Entrer dans Paris par voie d'eau. Usages et urbanisation du bassin de La Villette au xixe siècle
p. 285-306
Texte intégral
1Le 21 juillet 1965, la Commission des abords examine en séance un plan d’ensemble pour améliorer la circulation dans le centre de Paris. Parmi les points abordés le rapporteur, Jean Trouvelot, inspecteur général des Monuments historiques, « se préoccupe de l'aménagement envisagé pour la Rotonde de La Villette et du magnifique bassin situé devant. C'est l'entrée de Paris de Ledoux. Il lui paraît indispensable de réaliser des constructions convenables de chaque côté et de supprimer le métro aérien »1. Ainsi au xxe siècle, cette entrée, qui n'en est plus une depuis la loi d'annexion de 1860, garde pourtant cette qualité, ce qui pose la question du statut de l'entrée, et de l'évolution de sa perception au cours des ans. L'objet de notre réflexion commune a l'avantage, sur le plan méthodologique, d'associer les deux pans indissociables de l'histoire urbaine telle qu'elle se définit aujourd'hui. D'une part, une approche des formes de la ville – ici la limite de la ville, le seuil, la rupture entre la ville et l'extérieur (banlieue, campagne) – forme qui tire une de ses spécificités de son inscription dans l'espace puisqu'elle circonscrit la ville, à divers titres (économie, société, fiscalité, sociabilité). D'autre part, les pratiques qui s'inscrivent sur cet espace, espace de transition aux potentialités propres. C'est alors, l'entrée et l'entrer qu'il faut tenter d'articuler pour comprendre les évolutions qui affectent cet objet.
2J'ai choisi d'évoquer une des entrées parisiennes, La Villette, dont les spécificités sont fortes du fait de la construction au début du xixe siècle du réseau de canaux qui converge au bassin de La Villette2, situé immédiatement au nord de la limite urbaine3. Cette dernière est matérialisée depuis 1791 par la barrière des Fermiers Généraux dont la rotonde de Ledoux constitue un des bureaux de péage de l’octroi. Il s’agit donc d’une entrée qui fait l'objet d'un aménagement important qui a des effets multiples : il bouleverse le paysage, diversifie les voies d'accès à la ville et inscrit ce seuil dans une nouvelle échelle d'intérêt, Paris étant relié par les canaux à toute la région Nord. À ce titre, il me semble que l’entrée de La Villette conjugue un double statut, avec de fortes tensions entre les deux dimensions.
3En premier lieu, le nouvel équipement fluvial tire sa logique des besoins de la capitale (commerce, transports, approvisionnement en eau), et dès l'origine, les pratiques orientent le destin de cet espace vers une intégration à la capitale, intégration qui se fera par le renforcement des continuités entre Paris et La Villette, et qui se déclinera du point de vue des pratiques et du paysage. Il faut alors être attentif aux chronologies respectives qui affectent les différentes logiques d'acteurs qui se superposent sur cet espace. Le Génie militaire impose des servitudes militaires aux abords des fortifications construites dans les années 1840 et qui deviendront la limite administrative de Paris après 1860 ; le ministère des Travaux Publics et le conseil général des Ponts et Chaussées impulsent la construction des canaux ; la compagnie Vassal et Saint-Didier obtient la concession des canaux pour leur achèvement et leur entretien en 1818 et 1821, et les services techniques de la ville de Paris lui succéderont4 ; les services préfectoraux ont en charge la navigation dans la capitale ; enfin, le conseil municipal de La Villette a connaissance des conflits et projets d’aménagements aux abords du bassin. Cette diversité des compétences sur l’entrée de La Villette impose la nécessité de prendre en compte les différents pans de l'activité humaine (population, types d'activités, aménagement, interventions politiques et techniques) et d’être attentif à leur agencement, dans l’espace comme dans le temps.
4À l’inverse, la remarque du rapporteur de la commission des abords en 1965 à propos de la rotonde, désigne la permanence de la notion de seuil, de limite, que l'on peut lire comme un effet de la mémoire qui affecte alors cet espace devenu urbain à part entière. Cette perception signale la forte longévité qui affecte les vides par rapport aux pleins dans la ville : ainsi, très souvent, le parcellaire franchit les siècles alors que les pleins se transforment. Jean-Claude Perrot le signale à propos de Caen, entièrement reconstruite après la seconde guerre mondiale à partir du parcellaire antérieur reconstitué, alors que la configuration intérieure des îlots se modifie du point de vue des masses, du style architectural et du type d'usages affecté aux espaces. C'est un phénomène identique que l'on constate ici, à l'échelle de la capitale, la limite et l'entrée conservant une spécificité forte, qui au cours du siècle se cristallise en une identité propre au quartier de La Villette, intégré à Paris administrativement en 1860.
5C'est selon ces deux directions que je voudrais aborder l'entrée parisienne de La Villette. Quelles sont les modalités de son intégration dans la capitale, et donc de sa dilution dans l'espace parisien et quels sont, au contraire, les signes qui manifestent la permanence d'une spécificité qui passe de l'idée de seuil, de limite à celle d'identité de quartier au cours du xixe siècle ?
Une entrée parisienne
6Les motifs et les usages des canaux comme du bassin sont multiples, et ont évolué dans le temps. Ils déterminent les axes d'intégration progressive de cet espace dans Paris
Bassins et canaux au service de la capitale
7Dès la mise en eau du bassin, il devient un lieu de villégiature et de réjouissance très prisé des Parisiens et des habitants des communes alentour. Le Journal des Dames du 20 février 1827 évoque les plaisirs de la glissade sur le bassin : « Les amateurs de patin y venaient en veste rouge, et les dames s'y faisaient promener dans des traîneaux à deux places moyennant 15 sous le tour ou 40 sous de l'heure. La plupart de ces traîneaux étaient d'anciens chars des montagnes russes »5. En 1828, la compagnie des canaux « voulant contribuer au soulagement des pauvres, autorise le patinage », et les recettes seront réparties entre les familles les plus pauvres de la commune de La Villette6. Bordé d'arbres, le canal constitue une promenade appréciée, des joutes sont organisées à partir de 1827 tous les étés, et en 1834, on y organise les premières courses d'aviron en France. Enfin, on s'y baignera jusqu'à une date avancée. En 1822, un rapport fait à la Compagnie concessionnaire signale la présence de 150 baigneurs qui ont menacé les gardes et les ont insultés. Il est demandé au préfet de police un arrêté d'interdiction7. Celui-ci répond qu'il a invité les maires riverains à prendre de tels arrêtés et que la gendarmerie est trop surchargée pour surveiller le bassin. Lorsque la ville rachète la concession, elle limite fortement cet usage mais, en 1877, on constate encore : « Un grand nombre de baigneurs encombrent le canal et causent par leur attitude, leur grossièreté, leur vandalisme, les plus sérieux dommages à la navigation [...] récemment ils ont jeté à l'eau des centaines de planches chargées sur bateaux ; les mariniers n'osent plus traverser les parages ; les gestes et les paroles des baigneurs sont d'une immoralité flagrante »8. Le conseil municipal de l'arrondissement proposera la création de piscines qui se substitueraient au bassin. Les ingénieurs de la ville refusent pour trois raisons : la ponction d'eau serait trop importante dans le bassin pour alimenter les piscines et l’impossibilité de renouveler l’eau régulièrement entraînerait un manque d’hygiène ; l’attraction de la foule sur les berges à la sortie des piscines provoquerait un désordre dont la répression serait impossible ; enfin, sur le plan moral : « il serait difficile d'exercer une surveillance quelconque au point de vue des mœurs sur un établissement public, dépourvu de cabines, et hanté par la population des faubourgs »9.
