie d’arbitraire de la part de l’autorité de nomination. S’il existe encore un champ où la politisation a des chances d’exister, c’est celui-là.36
50Au delà de quelques prescriptions du Code judiciaire, rien ne prévoit une comparaison des titres et mérites des candidats.
51En réalité, cette comparaison est implicite et découle de l’article 10 de la Constitution : “L’exercice du pouvoir discrétionnaire de nommer devrait respecter le principe d’égalité (...) ce qui implique qu’une telle comparaison se fasse et que sa réalité puisse être vérifiée”37. C’est ce que démontre l’arrêt Halsberghe38 dans lequel il est précisé que “même si elle (l’autorité investie du pouvoir de nommer) dispose d’une réelle liberté d’appréciation en mettant en balance les titres et mérites, elle n’est pas dispensée pour autant de démontrer, en cas de contestation, par la production de pièces pertinentes en l’espèce, que l’examen comparatif des titres et mérites a effectivement eu lieu (...). En admettant même que les deux candidats fussent d'une qualité pour ainsi dire égale, encore faut-il que le dossier indique les motifs pour lesquels la préférence a été accordée à l’un”.
LES FEMMES DANS LA MAGISTRATURE
52Avant d’aborder cette partie consacrée à la place des femmes dans la magistrature belge, il nous faut mettre le lecteur en garde.
53Il est en effet fâcheux et dommage de constater, qu’en Belgique, à l’inverse de la France39, aucune étude d’envergure et exhaustive n’a été encore réalisée sur la question du recrutement des femmes dans l’ordre judiciaire. Nous ne pouvons donc nous référer ici qu’à des études partielles, qui traitent d’un aspect particulier de la question, ou au contraire, à des études très générales sur le féminisme belge, sur son évolution et sur les acquis sociaux et professionnels des femmes au cours de l’histoire. Nous en tenir à ce constat serait cependant faire peu de cas des travaux importants d’auteurs telles qu’Eliane Gubin, spécialiste de la question des femmes en Belgique, dont les multiples ouvrages ne peuvent que nous intéresser dans le cadre de cette contribution40.
54Ce qui est beaucoup plus déplorable, c’est la difficulté que rencontre le chercheur pour collecter des informations aussi élémentaires que la répartition chiffrée entre hommes et femmes au sein des différentes juridictions. L’absence de base de données efficace empêche de traiter l’information dans son ensemble et rend dépendant du bon vouloir des administrations.
55Il reste qu’un tel travail de recherche serait tout à fait passionnant à réaliser, à condition de disposer des moyens et du temps nécessaires, ce qui nous faisait défaut.
L'histoire d'un combat
56Le combat pour l’émancipation des femmes a été, et est peut-être toujours, un combat pour l’indépendance financière et la non-discrimination sexuelle. Tous deux trouvent à s’appliquer dans le champ très vaste des conditions d’accès à la profession. Certaines professions ont été “féminisées” très tôt, notamment les activités à caractère social ou éducatif, de même que certaines activités commerciales. D’autres professions sont restées longtemps inaccessibles aux femmes : c’est le cas de l’ensemble des professions juridiques, et plus particulièrement de l’accès au Barreau et à la magistrature.
57Ce combat d’envergure fut mené dès le 19è siècle par celles qui obtinrent d’abord le droit de poursuivre des études universitaires. Ce fut le cas de Marie Popelin, première femme docteur en droit, diplômée de l’Université Libre de Bruxelles. Dès l’obtention de son diplôme, en 1888, elle manifeste la volonté de s’inscrire au Barreau. Elle se heurte à un refus. Pourtant, il n’était inscrit nulle part que les femmes ne pouvaient être avocat. Sur le plan de l’interprétation du droit, nous sommes en pleine période dite de 1’“école de l’exégèse” : on s’en tient exclusivement à la lettre de la loi. Dans un tel contexte, tout ce qui n’est pas interdit par la loi est donc permis. Or, c’est vers le droit naturel que vont se tourner les juristes pour argumenter leur refus. Quand Marie Popelin porte l’affaire devant la cour d’Appel de Bruxelles, elle dut endurer l’argumentation méprisante des magistrats qui n’ont pas manqué de lui rappeler l’incapacité de la femme, en arguant “de la nature particulière de la femme, de la faiblesse relative à sa constitution, de la réserve inhérente à son sexe, de la protection qui lui est nécessaire, de sa mission spéciale dans l'humanité, des exigences et sujétions de la maternité, de l'éducation qu’elle doit à ses enfants, de la direction du foyer domestiques,...”41. Le même raisonnement, basé sur des évidences invisibles, sera tenu par la cour de Cassation : “Les principes les plus certains, les plus incontestables ne sont pas toujours ceux que la loi exprime, mais souvent ceux qu’elle juge inutile d’exprimer parce qu’ils sont présents à la pensée de tous”42. Avant cela, le procureur général près la cour d’Appel avait “éprouvé un seul embarras : il y a des vérités juridiques dont l’évidence est si grande qu elle rend leur démonstration malaisée. L’axiome s’affirme mais ne se démontre pas”43.
