Les jeunes nobles sous la Révolution : une génération sacrifiée ?
p. 221-233
Texte intégral
« En général, comme son nom, bal des victimes, l’indiquait, on n’était admis à ce bal qu’en vertu des droits étranges que vous y avaient donnés vos parents envoyés sur l’échafaud par la Convention […] mitraillés par Collot d’Herbois ou noyés par Carrier. […] Mais beaucoup avaient d’autres droits, pour entrer dans ce bal, que d’avoir eu des victimes dans leurs familles, beaucoup avaient fait eux-mêmes des victimes. Ceux-là cumulaient […]. Il y avait là des hommes de 25 à 30 ans, mis avec une élégance infinie, qui faisaient partie de l’association des Vengeurs, qui semblaient saisis de la monomanie de l’assassinat, de la folie de l’égorgement ; qui avaient la frénésie du sang, et que le sang ne désaltérait pas ; qui lorsque l’ordre leur était venu de tuer, tuaient celui qui leur était désigné, ami ou ennemi […].
Il y avait là des jeunes gens de 18 à 20 ans des enfants presque, mais des enfants nourris comme Achille de la moelle des bêtes féroces […] c’était une génération qui arrive après les grandes convulsions politiques, comme vinrent les Titans après le chaos, les hydres après le déluge, comme viennent enfin les vautours et les corbeaux après le carnage1. »
1Cet extrait des Compagnons de Jéhu d’Alexandre Dumas montre tout d’abord l’impact sur l’individu de l’événement révolutionnaire dans la mesure où ce dernier engendre presque systématiquement, par ses excès, une victimisation et cela pose d’emblée la question de l’origine des victimes. Certes, beaucoup de nobles ont perdu leur tête sous le couperet de la guillotine, mais ils étaient loin d’être les seuls et une partie d’entre eux, fascinés par les bouleversements de 1789-1793, servit la cause révolutionnaire. Une autre question semble essentielle durant cette période, celle du statut nobiliaire. Signe de distinction sociale sous l’Ancien Régime, il devint du fait de l’abolition des privilèges et du rejet de l’aristocratie, un élément de marginalisation. En coupant la tête de Louis XVI, les membres de la Convention n’ont-ils pas effacé du même coup, l’identité de tout un groupe ? Être noble a-t-il encore un sens sous la Révolution ? Alexandre Dumas évoque ensuite les classes d’âges 25-30 ans, 18-20 ans, en utilisant pour les désigner l’expression de « jeunes gens ». N’avons-nous pas là toute l’ambiguïté de cet état passager par lequel tous les hommes passent ? Les critères qu’Alexandre Dumas utilise dans cette fiction rédigée en 1857, sous le Second Empire, sont-ils les mêmes que ceux qui permettaient de cerner réellement cette jeune noblesse sous la Révolution ? Derrière la recherche de l’état de jeunesse apparaît une deuxième notion, celle de génération. Cet espace de temps correspondant à l’intervalle qui sépare chacun des degrés d’une filiation, estimé le plus souvent à une trentaine d’années, pourrait correspondre de 1770 à 1799, aux trois décennies équivalant aux périodes prérévolutionnaire et révolutionnaire. Ainsi, pour examiner de plus près ce “bal des victimes”, nous nous attacherons à identifier cette jeune noblesse, puis à cerner l’impact de la Révolution et le malaise qu’il suscite.
Le phénomène de génération appliqué à la jeunesse, à la noblesse et à la Révolution
2Les sociologues se sont beaucoup intéressés, surtout depuis le début des années 1970, à cet état éphémère qu’est la jeunesse. Pour Gérard Mauger2, cette notion naît d’un dualisme qui correspond à deux perspectives, l’une tenant compte de la temporalité, l’autre de l’environnement. Pour définir tout d’abord l’état de jeunesse, on oppose traditionnellement l’enfant au jeune et le jeune à l’homme mûr. On en donne ainsi une définition à la fois temporelle et sociale, celle-ci correspondant exclusivement à une période de la vie se situant entre l’enfance et l’âge adulte. La deuxième perspective serait de s’inscrire dans un espace correspondant à un groupe familial, social ou politique, et c’est bien ici ces angles d’entrée que l’événement révolutionnaire nous invite à étudier. Pour définir la jeunesse sous la Révolution, ne faut-il pas commencer par cerner ce que l’on entend par période révolutionnaire ? Pour les historiens, elle caractérise en général les dix ans qui, de la réunion des États Généraux à l’avènement du Consulat, constituèrent la charnière entre l’Ancien Régime et le XIXe siècle. Or, toute la profusion de travaux historiques publiés en France à l’occasion du bicentenaire a révélé une conception plus large du temps révolutionnaire. Pour François Furet, par exemple, il s’étalerait sur plus d’un siècle, de 1770 à 1880, se terminant par le triomphe de la République3. Sans aller jusque-là et en prenant en compte de manière plus classique la période 1789-1799, nous pourrions nous intéresser à ce qui se passe en amont, c’est-à-dire à la pré-révolution. Ainsi, pour définir la jeunesse de la Révolution, il faudrait s’intéresser à un groupe d’âge ayant entre 12 et 25 ans de 1789 à 1799 c’est-à-dire un groupe de jeunes dont la naissance a eu lieu entre 1765 et 1789. Cela correspond d’ailleurs à peu près à une génération. Mais le critère des dates de naissance contribue-t-il réellement à définir l’état de jeunesse ? Il est évident que les troubles engendrés par la Révolution ont entraîné une redéfinition de ce statut.