8Autre enjeu majeur, la fourniture de l'eau. Le bassin de La Villette, alimenté par la dérivation de l’Ourcq, a pour première motivation l'amélioration de la desserte en eau de la capitale. Alors que les quantités mises à disposition des Parisiens sont de l'ordre de 8 000 m3 par jour au début du siècle10, dès la mise en eau du bassin on atteint 20 000 m3 par jour. L'achèvement du canal de l'Ourcq porte cette quantité à 86 500 m3 et dans les années 1850, l'Ourcq fournit les deux tiers de l'eau consommée à Paris. Rapportée à la population parisienne, estimée à plus de 700 000 habitants, la distribution par habitant est de 27 litres par jour au début du siècle pour passer à 117 litres lorsque le canal de l'Ourcq est achevé11. Mais au-delà de 1860, cette position majeure de l'Ourcq s'érode en raison de la diversification des modes d'approvisionnement dans la perspective de l’élargissement du périmètre parisien inhérent à l’annexion12.
9Cette part déterminante des eaux de l'Ourcq dans la consommation de la capitale s'explique aussi par la mise en œuvre d'un réseau de distribution qui s’élabore progressivement. En 1830, les conduites installées pour la desserte des eaux de l'Ourcq avoisinent 40 kilomètres et ne permettent de tirer parti que du quart du volume d'eau disponible au bassin de La Villette. En 1854, Belgrand constate que l'insuffisance de la canalisation ne permet de distribuer que la moitié des eaux que la ville a le droit de prélever dans le bassin. Le réseau sera achevé en 1860, réseau souterrain qui constitue une autre facette de cette intégration dans la capitale. Ajoutons le prix très compétitif de cette eau dès sa mise en service : en 1820, un hectolitre d’eau de la Seine coûte 10 centimes alors que celui de l'Ourcq coûte 1,4 centimes13. Dernier usage de ces eaux de l’Ourcq : l’alimentation des bains publics de la capitale. Alors qu’en 1816, Paris compte 500 baignoires exclusivement alimentées par les eaux de la Seine, en 1832, 2 374 baignoires sont réparties dans 78 établissements et la plupart ont recours à l’eau du bassin14. Ainsi, en matière d'approvisionnement en eau, La Villette devient bien une ressource vitale pour faire face aux besoins d'une ville qui ne peut se passer de ses potentialités.
10Enfin, le système de canaux conçu au début du xixe siècle a pour mission de soulager la Seine de ses encombrements. Dès le xviiie siècle, les projets se multiplient pour améliorer le trafic sur la Seine ; on rejette les installations sédentaires et on aménage les ports et les quais15. La mise en service des canaux doit compléter, voire se substituer à la navigation sur la Seine, dans la mesure où la présence de la ville est de plus en plus perçue comme antinomique avec le développement du trafic fluvial. Ainsi, alors que les travaux sur les canaux sont interrompus en 1818, l'économiste Jean-Baptiste Say pose clairement l'alternative du bassin de La Villette face aux ports parisiens :
« Aux avantages d'une navigation plus courte, moins dangereuse et moins dispendieuse, le port de La Villette en ajoute beaucoup d'autres qu'il tient de sa localité, et qui le rendront chaque jour plus fréquenté »16. Et il présente le site de La Villette comme un lieu qui dominerait la capitale et lui prodiguerait aisément toutes ses ressources : « dans quelque endroit de Paris qu'on ait affaire, on trouve, partant de là, de belles avenues pour s'y rendre : faubourg Saint-Denis, faubourg Saint-Martin, celui du Temple. Les nouveaux boulevards conduisent à l'extrémité de toutes les grandes rues de Paris, et surtout à ce faubourg Saint-Antoine, qui seul est une ville manufacturière du premier ordre […]. Pour le transport de ces marchandises, il ne faut rouler qu'en descendant et par des chemins où les mêmes fardeaux sont conduits avec moitié moins de chevaux. Toutes les extrémités de la ville qui avoisinent le port de La Villette, offrent de nombreux magasins et de vastes chantiers. Les bords du canal, les quais du port sont entourés de terrains où peuvent se former des entrepôts de toute espèce »17.
11La description qu'il nous livre anticipe sur les aménagements, privilégie une économie de flux et atteste d'une nouvelle échelle pour l'économie parisienne, La Villette intégrée à Paris devenant un lieu majeur d'arrivée des marchandises indispensables à la vie urbaine.
12Se pose alors la question de la réalité du trafic sur le bassin, question qui se heurte à un problème de sources en raison de l’extrême variabilité de présentation des résultats annuels (distinction ou non des canaux et du fleuve, unités de comptage, transit ou arrivées). Les chiffres montrent que tout au long du xixe siècle, les canaux se substituent aux déficiences de la navigation aval de la Seine tandis que la navigation d'amont sur la Seine reste importante18. Dès le milieu du siècle, les canaux supplantent la Seine pour le trafic des marchandises (tableau 1). Un autre argument explique cette croissance commerciale du site de La Villette jusqu’en 1860, c’est la possibilité d'échelonner le paiement des droits d'octroi au fur et à mesure que les marchandises sont introduites dans Paris.
13Autre façon d'évaluer la part de La Villette dans le trafic de marchandises parisien, la comparaison avec les gares de chemin de fer. En 1882, le tonnage du port de La Villette est évalué à 3 millions de tonnes tandis que la gare du Nord accueille 2,8 millions de tonnes et que le total des marchandises transportées par le chemin de fer se monte à près de 11 millions de tonnes20. On peut enfin signaler, qu'en 1882, La Villette est le quatrième port français, en tonnage, après Marseille, Le Havre et Bordeaux21. Les produits qui transitent sur les canaux, et le bassin, sont en grande majorité des pondéreux (combustibles, matériaux de construction, marchandises diverses) ; plus modestement, des produits agricoles et de la métallurgie ; des matières premières au service de l'industrie locale surtout dans la seconde moitié du siècle. Il faut accorder une place à part aux matières premières qui alimentent les raffineries de sucre22 : La Villette a la chance, en effet, de pouvoir bénéficier d’une double source d’approvisionnement à savoir la canne à sucre des îles qui transite dans les ports atlantiques et arrive par le canal Saint-Denis, et la betterave à sucre du Nord qui arrive par la même voie grâce à la jonction avec le système de canaux du Nord. Double approvisionnement auquel il faut ajouter les possibilités d'écoulement du sucre raffiné. Notons aussi l'importance du volume des eaux-vannes (égouts) qui transitent sur le canal à destination d'Aubervilliers pour l'épandage ou du dépotoir de La Villette : dans ce cas le système de canaux fait office d'égouts au service de la capitale.
