Introduction. Un siècle de créations lyriques en France : paradoxes, utopies, réalités
p. 9-28
Texte intégral
1Qu’est-ce qu’un opéra, sinon la rencontre de l’utopie et de l’émotion : l’utopie d’une œuvre d’art total(e) conçue dans une logique de divertissement ou d’édification et qui, pour connaître la reconnaissance suprême de « l’entrée au répertoire », doit cristalliser une émotion universellement partagée, au-delà des frontières géographiques et temporelles. Cependant, ne serait-ce que par le choix de la langue du livret, la question de l’identité culturelle demeure centrale.
2Aux XVIIIe et XIXe siècles, de Rameau à Gluck, de Boieldieu et Meyerbeer à Gounod et Massenet, de nombreux compositeurs français ou travaillant en France ont fourni à l’histoire de l’art lyrique des ouvrages emblématiques, à la fois plébiscités par le public, influençant l’histoire du goût, demeurant ou revenant régulièrement à l’affiche en dépit d’éclipses, en vertu de renaissances. Toutefois, si cette considération est replacée dans l’actualité mondialisée du début du XXIe siècle, de ces deux siècles particulièrement féconds pour l’art lyrique, qui accueillent l’opéra au cœur des usages sociaux au point que leurs figures tutélaires donnent leurs noms à des rues ou des stations de métro de Paris, force est de constater que seule Carmen de Bizet (1875) a intégré le grand répertoire international1.
3Élargissons cette investigation au XXe siècle. Les mélomanes avertis fredonnent peut-être la chanson de Mélisande peignant ses cheveux du haut de sa tour ou frémissent à l’évocation du « Salve Regina » des Carmélites guillotinées l’une après l’autre ; mais qu’a pu retenir le grand public des créations lyriques en France depuis 1900 ? Peut-être le bon millier de représentations de la sulfureuse Louise de Charpentier (1900) ? La subtilité aigre-douce de L’Enfant et les sortilèges de Ravel (1925) ? L’expressionnisme à la française de La Voix humaine de Poulenc (1959) ? Ou encore le hiératisme sensuel de Saint François d’Assise de Messiaen (1983) ?
4En 1957, René Leibovitz2 ne garde de l’opéra français du XXe siècle que Pelléas et Mélisande (Debussy, 1902), L’Heure espagnole (Ravel, 1911), L’Enfant et les sortilèges et deux œuvres de Milhaud : Les Malheurs d’Orphée (1926) et Le Pauvre Matelot (1927). Leibovitz3 souligne les contradictions et les ambiguïtés de l’art lyrique et montre que seuls quelques compositeurs ont eu une influence avérée sur le genre au XXe siècle : pour la France, il retient uniquement Debussy, qualifiant Pelléas et Mélisande de « Tabula rasa4 ». Mais il est vrai que sa subjective et peu francophile Histoire de l’opéra est conçue avant Dialogues des Carmélites (Poulenc, 1957) et Saint François.
5En 1987, Rodney Milnes, rédacteur en chef du magazine londonien Opera, sélectionne quant à lui seize opéras français : Pelléas et Mélisande, L’Heure espagnole, L’Enfant et les sortilèges, Les Mamelles de Tirésias (Poulenc, 1947), cinq opéras de Milhaud (Le Pauvre Matelot ; Christophe Colomb, 1930 ; Bolivar, 1943 ; David, 1954), Le Roi David (1925) et Jeanne au bûcher (1938) d’Honegger, Dialogues des carmélites, Saint François d’Assise, Montségur (1987) et La Sorcière du placard à balais (1986) de Landowski, Noces de sang de Chaynes (1988), La Conférence des oiseaux (1985) de Levinas et Maximilien Kolbe de Probst (1988)5.
6Enfin, en 2001, dans sa rétrospective globale du XXe siècle6 Philippe Albèra admet quelques œuvres récentes. Pour ce qui est du domaine français, il remarque tout d’abord la rareté de programmation de Ravel, Milhaud et Honegger et la difficulté de donner Saint François d’Assise. Puis il analyse l’influence considérable de Pelléas, remarquant parmi ses suiveurs de Dukas d’Ariane et Barbe-bleue et montre comment Ravel en tire les leçons formelles dans L’Heure espagnole, archétype de l’opéra parodique. Pour la première moitié du siècle, Albèra mentionne aussi Oedipus rex de Stravinsky, L’Enfant et les Sortilèges, Les Mamelles de Tiresias, Christophe Colomb, Bolivar, Le Roi David, David, mais aussi, Maximilien (1932) de Milhaud, Jeanne au bûcher et Œdipe d’Enesco (1936). Pour la seconde moitié du siècle il élit Dialogues des Carmélites, Saint François d’Assise, L’Écharpe rouge d’Aperghis (1984), Trois Sœurs (1998) de Eötvös, Salammbô de Fénelon (1998, première création mondiale à l’Opéra Bastille), et Le Premier cercle de Gilbert Amy (1999).
Paradoxes
7Pourtant, la France a accueilli depuis 1900 près de mille créations, de presque trois cents compositeurs dans presque cent-cinquante salles, et ce malgré les vingt-cinq années noires qui succèdent à la fin de la Seconde Guerre mondiale. En 1957, Leibovitz n’est pas dupe. En effet, comme bien d’autres, il accuse les théâtres lyriques d’être devenus des « musées d’opéra7 » et dénonce la valeur « presque nulle8 » de la plupart des partitions composées en marge des chefs-d’œuvre et l’abondance « d’œuvres médiocres9 ». Elles ont cependant entretenu la tradition opératique et, partant, la survivance du genre à travers le siècle.
