Épilogue
p. 263-270
Texte intégral
1Comme l’écrivait en novembre 1948, Auguste Viatte : « Il existe une affaire des réfugiés français au Canada1. » En effet, l’affaire Bernonville, par ses multiples implications (juridique, médiatique, politique et diplomatique), revêt toutes les caractéristiques d’une « vraie affaire » qui nous en apprend autant sur l’enjeu de la controverse (les miliciens français) que sur la société où elle éclate (le Québec d’après-guerre). Un constat qui est déjà un début de réponse à la question « à quoi servent les affaires ? », que se posaient Luc Boltanski et Élisabeth Claverie lorsqu’ils cherchaient à théoriser cet objet. Eux-mêmes y voyaient prioritairement des « moments clés » à analyser comme des indicateurs d’un processus de changement social et surtout des tensions qui l’accompagnent2. Au-delà, l’affaire des réfugiés politiques français, à la croisée de plusieurs horizons d’analyse et de temporalité, ouvre d’autres perspectives.
2Éclatant au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, dont les deux sociétés ont fait une expérience bien différente, non sans risque d’incompréhension mutuelle, elle invite d’abord à (re)penser la notion de sortie de guerre. À ce titre, elle peut d’emblée être lue comme le signe d’une démobilisation culturelle plus difficile qu’il n’y paraît chez certains acteurs français comme canadiens, sans doute parce que certaines blessures de guerre ne guérissent ou ne cicatrisent que lentement. D’ailleurs, chacun à leur façon, Bernonville et ses camarades miliciens mais aussi certains protagonistes canadiens (Rumilly, Houde, Hamel, Chaloult) ne sont jamais vraiment sortis de leur(s) guerre(s). Un processus rendu d’autant plus complexe à appréhender qu’il est très vite parasité par l’entrée dans la guerre froide. Ainsi, cette séquence d’après-guerre3 peut aussi être analysée comme une transition politique et idéologique vers la guerre froide. Une dialectique fermeture-ouverture dont les implications géopolitiques ne sont pas minces comme le prouve le rôle déterminant de la Grande-Bretagne pour infléchir, dès 1948, la politique adoptée par le Canada à l’égard des présumés criminels de guerre ou leurs complices. De même, à l’instar de la situation Suisse, au sein du Canada-français comme du Canada dans son ensemble du reste, « l’anticommunisme joua un rôle prépondérant dans l’accueil “collabo”4 ».
3La réception de l’affaire Bernonville contribue également à une histoire des premières représentations de l’épuration française à l’étranger. Sous cet angle et dans la continuité des réactions observées lors du procès Pétain, on ne peut que constater, dans un contexte brouillé par la guerre froide, la diffusion d’une image largement faussée de la France libérée.
« Cette affaire s’explique, on le voit, surtout par des raisons de politique intérieure canadienne. Elle laisse cependant dans les esprits une impression fâcheuse. Une partie du public se fait de la France l’image la plus saugrenue : un pays qui vit sous la terreur, où les trois-quarts des magistrats sont communistes […] et condamnent pour trahison quiconque ne les suit pas. Si absurde qu’il nous paraisse, ce tableau emprunté aux démocraties populaires de l’Est est celui que se représentent aujourd’hui bien des Canadiens lorsqu’ils songent à nous5… »
4Certes, tout le monde au Canada et au Québec n’adhère pas, loin s’en faut à la vision outrancière de la France en épuration proposée par Robert Rumilly et ses partisans. Il n’en demeure pas moins que même plus mesurées, les critiques, les réticences ou a minima l’incompréhension face à l’exceptionnalité de l’épuration, y compris légale, étaient largement répandues. Ici, comme en Suisse « les stéréotypes circulant sur l’épuration firent florès dans les bureaux de l’administration et pesèrent lourdement sur l’admission des “collabos”6 ». En effet, dans une situation analogue à celle décrite par Luc Van Dongen, « croire au caractère partisan de la justice française dans l’immédiat après-guerre était devenu un lieu commun7 ». Nul doute qu’au Canada, au niveau fédéral comme à l’échelon provincial, « le dogme des peines disproportionnées » et « des verdicts excessivement sévères8 » a rencontré un large écho au sein des administrations et du personnel politique, y expliquant bien des connivences. Il s’agit là d’une réalité internationale, déjà relevée lors du procès Pétain, que l’historien de l’épuration en France se devait d’entendre.
