Les jeunes députés radicaux de la Libération : de l’élite vers la base ?
p. 151-162
Texte intégral
1La scène se déroule à l’occasion de l’Assemblée Générale radicale du 12 janvier 19461. Peu après le grave échec des élections législatives de septembre 1945, le parti tient congrès pour analyser les causes de cet échec et tenter d’y porter remède. Parmi les éléments avancés figure le fait que « dix générations de jeunes sont absentes du parti », selon la formule de Georges Laffargue2. Encouragé par cette déclaration, s’avance Bazille, jeune représentant du Gard3. Celui-ci entreprend de parler au nom des « jeunes Barbes » du parti. « Car il y a des jeunes Barbes au moins en puissance au parti radical. Je viens pour vous faire entendre une voix primordiale, c’est celle de la jeunesse. Je suis jeune, c’est à la fois un défaut et une qualité », lance-t-il à l’Assemblée. « Ça vous passera, jeune homme ! », l’interrompt alors Edouard Herriot, provoquant l’hilarité générale, et contraignant le malheureux intervenant à insister sur les « limites » de son « expérience récente » en politique, et à improviser un panégyrique des « consciences morales » du parti radical (« Si nous croyons à la fougue de notre ardeur juvénile, nous croyons aussi en la vertu de nos anciens. Puisque nous avons aujourd’hui la chance d’entrer dans la carrière quand nos aînés y sont encore, il faut que nous profitions de leurs conseils »). Cette anecdote illustre bien le rapport complexe qu’à la Libération le parti radical entretient avec sa jeune génération. Le besoin de renouvellement se fait sentir, les caciques radicaux semblent conscients de la nécessité de renouveler l’image et le discours du parti et les hommes qui les portent, mais s’avèrent dans un même temps peu disposés à abandonner, ou même à partager les postes de commandes et les mandats nationaux. C’est évidemment le cas d’Edouard Herriot, toujours prêt à se draper dans son glorieux passé pour répondre aux critiques de la jeune génération radicale. En décembre 1948, il lance ainsi au jeune Ramonet, représentant de la Loire, qui réclame un renouveau à la tête du parti : « Je conseille à ce jeune homme, qui est encore en âge de recevoir des conseils, de faire dans son département ce que j’ai fait dans un département voisin du sien, de mettre son talent, son courage, son énergie au service du parti au lieu de discréditer un homme qui se tient au-dessus de ces incidents4. »
2Cette attitude se trouve donc au cœur d’un paradoxe propre au parti radical, particulièrement frappant à la Libération. Peu de partis semblent alors plus étroitement associés au passé de la République, comme pourraient l’illustrer les célèbres propos d’Albert Camus sur cette « France que nous ne voulons plus voir » qu’ils incarneraient5. Cependant, peu de partis vont également permettre une accession aussi rapide de jeunes à des fonctions électives nationales, puis à des fonctions ministérielles. Pour s’en tenir aux groupes de l’Assemblée Nationale, sur les 54 députés radicaux élus aux deux assemblées constituantes de 1945 et 1946, puis aux élections législatives de 1946, 26 n’ont jamais auparavant exercé de mandat parlementaire, et 12 n’ont même déployé aucune activité politique dans un parti organisé avant-guerre. Certains noms célèbres de la vie politique française, comme Edgar Faure, Félix Gaillard, Maurice Bourgès-Maunoury, Jacques Chaban-Delmas, Jean Masson, ou plus tard Maurice Faure et Jacques Ducreux, profitent de l’occasion pour devenir députés d’un parti avec lequel ils n’avaient jusqu’ici entretenu que des rapports parfois lointains, et qui leur a accordé l’investiture en dépit de leur jeune âge et de leur relative inexpérience politique. De même, avec Maurice Bourgès-Maunoury puis Félix Gaillard, le parti radical offrira à la IVe République ses deux plus jeunes présidents du conseil. Comment comprendre la place faite à ces jeunes élus au sein du parti, au moins à l’Assemblée Nationale (il ne sera pas question du Sénat dans cette communication) ? Peut-on véritablement considérer qu’une tâche de renouvellement du parti leur est confiée, et qu’une place leur est accordée dans l’appareil du parti ? Ne se trouvent-ils pas, au contraire, contraints à un processus d’adaptation à un style politique plus traditionnel ? Ne servent-ils pas de « caution » pour rajeunir l’image du parti sans en changer les dirigeants ni le fonctionnement ?