8Dix ans plus tard, l’inertie passéiste des institutions, même si elle éduque les jeunes générations10, incite Pierre Boulez à pousser son fameux : « Dynamitons les maisons d’opéra11 », en écho à l’aveu de Debussy : « Si par malheur quelque ironique anarchiste avait eu la fantaisie de dynamiter l’Opéra, il est certain qu’on m’aurait accusé d’avoir été, pour le moins, l’inspirateur de ce geste éloquent mais brutal12 », lui-même nourri au lait de la mauvaise humeur wagnérienne à l’égard des institutions lyriques. Cette position est d’autant plus paradoxale que Debussy a bouleversé l’art lyrique avec Pelléas et que Boulez s’affirme comme l’un des chefs d’orchestre d’opéra les plus accomplis de la seconde moitié du XXe siècle. Mais s’il donne des lectures incontournables de monuments du répertoire, il demeure intransigeant à l’égard du vieux genre, qualifiant le livret de Pelléas de « tisane poétique13 » tout en en gravant une version d’anthologie.
9Leibovitz, sérialiste convaincu qui avait été le professeur de Boulez rue de Madrid avant qu’il ne lui préfère Messiaen, était tout de même plus optimiste et appelait à « cosmopoliser l’opéra14 » afin d’en extraire la quintessence. Vingt ans plus tard, c’est chose faite avec la nomination de Rolf Liebermann à la tête de l’Opéra de Paris en 1973 : il modifie l’organisation interne, engage une politique de commandes, confie des mises en scène à des hommes de théâtre et internationalise les distributions. Après l’âge d’or de la Belle Époque puis les tentatives de renouvellement de l’entre-deux-guerres, un vent de dynamisme souffle enfin sur le genre désigné depuis les années 1930 comme moribond, stimulant de nombreux compositeurs, toutes générations confondues. L’opéra français sauvé par un Suisse-Allemand ayant officié pendant quinze ans en Allemagne ? Au début des années 1980, le théâtre lyrique est promis, en France, à un bel avenir qui ne s’est en effet pas démenti, dans une perspective de démocratisation, d’européanisation, voire de mondialisation de la culture en général et de l’opéra en particulier. Pour ne citer qu’un exemple emblématique, rappelons que la distribution de la création parisienne de Saint François de Messiaen s’appuie sur un chef japonais (Seiji Osawa), un premier rôle belge (José Van Dam), un second rôle américain (Kenneth Riegel) et que sa première nouvelle production, commandée par Gerard Mortier pour le printemps 1992, est une coproduction entre le Festival de Salzbourg, l’Orchestre philarmonique de Los Angeles et l’Opéra Bastille, fondée elle aussi sur une distribution internationale15.
10Pourtant, lorsqu’en 1999, Harry Halbreich16 établit une liste de la discographie idéale des opéras du XXe siècle, les opéras français accédant à ce palmarès sont : Pelléas et Mélisande (opéra du millénaire), Ariane et Barbe bleue de Dukas, Œdipe d’Enesco (opéra du millénaire), La Vie brève (créé en traduction française mais tout de même conçu en espagnol !) et Les Tréteaux de Maître Pierre de Falla, Pénélope de Fauré, Les Aventures du roi Pausole d’Honegger, Christophe Colomb et Les Malheurs d’Orphée de Milhaud, L’Heure espagnole et L’Enfant et les sortilèges de Ravel, Padmâvati de Roussel. Autrement dit, rien des créations de la seconde moitié du siècle ne trouve grâce à ses yeux. L’opéra français serait-il anachronique ?
Utopies
11Dans cette France de la modernisation et de la société de loisirs, l’opéra cherche pourtant de nouvelles voies tout en conservant sa dépendance envers un système de financement qui a toujours à voir avec le capital, le pouvoir et une nécessité de valoriser l’investissement public ou privé par des œuvres qui rapportent ou, du moins, ne creusent pas de déficit17. L’opéra s’inscrit dans une identité nationale, territoriale, au même titre qu’il participe de cette identité et contribue à la construire ou à la renforcer18. Pour ce qui est de l’Opéra national, dans cette configuration ancrée au cœur d’une république démocratique, l’artiste, l’équipe artistique, les créateurs, servent à « faire croire au représentant du peuple qu’il est resté un prince19 » en s’insérant dans une logique qui se voudrait de triple échange avec le politique (désir), la culture nationale (rémunération contre promotion et renforcement) et le public (plaisir esthétique), mais dont bien souvent seul le terme politique est respecté20.
12En ce sens, les pays germaniques, fondamentalement décentralisés, affichent un dynamisme exemplaire en matière de fréquentation et de création21. Les productions allemandes des théâtres de Berlin, Leipzig, Stuttgart, Francfort, Bielefeld, Mannheim importées en France entre 1958 et 1963 dans le cadre du Théâtre des Nations en sont un exemple à la fois flagrant et fécondant, dont les répercussions sur l’avenir de l’art lyrique sont essentielles en termes de mise en scène et de conception de l’œuvre : « En Allemagne, l’opéra a toujours été considéré comme une partie intégrante et un élément vital de la culture générale, alors qu’en France, il n’a souvent été qu’un divertissement réservé à une élite sociale22. » Cette utopie de faste à la française est dénoncée par Michel Schneider : « Créer, c’est faire face à l’angoisse, la dévisager comme une sœur secourable. Gouverner, c’est lui tourner le dos. Le pouvoir est l’inépuisable tentative d’en finir avec la création23. » Il montre comment « sous nos yeux, l’État devint un spectacle, tandis que les spectacles se firent de plus en plus étatiques. Au désenchantement cynique du politicien qui ne croit plus au politique, répondit l’enchantement vain de l’artiste qui ne croit plus que l’art veuille dire quelque chose à quelqu’un24 ». Serait-il conjoncturellement impossible d’imaginer un opéra, en France, qui ne s’ancre pas dans un idéal de monarchie éclairée, avec les coteries et les dérives qu’il implique ?