3Le sociologue Olivier Galland4 a montré dans un livre récent, que sous l’Ancien Régime l’état de « juvénile », lié à une idéologie du paraître, était une émanation aristocratique dont les caractères devaient changer au milieu du XVIIIe siècle. En effet, au moment où est publié le 1er tome de l’Encyclopédie de Diderot en 1751, la jeunesse n’est plus seulement synonyme de désordre comme elle pouvait l’être durant les époques antérieures, mais devient une force de progrès et de renouveau. Cette transformation du statut juvénile, qui correspond à une époque et caractérise prioritairement le milieu nobiliaire, s’inscrit dans un phénomène de génération. Il suffit pour s’en convaincre de relire les mémoires du comte de Ségur dans lequel apparaît une opposition entre le regard des parents et celui de leurs enfants5. De même, dans une lettre adressée à sa mère, le 27 août 1789, Ange-Marie-Louis Couen de Saint-Luc, alors âgé de 22 ans, écrivait : « Ah ! Ma chère maman quel siècle ! Que vous avez bien raison de dire que la sotte et fausse philosophie d’aujourd’hui n’engendre que crimes et horreurs. C’est bien aujourd’hui que je commence à croire ce que vous m’avez dit bien souvent et sur quoi j’ai souvent disputé6… » Cette citation montre incontestablement un attachement plus ou moins grand de la noblesse, en fonction des générations, aux idées des Lumières. Elle atteste d’une nouvelle vision du jeune noble ouvert, grâce à la raison, au progrès et par conséquent aux changements.
4La Révolution, comme d’ailleurs les idées des Lumières, pose un autre problème, celui de l’identité nobiliaire. Les Lumières, tout d’abord, ont désacralisé le statut nobiliaire. De la célèbre interrogation de Figaro dans Le Barbier de Séville7, au constat pathétique du marquis de Bouillé8, la noblesse s’est retrouvée dès le milieu du XVIIIe siècle, métamorphosée. Les Lumières, en inventant de nouvelles valeurs, l’avaient conduite à se redéfinir9. La Révolution devait se révéler plus destructrice, puisque, par une série de mesures allant de l’abolition des privilèges à la loi des suspects, elle rejetait complètement tout ce qui était susceptible de contribuer à définir et à reconnaître le statut nobiliaire. La noblesse n’existe plus en tant que catégorie sociale car le tutoiement égalitaire a pris le pas sur les titres et les faveurs. Elle n’a d’ailleurs plus d’avenir à partir du 21 janvier 1793, puisque le Roi, qui est à l’origine de son existence, n’est plus. Les jeunes nobles ne deviennent-ils pas alors une génération sacrifiée ?
5L’expression de « génération sacrifiée » est de plus en plus utilisée aujourd’hui par les sociologues, les économistes, les psychologues et les historiens. Elle désigne aussi bien les jeunes qui ont fait le sacrifice de leur vie pendant la Grande Guerre, au Chemin des Dames, à Verdun ou dans les fossés de la Somme que la génération post-soixante-huitarde. Les travaux du sociologue Karl Mannheim10 ont montré, dès l’entre-deux-guerres, combien la notion de génération était liée au changement social et combien elle s’inscrivait dans un processus historique. C’est d’ailleurs la plupart du temps un concept qui sert à définir un groupe ou une catégorie de jeunes. Ainsi, il existe une génération révolutionnaire ou contre révolutionnaire à laquelle est liée, une notion supplémentaire, celle d’identité. Il faut, en effet, ne jamais perdre de vue que le noble se définit par son lignage, fondement essentiel de l’identité génétique et élément unificateur du second ordre, puis, par son attachement à un certain nombre de valeurs, le service et la fidélité dus par exemple à la monarchie et à l’Église. Son existence individuelle s’efface au profit de l’épanouissement de sa maison dont il n’est finalement que le maillon d’une chaîne11 et cet état d’esprit ne peut se transmettre que par une éducation prodiguée par la cellule familiale. La situation révolutionnaire constitue l’élément perturbateur qui remet en cause l’identité du groupe et cela dans la mesure où le noble est obligé de prendre position, de s’engager. L’exemple des Lur Saluces est révélateur en la matière d’une conduite lignagère caractérisée par le dévouement à la cause du Roi ou à celle de l’État, le respect d’un patrimoine culturel et religieux, la transmission d’un nom et d’un héritage moral12. Or, la Révolution renforce ou fait disparaître l’identité puisque la noblesse est rejetée, marginalisée. Elle divise aussi un groupe nobiliaire qui a perdu une partie de ses repères.
Entre révolution et réaction, de jeunes nobles à la recherche d’une identité perdue
6Au-delà des définitions, ce sujet pose un problème de méthode : comment identifier la jeune noblesse ? Quelles sources utiliser pour cerner son attitude ? J’ai, dans un premier temps, fait du repérage biographique en me servant de dictionnaires13. J’ai utilisé le parcours de personnages connus en le complétant par le témoignage de ceux qui, dans des lettres ou dans des mémoires, ont évoqué leur jeunesse. Puis, en incluant la période pré-révolutionnaire et en estimant un peu arbitrairement que l’on pouvait être jeune entre 12 et 26 ans, j’ai distingué trois groupes : ceux qui avaient à la veille de la Révolution, de 20 à 26 ans, la tranche d’âges de 12 à 19 ans et celle des moins de 12 ans. Ce dernier groupe est particulièrement intéressant car il permet de saisir, pendant dix ans de troubles, le passage de l’état d’enfant à celui de jeune. Face à la Révolution, au regard des biographies et des mémoires, trois profils nobiliaires apparaissent : celui du jeune noble révolutionnaire, celui du réactionnaire et celui qui subit en silence les événements. Le profil de cette dernière catégorie n’est pas toujours facile à percevoir car elle fait partie trop souvent de la masse silencieuse. Néanmoins, vingt ou trente ans après, dans les Mémoires de la Restauration et de la Monarchie de Juillet, on peut parvenir à l’identifier.