3Pour répondre à ces questions, nous voudrions développer trois hypothèses, qui correspondront à autant de parties. La première est que cette ouverture du groupe parlementaire radical aux jeunes est étroitement limitée à la parenthèse des années 1945-1946, dans un souci de renouveler l’image du parti, de lancer des candidats possesseurs d’un bagage technique, et de pallier certaines défections de vieux notables, parfois frappés d’inéligibilité6. Il faut donc employer avec prudence le terme de « génération » radicale des années 1945-1946 : ces hommes ont avant tout en commun d’avoir vu dans le parti radical le champ de tous les possibles et de toutes les opportunités. Dans un second temps, il faudra insister sur les difficultés auxquelles se heurtent ces jeunes pour progresser au sein du parti, l’ancienne génération ayant tôt fait de leur imposer un procès en légitimité une fois le retour au pouvoir acquis. Leur ascension s’opère moins au sein de l’appareil partisan ou des fédérations, que selon une hiérarchie parallèle, au sein du groupe parlementaire et des gouvernements. Enfin, on s’interrogera sur le sort de cette génération à la fin de la IVe République : ces hommes ne connaissent-ils pas une carrière « à l’envers », puisqu’ils incarnent déjà le passé dans le discours critique des jeunes mendésistes, puis se trouvent, précocement dans leur carrière, associés à l’époque révolue d’un régime défunt. Ne s’agit-il pas là de la contrepartie de leur rapide ascension ?
Une jeune génération de la guerre ?
4Dans l’hommage qu’il rend à son camarade Félix Gaillard, le 10 septembre 1970, Jacques Chaban-Delmas voit dans son élection à la députation en Charente, en juin 1946, un « modèle de fulgurance7 ». Peut-on généraliser ce cas et considérer comme « fulgurant » le renouvellement des élites au sein du parti radical à la Libération ? On peut à ce sujet faire deux remarques préliminaires. D’une part, le contexte de trois élections législatives rapprochées des années 1945-1946 favorise des implantations rapides, et permet un gain de temps appréciable pour des hommes aspirant à un mandat parlementaire. Selon la formule d’Edgar Faure, l’exercice de conquête d’un mandat parlementaire « exigerait normalement dix ans, et j’en gagnai neuf8 ». D’autre part, comme le souligne Gilles Le Béguec, la notion de « relève générationnelle » n’est pas étrangère au parti radical, même si celle-ci s’avère parfois problématique et conflictuelle9. Néanmoins, peut-on parler de « renouvellement » à la Libération ?
Un parti contraint au renouvellement : une « jeune génération » ?
5Force est de constater que la « jeune génération » du parti radical à la Libération se limite à quelques noms. Les élections du 21 octobre 1945 n’ayant sauvé que 22 députés radicaux et 4 apparentés, parmi lesquels les « anciens » de la IIIe République sont nettement majoritaires, c’est la seconde Assemblée constituante du 2 juin 1946 qui initie le rajeunissement du groupe (René Billères est élu député à 35 ans, Maurice Bourgès-Maunoury à 31, Henri Caillavet à 32), encore accentué par les élections à la première Assemblée nationale de la ive République, le 10 novembre 1946, qui voit l’entrée de Félix Gaillard, Jacques Chaban-Delmas, Lucien Bégouin ou Edgar Faure. Cependant, la moyenne d’âge du groupe radical reste relativement élevée : 53 ans pour le groupe de la première constituante, 50 pour celui de la seconde, et 48 pour celui de 1946.
6Majoritaires au sein du groupe radical des deux premières assemblées, les anciens élus de la IIIe République représentent encore une très importante minorité au sein de celui de l’Assemblée de novembre 1946 (20 sur 43). Plus encore, l’image du parti radical reste celle d’un « syndicat des anciens » de la IIIe République, ceux-ci y ayant conservé des places prééminentes. Certains symboles forts pèsent sur l’image du parti : en 1945, le groupe abrite le doyen de l’Assemblée, Charles Cuttoli, né en 1 864. Peu après, il recueille l’ancien républicain social Maurice Violette, entré au Parlement en 1902, ou Eugène Chassaing, député du Puy-de-Dôme depuis 1909. L’évolution du groupe ne projette donc pas obligatoirement cette image de rajeunissement. Certains anciens de la IIIe République laissent ainsi passer l’orage de l’immédiat après-guerre pour préparer leur retour à l’Assemblée. Edouard Daladier ou Henri Queuille10, pour ne citer que les plus connus, n’opèrent leur retour au Parlement qu’en juin ou en novembre 1946.
Des jeunes « nouveaux » ?