13En dépit de son image élitaire et de la crise qu’il a connue après 1945, le théâtre lyrique fait et continue à faire rêver. Représentant une forme supérieure du goût en raison de son caractère dispendieux inféodé à la conjonction de multiples disciplines et compétences artistiques, aucun gouvernement français, au cours des dix dernières décennies, n’a osé toucher de manière drastique à ce monument culturel. Après l’utopie du Front populaire qui avait regroupé en un même ministère l’Éducation nationale et les beaux-arts, les rêves de décentralisation du ministère Malraux donnent lieu, jusqu’à la fin des trente glorieuses, à un accroissement des budgets et des commandes.
14Cette générosité est poursuivie par le gouvernement socialiste de François Mitterrand : sa politique culturelle conduite par Jack Lang subventionne la construction d’un nouveau temple lyrique près de l’emplacement de la Bastille, inauguré le 13 juillet 1989 à l’occasion des festivités du bicentenaire de 1789. Un art éminemment monarchique serait-il devenu, après la politique de démocratisation et de décentralisation culturelle menée par Vichy, un art démocratique25 ? Effectivement baptisé pour la circonstance historique « opéra populaire », pourtant « hors de nos frontières, l’Opéra Bastille ne suscite pas l’envie, mais le rire, ou la désolation26 », figure au « sottisier lyrique international27 » et n’a pas démontré l’efficacité en termes de coût et de nombre de représentations qui avait présidé à son élaboration, pour la coquette somme de trois milliards de francs. Résultat non pas d’une politique culturelle de gauche mais d’une attitude médiatique autocentrée28 sur la glorification d’un prince ? Comme l’écrit Danielle Cohen-Levinas, « les compositeurs d’opéras sont les bâtisseurs d’une utopie occupant, dans la création musicale, la place du Roi29 ». La logique des privilèges et de l’obédience au monarque qui avait présidé à la naissance de l’opéra français demeurerait-elle une ombre tutélaire ? L’utopie des Princes, passe-t-elle, en France, nécessairement par une mise en abyme culturelle et tout particulièrement, de Louis XIV à François Mitterrand, opératique ?
15Au-delà de cette volonté de conférer à un art réputé pour son conventionnalisme une dimension actuelle et démocratique, quelle est la place de la France dans « l’espace opératique occidental30 » ? La tradition française est de défendre, ouvertement ou non31, une exception culturelle, reposant sur un patrimoine spécifique et symbolique dont l’opéra fait partie au même titre que le théâtre classique et contemporain, la peinture, la musique classique et le ballet32. Entraîné dans le rayonnement des œuvres données à l’Opéra de Paris sous ses diverses métamorphoses et dont le Palais Garnier est l’emblème absolu avec sa hiérarchisation architecturale des classes sociales et sa mise en scène du public : « L’Opéra ne devait être ni savant ni populaire, mais accessible tout en restant majestueux33 » ; ainsi contribue-t-il par son rayonnement et sa valorisation à améliorer la qualité de vie des citoyens, leur dynamisme et leur créativité34. Or sans création, ce patrimoine meurt et tous les gouvernements ont compris l’importance de la subventionner, même si le concept même de création, issu d’une imagerie peu ou prou religieuse, peut sembler galvaudé35. C’est pourquoi, au contraire des sombres pronostics des années 1930 ou des fantasmes progressistes des années 1960, l’opéra n’est pas mort. Fruit d’une utopie au moins autant politique qu’artistique, il a survécu grâce, d’une part, à son enracinement dans une culture populaire proche des genres légers et, d’autre part, au maintien de subventions, néanmoins disproportionnées entre Paris et la province36.
Réalité
16Aborder la création lyrique en France au XXe siècle relève donc d’une gageure car nul spectacle ne fut, dans ce pays, autant glorifié, snobé, bousculé, ridiculisé, condamné à mort, exécuté et ressuscité. Un genre et déjà tant de réalités au tournant des XIXe et XXe siècles en dehors des ouvrages répondant aux canons usuels définis par les cahiers des charges de l’Opéra ou de l’Opéra-Comique : les avatars du drame lyrique wagnérien comme Le Roi Arthus de Chausson (1903) ou L’Étranger de d’Indy (1903), les œuvres naturalistes comme Le Rêve37 (1891) ou L’Attaque du moulin (1893) de Bruneau ou Louise de Charpentier, les fresques mythologiques comme Prométhée de Fauré (1900) ou Hélène de Saint-Saëns (1904), les opéras littéraires comme Pelléas et Mélisande de Debussy d’après Maeterlinck, les contes et autres miracles comme Grisélidis (1901) ou Le Jongleur de Notre-Dame de Massenet (1902) ou encore les œuvres expérimentales comme Prométhée de Fauré (1900) dont bon nombre, boudés par les institutions métropolitaines furent créées aux frontières, notamment au Théâtre royal de la Monnaie à Bruxelles (Le Roi Arthus) ou à l’Opéra de Monte-Carlo (Le Jongleur de Notre-Dame).