7La philosophie des Lumières fascine tout d’abord car, comme l’écrit le comte de Ségur en 1822 : « Voltaire entraînait nos esprits ; Rousseau touchait nos cœurs ; nous sentions un secret plaisir à les voir attaquer le vieil échafaudage, qui nous semblait gothique et ridicule14. » L’attitude de Sophie de Grouchy marquise de Condorcet, attirée par les idées nouvelles, qui reçoit en 1786 dans son salon parisien philosophes et encyclopédistes et qui l’ouvre d’ailleurs sous la Révolution aux idéologues et aux agitateurs politiques, est révélateur de l’état d’esprit de la tranche d’âge des 20-26 ans15. Certains, comme Mathieu de Montmorency-Laval, avaient moins de 15 ans lorsqu’ils se sont engagés dans la guerre d’indépendance américaine16 avant de se forger une place en politique en se faisant élire aux états généraux par la noblesse de leur bailliage. Le duc de Montmorency-Laval va même très loin dans ses velléités d’égalité puisqu’il s’empresse de rejoindre le tiers état et propose l’abolition de la noblesse. On ne compte plus aux côtés de Davout, de Desaix qui refuse de suivre sa famille en émigration, du marquis de Grouchy, du duc de Decrès ou de Ferdinand-Louis Le Peletier de Saint-Fargeau, frère du conventionnel, les jeunes issus de la noblesse provinciale qui se sont engagés dans l’armée révolutionnaire. Ainsi, les nobles, dès 1770, se trouvaient tous, de près ou de loin, imprégnés par des idées nouvelles qui devaient très vite les dépasser comme nous le laisse entendre cette remarque implacable du baron de Frénilly sur Hérault de Séchelles : « La philosophie l’avait jeté dans la Révolution, l’orgueil l’y avait retenu, la peur l’y avait enchaîné17. » Cruelle et injuste, la Révolution devait l’être lorsqu’en mars 1794, à la mort de son époux, Sophie de Condorcet, haïe et calomniée, devait se retrouver dans la misère, ou lorsqu’en 1793, Davout, Desaix et Grouchy furent accusés, à cause de leurs origines, d’avoir des liens avec l’émigration. Ils restèrent pourtant fidèles aux idées de la Révolution et parfois, à l’instar de ce représentant de la noblesse du Dauphiné, Claude-François de Paysan, quelques irréductibles allèrent jusqu’à s’engager auprès de Robespierre. C’est ainsi que le jacobin Ferdinand Le Peletier de Saint-Fargeau, âgé de 26 ans, ponctue son discours, devant le cercueil de son aîné, par les mots suivants : « Je vote, comme mon frère, la mort des tyrans18. » Pourtant cette jeunesse qui s’était engagée dans la voie du changement devait voir les choses autrement après le 10 août 1792. Marcellin de Marbot, 11 ans sous la Terreur, se souvient d’avoir entendu son père, fraîchement nommé au commandement de l’armée de Toulouse, s’exclamer : « Ces misérables conventionnels ont gâté la Révolution qui pouvait être si belle ! Voilà encore des innocents qu’on mène en prison parce qu’ils sont nobles ou parents d’émigrés ; c’est affreux19 ! » Influencé par les idées familiales, il nota dans ses Mémoires rédigés quarante ans plus tard, « Je compris tout ce que mon père dit à ce sujet, et je vouai comme lui la haine la plus prononcée à ce parti terroriste, qui gâta la révolution de 178920. » Et de là, s’interrogea sur l’engagement de son père : « Mais pourquoi, dira-t-on, votre père servait-il encore un gouvernement qu’il méprisait ? Pourquoi ? C’est qu’il pensait que repousser les ennemis du territoire français était toujours une chose honorable et qui ne rendait pas les militaires solidaires des atrocités que la Convention commettait à l’intérieur21. » Il y avait déjà chez ce jeune aristocrate façonné par le modèle familial, un sens de la patrie et de l’État et l’on retrouve le même parcours chez d’autres nobles. Ainsi, Prosper de Barante, 12 ans en 1794, voit son père, favorable à l’esprit de 1789, rejeter les débordements révolutionnaires ce qui lui vaut d’ailleurs d’être arrêté et emprisonné à Thiers sous la Terreur.
