Solange Corbin et les sources musicales du Portugal
p. 77-88
Texte intégral
Solange Corbin et le Portugal
1Selon qu’on la regarde depuis la France ou depuis le Portugal, l’année 1940 est marquée par des événements différents : l’invasion et l’occupation allemande de Paris, ou bien les célébrations nationalistes du huitième centenaire de l’indépendance du Portugal à Lisbonne. Même si Salazar affiche une photo de Mussolini sur sa table de travail, le Portugal, pour des raisons géopolitiques, restera neutre pendant la Deuxième Guerre mondiale.
2La guerre, avec ses horreurs, eut cependant des conséquences positives pour la connaissance de l’histoire, de la liturgie et de la musique religieuse du Portugal. Ne pouvant continuer son enseignement à l’université de Cracovie après 1939, l’historien médiéviste l’abbé Pierre David (1882-1955), obligé d’abandonner ses fonctions auprès de Pétain puis, sur les conseils du Maréchal lui-même, de quitter la France pour avoir trop critiqué l’ingérence allemande dans le gouvernement de Vichy, trouve un poste à l’université de Coimbra en 1941. Ses travaux, qui apportent à l’étude des sources médiévales une perspective internationale, vont renouveler l’horizon de l’enseignement et de la recherche au Portugal1. L’année suivante, Solange Corbin, qui avait déjà visité le pays en 1940, obtient une bourse et y séjourne pendant presque une année, au cours de laquelle elle suivra ses cours2. Le 19 mars 1942, elle est prise en photo (ill. 1)3 à Lisbonne, où elle fait une conférence à l’Institut français sur l’évolution de la musique chorale en France jusqu’à Josquin des Prés.
3Sa première publication, sept pages sur les livres liturgiques du XVe siècle du Musée d’Aveiro, sera imprimée à Coïmbra en 1943. Elle prépare en même temps sa thèse sur la musique religieuse médiévale, au Portugal, présentée en 1944 à Paris, qui sera revue en 1946 pendant un nouveau séjour portugais de deux mois, et augmentée avant sa publication en 1952. Les documents réunis au Portugal fourniront également le noyau de son second livre, sur la déposition liturgique du Christ le Vendredi Saint. Voici, par ordre de publication, la liste des travaux en rapport direct avec le Portugal, hormis les notices parues dans des ouvrages collectifs. Trois d’entre elles (signalées par un astérisque) ne sont pas mentionnées dans la bibliographie parue dans le New Grove Dictionary4.
1. *« Les livres liturgiques d’Aveiro », Coimbra, 1943 [Extrait de : Arquivo do Distrito de Aveiro, vol. 8, 1942, p. 5-11]
2. * « Notes sur le séjour et le mariage d’Alphonse III de Portugal à la Cour de France », Bulletin des études portugaises, vol. 10, 1945, p. 155-166 ;
3. « Fêtes portugaises : commémoraison de la victoire chrétienne de 1340 », Bulletin hispanique, vol. 49, 1947, p. 205-218 ;
4. « L’office portugais de la Sepultura Christi », Revue de musicologie, vol. 29, 1947, p. 63-71 ;
5. « Les offices de la Sainte Face », Bulletin des études portugaises, vol. 11, 1947, p. 1-65 ;
6. « L’Office de la Conception de la Vierge », Bulletin des études portugaises, vol. 13, 1949, p. 105-166 ;
7. « Les textes musicaux de l’Auto da Alma (identification d’une pièce citée par Gil Vicente) », Mélanges d’histoire du Moyen Age dédiés à la mémoire de Louis Halphen, Paris, PUF, 1951, p. 137-143.
8. * « L’Office en vers Gaude Mater Ecclesia pour la Conception de la Vierge », Higinio Anglés (éd.), Atti del Congresso Internazionale di Musica Sacra (Roma, 25-30 Maggio 1950), Tournai, Desclée & Cie, 1952, p. 284-286 ;
9. Essai sur la musique religieuse portugaise au Moyen Age (1100-1385), Paris, Les Belles Lettres, 1952.
10. La déposition liturgique du Christ au Vendredi Saint — Sa place dans l’histoire des rites et du théâtre religieux (Analyse de documents portugais), [thèse de doctorat, 1957], Paris-Lisbonne, Les Belles Lettres/Bertrand, 1960.
4Si on compare cette liste à la bibliographie complète de Solange Corbin, on se rend compte qu'elle représente, à peu près, la moitié de ses publications jusqu’en 1960 : la moitié de ses livres, et un quart de l’ensemble de ses textes musicologiques.