17Effet de la construction du Festpielhaus de Bayreuth où, dans la salle, tous les regards convergent vers le spectacle et des diktats wagnériens en matière de retenue des applaudissements ? Dès les premières années du siècle, Claude Debussy s’insurge contre les mondanités et l’absence de goût qui président aux soirées du Palais Garnier38, ainsi que l’incohérence du public « qui demande “du Nouveau” [et qui] est le même qui s’effare et se moque toutes les fois qu’on essaye de le sortir de ses habitudes et du ronron habituel39… » : « En conscience, le spectacle purement mondain des belles dames descendant le célèbre “grand escalier” dans un bruit de soies froissées n’est pas suffisant comme musique40. » Il dénonce l’emprise de « la métaphysique wagnérienne [et du] fait divers italien41 », soulignant l’absence de cohérence de la musique française dans ce contexte et redoutant la vanité des recherches « qui paraissent, à première vue, devoir éloigner toute musique à brève échéance42 ». Il appelle de ses vœux « une forme d’art lyrique entièrement neuve43 », fantasme récurrent d’un bout à l’autre de ce siècle complexe. Charles Koechlin prophétise alors : « l’avenir du drame lyrique sera peut-être aussi superbe que varié, mais il ne prospèrera que dans l’indépendance jointe au respect absolu de l’art musical44 ». Ce qu’il appelle l’art musical, c’est la faculté de la musique à exprimer l’évolution des sentiments en fonction d’un texte qui « serre d’assez près la vérité vivante de l’âme45 ». Koechlin anticipe ainsi aussi bien les extrémismes de l’après-guerre que le post-modernisme du tournant des XXe et XXIe siècles. Quelle place occupe la France dans ce renouveau ?
18Après l’interruption de la Première Guerre mondiale, le début de l’après-guerre peine à donner un nouveau souffle à l’activité lyrique. Les créations reprennent dans les années 1920 avec quelques belles réussites et l’avènement des interrogations sur la forme lyrique en regard de la modernité insufflée à l’art par les nouveaux media, cinéma46 et radio, ainsi que de la pesanteur des institutions. L’opéra se maintient alors sur le fil entre tradition et changement, une problématique qui imprime tout le siècle à venir. Aux commandes de l’Opéra depuis 1914, devant les menaces financières et esthétiques qui pèsent sur le répertoire comme sur les créations, en 1932 Jacques Rouché appelle de ses vœux une évolution de l’art lyrique conciliant « l’auteur et le public, le directeur et l’abonné47 ». Il sent que quelque chose doit advenir, mais quoi ? Toute volonté politique, quand bien même née d’une observation perspicace, doit dialoguer avec les réalisations des hommes de terrain, or ces derniers, compositeurs et artisans du spectacle s’enlisent la plupart du temps dans des attitudes compassées :
« On ne veut plus du théâtre lyrique, paraît-il. Mais hier, voulait-on encore du théâtre tout court ? Pour y ramener le public, il a suffi d’un Baty, d’un Jouvet… La scène musicale n’a pas encore eu son Jouvet et son Baty. […] Cependant ce n’est point du théâtre lyrique d’avant-garde que nous voulions. Il ne s’agissait point de remonter Les Mariés de la Tour Eiffel, mais de retrouver, en le dégageant des conventions périmées de modernisme, l’esprit de notre opéra-comique, de notre opérette française48… »
19Dans l’entre-deux-guerres, la programmation témoigne généralement d’une prédominance du goût qui prévaut dans les petits théâtres lyriques jusqu’à l’Opéra-Comique49, perpétuant avec succès des œuvres au ton léger, à la dramaturgie efficace et à la musique « simple50 » : les œuvres plébiscitées par Barraud et Landormy sont L’Écossais de Chatou de Léo Delibes, « authentique petit chef-d’œuvre51 », La Vénitienne de Kerdyck et Rivier, « légère, fantasque52 » et La Poule noire de Nino et Rosenthal, « petite bouffonnerie […] du bon vieux vaudeville français53 ». Dans le même temps, Rouché programme à l’Opéra des valeurs sûres et de haute tenue54. Ainsi, en toute logique, la fin des années trente voit une forme de négation des avant-gardes et du modernisme pour un retour à l’humain, comme en témoigne la création en 1936 du groupe « Jeune France » constitué d’André Jolivet, Olivier Messiaen, Daniel-Lesur et Yves Baudrier, dont trois membres contribuent au renouveau de l’opéra entre 1960 et 198355.
20Cet « esprit » s’enlise dans les années qui suivent la Libération, un « âge de toutes les guerres56 », qui n’est assurément pas celui de l’apogée de l’art lyrique. Si l’entre-deux-guerres a porté quelques utopies comme L’Enfant et les sortilèges, Oedipus rex (Stravinsky, 1927, théâtre Sarah Bernhardt), La Tour de feu (Lazzarri, 1928, Opéra de Paris), Œdipe après le second conflit mondial, le cinéma et ses moyens considérables inspirent aussi les artistes. Darius Milhaud confie au sujet de la création de Bolivar à l’Opéra de Paris : « l’épopée de Bolivar constitue une vaste fresque populaire et dramatique. J’ai voulu en faire une œuvre à grand spectacle, selon la tradition de Verdi et de Mozart. L’action est intense, la figuration très abondante. Le cinéma a signé l’arrêt de mort des spectacles statiques, où rien ne se passe. Bolivar en est la preuve57 ». L’opéra connaîtrait-il un renouveau dans les fresques historiques rappelant la dimension monumentale de la tragédie lyrique ou du grand opéra en écho aux péplums ?