58Le 11 novembre 1889, elle apprend que son pourvoi en Cassation est rejeté. Les termes élégants du procureur lui recommandent de se pas se mêler à cette lutte publique “où tous les sujets abordés et discutés, peuvent compromettre et exposer, voire froisser, à tout instant cette réserve discrète, cette délicatesse de sentiments, de langage et de forme qui font le charme et la dignité du sexe féminin”44. Le verdict de la cour de Cassation était plus brutal, mais avait le mérite d’être clair : “Quand une femme exhibe un diplôme de docteur en droit pour être admise à la prestation de serment, la Cour d’appel ne peut même pas en examiner la régularité. Elle doit l’écarter par une fin de non recevoir préalable. Savoir, suivant la loi : un diplôme de docteur en droit obtenu par une femme ne constitue jamais un titre pour être reçu avocat”45.
59De nombreux auteurs ont renchéri, estimant incongrue l’introduction au Barreau d’un “être tout de douceur, de soumission, notre premier animal domestique”46.
60I1 faudra attendre trente-quatre ans pour que la loi du 7 avril 1922 permette aux femmes d’accéder au Barreau. Cet événement est sous-tendu par une conséquence sociologique capitale : on reconnaît que “la femme pouvait prendre publiquement la parole, qu’elle n’était donc pas cette éternelle mineure voulue par les Codes”47.
61Cette attitude, qui n’est pas extravagante dans le contexte de l’époque, a cependant perduré encore longtemps concernant l’entrée des femmes dans la magistrature. Auparavant, les lois belges des 13 juin 1924 et 13 juillet 1926 ont donné accès aux femmes aux tribunaux de commerce et aux conseils de prud’hommes48 mais pas en tant que magistrats professionnels. Au surplus, la loi du 7 avril 1922 a interdit aux avocates de suppléer les magistrats. La loi française du 11 avril 1946 permettant l’accès à la magistrature aux femmes, coïncide avec des requêtes de plus en plus pressantes de la part des milieux féministes belges. Suite à ces requêtes, le ministre de la Justice Van Glabbeke a interrogé le procureur général de Liège à propos de leur opportunité. Il y mentionne notamment la proposition déposée par le Comte Carton de Wiar, député, relative à l’ouverture de la carrière d’avoué aux femmes, tout en maintenant la prohibition de suppléance des magistrats assis. Le ministre s’inquiète de la “sauvegarde du rôle familial de la femme, d’une part ; et le légitime souci de celle-ci d’accomplir une mission sociale, d’autre part”. La première femme magistrate a cependant été nommée en 1948. Mais les débats qui ont précédé cette nomination rendent compte de la pesanteur des stéréotypes dans l’opinion publique. Ainsi en est-il de la mercuriale prononcée par le procureur général faisant fonction L. Delwaide à l’audience solennelle de rentrée de la cour d’Appel de Liège, le 16 septembre 1946. Comment résister à l’envie d’en reproduire ici les extraits les plus “convaincants” ? Le procureur invoque le fait que, contrairement à l’homme qui atteint la force de l’âge à 45 ans, “la femme, à ce moment, engraisse et devient matrone (...) Ne faudrait-il pas dès lors, avancer de quinze ans l’âge de la retraite pour les femmes magistrats ?”. Il faut ajouter au surplus, “l’extrême émotivité de la femme mais aussi ses accès d’humeur liés au cycle menstruel et à la grossesse, qui peuvent faire tort à sa capacité de discernement (...). De même, à la ménopause, sans aller jusqu'à l’entière irresponsabilité, une grande partie des femmes subit, dans une certaine mesure, des troubles psychiques Il s’interroge également sur les capacités d’une femme enceinte et s’inquiète de savoir s’il ne faudra pas bientôt “installer au Palais une pouponnière avec nurse et suspendre les audiences aux heures de tétée (...). Enfin, que fera-t-on lorsqu’une dame magistrat sera prise au siège, de vomissements incoercibles ? Et quand une présidente grosse de huit mois devra précéder son tribunal à l’audience, voire au Te Deum, avec le roulis d’une frégate désemparée”. Au delà de simples considérations techniques, la présence d’une femme dans la magistrature peut aussi mettre en péril tout le prestige de l’institution : “Le prestige est indispensable au pouvoir judiciaire (...). Mais Messieurs, si votre compagnie était panachée de femmes, s’il en siégeait quelques unes à la Cour de Cassation, où serait le prestige, le sentiment presque religieux qui doit émaner de nos grands corps de justice ? Si notre Cour était tombée en quenouille et si votre assemblée solennelle de ce jour, au lieu de notre Premier Président plein de dynamisme et de représentation, était présidée par une vielle femme, que resterait-il encore de votre prestige ? (...). Ainsi, quand nous aurons des sièges de femmes, les tribunaux apparaîtront au public comme des tribunaux d’opérette, je le crains”. En conclusion, l’accès des femmes à la magistrature rendrait “l’œuvre de la justice à peu près impossible”.
