Une pièce négligée du puzzle neumatique français : la notation lyonnaise
p. 111-146
Texte intégral
1La recherche sur les notations neumatiques s’est développée essentiellement autour des systèmes d’écriture considérés comme les plus précis et les plus intéressants pour la reconstitution des mélodies de chant liturgique, soit par la richesse de leurs indications agogiques (notations sangalliennes, messines), soit par leur passage précoce à la diastématie (notation aquitaine, notation bénéventaine par exemple). À cet égard, les notations neumatiques françaises ont longtemps paru d’un moindre intérêt. Solange Corbin est la première musicologue à s’y être véritablement intéressée. Son ouvrage posthume, Die Neumen1, reste une référence pour tout ce qui concerne les questions de typologies et de variantes au sein des écritures neumatiques. Mais l’abondante matière contenue dans sa thèse (inédite) de Doctorat d’Etat sur les notations françaises, soutenue en 1957, reste méconnue et peu exploitée2. Il a fallu attendre une époque toute récente pour que de nouveaux travaux soient engagés sur les notations françaises, à travers la réalisation d’un catalogue de manuscrits et de fragments notés conservés au Département des manuscrits de la BnF (catalogue MANNO)3.
2Parmi les notations françaises, certaines variantes régionales ou locales sont liées à d’importants centres de production écrite à l’époque carolingienne : Corbie, Fleury, Tours, Angers, Autun, les abbayes normandes, certains réseaux d’institutions religieuses comme Cluny, etc. D’autres formes de notations plus localisées ou moins bien représentées dans les sources peuvent sembler d’importance secondaire pour l’histoire des écritures neumatiques. De prime abord, on serait tenté de ranger la notation « lyonnaise » dans cette dernière catégorie. Solange Corbin est la première et quasiment la seule spécialiste à avoir pris sérieusement en considération l’existence d’une notation lyonnaise. Certes, dans son ouvrage sur la paléographie musicale grégorienne, G. Sunyol cite le missel BAV, Barb. lat. 559, mais comme un exemple de notation prégothique4.
3Pour Solange Corbin, la notation lyonnaise constitue non pas un phénomène anecdotique, mais plutôt une exception, un cas atypique parmi les notations françaises. Le passage consacré à Lyon dans Die Neumen souligne d’emblée ce caractère atypique :
On pourrait presque considérer l’écriture de Lyon et de son diocèse comme indépendante si les témoins les plus anciens n’accusaient pas une indiscutable parenté avec d’autres neumes français5.
4Vingt ans auparavant, dans sa thèse, elle avait déjà développé l’idée d’une exception lyonnaise tout en soulignant l’importance de la Cité des Gaules dans le paysage neumatique français :
La ville de Lyon a une position exceptionnelle dans l’histoire tout comme dans la notation neumatique. Capitale située au carrefour de plusieurs Etats, elle reste le plus souvent autonome, se défendant contre les influences extérieures, mais par là-même, rayonnant peu : parallèlement, nous allons voir la notation lyonnaise conserver quelque souvenance des groupes qui l’entourent, mais se figer en un type immuable qui restera propre à la ville elle-même et à un très petit nombre d’églises du diocèse6.
[...] On a quelque scrupule en commençant par la métropole de la première Lyonnaise à dire d’emblée que, sauf dans les plus anciens témoins, sa notation ne ressemble à aucune autre notation « française ». Il en est pourtant bien ainsi, au point que cette graphie claire, ferme, inamovible, exige une description spéciale. Elle est caractérisée par une cambrure de tous les signes qui accentue les pleins et les déliés de la plume ; à mesure que le temps passe, l’écriture lyonnaise qui au début ne se distingue guère de la « française » devient plus anguleuse et décorative et prend une vague ressemblance avec la graphie bénéventaine7.
5Le nombre de témoins en neumes lyonnais recensés dans la thèse de S. Corbin s’élève à une quinzaine, du IXe au XIIIe siècle8. Dans Die Neumen, six sources seulement sont mentionnées ; le bref chapitre consacré à la notation lyonnaise s’achève sur le constat qu’aucune enquête approfondie n’a encore été menée. Pour poursuivre les recherches sur la notation lyonnaise, il faut donc repartir de la thèse de S. Corbin plutôt que de son ouvrage posthume. Dans un premier temps, nous redéfinirons précisément les caractéristiques paléographiques de la notation lyonnaise. Dans un second temps, nous proposerons une nouvelle liste de sources témoins. Nous espérons à travers ce travail apporter quelques éléments de réponse aux questions suivantes :
existe-t-il une identité lyonnaise en matière d’écriture neumatique ?
comment cette notation s’intègre-t-elle dans le paysage neumatique régional ?
Lyon et son diocèse : une situation historique et géographique exceptionnelle
6Lyon se trouve à mi-chemin entre le Nord et le Sud sur une voie de communication, le Rhône, située entre les territoires francs à l’Ouest et ceux d’Empire à l’Est. Lotharingienne après le partage de l’Empire carolingien de 842, Lyon est incorporée au royaume de Haute-Bourgogne en 952, lequel devient plus tard royaume d’Arles. À partir de 1032, la ville est théoriquement rattachée aux territoires relevant de l’Empire germanique, mais reste tournée vers la France par sa langue et sa culture. Lyon est gouvernée jusqu’à la fin du XIIIe siècle par ses évêques métropolitains, ce qui lui donne une sorte d’indépendance de fait. Il faut attendre le début du XIVe siècle (1312) pour que la ville reconnaisse la souveraineté du roi de France et se dote de statuts communaux (1320)9.
7L’ancienneté de la tradition chrétienne lyonnaise est bien connue. L’épisode des martyrs de 177 après J.-C., rapporté par Eusèbe de Césarée dans son Histoire ecclésiastique10, a été retenu comme un événement fondateur pour l’histoire du christianisme en Gaule. La cité tardo-antique et médiévale s’est implantée sur la rive droite de la Saône, au pied de la colline de Fourvière, ainsi que dans la presqu’île située entre Saône et Rhône. Elle se dote très rapidement d’un nombre considérable d’édifices religieux. Le groupe épiscopal est constitué de trois églises (Saint-Jean-Baptiste, Saint-Étienne et Sainte-Croix) situées à l’emplacement de l’actuelle primatiale. On compte également plusieurs autres édifices liés au culte des saints : Saint-Irénée, Saint-Just (primitivement Saints-Macchabées), Saint-Paul, Saint-Laurent, Saints-Apôtres (plus tard Saint-Nizier), Saint-Michel d’Ainay11.
8Lyon compte au Moyen Âge quatre chapitres de chanoines (cathédrale Saint-Jean, collégiales Saint-Paul, Saint-Just et Saint-Irénée)12 et plusieurs monastères (Sainte-Eulalie, Saint-Pierre-des-Terreaux, Saint-Georges, Saint-Martin d’Ainay). En dehors de la ville proprement dite, le diocèse abrite quelques établissements monastiques importants : l'Île-Barbe, au nord de la ville, Saint-Claude (abbaye qui porte également le nom de Condat et de Saint-Oyan, dans le Jura), Saint-Pierre de Nantua, Saint-Martin de Savigny, Saint-Rambert-de-Joux.
9Le diocèse de Lyon est particulièrement étendu à l'époque médiévale, puisqu’il englobe approximativement les trois départements actuels du Rhône, de la Loire et de l’Ain13. Métropolitain de la Lyonnaise première, l'évêque de Lyon a autorité sur les évêchés d’Autun, Langres, Chalon et Mâcon. En 1079, le pape Grégoire VII lui accorde le titre de « primat », ce qui élargit sa prééminence aux provinces de Sens, de Rouen et de Tours, c’est-à-dire, avec celle de Lyon, les quatre provinces ecclésiastiques étudiées par S. Corbin dans sa thèse. Du point de vue de l’histoire des notations musicales neumatiques, ce territoire correspond à peu près (la Bretagne exceptée) au domaine des notations françaises14. Par sa position excentrée, à l’extrémité sud-est d’un vaste domaine primatial couvrant les territoires francs de l’Ouest et de la zone de transition (ancienne Lotharingie), Lyon se trouve au contact des régions plus méridionales de la vallée du Rhône et de Parc alpin.
10Au regard de l’histoire de la liturgie, l’idée d’une exception lyonnaise a souvent été émise. Dans les années 1930, D. Buenner a réfuté l’idée d’un rit lyonnais et démontré que la liturgie lyonnaise était de type romano-franc, teintée de quelques particularismes locaux comme cela se rencontre un peu partout à l’époque médiévale15. À l’époque carolingienne, certains évêques, notamment Leidrade (798-816) et Agobard (816-835 et 839/840), fortement impliqués dans le mouvement de réforme liturgique et musicale, ont fait preuve d’un zèle tout particulier. On a maintes fois souligné les positions intransigeantes d’Agobard à propos du choix des textes. L’éviction de tous les textes non scripturaires a marqué durablement la tradition lyonnaise. L’absence de certaines pièces de chant par ailleurs universelles, les corrections apportées à d’autres pièces, l’ordonnancement des séries alléluiatiques ou des séries de répons de l’Avent distinguent clairement un livre à l’usage du diocèse de Lyon16.
11La poésie liturgique (tropes, séquences, proses, prosules) ne semble guère s’être développée dans la région lyonnaise : les livres de chant provenant de Lyon et son diocèse qui nous sont parvenus sont des missels, des bréviaires et des antiphonaires qui s’en tiennent strictement aux pièces nécessaires à la célébration de la messe ou de l’office. Aucun tropaire n’a été retrouvé, même sous forme de fragments, tout au plus dispose-t-on de quelques prosaires d’époque moderne17 Le caractère non biblique des textes associés à ces compositions musicales explique probablement cet état de fait. On a parfois évoqué une possible influence de l’abbaye de Cluny : en effet, malgré sa réputation de grandeur et de solennité, la liturgie de la célèbre abbaye bourguignonne n’a jamais accordé qu’une faible place aux tropes18. Mais l’idée d’une influence clunisienne sur la liturgie lyonnaise (ou l’inverse) ne résiste pas à la comparaison des sources. D’après V. Leroquais, il s’agit de deux liturgies qui se sont développées indépendamment et qui ne se rencontrent qu’occasionnellement19.
12Certains prélats placés à la tête du diocèse de Lyon sont, certes, issus des milieux clunisiens, tel Halinard (1046-1052), ancien moine puis abbé de Saint-Bénigne de Dijon. Cependant, on ignore jusqu’à quel point la personnalité des archevêques a pu avoir une influence sur la liturgie lyonnaise après l’époque carolingienne. L’emprise clunisienne semble être restée très limitée dans le diocèse : seules les abbayes de Nantua et de Gigny ont été rattachées à cet ordre au cours du XIe siècle ; celle de Saint-Rambert-en-Bugey le fut tardivement, en 1139. De la même manière, et bien que les archevêques de Lyon aient été globalement favorables à la réforme grégorienne ainsi qu’aux nouvelles formes de monachisme qui se développent au XIIe siècle, peu d’établissements cisterciens ont vu le jour dans le diocèse de Lyon. Les cartusiens se sont mieux implantés, notamment dans le Bugey, à Portes dès 1115 et à Meyriat dès 1116. On constate par ailleurs que les monastères urbains et suburbains (L’Île-Barbe, Ainay, Savigny) sont tous restés sous la tutelle étroite du diocèse20. Quant à la réforme canoniale, elle semble avoir rencontré une franche hostilité : sur quatre collégiales, seule celle de Saint-Irénée accepta la régularisation de son chapitre vers 110021.
13Ces quelques données relatives à l’histoire religieuse comme à la liturgie tendent à confirmer l’idée d’un « conservatisme » lyonnais. Lyon et son diocèse semblent avoir cultivé un attachement particulier à la stabilité et à la permanence des institutions et des usages liturgiques. Il est permis de penser que cet attachement à une forme de tradition locale est lié au prestige que l’Église lyonnaise tirait de son ancienneté et de son rang parmi les provinces ecclésiastiques françaises.
