1 Dans son Gujinzhu 古今注 (Commentaires sur des textes anciens et modernes), Cui Bao 崔豹 rapporte qu’en 40 avant notre ère, les indigènes collectèrent dans la montagne Dongmou 東牟 (Donglai 東萊 préfecture, Shandong) plus de dix mille shi 石 (équivalant à 310 000 kg) de cocons pour produire la bourre. Cui Bao, nom social (ci-après n. s.) Zhengxiong 正熊 et Zhengneng 正能, vivait sous la dynastie des Jin (266-420) et était un natif de Yuyang 漁陽 (correspondant à la partie sud-ouest de la sous-préfecture Miyun 密雲 à Beijing).
2 La poésie de Ma Zuzhang 馬祖常 (1279-1338) nous fournit un témoignage intéressant. On lit, dans un recueil de poésies sélectionnées des Yuan par Gu Sili 顧嗣立 (1669-1722), une poésie de MA Zuzhang disant : on tire la soie des cocons en raison de son bas prix ; Gu Sili, Yuan shixuan chuji, bingji 元詩選初選丙集 : 野繭繅絲喜價低.
3 Arrivé à Pékin en janvier 1741, P.N. Le Chéron d’Incarville, botaniste et directeur des Jardins impériaux, fut nommé en 1750 correspondant de l’Académie des sciences de Paris. Cf. Joseph Dehergne, Répertoire des jésuites de Chine, de 1552 à 1800, Roma : Institutum Historicum S. I. ; Paris : Letouzey & Ané, 1973, p. 128-129.
4 Cibot P.M., Mémoires concernant l’histoire, les sciences, les arts, etc. des Chinois, Paris, Nyon Libraire, t. 2, 1776, p. 575-598. Cibot n’a pas inséré les reproductions de dessins illustrant la fabrication chinoise de la soie sauvage contenus dans la description du père d’Incarville. Ces illustrations se trouvent dans la collection de Bonafous, à la bibliothèque municipale de Lyon, Ms. 6060.
5 Avant les grandes découvertes au XVe siècle, il existait un commerce maritime très actif dans l’Océan indien, qui était dominé par des marchands musulmans, indiens et chinois. La découverte de la nouvelle route maritime par les Portugais permettait aux Européens d’importer directement sur le marché européen des produits asiatiques de luxe, tels que le poivre, les soieries et les cotonnades. De nombreuses études permettent de reconstituer ces échanges multiculturels. Voir par exemple : Abu-lughod J.-L., Before European Hegemony. The World system a. d. 1250-1350, New York, Oxford University Press, 1989 ; Maritime India, introduction de Sanjay Subrahmanyam, New York, Oxford University Press, 2004 ; The Cambridge History of China, vol. 8, The Ming Dynasty, 1368-1644, part 2 offre des idées générales sur les relations maritimes entre les Ming et d’autres cultures (p. 301-375).
6 Passage reproduit par Gu Yanwu 顧炎武 (1613-1682) dans son Tianxia junguo libing shu (天下郡國利病書, Livre des qualités et des défauts des provinces de l’Empire), livre 26 « Fujian », 33b :〔是兩夷者〕 皆好中國綾羅雜繒, 其土不蠶, 惟藉中國之絲到彼, 能織精好緞疋, 服之以為華好。 是以中國湖絲百觔, 價值百兩者, 至彼得價二倍.
7 Sur le commerce à Canton, de nombreuses études ont été publiées, dont les plus générales sont celles de Louis Dermigny qui a localisé et analysé un grand nombre d’archives et de documents ; Dermigny L., La Chine et l’Occident, le Commerce à Canton au xviiie siècle (1719-1833), Paris, SEVPEN, 1964 ; Les mémoires de Charles de Constant sur le commerce à la Chine, Paris, EPHE, 1964.
8 Shiliao xunkan 史料旬刊 (Revue concernant des documents historiques), no 3 et 5, « Qianlong 24 nian Yingjili tongshang an 乾隆24年英咭唎通商案 » (Les affaires commerciales avec les Anglais en l’an 24 du règne de Qianlong) : « 查絲貨為外夷必 需之物 » : « 並可阻抑外夷驕縱之氣 ».