La présence effective des femmes
62De tels propos n’auront cependant pas empêché l’accession des femmes aux professions juridiques.
63Le monde des avocats fut le premier à leur être ouvert, avec comme corollaire une augmentation du nombre de diplômée en droit. En effet, tant que l’accès au Barreau leur était interdit, très peu de jeunes filles fréquentaient les facultés de droit. Ainsi, entre 1918 et 1922, l’Université Libre de Bruxelles ne compta qu’une seule diplômée. Par contre, elle en dénombra 139 entre 1922 et 1941, soit 11 % du nombre d’étudiants en droit.
64En revanche, le nombre d’avocates resta très peu élevé, longtemps après leur admission au barreau. Ainsi, en 1960 les femmes ne représentaient que 7 % de la profession. Elles tendent à s’affirmer dans le milieu à la fin des années septante, ce qui permet d’évaluer à 24 % leur représentation49. En 1995, elles étaient 35 %, à peu de chose près le même pourcentage que dans la magistrature50. Le décalage existant entre l’accès au Barreau et à la magistrature s’est donc estompé avec le temps.
65Plus précisément, si la première femme magistrate a été nommée au siège en 1948, il faudra attendre 1953 pour l’accès au Parquet, et 1971 pour l’accès à la cour d’Appel51. La carrière des femmes magistrates est régulière, c’est-à-dire très lente en fonction de leur arrivée progressive dans la hiérarchie.
66Comme le montrent les tableaux repris en annexe, en 1983, les femmes représentaient 15 % de la magistrature assise, avec une large dominance dans les tribunaux de première instance. Une seule femme siégeait à la cour de Cassation. En 1995, elles étaient 1949, soit 30 % de l’ensemble de la magistrature (28,4 % pour la magistrature assise et 32, 2 % pour le parquet). En 1997, elles sont 2054, soit 34 % des magistrats du Siège52.
67Plusieurs remarques méritent notre attention :
En dix ans, le nombre de femmes magistrates au siège a pratiquement triplé (703 en 1997 pour 246 en 1983), alors que celui des hommes a légèrement diminué (1351 en 1997 pour 1401 en 1983). On peut imputer cette augmentation, qui était sensiblement la même en 1995, à la réforme de la loi intervenue en 1991 qui a objectivé les conditions d’accès, tant pour les hommes que les femmes.
Cette augmentation se traduit au niveau de toutes les juridictions (sauf en ce qui concerne la cour militaire et le conseil de guerre) : la cour de Cassation (13 % pour 2 %), cour d’Appel (21 % pour 8,5 %), cour du travail (23 % pour 4 %), tribunaux de première instance (40 % pour 19 %), tribunaux du travail (47 % pour 14 %), tribunaux de commerce (38 % pour 11,6 %), justice de paix (18 % pour 8,7 %), tribunaux de police (22 % pour 11,3 %).