5Choisir l’exil pour mieux revenir à Vichy, c’était également faire le pari d’une histoire régressive « celle qui suivant l’idée de Marc Bloch, cherche à configurer une question historique non en partant de ses origines mais en partant de sa fin9 ». Dès lors, il s’agissait de reconstituer les trajectoires antérieures de nos réfugiés non sans y observer une certaine communauté de destin. Cette démarche appliquée notamment « au plus connu » d’entre eux, Jacques Dugé de Bernonville, nous a fait entrer dans le milieu des tenants d’un collaborationnisme d’Ėtat au pouvoir dès 1942-1943 (Platon, Bridoux, Bonnard, Benoist-Méchin…). Un profil hybride entre collaborationnisme et collaboration d’État qui, à la croisée de la « droite musclée », des « gens d’armes », des « milices » et de la « Raison d’état10 », défend sans succès l’idée d’une collaboration militaire d’État (Légion tricolore, Phalange africaine, CVF). De Bernonville incarne parfaitement les contradictions et illusions de ces ultras de la collaboration d’État qui ont presque toujours et partout abouti aux résultats strictement inverses à ceux escomptés. Il est alors assez proche de l’évolution de son « patron » Abel Bonnard :
« Marqué par le maurrassisme, Abel Bonnard partage bien des éléments de cette vision, en cela partie d’un courant traditionaliste qui croit trouver en Vichy une machine à remonter le temps. […] Curieuse figure, dès lors, que cet académicien de choc selon la formule de Céline : un traditionaliste par beaucoup d’aspects, attaché à l’image d’une France rurale, vertueuse, immobile, tout en subissant la séduction du fascisme, de la mobilisation et de la communion dans l’action11. »
6Un portrait d’Abel Bonnard qui permet de souligner un autre trait caractéristique de cette étude, à savoir la prégnance de part et d’autre de l’Atlantique d’un certain maurrassisme. Une influence prédominante chez les principaux acteurs de notre affaire qu’ils soient Français émigrés au Canada de plus ou moins fraiche date (Bernonville, Rumilly, Houpert…) ou Canadiens-français (Chaloult, Hamel, Bruchési, Barbeau…). Une sensibilité d’autant plus perceptible qu’au Canada-français comme en Suisse romande12, nos miliciens recherchent et bénéficient prioritairement des relais de la « vieille France » conservatrice et catholique. Des cercles au sein desquels on reste souvent convaincu du bien-fondé d’une Révolution nationale dont le plein accomplissement a été « malheureusement » perturbé par des événements contraires : « Ceux-ci étaient encore nombreux après-guerre à penser que le projet pétainiste de la Révolution nationale était un programme politique honorable, voire nécessaire au redressement de la France et que seules les exigences allemandes et la tournure de la guerre ont empêché son heureuse réalisation13. » Une situation qui confirme la diffusion significative de « l’idéologie maurrassienne chez les clercs nationalistes des pays de culture française ou latine au XXe siècle14 ». Ou, pour le dire autrement, et au sujet du Québec : « L’Action française a connu ses succès les plus marqués […] dans les pays où l’influence de la culture française se trouvait traditionnellement la plus forte15. » Des relais qui, selon John Hellman et Luc Van Dongen, permettraient d’établir « une parenté entre le radicalisme de l’action milicienne et une certaine forme de traditionalisme religieux et en particulier celui qui, politiquement proche de l’Action française, allait déboucher sur l’intégrisme des années 196016 ». Une filiation entre Pétainisme de combat et traditionalisme qui resterait à creuser mais dont se rapprochent néanmoins Marcel Clément, Mgr Courchesne, Paul-Everard Richemont17 ou encore Paul Touvier mais aussi les héritiers de Robert Rumilly18. Bernard Faÿ, réfugié en Suisse, partage également cette trajectoire alors même qu’il bénéficie au Canada français de solides appuis de la part de Jean Bruchési et Victor Barbeau qui orchestrent en 1946-1947 des campagnes en sa faveur. Peut-être est-ce pour cette raison que les autorités suisses ont cru un temps qu’une carrière lui serait prochainement offerte au Canada : « Cet historien reconnu […] occupera vraisemblablement une chaire universitaire au Canada19. » Bien entendu, il importe de ne pas surestimer l’influence réelle de ces activistes de la droite catholique et contre-révolutionnaire qui, bien que bruyants dans la défense de Bernonville, témoignent d’une mobilisation minoritaire, y compris au sein du Québec de Duplessis20. De même, les travaux de Catherine Pomeyrols ou Olivier Dard ont bien montré que les emprunts à la doctrine de Maurras ne consistent jamais en une transposition pure et à l’identique du programme de l’Action française de France. Au contraire, ces transferts de doctrine ont débouché d’un pays à l’autre sur une grande variété d’adaptations locales allant du « maurrassisme d’observance stricte » à la simple « teinture diffuse » en passant par la pratique d’un « maurrassisme tempéré21 ».