7L’aspect de « relève » de la Libération reste donc relativement limité, d’autant que le parti radical enfourche comme cheval de bataille la défense des défuntes institutions de la IIIe République11. L’opposition entre « nouveaux » et « anciens » selon la frontière d’une carrière politique sous la IIIe République est-elle toutefois pertinente ? Edgar Faure propose une solution de transaction en qualifiant une partie du groupe parlementaire de 1946 de « nouveaux anciens », qui « ressemblaient aux anciens, à la date d’élection près12 ». En effet, parmi les « anciens » élus de la IIIe République, certains, comme Pierre Mendès France, élu en 1932, ou Vincent Badie, élu en 1936, n’ont guère plus de 40 ans à la Libération. Au contraire, les nouveaux élus n’incarnent pas nécessairement la jeunesse ou le renouveau. Une certaine continuité prévaut dans plusieurs parcours politiques : l’élection en 1945 ou 1946 couronne parfois un chemin déjà bien entamé avant guerre. Parmi les 26 nouveaux députés, 6, dont René Billères et Paul Anxionnaz, ont été candidats aux élections législatives de 1936, et 7 ont conquis un mandat local avant guerre. Paul Baratgin ou Gabriel Cudenet ont accompli une carrière importante sous la IIIe République sans être élus nationaux, il est donc délicat de les classer parmi les « jeunes » quand leur style et leurs références politiques se rapprochent bien plus de celles des « vieux élus ». D’autres, comme Jean-Paul David, Edouard Ramonet13 ou Paul Devinat14 ont déjà entamé une carrière au sein du parti radical ou dans la mouvance de son groupe parlementaire. Par-delà les bouleversements du conflit mondial, leur entrée au Parlement entre donc, en partie, dans une logique de continuité.
8Seules les élections législatives de novembre 1946 semblent constituer une véritable « ouverture », conjoncturelle, du parti à une nouvelle génération politique. C’est alors que, dans quelques cas précis, la souplesse de l’organisation radicale joue un rôle d’accélérateur de carrière, et permet à des hommes n’ayant aucun passé dans le parti d’accéder directement à une fonction élective, ce que d’autres partis n’auraient pas accepté. Edgar Faure provoque ainsi l’hilarité générale, lors du congrès radical de novembre 1955, en évoquant ses souvenirs de « militant radical », qu’il n’a été que quelques mois15. De même, Jacques Chaban-Delmas mentionne comme l’une des conditions de son « mariage de raison » avec le parti radical le fait que celui-ci n’exigeait aucune condition d’ancienneté à ses candidats16.
Le reflux de 1951
9Dernière remarque, ce renouvellement, pour limité qu’il soit, s’interrompt avec les élections de 1951 : le succès électoral du parti radical bénéficie alors essentiellement à des revenants de la IIIe République, qui, débarrassés du fardeau de l’inéligibilité, opèrent leur retour dans la vie publique. Leur nombre dans le groupe radical passe de 20 à 27. Pour quelques nouvelles figures, comme Maurice Faure dans le Lot ou le tristement célèbre Jacques Ducreux dans les Vosges (lesquels ont tous deux changé de département pour conquérir un fief)17, on compte un nombre important d’anciens élus, Adrien André, Marcel Massot, Léon Martinaud-Déplat, Abel Gardey, Hippolyte Ducos, Lucien Coudert, etc. Là encore, les nouveaux députés ne sont pas véritablement des débutants en politique : Adrien Laplace fut en 1935 le plus jeune conseiller général de France, Henry Laforest, Pierre de Félice et Pierre Mailhé ont été candidats aux élections législatives de 1936, Olivier Caliot bénéficie d’une expérience de 25 ans de mandat municipal : le parti radical revenu au pouvoir, les hiérarchies locales reprennent leurs droits, empêchant tout « parachutage ».
10Dès lors, de nombreuses successions manquées en 1945-1946 ne s’opèreront pas avant les élections suivantes, en 1956. Second sur la liste de Maurice Violette en Eure-et-Loire dès 1945, Edmond Desouches devra ainsi attendre ces élections pour faire son entrée au Parlement. Il en va de même pour Patrice Brocas, barré par Abel Gardey dans le Gers. Toute une génération de la IIIe République atteinte par un « Complexe de Volpone », (Pierre Dezarnaulds, Eugène Chassaing, François Delcos), attendra en effet ces élections de 1956 pour passer la main, parfois trop tard, quitte à ne pas laisser d’héritage politique. La possibilité pour les jeunes radicaux de sbénéficier de situations politiques favorables s’est donc considérablement rétrécie après l’immédiat après guerre.