14On peut conclure en soulignant la polarisation progressive au cours du xixe siècle du commerce parisien sur cette entrée qui explique sa capacité d'attraction pour de nombreuses activités et justifie l'intérêt des autorités parisiennes. Ainsi, cette diversité d'usages, parmi lesquels le commerce l'emporte, tisse des liens étroits entre La Villette et la capitale et conditionne une intégration aux facettes multiples qui se traduit en tout état de cause par une dépendance accrue de Paris à l'égard de cet espace. Le paysage, et l'organisation de cet espace, subissent également des évolutions qui renforcent les continuités avec Paris.
Du rural à l'urbain
15Si la frontière entre le rural et l'urbain est toujours complexe à définir, plusieurs indicateurs orientent l'analyse vers la rapidité des transformations de cet espace. Je n'en aborderai que deux : le peuplement et la trame viaire. Alors qu'en 1801, la population de La Villette est estimée à 1666 habitants23, dix ans après la mise en fonction des canaux, elle est multipliée par 5, et double encore dix ans après. Elle atteint plus de 3 000 habitants en 1856 et comptera plus de 50 000 habitants en 189624. Ainsi, la commune voit sa population multipliée par 11 entre 1806 et 1856, alors qu'elle progresse de 60 % entre 1856 et 1896. À titre de comparaison, la population parisienne double dans la première période tandis que les autres communes annexées voient leur population augmenter de 50 à 70 %. En 1838, La Villette est au 4e rang dans l'arrondissement de Saint-Denis qui compte 37 communes, derrière Les Batignolles, Belleville, et Saint-Denis, apparaissant comme l’une des zones les plus dynamiques aux portes de Paris25. Ainsi, le vrai décollage démographique se fait dans la première moitié du siècle, indépendamment de l'annexion, et en grande partie sous l'effet de la mise en service des canaux. L’origine des Villetois montre aussi la forte continuité qui s’instaure avec la capitale. Les listes électorales de 1872 recensent les hommes nés en France, de plus de 21 ans, et elles montrent que le nombre d’électeurs nés à Paris est largement supérieur à celui d’électeurs nés à La Villette. Notre observation porte sur 2470 électeurs sur un nombre total de 5 495 électeurs (rapporté à une population totale de 38 502 habitants)26 : 441 d’entre eux sont nés dans la Seine, et parmi eux, 71,5 % sont nés à Paris alors que seulement 13,64 % sont nés à la Villette27.
16Autre signe de la croissance démographique, celle de la consommation dénoncée par l’augmentation et la diversification des commerces de la commune (tableau 2)28.
17Enfin, dernier signe des mutations socio-économiques de cet espace, le nombre d'électeurs attribué à la commune : alors qu'entre 1806 et 1818, La Villette n'a aucun électeur dans le département de la Seine, elle en compte 1 à partir de 1824, et sur 650 électeurs en 1830, 29 proviennent de La Villette, signe de la prospérité qui la caractérise puisque seuls les plus riches contribuables ont accès aux urnes29. En 1838, La Villette fournit 408 électeurs sur un total de 6 724 pour l’arrondissement de Saint-Denis30.
18Autre indicateur, la trame viaire. Si on compare la carte des Chasses31 (fig. 1, p. XXIX), terminée en 1807, et l’atlas communal du département de la Seine dressé par Lefèvre en 1859, il est notable que le réseau de rues et de routes se complexifie. Il est dominé par les deux axes qui forment un triangle enserrant le bassin : la grande rue de La Villette ou route de Senlis, future rue de Flandre, et la route de Meaux, devenue rue d'Allemagne puis avenue Jean Jaurès en août 1914. En 1807, La Villette est un village-rue où dominent les terres agricoles et les jardins. En 1834, la route de Meaux est jalonnée d’habitations de plus en plus nombreuses et les voies perpendiculaires entre la route de Senlis et le bassin se multiplient32. La feuille du cadastre de 1844 révèle la densification du bâti et le morcellement des parcelles, surtout de part et d'autre de la rue de Flandre33 (fig. 2, p. XXX). En 1859, la densification du bâti est encore plus évidente, notamment le long des axes secondaires et du côté opposé au bassin, et la fragmentation des parcelles le long de la rue d'Allemagne est largement amorcée. On note également la multiplication des voies entre le bassin et les deux grands axes : elles sont souvent aménagées par les locataires des magasins riverains du bassin ou par les propriétaires des terrains (fig. 3, p. XXXI). Ainsi, en 1827, des propriétaires offrent de percer une rue sur leur terrain sis au n° 24 de la rue de Flandre, de façon à relier leur maison au bassin. Ils s’engagent à payer le pavé et l'établissement de réverbères tandis que la commune prendra en charge l'entretien ultérieur34. Dans les années 1820, il semble que l'initiative privée soit déterminante pour l'ouverture de rues. C'est autour du bassin que les initiatives se multiplient, signalant son rôle stimulant dans la transformation morphologique de cet espace et la plus value des terrains qui ont un accès direct aux berges. On peut aussi noter la construction de ponts et de passerelles, notamment dans le prolongement de la rue de l’Ourcq, pour atténuer la coupure que représente le bassin sur le territoire communal. Ces mutations démographiques et physiques se doublent de transformations administratives notables.
La diffusion des attributs urbains
19Toute une série d'indicateurs signalent un changement qualitatif dans l'organisation de la vie municipale. Tout d’abord, la taille du conseil municipal. La loi du 21 mars 1831 fixe à 27 le maximum de conseillers municipaux : en 1844, sur les 37 communes de l'arrondissement, deux communes – dont La Villette – atteignent ce chiffre plafond. Au milieu des années 1840, le nom des rues et le numérotage des maisons est une réalité à La Villette comme en témoigne la Gazette municipale de mars 1844 : « Des plaques indiquant le nom des rues viennent d'être placées dans toute la commune de La Villette, par les soins du Maire ; les frais en ont été faits par les propriétaires. Nous les félicitons bien sincèrement d'avoir ainsi compris un intérêt dont ils ont tout le bénéfice ; nous ne doutons pas qu'ils trouvent des imitateurs. » Dès 1826, le conseil municipal se préoccupe de l'éclairage des rues et en 1856 l'éclairage au gaz est achevé35. Autre attribut qui marque la transformation de cet espace : dès les années 1830, La Villette a un commissaire de police puisqu’elle a atteint le seuil des 5 000 habitants nécessaire, et un vicaire, signe d'une emprise administrative – policière ou religieuse – qui s'accroît sur la population.
20L'évolution du budget communal est un autre indicateur de cette promotion de La Villette à la périphérie nord de Paris : alors qu'en 1822, le montant de son budget communal la place au 18e rang sur 37 communes, dès 1830, elle entre dans le peloton de tête derrière Saint-Denis, Belleville, La Chapelle et Montmartre36. L’évolution de la structure du budget communal jusqu’à l’annexion témoigne de l’ampleur des transformations qui affectent le fonctionnement administratif et politique de La Villette (tableau 3) : d’une bourgade rurale, on est passé à un budget important, grossi par les taxes prélevées sur les nombreuses activités commerciales et industrielles que désormais la commune accueille.