5L’importance de ces écrits, en particulier l'Essai sur la musique religieuse (désormais Essai), pour la connaissance de la musique médiévale au Portugal, est considérable, néanmoins leur parution passe pratiquement inaperçue, faute de contexte universitaire pour leur divulgation, et faute de contexte idéologique pour leur mise en valeur – cela aussi bien parmi les intellectuels de gauche, héritiers de l’anticléricalisme républicain, que parmi les prêtres et auteurs catholiques, généralement peu soucieux de leur patrimoine historique ou incapables de saisir ses nuances liturgiques et musicales5.
L'Essai de Solange Corbin
6Je suppose que l’Essai de Corbin n’est pas souvent lu, surtout hors du Portugal. Il m’a donc semblé utile d’en faire une brève présentation. Il se compose de deux « livres » au sens médiéval du terme. Le premier, « Études d’histoire », composé de quatre chapitres, propose plus de cent cinquante pages de synthèse historique sur le contexte politique et religieux portugais, en privilégiant l’influence française et la problématique des rites. Dans le second « livre » intitulé « Études de textes », l’auteure commence par identifier et décrire les sources musicales, rassemblant plus d’une centaine de manuscrits en tout, conservées au nord du Tage et rédigées entre l’an mil et l’année 1500 environ, avec mention de manuscrits postérieurs, surtout à Coïmbra, Aveiro et Braga. C’était, à l’époque, faute de catalogues, la première liste générale, à une échelle quasi nationale (car le sud n’est pas présent), des témoins de musique religieuse monodique ancienne.
7Le chapitre suivant est un recueil de témoignages historiques sur la pratique musicale, les livres et les chantres, du IXe au XIVe siècle. Corbin propose ensuite une classification paléographique des sources musicales, illustrée par des fac-similés. Elle les divise en quatre groupes :
Manuscrits d’écriture wisigothique et notation tolédane. Corbin propose que ce type, bien que représenté par un seul témoin « a peut-être fait le fonds des manuscrits, dans tout l’ouest de la péninsule, jusqu’au XIe siècle6 ».
Manuscrits d’écriture wisigothique et de notation aquitaine.
Manuscrits d’écriture non wisigothique et de notation aquitaine. Corbin considère dans ce groupe quatre divisions :
notation aquitaine ; elle se trouve aux XIIe et XIIIe siècles.
notation aquitaine évoluée ou décadente, c’est-à-dire plus lourde, jusqu’à devenir carrée ; mais parfois, « il s’agit de du système qui deviendra typiquement portugais, dans lequel la note la plus grave du demi-ton est représentée para un signe invariable… Il ne s’agit le plus souvent que d’essais7 ».
notation portugaise avec losange et demi-ton lisible, qui « s’est probablement constituée à la fin du XIIe siècle… Surtout, la note inférieure du demi-ton est représentée par une virgule ou un losange, et ce système est assez régulier dans bien des manuscrits »8. En usage jusqu’à la fin du XVe siècle.
écritures tardives, avec notation sur une ligne, où le principe de lecture du demi-ton est oublié. C’est la notation portugaise décadente. Mais Corbin se demande à la fin si les exemples donnés ne sont pas d’origine espagnole9.
Manuscrits sur portée (rares avant le XVe siècle)
8Les deux derniers chapitres du livre sont dédiés aux pièces caractéristiques (c’est-à-dire aux compositions qui ne sont pas, ou ne sont plus, courantes à l’époque, en Europe, ailleurs qu’au Portugal et en Espagne), notamment le chant de la Sibylle ; et aux compositions versifiées, en particulier les offices rythmiques pour la Vierge.
9Le chapitre sur les pièces caractéristiques de la liturgie dans les livres portugais a dû être revu et augmenté autour de 1951 ; sa densité scientifique est particulièrement imposante. Les travaux de Dom Louis Brou et les perspectives comparatives développées par Victor Leroquais et Dom Gabriel Beyssac y sont déjà intégrés. La coutume de Braga y trouve aussi une place d’honneur. La cérémonie des Rameaux, la depositio Christi au Vendredi Saint (noyau du futur livre) et les possibles survivances du rite hispanique sont analysées avec une attention particulière.
10Le dernier chapitre, sur les compositions poétiques, concerne surtout le culte de Marie ; la présentation et la discussion de l’office marial du Samedi, avec transcriptions musicales, occupent à elles seules plus de vingt-cinq pages. Il faut aussi mentionner les deux pages où Corbin parle de l’office de commémoraison de la bataille de Salado en 1340, Victoria Christianorum, dont seules les hymnes ont survécu dans un manuscrit de Coïmbra10.