Une « greffe » problématique
11L’intronisation des jeunes au sein des élites du parti radical ne s’opère pas non plus d’une manière des plus harmonieuses. Un réel conflit de génération existe au sein du groupe parlementaire comme au sein du parti. Dans ses Souvenirs politiques, Pierre de Léotard, élu en 1951, l’évoque ainsi : « Au groupe même, il y avait un fort contingent de très vieux. Des caciques du radicalisme, Viollette, Chassaing, Tony-Révillon, Delcos, Abel Gardey, du Gers, Couderc, du Tarn, Daladier, du Vaucluse, Vincent Badie, Massot, Jules Julien, André Marie, tous des élus d’avant guerre que je côtoyais avec beaucoup de déférence et qui ne me jugeaient sans doute pas avec beaucoup de bienveillance. La tradition d’autrefois voulait que les nouveaux attendent au moins quatre ans avant de monter à la tribune ou d’ambitionner un poste quelconque18. » C’est donc un véritable parcours initiatique qui attend les jeunes élus pour conquérir leur mandat, d’une part, puis pour intégrer les instances dirigeantes du parti, d’autre part.
Des difficultés à s’imposer
12Pour plusieurs exemples célèbres, on peut donc parler de « parachutage » au sujet des jeunes radicaux ou de nouveaux députés, comme René Mayer à Constantine. Ce cas n’est pas majoritaire, puisqu’il concerne avant tout des hommes disposant d’un capital politique, d’un prestige personnel, souvent conquis dans la Résistance, ou d’une maîtrise des questions techniques que le parti souhaite récupérer à son profit. Leur émergence a été souvent souhaitée par la direction nationale du parti, mais se heurte tout aussi fréquemment à la mauvaise volonté des instances locales. Jacques Chaban-Delmas ou Félix Gaillard rencontrèrent ainsi d’importantes difficultés à conquérir l’investiture de la fédération, en dépit du soutien que leur apportait la direction nationale. Dans ses mémoires, Jacques Chaban-Delmas raconte ainsi combien Félix Gaillard fut, en 1946, bien près de renoncer à sa candidature, les délégués de la fédération de Charente lui préférant comme tête de liste un vétéran de la Première Guerre mondiale19. De même, Chaban lui-même pourtant cornaqué par des hommes de la Place de Valois, comme Romain Frugier, eut certaines difficultés à surmonter l’hostilité que lui vouait l’ancien député Jean Odin. Leur ami Lorrain Cruse, mal accepté par la fédération de Charente Maritime, ne parvint jamais à conquérir de siège de député20. René Mayer lui-même vit ses tentatives d’implantation dans l’Eure contrariées par l’hostilité de Pierre Mendès France. Enfin, Maurice Bourgès-Maunoury dut faire face en Haute Garonne à des réticences locales, orchestrées notamment par Maurice Faure21.
13Cette moindre légitimité se retrouve également au sein du groupe parlementaire, puisque le leadership reste assuré par la « triade capitoline » évoquée par Edgar Faure, dominée par Edouard Herriot et Henri Queuille. Un certain décalage de génération, notamment en ce qui concerne le style politique, se fait jour. Que l’on songe ainsi à l’ironie affectueuse dont Edgar Faure gratifie l’éloquence grandiloquente de Gabriel Cudenet et son « incompétence » sur les questions techniques22, ou l’incompétence « touchant au risible » d’Edouard Daladier en matière financière23. On peut également songer à l’ironie, nettement moins affectueuse, avec laquelle Pierre de Léotard qualifie les « très vieux » du groupe radical24.
Un apport en crédibilité politique et technique : le prisme gouvernemental
14C’est précisément là que se situe l’apport principal des jeunes au parti et au groupe parlementaire radical : outre la crédibilité politique issue de la Résistance, qui fait défaut au parti radical, celui d’une compétence technique qui, faisait défaut aux leaders radicaux d’avant-guerre, laissant par exemple quelques personnalités, Bonnet, Caillaux ou dans une moindre mesure Mendès France, exercer un monopole sur la pensée du parti sur les questions financières25. La nouvelle génération tranche sur ce point avec celle d’avant-guerre par son parcours de formation. Si l’École Libre des sciences politiques a toujours joué un rôle de lieu de passage et de sélection, nombreux sont ceux qui viennent de la haute fonction publique, comme les inspecteurs des finances Chaban-Delmas et Gaillard, le Polytechnicien Bourgès-Maunoury ou, pour une assez large part, des hommes issus du réseau préfectoral, comme Jean Masson ou, plus tard, Jacques Genton. Le monde de l’enseignement ou le barreau, viviers d’avant-guerre, voient leur influence décroître, à quelques exceptions près (Billères, Ramonet).