La proportion plus forte de femmes aux tribunaux du travail a toujours été dominante. Les facteurs d’explication ne relèvent que de simples hypothèses dans la mesure où ce pourcentage ne nous informe pas sur la répartition entre les juges professionnels et les juges sociaux. Un constat semble cependant intéressant : la tendance à rencontrer beaucoup de femmes dans les juridictions du travail est juste inverse à celle que l’on observe dans les instances syndicales et patronales, où les femmes sont très peu représentées. Même si le pourcentage augmente (on passe de 7 % en 1988 à 10 % en 199453), elles restent très minoritaires. Il est donc curieux de constater cette “inflation” de femmes dans cet autre champ du monde du travail que constitue les juridictions. En l’état actuel, il est extrêmement difficile de donner une interprétation de ces chiffres, dans la mesure où elle nécessite une étude de terrain et la pratique de l’interview notamment, afin de dégager les motivations, les raisons de cette présence importante des femmes dans les juridictions du travail.
La proportion de femmes dans la haute magistrature est beaucoup plus modeste, même si l’on compte 5 femmes de plus à la cour de Cassation qu’en 1982. A nouveau, les facteurs d’explication peuvent être variés. Nous en retiendrons un, qui intéresse plus particulièrement notre propos : l’influence de la politique de nomination. Nous l’avons dit dans la première partie de l’exposé, la faiblesse de la loi du 18 juillet 1991 réside dans le processus de promotion des magistrats. Rappelons brièvement qu’à ce stade, n’interviennent ni classement, ni appréciation et donc, que l’autorité de nomination conserve un pouvoir discrétionnaire. Si nous pouvons raisonnablement penser, qu’aujourd’hui encore, cette discrétion s’exerce au détriment des femmes, un autre facteur entre en ligne de compte : les femmes nommées à partir de 1991 ne remplissent tout simplement pas la condition d’ancienneté requise pour siéger à la cour de Cassation ! D’autre part, des éléments intrinsèques à la vie d’une femme font que, souvent, elle se retire plus tôt de la vie professionnelle.
68Une remarque particulière doit être apportée quant au pourcentage de femmes nommées à la magistrature debout, au parquet. Elles représentent à peu près 30 % en 1995. Soit l’équivalent du nombre de femmes présentes au siège. Il est assez intéressant de constater à cet égard, qu’en France, si la moitié des magistrats sont des femmes, très peu d’entre elles exercent au parquet54, qui est davantage considéré comme un lieu de pouvoir. Cet aspect des choses n’intervient apparemment pas en Belgique.
69Qu’en sera-t-il demain ? Si l’on examine les chiffres relatifs au stage judiciaire, on constate qu’en 1983, les femmes représentaient 44 % des magistrats stagiaires. Aujourd’hui, elles sont 65 % à effectuer le stage. L’avenir nous dira si cette proportion importante va se concrétiser en un même nombre de nominations ! Mais il semble que cela soit peu probable. Tout d’abord parce qu’il faut prendre en considération le nombre de places vacantes. Ensuite parce qu’il faut prévoir que certaines stagiaires vont échouer, abandonner, ou avoir dans le classement une position telle qu’elles ne pourront être nommées tout de suite. Ainsi, l’étape du stage peut s’avérer très révélatrice pour les candidats qui se trouvent confrontés à leur futur milieu professionnel. C’est à ce stade que s’opère souvent une sélection décisive.
Annexe no 1. Tableau comparatif du pourcentage de femmes dans la magistrature belge en 1983, 1995 et 1997.
Année | Total des magistrats | Total des hommes | Total des femmes | Pourcenta ge de femmes |
1983 | 1 647 | 1 401 | 246 | 15 % |
1995 | 1 949 | 1 366 | 583 | 30 % |
1997 | 2 054 | 1 351 | 703 | 34 % |
Annexe no 2. Participation des femmes à la magistrature assise et debout en 1995.
Hommes | Femmes | Total | % de femmes | |
Siège | 851 | 338 | 1 189 | 28,4 % |
Parquet | 515 | 245 | 760 | 32, 2 % |
Total | 1 366 | 583 | 1 949 | 30 % |
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 A. HAUWEL, "Il y a cent ans, Marie Popelin", Le Soir, 10 novembre 1989.
2 L’accent sera mis d’avantage sur la magistrature assise que sur la magistrature debout. A savoir, les cours et tribunaux de l’ordre judiciaire et la Cour de Cassation.
3 C. CAMBIER, Droit Judiciaire Civil, tome I, Précis de la Faculté de Droit de l’Université catholique de Louvain, Bruxelles, Larder, 1974, p. 544.