21À cette époque, l’art sous toutes ses formes s’émancipe et dénote un goût prononcé pour les avant-gardes, en résonance avec les préoccupations de la génération 1920-1935, autre sortie de crise. Cependant l’opéra demeure, malgré des efforts timides58, l’antithèse d’un genre engagé :
« J’avais gardé un souvenir horrifié de représentations piteuses à l’Opéra de Paris auxquelles j’assistais dans la loge des élèves du Conservatoire. À l’exception du festival d’Aix, ce n’était guère mieux ailleurs : décors poussiéreux, mises en scène risibles, un “concert en costumes” disait Claudel, et encore le concert n’était pas fameux. De temps en temps, Knappertsbuch venait à l’Opéra. La musique était là, superbe, mais il valait mieux fermer les yeux59. »
22Et justement, le courant d’air frais vient du sud et de l’été, quand le genre s’émancipe des théâtres à l’italienne pour investir d’autres espaces à l’image du théâtre parlé, notamment du festival d’Avignon. Thierry G. Boucher60 montre cependant que cette délocalisation reste timide, aussi bien à travers les décors de Cassandre pour la cour de l’Évêché à Aix-en-Provence (1948) que par l’emploi du théâtre antique d’Orange où l’on donne des opéras dès 1869, les fameuses Chorégies étant inspirées des spectacles lyriques donnés dans les arènes de Béziers entre 1898 et 192561. Conjointement à la multiplication des festivals où l’art lyrique sait peu ou prou trouver sa place, l’opéra se démocratise peu à peu et, après le partenariat d’un quart de siècle entre le Festival d’Avignon et le Programme musical de France-Culture pour la subvention du théâtre musical62, dans les années 1980, l’opéra investit des salles parisiennes alternatives comme le Théâtre des Amandiers de Nanterre – qui devient dans les années 1990 le havre de l’ATEM – ou encore la maison de la culture du 93 à Bobigny.
23Le gel total des créations à l’Opéra à partir de 1955 enterre-t-il le théâtre lyrique dans les théâtres subventionnés ? « L’âge de la croissance63 », caractérisé par une morale hédoniste, l’attrait irrépressible pour la modernité, les musiques populaires et le formalisme qui voit l’avènement du Domaine musical, refuse manifestement toute concession au passé et instaure à la fois l’autonomie de la création et la distance d’avec l’objet créé. Si l’on continue à voir de nouveaux opéras à Bordeaux, Nancy, Toulouse, Marseille, Mulhouse, Rouen, Strasbourg, Tours, Reims, Metz, Lille et Lyon, et à Paris à l’Opéra-Comique, au théâtre du Châtelet et au Théâtre Sarah Bernhardt, ce n’est sans doute pas le public de l’avant-garde qui se presse dans ces salles. Le hiatus est total et les camps farouchement antagonistes, quand ils ne sont pas franchement hostiles.
24C’est lors de la décennie suivante, « l’âge de mai64 », dernière étape de la croissance et du formalisme mais qui accueille aussi des expérimentations plus libres et festives (création du GRM, apogée du théâtre musical) que l’intuition de Barraud et Landormy est avérée : c’est effectivement par le théâtre que l’opéra reprend vie dans trois directions distinctes. Tout d’abord, les institutions sont dynamisées par la présence de Marcel Landowski à la direction de la Musique de 1966 à 1974, par la nomination de directeurs d’opéra dynamiques comme Louis Erlo à Lyon, Michel Plasson à Toulouse ainsi que par la mise en place d’une politique de formation professionnelle (notamment la création de l’Opéra-studio en 1973), d’aides et de prix. Mais l’opéra se renouvelle aussi par l’implication de metteurs en scène innovants comme Jean-Louis Barrault (Wozzeck à l’Opéra de Paris en 1963), Jorge Lavelli (Faust et Pelléas et Mélisande à l’Opéra de Paris en 1975 et 1977), Luca Ronconi (Le Barbier de Séville au Théâtre de l’Odéon en 1975) ou la très symbolique présence du jeune Patrice Chereau aux commandes du Ring du centenaire de Bayreuth en 1976. Enfin, le théâtre musical dont les modes d’expression divergent grandement d’une production à l’autre65 fait du festival d’Avignon l’un des hauts lieux de l’innovation lyrique en France. Pourtant, déjà, la jeune génération prend ses distances d’avec les avant-gardes, consciente que le sérialisme comme l’œuvre ouverte sont des formes d’académismes66 et appelle de ses vœux « quelque chose de plus dramatique, avec une véritable représentation scénique67 », comme le formalise clairement Philippe Hersant quelques années plus tard.
25C’est alors l’heure de ce que Pascal Ory nomme « l’âge post-moderne68 », la période 1975-1985, clairement américanophile, qui voit notamment le retour de la figuration en peinture et la marginalisation de la musique sérielle et de ses avatars69 : l’heure du retour en force de l’opéra aurait-elle sonné ? Le plaisir du texte et le sens du religieux renaissants annoncent-ils l’avenir du genre ? Cela ne fait aucun doute si l’on considère les deux œuvres majeures de l’année 1983 : La Passion de Gilles de Philippe Boesmans sur un texte de Pierre Mertens créé à La Monnaie à Bruxelles quelques jours avant celle de Saint François d’Assise de Messiaen à l’Opéra de Paris. Maurice Ohana, élève de Daniel-Lesur à la Schola cantorum confirme ce virage esthétique : « je ne chasse pas la musique : je la laisse venir, comme un oiseleur patient et attentif. Jamais je ne traque les idées à l’aide d’un système ou d’une spéculation70 ».