21La multiplication des équipements, probablement grâce à l’augmentation des ressources de la commune, signale également la transformation du rapport entre les habitants et la sphère publique. Très symboliquement, en 1834, La Villette se dote d'un Hôtel de Ville38 alors que jusqu’à cette date, les locaux de la mairie sont installés chez le maire. Or, en 1832, le maire, Frémicourt, note que de toutes les communes de son importance, La Villette est la seule ne possédant pas d'Hôtel de Ville et il souligne l’inconvénient d’une telle situation qui aboutit à : « restreindre le choix des maires au petit nombre de personnes qui veulent et peuvent offrir un local aux bureaux », et il ajoute : « depuis bien des années, la commune de la Villette éprouve le besoin de réunir dans un même local toutes les parties de son administration municipale. Obligée à chaque changement de maire de déplacer ses archives, son mobilier et tous les registres et papiers qui dépendent du secrétariat, elle avait reconnu l'indispensable nécessité d'un hôtel de ville ». On passe d'un pouvoir itinérant, et privé, à une volonté d'installation définitive dans un local spécialisé installé au centre de la commune et à proximité du bassin. L’année suivante, on aménage l’espace vacant devant la mairie : « destiné aux rassemblemens de la garde nationale, aux fêtes publiques et à toutes les réunions nombreuses, il peut être sans grands frais approprié à cet usage, une disposition régulière et la plantation d’une rangée d’arbres au pourtour seront suffisans »39. La commune s'étoffe d'un espace approprié aux manifestations publiques et on trouve là un des signes qui fait la spécificité de la ville, la conformation de l'espace à un usage particulier. L'aménagement est sommaire mais il est question de « nivellement et de décoration », de « régularité et de plantations d'arbres », donc d'une délimitation d'un espace public de façon ostentatoire.
22En 1844, une nouvelle église est achevée40. Dès 1836, une délibération du conseil municipal annonce l’achat d’un terrain au coin de la rue de Bordeaux et du quai de l’Oise pour la somme de 101 178 francs, moyennant une augmentation des droits d’octroi sur les vins de 1,50 francs par hectolitre pendant 6 ans. Comme pour la mairie, les bords du bassin polarisent ce nouvel équipement qui : « de l’aveu de tout le monde, ne saurait avoir lieu sur un point plus central et plus convenable sur tous les rapports. Cet emplacement est le plus heureusement situé comme point central et à proximité du seul pont qui existe comme moyen de communication entre les deux parties de La Villette que le canal et le bassin de l’Ourcq séparent à peu près par moitié dans toute sa longueur »41. Le conseil municipal exige : « pour compléter l’instruction de cette grande affaire, une enquête tenue dans la commune par un délégué spécial. Dans le doute et pour ne point retarder l’approbation de l’autorité supérieure qu’il nous importe d’obtenir le plutôt possible, je sollicite moi-même cette mesure et vous prie, monsieur le sous-préfet, de désigner le commissaire qui sera chargé de cette opération ». Cette correspondance entre le maire et le sous-préfet témoigne des modalités de transformation de l’espace villettois : on consulte les habitants avant d’engager la réalisation du projet.
23En 1836, dans la lignée de la loi Guizot du 28 juin 1833, La Villette se dote d'une nouvelle école en acceptant « la souscription ouverte par les principaux industriels de la localité pour l'établir »42. Elle accueille 180 élèves moyennant une rétribution mensuelle de 2 francs par mois par enfant, abaissée à 1 franc pour les plus démunis et dont les indigents sont dispensés. Très vite insuffisante, cette école se double de deux nouveaux établissements qui ouvrent en 1843, auxquels s'adjoint une salle d'asile en 184943. En prenant en compte les écoles libres, en 1856, la capacité d’accueil de La Villette est de 1500 enfants dont 500 dans les écoles publiques. Notons que la mairie, l'église et les écoles communales sont réunies sur le même site, proche du bassin : sorte de cœur administratif de La Villette qui est la traduction dans l'espace de notables modifications de la vie communale44.
24Enfin, un nouveau cimetière excentré s'ouvre en 1831 après une longue bataille des Villettois hostiles au projet. Le cimetière d’origine est situé à l’ouest de la commune, à proximité du bassin et les terrains ayant acquis de la valeur, le maire et la compagnie souhaitent les destiner à d'autres usages et usent d'arguments similaires à ceux qui sont invoqués pour chasser les cimetières hors les villes45. Le transfert doit se faire à la Petite Villette, à l’est de la commune, de l’autre côté du bassin. L'enquête de commodo et incommodo révèle la forte cohésion entre l’organisation de l’espace communal et l’identité de la communauté villettoise : la coupure du bassin et du canal organise l’espace dans la conscience des habitants et il leur semble inimaginable de franchir le bassin pour aller enterrer leurs morts. Deux logiques s’affrontent : les habitants, attachés à une mémoire identitaire à laquelle participe le culte des morts, ne veulent pas voir le cimetière s'éloigner du centre ancien de la commune, alors que le maire et la compagnie, conscients de la plus-value des terrains, n’hésitent pas à investir les marges communales pour reléguer le cimetière.
25Cette transformation rapide des alentours du bassin frappe les autorités de l’époque, témoignant de la rapidité du processus dans la première moitié du xixe siècle : « Des communes qui n'étaient naguère que des villages se classent au rang de villes importantes ; aux travaux de la culture ont succédé, dans la plupart des communes, les travaux de l'industrie et du commerce ; les habitations prennent successivement le caractère des habitations urbaines. Il s'opère, en un mot, un travail de transformation dont la limite est loin d'être atteinte46. » Et à l’échelle du canton, plusieurs indicateurs signalent la situation exceptionnelle de La Villette par rapport aux communes les plus dynamiques. Le montant des contributions indirectes payées par les habitants connaît un accroissement exceptionnel47 (tableau 4) tandis que le produit de l’octroi communal, créé le 7 janvier 1824 sur les vins et les alcools, témoigne aussi du décollage précoce de la commune, particulièrement dans les années 1820 au moment de la mise en service des canaux48 (tableau 5).
26L'importance vitale de La Villette pour la capitale et les lentes mutations repérées renforcent les continuités de tout ordre avec Paris. J’ai montré, selon plusieurs pistes, que cette intégration était une réalité, sociale et économique, antérieure à l'annexion. Ce n'est pas le lieu ici d'entrer dans le détail des motivations, et des résistances, à cette décision50. Mais l’histoire de la capitale étant fortement déterminée par les interventions du Second Empire, et du baron Haussmann, il semble important de réhabiliter les transformations antérieures à la décision d’annexer pour mieux comprendre le contexte de cette prise de décision dont les motivations ne sont pas seulement politiques. L’aménagement du bassin et des canaux déclenche un processus rapide d’urbanisation de La Villette, et l’on doit prendre en compte ces transformations économiques et sociales pour comprendre les modalités de croissance de la capitale, et donner du sens à l’acte administratif qui entérine l’incorporation de La Villette dans les limites parisiennes à partir de 1860. À cette date, cet espace perd sa qualité d’entrée dans la ville, au moins sur le plan administratif et fiscal. Mais la permanence des usages et la survivance de certains traits du paysage, fondent une probable « mémoire des lieux », et conservent à cet espace un certain nombre de caractères qui perpétuent une forme de distinction, indiscutablement liée à sa situation de limite urbaine, et qui dorénavant doit se lire en termes d’identité particulière.
Un quartier parisien
27Au-delà des évolutions précédemment décrites qui tendent à intégrer cet espace périphérique dans la capitale, et donc à diluer son statut de seuil urbain, on peut repérer les caractères qui affirment l'originalité de ce quartier, son identité propre perpétuant au cours du siècle l'idée d'un passage, d'un lieu de transit.