La notation lyonnaise : définition
14L’établissement d’un inventaire des sources en notation lyonnaise pose le problème de la définition même de cette notation. Qu’est-ce qui la distingue d’une autre notation française ? Contrairement à ce qu’on pourrait croire, les travaux de S. Corbin n’ont pas tout à fait résolu la question. Dans la thèse, la description des formes neumatiques ne cadre pas parfaitement avec toutes les sources retenues comme témoins de la notation lyonnaise. Il convient par conséquent de préciser les caractéristiques de cette notation d’après les manuscrits de chant dont l’origine lyonnaise (Lyon ou diocèse de Lyon) est fermement établie :
Lyon, BM 537 : sacramentaire (XIe siècle), antiphonaire (XIe-XIIe siècle), fragment d’ordinaire (2e moitié du XIIe siècle), additions diverses (2e moitié du XIIe siècle). Le manuscrit est incontestablement lyonnais, même si l’origine de ses différentes parties n’est pas précisément établie.
Besançon, BM 143 : bréviaire à l’usage de l’abbaye de Saint-Claude, XIIe siècle.
Rome, BAV, Barb. lat. 559 : missel à l’usage de Saint-Michel de Lyon, XIIe-XIIIe siècle.
Lyon, BM 5139 : missel à l’usage de la collégiale Saint-Just, 2e quart du XIIIe siècle.
Paris, BnF, lat. 1017 : ordinaire de Lyon, début du XIIIe siècle (notations sans doute postérieures, 2e moitié du XIIIe siècle).
Lyon, BM 6167 (anciennement Fourvière, bibliothèque du chapitre, sans cote) : Liber intonationum de la collégiale Saint-Just, 1re moitié ou milieu du XIIIe siècle (notations additionnelles contemporaines ou peu postérieures).
15Les neumes lyonnais (cf. Tableau 2) présentent comme la plupart des notations françaises un axe vertical en mouvement mélodique ascendant, oblique en mouvement descendant. La verticalité de l’écriture est assez stricte aux XIIe et XIIIe siècles, mais certaines notations plus anciennes semblent moins rigides, surtout lorsque la copie des neumes ne semble pas très soignée.
16Comme le souligne S. Corbin, « la virga à elle seule indique l’origine lyonnaise : verticale, avec de légères flexions à gauche en bas, à droite en haut, qui lui donnent sa cambrure ». Cette cambrure se retrouve dans tous les neumes composés à partir de la virga (climacus, scandicus), ainsi que dans les hastes du pes et de la clivis. Elle confère à la notation lyonnaise une allure sinueuse, qui devient de plus en plus anguleuse à mesure que l’on avance dans le temps. Autre particularité qui mérite d’être relevée, la virga lyonnaise ne comporte jamais de « lâcher de plume » ; son sommet, tout comme celui du pes, se distingue au contraire par un trait effilé, parfois si fin qu’il en devient imperceptible sur certaines sources. Avec la gothicisation de l’écriture, dès la fin du XIIe siècle, la cambrure caractéristique des graphies lyonnaises évolue vers une brisure en pleins et déliés de plus en plus marqués, ce qui confère une allure très stylisée à la notation neumatique. Le missel Lyon, BM 5139 et le missel BAV, Barb. lat. 559 en constituent des exemples particulièrement éloquents. Il n’est pas très étonnant, finalement, que G. Sunyol ait considéré le manuscrit de la bibliothèque vaticane comme un précurseur des notations gothiques22.
17Néanmoins, il faut se garder de réduire la notation lyonnaise à des caractéristiques d’écriture dues en partie au caractère tardif de ses principaux témoins. Solange Corbin elle-même parle de « notation très pure » à propos du tonaire du manuscrit Parkminster A 33 (XIIe siècle) et du missel Lyon, BM 5139 (XIIIe siècle), ce qui n’est pas sans ambiguïté : l’écueil serait de confondre « pureté » et « stylisation » des graphies neumatiques. Définir les contours paléographiques de la notation lyonnaise nécessite d’observer dans quelle mesure les graphies employées sont stables et fermement établies, au-delà des inévitables variations propres à un copiste, une source ou une époque.
Punctum
18Il se présente, comme dans toutes les notations françaises, sous la forme d’un point (rond ou losangé), plus rarement d’un trait un peu étiré, soit à l’horizontale, soit très légèrement vers le bas à partir du XIIe siècle. Le trait légèrement allongé ne paraît pas, à première vue, en relation avec une indication rythmique ou mélodique, mais plutôt une manière d’écrire propre à certains copistes. On trouve cependant des séries de points rapprochés (deux ou trois sons répétés sur une même syllabe) pour signifier des sons de même hauteur ; ces points, parfois très légèrement arrondis, correspondent très souvent aux bi- et tri-strophae de la notation sangallienne.
Virga
19Comme cela a été dit plus haut, le trait de la virga est ondulé et non pas droit. En bas, il est soit effilé, soit plein, mais presque toujours incurvé vers la gauche. La partie médiane de la haste présente souvent un trait plus épais lorsque l’extrémité basse est effilée. Le sommet présente un trait toujours effilé qui se courbe plus ou moins fortement vers la droite. La notation lyonnaise emploie volontiers des séries de deux ou trois virgae sur une même syllabe (bi- et tri-virga). Certains groupes de virgae présentent des signes plus courts que les virgae isolées. Il semble par ailleurs que lorsque la virga est employée après deux ou trois points, elle représente un son plus aigu que les points qui précèdent.
Pes
20Le premier élément est un trait plein, légèrement incurvé et descendant, qui s’arrondit avant la haste montante. Cette dernière est un trait ondulé qui s’incurve d’abord vers la gauche, puis se termine, au sommet, par une courbure vers la droite, à l’instar de la virga ; la terminaison est effilée comme pour la virga. L’angle formé par les deux éléments est un angle droit ou légèrement obtus. Lorsque le pes est liquescent, le premier élément est une boucle étroite et arrondie ; le second élément est parfois plus court et moins ondulé que dans le pes ordinaire.
Clivis
21À l’instar de la virga, la haste montante de la clivis est légèrement ondulée, le trait se dirige d’abord vers la gauche, puis la courbure s’inverse au cours de la montée, si bien que ce premier élément se termine par un trait obliquant vers la droite qui peut donner lieu à un sommet soit pointu, soit légèrement « en potence ». Le deuxième élément est un trait descendant plus court que la montée, soit vertical, soit très légèrement incurvé vers la droite ; on observe parfois, dans certaines sources, un léger lâcher de plume.
Torculus
22Deux formes coexistent. La plus fréquente est la forme française usuelle. Le départ du torculus est généralement arrondi, plus anguleux dans les sources tardives. Le reste du tracé suit la forme de la clivis, avec sa cambrure typique. L’autre graphie de torculus est très intéressante, pourtant elle n’a jamais retenu l’attention des spécialistes. Solange Corbin ne la mentionne pas dans sa thèse et l’apparat éditorial de Die Neumen n’y fait qu’une très brève allusion23. Il s’agit d’un torculus de type « contourné ». Au Xe siècle, dans le manuscrit Troyes, BM 96, il ressemble à la lettre grecque thêta. Dans les sources postérieures, le torculus contourné ressemble à un « 8 » penché vers la droite voire quasiment couché à l’horizontale. Au XIIIe siècle, la graphie se stylise en un signe dont les boucles sont moins fermées, mais le principe du tracé ne change pas. Ce neume peut être utilisé isolément, mais il apparaît le plus souvent en composition, c’est-à-dire en association avec d’autres neumes sur une même syllabe, souvent comme dernier élément d’un mélisme.
23L’utilisation de graphies contournées de torculus est un phénomène que l’on observe presque exclusivement dans les notations méridionales : notations wisigothique et catalane, notations italiennes (Bologne), notations franco-italiennes pratiquées dans le sud de la vallée du Rhône, les Alpes provençales et piémontaises24. Dans les notations françaises plus septentrionales, l’utilisation de ce type de signe est un fait rare qui ne concerne que quelques sources isolées : par exemple, dans le tonaire de Dijon (BIU Montpellier, H159) et dans quelques sources attribuées à l’abbaye de Fleury25. Dans la notation lyonnaise, au contraire, le torculus contourné fait partie intégrante du « vocabulaire neumatique ». On peut l’observer dans toutes les sources, sauf dans les plus petits fragments où toutes les graphies neumatiques ne sont pas forcément représentées. De plus, ce type de torculus présente une graphie spécifique à la notation lyonnaise, à la fois proche, mais bien distincte des signes utilisés dans les notations hispaniques, italiennes ou franco-italiennes. Enfin, ce torculus est utilisé jusque dans les sources les plus tardives, alors que partout ailleurs, il disparaît vers la fin du XIe siècle.
Torculus resupinus
24Lorsqu’il est resupinus, le torculus est complété par un trait fin partant à l’oblique et formant un angle aigu ou légèrement arrondi avec ce qui précède et dont l’extrémité laisse apparaître, à partir de la fin du XIIe siècle, un léger lâcher de plume. Il n’existe pas de forme resupina du torculus contourné.
Porrectus
25Contrairement à ce qu’affirme Solange Corbin26, le porrectus est attesté jusque dans les sources les plus tardives, ce qui n’est pas très fréquent dans d’autres notations françaises où il tend à disparaître très tôt au profit de formes « décomposées » de type clivis + virga. À Lyon, le signe est tracé comme une clivis resupina : le prolongement de la clivis vers l’aigu est marqué par un trait fin, assez long, partant à l’oblique et formant un angle avec ce qui précède. Ce trait peut être légèrement incurvé vers la droite à son extrémité ; à partir de la fin du XIIe siècle, cette extrémité a tendance à s’épaissir et l’on voit apparaître un léger lâcher de plume.
26Il existe une forme de porrectus assez différente, plus étirée en longueur, qui n’est pas du tout fondée sur la forme de la virga lyonnaise. Cette graphie de porrectus se rencontre dans les sources originaires de l’abbaye de Saint-Claude : on la trouve en effet dans le ms. Troyes, BM 96 et dans Besançon, BM 143. On la trouve également dans le fragment de bréviaire (d’origine inconnue) coté 1 J 1272 aux AD du Rhône (voir Tableau 2).
Climacus et pes subpunctis
27Ils se présentent sous deux formes. Dans le premier cas, la virga ou le pes sont suivis d’une descente formée de points ronds, losangés ou légèrement étirés selon les sources et les époques. Dans le second cas, la descente est liée « en dents de scie » à la virga initiale. La graphie lyonnaise du climacus lié est étonnamment proche de celle que l’on rencontre dans les Alpes franco-italiennes et en Italie du Nord. On s’étonne de constater que le climacus et le pes subpunctis liés se maintiennent dans la notation lyonnaise jusqu’à la première moitié du XIIIe siècle au moins : il faut vraiment attendre le milieu du XIIIe siècle et les sources les plus tardives (Lyon, BM 6167 et BnF, lat. 1017) pour voir ces formes cursives disparaître des sources lyonnaises.
Scandicus
28Il est formé de deux points ronds, losangés ou légèrement étirés surmontés d’une virga. Nous n’avons pas relevé de graphie de salicus mais certaines occurrences du salicus dans la notation de Saint-Gall sont parfois retranscrites dans la notation lyonnaise par un pes quassus.
Oriscus
29L'oriscus de la notation lyonnaise ne présente pas de particularité notable par rapport aux formes rencontrées dans les notations françaises, si ce n’est une tendance à être d’un assez gros module par rapport aux autres neumes. Solange Corbin distingue une graphie en forme de « N majuscule27 » : elle entend par là une graphie d'oriscus assez large se terminant par un trait court. Indépendamment des sources et des copistes, ce type de graphie coexiste avec une forme plus étroite dont le dernier trait s’allonge vers le bas en se recourbant légèrement vers l’intérieur (voir Tableau 2).