8Parallèlement, face aux sympathisants ou aux engagés de la Révolution, il existe une jeunesse restée très attachée à l’Ancien Régime qui rejette l’abolition des privilèges, la constitution civile du clergé, la monarchie constitutionnelle. Terrifiée par l’ébranlement de la société d’ordres, cette jeunesse part en émigration pour faire partie de l’Armée des Princes et organise, de retour en France, une résistance intérieure en soulevant les populations locales. Sous le Directoire, elle cherche à en découdre avec les Jacobins et devient une « jeunesse dorée ». Les profils sont très variables. Beaucoup, comme le comte d’Audigné, émigrent en 1792, se retrouvent dans l’armée des Princes, se rendent en Angleterre et de là regagnent la Bretagne ou la Vendée. Lettres et mémoires attestent d’un exil à la fois dur et joyeux, très différent en fonction de la fortune de chacun. Ainsi, François-Xavier Guyot de Maiche s’indigne de l’attitude des nobles réfugiés aux frontières de la France : « Les émigrants y jouent un rôle impitoyable […]. Les jeunes gens s’y conduisent avec la dépravation qu’on leur reprochait avant la Révolution. Ils séduisent les femmes et les filles de leurs hôtes, font des dettes, ne payent point et s’aliènent tous les esprits par leur fatuité et leur insolence. Il n’est question rien de moins que de les chasser22. » Ce contraste entre les excès en tout genre de la Révolution et l’insouciance d’une jeunesse encline à l’amusement est noté également dans ses mémoires par le baron de Frénilly : « Les journaux n’étaient remplis que de crimes et des malheurs. Au milieu de cette sombre atmosphère, nos jeunes femmes riaient ; il faut bien payer le tribut à la jeunesse. […] Ces dames étaient heureuses. Pourquoi ? De quoi, hé mon Dieu de ce qu’elles avaient 20 ans23. » L’émigration constitue une rupture, une fracture, un malaise et loin de ses domaines, loin des modes parisiennes et des contraintes de la cour ou de la vie en société, on essaie de reconstituer partiellement un univers. C’est ainsi que le 23 novembre 1791, Monsieur de Puyvallée peut se plaindre de Coblence à Monsieur d’Abzac : « Je m’étais imaginé trouver ici une cour avec une contenance qui convint à des gens éprouvés par deux ans d’infortune… je n’ai aperçu que légèreté et inconséquence… une jeunesse indiscrète qui décide souverainement24… » Pour certains, tout se passe comme si rien n’avait changé. Quelques jeunes d’une noblesse de fraîche date originaire du négoce se rendent dans des grandes villes européennes pour parfaire, comme sous l’Ancien Régime, leur éducation. Leurs parents utilisent les lois du 8 avril 1792 et du 28 mars 1793 qui autorisent à organiser ce type de départ, c’est aussi pour eux le moyen de les préserver, de les écarter des troubles et de leur éviter l’incertitude du lendemain. Ainsi, le Bordelais Éloi de Groc, âgé de 16 ans, a le plaisir de retrouver à Hambourg, Philippe-Amédée de Carles, Joseph de Lamourous, Louis-Henri Daugeard de Virazel. Certains, comme André Kirwan en juillet 1792, partent parachever leur formation dans le berceau de la famille, l’Irlande25.
9Parallèlement, face à la Révolution, certains jeunes aristocrates préférèrent s’insurger en Bretagne, en Vendée ou ailleurs contre les nouvelles conceptions de la société. Ainsi, Eugène François baron de Vitrolles, issu d’une vieille famille parlementaire de Provence, n’avait même pas 20 ans lorsqu’il s’enrôla dans l’armée de Condé où il servit jusqu’en 1794. De même, le Comte de Bourmont, avait 23 ans lorsque de retour de Coblence, il devint le principal lieutenant du vicomte de Scepeaux en Anjou. Armand de Chateaubriand, cousin du très célèbre écrivain, 21 ans en 1789, émigra, se joignit à l’armée des Princes, passa en Bretagne et servit d’agent de liaison entre Londres et les royalistes de l’intérieur. En France, le comte de La Rochejaquelein, généralissime de l’armée catholique et royale, n’avait pas 22 ans lorsqu’il succomba sous le feu des bleus26, Charles-Marie-Auguste-Joseph de Beaumont comte d’Autichamp avait 23 ans lorsqu’il participa au siège de Nantes27 et Ange Marie-Louis-René-Joseph Couen de Saint-Luc, qui fit partie de l’expédition de Quiberon, fut fusillé à Vannes en 1793. La violence et la passion pour des idées avec, en toile de fond, l’idéal de vie d’Ancien Régime que l’on concevait comme un âge d’or, conduisit à bien des excès. C’est comme cela que cette jeune fille de petite noblesse normande, Charlotte Corday d’Armont, exaspérée par les mesures prises contre les prêtres réfractaires et choquée par les massacres de septembre, poignarda Marat dans sa baignoire. Mais, la Terreur passée, les jeunes nobles affirmèrent leur identité en se raillant des sans-culottes et en les pourchassant. Beaucoup avaient suivi le parcours d’un Matthieu de Molé qui se souvient « avoir revêtu le costume de ces jeunes gens que les pamphlets du temps appelaient “jeunesse dorée”, jeunesse “thermidorienne” ou de “Fréron”28 ». Dès le 23 nivôse An III, Fréron lança une Invitation à la jeunesse parisienne à poursuivre les sans-culottes et ce phénomène finit par gagner la province29. Le comportement à Bordeaux, en août 1799, alors qu’il n’avait pas 19 ans, de Ferdinand-Eugène de Lur Saluces atteste de la fougue de toute une génération : à l’occasion de la publication de la loi des otages du 24 messidor an VII30, de jeunes royalistes affrontèrent des jacobins. Ce combat de rue auquel s’était mêlée la police, fit des morts et de nombreux blessés ; quarante jeunes gens furent arrêtés. Ferdinand-Eugène de Lur Saluces, atteint de trois coups de baïonnette à la tête, fut traîné en prison. Libéré après deux ou trois mois de détention, il s’empressa de rejoindre les royalistes de Vendée afin de se battre à nouveau mais la politique de pacification du Premier Consul, puis la paix d’Amiens interrompirent les hostilités31. Tous ces adolescents inexpérimentés qui avaient vu un proche succomber sous le couperet de la guillotine ou qui étaient devenus des orphelins sans repère étaient nombreux en Bordelais à rejeter le statut de paria et à s’engager soit dans l’Armée des Princes, soit dans la guerre de Vendée. Ainsi, Ferdinand de Bertier avait 14 ans, Marie-François-Victor de Canolle, 15 ans, André-Guy-Victor du Hamel 17ans, le futur comte de Marcellus, 17 ans, le marquis de Lamoignon 27 ans, la marquise de La Rochejacquelein 21 ans… au moment où ils choisirent de passer dans la contrerévolution. Pierre Bécamps, qui a travaillé sur la Société de la jeunesse bordelaise, a bien souligné le rôle, dès 1793, de ces jeunes armés de sabres et de cannes à lance qui manifestaient bruyamment contre les pièces jacobines et qui n’hésitaient pas à molester d’anciens responsables terroristes, les traitant de « cannibales » et de « buveurs de sang32 ». Ce qui les avait vraiment heurtés, c’était d’avoir été réduits au rang de paria, de vivre dans la peur du lendemain et parfois dans le besoin.