9 Après la conquête de la Dzoungarie, à la demande des Kazakhs, Qianlong ordonna d’ouvrir un marché dans la région du Xinjiang ; il espérait obtenir des matières militaires nécessaires pour contrôler la région en contrepartie de leur fournir des soieries. Au début de ces échanges la Cour fit venir de la province du Shanxi des soieries de leur entrepôt. Mais la qualité de ces étoffes ne satisfaisait pas les Kazakhs. L’empereur chargea les trois manufactures impériales du Jiangnan d’étudier le marché et de confectionner des soieries convenant aux goûts kazakh. Trois ans plus tard, ce fut avec des soieries fournies par les trois manufactures impériales que le marché du Xinjiang commença à prendre de l’ampleur. Jusqu’en 1853, on comptait chaque année une moyenne de trois mille pièces environ de soieries envoyées sur ce marché ; Fan J. 范金民, Jin Wen 金文, Jiangnan sichou shi yanjiu 江南絲綢史研究 (recherches sur l’histoire de la soie au Jiangnan), Beijing, Nongye chubanshe, p. 310-315.
10 Pour une idée générale sur les conquêtes des Qing au XVIIIe siècle : Twitchett D. et Fairbank J. K. (dir.), The Cambridge History of China, vol. 10, Late Ch’ingn 1800-1911, particulièrement le chapitre 2 « Ch’ing Inner Asia c. 1800 ».
11 La « sériciculture » sous les Qing devint l’emblème de l’ensemble des activités relatives à la production des matières premières textiles, dont la soie et le coton constituaient les deux matières essentielles.
12 Will P.-E., « Développement quantitatif et développement qualitatif en Chine à la fin de l’époque impériale », Annales, Histoire, Sciences sociales, juillet-août 1994, no 4, p. 863-90 ; Bowe W. T., Saving the World : Chen Hongmou and Elite Consciousness in Eighteenth-Century China, Stanford (Calif.), Stanford University Press, 2001.
13 Wang Er-min 王爾敏, « Chaoting “Tingyu guangxun” zhi banxing ji minjian zhi xuanjiang shiyi 朝廷‘廷諭廣訓’之頒行及民間之宣講拾遺 », in Jindaishi yanjiusuo jikan, 1993, 22, p. 255-276 + 2 pl.
14 Conclusion obtenue par Jiang Tao 姜濤, Zhongguo jindai renkou shi 中國近代人口史, Taibei, Nantian shuju, 1998.
15 Le recensement démographique en Chine ancienne est un sujet délicat pour des historiens modernes. Ceci fournit des renseignements nécessaires aux gouvernements des différentes dynasties pour les collectes des impôts, dont les méthodes et critères de recensement étaient étroitement liés aux règlements fiscaux. Pour plus de details, Ho P., Studies on the Population of China, 1368-1953, Cambridge (Mass.), Harvard University Press, 1959, p. 3-79.
16 Les Qing ont instauré un système d’impôts par tête (sorte de capitation). Afin d’obtenir une statistique véridique de la démographie, Kangxi publia en 1712 un édit garantissant de ne jamais imposer les sujets qui naîtraient pendant « l’époque de prospérité » (i.e. après 1712) ; Qing Shengzu Ren huangdi shilu 清聖祖仁皇帝實錄, juan 249, « deuxième mois lunaire de l’an 51 du règne Kangxi » ; Beiping : Zhonghua shuju, 1986, 15a-b (p. 3328).
17 Qingshi gao 清史稿 (Histoire des Qing), « Liezhuan 列傳 » (Biographies), juan 476 : « Dans les montagnes poussent en grand nombre les feuilles de hu que le peuple ne [savait] pas utiliser pour nourrir des vers [sauvages]. [Liu Qi] envoya aussitôt des gens dans son pays natal pour acheter des œufs de vers à soie sauvages et engager des gens maîtrisant l’élevage des vers pour apprendre à ses sujets cette pratique. Les indigènes en tirèrent profit et appelèrent les soieries Liu gong chou « 山多槲葉, 民未之蠶, 遣人旋鄉里, 齎蠶種, 募善蠶者教之。 人習其利, 名所織曰劉公綢 ». Voir aussi Lidai quannong shilue 歷代勸農事略, xia pian, 32b.