4 Article 151 : "Les juges de paix et les juges des tribunaux sont directement nommés par le Roi. Les conseillers des cours d’appel et les vice-présidents des tribunaux de première instance de leur ressort sont nommés par le Roi, sur deux listes doubles présentées l’une par ces cours, l’autre par les conseils provinciaux et le conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, selon le cas les conseillers de la cour de cassation sont nommés par le Roi, sur deux listes double, présentées l’une par la Cour de Cassation, l’autre alternativement par la Chambre des Représentants et par le Sénat. Dans les deux cas, les candidats portés sur une liste peuvent également être portés sur l'autre. Toutes les présentations sont rendues publiques, au moins quinze jours avant la nomination. Les cours choisissent en leur sein leurs présidents et vice-présidents".
Article 152 : "Les juges sont nommés à vie"
Article 153 : "Le Roi nomme et révoque les officiers du ministère public près des cours et tribunaux".
5 Cette loi ne réglait pas le mode de recrutement des cours et tribunaux (R. WARLOMONT, Le magistrat : son statut et sa fonction, Bruxelles, Larcier, 1950, p. 190.)
6 ID., p. 191.
7 Loi du 23 décembre 1946.
8 R. WARLOMONT, art. cit., p. 191.
9 L’intervention majeure du législateur se situe entre autres mais surtout au niveau de l’augmentation du personnel judiciaire. Outre l’arrêté royal d’octobre 1832 qui nomma près de 400 magistrats, on citera la loi du 17 août 1834 portant augmentation du personnel des cours d’appel de Bruxelles et de Gand et du Tribunal de 1ère instance de Bruxelles et la loi du 25 mars 1841 sur la compétence en matière civile, qui visait une absorption de l’arriéré judiciaire. Viendra ensuite la loi du 25 octobre 1919 sur l’instauration du juge unique. Nous ne nous étendrons cependant pas plus avant sur ce sujet qui relève d’un travail d’historien et renvoyons le lecteur à la thèse que J.-P. NANDRIN a consacrée à ce sujet : Hommes et normes. Le pouvoir judiciaire en Belgique aux premiers temps de l'indépendance (1832-1848), défendue à l’UCL en février 1995 ; ainsi qu'aux publications qui en sont issues : Justice, magistrature et politique aux premiers temps de l’indépendance de la Belgique, Bulletin de la Classe des Lettres et des Sciences Politiques, Académie Royale de Belgique, 1997, 6è série, Tome VIII, p. 67-111 ; et Hommes et Normes. Le pouvoir judiciaire en Belgique aux premiers temps de l'indépendance, Revue Belge d’histoire contemporaine, 1994-1995, T. XXV, no 1-2, p. 255-262.
10 La nouvelle loi date du 1er décembre 1994.
11 J. VAN COMPERNOLLE, Réformer l’accès à la magistrature, nécessité ou utopie ?, Journal des Tribunaux (J.T.), 1982, p. 198.
12 A. FETTWEIS, Le recrutement et la formation des magistrats, J.T., 1960, p. 221.
13 A. FETTWEIS, Esquisse d’une évolution minimale du problème de la formation et du recrutement des magistrats, J.T., 1975, p. 87.
14 J. MATHIJS, L’avenir de la magistrature au tournant, J.T., 1971, p. 245.
15 W. GANSHOF VAN DER MEERSCH, Réflexion sur l’art de juger et l’exercice de la fonction judiciaire : mercuriale du 3 septembre 1973, J.T., 1973, p. 509.
16 J. VAN COMPERNOLLE, art. cit., p. 198.
17 Cité dans Le Journal des Procès, 23 février 1990, no 167, p. 12.
18 ID„ p. 14.
19 Proposition no 734/1, Doc.Parl., Chambre, session 1973-1974.
20 Proposition no 378/1, Doc.Parl., Chambre, session 1975-1976.
21 Proposition no 485/1, Doc.Parl., Sénat, session 1979-1980.
22 Proposition no 385, Doc.Parl., Sénat, session 1986-1987.
23 Proposition no 984/1, Doc.Parl., Chambre, session 1986-1987.
24 Proposition no 101, Doc.Parl., Sénat, session 1985-1986.
25 Le Moniteur belge, 26 juillet 1991, p. 16 500.
26 c. PARMENTIER, La loi du 18 Juillet 1991 modifiant les règles du Code judiciaire relatives au recrutement et à la formation des magistrats - Commentaire Législatif, Cahier de droit judiciaire, 1991, no 6, p. 162.