10Les jeunes nobles ni révolutionnaires, ni contre-révolutionnaires, eurent pour la plupart le souci de vivre le quotidien. Les mémoires de cette période sont riches de souvenirs et relatent des difficultés d’avoir appartenu au second ordre. Là encore, Matthieu de Molé témoigne : « Malgré ma grande jeunesse, je souffrais plus que mes parents eux-mêmes des maux qui les accablaient. » « Mon père et ma mère furent arrêtés au commencement d’octobre. […] On me permit de les voir. J’y allais tous les matins et je passais le reste de la journée à solliciter les membres du comité révolutionnaire. » « Depuis ce moment (première arrestation du père), jusqu’au fameux neuf Thermidor, ma vie se passa à concerter des mesures, à faire des démarches pour sauver mes parents de l’échafaud33. » La peur et la vulgarité étaient du quotidien et la violence trop souvent banalisée. Ainsi, la comtesse d’Ambrugeac constata, dès décembre 1790, dans une lettre adressée à la comtesse de Bussy : « L’on dépend d’un tas de vagabonds qui sur la moindre déposition, vous font arrêter, enfermer » et de ponctuer sa phrase par : « Actuellement, bon Dieu, que nous sommes malheureux34. » Dans ses mémoires le baron de Bonnefoux souligne toute l’importance des liens familiaux et à l’intérieur de cette cellule, le rôle de la mère :
« J’ai peine encore à m’expliquer comment ayant sous les yeux tant de souffrances et de peines, tant de dévouement et de malheurs, il pût encore me rester, dans l’âme, quelque place à d’autres émotions, dans l’esprit, quelques pensées d’amusement. L’enfance est ainsi faite ; tout glisse sur elle, l’impression même des chagrins. Notre tendre mère, d’ailleurs, mettant tant de soins à cacher son véritable état, nous engageait tous si vivement à nous distraire35 ! »
11Finalement, la Révolution, en tant qu’événement a multiplié les prises de position différentes et a accentué la division du groupe nobiliaire. Il suffit pour s’en convaincre d’écouter en février 1790, le jeune négociant bordelais anobli, Boyer-Fonfrède : « Quoi ! La destruction des privilèges, des bastilles, des ordres arbitraires […]. Ce sont des maux sans doute pour les mauvais citoyens […]. Qu’ils pleurent sur l’heureuse révolution, qui nous rend tous libres, égaux et heureux, mais qu’ils se gardent de répandre leurs plaintes séditieuses ; tous les regrets sont criminels quand la nation n’a que des espérances36. » On se trouve là devant un discours manichéen utilisé à des fins discriminatoires pour désigner les mauvais citoyens. Boyer-Fonfrède ne tient pas compte de la masse des jeunes nobles anonymes qui se sont contentés de souffrir en silence livrés à l’aventure du quotidien et qui allaient malgré tout devenir acteurs de leur destin.
Entre engagement et responsabilité, une génération actrice de son destin ?
12Tous les mémoires nobles rédigés sous la Restauration, la monarchie de Juillet et le Second Empire s’inscrivent indiscutablement dans un processus de transmission à la fois lignager et identitaire. Chaque génération se doit de laisser son empreinte afin de contribuer par son engagement et donc sa responsabilité, au capital symbolique de son lignage. Chaque lettre, chaque mémoire conservé, daté, constitue une trace du passé qui relève à la fois du même, de l’autre et de l’analogue37. Le même, parce que ces écrits sont spécifiques d’un milieu où chaque génération n’a été que le maillon d’une chaîne, de l’autre, puisque ces récits relèvent du contexte particulier de la Révolution et de l’analogue, car ils s’inscrivent dans un processus de devoir de mémoire qui dans le temps comme dans l’espace, n’est pas spécifique au milieu nobiliaire. Mais, à travers cette trilogie, une question se pose : quel a été l’impact des événements révolutionnaires sur la jeune noblesse ? Là, on s’inscrit dans la dialectique du bourreau et de la victime. Cela pose néanmoins problème en ce qui concerne les jeunes nobles de la Révolution car on ne sait plus où sont les bourreaux et où se trouvent les victimes, le discours manichéen d’un Boyer-Fonfrède en atteste d’ailleurs.
13Préserver dans la mesure du possible le nucléus familial et s’engager contribuent à aider ces jeunes à la construction de leur propre avenir. L’un des plus beaux exemples de la reconstitution du noyau familial est celui des Lur Saluces à travers le parcours de Françoise-Joséphine de Sauvage : veuve à vingt ans, vingt-cinq ans en 1793, elle se retrouve seule avec ses deux enfants et ses belles-sœurs tandis que ses beaux-frères sont partis en émigration et que son beau-père est mort guillotiné38. Grâce à son statut de veuve, elle protège son entourage plus jeune qu’elle et préserve dans la mesure du possible, les biens de son lignage. Cet état d’esprit, on le retrouve aussi chez les Pichon. Sophie de Pichon quitte Bordeaux pour se réfugier avec sa famille en Médoc, elle n’a pas neuf ans lorsque ses parents sont arrêtés. Durant la détention de ces derniers, elle prend en charge pendant six mois ses deux frères de six et quatre ans39.