26Giordano Ferrari voit, quant à lui, dans les quinze ans situés entre 1969 et 1984 une période d’éclatement de la dramaturgie lyrique qui permet interprétations et détournements du genre canonique où se renforcent, éclosent ou se développent opéras radiophoniques, théâtres musical et instrumental, happenings, expériences intégrant les musiques électroacoustiques, premiers pas des scènes multimédia71. Mais on observe un manque de moyens – et de goût ? – des grandes scènes françaises pour la création d’œuvres avant-gardistes, songeons par exemple à Kyldex I de Schöffer, Henry et Nikolaïs, créé à Hambourg en 1973 pour le départ de Rolf Liebermann qui ne peut-être ensuite donné à l’Opéra de Paris72. Et il note qu’une fois la méfiance tombée, au tournant des années 1980, l’opéra, libéré de ses carcans romantiques, voit éclore de nouvelles productions dont il s’agit de comprendre si elles sont des « simulacres, des détournements ou de nouvelles formes d’expression73 ».
27En effet, dans les années 1980 le théâtre musical s’est institutionnalisé, mais, dans sa quête de devenir une « tradition lyrique nouvelle74 », « échoue dans la récupération du renouveau du théâtre lyrique75 » et une renaissance de l’opéra est perceptible : pendant une bonne dizaine d’années, s’élabore un questionnement en profondeur sur le genre76 à partir d’œuvres aussi emblématiques que Le Grand Macabre de Ligeti dans la mise en scène de Daniel Mesguich qui s’achève par l’incendie de l’Opéra (Opéra de Paris, 1981). Quant à Désordres lyriques, donné à la salle Favart en 1988, cet opéra d’Arman et Aperghis tord le cou aux clichés de l’art lyrique après Staatstheater de Kagel (Hambourg, 1971) à grand renfort de déconstruction, citation, parodie. Aperghis utilise ses propres œuvres (Concerto grosso, Pandaemonuim, Liebestod) et cite Paillasse, Lulu, Les Mamelles de Tiresias, Don Giovanni tandis qu’Arman emploie des éléments de décor trouvés dans les poubelles des ateliers Berthier. Le « parangon du théâtre musical moderne77 » et son complice illustrent ainsi des scènes archétypiques de l’opéra, avec des allusions au mythe de Faust, célébration de la virtuosité des cantatrices caractérisées par leur propension à chanter d’étourdissantes vocalises en tricotant… et Jacques Lonchampt avoue que cela « ne manque pas de charme78 ». Les prémices de la post-modernité ?
28En 1976, la naissance de la revue L’Avant-scène opéra répond à la « faveur spectaculaire79 » dont jouit alors l’opéra et réclame la réaffirmation de « la théâtralité de l’opéra. Ni une alchimie de grands noms, ni un concours de décibels, ni une collection de contre-ut, l’opéra est d’abord un discours dans l’espace dont l’unité et le sens convergent dans la scénographie, véritable troisième langage80 ». Guy Samama appelle de ses vœux des créations d’œuvres du répertoire passant essentiellement par le renouvellement des codes de la mise en scène et par la redécouverte d’œuvres oubliées. Consacrée à La Flûte enchantée de Mozart juste après la sortie du film de Bergman, la nouvelle revue s’inscrit dans ce mouvement de renouveau en cherchant « à comprendre le vécu qui lie l’œuvre aux créateurs, aux interprètes, au public […] rendre compte à la fois de ce qui est donné à chaque ouvrage, entendu ou étudié, son caractère unique, et des liens qui l’unissent à un climat psychologique, esthétique, et social particulier à une époque81 ». Elle ouvre ses colonnes à des plumes qui interprètent le répertoire, comme Catherine Clément dès le numéro 3 consacré à Otello de Verdi, mais aussi en proposant de 1991 à 2004 la série « Opéra aujourd’hui » consacrée à des créations de compositeurs français82. Publiée avec le concours de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD), cette collection s’insère dans une dynamique d’incitation et d’aide à l’écriture et à la production d’ouvrages lyriques.
29Par ailleurs Charles Chaynes mène à la direction de la Création musicale de Radio France (1975-1990) une politique dédiée aux compositeurs, notamment à travers la commande d’une douzaine d’opéras donnés en version radiophonique avant d’être portés à la scène83. Radio France et Europe 1 se livrent une guerre au sujet des retransmissions radiophoniques d’opéra84. En outre, depuis juillet 1976 il existe une obligation de service public qui permet la diffusion télévisuelle de douze opéras par an, essentiellement du grand répertoire produit par l’Opéra de Paris ; ainsi pour la saison 1977-78 : Platée, L’Enlèvement au sérail, La Flûte enchantée, La Cenerentola, Les Contes d’Hoffmann, Werther, Le Couronnement de Poppée, La Dame de pique, Otello, et Simon Boccanegra85. Toutefois, à l’heure de la démocratisation de la TSF puis du petit écran qui tiennent le spectateur à distance des œuvres tout en lui en facilitant la consommation, la politique de création lyrique de la radio et de la télévision échoue, s’apparentant bien plus à une logique de médiation86, variant dans son ampleur et ses moyens au fils des politiques gouvernementales.