28Un premier point n’est pas à développer ici car il s’insère dans des transformations à l’échelle de la capitale, mais il est un facteur déterminant de maintien d’un statut particulier de cet espace. Il s’agit de l'articulation du bassin avec d'autres équipements qui se dessine au milieu du siècle, et confirme la vocation de cet espace comme espace de flux, économique et social. On peut rappeler l’installation des gares, notamment celles de l’Est en 1850 et celle du Nord en 1866, et la construction du chemin de fer de ceinture à partir de 1851 avec l'ouverture de la gare de La Villette en 185651. Interviennent également l’aménagement et la diversification des entrepôts sous le Second Empire qui consolident durablement la fonction de transit : les premiers entrepôts pour les grains sont installés dans les années 1850, Émile Pereire fonde la Compagnie des Entrepôts et Magasins Généraux de Paris en 1860 qui succède à la Compagnie des Docks Louis-Napoléon née en 1852, l’entrepôt des douanes et des sels remonte du canal Saint-Martin à la rotonde de La Villette en 1864, enfin, en 1867, s’ouvrent les abattoirs de La Villette, marché central aux bestiaux parisien. Tous ces équipements commerciaux confirment la vocation de cet espace à accueillir les hommes comme les marchandises. Ils constituent aussi un formidable pouvoir d’attraction pour l’industrie qui était déjà bien ancrée à La Villette, et qui devient dans la seconde moitié du siècle, l’activité prépondérante du quartier.
Une identité industrielle affirmée.
29La dominante économique de La Villette change de visage au cours du siècle. D'espace agricole, la commune s'affirme comme un espace commerçant et marchand au milieu du siècle. Sur un échantillon de 448 électeurs communaux en 1841, échantillon qui signale les plus riches Villettois, plus de la moitié sont commerçants (231), les agriculteurs et les propriétaires sont en bonne place (114), et viennent ensuite les entrepreneurs et industriels (42)52. Ce commerce est en prise avec les arrivées sur le bassin : tuiles, plâtre, charbon, bois, vin, et il s'organise selon une spécialisation des deux quais du bassin qui ira en s'accentuant. Sur le quai de Seine, à l’ouest du bassin, on trouve principalement des transporteurs de produits alimentaires et de matières premières ; sur le quai de la Loire, à l’est du bassin, des commerces de combustibles et de matériaux53. Par contre, le dénombrement de 1886 atteste d'une montée notable de l'industrie : 50 % de la population travaille dans l'industrie contre 42 % dans le transport et le commerce, et 0,12 % dans l'agriculture54. La ventilation entre patrons, employés et ouvriers montre le caractère populaire de ce quartier puisque toutes professions confondues, 73 % de la population est ouvrière, et il faudrait ajouter un certain nombre de petits patrons dont la condition est proche de celle des ouvriers (tableau 6).
Tableau 6 : Ventilation de la population active à La Villette en 1886.
30À noter que peu nombreux sont les ouvriers qui travaillent dans la métallurgie, la chimie et la raffinerie de sucre, secteurs dominants de l'industrie villetoise. C'est donc que la main d’œuvre de ces entreprises vient d'ailleurs. Par contre, on constate la force de l'artisanat local, notamment dans l'habillement (couturières, blanchisseurs, cordonniers), ou les métiers d’art (orfèvres). S'il y a bien eu renversement des activités économiques au profit de l'industrie, il faut nuancer l'idée d'un quartier qui prospère principalement sur la grande industrie. Ainsi, quelle que soit la taille des entreprises, dans la seconde moitié du siècle La Villette tire une bonne part de son identité d’un décollage industriel en relation avec le bassin.
Un bassin monumental
31Au-delà de la construction du bassin et des canaux, cet espace fait l'objet de multiples aménagements propres à accueillir les produits et à faire face à l'augmentation du trafic. À partir de 1822, la compagnie des canaux est autorisée à construire des magasins au fur et à mesure des besoins, exclusivement réservés à l’entrepôt des marchandises et avec interdiction d'implanter des guinguettes, restaurants ou marchands de vin. Les arbres plantés sur les bords du bassin ne seront arrachés qu'au fur et à mesure de l'établissement de magasins, hangars et ports de décharge55. Ces constructions sont achevées à la fin des années 1830. Elles forment six masses sur chaque rive, séparées par des intervalles de 20 m, un quai de 8 m de largeur reste libre sur les deux rives. Chaque magasin a une largeur de 15 m et est bordé d’une rue latérale à l’arrière. La Compagnie décide en octobre 1839 de numéroter les magasins riverains : « ceux de la rive droite auraient les numéros impairs et ceux de la rive gauche les numéros pairs. Les n° 1 et 2 appartiendraient aux deux magasins les plus rapprochés de la barrière »56.
32Cette relative lenteur du processus est due aux multiples résistances de propriétaires expropriés pour monter les magasins. Notons que la construction de magasins fermés va permettre l'arrivée de produits plus fragiles et plus précieux que le charbon et le bois, et donc orienter l'activité du bassin vers l'industrie de transformation de matières premières désormais stockées dans les magasins. À la fin des années 1830, l'activité du bassin semble avoir atteint un rythme important, les magasins sont tous construits et la compagnie, par le numérotage des magasins, donne une cohérence à tous les établissements riverains. On retrouve ainsi la même chronologie du point de vue des aménagements que celle des activités qui semblent atteindre une vitesse de croisière à la fin de cette décennie. C'est aussi à la fin des années 1830 que les rues latérales du bassin se construisent sous l'égide de la compagnie57. Parallèlement au développement des activités sur le bassin, la ville se complexifie. Par contre la compagnie refuse d'assurer les frais d'éclairage et de balayage des chemins latéraux au canal élargi entre la gare circulaire et le pont tournant : ils sont en terre, donc impossibles à entretenir, et ne sont pas encore classés pour être pris en charge par la puissance publique58.
33Lors du rachat de la concession en 1876, la ville souhaite que le bassin profite de la prévisible croissance du trafic qui découlera des travaux engagés dans les années 1870 pour approfondir le lit de la Seine. Elle se lance dans une campagne de travaux qui visent à porter le tirant d’eau du bassin et du canal Saint-Denis à 3,2 m. Du même coup, les magasins en place ne sont plus adaptés : « Les magasins et hangars existant actuellement sur les quais du bassin de La Villette sont misérables et doivent disparaître dans les travaux d'amélioration des canaux à l'étude. La galerie extérieure du Palais du Champ de Mars nous a paru présenter un type qui conviendrait sous tous les rapports pour établir de nouveaux hangars et magasins59. » Les travaux débutent en 1880, et se font en deux tranches sur chaque rive pour ne pas immobiliser le trafic. Les 250 travées des galeries installées pour l'exposition universelle de 1878 sont prolongées par une marquise qui permet de protéger les marchandises qui stationnent sur le quai.
34L’uniformité de ces magasins tranche avec les constructions hétéroclites des décennies précédentes, introduisant un changement de paysage notable. Le caractère monumental des pavillons de l'exposition universelle répond à la Rotonde de Ledoux, et sur le plan architectural cet espace s'offre comme une gigantesque vitrine des activités commerciales et industrielles implantées au cours du siècle. Les bâtiments soulignent dans le paysage la forte identité de cet espace, perpétuant son statut « d'abord » de la capitale par la fonction de stockage des produits qu'ils accueillent. L’entrée fiscale a laissé place, dans le paysage et dans les pratiques, à une entrée commerciale et industrielle, sorte de poumon économique de la capitale.