« Ce n’est pas le moindre paradoxe de cette doctrine nationaliste, assez souple pour se prêter à des transpositions, que de s’internationaliser et de donner naissance à de nombreuses adaptations locales. En plus de l’AF, il y aurait aussi des Actions françaises adaptées par des intellectuels francophones ou de cultures françaises au service de la défense de leur groupe dans un pays pluriethnique. Dans les pays de catholicité et de francophonie, ces intellectuels érigent un régionalisme ou un nationalisme qui s’auto-légitime par une langue, une histoire et la culture latine. […] Le cas québécois rentre tout à fait dans le cadre de cette réflexion, étant donnée la prépondérance de la culture française dans la formation des élites jusqu’à la Seconde Guerre mondiale22. »
7D’ailleurs dans un autre ouvrage, Catherine Pomeyrols montrait que Jean Bruchési et Victor Barbeau appartenaient, parmi son corpus d’intellectuels québécois, « à la minorité qui reste ouvertement maurrassienne après la guerre23 ». On pourrait y ajouter Robert Rumilly qui professera jusqu’à sa mort une fidélité sans faille à Maurras dont il se déclarait volontiers le fils spirituel24. Au-delà de ces liens hérités25, la période est aussi propice à la mise en place de nouveaux réseaux. D’abord, construits autour d’une communauté de destin de « victimes de l’épuration », ils ne tardent pas à se structurer sur des bases idéologiques nouvelles : néo-Vichyste, néo-fasciste, ou encore révisionniste puis négationniste (Maurice Bardèche, Henry Coston, Adrien Arcand, Ernst Zündel). Au Canada, le leader fasciste Adrien Arcand, libéré de son internement en juillet 1945, professe très tôt un négationnisme virulent dénonçant l’holocauste comme une « falsification de l’histoire » et le procès Eichmann comme « une diabolique conspiration mondiale26 ». À compter de 1958, il contribue même à la formation idéologique du jeune néo-canadien Ernst Zündel, participant ainsi au renouvellement générationnel entre les différents âges du révisionnisme27. Zündel décrira d’ailleurs en 1985 Arcand comme un grand Canadien « qui l’a aidé à chasser sa croyance dans l’Holocauste28 ». L’antisémitisme persistant de Robert Rumilly n’ira pas jusque-là, mais après-guerre il continue à professer un racisme décomplexé défendant toujours l’existence de race pure29. Bien entendu, ancien et nouveau réseaux, malgré leur apparente proximité idéologique, ne se recoupent jamais totalement. Tout comme, on a déjà souligné la prudence nécessaire pour aborder la question de la filiation entre le clérico-nationalisme conservateur canadien-français du premier vingtième siècle et le néo-nationalisme québécois plus laïc, progressiste et souverainiste, qui s’annonce à partir des années 1950-1960. Les cercles les plus actifs dans la défense des réfugiés français appartiennent clairement au premier groupe et resteront toujours très critiques pour ne pas dire hostiles au second. En ce sens, ils sont des hommes du passé, déjà en décalage avec leur temps. Hantés par la tentation constante du repli, ils sont habités de l’image d’une France largement « imaginaire » voire « déréalisée ». Il est d’ailleurs symptomatique de constater que Robert Rumilly, plus que jamais réactionnaire pendant les années 1950-1970, combattra inlassablement toutes velléités progressistes et souverainistes au sein de la société québécoise. Il dénoncera alors pêle-mêle, la gauche catholique, les syndicats, la nouvelle ligne adoptée par Le Devoir sous l’influence d’un Laurendeau mais aussi les « séparatistes » du parti québécois comme autant de manifestations de « l’infiltration gauchiste au Canada-français30 ». Dans le même ordre d’idées, bien que partageant pour partie les mêmes combats, le fasciste Adrien Arcand et le réactionnaire Robert Rumilly s’ignorent mutuellement et Arcand restera totalement extérieur à la cause des miliciens français.