15Cette compétence technique sert donc de viatique à l’ascension des jeunes élus dans la hiérarchie radicale, comme son statut de Professeur agrégé et normalien avait en son temps servi l’ascension d’Edouard Herriot à Lyon. Leur rôle s’avère prépondérant, à l’Assemblée, dans les commissions techniques. À la commission des finances, Gabriel Cudenet est ainsi le fidèle interprète des notes que lui prépare Edgar Faure26. Mais elle joue surtout dans une rapide accession à des fonctions gouvernementales. Si les premiers postes gouvernementaux occupés par des radicaux sous la IVe République échoient à des hommes d’expérience, le renouvellement et l’ouverture sont dans ce domaine assez rapides. Avec le Gouvernement de Robert Schuman, en novembre 1947, René Mayer assure ainsi la rapide promotion gouvernementale de Maurice Bourgès-Maunoury (au budget), de Félix Gaillard (aux affaires économiques, grâce au soutien d’Henri Queuille), et d’André Morice à l’enseignement technique. Moins d’un an plus tard, Edgar Faure débute à son tour sa carrière gouvernementale au secrétariat aux finances du premier gouvernement d’Henri Queuille. Étape fondatrice de cette ascension, le premier gouvernement d’Edgar Faure de janvier 1952, arrivé sans doute, si on l’en croît, un peu vite aux yeux des caciques du radicalisme27, est largement ouvert à cette nouvelle génération (Masson, Bégouin, Lafay, Gaillard).
16À quelques exceptions près, comme Félix Gaillard, absent du gouvernement pendant quatre ans entre 1953 et 1957, on assiste donc à un processus assez régulier d’ouverture des postes gouvernementaux à la jeune génération radicale, en particulier car elle offre aux radicaux des domaines de compétences dans lesquels ils ne se risquaient guère précédemment. Certes, cette ouverture reste assez limitée à un échantillon de cinq ou six figures qui incarnent le renouveau radical. Néanmoins, ce processus joue nettement dans l’évolution du discours du parti, et notamment dans le renforcement d’un discours résolument libéral en matière économique, de l’anticommunisme, ou de la relativisation de la part accordée à la thématique laïque.
Au sein du parti : une ascension en trompe l’œil ?
17À cette promotion rapide des « jeunes » dans les milieux gouvernementaux, il convient néanmoins d’opposer la lenteur de leur progression dans les instances du parti. On peut ainsi constater que leur implantation au niveau local reste assez limitée jusqu’au milieu des années 1950. Pour quelques-uns qui parviennent à rapidement conquérir des positions fortes, et notamment à s’emparer de la présidence de leur fédération départementale, comme Jacques Chaban-Delmas en Gironde, lequel devient président de la fédération régionale du sud-ouest en juin 1949, de nombreux jeunes élus restent dans l’ombre de grands anciens, de notables plus anciennement implantés, comme Edouard Ramonet, soumis à l’influence de Vincent Rotinat dans l’Indre, ou René Billères, second de Paul Baratgin dans les Hautes-Pyrénées. Une figure du radicalisme de gouvernement comme Félix Gaillard, député de Charente, surveillé par le sénateur radical du département, Jacques Verneuil, n’occupera aucun mandat local avant 1965. De même, Maurice Bourgès-Maunoury verra ses positions en Haute-Garonne progressivement sapées par le député Hippolyte Ducos, au point que sa défaite en 1958 entraînera à terme la fin de sa carrière politique dans le département. Cette position de brillants seconds a parfois pour effet de considérablement restreindre la liberté d’action de certains élus : dans le Rhône, Lucien Degoutte se trouve longtemps soumis aux positions de ses collègues Edouard Herriot et Alfred Jules-Julien, lesquels le considèrent sans bienveillance excessive.
18De même, au sein des instances nationales du parti, le rôle des « anciens », Henri Queuille, puis Léon Martinaud-Déplat, reste prépondérant. Symboliquement, plusieurs anciens députés de la IIIe République n’ayant pas retrouvé de siège sous le nouveau régime, comme Lucien Galimand ou Georges Potut, se voient attribuer une place de « représentant des militants » au sein de l’organisme central du parti, le bureau national. En revanche, la place des jeunes reste extrêmement limitée dans l’appareil de la Place de Valois : quelques vice-présidence, aucune présidence de commission. Seule l’attribution du poste de secrétaire national du parti à Maurice Faure, en 1952, marquera une certaine volonté de renouveau28. Leur activité se situe donc en marge du parti, par la présentation de rapports lors des congrès, par la présence au gouvernement : on peut donc parler à leur sujet d’une ascension suivant une hiérarchie « parallèle »
Une carrière « à l’envers » ?