14« Mais comment, me dira-t-on, à douze ans, écrire d’une manière supportable ? Quelles réflexions un enfant de cet âge peut-il confier au papier ? […] Voilà ma réponse : rien ne forme comme l’adversité, quand elle n’abrutit pas ; […] De bonne heure livré à moi-même, obligé de me créer une existence, je fus forcé de réfléchir, à l’âge où l’on joue à la balle ou aux barres. » Cette réflexion du vicomte de Rochechouart incorporé, à douze ans, en 1800, dans l’armée de Condé, montre combien la Révolution a privé de jeunesse des enfants, les poussant à faire face à des situations spécifiques au monde des adultes40. L’événement était d’importance puisque, comme le souligne Matthieu de Molé, « j’ai peu de choses à dire du commencement de la Révolution, mais je dois parler des malheurs dont elle a environné mon enfance et de l’effet qu’ils ont produit sur moi. Leur influence a décidé de ma vie ; […] Elle a tout prononcé chez moi41 ». Pourtant, lorsque l’on examine de plus près le parcours de quelques mémorialistes, on s’aperçoit que d’hommes politiques à écrivains, ils se sont tous forgés un destin plus ou moins célèbre et les malheurs de l’enfance ont glissé au plus profond de leur mémoire pour réapparaître sur une feuille de papier quelques années avant leur mort. Il suffit de décrire certains parcours pour s’apercevoir que les événements révolutionnaires n’ont brisé ni l’engagement libéral, ni la générosité conduisant souvent à la philanthropie.
15Ainsi, Alexandre de Laborde, envoyé à dix-sept ans en Autriche pour y faire sa carrière militaire, apprend en 1794, la mort de son père qui succombe sur l’échafaud. Il retrouve sa mère et sa sœur en Suisse, puis son frère en Angleterre et de là, parcourt l’Europe pour revenir en France en 1797. Il publia beaucoup et ses écrits montrent combien il est attaché au bien public et à la volonté de construire le bonheur du peuple. La blessure que représentait la mort de son père sur l’échafaud n’avait laissé aucune trace apparente de haine. Libéral, il eut des fonctions politiques sous la Restauration et la Monarchie de Juillet. Ainsi, la Terreur ne semble pas avoir freiné son ascension sociale, elle l’a bien au contraire conforté dans ses idées. À l’opposé, Alexandre de Lur Saluces partit en émigration à dix-sept ans, intégra l’armée des Princes puis se rendit en Angleterre, en Espagne, il contribua au rétablissement des Bourbons. Député sous la Restauration, il abandonna la scène politique en 1830 pour s’engager dans le légitimisme. Autre parcours sur lequel la Révolution semblait s’être estompée. Pourtant, elle était bien présente dans les esprits et beaucoup en parlaient sans en parler car, comme l’écrivit de nombreuses années plus tard Charles de Rémusat42 : « Dans ma jeunesse, dans mon enfance, les plaies étaient bien récentes. Ce n’était pas un aïeul, un bisaïeul inconnu, mais un mari ou un père dont le sang venait presque de couler. Certainement, on ne parlait pas sans horreur des jours de 1793, et même on craignait d’en parler. Je n’ai jamais entendu rien raconter de l’emprisonnement et de la mort de mes deux aïeuls43. » S’agissait-il là, par le non-dit, d’une volonté de préserver l’enfance et la jeunesse ? Ou sommes-nous en présence de mémoires souffrantes auxquelles il a fallu du temps pour obturer les plaies ? Il est certain que les jeunes qui ont vécu la Révolution, ont beaucoup écrit en devenant vieux sans doute pour fixer à jamais pour les générations suivantes des moments d’existence à la fois douloureux et exceptionnels. Pour comprendre ce comportement, il suffit d’écouter cette pensée d’Alexandre de Lur Saluces qui, interrogé en 2005 sur le rôle de ses ancêtres dans la Révolution, répondait :
« Je trouve en effet que cette dimension humaine est importante, on dit souvent que les grands chocs sont muets. Par leur fonction militaire, par leur engagement politique, par leur prise de position, les membres de l’aristocratie française sont souvent à l’origine de traumatismes familiaux. Dans notre milieu, la souffrance est transparente. Dans le destin d’une famille il n’y a pas que du positif mais le positif efface le négatif. C’est en tout cas ce que mes ancêtres ont essayé de faire dans la transmission de ce que l’on a appelé le patrimoine symbolique du lignage44. »
16Alexandre de Lur Saluces explique bien ici à travers l’image de « la souffrance transparente » ce qu’a représenté pour les jeunes nobles l’engagement par rapport à la Révolution et il montre que ce processus n’est pas spécifique à une génération, qu’il s’inscrit sur la longue durée et qu’il correspond à un besoin de transmission.