« Est-il heureux de voir un groupe d’hommes de droite, menés par l’historien Robert Rumilly, accueillir au Canada plusieurs collaborateurs du régime de Vichy ? Sans aucun doute, mais on ne le trouve pas au cœur des efforts menés alors par l’industrieux historien pour permettre à une poignée de pétainistes convaincus de trouver refuge aux pays des érables. Il faut dire qu’Arcand est jugé, même par cette droite raciste et antisémite aux idées de laquelle souscrit Rumilly, comme une personnalité quelque peu gênante, du moins en public31. »
8Arcand, à l’instar de Robert Rumilly, entretient après-guerre un réseau, au moins épistolaire d’ex-fascistes européens, mais il n’assistera pas en 1950 et 1951 aux rencontres internationales fascistes de Rome et de Malmö. À ce stade, une approche comparée des différents points nationaux d’ancrage de ces nouveaux réseaux, plus ou moins structurés, mériteraient un approfondissement. À titre d’exemple, on pourrait rapprocher Robert Rumilly de son alter ego l’avocat et politicien genevois Adrien Lachenal qui, à l’échelle de la Suisse, incarne « la principale figure du monde des soutiens » à savoir « celui qui fut à la fois le défenseur privilégié et l’ami des proscrits français, bref une véritable figure tutélaire32 ».
9La postérité de l’événement s’accompagne enfin d’un net changement d’échelle(s). En effet, si cette phase mémorielle conserve une dimension provinciale importante en particulier durant les années 1990 (sur fond de multiplication des affaires notamment médiatiques), les conditions et les enjeux en sont désormais très différents. De fait, cette remémoration s’inscrit d’abord dans une américanisation de la mémoire de la Shoah qui acquiert, ici comme ailleurs, une centralité qu’elle n’avait pas eu au sortir de la guerre, où elle était restée en grande partie ignorée. Plus globalement, elle participe d’un processus mémoriel mondialisé, en particulier à compter des années 199033. Au sein de nombreuses sociétés, notamment occidentales, on assiste, à partir de cette époque, à une multiplication des usages politiques ou sociaux du passé, non sans de fréquentes confusions entre histoire et mémoire mais aussi entre mémoire(s) et identité(s). Le Canada des années 1990-2000 n’échappe donc pas à la règle comme l’observait Martin Pâquet en 2006 :
« Nombre d’acteurs politiques font référence au passé, notamment en faisant appel aux ressources de la discipline historique, pour identifier des fautes commises envers les membres de leurs groupes et pour justifier ensuite leurs revendications en matière de réparations. Que l’on songe par exemple aux débats entourant l’internement des Canadiens d’origine japonaise, italienne ou ukrainienne ; la déportation des Acadiens ; le non-respect des traités conclus avec les Autochtones ; le traitement réservé aux orphelins de Duplessis ou aux enfants amérindiens dans les écoles résidentielles. D’autres polémiques montrent également des références de la faute passée sur un plan plus nettement politique, que ce soit pour disqualifier des protagonistes dans les champs politique et médiatique. Pensons ici aux multiples controverses fort médiatisées lorsque des aspects méconnus du passé d’un individu deviennent de notoriété publique, à l’instar des allégations d’antisémitisme d’un historien connu [ou] des facéties d’un lieutenant-gouverneur34… »
10Partout, la position de l’historien s’en trouve modifiée de manière ambivalente d’ailleurs, puisqu’à la fois renforcée et fragilisée. Dans un même mouvement, le Canada contemporain témoigne également d’une tendance internationale à la judiciarisation croissante du passé, non sans un effet d’entrainement réciproque d’un pays à l’autre. La jurisprudence se joue maintenant à l’échelle mondiale. C’est ainsi que certaines procédures extérieures au pays (on peut penser ici au procès Barbie, Touvier ou Demjanjuk) ont cristallisé ou exacerbé des revendications mémorielles et une exigence de justice au Canada. À l’inverse, lorsque l’Australie met en place la commission Menzies pour enquêter au sujet de la présence sur son sol d’éventuels criminels de guerre, elle fait explicitement référence à l’expérience canadienne de la Commission Deschênes. Cependant, ne nous y trompons pas, sauf exception la séquence qui s’ouvre de la fin des années 1980 à aujourd’hui n’est plus celle des « réfugiés politiques français » comme après-guerre. Ces derniers appartiennent bien au passé, même s’ils resurgissent périodiquement dans des controverses qui portent davantage sur la façon d’écrire leur histoire. Une modification de perspective de nature à nuancer, une fois encore, l’idée d’une singularité québécoise sur le sujet, puisqu’in fine c’est bien l’ensemble de la société canadienne qui est désormais interpellé par la question de l’accueil réservé depuis 1945 aux présumés criminels de guerre ou à leurs collaborateurs. Une réalité que traduisaient bien, dès 1992, Harold Troper et Morton Weinfeld lorsqu’ils expliquaient que la question des criminels de guerre au Canada réveillait les braises mal éteintes d’une vieille rivalité entre les communautés juive et ukrainienne35. Depuis lors, les procédures judiciaires ou de dénaturalisation visant prioritairement des ressortissants baltes ou ukrainiens, n’ont pas contribué à apaiser les choses. Assurément, il y a dans ces relations et antagonismes intercommunautaires, sur fond de passé de la Seconde Guerre mondiale, un autre bel objet d’histoire canadienne.