19La prise de pouvoir de Pierre Mendès France au sein du parti radical a une double conséquence au sein de celui-ci. D’une part, elle pose le problème de l’irruption d’une nouvelle génération de « jeunes » avec une acuité bien différente de celle de la Libération, et suscite une réaction de défense de la « vieille génération ». En novembre 1955, le sénateur Henri Varlot peut encore écrire à Pierre Mendès France :
« Il me serait agréable que vous permettiez à un ancien de la IIIe, laquelle a fait la France d’aujourd’hui, de conserver le bel optimisme d’avant 1940 malgré les prétendues indications de l’après-guerre. Notre représentation nationale conserve le besoin d’élus ayant fait leurs preuves au cours du long effort républicain de naguère, et même de jadis, dont les résultats sont suffisamment éloquents. […] Un juste équilibre de ses représentants au Parlement est plus que jamais nécessaire à la pérennité du radicalisme. […] La majorité doit pour le moment rester aux anciens que pénétrera petit à petit l’esprit de la génération « neuve » dans le climat de la future évolution politique29. »
20Le conflit de générations apparaît bien plus vif qu’à la Libération. Dès lors, la position de la génération radicale de la Libération, laquelle ne peut plus prétendre à une forme d’innocence politique, est ambiguë : encore jeunes, relativement nouveaux dans la carrière politique, ces hommes se trouvent pourtant déjà associés, dans le discours mendésiste, aux forces du passé. Ne peut-on pas y voir le début d’un rapide processus d’obsolescence politique qui va les frapper ?
Le mendésisme ou conflit des jeunesses ?
21Comme l’ont montré plusieurs travaux, dont ceux de Philippe Reclus30, il existe plusieurs générations de jeunes mendésistes, une première initiée par le club des Jacobins, une seconde qui entre en politique pour soutenir Pierre Mendès France dans son entreprise de conquête du parti radical. Cette opération se met en œuvre contre la volonté des radicaux de la Résistance, pour la plupart liés à l’ordre ancien du parti. Félix Gaillard et Émile Hugues votent ainsi contre Pierre Mendès France lors de la chute de son gouvernement, et l’ensemble des jeunes radicaux, dont Maurice Faure, Émile Hugues, Edouard Ramonet ou André Morice, s’opposent à Mendès France lors du congrès de la salle Wagram de mai 1955, certains rejoignant par la suite la scission RGR, autour d’Edgar Faure, ou la scission d’octobre 1956, menée par André Morice. Dans une large mesure, au sein de l’appareil du parti radical, la victoire de Pierre Mendès France est donc celle d’une partie des anciens de la IIIe République, André Maroselli, Edouard Herriot, Edouard Daladier, lesquels ont joué un rôle décisif en empêchant la direction du parti d’étouffer dans l’œuf l’offensive mendésiste.
Aspects du « conflit de générations » radical
22L’avènement de Pierre Mendès France à la tête du parti radical nourrit donc un affrontement de deux « jeunesses » du parti, l’une nourrie à une culture d’opposition et désireuse d’un renouveau du parti et de la vie politique, l’autre imprégnée de culture gouvernementale, ayant bâti son ascension sur un processus d’adaptation aux normes et aux règles implicites du parti plus que sur la volonté de le rénover. Le dialogue entre les deux camps apparaît dès lors biaisé. En novembre 1957, peu après le violent congrès de Strasbourg qui a opposé Pierre Mendès France et les siens au président du conseil, Félix Gaillard, Louis Gabriel Robinet souligne à quel point il était malaisé pour les mendésistes d’employer l’argument générationnel, le thème du renouveau, face à un homme de leur génération, porteur quelques années plus tôt, lui aussi, d’une image de renouveau du parti radical31. La peu satisfaisante solution de transaction qui conclut le congrès amène d’ailleurs certains observateurs à souligner que dans un parti dominé par la jeune génération, et qui fournit alors à la République le plus jeune Président du conseil depuis la Restauration, « les barbes blanches poussent décidément vite32 ».
23En somme, la culture gouvernementale propre au radicalisme apparaît comme un élément unificateur, propre finalement à noyer les caractéristiques des jeunes générations du radicalisme dans un prisme commun. C’est la raison pour laquelle, quoique jeune en 1958, la génération radicale de la Résistance apparaît très vite marquée par son passé.
De « très jeunes vieux » en politique ?
24C’est en effet un paradoxe important. En 1958, plusieurs radicaux plaident l’idée que le parti radical a un rôle à jouer dans la rénovation de la vie politique avec le nouveau régime. Parmi les arguments au service de cette thèse, celui de Michel Soulié selon lequel ce parti a donné sa chance à des jeunes, et n’a pas hésité à favoriser leur accession à des fonctions gouvernementales importantes33. En 1958, Félix Gaillard, nouveau président du parti radical, n’a que 39 ans, Maurice Faure n’en a que 36, René Billères en a 48, Maurice Bourgès-Maunoury, 44. C’est dans cette génération que se recrutent les hommes qui survivent aux consultations de 1958 : au contraire, la génération radicale de 1956, disparaît rapidement de la vie politique nationale, à de rares exceptions, comme Charles Hernu.