17Ces parcours de jeunes vies écrits dans la première moitié du XIXe siècle, ne furent publiés que tard après 1870, c’est en tout cas ce qu’a très bien montré Henri Rossi dans son livre sur les Mémoires aristocratiques féminins45. Il remarque d’ailleurs, que c’est un genre qui est à son apogée entre 1789 et 1848 tant sur le plan de la quantité que sur celui de la densité littéraire46. Cette tendance s’inscrit dans un besoin d’écrire, de dire, de chasser de la pensée la trajectoire d’une jeunesse à la fois insouciante, souffrante et engagée. Mais, le mémoire qui relate une jeunesse passée au parcours reconstitué et souvent embelli, correspond aussi à une nécessité de transmettre des moments de vie difficiles, des moments de vie exceptionnels, des moments de vie qui ont contribué à construire une histoire et à enrichir le capital symbolique d’une maison. Nous avons incontestablement là un phénomène de génération où l’individu négligé par la Révolution prévaut sur le groupe, où l’on regarde avec nostalgie un passé que l’on magnifie et où les états d’âme, les sentiments, la description d’un univers occupent une place plus grande comme si cette écriture du quotidien appartenait, à l’instar de la littérature romantique de l’époque, au domaine de la sensibilité. Il suffit pour s’en convaincre de lire ces quelques phrases de Léontine de Villeneuve, comtesse de Castelbajac exhumées par sa petite fille en 1927 : « La génération actuelle, étrangère à un monde disparu, s’informe s’il y avait autre chose que de l’esprit chez ces émigrés demeurés, malgré tout, hommes de salon dans l’exil… Mais ces vétérans de l’exil sont demeurés toujours fidèles au culte de leur jeunesse, à cette vieille royauté qui les avait écrasés en s’écroulant47. » Ainsi, pour ces jeunes de la Révolution, rien ne pouvait plus être comme avant et nous avons bien là l’impact du choc révolutionnaire sur toute une génération. Il les avait conduits, plus encore qu’auparavant, à affirmer leurs positions politiques. Il était devenu un facteur d’identité surexposé dans une vie se situant elle-même à la fois dans un parcours lignager et dans une attitude de groupe qu’il avait contribué à diviser.
18Au terme de cette étude, les jeunes nobles de la Révolution constituent-ils une génération sacrifiée ? La plume, la verve, l’impatience, l’impertinence d’une jeunesse qui vénérait le changement et se piquait de liberté, conduisit à une Révolution qui dépassa ses velléités et constitua un horrible foyer de détresse. C’est néanmoins, avec beaucoup de pudeur et de dignité que certains nobles relatent de douloureux moments comme s’ils ne constituaient que les parenthèses d’une vie. Ainsi, Chateaubriand, parti en émigration, se contenta de noter dans les Mémoires d’Outre-Tombe :
« Les malheurs de ma famille, que j’appris par les journaux, et qui me firent connaître sous mon véritable nom (car je ne pus cacher ma douleur), augmentèrent à mon égard l’intérêt de la société. Les feuilles publiques annoncèrent la mort de M. de Malesherbes ; celle de sa fille, madame la présidente de Rosambo ; celle de sa petite-fille, madame la comtesse de Chateaubriand ; et celle de son petit gendre, le comte de Chateaubriand, mon frère, immolés ensemble, le même jour, à la même heure, au même échafaud48. »
19Sans tomber dans l’excès de ce tableau d’une jeunesse victime ou d’une jeunesse vengeresse que la plume d’Alexandre Dumas considère comme « nourrie de la moelle des bêtes féroces », il est certain que les événements révolutionnaires ont laissé une empreinte, ont transformé, modelé et conduit des destins. Ils ont façonné une génération. La pudeur et la sensibilité parcimonieusement distillées dans les écrits du for privé attestent de sentiments où la haine ne vient pas remplacer le bonheur détruit, car la mort n’est rien pour une noblesse chrétienne dont la fonction première (bellatores) a toujours été de laisser couler son sang. Quant au malheur, il ne s’étale pas, il s’intériorise. Les destins individuels des jeunes nobles de la Révolution sont le reflet, quels que soient leurs engagements politiques, d’un attachement profond à la mémoire du lignage, au culte des ancêtres et à l’identité nobiliaire. La pudeur des sentiments, la volonté de ne pas devenir des victimes et de ne pas s’enfermer dans une mémoire souffrante, même si la Révolution reste un traumatisme, constitueront au XIXe siècle, les éléments d’une éducation et d’un savoir-vivre nobiliaires.
Notes de bas de page
1 A. Dumas, Les Compagnons de Jéhu, Paris, Phébus, 2006, p. 320-321.
2 G. Mauger, « La “jeunesse” dans les “âges de la vie”. Une “définition préalable” », Temporalistes, no 11, mai 1989. http://www.sociologics.org/temporalistes/indarch.php?page2=mauger_n11_01.
3 F. Furet, La Révolution, 1770-1880, Paris, Histoire de France Hachette, 1988.
4 Olivier Galland, Sociologie de la jeunesse, Paris, Armand Colin, 2007, p. 23.
5 Comte de Ségur, Mémoires, Paris, Barrière, 1822.
6 P. de Vaissière, Lettres d’aristocrates, la Révolution racontée par des correspondances privées 1789-1794, Paris, 1907, p. 312.
7 « Qu’avez-vous fait pour tant de biens ? Vous vous êtes donné la peine de naître, et rien de plus. »
8 Marquis de Bouillé, Mémoires, Paris, éd. Berville et Barrière dans la Collection des mémoires relatifs à la Révolution française, 1822, p. 53. « La noblesse enfin n’était plus distinguée des autres classes des citoyens, que par les faveurs arbitraires de la cour et par les exemptions d’impôts, moins utiles pour elle-même qu’onéreuses pour l’État et choquantes pour le peuple. Elle n’avait rien conservé de son ancienne dignité et de sa première considération ; il lui restait seulement la haine et la jalousie des plébéiens. »
9 M. Vovelle (dir.), L’homme des Lumières, P. Serna « Le noble », Paris, Seuil, 1996, p. 68.
10 K. Mannheim, Le problème des générations, (1928), trad. G Mauger et N. Perivolaropoulou, Paris, A. Colin, 2005.
11 G. Chaussinand-Nogaret, La Noblesse au XVIIIe siècle : de la féodalité aux lumières, Paris, Hachette, 1976, p. 40. M. Figeac-Monthus, « La place de la tradition nobiliaire dans l’identité familiale : l’exemple des Lur Saluces », L’identité nobiliaire. Dix siècles de métamorphoses (IXe-XIXe siècles), Le Mans, Université du Maine, 1997, p. 338.