Le laboratoire de Paris
35On peut enfin aborder les permanences qui affectent cet espace en se plaçant du côté des représentations et en examinant l’image qu’en donnent les guides, genre littéraire qui fleurit au cours du xixe siècle. Quel regard les guides proposent-ils à leurs lecteurs à la lumière des constats précédents et en sachant que cette production livresque a ses propres spécificités littéraires ? C'est une image contrastée que livrent les guides, elle évolue au cours du siècle témoignant d’une réelle prise de conscience des transformations de l’espace. La vision positive d’un espace bienfaisant pour la capitale laisse peu à peu la place à celle d’un espace stigmatisé, à tous points de vue, témoignant par là des dénivellations qui s’instaurent dans le grand Paris haussmannien et dans l’imaginaire véhiculé par une littérature offerte au visiteur extérieur.
36Au début du siècle, une certaine unanimité se fait jour autour d'un espace récréatif et champêtre voué à l’excursion, l’amusement, le repos, la distraction. Parce qu’elle est hors les murs, La Villette échappe aux nuisances de la ville et trouve grâce aux yeux de nombreux guides. Souvent citée comme exemple d’entrée parisienne majestueuse, les aspects monumentaux (rotonde et bassin) et l'attrait du paysage qu'ils décorent sont les points forts qui rappellent au lecteur l'entrée fiscale et commerciale que représente La Villette.
37L'importance de l'activité commerciale retient aussi l’attention des guides :
« Non-seulement le Bassin de la Villette présente, dans l'été, l'intéressant coup-d'œil d'une nappe d'eau considérable, couvert de bateaux marchands ; mais il offre encore une agréable promenade sur de jolies barques allant à pleine voile. Ses bords, garnis d'une double rangée d'arbres, sont très fréquentés, les dimanches et jours de fêtes. Des guinguettes dont les environs sont parsemés, des avenues, des champs, de riants points-de-vue, un air pur, tant d'agrémens réunis sont bien faits pour attirer la foule qui s'y porte avec autant d'empressement que de constance. Pendant l'hiver, le Bassin de la Villette sert de théâtre aux exercices du patin, et les amateurs de cet art, aussi agréable que périlleux, ont eux-mêmes surnommé le Bassin de la Villette, le Longchamp d'hiver »60. En encore en 1834 : « ce bassin est devenu le centre du commerce le plus actif ; il en part chaque semaine des bateaux à vapeur chargés pour Rouen et Le Havre ; il reçoit par l'Ourcq les productions et les produits des départements du nord-est ; Rouen y fait parvenir ses bateaux ; il en reçoit de la Haute-Seine par le canal Saint-Martin : ce marché est très avantageux pour les communes au nord de Paris61. »
38Le lecteur est confronté à la découverte d’un véritable lieu-ressource, ouvert aux richesses du pays qu’il prodigue à son environnement.
39Par contre, en 1864, alors que le xixe arrondissement n’est signalé que pour « ses curiosités secondaires », La Villette est « surtout une localité industrielle et commerçante, presque maritime »62. S’opère ainsi dans un certain nombre de guides un glissement significatif dans la mesure où la personnalité commerciale et industrieuse de La Villette se substitue peu à peu à la fonction récréative :
« Le 19e arrondissement n'offre rien d'essentiellement curieux. Cet arrondissement prend son nom des buttes Chaumont qui rappellent un des glorieux épisodes de la défense de Paris contre les alliés en 1814. Il a été composé des communes de la Villette, qui ne se recommande que par son commerce et le grand mouvement de son bassin et d'une partie de Belleville, qui n'a de remarquable que sa nouvelle église63. »
40Et en 1889, l’industrialisation de La Villette est une image forte qui associe l’idée d’un espace vital mais peu attractif pour le visiteur de la capitale :
« Ce xixe arrondissement, dans lequel nous nous sommes engagés, comme si nous allions nous faire pendre, en nous dirigeant par le Chemin des Potences (c'est-à-dire par la rue Chateau-Landon) vers le boulevard extérieur, n'est point du tout lieu de plaisance. Ce pourrait s'appeler le laboratoire de Paris. Il s'y cuisine un tas de choses [...] On y travaille pour tous nos besoins : usine à gaz, pour l'éclairage et le chauffage ; magasin général des Pompes funèbres, pour nous mettre décemment en terre ; abattoirs et marché aux bestiaux, pour nous nourrir. N'oublions point non plus, le long du canal, le quai des vidanges, sur lequel nous passerons – et sans glisser ! On voit par cette énumération rapide l'importance de ce quartier dans le fonctionnement des organes de Paris […] La Villette est un des grands entrepôts de l'approvisionnement de Paris. Ses bassins ont l'aspect d'un grand port marchand. C'est également un vaste centre d'industrie parisienne. Une forêt de cheminées domine les manufactures et les usines. Plusieurs raffineries fort importantes y fonctionnent. À l'heure de la sortie des ouvrières, le coup d‘œil est très curieux. Toutes ces filles sont poudrées, des pieds à la tête, de fine et brillante poussière de sucre. Aussi, la marmaille qui les attend à la porte des usines ne se fait-elle point faute de les embrasser… et sur les deux joues encore64 ! »
41Ce « laboratoire de Paris » est décrit de façon de plus en plus péjorative au fil du siècle, et ce jugement repose tout autant sur les activités considérées comme polluantes que sur la société qu’il accueille, décrite en des termes qui font voir l’évolution de la perception du peuple par le genre littéraire des guides. En 1810, le peuple est une curiosité sociologique que le guide invite à découvrir :
« Les classes les plus communes du peuple ont coutume de diriger leurs pèlerinages de dimanche, et trop souvent aussi ceux des jours ouvriers, à Vaugirard, à La Villette, et aux villages les plus voisins de la barrière, où ils peuplent surtout les guinguettes […]. Le voyageur qui trouve de l’intérêt à observer les classes inférieures et moyennes du peuple ne doit pas négliger d’aller visiter ces endroits65. »
42En 1854, la stigmatisation repose tout autant sur le paysage urbain que sur les usages qu’il héberge :
« Le dimanche, le lundi, quelquefois même le jeudi, une grande partie de la population parisienne, celle du moins qui travaille ou tient le comptoir pendant les journées pénibles de la semaine, se répand dans la zone comprise entre le long mur de l’octroi et l’enceinte des fortifications. C’est là que toute cette masse de boutiquiers et de prolétaires laborieux va voir une campagne, qui n’existe plus, car le moellon a tout envahi, et où, il y a peu d’années encore, l’œil pouvait se reposer sur la verdure, où les pelouses et les ombrages invitaient à s’asseoir, il n’y a plus que les murs rougis des marchands de vin bleu, les tables disloquées des guinguettes, une atmosphère de fanges et de fritures, des rues sales, où une stupide tendance à la villa alterne avec la dégouttante réalité du bouge, du repaire ou du lupanar66. »
43Ainsi, tout au long du siècle se cristallise une représentation qui perpétue le statut d'entrée de La Villette par le biais d’une sorte d'image d'Épinal qui oscille entre deux pôles : l'un positif – la campagne aux portes de la ville et un lieu qui prodigue des richesses à la capitale (eau et marchandises), l'autre négatif – la concentration populaire et la vocation industrielle qui ne trouvent pas grâce aux yeux des guides. Cette évolution est également visible dans les vocables utilisés pour désigner La Villette. Ainsi lit-on en 1835 : « Joli bourg situé à 2 lieues de Saint-Denis et près de la barrière Saint-Martin »67, tandis qu’en 1855, il est précisé que La Villette est un : « faubourg très commerçant et peuplé de nombreuses usines »68. Après 1860, La Villette intègre le xixe arrondissement dont les caractéristiques administratives sont décrites par les guides (population, commissariat, ressources). Pourtant certains détails témoignent de la persistance d'une distinction : ainsi, le tarif des omnibus donné en 1864 distingue Paris dans ses anciennes limites (3 francs) et les communes annexées (4 francs), signe qu’au-delà de l’annexion, une certaine inertie des pratiques perpétue le statut périphérique de cet espace69.