Quilisma
30Deux formes bien distinctes coexistent dans les sources jusqu’au XIIIe siècle. L’une est ascendante et en dents de scie ; elle se termine par une haste courte et fine, parfois imperceptible (quilisma-pes). L’autre forme est plus horizontale et comporte trois boucles plutôt arrondies, elle est plus fréquemment employée lorsqu’elle précède un neume lié (climacus, pes subpunctis voire même torculus subpunctis). Cette dernière forme disparaît au XIIIe siècle et seule la première graphie semble se maintenir dans les sources tardives28. Il ne faut pas confondre le quilisma à trois boucles avec un pes quassus, où deux boucles seulement précèdent la haste montante du pes.
Trigon
31Le trigon lyonnais est formé de deux points surmontant une virgule située à égale distance de ces deux points, ce qui n’a rien d’original par rapport à d’autres notations françaises.
Liquescences
32La notation lyonnaise reste attachée à l’emploi des liquescences jusque dans les sources les plus tardives. Les graphies de liquescences que l’on rencontre le plus souvent sont :
le cephalicus : en forme de demi-cercle largement ouvert vers le bas et dirigé vers la gauche
l’epiphonus : départ arrondi en boucle étroite, haste plus courte que celle d’un pes ordinaire.
la liquescence du point consiste à étirer le point rond en l’arrondissant. La graphie ressemble soit à une virgule (mouvement mélodique descendant), soit à une sorte de u minuscule orienté vers le haut (mouvement mélodique ascendant)
Lettres significatives
33Quelques manuscrits lyonnais tardifs utilisent, chose surprenante, des lettres significatives. Ces lettres sont principalement « t », qui désigne clairement le demi-ton, mais aussi, plus rarement, la lettre « b » qui semble signaler un son plus grave que le précédent, soit parce qu’il y a un saut important vers le grave, soit pour remédier à l’ambiguïté de certains enchaînements de neumes (virga après un point suggérant un son plus aigu que le précédent). On trouve ces lettres sous la plume des copistes des missels BAV, Barb. lat. 559 et Lyon, BM 5139, dans le liber intonationum Lyon, BM 6167, ainsi que dans les additions notées du manuscrit Lyon, BM Coste 34129. Le ms. BAV, Barb. lat. 559 utilise également plusieurs autres lettres (« e », « s », « i ») dont la signification précise reste à élucider30. Ces lettres sont-elles destinées à pallier aux inconvénients d’une notation adiastématique tardive (sans doute début XIIIe siècle) ? À cette époque, en principe, les manuscrits de chant sont notés sur lignes et comportent des clés ; dans bien des cas, les formes neumatiques régionales ont été abandonnées au profit d’une notation carrée plus standardisée. La notation neumatique lyonnaise n’a jamais suivi cette évolution vers la diastématie. On observe, certes, quelques indications relatives aux intervalles (séries de points décalés en hauteur, emploi de la virga pour signifier un son plus aigu), mais celles-ci correspondent plutôt à une forme archaïque de diastématie, que l’on rencontre dans les sources antérieures à l’apparition de lignes de portée.
34À la fin du XIIIe siècle, une rupture se produit : l’écriture neumatique lyonnaise est abandonnée, sans transition, au profit de la notation carrée. Le missel de Saint-Saturnin (paroisse dépendant de l’abbaye Saint-Pierre des Terreaux) pourrait faire figure de précurseur, aux alentours de 1200, avec sa notation à petits carrés liés. Mais il n’est pas certain qu’il faille le considérer comme le trait d’union entre les neumes lyonnais et la notation carrée. En dépit de ce qu’affirme R. Amiet, qui se réfère à un courrier échangé avec S. Corbin en 197031, il n’y a guère de parenté entre cette notation à petits carrés liés et les neumes des sources lyonnaises contemporaines. Peut-être sa copie a-t-elle été réalisée ailleurs qu’à Lyon ou par une main non lyonnaise, en tout cas, en dehors des milieux séculiers lyonnais où se perpétuent les neumes adiastématiques. Les sources lyonnaises en notation carrée recensées par S. Corbin et R. Amiet datent au plus tôt du milieu du XIIIe siècle, comme le lectionnaire-antiphonaire de Saint-Claude (AD du Jura, ms. 11, Amiet no 258). De Lyon même, aucune source sur lignes n’est antérieure au XIVe siècle :
Carpentras, bibliothèque Inguimbertine, ms. 43 (bréviaire)
Lyon, bibliothèque du Musée des Tissus, R. 70 (anciennement Le Mans, fonds Chappée sans cote, bréviaire)
Lyon, BM 6667 et 6699 (bréviaires)
Lyon, BM 1394 (missel de Jean Talaru)32.
Les sources : méthodologie et pistes pour de futures recherches
35Ce nouvel état des sources en neumes lyonnais (voir aussi Tableau 1) se fonde sur la liste établie dans la thèse de Solange Corbin et dans Die Neumen, ainsi que sur les instruments de travail suivants :
Victor Leroquais, Les Bréviaires manuscrits des bibliothèques publiques de France, 6 vol., Paris, 1934 ; Les Pontificaux manuscrits des bibliothèques publiques de France, 4 vol., Paris, 1937 ; Les Sacramentaires et les missels manuscrits des bibliothèques publiques de France, 4 vol., Paris, 1924.
Robert Amiet, Inventaire général des livres liturgiques du diocèse de Lyon, Paris, 1979.
Robert Amiet, Les manuscrits liturgiques du diocèse de Lyon : description et analyse, Paris, 1998 [Amiet suivi du numéro de notice]
Christian Meyer, Catalogue des manuscrits notés des Bibliothèques publiques de France, Turnhout, 2006 [CMN], Les volumes utiles à nos recherches concernent les sources conservées (1) en Alsace, Lorraine, Franche-Comté, (2) Champagne-Ardenne. Ce catalogue est complété en ligne par des pré-inventaires de sources pour les autres régions33.
Les notices en ligne du catalogue MANNO (Manuscrits notés en neumes en Occident)34.
36Le dépouillement des catalogues mentionnés ci-dessus a été complété par des investigations directes sur les sources originales ou reproduites, ce qui a permis de revoir considérablement la liste des témoins de la notation lyonnaise figurant dans Die Neumen. Quelques sources et fragments nouveaux ont été mis au jour, d’autres le seront peut-être à l’avenir. Identifier et retrouver l’ensemble des documents signalés par S. Corbin et R. Amiet a parfois été un véritable jeu de piste. Plusieurs manuscrits ou fragments ont en effet changé de lieu de conservation ou de cote (fragments des Archives départementales, fragment d’Annecy) depuis les signalements de ces deux spécialistes. La plupart d’entre eux ont finalement été retrouvés, sauf un bifeuillet de missel du XIIe siècle, signalé par R. Amiet sous une cote aujourd’hui obsolète des Archives départementales du Rhône (75 J 253 fragm. A)35. Ce fragment censé contenir des neumes lyonnais est malheureusement resté introuvable. Il contenait des messes pour la période allant de saint Jean-Baptiste (24 juin) aux saints Procès et Martinien (7 juillet).
37Le missel du XIIe siècle qui se trouvait dans la collection privée de l’abbé Pierre David, dont Solange Corbin signale l’existence dans sa thèse, mais auquel elle n’a pas eu accès à cette époque, correspond selon toute vraisemblance au manuscrit qui porte aujourd’hui la cote 5947 à la BM de Lyon, missel de Saint-Saturnin noté en petits carrés liés que nous avons mentionné plus haut36. Précisons enfin que le manuscrit qui porte aujourd’hui la cote 6167 du fonds de la BM de Lyon (liber intonationum de la collégiale Saint-Just, XIIIe siècle) correspond au volume sans cote anciennement conservé à la bibliothèque du chapitre de la Basilique de Fourvière37.
38La localisation actuelle des manuscrits en notation lyonnaise se concentre dans une zone géographique incluant, autour de Lyon et sa région, la Champagne, la Franche-Comté, la Suisse, la Savoie et le Dauphiné. Les sources qui ont été recueillies loin de leur lieu d’origine semblent peu nombreuses. La plus importante pour cette étude est un missel conservé à Rome, BAV, Barb. lat. 559 (XIIe-XIIIe siècle). Un fragment de tonaire du XIIe siècle se trouve aujourd’hui à la chartreuse de Parkminster (A 33, f. 197-199)38. Hormis quelques additions portées sur un ordinaire du début du XIIIe siècle (BnF lat. 1017), nous n’avons pas, à ce jour, retrouvé de notations lyonnaises à la Bibliothèque nationale de France.
39Pour compléter le présent recensement, il faudrait poursuivre les recherches dans les dépôts d’archives de toutes les régions citées ainsi que dans les bibliothèques de Savoie, Dauphiné, Bourgogne, voire en Suisse39. La province ecclésiastique de Lyonnaise première comprenait les diocèses de Lausanne, Constance et Bâle, que Solange Corbin a laissés de côté, pensant que leur apport serait mince40.
40Les sources en notation lyonnaise recensées jusqu’ici restent peu nombreuses par rapport à l’importance de la ville de Lyon, celle du diocèse et des institutions ecclésiastiques qui en dépendaient. En dehors de quelques livres entièrement notés conservés à la BM de Lyon, à la BM de Besançon et à la BAV, seuls des fragments subsistent, de provenance incertaine. D’un point de vue chronologique, les documents couvrent une période allant de l’an mil à 1 300 environ.
Témoins déjà signalés par S. Corbin
41Nous nous contenterons de brèves remarques sur les sources déjà connues et identifiées comme témoins de la notation lyonnaise. Le lecteur pourra se reporter aux catalogues cités plus haut pour les détails de la description codicologique et une bibliographie plus complète sur ces manuscrits.
- Troyes, Médiathèque 96, IXe et Xe siècle
42Ce manuscrit contient des œuvres de Florus de Lyon copiées vers 850-88041. Il aurait appartenu au prévôt Mannon, qui l’aurait offert à l’abbaye de Saint-Claude. Il n’est pas certain que le manuscrit soit, pour autant, originaire de Lyon ou de son diocèse : C. Charlier conteste l’origine lyonnaise42, tandis que le CMEL indique « Lyon » avec un point d’interrogation.
43Au f. 300 se trouve le début d’un tonaire, une addition qui semble particulièrement ancienne, probablement du Xe siècle43. Seuls les quatre premiers tons sont conservés, mais ce tonaire se poursuivait à l’origine sur le début de la deuxième colonne du feuillet, grattée par la suite en vue de la transcription d’une charte en faveur de l’abbaye. L’écriture peu soignée fait songer à une copie spontanée. Michel Huglo y voit d’ailleurs un « essai inachevé de composition » plutôt qu’une transcription d’après un modèle préexistant. Virga, pes, clivis, climacus, quilisma, oriscus, porrectus correspondent bien aux caractéristiques de la notation lyonnaise. On rencontre en particulier le torculus contourné, tracé comme une sorte de thêta grec. Indépendamment de l’origine du reste du manuscrit, ce tonaire additionnel constitue le plus ancien exemple connu d’écriture neumatique lyonnaise, probablement noté à l’abbaye de Saint-Claude.