12 Ibid., p. 356.
13 J. Tulard, J.-F. Bayard, A. Fierro, Histoire et dictionnaire de la Révolution française, 1789-1799, Paris, Robert-Laffont, Bouquins, 1987. A. Soboul, Dictionnaire historique de la révolution française, Paris, PUF, 1989. F. Furet, M. Ozouf, Dictionnaire critique de la Révolution française, Paris, Flammarion, 1988.
14 Comte de Ségur, Mémoires, Paris, Barrière, 1822.
15 J. Tulard, op. cit., p. 671.
16 J. Tulard, op. cit., p. 994.
17 Baron de Frénilly, 1768-1848. Souvenirs d’un ultraroyaliste, coll. L’Histoire en Mémoires, Paris, Perrin, 1987, p. 135.
18 J. Tulard, op. cit., p. 946.
19 Mémoires du Général Baron de Marbot, Paris, Plon, 1892, p. 15.
20 Ibid.
21 Ibid.
22 Comte d’Herisson, Autour d’une Révolution (1788-1799), Paris, Paul Ollendorff, éditeur, 1888, p. 324. Lettre de Monsieur de Maiche, capitaine au régiment de Bourbon Infanterie à Arras à la marquise de Maiche, sa mère.
23 Baron de Frénilly, 1768-1848, op. cit, p. 138.
24 P. de Vaissière, op. cit., p. 366. Lettre de Monsieur Bengey de Puyvallée à Monsieur d’Abzac, Coblence le 23 novembre 1791.
25 Cité par Michel Figeac, Destins de la noblesse bordelaise (1770-1830), Bordeaux, Fédération Historique du Sud-Ouest, 1996, p. 387.
26 J. Tulard, op. cit., p. 933.
27 J. Tulard, op. cit., p. 549.
28 M. Molé, Souvenirs d’un témoin de la Révolution et de l’Empire (1791-1803), Genève, Le Milieu du Monde, 1943.
29 F. Gendron, La jeunesse sous Thermidor, Paris, PUF, 1983, p. 45.
30 Loi des otages (24 messidor an VII, 12 juillet 1799) : l’administration centrale des départements déclarés en « état de trouble » avait soin d’interner des otages choisis parmi les parents d’émigrés et de rebelles. Ces otages étaient déportés en cas d’assassinat de patriotes, à raison de quatre pour un, tous étaient solidairement responsables des indemnités dues aux familles des victimes.
31 M. Figeac-Monthus, Les Lur Saluces d’Yquem de la fin du XVIIIe siècle au milieu du XIXe siècle, Bordeaux, Mollat-Fédération Historique du Sud-Ouest, 2000, p. 79.
32 P. Bécamps, « La société de la jeunesse bordelaise, août-septembre 1793 », Revue historique de Bordeaux et du département de la Gironde, 1982, p. 47-55.
33 Molé (M), op. cit.
34 P. de Vaissière, op. cit., p. 209. De même, le jeune Bonnefoux écrivit que « quelque chose de plus repoussant encore était de subir le ton grossier, les soupçons ridicules, les sarcasmes insolents, l’ignorance stupide, le tutoiement répugnant de ces individus ; et, s’il s’échappait une parole douteuse, vous étiez vous-même saisi et aussitôt incarcéré ». Bonnefoux (Pierre Marie Joseph), Mémoires du baron Bonnefoux, capitaine de vaisseau (1782-1855), publiés avec une préface et des notes par E. Jobbé-Duval, Paris, Plon-Nourrit, 1900.
35 Bonnefoux (Pierre Marie Joseph), op. cit., p. 46.
36 Cité par Michel Figeac, op. cit., p. 343.
37 P. Ricoeur, Temps et récit, t. 3, Le temps raconté, Coll. Points Essais, Paris, Éditions du Seuil, 1985, p. 252-283.
38 M. Figeac-Monthus, op. cit., p. 78-81.
39 D. Haziot, Château Pichon-Longueville, Comtesse de Lalande. La passion du vin, Paris, Éditions de La Martinière, 2007, p. 63-64.
40 C. Piquemal, Enfances en révolution et sous l’Empire, t. 1, maîtrise d’Histoire dirigée par F.-J. Ruggiu, juin 2004, p. 15. Rochechouart (L.V.L., comte de), Souvenirs sur la Révolution, l’Empire, la Restauration et le règne de Louis-Philippe. Mémoires inédits publiés par son fils, Paris, Plon, 1933.
41 M. Molé, op. cit.
42 Son grand-père maternel et l’un des oncles ont été guillotinés
43 Rémusat (C. de), Mémoires de ma vie ; enfance et jeunesse, Paris, Plon, 1955.
44 Réponse d’Alexandre de Lur Saluces faite à Marguerite Figeac-Monthus dans J. Favier, Archives familiales et noblesse provinciale. Hommage à Yves Soulingeas, M. Figeac-Monthus, A. de Lur Saluces, « De l’Italie vers la France, de la Province vers Paris, de la Guyenne vers le Cantal : faire revivre les Lur Saluces d’Yquem aux XVIIIe-XIXe siècles », Grenoble, PUG, 2006.
45 H. Rossi, Mémoires aristocratiques féminins, 1789-1848, Paris, Honoré Champion, 1998, p. 13.
46 H. Rossi, op. cit., p. 18.
47 L. de Villeneuve, comtesse de Castelbajac, Mémoires de l’Occitanienne. Souvenirs de famille et de jeunesse publiés par sa petite-fille la comtesse de Saint-Roman née Castelbajac, Paris, Librairie Plon et Nourrit, 1927, p. 94-95.
48 Chateaubriand, Mémoires d’Outre-Tombe, Paris, Gallimard, 1951, p. 363.
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