11Il n’y a pas de chapitre conclusif. Cependant, on peut souligner un fait : Solange Corbin apporte, comme Pierre David, une perspective européenne à l’étude des sources portugaises, écartant le parti pris nationaliste de beaucoup d’intellectuels portugais de l’époque ; en même temps, cela met en valeur la contribution française pour la constitution du répertoire religieux médiéval au Portugal à partir de la fin du XIe siècle, ce qui contribuait à renforcer une identité et une fierté mises à mal par la récente défaite militaire et l’occupation allemande. Tout se passe comme si le Portugal, pays catholique d’élite francophone, était le miroir de la centralité et de l’influence de l’ancienne France catholique. D’une certaine façon, Solange Corbin le confesse : « j’ai décrit, par métier, des documents qui m’ont parfois profondément émue par leur parenté obstinée avec les nôtres […] la période étudiée (de 1100 environ à 1385 environ) est d’autant plus attachante pour nous qu'elle délimite à peu près l’extension de l’influence française au Portugal11 ».
12Le père du premier roi du Portugal, il faut le rappeler, était fils du duc de Bourgogne et cousin de saint Hugues, abbé de Cluny ; Géraud de Moissac et Maurice Bourdin de Limoges ont occupé les sièges épiscopaux de Braga et Coimbra avec son soutien. Corbin néglige par conséquent la distinction entre le pays d’oc et le pays d’oïl, peut-être aussi par crainte de raviver dans les esprits la démarcation et la séparation forcées entre la zone nord occupée en 1940 et la zone de Vichy. Sûre de l’unité de la France comme de l’unité liturgique de l’Église catholique, elle souligne les signes d’uniformité tandis qu'elle ignore les différences, alors insuffisamment connues, entre coutumes liturgiques aquitaines et coutumes françaises. Outre la distinction entre formes de notation musicale, elle préfère, consciemment ou pas, effacer les profondes différences régionales en France au Moyen Âge. En revanche, sans doute impressionnée par l’abondance (et parfois la qualité) des témoins manuscrits cisterciens au Portugal, elle attribue aux Cisterciens, bourguignons à l’origine mais strictement uniformisés entre eux et protégés par les premiers rois portugais, un poids tout à fait exagéré dans l’histoire de la musique des terres les plus occidentales de l’Europe12.
13En dépit de son importance, le travail de Solange Corbin n’a été initialement suivi attentivement au Portugal que par deux spécialistes : un disciple de Pierre David, le prêtre et historien Avelino de Jesus da Costa (1908-2000), lequel a poursuivi le recueil de fragments et contribué à fournir des informations précieuses, et le lieutenant Manuel Joaquim (1894-1986), musicologue amateur d’école positiviste, sérieux et méthodique dans la description des sources, mais qui s’intéressait surtout à la polyphonie de la Renaissance13. L’identification de différentes étapes notationnelles médiévales et d’une « notation portugaise » issue de la notation aquitaine ne sera assimilée au Portugal qu’après la fondation d’un cours de musicologie à l’Université, au début des années quatre-vingt14. C’est seulement dix ans après qu’on a pu poursuivre et approfondir les observations réunies dans l’Essai, vieilles déjà d’un demi-siècle. Finalement, en 2005, le premier colloque international sur la monodie sacrée médiévale sera organisé au Portugal ; il sera justement dédié à la mémoire de Solange Corbin15.
L’après-Essai
14Pendant ce temps, beaucoup de choses avaient changé dans les études grégoriennes16. La recherche sur les contenus liturgiques des manuscrits de l’Office menée par René-Jean Hesbert, et la classification méthodique des variantes mélodiques du Graduel travaillée par d’autres moines de Solesmes, avaient mis en évidence la mouvance ou la stabilité de différents corpora dans la tradition, et la possibilité d’y discerner des sous-traditions musicales. En Allemagne, des thèses sur les répertoires de l’Ordinaire de la messe ont documenté leur évolution musicale, souvent en accord avec des divisions régionales. Même chose en ce qui concerne les hymnes et les séquences, dont on avait auparavant étudié uniquement les textes, et l’alléluia de la messe et les tropes, auxquels on a finalement commencé à accorder leur importance et leur signification dans la période post-carolingienne. Plus récemment, certaines sources conservées dans des pays périphériques et ignorées dans le Corpus antiphonalium officii d’Hesbert ont attiré l’attention de chercheurs universitaires et contribué à élargir le panorama liturgique de l’Europe médiévale.
15Les transformations intellectuelles ont également été vastes ; Corbin a elle-même participé aux premiers changements, dans les années cinquante et soixante. Le pedigree purement romain du chant grégorien a été remis en question ; sa conception rythmique, bouleversée par Eugène Cardine ; et sa fixité compositionnelle, longuement discutée selon des perspectives diverses. Le nouveau modalisme archéologique de Jean Claire et la mise en valeur de l’improvisation ont ancré fermement notre vision du répertoire dans les processus de composition orale, déjà aperçus par François-Auguste Gevaert, Walter Frere, Paolo Ferretti et Willi Apel. Le scepticisme sur la possibilité d’un seul archétype grégorien a conduit à la dévaluation de la norme centrale et a mis en valeur la particularité régionale, voire locale. En conséquence, pour la communauté médiéviste, l’authenticité grégorienne ne réside plus seulement à Rome, ou à Metz, ni même sur un axe imaginaire unissant le tictac suisse de Saint-Gall et le soleil diastématique du Midi ou de l’Italie du sud.