30Cette « phase singulière de contradiction et d’anticonformisme87 » voit pourtant la renaissance du genre à travers la démultiplication des expériences et des tentatives voulues comme autant d’émancipations de la figure-mère d’un opéra supposé dépassé et haïssable, bien que de nombreux compositeurs avouent leur attirance pour la force de l’harmonie, de la mélodie, et la beauté des voix88 ou la nécessité de prendre leurs distances d’avec « la terreur de la série89 », alors érigée comme canon de la musique contemporaine. Or si le XXe siècle a honni le XIXe, lieu de l’apogée de l’opéra comme emblème de la bourgeoisie90, malgré les craintes des organisateurs et les appels au meurtre des troublions, le théâtre lyrique perdure et, même, prolifère en France au XXe siècle à travers la coexistence d’un répertoire de plus en plus monolithique et d’œuvres nouvelles dont l’ensemble n’a que peu à envier au siècle précédent. Des artistes nés après le second conflit mondial comme, entre autres, Pascal Dusapin, Philippe Fénelon, Graciane Finzi, Philippe Hersant, Michael Levinas, Philippe Manoury, Gérard Pesson ou encore Michèle Reverdy, mettent alors sur le métier des ouvrages effectuant une synthèse entre des données historiques, des aspirations nouvelles et des moyens compositionnels décomplexés et désentravés des systèmes. Ils donnent, encore à l’heure où nous écrivons, des œuvres significatives dans ce mouvement de renouveau, voire « d’éternel retour », comme le souligne Danielle Cohen-Levinas91.
31Quelles sont ces œuvres nouvelles, ces créations qui jalonnent le XXe siècle français ? Comment l’opéra réagit-il à la crise de la modernité, et ce particulièrement à travers les créations programmées par les maisons françaises qui accordent, depuis toujours et en vertu de stricts cahiers des charges, une part importante aux œuvres des compositeurs français ou vivant en France92 ? De quelle manière offre-t-il un écho ou une réponse aux paradoxes des rapports complexes entre pouvoir bourgeois et mécène, modernité et avant-garde93 ? Quelles solutions les compositeurs et leurs collaborateurs rêvent-ils pour le genre lyrique ?
OPEFRA dans le contexte de la recherche
32Le groupe de recherches OPEFRA est né en octobre 2009 au sein du laboratoire GERHICO (université de Poitiers), à la suite d’un constat affûté lors de l’étude approfondie de l’œuvre de Daniel-Lesur94 : près d’un millier d’œuvres lyriques ont été commandées et créées en France au XXe siècle, mais très peu d’entre elles sont entrées au répertoire et le plus grand nombre est tombé dans l’oubli, véritable « continent englouti95 ». Pourtant, ce vivier existe, constitue un patrimoine et il est nécessaire de lui donner une visibilité en suscitant des études générales et monographiques et, à terme, en regroupant en une base l’ensemble des données historiques, documentaires et archivistiques. Car, comme le note Gérard Condé, « il n’est pas très sain qu’un compositeur écrive un opéra en vue de quelques représentations seulement. Il faudrait que le public ait envie de réécouter l’œuvre, que les interprètes prennent du plaisir à la rejouer et que les metteurs en scène souhaitent la monter96 ».
33La mission d’OPEFRA97, rassemblant une cinquantaine de chercheurs d’institutions et de disciplines variées mais travaillant tous sur l’opéra en France aux XXe et XXIe siècles, s’attache donc à porter à la connaissance du plus grand nombre, rendre compte de la diversité, des spécificités et du dynamisme de la création lyrique française, dans un paysage bibliographique encore timide et surtout lacunaire en dehors des monographies de compositeurs et études spécifiques sur des théâtres, des œuvres phare ou des questions générales de mise en scène ou de réception.
34En juin 1985 paraît un numéro spécial de la revue Autrement98 de 256 pages consacré à l’opéra, divisé en 56 articles et quatre annexes. En réunissant les plumes les plus pointues du moment99, il s’agit d’envisager successivement l’histoire du genre, ses acteurs, ses sanctuaires, ses usages et le projet Opéra Bastille. Le propos se divise en généralités et en études de cas, sachant que les articles concernant la France, les Français ou les usages de ce pays constituent environ un tiers du volume. Au même moment, Danièle Pistone publie un ouvrage collectif déterminant100 qui, à l’aube de la renaissance de l’opéra, a pour qualité de dresser un panorama de l’activité lyrique en France après la Seconde Guerre mondiale, notamment dans les théâtres de la RTLMF et d’offrir des études monographiques articulées en trois points : caractéristiques et fonctions, compositeurs et styles, cadres et structures. Dans cet héritage, les travaux de recensement et de collecte effectués dans le cadre d’OPEFRA devraient trouver un support informatique performant et pérenne pour être communiqués au public, afin de poursuivre et compléter la connaissance du patrimoine lyrique français du XXe siècle.