- Lyon, AD du Rhône, 1 J 1272
44Parmi les documents conservés aux Archives départementales du Rhône, Solange Corbin signale un fragment de trois feuillets sans cote qu'elle décrit comme un antiphonaire des Xe-XIe siècle, mais qui, d’après la reproduction fournie au vol. 3 de sa thèse, semble plutôt être un missel, si l’on en juge par la présence de deux répons-graduels, Ab occultis meis et Convertere Domine, appartenant à deux formulaires de messes successifs (vraisemblablement les Ve et VIe dimanches après la Pentecôte)44. Après quelques recherches, ce fragment de missel a pu être identifié parmi le lot de documents conservés aujourd’hui sous la cote 1 J 1272. Il s’agit de deux feuillets (et non trois) contrecollés sur du papier et reliés entre eux de manière à faire office de couverture de livre. Le livre d’origine est tronqué en haut et en bas ainsi que sur un côté dans la largeur. L’écriture du texte et des neumes indique le courant du XIe siècle. Les quelques chants mélismatiques notés sur ces feuillets permettent d’observer l’ensemble des graphies neumatiques de la notation lyonnaise, tracées d’une plume fine et nerveuse qui annonce l’écriture de l’antiphonaire Lyon, BM ms. 537.
- Lyon, BM 537, XIe et XIIe siècle
45Ce volume contient un sacramentaire du XIe siècle (f. 1-108v), un antiphonaire de la fin du XIe ou du début du XIIe siècle (f. 109-151 v) suivi d’additions diverses (f. 152-156v) de la seconde moitié du XIIe siècle, ainsi qu’un fragment d’ordinaire de la même époque (f. 157-160), le plus ancien qui nous soit parvenu pour la ville de Lyon45. Des notations musicales se trouvent dans chacune des parties du volume, mais elles sont plus particulièrement abondantes dans l’antiphonaire, dans les additions placées après ce dernier, ainsi que dans l’ordinaire. Quelques notations additionnelles peuvent être relevées dans le sacramentaire (f. 7v, 50v, 69v et 109v), mais elles sont probablement postérieures à la copie de cette partie du manuscrit (XIIe siècle ?).
46L’antiphonaire (f. 109-151v) ne comporte que les principales fêtes et dimanches de l’année liturgique et son sanctoral est extrêmement réduit (Agnès, Agathe, Philippe et Jacques, Jean-Baptiste, Jean et Paul, Pierre, Paul, Laurent, l’Assomption de Marie, la Décollation de saint Jean-Baptiste, Michel, Cécile, André). Il s’agit d’un livre de petites dimensions (23,5 x 16 cm, justification 19 x 12,5 cm), de modeste facture, quasiment dépourvu de décor, en dehors d’une initiale peinte – assez rustique – au f. 109. Les rubriques, écrites à l’encre brune comme le reste du texte, sont à peine mises en valeur par quelques rehauts d’encre rouge ; le plus souvent elles sont simplement barrées par un trait de cette couleur. La place laissée pour les neumes est mince, en hauteur comme en largeur, et ces derniers sont souvent très serrés, quoique tracés d’une plume fine et dans un très petit module. En somme, cet antiphonaire n’a rien de l’exemplaire luxueux qu’on pourrait imaginer pour une collégiale ou une cathédrale de Lyon. Il est pourtant lyonnais par sa notation et son contenu liturgique, mais sa provenance et sa destination précises restent inconnues à ce jour. Son aspect rustique, archaïsant, inciterait à ramener la datation communément admise (première moitié du XIIe siècle) aux environs de 1 100. Il est peut-être moins ancien qu’il ne le paraît, mais assurément antérieur au premier quart du XIIe siècle. L’usure du parchemin, l’effacement de l’écriture sur les premières et dernières pages des cahiers suggèrent que ce livre n’a été relié que fort tardivement. On constate quatre lacunes correspondant à la perte de certains cahiers, entre les f. 128v et 129, 140v et 141, 147v et 148, ainsi qu’après le f. 151 (le dernier cahier conservé est tronqué). Lors de nos recherches aux AD du Rhône, nous avons eu le bonheur de retrouver le cahier faisant la jonction entre les f. 140v et 141, qui n’est autre que le fragment d’antiphonaire conservé sous la cote 1 J 65946.
47À la suite de cet antiphonaire se trouvent plusieurs feuillets (f. 152 à 156v) contenant des chants de l’office notés que R. Amiet définit comme un « fragment de bréviaire » (no 20 de son catalogue). Nous préférons considérer ces feuillets comme de simples additions, ou plus exactement comme des fragments codicologiquement distincts, mais reliés avec le reste du volume47.
48La copie des différentes parties de ce manuscrit s’étale sur deux siècles, formant un ensemble composite qu’il n’est pas possible, en l’état actuel de nos recherches, de situer plus précisément. C’est finalement l’homogénéité et la stabilité des graphies neumatiques qui font l’unité de ce volume et lui donnent une valeur toute particulière pour l’étude de la notation lyonnaise.
- Besançon, BM 143, XIIe siècle
49Des datations divergentes ont été proposées pour ce bréviaire à l’usage de l’abbaye de Saint-Claude48. Il n’est probablement pas du XIe siècle comme on peut le lire dans Leroquais49, la thèse de Solange Corbin et Die Neumen50. R. Amiet, qui se réclame de B. Bischoff, le place au début du XIIIe siècle, ce qui paraît tardif51. Le CMEL52 situe le manuscrit dans la première moitié du XIIe siècle, datation reprise par Christian Meyer dans le CMN53.
50La notation musicale de ce bréviaire est assurément de type lyonnais, mais elle présente cependant quelques menues différences avec la notation que l’on peut observer dans les livres originaires de Lyon même, à la même époque. La clivis est moins ondulée et plus pointue, le départ du torculus présente un trait horizontal comparable à celui du pes au lieu d’un départ arrondi (comme si le torculus était un pes flexus), le porrectus est différent de celui, en clivis resupina, typique de la notation lyonnaise.
- BAV, Barb. lat. 559, XIIe-XIIIe siècle
51Ce manuscrit est un missel à l’usage de Saint-Michel d’Ainay, église située dans la Presqu’île de Lyon. D’après H. M. Bannister, qui se fonde sur le calendrier liturgique, il aurait été copié entre 1173 et 1223 : la fête de saint Thomas de Cantorbéry y figure de première main tandis que la fête de la Translation de saint Thomas (instituée en 1223) a été rajoutée dans le calendrier54. Le premier quart du XIIIe siècle est plus plausible que la fin du XIIe siècle tant l’écriture neumatique paraît gothicisée. Ce missel mériterait une étude approfondie de son contenu et de sa notation musicale, en raison de la présence de nombreuses lettres significatives, mais aussi en raison de sa ressemblance avec le ms. Lyon, BM 513955.
- Lyon, BM 5139, XIIIe siècle
52Ce manuscrit est un missel à l’usage de la collégiale Saint-Just de Lyon. D’après R. Amiet, il date du second quart du XIIIe siècle56. Contrairement au missel précédent, les chants n’y sont pas notés en entier. Si l’on se fie aux datations suggérées par R. Amiet et H. M. Bannister, le ms. 5 139 serait donc légèrement postérieur au Barb. lat. 559. Il lui ressemble beaucoup, tant du point de vue de la présentation et de la décoration, que par son écriture neumatique. Comme le missel conservé à la BAV, il utilise des lettres significatives, principalement « t » et « b »57. Il ne serait pas étonnant que les deux livres soient issus d’un même scriptorium voire d’un modèle commun.
- Lyon, BM 6167, XIIIe siècle
53Ce Liber intonationum de la collégiale Saint-Just est daté de la seconde moitié du XIIIe siècle par Solange Corbin. R. Amiet le considère comme antérieur à 124558. Les notations neumatiques, assez abondantes, ne concernent que des incipits de chants, rarement des pièces complètes. Elles montrent une écriture fortement stylisée qui semble contemporaine ou peu postérieure à la copie et que l’on peut situer vers le milieu du XIIIe siècle. On y reconnaît la plupart des graphies de la notation lyonnaise et on y rencontre fréquemment la lettre significative « t »59. En revanche, les formes cursives de climacus liés ont disparu.
- Paris, BnF, lat. 1017, XIIIe siècle
54Ce volume constitue le seul ordinaire manuscrit à l’usage de la cathédrale de Lyon qu’on ait conservé60. Il date des années 1200 et a sans doute été rédigé à la demande de l’archevêque Renaud II de Forez (1193-1226). Des notations additionnelles peuvent être relevées aux f. 64v-67. On y reconnaît les neumes lyonnais, mais le trait paraît à la fois maniéré et maladroit, comme si ces notations avaient été portées par une main peu experte, difficile à dater, mais vraisemblablement postérieure à la copie du texte (2e moitié du XIIIe siècle ?).
- Chartreuse de Parkminster, A 33, XIIe et XIIIe siècles
55Le manuscrit Parkminster A 33 est un graduel provenant de la Chartreuse de Portes, fondée en 1115 par les moines de l’abbaye Notre-Dame d’Ambronay. Ce livre, qui est le plus ancien graduel cartusien connu, n’est pas d’origine cartusienne, mais il a été adapté à l’usage de cet ordre. D’où provient ce livre ? La notation ne plaide pas en faveur d’une origine lyonnaise. Plusieurs mains des XIIe et XIIIe siècles sont intervenues. Les plus anciennes (XIIe siècle) présentent des neumes sur lignes d’une mixité assez déroutante, plus proches d’une notation messine que d’une notation française, et sans aucune ressemblance avec les neumes lyonnais61. C’est un petit fragment indépendant du graduel sur le plan codicologique, mais relié avec le reste du volume (f. 197 à 199), qui nous intéresse ici. Il s’agit d’un tonaire du XIIe siècle en neumes adiastématiques lyonnais, que R. Amiet attribue, à la suite de H. J. Becker, à l’abbaye Notre-Dame d’Ambronay. Dans son étude des tonaires, M. Huglo évoque une possible origine grenobloise62.
- Grenoble, BM 140, XIIIe siècle
56Signalé dans la thèse de Solange Corbin, ce pontifical de Grenoble comporte quelques incipits de pièces notées de première main aux f. 9, 9v, 33v, 34, 38v, 44, 45v, 46, 54v. L’écriture est sans conteste une notation lyonnaise contemporaine de la copie du livre, qui date vraisemblablement du XIIIe siècle63. La présence de neumes lyonnais dans un livre originaire du Dauphiné est intéressante, dans une région plus volontiers associée aux sources cartusiennes et à des formes neumatiques issues de la notation aquitaine.
Sources rejetées ou douteuses
57Trois sources anciennes (IXe siècle) ont été citées par Solange Corbin ou d’autres spécialistes en raison de leurs liens réels ou supposés avec Lyon ou avec Florus de Lyon : BnF lat. 8093, BnF lat. 2832, Lyon, BM 431. Aucune, à notre sens, ne contient de neumes spécifiquement lyonnais.
58À propos du ms. lat. 8093, Solange Corbin parle dans sa thèse de mains françaises « antérieures à la diversification », c’est à dire à l’apparition d’une notation lyonnaise bien individualisée64. Ce florilège a été copié en Espagne au IXe siècle, puis porté à Lyon, où il a reçu des additions de Florus de Lyon, mort en 860 dans cette région. Il a autrefois été attribué au monastère de l’Île-Barbe situé au Nord de Lyon, mais cela concerne seulement une autre partie du manuscrit, conservée à Leyde (Rijksuniversiteit Bibliotheek, mss. Voss. lat. 111). Les neumes que l'on trouve sur quelques Carmina d’Eugenius Toletanus (f. 17, 18, 19, 24) ont sans doute été ajoutés à l'époque où le manuscrit se trouvait dans la région lyonnaise, c’est à dire à la fin du IXe siècle. Ils révèlent des graphies très archaïques et particulièrement difficiles à caractériser, entre notation française et wisigothique, mais certainement pas lyonnaises65.