16Tout cela est important pour l’étude des sources musicales portugaises : parce qu’a été ainsi ouverte la possibilité de retracer en détail la généalogie européenne des versions trouvées, et parce que ces versions peuvent apporter leur propre contribution historique et esthétique et éclairer le contexte d’origine aussi bien que celui de sa réception.
17La recherche musicologique la plus récente au Portugal a été facilitée par le travail de deux éminents liturgistes, formés à Paris sous Pierre-Marie Gy. Joaquim Oliveira Bragança, professeur à l’université catholique à Fisbonne, s’est concentré sur le Missel, le Pontifical et le Rituel17 ; Pedro Romano Rocha, professeur à Rome, a surtout étudié l’Office divin18. Tous deux ont édité des manuscrits à l’usage de Braga et ont mis en évidence la connexion très proche entre la plupart des sources liturgiques portugaises et la tradition aquitaine. La musique monodique de la tradition de Braga a été surtout étudiée par moi-même, mais on doit aussi mentionner, entre autres, la contribution de João Pedro d’Alvarenga19. Les manuscrits cisterciens ont également été l’objet de mon attention20 ; une thèse de doctorat sur ce sujet est en train d’être achevée par Mara Fortu à l’Universidade Nova de Lisbonne. Récemment, une litanie funéraire considérée par Corbin parmi les « pièces caractéristiques » du Portugal, où elle est souvent mise en polyphonie, a été étudiée par Owen Rees21.
L’actualité de Corbin
18Quelque soixante ans après, quelles sont les principales différences entre notre vision actuelle de la musique religieuse médiévale au Portugal et celle de Solange Corbin ?
19L’état des sources n’est bien sûr pas comparable : Corbin connaissait environ une centaine de manuscrits anciens. Aujourd’hui, on sait ainsi que Guimarães, petite ville du nord du Portugal, compte à elle seule 300 fragments comportant une notation musicale. Il y a, en fait, des milliers de sources dispersées dans des dizaines d’archives. Mais si l’on compare le nombre de manuscrits examinés par Corbin et ceux qu’on a vraiment étudiés depuis, la différence n’est pas si grande. De plus, l’échantillon du milieu du siècle incluait déjà presque toutes les variétés liturgiques et notationnelles qu’on a trouvées plus récemment.
20La découverte à Lamego d’un témoin du rite wisigothique avec notation hispanique du nord constitue une exception et remet en question l’hypothèse de Corbin selon laquelle la notation de Tolède était pratiquée dans l’ensemble du territoire portugais. J’ai moi-même formulé l’hypothèse selon laquelle le fragment de Coimbra avec notation horizontale a été importé de Tolède, celui de Lamego, importé de Léon, et qu’il n’y a pas eu au Portugal une tradition de notation musicale stable associée au rite wisigothique22.
21La question de la notation portugaise et de ses étapes a connu, elle aussi, des développements. Marie-Noël Colette, élève de Corbin, a découvert l’origine du système portugais dans des sources aquitaines23. Cela implique qu’on ne doit pas supposer une période d’expérimentation locale, mais seulement des étapes d’assimilation et d’évolution, liées à la circulation de manuscrits et à l’émergence de l’écriture gothique. Il n’est pas nécessaire non plus d’imaginer une période de décadence : les sources dites « décadentes » dans les planches de l’Essai, soupçonnées d’être espagnoles, appartiennent en fait à une région du nord du Portugal intégrée dans le diocèse de Tuy, en Galice, c’est-à-dire une zone hors du circuit des évêchés portugais jusqu’au XIVe siècle. Colette a supposé que les copistes portugais ont pu assimiler le losange sub-demi-tonal à partir des additions au missel de Mateus (c. 1140), pendant le troisième quart du XIIe siècle, c’est-à-dire une génération avant que Corbin ne l’ait admis. Mais le losange apparaît déjà avec sa signification tonale dans un fragment copié au début du siècle, probablement dans la région de Braga, avec l’office de Géraud d’Aurillac24. Alvarenga, en outre, a contesté la notion même de « notation portugaise » forgée par Corbin, puisqu’il s’agit d’une variété de la notation aquitaine sans suffisamment de caractéristiques autonomes25. Il est cependant incontestable que ce système a été majoritairement suivi au Portugal du XIIIe au XVe siècle, au sud du fleuve Lima, par les clercs séculiers, réguliers et bénédictins, tandis qu’il est rare dans d’autres régions européennes. Corbin a d’ailleurs précisé qu’au Portugal on ne trouve pas une notation autonome, mais « une graphie aquitaine peu à peu stylisée et devenue un sous-groupe26 ». On a ainsi retenu non la désignation, mais l’essentiel du concept forgé par Corbin, « Notation aquitaine (variété portugaise) » dans la Portuguese Early Music Database, publiée en ligne <http://pemdatabase.eu>.