Notes de bas de page
1 Auguste Viatte, « L’affaire des réfugiés français au Canada », Le Monde, 4 novembre 1948, p. 3.
2 Luc Boltanski, Élisabeth Claverie, en conclusion du collectif Affaires, scandales et grandes causes, op. cit., p. 395 sq.
3 Sur cette expression riche de différents horizons de temporalités, on peut lire la stimulante réflexion appliquée à l’Europe par Tony Judt dans Après-guerre. Une histoire de l’Europe depuis 1945, Paris, Hachette, coll. « Pluriel », 2009 (1re édition française, 2007 ; édition originale, Postwar. A History of Europe since 1945, 2005). Un après-guerre européen qui, selon lui, s’achève véritablement à la chute du mur de Berlin et dont il donne rétrospectivement la définition « longue » suivante : « On verrait désormais les années 1945-1989 non pas comme le seuil d’une époque nouvelle, mais plutôt un âge intermédiaire : une parenthèse de l’après-guerre, les effets inachevés d’un conflit qui se termina en 1945 mais dont l’épilogue avait duré encore un demi-siècle », op. cit., p. 14.
4 Luc Van Dongen, Un purgatoire très discret, op cit., p. 283.
5 Auguste Viatte, « L’affaire des réfugiés français au Canada », Le Monde, 4 novembre 1948, p. 3.
6 Luc Van Dongen, Un purgatoire très discret, op cit., p. 285.
7 Ibidem, p. 286.
8 Ibidem, p. 287.
9 Henry Rousso, préface à l’édition 2012, Un château en Allemagne, Sigmaringen 1944-1945, op. cit., p. 14.
10 Pour reprendre la typologie esquissée par Philippe Burrin dans La France à l’heure allemande, op. cit.
11 Philippe Burrin, La France à l’heure allemande, op. cit., p. 413-414.
12 On a déjà signalé la pertinence de ce clivage dans la lecture du procès Pétain (chapitre 1). Luc Van Dongen le confirme dans son étude : « On aura remarqué que la géographie du soutien religieux constitue le reflet fidèle de la présence française en Suisse. En effet, pour des raisons que nous avons évoquées (convergences culturelles, sociales, idéologiques, linguistiques), la Suisse romande se mobilisa davantage que la Suisse allemande pour les collabos » ou encore : « Une pente naturelle amenait ainsi une partie des épurés français vers les cantons catholiques. L’impulsion provenait tantôt du réfugié lui-même, tantôt des milieux ecclésiastiques suisse ou français (comme avec Charbonneau), tantôt des autorités fédérales. Pour éviter des complications, telles que polémiques de presse et hostilité des autorités cantonales Berne proposa voire imposa régulièrement les cantons de Fribourg et du Valais. » Luc Van Dongen, Un purgatoire très discret, op cit., p. 299 et 301.
13 Luc Van Dongen, Un purgatoire très discret, op. cit., p. 296.
14 Ce constat marquait le point de départ de la réflexion collective engagée sous la direction de Catherine Pomeyrols et Claude Hauser, L’Action française à l’étranger, op. cit., p. 5.
15 Catherine Pomeyrols, « Les échos de la condamnation de l’Action française au Québec », dans L’Action française à l’étranger, op. cit., p. 77.
16 Luc Van Dongen, Un purgatoire très discret, op. cit., p. 301.
17 Cf. le chapitre 3.
18 Après la mort du « maître », le Centre d’information nationale Robert Rumilly se rapproche nettement, sous l’impulsion du chanoine Achille Larouche, de la mouvance catholique la plus traditionaliste. Jean-François Nadeau, Robert Rumilly, op. cit., p. 328-329.