59Le ms. 431 de la BM de Lyon, que Solange Corbin a également intégré à sa liste, contient des Evangiles du IXe siècle ainsi que quelques textes patristiques. Le volume a vraisemblablement été copié dans le Nord de la France, peut-être dans la région de Saint-Amand, mais il est arrivé à Lyon dès le IXe siècle, où il a reçu des annotations de Florus66. Ce manuscrit est bien connu des musicologues en raison des lettres qui précisent la manière dont doivent être cantillés les textes de la Passion. Quelques signes isolés peuvent être observés sur les débuts de phrases et les premières syllabes de certains mots : on reconnaît quelques formes de pes et de quilisma mais faut-il considérer cela comme des neumes ou plutôt comme des signes de cantillation ? Quoi qu’il en soit, il nous semble imprudent de les identifier comme spécifiquement lyonnais.
60Le ms. lat. 2832, un autre florilège du IXe siècle, proviendrait de l’abbaye de Saint-Claude à qui il aurait été donné par son prévôt, Mannon, mort en 880. Une mention portée directement sur le manuscrit rappelle ce don67. Ce manuscrit présente quelques notations additionnelles difficiles à caractériser. Solange Corbin parle d’une notation bénéventaine sur quelques passages du chant de la Sibylle (f. 123v-124)68 et de neumes français « très anciens » (f. 62) avec une clivis « qui tient le milieu entre le breton et le paléo-franc69 ». La pièce concernée est une hymne en l’honneur des saints Jean et Paul dont les deux premières lignes ont reçu quelques signes épars (on reconnaît punctum, pes, virga, clivis, quilisma) plus clairs que le texte. Toutes ces graphies nous semblent difficiles à caractériser comme lyonnaises.
61Solange Corbin mentionne dans sa liste des sources en notation lyonnaise un autre manuscrit du IXe siècle, BnF lat. 2812. Il s’agit d’un sacramentaire que R. Amiet juge lyonnais mais qui est passé par la suite à l’usage d’Arles. Fa Bénédiction de l’eau et l'Exultet comportent quelques neumes contemporains ou peu postérieurs à la copie, de main aquitaine aux f. 96v-97, de main française aux f. 39-41. On imagine sans peine le lien entre les neumes aquitains et Arles. Quant à la main française, est-elle lyonnaise ? S. Corbin reste prudente et parle de neumes « franco-lyonnais70 ». Le caractère lyonnais de la notation nous paraît assez contestable : la virga fine et droite et le pes se terminent par un très léger « lâcher de plume » au sommet qui n’a rien à voir avec la terminaison effilée des même neumes à Lyon. Les hastes montantes sont dépourvues de toute ondulation. Enfin, l'oriscus est placé très haut par rapport à la virga lorsqu’il forme pressus avec cette dernière, ce qui n’est pas du tout habituel dans la notation lyonnaise.
62Un dernier manuscrit cité par Solange Corbin appelle quelques remarques71. Il s’agit d’un missel conservé à la BAV, Barb. lat. 564, de provenance incertaine. R. Amiet ne l’inclut pas dans son catalogue des manuscrits liturgiques lyonnais. H. M. Bannister le situe quelque part entre l’Auvergne, le Dauphiné, le sud de la vallée du Rhône et la Provence72. Le sanctoral de ce missel inclut quelques figures de saints qui pourraient effectivement faire songer au sud de la vallée du Rhône : saint Trophime (Arles), saint Andéol, saint Théodorit (Uzès). Par ailleurs, deux autres saints sont mis en avant, saint Ménat et saint Marcellin, qualifiés respectivement de « almi patris nostri », de « patronis [sic] nostri » et « egregius huius <domus> custos assiduus ». H. M. Bannister évoque, non sans précautions, une origine à Saint-Marcellin dans le Dauphiné. Curieusement, les tables des Monumenti Vaticani indiquent « Saint-Marcellin (Provence) » : le glissement du Dauphiné à la Provence est-il né du fait que saint Marcellin est le premier évêque et patron de la ville d’Embrun dans les Alpes provençales ? Il existe, du reste, une abbaye placée sous le patronage de ce saint à Embrun, que H. M. Bannister ne mentionne pas dans sa notice. Quoi qu’il en soit, le rapprochement, dans ce missel, entre les figures de saint Marcellin et de saint Ménat inviterait plutôt à songer au Sud-Est du Massif Central : tandis que saint Ménat est vénéré plus particulièrement en Auvergne, le corps de saint Marcellin a été transporté d’Embrun vers le diocèse du Puy au Xe siècle et placé dans une abbaye fondée sous ce vocable. Le sanctoral de ce missel pourrait ainsi porter les traces du trajet effectué par le corps de saint Marcellin, des Alpes provençales au Massif Central, en passant par la vallée du Rhône et les Cévennes.
63En ce qui concerne la notation musicale, H. M. Bannister relève la présence de plusieurs mains, deux françaises et une aquitaine. La main prédominante, française, est jugée « trop lyonnaise » (sic) pour permettre de localiser, d’après lui, le manuscrit dans la partie méridionale de la vallée du Rhône. Il est vrai qu’on associe plus volontiers les régions citées à la notation aquitaine qu’à la notation française. Pourtant, des notations de type français ou franco-italien sont attestées dans le Sud de la vallée du Rhône et en Provence (Apt, Gap)73 jusqu’au XIe siècle au moins. La notation du ms. 564 est-elle vraiment lyonnaise ? Nous n’avons pas eu accès à l’original de ce manuscrit et préférons ne pas nous prononcer de manière définitive sur un volume qui paraît assez complexe. Le f. 74, reproduit dans les Monumenti Vaticani, révèle des graphies qu’on hésite beaucoup à classer comme lyonnaises malgré le tracé légèrement ondulé de la virga et du pes, la cambrure du torculus, la présence de quelques descentes de climacus liées et de quilisma en dents de scie. Certains aspects de l’écriture nous éloignent des usages lyonnais, notamment la variété des signes de liquescence et leur tracé plus « exubérant » que dans les sources lyonnaises, ainsi que l’absence de torculus en 8 couché.
Témoins à ajouter à la liste de Solange Corbin
- Troyes, Médiathèque 1742, Xe siècle
64Un fragment de 4 feuillets (f. 1-4) d’antiphonaire se trouve en tête du ms. Troyes 1742, un recueil contenant des œuvres d’Alcuin et de divers auteurs chrétiens. R. Amiet date ce fragment du Xe siècle sans faire mention de la présence de notation musicale74. Il s’agit d’un antiphonaire à l’usage de l’abbaye Saint-Claude, comme le montre la présence de la fête de saint Oyan (Eugendus, fêté le 1er janvier). L’ordre des feuillets a été malmené lors de la reliure : le bifeuillet extérieur (f. 1 et f. 4) est plié à l’envers. On retrouve l’ordre du calendrier en commençant par les f. 4, 4v (saint Jean l’Évangéliste75), puis les f. 1, 1v, 2, 2v, 3, 3v (qui se terminent avec l’office incomplet de sainte Agathe).
65L’écriture du texte dénote quelques archaïsmes comme la présence de « a » ouverts. Pour l’essentiel, ce fragment ne semble pas avoir été préparé pour être noté mais les quelques pièces neumées semblent contemporaines de la copie du texte et pourraient même être de la même main :
f. 1 col. A : quelques neumes sur le début des antiennes (non CAO) pour saint Oyan Quasi lampas totus splendens et Plebem tuam pater sancte (les neumes ont été repassés grossièrement par une main postérieure).
f. 1v col. A : répons bref Venit Hiesus a Nazaret V. Et vox facta est ainsi que le début du répons bref Factum est autem V. Venit Hiesus (le verset n’est pas noté).
f. 3 col. A : antienne d’invitatoire Ecce venit ad templum (CAO 1072).
f. 3v col. A: antienne Homo erat in Hierusalem (CAO 3127).
66La notation musicale révèle des graphies typiquement lyonnaises, en dépit de son axe penché vers la droite. La virga présente un sommet effilé légèrement incurvé à droite, la haste montante du pes est typiquement ondulée, clivis, torculus sont conformes aux graphies lyonnaises. On rencontre les deux formes du quilisma ainsi que des climacus et pes subpunctis aux descentes liées en dents de scie. Malheureusement, toutes les formes neumatiques ne sont pas représentées dans ces brefs passages notés ; on ne trouve aucun exemple de torculus contourné.
- Lyon, AD du Rhône, 1 J 1272, Xe-XIe siècle
67Deux feuillets issus d’un livre de chant noté en neumes lyonnais ont été mis au jour parmi un ensemble de fragments et défaits de reliure cotés 1 J 1272 aux AD du Rhône. Le document fait apparaître la fin d’un office De Sapientia et le début d’un office du IVe dimanche de l’Avent. Les chants sont notés dans un module plus petit que les lectures que les accompagnent, selon l’usage pour les bréviaires et les missels, mais ici, le texte est copié à longues lignes et non en colonnes, à la différence des bréviaires plus tardifs. L’écriture du texte et la présence de quelques archaïsmes (ligatures à l’intérieur des mots, avec des majuscules, type « Nt ») incitent à dater ce fragment des premières années du XIe siècle. La notation musicale offre un panorama particulièrement précoce et complet des graphies neumatiques lyonnaises, que l’on retrouve, quasi identiques, dans les autres témoins du XIe siècle et des premières années du XIIe siècle. On remarquera que dans ce manuscrit, le porrectus ressemble à celui des sources originaires de l’abbaye de Saint-Claude, et non à celui utilisé dans les sources originaires de Lyon même.
- Lyon, AD du Rhône, 10 G 1042, XIe siècle
68Détaché de la reliure d’un recueil du XVe siècle coté 10 G 1042 aux Archives départementales du Rhône, ce fragment est issu d’un bifeuillet d’antiphonaire séculier, sévèrement rogné et en piteux état. Il n’est pas signalé par S. Corbin ; R. Amiet le situe au XIe siècle, mais ne dit rien de la présence de notation musicale76. La partie lisible de ce document contient les antiennes d’un office de la Septuagésime. L’examen paléographique ne peut être que limité mais la notation musicale, de petit module, paraît néanmoins soignée. On reconnaît les principaux neumes de la notation lyonnaise : virga, premier élément de la clivis et montée du pes légèrement ondulés, torculus cambré, étroit et pointu, quilisma en boucle ou en dents de scie, horizontal ou légèrement ascendant, oriscus court et un peu large, etc. Malheureusement, les chants notés sur ce document, peu ornés, n’ont recours qu’à un nombre limité de graphies et ne donnent pas un aperçu complet des formes neumatiques.
- Archives départementales du Rhône, 1 J 659, fin XIe ou début du XIIe siècle
69Un cahier de 8 feuillets qui ne semble jamais avoir été signalé par le passé a été mis au jour lors de nos recherches aux Archives départementales du Rhône. Il provient d’un antiphonaire séculier dont les modestes dimensions (23,5 x 16,5 cm ; justification 19 x 12,5 cm), la présentation serrée (21 lignes par page), la décoration minimaliste, le style des rubriques, enfin bien sûr, l’écriture et la notation musicale, fine et de très petit module, font fortement penser à l’antiphonaire du ms. BM, Lyon 537. Si l’on se penche sur le contenu de ce fragment, il apparaît qu’en effet, ce cahier vient compléter la lacune qui se trouve entre les f. 140v et 141 du ms. 537. Le f. 140v du ms. 537 se termine sur la rubrique annonçant la fête de Pâques, tandis que le fragment des AD du Rhône commence justement, sans rubrique, avec l’antienne d’invitatoire des matines de Pâques suivie de trois antiennes avec leurs psaumes puis de la série des répons, f. 1-1v. Le temporal se poursuit jusqu’à la Pentecôte, viennent ensuite quelques rubriques consacrées au commun des saints, puis le début du sanctoral des mois de mai et juin : Philippe et Jacques, Jean-Baptiste, Jean et Paul, Pierre. Le fragment 1 J 659 se termine avec le début des répons de matines de saint Pierre, tandis que le f. 141 du ms. 537 reprend la suite77.