25On peut dès lors faire deux remarques à ce sujet. Malgré leurs tentatives, aucun des hommes de cette génération ne parviendra à rénover l’image du parti radical, précisément car eux-mêmes incarnent ce régime défunt auquel la propagande gaulliste ne cesse de les assimiler. Maurice Faure apparaît ainsi comme l’appariteur du déclin, proposant en 1964 d’abandonner la dénomination de « Parti radical », avant de faire appel en 1969 à Jean-Jacques Servan Schreiber pour faire face à « l’indifférence totale de l’opinion » à l’égard du radicalisme34. Second point, ces hommes connaissent finalement une « carrière à l’envers » : les premières décennies de la Ve République sont pour eux celle de la conquête de mandats locaux, voire de fortes positions sur le plan local. Député depuis 1946, Félix Gaillard devient conseiller général puis conseiller municipal de Charente, avant de jouer un rôle important dans la CODER de Poitou-Charente. De même, c’est à partir de la seconde moitié des années 1960 que Maurice Faure entame le processus qui fera de lui « l’empereur du Lot ». « Le radical arrive progressivement à la Chambre, porté par des amitiés locales », écrivait Emmanuel Berl. Cette génération radicale de la Résistance a finalement inversé le processus : sa promotion très rapide à des fonctions de responsabilité a fait de ses membres de « jeunes vieux » en politique.
26Dès lors, il convient de faire trois remarques.
27Renouvellement des élites : dans le cas étudié, ce renouvellement est circonstancié, lié à un moment particulier, et à un besoin réel de la part du parti radical. On a donc un double processus d’instrumentalisation. La vielle génération se sert de la jeune génération pour rénover l’image du parti et régénérer son influence parlementaire, sans pour autant lâcher les leviers de commande. Au contraire, la jeune génération profite de cette opportunité pour accéder rapidement à des mandats électifs sans avoir forcément connu de parcours militant, ce que d’autres partis n’auraient pas permis. Cependant, cette « jeunesse » n’est pas toujours inexpérimentée ou novice en politique, loin s’en faut.
28Jeunesse et élites : cette accession à l’« élite » du radicalisme n’est pas totale. Les jeunes intègrent une certaine élite, l’élite parlementaire, l’élite gouvernementale, mais conservent un rôle subalterne au sein du parti, et peinent à conquérir des positions de pouvoir à l’échelon local. L’ascension se fait donc selon une hiérarchie parallèle, jusqu’ici inédite au sein du parti radical. La contrepartie est que la réalité de leur emprise sur leur formation politique est modeste. Nombreux sont ceux qui, n’ayant pas connu de parcours de formation militant, entretiennent d’ailleurs une relation lointaine avec le parti, sont dépourvus de culture partisane et de réel ancrage local. Il sera d’autant plus difficile pour eux de rebondir après 1956, et certains le feront hors du cadre radical.
29Ce processus particulier d’intégration des élites du parti radical tend enfin à banaliser la « jeunesse » de cette génération. L’ascension se fait selon un processus d’acceptation des traditions, et de mise des compétences spécifiques au service d’un système politique bien rôdé. Ces hommes perdent dès lors très vite leur image d’hommes « jeunes », faute d’avoir su ou voulu porter un renouveau politique, d’avoir voulu donner un sens politique à la relève générationnelle qu’ils incarnaient. C’est sans doute pourquoi, après avoir intégré très tôt les élites politiques, ces hommes feront par la suite figure de « jeunes vieux » en politique. Les circonstances y aideront. Dès 1965, Félix Gaillard parle au passé de sa « vie politique active » : il n’a alors que 45 ans35.
Notes de bas de page
1 Cf. Archives du parti radical, carton 40.
2 Ibid.
3 Celui-ci restera un dirigeant national des jeunesses radicales jusqu’au début des années 1960.
4 Cf. Archives du parti radical, carton 43.
5 Cf. Combat du 24 août 1945.
6 À ce sujet, cf. Olivier Wieviorka, Les Orphelins de la République, Paris, Seuil, 2001, p. 399-400.
7 AN, F7 15502.
8 Cf. Edgar Faure, Avoir toujours raison, c’est un grand tort, Paris, Fayard, 1982, p. 169.
9 Cf. Gilles Le Béguec, « Les élus radicaux aux deux Assemblées Constituantes », in Gilles Le Béguec, Éric Duhamel (dir.), La reconstruction du parti radical, Paris, L’Harmattan, 1993, p. 100. Néanmoins, le conflit générationnel y est également présent : Émile Roche rappelle ainsi, en 1958, avoir entamé sa carrière électorale « en conflit avec le bureau de la fédération du Nord, tenu par des sénateurs qui refusaient de former des successeurs ». Cf. Congrès de Pau, 1959, Archives du parti radical, carton 59.