44Et La Villette se signala comme un haut lieu de l’action communarde en 1871, faisant figure de quartier stratégique tout autant pour des raisons topographiques qu’économiques et sociales. On note le jeudi 25 mai :
« Les incendies continuaient avec une intensité plus grande encore, s'il se peut, que les jours précédents. À dix heures, l'horizon était éclairé par la lueur de huit foyers incandescents. Le plus considérable était celui des docks de la Villette et, de ce côté, disait-on, le feu avait gagné toutes les maisons voisines »70.
45Et la révolte une fois circonscrite, la menace persiste sur la capitale :
« Nous avons visité les quartiers qui, les derniers, ont servi de champ de défense à l'émeute. Nous avons visité, avec l'un des chefs du corps de pompiers occupé aux docks de la Villette, ce gigantesque foyer d'incendie qui a illuminé Paris de ses lueurs sinistres ces jours derniers. L'incendie n'était pas encore éteint. La terre, imprégnée de corps gras, et les murs sur lesquels suintaient des émanations alcooliques, étaient encore couverts de fumée. Néanmoins, le feu a été circonscrit en abandonnant ce qu'il était impossible de sauver. Les entrepôts de la Rotonde, ainsi nommés à raison de la forme des bâtiments occupés par les employés et les bureaux, contenaient cinq millions de marchandises au moment du sinistre. Barils d'essence, bonbonnes d'huiles et de drogues, tous corps propices aux flammes ont éclaté et laissé couler leur contenu, qui menaçait de s'étendre, en suivant la rue Riquet, jusqu'à la rue de Flandre, et en tournant les quais. L'incendie eût pris alors d'énormes proportions. On a élevé des talus en terre qui ont arrêté les liquides en permettant au feu de les absorber. En même temps, on projetait de l'eau, qu'on avait en abondance, sur le bâtiment de la Rotonde71. »
46Résistance communarde et flamboiement du paysage s’articulent au gré de l’événement pour démarquer à nouveau La Villette.
47L'entrée dans Paris par La Villette a subi de fortes mutations, allant jusqu'à l'incorporation dans la ville après 1860, et j'ai tenté de montrer en quoi elles consistent aussi bien du point de vue des usages que des formes, et comment elles influent sur la qualité de cet espace urbain. Le caractère radical des transformations, qui touchent tout autant au paysage qu'aux pratiques, n'exclut pas certaines permanences qui nous rappellent la diversité des temporalités qui sont à l'œuvre dans la ville, et la nécessité de diversifier les approches pour prendre en compte le devenir urbain ainsi que la perception qu’en ont les contemporains.
48Encore aujourd'hui, la multiplication des équipements comme la Cité des Sciences, la Cité de la Musique et le Parc de La Villette signale tout à la fois la réelle intégration de cet espace dans la capitale (du point de vue de l'urbanisme), et la volonté politique qui la sous-tend, et en même temps les efforts pour rendre attractif aux Parisiens un quartier qui demeure aux marges.
49Cette tension entre plusieurs « significations », qui se superposent plus qu’elles ne se succèdent en un lieu, fonde l’épaisseur de la ville. La situation périphérique intrinsèque à « l’entrée » est alors peut-être aussi un « laboratoire » précieux pour l’historien qui tente de comprendre les usages sociaux de la ville qui sont aussi les moteurs de son évolution. C’est en combinant le regard sur l’espace, et la sensibilité aux rythmes décalés qui l’animent, que l’analyse parvient le plus certainement à dépasser l’évidence de la fonctionnalité des lieux.
Notes de bas de page
1 Médiathèque du Patrimoine, Procès-verbaux de la Commission des abords, 80/059/1, liasse 1, 21 juillet 1965. La Commission des abords a pour mission d’examiner les projets d’aménagement urbain qui se trouvent dans le périmètre d’un monument classé ou inscrit à l’inventaire supplémentaire selon la loi du 31 décembre 1913, précisée par celle du 25 février 1943 qui définit « le champ de visibilité d’un immeuble classé », fixé à 500 m.
2 La loi du 19 mai 1802 décide de la dérivation de l'Ourcq aboutissant au bassin de la Villette, et de la construction des deux autres canaux. Le bassin est mis en eau en octobre 1808 et les trois canaux — canal de l’Ourcq, canal Saint-Denis, canal Saint-Martin ouvrent entre 1821 et 1825.
3 Cet article s’appuie sur une enquête menée en collaboration avec Nathalie Montel : « Le bassin de La Villette au xixe siècle : espace construit, espace vécu ».
4 En 1861, la ville de Paris rachète la concession pour le canal Saint-Martin, et elle rachète celle des canaux Saint-Denis et de l’Ourcq en 1876.
5 Labedollière (Émile de), Le nouveau Paris. Histoire de ses 20 arrondissements, Paris, G. Barba, Les Buttes Chaumont, p. 289-304.
6 Musée de la batellerie, Conflans-Sainte-Honorine (MBCSH), Fonds Carivenc, Le Moniteur, 8 janvier 1828.
7 Archives des Canaux de la ville de Paris (ACVP), Registre des délibérations de la compagnie, 6 juin 1822.
8 Archives départementales de Paris (ADP), VO3 545, rapport de Durand Claye, 9 août 1877.
9 ADP, VO3 545, rapport d'ingénieur, juin 1877.
10 Cette eau provient d’ouvrages anciens tels que l’aqueduc d’Arcueil, des sources du Pré-Saint-Gervais, de Belleville et de Ménilmontant, les machines hydrauliques et les pompes à feu des frères Périer sur la Seine. Il faut y ajouter les eaux de Seine filtrées et vendues par des compagnies privées et les prélèvements des porteurs d'eau dans le fleuve.
11 Chabrol (G. J. G, comte de), Recherches statistiques sur la ville de Paris et le département de la Seine, Paris, Imprimerie Royale & Dupont, vol. 2, 1823, tableau 9.
12 Elle repose principalement sur la dérivation d'eaux de source (Dhuis 1865, Vanne 1875). Lemarchand (Georges), Étude générale sur l'alimentation en eau de la ville de Paris et du département depuis 1854, Paris, Imprimerie municipale, 1923.