- Annecy, bibliothèque de l’Académie salésienne ms. 2, 1re moitié du XIIe siècle
70Ce manuscrit est un ouvrage composite qui se trouvait autrefois à la bibliothèque du Grand séminaire d’Annecy78. La partie qui nous intéresse est un fragment de libellas (f. 1-1v) contenant l’un des plus anciens témoins de l’office pour la fête de la Conception de la Vierge (8 décembre), Gaude mater ecclesia. Solange Corbin ne cite pas ce fragment dans sa thèse, mais elle en a eu connaissance plus tard, à l’occasion de ses recherches sur l’office en quesdon79. De son point de vue, l’origine du document ne fait pas de doute, puisque sa notation musicale est lyonnaise et que cette notation « n’est pratiquement pas sortie de Lyon80 ». La virga, le pes, la clivis, le torculus, le porrectus, les graphies égrénées ou liées de climacus, le quilisma sont en effet caractéristiques de l’écriture lyonnaise. On ne trouve pas, toutefois, d’exemple de torculus contourné. La notation, quoique légèrement postérieure, rappelle celle du fragment d’antiphonaire séculier conservé aux Archives départementales sous la cote 10 G 1042. Au recto du f. 1 du fragment d’Annecy a été transcrit le Gloria laus de Théodulphe d’Orléans dans une notation semblable, mais très effacée.
71Ce fragment de l’office Gaude mater est intéressant, quoique trop succinct pour permettre une identification plus précise. Comme on sait, la dévotion particulière qui s’est développée autour de la fête de la Conception de Marie, à Lyon, au début du XIIe siècle, a été dénoncée par saint Bernard dans une célèbre lettre adressée aux chanoines de la cathédrale de Lyon, à la fin des années 1130. Les sources liturgiques lyonnaises qui ont été conservées sont nettement postérieures à ces événements puisqu’elles s’échelonnent des années 1200 à la mi-XIIIe siècle. Elles transmettent pour cette fête un formulaire tout à fait différent dont le contenu est presque entièrement emprunté à celui de la Nativité de la Vierge : l’office Egredietur81. Si le fragment d’Annecy est d’origine lyonnaise, comme le suggère sa notation musicale, on serait tenté de penser que l’office Gaude mater a connu une certaine diffusion à Lyon ou dans le diocèse de Lyon au début du XIIe siècle82. Dans quelle mesure ce fragment en notation lyonnaise peut-il refléter l’usage lyonnais du début du XIIe siècle, alors que la par suite, c’est un autre formulaire, plus neutre, qui s’est imposé ? Une certaine prudence s’impose pour plusieurs raisons. Tout d’abord, il s’agit d’un libellas et non d’un livre de chant complet. Or un office recopié sur quelques feuillets de parchemin isolés n’a pas la même légitimité qu’un formulaire inclus dans un antiphonaire à l’usage d’une institution précise. D’autre part, l’office Gaude mater semble d’origine monastique, comme l’a montré Solange Corbin en se fondant sur la stabilité du formulaire monastique par rapport aux versions séculières, qui divergent entre elles83. Le fragment de libellas conservé à Annecy est de cursus monastique : il comporte quatre psaumes aux vêpres et non cinq comme dans l’usage séculier. Il ne peut refléter ni l’usage de la cathédrale, ni celui d’une église séculière du diocèse de Lyon. Bien d’autres hypothèses sont possibles et notre fragment pourrait être en relation avec un établissement monastique indépendant de la tutelle du diocèse, mais proche de la région de Lyon. Même si l’office Gaude mater n’a peut-être jamais été en usage dans le diocèse de Lyon, sa diffusion est largement attestée dans les régions voisines, en particulier à Genève, Lausanne, Sion et jusqu’à Aoste84.
- Sion, Archives du chapitre, fragment no 5, XIe-XIIe siècle
72Plusieurs fragments originaires du prieuré de Saint-Romain de Granges-Ayent dans le Valais, une dépendance de l’abbaye de Saint-Martin d’Ainay, sont signalés dans le catalogue de R. Amiet85. Le fragment no 5 est un bifeuillet de bréviaire contenant des répons notés pour la Toussaint et la fête de saint Martin. La main principale est incontestablement lyonnaise. En haut de la colonne droite du f. 4 le répons (tronqué du début) Oculis a manibus (CAO 7310) a été noté par une autre main française, mais pas lyonnaise, qui utilise notamment une virga courte et pourvue d’un lâcher de plume vers la gauche. Les fragments no 1 à 3, issus d’une autre unité codicologique, ne sont pas non plus notés en neumes lyonnais, contrairement à ce qu’affirme R. Amiet, mais dans une notation de type sangallien.
73Le prieuré de Granges-Ayent devait probablement disposer de livres ou de modèles issus de l’abbaye dont elle dépendait, ou de copistes venus de Lyon, mais il est assez probable que la culture neumatique de cette région de la Suisse francophone ait été marquée par des influences diverses, comme le suggèrent ces quelques fragments. Dans tous les cas, l’exemple des fragments de Sion montre qu’il est difficile d’assigner un type de notation à une origine géographique trop circonscrite. La notation lyonnaise s’est certes pratiquée avant tout à Lyon et dans le diocèse de Lyon, comme le soulignait Solange Corbin86, mais aussi un peu au-delà, vers la Suisse et le Dauphiné, comme le montrent non seulement ce fragment valaisan, mais aussi le pontifical de Grenoble (BM ms. 140) voire les fragments conservés à Annecy.
- Lyon, BM, Coste 341, XIIIe siècle
74Les feuillets 55 à 62 de ce volume (un obituaire à l’usage de la collégiale Saint-Paul de Lyon) comportent des pièces pour les Rogations suivies de litanies87. Bien que ce détail ne soit pas signalé par R. Amiet, on constate que les incipits des répons et des antiennes De quacumque tribulatione (f. 55-55v) sont pourvus d’une notation neumatique lyonnaise. Celle-ci rappelle beaucoup la notation du missel Lyon, BM 5139 et semble contemporaine, c’est à dire de la première moitié du XIIIe siècle. On observe également, en plusieurs endroits, la présence de la lettre significative « t ».
La notation lyonnaise et les notations neumatiques de la zone de transition
Une notation française atypique par son conservatisme
75Le conservatisme de Lyon ne concerne pas seulement les textes liturgiques mais se manifeste, de manière éclatante, dans les usages en matière de notation. Alors que toutes les notations françaises adoptent des lignes de portée au cours du XIIe siècle et que la notation carrée s’impose très largement au siècle suivant, les scriptoria lyonnais perpétuent une écriture neumatique adiastématique très au-delà de 1200, au point qu’on puisse encore observer, dans les ms. BAV, Barb. 559 et Lyon, BM 5139 l’emploi d’un système de lettres significatives depuis longtemps abandonné dans les autres sources françaises. Ces lettres ont-elles été utilisées pour pallier les insuffisances d’une notation qui commençait à être perçue comme archaïque ?
76La survivance tardive de la notation neumatique lyonnaise est circonscrite aux institutions séculières de la ville proprement dite. Au moment où elle acquiert son identité graphique, vers le début du Xe siècle, la notation lyonnaise est principalement connue par deux témoins monastiques issus de l’abbaye de Saint-Claude et non par des sources originaires de Lyon même. À partir de la seconde moitié du XIIe siècle, le phénomène s’inverse : il semble que le périmètre de diffusion de la notation lyonnaise se soit resserré autour de Lyon. Hormis le Pontifical de Grenoble, toutes les sources en neumes lyonnais postérieures à 1150 répertoriées jusqu’ici sont en relation avec des églises séculières de Lyon. Étant donné l’étonnante stabilité des graphies observées, il ne serait pas étonnant quelles aient été produites dans un même scriptorium, peut-être celui de la cathédrale, sorte de conservatoire de cette écriture lyonnaise, rétif à toute forme d’évolution jusqu’en 1250 au moins. Entre les dernières décennies du XIIIe siècle et le début XIVe siècle, la situation change du tout au tout et les neumes lyonnais disparaissent des livres de chant produits à Lyon, au profit d’une notation carrée qui n’a rien à voir avec l’ancienne écriture. Ce changement a-t-il un lien avec l’histoire de la ville ? Il semble en tout cas coïncider avec le moment où la cité épiscopale, jusque-là quasi indépendante, est officiellement rattachée au royaume de France (1312).
77En dehors de la Cité des Gaules, la notation lyonnaise a probablement cédé du terrain dès le courant du XIIe siècle, au moment où la diastématie s’impose en entraînant d’inévitables évolutions dans les graphies neumatiques. Premier témoin de l’émergence d’une notation lyonnaise, l’abbaye de Saint-Claude est aussi le premier témoin de son recul à partir du XIIe siècle : certaines graphies du bréviaire Besançon, BM 143 s’éloignent de la plus « pure » tradition neumatique lyonnaise, comme si le style de cette notation était en train de se diluer dans une écriture française moins fortement caractérisée. Rappelons enfin que le plus ancien témoin en notation carrée conservé pour le diocèse de Lyon vient, lui aussi, de Saint-Claude : il s’agit d’un lectionnaire-antiphonaire du milieu du XIIIe siècle88. La notation lyonnaise a-t-elle été plus tôt remplacée par les nouvelles formes d’écriture sur lignes dans le diocèse que dans la ville proprement dite ? En dehors du lectionnaire-antiphonaire de Saint-Claude, aucune source ne permet, à ce jour, de confirmer une telle hypothèse en ce qui concerne les établissements de fondation ancienne. Quant aux fondations plus récentes, affiliées aux nouveaux ordres monastiques comme les Chartreux, elles n’ont pas laissé beaucoup de témoins antérieurs au XVe siècle, mais tout porte à croire qu’elles ont suivi les usages propres à leur ordre.
Entre Ouest et Est : Lyon et les notations de la zone de transition
78Certaines spécificités graphiques de la notation lyonnaise sont particulièrement intéressantes dans la mesure où elle s’intègrent dans un ensemble plus vaste de notations couvrant la partie Est de la France actuelle, Franche-Comté et Bourgogne au Nord, couloir du Rhône jusqu’à la Provence au Sud, Alpes franco-suisses et franco-italiennes à l’Est. Après le partage de Verdun, ces régions ont appartenu à la Lotharingie, constituant par la suite une zone de transition entre la Francie occidentale et les régions germaniques. En ce qui concerne le répertoire musical, cette partition de l’Empire en régions Est, Ouest et zone de transition a été déterminante pour l’histoire du chant liturgique. Il semble qu'elle l’ait été aussi du point de vue des usages en matière d’écriture musicale. Les notations de la zone de transition sont assez différentes des notations françaises situées plus à l’Ouest, notamment celles du Val de Loire (Tours, Angers), de la région parisienne (Saint-Denis, Saint-Maur-des-Fossés, Saint-Germain-des-Prés, Chartres), de la Picardie (Corbie) voire de la Normandie, selon les époques concernées89.
79L’une des différences les plus saillantes entre la zone de transition et l’Ouest tient à la terminaison des hastes de certains neumes, plus particulièrement la virga, mais aussi, souvent, le pes. À l’Ouest, on observe partout un retour de plume à gauche ou plus rarement à droite au sommet des hastes montantes ; cette habitude graphique, repérable dès le Xe siècle, ne fait que s’accentuer à mesure que l’on avance dans le temps. À partir du moment où l’on passe sur lignes, cela donne lieu à une sorte de tête d’épingle ou de trait épais, qui devient un petit carré, futur carré des graphies de virga et de pes de la notation qui porte ce nom. Les sources de la zone de transition, comme la notation lyonnaise, les notations bourguignonnes (Dijon, Autun, Auxerre) et les rares exemples de notation française que l’on peut observer plus au Sud (Apt, Provence) présentent une virga en forme de trait simple, sans retour de plume ni décrochement vers la gauche ou la droite ; de même pour la haste montante du pes. Ces notations semblent également plus enclines à utiliser des graphies cursives, d’où la présence très fréquente de signes liés (climacus, pes subpunctis) ou contournés. Ces graphies se rencontrent aussi plus à l’Ouest (Corbie, Fleury), mais elle restent rares et disparaissent généralement après le XIe siècle.