22En ce qui concerne le répertoire religieux copié dans les manuscrits, notre vision actuelle est différente de celle de Corbin surtout parce qu’on a, aujourd’hui, une conscience accrue des particularités de la tradition aquitaine, et de la dépendance de l’ensemble des sources portugaises à l’égard de l’Aquitaine ; cela particulièrement en matière musicale, car les textes sont plus perméables, par exemple, à l’influence de Cluny. On y trouve des antiennes, des répons, des versets, des kyrie, des alléluias, des séquences, des tropes, des tons d’invitatoire, des offices rythmiques, purement aquitains. Même quand la liturgie n’est pas directement issue de la réception du rite romano-franc autour de l’année 1100, mais correspond à des adaptations et à des renouvellements postérieurs, comme dans le culte marial, le fonds mélodique, jusqu’à la fin du XIVe siècle, correspond aux traditions du sud.
23Finalement, si les compositions poétiques sont presque toutes d’importation et les mélodies pour de nouveaux textes de simples adaptations de compositions préexistantes, comme l’a démontré Corbin, il faut faire attention au fait que la créativité culturelle était concentrée à Lisbonne depuis le XIIIe siècle, et que la plupart des sources musicales anciennes de la capitale du royaume ont disparu avant ou pendant le grand tremblement de terre de 1755. Je me permets de signaler à ce propos qu’on a trouvé récemment un fragment d’un office rythmique pour la translation des reliques de saint Vincent à Lisbonne avec les antiennes et répons composés selon l’ordre modal27. Il nous donne un petit aperçu de ce que pouvait être le culte à la cathédrale de Lisbonne ; celui-ci paraît à présent moins périphérique qu’on ne l’imaginait. Solange Corbin serait heureuse de constater que la recherche historique continue de rapprocher le Portugal de la France d’autrefois.
Notes de bas de page
1 Cf. Avelino de Jesus Da Costa, « L’abbé Pierre David (esquisse biographique et bibliographique) », Bulletin des études portugaises, vol. 19, 1955-1956, p. 293-312. L’abbé David recevra un doctorat honoris causa de l’université de Coimbra en 1951. Parmi ses multiples publications, la connexion avec la liturgie est présente surtout dans Pierre David, Études historiques sur la Galice et le Portugal du VIe au XIIe siècle, Coimbra, Instituto de Estudos Históricos/Institut français, 1947.
2 Pour la biographie de Solange Corbin, voir « Nécrologie », Revue de musicologie, vol. 59, 1973, p. 312-316 ; son apport à la musicologie portugaise est résumé dans : Manuel Pedro Ferreira, « Corbin de Mangoux, Solange », Salwa Castelo-Branco (dir.), Enciclopédia de Música em Portugal no Século XX, Lisboa, Círculo de Leitores/Temas e Debates, 2010, vol. II, p. 333.
3 Je dois ces renseignements ainsi que la reproduction de la photo à la gentillesse de Jean Gribenski.
4 Christiane Spieth-Weissenbacher, « Corbin, Solange », The New Grove Dictionary of Music and Musicians, 2e éd., London, Macmillan, 2001, p. 447-448. Un article inédit sur « L’office dramatique de la sepultura Christi et sa place dans la liturgie », lequel était censé sortir en 1952 dans le Bulletin des études portugaises, a fourni la base du livre publié en 1960.
5 Deux cas de réception : Maria Antonieta de Lima Cruz (História da Música Portuguesa, Lisboa, Editorial Dois Continentes, 1955) a connaissance de l’Essai, mais n’en comprend pas la portée. João de Freitas Branco (História da Música Portuguesa, Lisboa, Europa-América, 1959) connaît l'Essai, mais décide de ne pas en faire usage. À ma connaissance, il n’en existe qu’un compte rendu, celui de Michel Huglo dans la Revue grégorienne, 31, 1952, p. 246-248.
6 Essai, p. 248.
7 Essai, p. 250-251.
8 Essai, p. 251.
9 Essai, planches XI/XII.
10 Je suis à présent en mesure d’ajouter que le texte complet de cet Office inédit se trouve dans le Bréviaire de Valascus, Oxford MS. Lat. Liturg. e.12, un témoin écrit autour de 1440 que l’on croyait perdu depuis la fin du XIXe siècle.
11 Essai, p. xvii, 5. À ce propos, on doit reconnaître que l’influence des clercs aquitains au Portugal a été très prolongée : cf. Pierre David, Français du Midi dans les évêchés portugais (1279-1390), Lisboa, 1944 [tirage à part du Bulletin des études portugaises, vol. 8 (1943)].