18 Un autre Gongfu 公復 et Han Mengzhou N. s. Litang 理堂 obtint le titre de jinshi en 1757. Ses ancêtres émigrèrent du Yunnan au Shandong au milieu de l’époque des Ming. Sa famille se considérait dès lors comme originaire de Weixian au Shandong. En 1772, à la suite de la calamité causée par les sauterelles, on lui a imputé la faute de ne pas stopper le désastre et on l’a démis de ses fonctions. Il enseigna dès lors à la Montagne de Chengfu pendant 26 ans. Cf. Li Yuandu 李元度 (1821-1887), « Han Gongfu xiansheng shilue 韓公復先生事略 », in Yecan lu 野蠶錄, Xuxiu Siku quanshu 續修四庫全書, Shanghai, Shanghai guji, 1995, vol. 978, p. 659.
19 Ce volume a été recueilli dans la collection agricole (Nongxue congshu 農學叢書) de la Société d’agriculture ; Amano Yoshinobu, Zhongguo gu nongshu kao 中國古農書考, Pékin, Nongye chubanshe, 1992, p. 301.
20 Liu Z.-X, Xiangjian tushuo, postface, 3a, éd 1827, reproduit dans Xuxiu Siku Quansku, vol 978, Shanghai : Guji Chubanshe, 1995.
21 Zheng Z. (1806-1864), Chujian pu, éd 1837, reproduit dans Xuxiu Siku Quansku, vol 978, Shanghai : Guji Chubanshe, 1995 19a, « saosi 繅絲 ».
22 Wang Yuanting a inséré dans son Yecan lu 野蠶錄 (Récits sur les vers à soie sauvages) la traduction phonétique de diverses espèces de vers à soie, domestiques et sauvages. Pour la première sorte, on trouve des dessins qui précisent les caractéristiques des insectes et des feuilles d’arbres leur servant de nourriture (planche XIV, illustration 15).
23 Dans son ouvrage, Louis Le Comte a précisé les avantages de ces étoffes et l’estime accordée par les Chinois à ces produits ; Le Comte L., Nouveaux mémoires sur l’état présent de la Chine, Paris, Jean Anisson, 1696-1698 (traduction en anglais : Mémoirs and observations topographical, physical, mathematical, mechanical, natural, civil and ecclesiatical, made in a late journey through the Empire of China, and published in several letters. Particularly upon the Chinese Pottery and Varnishing ; the Silk and other Manufactures ; the Pearl Fishing ; the History of Plants and Animals ; with a Description of their cities and publick works ; their habits, Economy and Government. The Phylosophy of Conficius. The State of Christianity, and many other Curious and useful remarks, translated from the Paris edition, and illustrated with figures, Londres, Benjamin Tooke, 1699 [3e éd.], p. 140-141).
24 Du Halde J.-B., Description géographique, historique, chronologique, politique, et physique de la Chine et de la Tartarie chinoise enrichie des cartes générales et particulières de ces pays, de la Carte générale et des Cartes particulières du Tibet et de la Corée, La Haye, chez Henri Scheurleer, 1736 (2e éd., 1re éd. en 1735), tome 2, 1736, p. 249.
25 Dehergne J., op. cit., p. 55.
26 Sur l’ordre de Louis XI, une manufacture de soieries fut créée à la fin du XIVe siècle à Lyon. Peu appréciée par la ville, la manufacture fut déménagée à Tours près du palais royal du souverain. Sous François Ier, le succès tourangeau et les changements de circonstances amenèrent les Lyonnais à demander au roi les mêmes privilèges pour l’installation de cette industrie dans leur ville. Profitant de la situation géographique de la ville et des efforts pour perfectionner les techniques, les soieries lyonnaises dépassèrent rapidement leurs homologues tourangelles, et ce en grande partie grâce à un accès facile à des soies de qualité et à bas prix qui arrivaient à la foire de Lyon. Pour plus de détails voir Mau C.-H., L’industrie de la soie en France et en Chine de la fin du XVIIIe au début du XXe siècle : échanges technologiques, stylistiques et commerciaux, thèse soutenue en 2002 à Paris (EHESS), chapitres 1 et 2.
27 Après les efforts des savants s’inspirant des connaissances séricicoles chinoises et italiennes, les Français réussirent dans les années 1820 à développer leurs propres méthodes et créèrent l’école française de sériciculture ; Mau C.-H., « Enquêtes françaises sur la sériciculture chinoise, fin XVIIe -fin XIXe siècles », Documents pour l’Histoire des Techniques, 2007, no 14, p. 24-36.