80Certaines notations de la zone de transition ont sans doute des points communs avec les notations germaniques, pas seulement sur le plan graphique, mais peut-être aussi sur le plan musical. Par exemple, la notation lyonnaise utilise des groupes de points rapprochés, parfois légèrement arrondis, ainsi que des virgae de petite taille qui équivalent vraisemblablement aux strophae et aux bi et tri-virgae de la notation sangallienne. Les coupures neumatiques correspondent assez souvent à l’usage sangallien, ce qui est rarement le cas dans les notations françaises, a fortiori dans les sources postérieures au Xe siècle. Une étude fondée sur la comparaison des mélodies, pour la notation lyonnaise et pour d’autres notations de la zone de transition, permettrait d’aller au-delà de simples remarques et de déterminer si, réellement, ces notations sont plus attentives aux indications agogiques que ne le sont la plupart des notations françaises étudiées jusqu’ici.
Lyon et le paysage neumatique du Sud-Est de la France
81La présence d’une forme très particulière de torculus contourné dans la notation lyonnaise n’a jusqu’ici jamais été commentée par les spécialistes, à peine est-elle signalée par W. Arlt dans l’apparat éditorial de Die Neumen. Elle est pourtant d’une grande importance pour la compréhension de l’histoire des notations neumatiques dans les régions allant des Pyrénées aux Alpes italiennes et englobant un grand quart Sud-Est de la France actuelle.
82Des formes équivalentes de ce torculus ont été signalées depuis longtemps dans les notations du Nord de l’Italie (Bologne), des Alpes franco-italiennes (Novalèse, Turin, Gap), en Provence (Apt) et dans les notations catalane et wisigothique. Rares sont les exemples de ce type de torculus rencontrés en dehors de ce périmètre. Les quelques occurrences observées à Dijon et Fleury concernent des sources relativement isolées plutôt qu’un type de notation à proprement parler. Eles sont généralement reliées à une influence soit italienne (Guillaume de Volpiano à Dijon), soit hispanique (Théodulphe d’Orléans à Fleury).
83À Lyon, dans les Alpes franco-italiennes, en Provence, la présence du torculus contourné semble constitutive des notations de ces régions et révélatrice de l’influence probablement hispanique qui a accompagné leurs premiers développements, sans doute à partir du IXe siècle. La présence de clercs d’origine espagnole a marqué la culture et les usages en matière d’écriture dans une grande partie de la zone de transition, notamment dans le Sud-Est. Lyon a été l’un des principaux lieux de convergence de la diaspora hispanique à l’époque carolingienne : les personnalités les plus connues sont Leidrade, Agobard, Claude de Turin, mais il faut penser à tous ceux, plus anonymes, qui étaient venus avec des livres liturgiques ou qui ont pu exercer leurs talents au sein de scriptoria. Lyon est aussi le trait d’union entre la vallée du Rhône et les vallées alpines, en direction du Sud-Est et de l’Italie. Cette ville n’est pas seulement l’appendice méridional des quatre provinces lyonnaises délimitées par S. Corbin dans sa thèse, regardant vers la vallée de la Saône et la Bourgogne au Nord, vers la Suisse à l’Est, mais elle est aussi le point de convergence d’une culture plus méridionale, partagée par les régions disposées le long de la vallée du Rhône, Dauphiné, Provence, avec des prolongements vers les Alpes franco-italiennes, le Languedoc et les Pyrénées. En Dauphiné, en Provence et dans le sud de la vallée du Rhône, tout comme en Languedoc, rares sont les sources musicales qui témoignent de ces liens : ces régions ont laissé peu de sources antérieures au XIIe siècle qui ne soient pas déjà passées à la notation aquitaine voire à la notation carrée. Un petit nombre de sources et de fragments en notation française et franco-italienne ont cependant été mises au jour au cours des dernières années. Elles confirment l’existence d’une culture neumatique commune aux régions situées entre Alpes et Pyrénées, dans un grand quart Sud-Est de la France actuelle, comme nous avons tenté de le montrer récemment à propos de la notation franco-italienne dite « de Novalèse »90.
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84L’exceptionnelle longévité de sa tradition neumatique fait de Lyon un cas isolé au sein de la famille française des notations neumatiques. Mais, sur le plan paléographique, la tradition neumatique lyonnaise n’est pas si atypique qu'elle pourrait le sembler de prime abord : il faut la rapprocher non pas des notations françaises de l’Ouest, mais plutôt de celles d’un Sud-Est encore trop peu exploré et indiscutablement moins riche en sources anciennes. Les sources de la notation lyonnaise sont suffisamment nombreuses pour nous permettre d’observer une culture neumatique influencée par les écritures ibériques, qui s’est diffusée des Pyrénées aux Alpes et le long de la vallée du Rhône à partir du IXe-Xe siècle, se déclinant probablement en variantes régionales. La notation lyonnaise est une survivance tardive de ces notations, qui, ailleurs, ne semblent guère avoir laissé de traces au-delà du XIe siècle.
Abréviations
85AD : Archives départementales
86BM : bibliothèque municipale
87BnF : Bibliothèque nationale de France
88BAV : Biblioteca Apostolica Vaticana
89CAO: Corpus antiphonalium offlcii, éd. R.-J. Hesbert, Rome, 1963-1979, 6 vol.
90CMEL : Catalogue des manuscrits en écriture latine portant des indications de date, de lieu ou de copiste (éd. C. Samaran et R. Marichal)
91CMN : Catalogue des manuscrits notés des bibliothèques publiques de France (éd. C. Meyer)
92MANNO : Manuscrits notés en neumes d’Occident (éd. M.-N. Colette et C. Cazaux-Kowalski91)
Notes de bas de page
1 Solange Corbin, Die Neumen, éd. Wulf Arlt, Köln, Arno Volk Verlag-Hans Gerig KG, 1977.
2 Solange Corbin, La Notation neumatique. Les quatre provinces lyonnaises : Lyon, Rouen, Tours et Sens, thèse, université de Paris, faculté des lettres, 1957, 2 vol.
3 http://saprat.ephe.sorbonne.fr/manuscrits-notes-en-neumes-en-occident-manno--26.htm
4 Dom Grégoire Sunyol, Introduction à la paléographie musicale grégorienne, Tournai, 1935, p. 384-386 et pl. 122 : « un missel de Lyon, de notation française, nous donne un exemple d’écriture aux lignes verticales et aux profils nettement anguleux ».
5 Corbin, Die Neumen, op. cit., p. 113 : « Mann könnte beinahe von einer unabhängigen Schrift Lyons und seines Bistums sprechen, wiesen nicht die ältesten Zeugnisse auf eine unleugbare Abhängigkeit von anderen französischen Neumen hin » (traduit par l’auteur de ces lignes).
6 Corbin, La Notation..., op. cit., vol. 1, p. 194.
7 Corbin, La Notation..., op. cit., vol. 1, p. 197.
8 Dans cet inventaire, Solange Corbin signale également un certain nombre de sources plus tardives en notation carrée.
9 Jacques Gadille (dir.), Le Diocèse de Lyon, Paris, 1983, p. 62-66.
10 Eusèbe De Césarée, Lettre des chrétiens de Vienne et de Lyon, Histoire Ecclésiastique, V-l, 1-4, éd. G. Bardy, Paris, 1933, p. 6-28 (Sources chrétiennes ; 41).
11 Sur les débuts du christianisme à Lyon, voir Jacques Gadille (dir.), Le Diocèse de Lyon, op. cit., chapitres I à III ; Topographie chrétienne des cités de la Gaule des origines au milieu du VIIIe siècle. IV : province ecclésiastique de Lyon (Lugdunensis Prima), Paris, 1986. Jean-François Reynaud, Lugdunum christianum. Lyon du IVe au VIIIe s. : topographie, nécropoles et édifices religieux, Paris, 1998.
12 Saint-Irénée, le moins important de ces chapitres, fut transformé en chapitre de chanoines réguliers vers 1100. Cf. Michel Rubellin, « Les Archevêques de Lyon, les abbayes lyonnaises et la Réforme grégorienne », L'Abbaye d'Ainay des origines au XIIe siècle, éd. Jean-François Reynaud et François Richard, Lyon, 2008, p. 193-195.
13 En 1642, l’étendue du diocèse est réduite par la création de l’évêché de Saint-Claude dans le Jura.
14 Bruno Galland, Deux archevêchés entre la France et l'Empire : les archevêques de Lyon et les archevêques de Vienne du milieu du XIIe siècle au milieu du XIVe siècle. Rome, 1994, p. 1-7.
15 Victor Leroquais, Compte rendu de l’ouvrage de Dom Denys Buenner, Revue d'histoire de l'Église de France, vol. 22, no 94, 1936, p. 55-57.
16 Le calendrier et les particularités du répertoire chanté (alléluias, répons) de la liturgie lyonnaise sont fournis par Robert Amiet, Les Manuscrits liturgiques du diocèse de Lyon : description et analyse, Paris, 1998, p. 18-25 (ci-après : Amiet suivi du numéro de notice).
17 Deux prosaires antérieurs au concile de Trente sont conservés à la BM de Lyon, ms. 525 (graduel-prosaire, XVe s., Amiet, no 8) et ms. 6263 (prosaire de la collégiale Saint-Just, XVIe s., Amiet, no 219). Trois autres prosaires d’époque moderne (XVIIe et XVIIIe s.) sont signalés par Amiet sous les nos 218, 220 et 221.
18 David Hlley, « Cluny, sequences and tropes », dans La Tradizione dei tropi liturgici : Atti dei Convegni sui Tropi Liturgici, Parigi (15-19 ottobre 1985) – Perugia (2-5 settembre 1987) organizzati dal Corpus Troporum, éd. C. Leonardi et E. Menesto, Spoleto, 1990, p. 125-138.
19 Leroquais, compte rendu cité note 15, p. 56.
20 Rubellin, « Les Archevêques de Lyon... », art. cit., p. 181-201.
21 Ibid., p. 193-195.
22 Sunyol, Introduction à la paléographie..., op. cit., p. 384-386, pl. 122.
23 Corbin, Die Neumen, op. cit., p. 113, lignes 12-13.
24 Christelle Cazaux-Kowalski, « Peut-on encore parler de notation de Novalèse ? », Études grégoriennes, XXXIX, 2012, p. 73-96.
25 Parmi les nombreux manuscrits attribués à Fleury, deux utilisent une graphie de torculus contourné, BAV Reginensis lat. 596 et 1709, du XIe siècle (cf. Henry Marriott Bannister, Monumenti Vaticani di paleografia musicale latina, Leipzig, 1913, no 123 et pl. 15b ; no 129 et pl. 16b). Quelques témoins de la notation de Fleury ont été recensés parmi les manuscrits conservés à la BnF dans le catalogue MANNO, mais ils ne font pas apparaître ce type de torculus : latin 5763, 6365, 6401, 7520, 7193.
26 Corbin, La Notation..., op. cit., vol. 1, p. 198.
27 Ibid., vol. 1, p. 198.
28 Lyon, BM 5139 et 6167, tous deux du XIIIe siècle, ne l’utilisent plus.
29 Voir ci-dessous la description de ces différents manuscrits.
30 Stefan Engels, « Die Bedeutung der Buchstaben im Cod. Barb. Lat. 5559 (XII.2) der Bibliotheca Vaticana », Cantus Planus, Papers Read at the 6th Meeting, Eger, Hungary, 1993, Budapest, Hungarian Academy of Sciences, Institute for Musicology, 1995, p. 187-203.