12 Une critique qu’on peut déjà trouver chez Archdale Arthur King, Liturgies of the Primatial Sees, London-New York-Toronto, Longmans, 1957, p. 257, note 3.
13 Avelino de Jesus da Costa, « Fragmentos preciosos de códices medievais », Bracara Augusta, 1 1949, p. 421-434 ; 2, 1930, p. 44-63 ; Manuel Joaquim, Da origem do canto cristão e sua antiga prática em Portugal, Porto, Centro de Estudos Humanísticos, 1953 ; Id., O Colectário de Arouca e os seus textos musicais, Porto, Imprensa Portuguesa, 1957. Dans cette monographie, Joaquim explore une observation (erronée) de Corbin sur ce collectaire-rituel cistercien du XIIIe siècle (Essai, p. 165).
14 Le cours de Sciences Musicales à l’Universidade Nova de Lisbonne (Faculdade de Ciências Sociais e Humanas) a été créé en 1980. Voir Manuel Carlos de Britto, « Musicology in Portugal since 1960 », Acta musicologica, 56, 1984, p. 29-47. Les deux premiers livres d’histoire de la musique portugaise écrits par des universitaires citent correctement l'Essai : Rui Vieira Nery & Paulo Ferreira Castro, História da Música, Lisbonne : Imprensa Nacional-Casa da Moeda, 1991 ; Manuel Carlos de Britto & Luisa Cymbron, História da Música Portuguesa, Lisboa : Universidade Aberta, 1992.
15 Un livre est issu de ce colloque (« Monodia Sacra Medieval » [Lisboa-Évora, 2-5/6/2005]) : Manuel Pedro Ferreira (éd.), Medieval Sacred Chant : from Japan to Portugal/Canto sacro medieval : do Japão a Portugal, Lisboa, Colibri/Cesem, 2008.
16 Pour une vision d’ensemble, voir David Hiley, Western Plainchant. A Handbook, Oxford, Clarendon Press, 1993 ; Id., « Writings on Western Plainchant in the 1980s and 1990s », Acta musicologica, 69, 1997, p. 53-93.
17 Joaquim Oliveira Bragança, « A Liturgia de Braga », Miscelanea en memoria de Dom Mario Férotin, 1914-1964, Madrid-Barcelona, CSIC, [1965], p. 259-281 ; Missal de Mateus : Manuscrito 1000 da Biblioteca Pública e Arquivo Distrital de Braga, Lisboa, Gulbenkian, 1975 ; Ritual de Santa Cruz de Coimbra : Porto, Bibl. Municipal, ms. 858, Lisboa, L’auteur, 1976 [reproduction presque intégrale in « A música do Ritual de Santa Cruz de Coimbra do séc. XIII », Modus, 1, 1987, p. 37-190] ; Pontifical de Braga do século XII : Porto, Bibl. Mun. ms. 1134, fol. 1-42, Lisboa, Edições Didaskalia, 1978 [tiré-à-part de Didaskalia, VII, 1977, p. 309-397] ; Ritual bracarense – Manuscrito do séc. XV : Porto, Bibl. Mun. Fundo Azevedo, ms. 81, Lisbonne, Edições Didaskalia, 1984 ; Processional Tropário de Alcobaça : Manuscrito 6207 da B. N. de Lisboa, Liboa, Instituto Gregoriano de Lisboa, 1984 ; « A musica do Pontifical de Braga do século XV », Modus, 2, 1988, p. 57-230 ; Liturgia e espiritualidade na Idade Média, Lisbonne, Universidade Católica Editora, 2008.