10 Henri Queuille ne se présente pas aux élections pour la seconde Assemblée Constituante de juin 1946.
11 Cf. Jean-Thomas Nordmann, Histoire des Radicaux, Paris, La Table ronde, 1973.
12 Cf. Edgar Faure, op. cit, pp. 189-190.
13 Tous deux ont déjà connu une carrière conséquente au sein des associations de jeunes du parti, Jean-Paul David a été chargé par Edouard Daladier, en 1938, de réorganiser les jeunesses, tandis qu’Edouard Ramonet a été, à partir de 1935, l’un des principaux dirigeants de la fédération nationale des étudiants radicaux.
14 Paul Devinat fut, dans les années 1930, l’un des plus proches collaborateurs d’Henri Queuille.
15 Cf. Archives du parti radical, carton 51
16 Cf. Jacques Chaban-Delmas, L’ardeur, Paris, Stock, 1975, p. 143.
17 Maurice Faure est élu dans le Lot après avoir débuté sa carrière en Haute-Garonne, Jacques Ducreux est élu député des Vosges après avoir débuté sa (seconde) carrière politique dans la Marne, aux côtés de Paul Anxionnaz.
18 Cf. Pierre de Léotard, Mes souvenirs politiques, Éric Duhamel (éd.), in Recherches Contemporaines, 5, 1999-2000, p. 249.
19 Cf. Jacques Chaban-Delmas, L’Ardeur, op. cit., p. 144 : « Quant à la Charente, elle était d’évidence promise à Félix Gaillard, dont les parents possédaient une maison à Barbezieux. Il faillit, lui aussi, se faire éliminer avant d’avoir pu courir sa chance. Par un samedi après-midi caniculaire, j’allai par la route jusqu’à ce café d’Angoulême où se réunissait la fédération départementale du parti radical. J’arrivai au moment précis où un valeureux soldat de la Grande Guerre, et qui s’était acquis des mérites auprès des anciens combattants, était en passe de convaincre les militants de préférer sa candidature à celle de ce beau jeune homme d’allure quelque peu désinvolte. Félix était seul, à la terrasse, et semblait considérer que l’affaire était classée. Me ruant au premier étage et faisant jouer ma qualité de chef de liste en Gironde, j’eus la bonne fortune d’obtenir qu’aucune décision ne fut prise ce jour là, ce qui revenait à s’en remettre à la Place de Valois pour désigner la tête de liste. Bourgès-Maunoury y prit les précautions utiles, Félix Gaillard fut désigné, puis élu député le 10 novembre 1946. »
20 Ibid.
21 Cf. Maurice Faure, D’une République à l’autre, Paris, Plon, 1999, p. 32.
22 Cf. Edgar Faure, op. cit, p. 192-193.
23 Ibid, p. 645.
24 Cf. Pierre de Léotard, op. cit, p. 289 : « Bien sûr, l’oracle du parti radical était Edouard Herriot, président de l’Assemblée, qui siégeait à l’hôtel de la Présidence. Podagre, il se traînait avec deux cannes pour aller à la salle des séances. Ainsi devait se déplacer Louis XVIII avant de consentir à être dans une petite voiture. Herriot était resté un symbole. On le gardait comme une figure du passé. »
25 À ce sujet, cf. Peter J. Larmour, The French Radical Party in the 1930’s, Stanford University Press, 1963, p. 71-77.
26 Cf. Edgar Faure, op. cit, p. 193.
27 Cf. Edgar Faure, op. cit, p. 339-340.
28 Son action reste cependant étroitement encadrée par le président administratif, Léon Martinaud-Déplat.
29 Cf. Lettre d’Henri Varlot à Pierre Mendès France, Archives du parti radical, carton 545.
30 Cf. Philippe Reclus, La République impatiente : Le Club des Jacobins, Paris, Presses de la Sorbonne, 1987.
31 Cf. Le Figaro, 25 novembre 1957.
32 Cf. Le Figaro, 22 novembre 1957. Une formule du même ordre est reprise par L’Aurore du même jour : « Jacobins et Jeunes Turcs ont choisi, eux aussi, de porter la barbe radicale. Les bonnes traditions ne se perdent pas. »
33 Cf. Congrès de Lyon, octobre 1958, archives du parti radical, carton 57.
34 La formule est prononcée par Auguste Pinton à la tribune du congrès de Nantes, en 1969. Cf. Archives du parti radical, carton 93.
35 Cf. Comité exécutif du 15 janvier 1965, archives du parti radical, carton 172. La formule comporte une part d’affectation : au sein du parti radical, Félix Gaillard continuera de peser, notamment contre de trop larges ouvertures de la FGDS aux communistes.
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