19 Note d’un inspecteur de police à son sujet en 1956. Luc Van Dongen, Un purgatoire très discret, op cit., p. 309. Rappelons qu’il était professeur de civilisation américaine après une thèse soutenue en 1924 sur L’esprit révolutionnaire en France et aux États-Unis à la fin du XVIIIe. Dans les faits, ayant perdu à la Libération son poste au Collège de France, il enseigne en Suisse jusqu’en 1961.
20 En effet, si l’affaire Bernonville témoigne bien à sa façon d’un certain climat idéologique propre à la Grande noirceur du Québec de Duplessis, on ne peut perdre de vue que le premier ministre lui-même et au-delà les autorités provinciales se sont tenus assez scrupuleusement à l’écart de ce dossier. Inversement, et rappelant combien les notions de rupture et de continuité doivent toujours être maniées avec beaucoup de précaution, il ne fait aucun doute que, par calcul politique ou au nom du « fait provincial », des élus du parti libéral originaires du Canada-français ont soutenu (parfois ardemment) la cause des miliciens. Cela n’empêchera pas certains, par la suite, d’être ministre provincial de la Révolution tranquille (Bona Arsenault) ou d’avoir des responsabilités fédérales.
21 Catherine Pomeyrols et Claude Hauser, L’Action française à l’étranger, op. cit., p. 6 ; Olivier Dard, Michel Grunevald (dir.), Charles Maurras et l’étranger. L’étranger et Charles Maurras, Berne, Peter Lang, 2009.
22 Catherine Pomeyrols, « Les échos de la condamnation de l’Action française au Québec », dans L’Action française à l’étranger, op. cit., p. 78.
23 Catherine Pomeyrols, Les intellectuels québécois, op. cit., p. 445. De fait, des gens comme Henri Bourassa ou le Chanoine Groulx avaient déjà depuis l’entre-deux-guerres (et notamment la condamnation de 1926) pris leur distance à l’égard de Maurras et de son mouvement.
24 Jean-François Nadeau, Robert Rumilly, op. cit., p. 326.
25 Dans le cas de Bernonville, on ne peut être que frappé par la présence persistante des Cagoulards dans son entourage. Un « réseau », à l’importance souvent exagérée ou fantasmée, mais qui montre ici une certaine vitalité. Sur ce point, les travaux de Philippe Bourdrel restent une référence : outre son ouvrage plus récent Les Cagoulards dans la guerre (op. cit.), on peut toujours se référer à son premier livre sur la question La Cagoule Histoire d’une société secrète du Front populaire à la Ve République, Paris, Albin Michel, 1970.
26 En particulier en 1965 dans un pamphlet, intitulé A bas la haine !, Montréal, La Vérité. Sur cette facette d’Adrien Arcand, voir Jean-François Nadeau, Adrien Arcand, op. cit., chapitre 11, Le Négationniste, p. 311-340. À ce titre Arcand a des correspondants communs avec Robert Rumilly, en particulier Henry Coston.
27 Sur ces différents âges, cf. Valérie Igounet, Histoire du négationnisme en France, op. cit.
28 Jean-François Nadeau, Adrien Arcand, op. cit., p. 326.
29 En particulier dans son livre Quel monde ! publié en 1965. Jean-François Nadeau, Robert Rumilly, op. cit., p. 227-229.
30 Jean-François Nadeau, Robert Rumilly, op. cit., p. 182.
31 Jean-François Nadeau, Adrien Arcand, op. cit., p. 278.
32 Luc Van Dongen, Un purgatoire très discret, op cit., p. 292. L’auteur insiste : « La liste est longue de tous ceux qu’il épaula à la fin de la guerre, en général avec succès : nous en avons dénombré une vingtaine. »
33 Sur ce processus de mondialisation des enjeux mémoriels, voir notamment le dossier publié en octobre 2008 par Pascal Blanchard, Marc Ferro et Isabelle Veyrat-Masson, dans la revue Hermès, « Les guerres de mémoires dans le monde », no 52, CNRS éditions.
34 Martin Pâquet, « Des usages publics du passé au Canada et au Québec contemporains », dans Martin Pâquet (dir.), Faute et réparation au Canada et au Québec contemporains, op. cit., p. 15-16.
35 Harold Troper et Morton Weinfeld, « Jewish-Ukrainian Relations in Canada since World War II and the Nazi War Criminal Issue », dans Alan Davies (dir.), Antisemitism in Canada, op. cit., p. 282.
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