18 Sur la tradition de Braga : Pedro Romano Rocha, « Um breviário bracarense na biblioteca do Escorial », Lusitania Sacra, IX, 1970/71, p. 41-54 ; « As Vésperas Pascais na liturgia bracarense », Theologica, XI, 1976, p. 61-79 ; L'Office Divin au Moyen Âge dans l'Église de Braga : Originalité et dépendances d'une liturgie particulière au Moyen Âge, Paris, F. C. Gulbenkian, 1980 ; « Les sources languedociennes du Bréviaire de Braga », Liturgie et musique (XIe-XIVe s.) [Cahiers de Fanjeaux, 17], Toulouse, Privat, 1982, p. 185-207 ; « Il sangue di Cristo nell’ambito delle tradizioni liturgiche portoghesi », Francesco Vattioni (éd.), Sangue e antropologia nella Liturgia, Atti della IV. Settimana (Roma, 21-26 novembre 1983), Roma, Ed. Pia Unione Preziosissimo Sangue, 1984, vol. III, p. 1435-1450 ; intr. : Breviário Bracarense de 1494. Reprodução em fac-símile do exemplar da Biblioteca National, Lisboa : Imprensa Nacional-Casa da Moeda, 1987, p. 7-30 ; « O Ofício Divino na tradição bracarense », in IX Centenário da dedicação da Sé de Braga, Actas do Congresso international, Braga, Universidade Católica Portuguesa, 1990, vol. III, p. 81-102 ; « Semana Santa em Braga », Manuel Pedro Ferreira et Ana Maria Rodriges (éd.), A Catedral de Braga : Arte, Liturgia e Música dos fins do século xi à época tridentina, Lisboa, Arte das Musas/Cesem, 2009, p. 82-91 ; « Os responsórios do Ofício de Defuntos na Liturgia Bracarense », ibid., p. 148-151. Autres études : Pedro Romano Rocha, « Les “tropes” ou versets de l’ancien Office des Ténèbres », Mens concordet voci [Mélanges Martimort], Paris, Desclée, 1983, p. 691-702 ; « Le rayonnement de l’Ordre de Saint-Ruf dans la péninsule ibérique, d’après sa liturgie », Le Monde des chanoines (XIe-XIVe s.), Toulouse, Privat, 1989, p. 193-208 ; « Influjo de los antifonarios aquitanos en el Oficio Divino de las iglesias del noroeste de la Península », Estudios sobre Alfonso VI y la reconquista de Toledo, Actas del Congreso International de Estudios Mozarabes : Toledo, 20-25 Mayo 1985, Toledo, Instituto de Estudios Visigótico-Mozárabes, 1990, vol. 4, p. 27-45 ; « La liturgia de Compostela a fines del siglo XII », Actas do Simposio international “O Pórtico da Gloria e a Arte do seu tempo”, A Coruña, Xunta de Galicia, 1991, p. 397-410 ; « Liturgia della Cappella papale, liturgia dei Frati Minori e liturgia dei Frati Predicatori », Leonard E. Boyle et Pierre-Marie Gy (éd.), Aux origines de la liturgie dominicaine : le manuscrit Santa Sabina XIV L 1, Paris-Rome, CNRS/Éditions/École française de Rome, 2004, p. 115-125.
19 Travaux publiés en anglais : Manuel Pedro Ferreira, « Three Fragments from Lamego » [première version, sans notes], Revista de Musicología, XVI, 1993, p. 457-476 ; « Braga, Toledo and Sahagún : The Testimony of a Sixteenth-Century Liturgical Manuscript », Maricarmen Gómez et Màrius Bernadó (éd.), Fuentes Musicales en la Península Ibérica. Actas del Coloquio International, Lleida, 1-3 abril 1996, Universitat de Lleida, 2002, p. 11-33 ; « Braga’s InvitatoryTones », Cantus Planus. Papers Read at the 9th Meeting, Esztergom & Visegrád, 1998, Budapest, Hungarian Academy of Sciences, 2001, p. 127-150 ; « Two Offices for St. Gerald : Braga and Aurillac », Commemoration, Ritual and Performance : Essays in Medieval and Early Modem Music, Jane Morlet Hardie et David Harvey (éd.), Ottawa : Institute of Mediaeval Music, 2006, p. 37-52 ; « Notation and Psalmody : a Southwestern Connection ? », Cantus planus. Papers Read at the 12th Meeting of the IMS Study Group (2004), Budapest, Hungarian Academy of Sciences, 2006, p. 621-639 ; « Cluny at Fynystere : One Use, Three Fragments », Terence Bailey et László Dobszay (éd.), Studies in Medieval Chant and Liturgy in Honour of David Hiley, Ottawa-Budapest : The Institute of Mediaeval Music/Hungarian Academy of Sciences (Institute for Musicology), 2007, p. 179-228. Études écrites ou traduites en portugais : Manuel Pedro Ferreira, Aspectos da música medieval no Ocidente Peninsular, vol. 2 : Música eclesiástica, Lisbonne, Imprensa Nacional/Fundação C. Gulbenkian, 2010. Voir aussi, du même auteur : « O processional português de Chicago » (avec Michel Huglo), Revista Portuguesa de Musicologia, 14-15, 2004-2005, p. 55-78 ; Antologia de Música em Portugal na Idade Média e no Renascimento, 2 vols, Lisboa, Arte das Musas/Cesem, 2008 ; « S. Geraldo de Braga e o seu culto litúrgico », A Sé de Braga. Arte, Liturgia e Música, p. 208-236 ; « Recordando o rei David : vivência coral e criatividade musical na Europa póscarolíngia », Medievalista, no 8, (juillet 2010) <www2.fcsh.unl.pt/iem/medievalista>.
Autres contributions sur la tradition liturgique et musicale de Braga : João Pedro d’Alvarenga, « Fragmento de um Breviário notado bracarense do século XIII », ID., Estudos de Musicologia, Lisbonne, Colibri, 2002, p. 11-33. José Maria Pedrosa Cardoso, O canto da Paixão nos séculos XVI e XVII : A singularidade portuguesa, Coimbra, Imprensa da Universidade de Coimbra, 2006, p. 115-130, 163-169, 425-428.