27 Ibid.
28 Ibid.
29 Ibid.
30 Doc. Parl., Sénat, no 974-2, session 1989-1990, p. 7.
31 O. DAURMONT, Le statut des agents administratifs : le recrutement, dans J. SAROT, Précis de Fonction Publique, Bruxelles, Bruylant, 1994, p. 158.
32 Doc. Parl., Sénat, no 974/1, session 1989-1990, Exposé des motifs, p. 7.
33 L’avant-projet de loi avait prévu la possibilité de dispense de l’examen accordée par le jury au profit des candidats “de grande valeur professionnelle”, sur le modèle de l’article 18 du statut des agents de l’Etat ; Mais cette disposition fut fort critiquée par le Conseil d’Etat et ne fut pas retenue. A ce sujet, voir ID., p. 57.
34 Cette indépendance est garantie par différents mécanismes constitutionnels : “Les juges sont nommés à vie. Ils sont mis à la retraite à un âge déterminé par la loi et bénéficient de la pension prévue par la loi. Aucun juge ne peut être privé de sa place ni suspendu que par un jugement. Le déplacement d’un juge ne peut avoir lieu que par une nomination nouvelle et de son consentement” (article 152). Au surplus, “aucun juge ne peut accepter d’un gouvernement des fonctions salariées, à moins qu'il ne les exerce gratuitement et sauf les cas d'incompatibilité déterminé par la loi” (article 155). Il s’agit entre autres du cumul de fonctions judiciaires simultanées ou successives, de l’incompatibilité entre la fonction judiciaire et l’exercice d’un mandat politique ou d’activité professionnelles extérieures.
35 GEHLEN S. La carrière dans la magistrature, dans J.SAROT, Précis de Fonction Publique, op. cit., p. 321.
36 Articles 193, 194, 208, 209, 256, 259bis, 259quater et 287.
37 GEHLEN S., art. cit., p. 323.
38 Conseil d'Etat (3è Ch), 13 novembre 1991, Halsberghe, no 38 102 dans Recueil des Arrêts du Conseil d’Etat (RACE).
39 Reportons-nous à ce sujet à la contribution d’Anne Boigeol et à son étude du recrutement des magistrates dans l’ordre judiciaire français.
40 Dix femmes en politique, Bruxelles, Ministère de l’emploi et du travail, 1994 (en collaboration avec L. Van Molle) ; Femmes et politique en Belgique, Bruxelles, Ed. Racine, 1998 (en collaboration avec L. Van Molle et R. Christens), Norme et marginalités, comportements féminins aux 19è et 20è siècles, Bruxelles, Université Libre de Bruxelles, 1991 ; La ville et les femmes en Belgique : histoire et sociologie, Bruxelles, Facultés Universitaires Saint-Louis, 1993.
41 A. HAUWEL, art. cit.
42 Cour de Cassation, arrêt du 11 novembre 1880, Pasicrisie (Pas.), 1880,1, p. 10.
43 Avis du procureur général VAN SCHOOR, 12 décembre 1888, Belgique Judiciaire, 1889, p. 3.
44 Ibid.
45 Cour de Cassation, arrêt du 11 novembre 1880, Pas., 1880,1, p. 10
46 P. VERMEYLEN, Règles et usages de la profession d’avocat, Bruxelles, Larder, 1940, p. 78, no 107.
47 E. GUBIN, L'accès des femmes aux professions juridiques, Sextant, 1995, no 4, p. 104. Toutes les citations qui suivent proviennent de cet article.
48 Ibid.
49 E. GUBIN, art. cit. p. 104.
50 COMITÉ BELGE DE COORDINATION EN PRÉPARATION À LA CONFÉRENCE MONDIALE SUR LES FEMMES, Lutte pour l’égalité, le développement et la paix, Pékin, 1995, Rapport de la Belgique, Bruxelles, Ministère de l’Emploi et du travail, service Egalité des chances, 1995, p. 13.
51 L’association belge des femmes juristes, Courrier hebdomadaire du CRISP, 1976, no 802, p. 2 et 3.
52 Statistiques établies par le Ministère de la Justice, services généraux - 1983 à 1997.
53 COMITE BELGE DE COORDINATION EN PRÉPARATION À LA CONFÉRENCE MONDIALE SUR LES FEMMES, Op. cit.
54 Quelques 15 %, d’après les sources recueillies par Anne Boigeol et dont il est question dans sa contribution au présent ouvrage.
Auteur
Politologue, licenciée en administration publique et candidate en droit de l'Université libre de Bruxelles.
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