31 Lyon, BM 5947 : cf. Robert Amiet, no 160. Il n’est pas certain que Solange Corbin ait eu une connaissance précise de ce manuscrit : il n’est cité ni dans sa thèse, ni dans Die Neumen. Ce missel se trouvait dans une collection privée à l’époque où Solange Corbin rédigeait sa thèse : elle le signale mais indique qu'elle n’a pas pu y avoir accès.
32 Corbin, La Notation., op. cit., vol. 1, p. 204-203. Amiet, nos 13, 27, 23, 25 et 153.
33 Collections d'Alsace, de Franche-Comté et de Lorraine. I. Colmar, bibliothèque municipale. Turnhout : Brepols, 2006 ; Collections d'Alsace, de Franche-Comté et de Lorraine. II. Besançon, Épinal, Metz, Mulhouse, Nancy, Rambervillers, Saint-Dié, Saint-Mihiel, Salins-les-Bains, Sélestat, Strasbourg, Verdun, Vesoul. Turnhout : Brepols, 2008 ; Collections de Champagne-Ardenne. Châlons-en-Champagne, Charleville-Mézières, Chaumont, Langres, Reims, Troyes, Vitry-le-François. Turnhout : Brepols, 2010. En ligne : http//www.musmed.fr/CMN.
34 http://saprat.ephe.sorbonne.fr/manuscrits-notes-en-neumes-en-occident-manno--26.htm
35 Amiet, no 164. Les fragments (défaits de reliure) autrefois conservés sous la cote 75 J 253 sont désormais consultables sous la cote 1 J 662, mais celui portant la lettre A a disparu du lot.
36 Corbin, La Notation..., op. cit., vol. 1, p. 204.
37 Ibid., vol. 1, p. 204 et vol. 3, pl. 5 ; Amiet, no 106.
38 Amiet, no 251.
39 Les volumes du CMN concernant la Champagne et la Franche-Comté permettent de considérer que le tour de la question a été fait pour les fonds conservés dans les bibliothèques publiques de ces régions.
40 Corbin, La Notation..., op. cit., vol. 1, p. 190.
41 Amiet, no 264. Voir aussi Charles Samaran et Robert Marichal, Catalogue des manuscrits en écriture latine portant des indications de date, de lieu ou de copiste, V : Est de la France, Paris, 1965, p. 455 [ci-après CMEL] ; CMN 2 (Champagne-Ardenne), p. 156.
42 Dom Célestin Charlier, « Les Manuscrits personnels de Florus de Lyon et son activité littéraire », Mélanges E. Podechard, Lyon, 1945, p. 83.
43 Michel Huglo, Les Tonaires. Inventaire, Analyse, Comparaison. Paru, 1971, p. 316-317 (la datation proposée par M. Huglo est Xe-XIe s.).
44 Corbin, La Notation..., op. cit., vol. 3, pl. 2c.
45 Leroquais, Sacramentaires, op. cit., I, no 51. Amiet, nos 2, 20, 149 et 200. Pascal Collomb, « Le premier ordinaire connu à l'usage de la cathédrale Saint-Jean de Lyon (2e moitié du XIIe siècle) », Revue Mabillon, no 8 [n. s.], 1997, p. 13-51.
46 Voir infra.
47 En effet, le contenu et la présentation matérielle des f. 152 à 156v est hétérogène. Les f. 152-153v comportent uniquement des antiennes de l’office, notamment pour les dimanches après la Pentecôte, et se terminent sur le début des antiennes de vêpres pour saint Nicolas. Les f. 154-156v contiennent un fragment d’office monastique de saint Nicolas, où les répons de matines sont accompagnés de leurs leçons. Bien qu’il semble faire suite aux feuillets précédents par son contenu relatif à saint Nicolas, ce second fragment nous paraît issu d’une autre unité codicologique. Tout d’abord, il ne complète pas la partie manquante des vêpres du f. 153v. D’autre part, il est présenté à la manière d’un bréviaire (chants notés dans un module plus petit que les lectures) contrairement aux f. 152-153v.
48 Amiet, no 255.
49 Leroquais, Bréviaires, op. cit., I, p. 136-138.
50 La Notation..., op. cit., p. 199 et p. 203 ; Die Neumen, op. cit., p. 115.
51 Amiet, no 255.
52 CMEL V : Est de la France, Paris, 1965, pl. CCXXXIII (f. 13v, détail).
53 CMN 1/II, p. 26-27.
54 Amiet, no 181. Bannister, Monumenti Vaticani, op. cit., p. 46, no 161, tav. 20 ; p. 185, no 751 ; p. 194, no 932.
55 Seule une très brève étude a été consacrée à ce manuscrit et à la question des lettres significatives (Engels, « Die Bedeutung... », art. cit.).
56 Amiet, no 157.
57 Lyon, BM 5139, f 14v, 17v, 21, 24, 42v, 45, 51, 54, 55, 59v, 62v, 63, 63v, 91, 91v, 108, 118, 119v, 138, 139, 139v, 143v, 150, 157v, 213v, 215.
58 Amiet, no 106.
59 Par exemple, f. 5v sur l’incipit du répons Bethleem civitas.
60 Corbin, La Notation..op. cit., vol. 1, p. 204 ; Amiet, no 204 ; Collomb, « Le Premier ordinaire... », art. cit.
61 La Paléographie musicale (série 1, vol. 1, p. 142-145 et pl. XII, XIII et XIV) parle pour la pl. XII d’une « forme altérée de la notation italienne » ; Amiet (no 298) dit « lyonnaise-messine ».
62 Corbin, La Notation..., op. cit., vol. 1, p. 204 ; Amiet, no 251 (tonaire) ; M. Huglo, Les Tonaires..., op. cit., p. 353-355, en particulier p. 354, note 2 ; Hans-Jakob Becker, Das Tonale Guigos L. Ein Beitrag zur Geschichte des liturgischen Gesanges und der Ars Musica im Mittelalter, München, 1975, p. 171.
63 Corbin, La Notation..., op. cit., vol. 1, p. 206 ; Leroquais, Pontificaux, op. cit., I, p. 155-162, notamment f. 161 et 162. Ce manuscrit n’est pas recensé par R. Amiet puisqu’il n’est pas originaire du diocèse de Lyon.
64 Corbin, La Notation..., op. cit., vol. 1, p. 198-199.
65 Voir la notice [en ligne] du catalogue MANNO. Voir aussi Corbin, Die Neumen, op. cit., p. 25, 30, 36, 41, 172n ; Nancy Phillips, « Notationen und Notationslehren von Boethius bis zum 12. Jahrhundert », Die Lehre vom Einstimmigen liturgischen Gesang, Darmstadt, 2000, 4, p. 445, 500, 512.
66 Amiet, no 96. Concernant l’origine du manuscrit, nous nous fondons sur le catalogue en ligne des manuscrits mérovingiens et carolingiens de la BM de Lyon (http://florus.bm-lyon.fr/) et plus particulièrement la notice du ms. 431 (http://florus.bm-lyon.fr/description.php?cn=MS0431)
67 « Voto bonae memoriae Mannonis liber ad sepulchrum sancti Eugendi oblatus » (Cabinet des manuscrits de la Bibliothèque impériale, III, Paris, 1881, p. 260 et pl. 28, 2-3).
68 Sur ce point, voir l’étude plus récente de Nicole Sevestre, « La Tradition mélodique du Cantus Sibyllae », La Représentation de l’Antiquité au Moyen Âge. Wiener Arbeiten zur germanischen Altertumskunde und Philologie, 20, 1982, p. 269-283.
69 Corbin, La Notation., op. cit., vol. 1, p. 199 et 202 et vol. 3, pl. 2a.
70 Corbin, La Notation..., op. cit., vol. 1, p. 205. Sur ce manuscrit, voir Leroquais, Sacramentaires, op. cit., I, p. 59-60 ; Victor Saxer, « Observations codicologiques et liturgiques sur trois sacramentaires grégoriens de la première moitié du IXe siècle : Paris lat. 2812, Vatican Ottoboni lat. 313 et Reginensis lat. 337 », dans Mélanges de l'École française de Rome, 97, no 1, 1985, p. 23-43 ; Amiet, no 177.
71 Corbin, La Notation..., op. cit., vol. 1, p. 205-206.
72 Bannister, Monumenti Vaticani... op. cit., notices no 153 et 154, 244, 304a et 919, pl. 19a et 19b (voir notamment le f. 74 du manuscrit pl. 19b).
73 Apt, ms. 18 (tropaire du XIe s.) ; un fragment en notation « de Novalèse », BnF, nal 2444, Xe s., a récemment été mis au jour par M.-N. Colette (Colette, « Un nouveau Responsorial témoin de la notation de Novalèse (Paris, Bibliothèque nationale de France, n.a.l. 2444 f. 1-2, Xe s.) », Quod ore cantas corde credas. Studi in onore di Giacomo Baroffio Dahnk, sous la dir. de Leandra Scappaticci, Città del Vaticano, Libreria Editrice Vaticana, 2013, p. 433-462 ; sur la notation de ces deux manuscrits, cf. Cazaux-Kowalski, « Peut-on encore... », art. cit., p. 80-82).
74 Amiet, no 254.
75 Il s’agit bien de l’office du 27 décembre et non de la fête de saint Jean Porte Latine (6 mai) indiquée par R. Amiet.
76 Amiet, no 7.
77 La transition se fait sur le V. Beatus es Simon du R. Quem dicunt homines (CAO 7467).
78 Amiet, no 292. Le fragment est signalé sous son ancien lieu de conservation.
79 Corbin, « Miracula beatae Mariae semper Virginis », Cahiers de civilisation médiévale, vol. 10, 1967, p. 409-433 ; le fragment d’Annecy est cité p. 419. Il se trouve que les recherches de Solange Corbin ont porté pendant plusieurs années sur l’office de la Conception de la Vierge, au Portugal dans les années 1940 et à plusieurs reprises par la suite. L’article cité ci-dessus constitue sa publication la plus récente sur le sujet.
80 Corbin, « Miracula... », art. cit., p. 419.
81 Collomb, « L’Inscription liturgique de la Conceptio beate Marie dans le calendrier diocésain. Le cas lyonnais (XIIe-XVIe siècle) », L’Immaculée Conception : une croyance avant d’être un dogme, un enjeu social pour la Chrétienté, dans L’atelier du CRH, éd. par Eléonore Fournié et Séverine Berlier-Lepape, [mise en ligne le 17 avril 2012 : http://acrh.revues.org/4355].
82 Collomb, « L’Inscription liturgique... », art. cit., p. 6-8.
83 Corbin, « L’Office en vers Gaude mater ecclesia pour la Conception de la Vierge », Congresso internazionale di musica sacra, Roma, 1950, éd. Higinio Anglés, Tournai, 1932, p. 284-286.
84 Collomb, « L’Inscription liturgique... », art. cit., p. 6-8.
85 Amiet, no 289 (frag. 1-3) et no 290 (frag. 5).
86 Corbin, « Miracula... », art. cit., p. 419 et « L’Office en vers... », art. cit. p. 285.
87 Amiet, no 191.
88 AD Jura, ms. 11 (Corbin, La Notation.op. cit., vol. 1, p. 204 ; Amiet, no 258)
89 Les réformes opérées par Guillaume de Volpiano en Normandie semblent avoir infléchi temporairement la tradition neumatique, qui, au XIe siècle, se rapproche plutôt de celle de la Bourgogne, donc de la zone de transition, tout au moins dans les établissements réformés par le moine italien. À partir du XIIe siècle, l’écriture neumatique normande rejoint pleinement le groupe de l’Ouest.
90 Cazaux-Kowalski, « Peut-on encore parler... », art. cit., p. 87-88.
91 Christelle Cazaux-Kowalski, « Peut-on encore parler... », art. cit., p. 87-88.
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