20 « Early Cistercian Polyphony : A Newly-Discovered Source », Lusitania Sacra, 2e série, XIII-XIV, 2001-2002, p. 267-313 ; « A música antiga nos manuscritos de Arouca : contribuição para um catálogo » (avec Mara Fortu), Ângela Melo (éd.), O orgão do Mosteiro de Arouca : conservação e restauro do património musical, Vila Real-Arouca : Direcção Regional de Cultura do Norte/Câmara Municipal de Arouca, 2009, p. 40-53 ; « Um fragmento de Alcobaça, o canto dos pregadores e os seus livros de coro na Biblioteca Nacional », IV Congreso International sobre el Císter en Portugal y Galicia : Actas, tome II, Zamora, Ediciones Monte Casino, 2010, p. 721-741 ; « Recitação do texto sacro : Claraval e Alcobaça » (avec Mara Fortu), in José Albuquerque Carreiras (dir.), Mosteiros Cistercienses : Histó, Arte, Espiritualidade e Património, Alcobaça, Jorlis, 2013, Tomo II, p. 195-203.
21 Owen Rees, « Jesu redemptor : Polyphonic Funerary Litanies in Portugal », Pure Gold : Golden Age Sacred Music in the Iberian World. A Homage to Bruno Turner, éd. Tess Knighton et Bernadette Nelson, Kassel, Reichenberger, 2011, p. 228-261.
22 Essai, op. cit., p. 248 ; Manuel Pedro Ferreira, « Three Fragments from Lamego », reproduit (avec notes) in Aspectos da música medieval, op. cit., vol. II, ch. 3.
23 Essai, op. cit., p. 247-261 ; Marie-Noël Colette, « La notation du demi-ton dans le manuscrit Paris, B. N. Lat. 1139 et dans quelques manuscrits du Sud de la France », La Tradizione dei tropi liturgici. Atti dei convegni sui tropi liturgici, Parigi (15-19 ottobre 1983), Perugia (2-5 settembre 1987), éd. Claudio Leonardi et Enrico Manesto, Spoleto, Centro Italiano di Studi sull’Alto Medioevo, 1990, p. 297-311.
24 Manuel Pedro Ferreira, Aspectos da música medieval, op. cit., vol. II, p. 196n et planches XIII-XVI (le fragment contient partie des offices propres pour St. Géraud d’Aurillac et St. Brice).
25 João Pedro d’Alvarenga, « Breves notas sobre a representação do meio-tom nos manuscritos litúrgicos medievais portugueses, ou o mito da “notação portuguesa” », Manuel Pedro Ferreira (éd.), Médieval Sacred Chant, op. cit., p. 203-219.
26 Solange Corbin, La Notation musicale neumatique. Les quatre provinces lyonnaises : Lyon, Rouen, Tours et Sens (Thèse pour le doctorat ès lettres, université de Paris, faculté des lettres, 1957), p. 121.
27 Manuscrit découvert aux archives de l’Imprensa Nacional-Casa da Moeda à Lisbonne (reliure du Livro de Receita e Despesa de 1540), rapporté par l’abbé Aires Augusto Nascimento, qui m’a demandé de donner un avis musicologique. Cf. Aires A. Nascimento, S. Vicente de Lisboa : legendas, milagres e culto litúrgico (testemunhos latino-medievais), Lisboa, Centra de Estudos Clássicos, 2011, p. 63-74 ; Manuel Pedro Ferreira, « The Lisbon Office for the Translation of St. Vincent », in A Musicological Gift. Libro Homenaje for Jane Morlet Hardie, éd. Kathleen Nelson & Maricarmen Gómez, Lions Bay [Canada], Institute of Mediaeval Music, 2013, p. 57-86.
Auteur
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Un constructeur de la France du xxe siècle
La Société Auxiliaire d'Entreprises (SAE) et la naissance de la grande entreprise française de bâtiment (1924-1974)
Pierre Jambard
2008
Ouvriers bretons
Conflits d'usines, conflits identitaires en Bretagne dans les années 1968
Vincent Porhel
2008
L'intrusion balnéaire
Les populations littorales bretonnes et vendéennes face au tourisme (1800-1945)
Johan Vincent
2008
L'individu dans la famille à Rome au ive siècle
D'après l'œuvre d'Ambroise de Milan
Dominique Lhuillier-Martinetti
2008
L'éveil politique de la Savoie
Conflits ordinaires et rivalités nouvelles (1848-1853)
Sylvain Milbach
2008
L'évangélisation des Indiens du Mexique
Impact et réalité de la conquête spirituelle (xvie siècle)
Éric Roulet
2008
Les miroirs du silence
L'éducation des jeunes sourds dans l'Ouest, 1800-1934
Patrick Bourgalais
2008