13 Cebron de Lisle (Philippe), L’eau à Paris au xixe siècle, Paris, Association générale des hygiénistes et techniciens municipaux, 1991.
14 Girard (Pierre Simon), Recherches sur les établissements de bains publics à Paris depuis le vie siècle jusqu'à présent, Paris, E. Crochard, 1832, p. 46-56.
15 Backouche (Isabelle), La trace du fleuve. La Seine et Paris (1750-1850), Paris, EHESS, 2000.
16 Say (Jean-Baptiste), De l'importance du port de la Villette, Paris, Deterville, 1818, p. 16.
17 Ibidem.
18 Il faut comparer les chiffres donnés par plusieurs sources. Chabrol (G. J. G, comte de), op. cit., vol 2, tableau 15, vol. 4, tableau 7 ; Annuaire statistique de la ville de Paris, 1880 ; MBCSH, fonds Carivenc, boite 43.
19 Humblot (Félix-Eugène-Edmond), Les canaux de Paris à la fin de 1884, Paris, Chaix, 1885 ; MBCSH, fonds Carivenc, boite 43.
20 Ibidem.
21 Ibid.
22 Montel (Nathalie), « Mutations spatiales, stratégies professionnelles et solidarités familiales à Paris au xixe siècle. Le rôle des raffineurs de sucre villettois dans la formation d’un espace industriel », Histoire urbaine, décembre 2001, n° 4, p. 47-65.
23 Commission d’extension de Paris. Aperçu historique, Paris, Chaix, 1913, p. 136.
24 Recueil des actes administratifs de la préfecture du département de la Seine, 1re année, 1844, Paris, Librairie administrative de Paul Dupont, 1844 ; ADP, DM8/1M8, dénombrement de population, 1886, Paris et banlieue ; Canfor-Argandona (Elise) et Henri-Guerrand (Roger), La répartition de la population, les conditions de logement des classes ouvrières à Paris au xixe siècle, Paris, CSU, 1976, p. 321.
25 Recueil des actes administratifs… op. cit.,1844.
26 Nous avons constitué deux échantillons distincts : 820 hommes par le biais des deux premières lettres de l'alphabet ; 1717 hommes sélectionnés dans certaines rues sur lesquelles nous avons approfondi l’étude.
27 ADP, D1M2/201, listes électorales, 1er janvier 1872, 19e arrondissement, quartier de La Villette.
28 ADP, DO9 42, 43, 44.
29 ADP, VD14/14/Listes électorales, 1830.
30 ADP, D2M2/8, Préfecture du département de la Seine, Formation des listes d'électeurs communaux pour l'année 1838.
31 Carte topographique des environs de Versailles, dite des Chasses impériales, levée et dressée de 1764 à 1773, par les ingénieurs géographes des camps et armées, commandée par feu M. Berthier, colonel, terminée en 1807.
32 Manin (Charles-V), Banlieue. Supplément au petit atlas pittoresque des 48 quartiers de la ville de Paris, arrondissement de Saint-Denis et arrondissement de Sceaux, rédigé d’après Cassini, les travaux du cadastre et ceux du dépôt de la guerre, gravé par Laguillermie, Paris, chez E. Garnot, 1834, planche 3, canton de Pantin.
33 Tableau d’assemblage du plan cadastral parcellaire de la commune de La Villette. Canton de Pantin, arrondissement de Saint-Denis. Département de la Seine, terminé sur le terrain par M. Buyer, géomètre du cadastre, 1844
34 ADP, DO9/41.
35 Lambeau (Lucien), Histoire des communes annexées à Paris en 1859, La Villette, Paris, Ernest Leroux, 1926.
36 Recueil des actes administratifs…, op. cit, 1844.
37 ADP, DO9/43 et DO3/230.
38 ADP, DO3/230. Il est installé au carrefour formé par le quai de l’Oise, le quai de Seine et la rue de Bordeaux, aujourd’hui, rue de Crimée.
39 ADP, DO9/41.
40 ADP, DO3/229. L’église Saint-Jacques-Saint-Christophe est consacrée par Monseigneur Affre, archevêque de Paris le 27 octobre 1844.
41 ADP, DO3/229, Lettre du maire de La Villette au sous-préfet, 19 septembre 1840.
42 ADP, DO9/41.
43 ADP, DO3/230.
44 Aujourd’hui, place de Bitche.
45 ADP, DO3/229.
46 Rapport du sous-préfet de l’arrondissement de Saint-Denis, Recueil des actes administratifs…, op. cit., 1844, p. 264.
47 Ibidem.
48 Ibid.
49 La date de création de l’octroi dans les communes est indiquée entre parenthèses.
50 Montel (Nathalie), « Chronique d’une mort annoncée : l’annexion par Paris de sa banlieue en 1860 », Recherches contemporaines, 2000-2001, n° 6, p. 217-254.
51 Plusieurs projets de raccordement du bassin avec le chemin de fer de petite ceinture ont été projetés, mais aucun n’a abouti.
52 ADP, DM3/39.
53 ACVP, Délibérations de la compagnie des canaux, 1821-23, 1839-1841, 1843-45, 1845-47 et plans parcellaires et divers, 1844-1869.
54 ADP, D1M8/dénombrement/1886/professions.
55 ACVP, 1819-1902, entretien immeubles, magasins, arrêté du préfet de la Seine du 1er mars 1822.
56 ACVP, Délibérations de la compagnie des canaux, 1er octobre 1839.
57 ACVP, Délibérations de la compagnie des canaux, 15 octobre 1839.
58 ACVP, Délibérations de la compagnie des canaux, 14 janvier 1840.
59 ADP, VO3 534, rapport de Durand-Claye, janvier 1879.
60 Nouveau guide ou conducteur parisien contenant des détails exacts sur la ville de Paris, depuis son origine jusqu'à nos jours […], Paris, Leroi et Ledoyen, 1828.
61 Person de Teyssedre, Conducteur général de l'étranger à Paris, Paris, Constant-Chantpie, 1834.
62 Cesena (Amédée de), Le nouveau Paris, guide de l'étranger pratique, historique, descriptif et pittoresque […], Paris, Guides Garnier Frères, 1864.
63 Marin de P (J. C. G), Quinze jours à Paris ou guide de l'étranger dans la capitale et ses environs […], Paris, Chaumerot libraire, 1863.
64 Deschaumes (Edmond), Pour bien voir Paris, guide parisien pittoresque et pratique, Paris, M. Dreyfous, 1889.
65 Reichard (Heinrich August Ottokar), Guide des voyageurs en France, Weimar, bureau d’industrie, 1810.
66 B. -R., Le guide du promeneur aux barrières et dans les environs de Paris […], Paris, R. Ruel aîné, 1851.
67 Girault de Saint Fargeau (Eusèbe), Guide pittoresque du voyageur en France […], Paris, Firmin Didot, 1835.
68 Guide pour tous. Paris tel qu'il est […], Paris, Librairie nouvelle, 1855.
69 Cesena (Amédée de), Le nouveau Paris… op. cit.
70 Moreau, Guide recueil de Paris-brulé. Événements de mai 1871 contenant le récit de l'entrée de l'armée à Paris et la bataille des rues, des notices historiques et archéologiques sur tous les monuments et maisons particulières incendiés ou détruits, Dentu, Paris, 1871.
71 Ibidem.
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