28 Lettre du 9 avril 1848, Faits commerciaux », no 16, p. 18-19.
29 En 1854, il fut possible de tirer en laboratoire la soie des cocons d’Antheraea pernyi. Des brevets relatifs au dévidage des cocons sauvages ont été déposés à l’Institut national de la Propriété Industrielle. Par exemple en 1857, Kaufmann (à Paris) déposa un brevet de 15 ans (no 31594) sur le « Dévidage des cocons de vers à soie du ricin ».
30 Guérin-Méneville F.-E., Rapport à S.M. L’Empereur sur les travaux entrepris par ses ordres pour introduire le ver à soie de l’Aylanthe en France et en Algérie, Paris, Imprimerie impériale, 1860, p. 3.
31 Né le 23 mars 1821 à Saint-Quentin, Natalis Rondot fut chargé d’enquêter sur l’industrie de la laine en Chine lors de la mission de Lagrenée. Par la suite, il occupa plusieurs postes importants ; il était représentant à Paris de la Chambre de commerce de Lyon, et un membre actif des expositions universelles de 1851 à 1883. En 1879 il demanda à l’Inspecteur général des douanes maritimes chinoises d’effectuer une enquête sur l’industrie de la soie chinoise, y compris sur la fabrication de la soie sauvage. Cf. Galle L., Nathalis Rondot, sa vie et ses travaux, Lyon, Bernoux & Cumin, 1902.
32 Né le 29 septembre 1825 à Lyon, Ernest Pariset était un ancien fabricant de soieries. De 1867 à 1886, il fut nommé consul de la Chambre de Commerce de Lyon ; puis vice-président de 1872 à 1880. Pariset est l’auteur d’ouvrages importants sur l’industrie de la soie et la Chambre de commerce de Lyon.
33 MCC, t. 2, p. 583 ; Julien S., Résumé des principaux traités chinois sur la culture des mûriers et l’éducation des vers à soie, 1837, Paris, Imprimerie royale, p. 195. Les passages cités ci-dessous, provenant du même mémoire, ne seront plus précisés ; MCC, t. 2, p. 575-598 ou Julien S., Résumé des principaux traités chinois, op. cit., p. 190-218.
34 Histoire de l’Académie royale des Sciences, avec les mémoires de Mathématique et de Physique, Paris, 1786, p. 265-271.
35 Dupuis A., Notice sur l’Ailante glanduleux et sa culture, extrait du Bulletin de la Société impériale d’acclimatation, 1862, no oct., p. 7.
36 André E., Élevage des vers à soie sauvages, Paris, Librairie générale et internationale Gustave Ficker, 1907 (avant-propos), p. 67.
37 Ce mémoire fut inséré dans les Annales de la société séricicole, vol. 9, 1845, p. 263-266 + 1 pl.
38 Un exemple est évoqué par Guérin-méneville F. E., « Recherches sur les vers à soie sauvages et domestiques », Bulletin de la Société zoologique d’Acclimatation, no 7, septembre 1854, p. 2-8. Il s’agissait d’un envoi de Bombyx cynthia du Bengale à Marseille, dont le voyage durait plus d’un mois, sous une grande chaleur de 28° Réaumur (ca 35° C) : « Ces vers ne peuvent voyager que vingt jours », rapportait sa correspondance. Pour plus de détails sur cet épisode, voir ledit article.
39 Les Annales Forestières reproduisirent partiellement cette lettre expédiée de Tchonng-Kin-Fou (Chongqing) le 19 juillet 1842, dans leur second tome publié en 1843 (p. 644-648). La lettre a été reproduite intégralement par le Courrier du Velay,
40 Pour plus de détails sur l’histoire de l’introduction de ce ver, voir André E., Élevage des vers à soie sauvages, op. cit., p. 154-159.
41 Ibid., p. 66-68 et Personnat C., Le ver à soie du chêne (Bombyx Yama-maï), son histoire – sa description – ses mœurs – son éducation – ses produits, Librairie agricole de la maison rustique, 1868, p. 2-10.
42 Personnat C., Le ver à soie du chêne (Bombyx Yama-maï), op. cit., p. 3.
43 Une notice par van Meerdervoort fut insérée par Personnat dans son ouvrage (Personnat C., Le ver à soie du chêne (Bombyx Yama-maï), op. cit., p. 4-5,) qui donne plus de détails sur cet épisode historique de l’introduction en Europe du Bombyx Yama-maï. Voir aussi André E., Élevage des vers à soie sauvages, op. cit., p. 143-146.