35Si la question de l’actualité de l’opéra est délaissée dans les années 1990, peut-être en raison du foisonnement des créations et de la difficulté à mener une lecture à chaud des voies et tendances, les années 2000 reviennent à la théorisation. C’est d’abord le remarquable panorama dressé par Pierre Albert Castanet101 dans l’ouvrage de Béatrice Ramaut-Chevassus Composer un opéra aujourd’hui qui envisage quatre cas particuliers (Jolas, Chaynes, Adams et Ohana) et propose une étude transversale sur les dramaturgies hölderlienniennes. Puis, fort d’une subvention de l’Agence nationale de la recherche, Giordano Ferrari anime l’équipe « Dramaturgie musicale contemporaine en Europe » (DMCE 2006-2008) qui ne fait pourtant qu’une place minime à la France102. Laurent Feneyrou rassemble en 2003 de remarquables contributions sur la dramaturgie musicale au XXe siècle103 dans une somme qui laisse également assez peu de place à la France, hormis les quarante pages consacrées à l’apport indéniable et majeur de Georges Aperghis au théâtre musical et à la (con) fusion des genres, notamment par Daniel Durney104 et Antoine Gindt105, ainsi que la trentaine de pages consacrées par Sylvie Bouissou et Costin Miereanu à leur opéra commun La Porte du paradis (1991).
36Ensuite, dans la lignée des études d’histoire culturelle et de sociologie de l’art qui ont vu le jour dans les deux dernières décennies du XXe siècle, deux colloques internationaux spécifiquement consacrés à l’opéra ont été organisés par Solveig Serre, Michel Noiray, Denis Herlin et Sabine Chaouche à Paris en 2009 et 2010. Leurs travaux rapidement publiés106 ont prouvé la nécessité de s’intéresser à l’histoire des institutions lyriques et leurs rapports avec leurs tutelles, aux répertoires et à leur réception, à la circulation des artistes et à la diffusion des œuvres. À ce titre, il semblait légitime de commencer par l’Opéra de Paris, l’Opéra-Comique et la Comédie française. En outre, la base de données Chronopéra107 élaborée par Michel Noiray au CNRS (IRPMF) démontre l’utilité fondamentale de l’élaboration et la mise à disposition de ce type d’outil, notamment dans sa dimension statistique, pour comprendre les logiques de programmation, l’édification du répertoire et l’évolution du goût. Dans ce contexte, la place d’OPEFRA s’impose par sa double vocation de recensement et d’exégèse des ouvrages créés sur les scènes françaises, comme dans les autres théâtres autonomes, expérimentaux, itinérants, saisonniers.
37L’opéra, selon Hervé Lacombe, tend au fil du siècle vers trois pôles, conservateur, moderniste et accumulatif et dépasse les nationalismes pour épouser les grandes lignes de la mondialisation108. Les compositeurs dont la France commande les œuvres iraient-ils à l’encontre de ces tendances et résisteraient-ils à la mondialisation ? La vocation d’OPEFRA, c’est-à-dire l’examen approfondi des tendances en présence sur un territoire donné et répondant à une politique culturelle particulière, offre un contrepoint aux réflexions générales qui ne s’appuient que sur quelques œuvres emblématiques. Un paradoxe, certes, que de restreindre cette investigation à l’hexagone à l’heure de la mondialisation, mais peut-être pas autant qu’il n’y paraît quand on songe que composer un opéra, c’est quasiment toujours répondre à une commande, donc trouver un point d’équilibre entre trois forces : la nécessité intérieure de l’artiste, le budget et l’attente esthétique du commanditaire.
38Cette première livraison d’une réflexion commune sur l’opéra en France est donc centrée sur des approches historiques, contextuelles et monographiques. Une première partie contextualise l’opéra au cœur de la vie artistique française, puis une seconde réunit trois chapitres consacrés à des études de cas : le livret, les marges des grands genres et des témoignages. Ce volume ne revient donc pas sur les œuvres qui ont subsisté ou qui ont fait l’objet d’études et de thèses puisque le propos même d’OPEFRA est de valoriser un répertoire disparu même si, exception qui confirme la règle, l’exemple fondateur des Trois Sœurs de Peter Eötvös, créé en 1998 à l’Opéra de Lyon est examiné en détail.
39De même, les conditions de production et l’histoire de l’évolution esthétique des mises en scène ne sont pas envisagées ici. L’étude des conditions de production mériterait un volume entier, sachant que de grandes disparités existent entre la situation centralisée du début du siècle, fondée par tradition sur une réponse locale un rayonnement national du théâtre national de l’Opéra et de l’Opéra-Comique, puis l’éclatement régional après le « décret Malraux » du 24 juillet 1959109, favorisant la décentralisation et, partant, la pluralité des modes de représentation et des genres110 et enfin le foisonnement créatif souhaité par le « décret Lang » du 10 mai 1982111. Un volume ultérieur y sera entièrement consacré, dans la lignée des journées d’étude de juin 2012 consacrées à « Opéra et mondialisation112 ».
40Il en va de même pour la mise en scène à une époque où les usages obsolètes de « faste spectaculaire113 » sont remis en question par les représentations lyriques invitées des grandes scènes de l’est, notamment dans le cadre des saisons du Théâtre des Nations, de 1957 à 1968114. L’arrivée de Rolf Liebermann à la tête de l’Opéra de Paris, achève de précipiter la fin de ces usages et d’ouvrir de nouvelles voies à la scénographie lyrique en renouvelant le regard porté sur les œuvres du répertoire et en initiant de nouvelles approches du genre115. À la suite des journées d’étude de mai 2013 et d’autres prévues ultérieurement consacrées à la scénographie et aux relations interartistiques sur la scène lyrique, un volume sera consacré à cette question aux confins de la musicologie et des arts du spectacle.
41D’un point de vue plus spécifique, l’opéra radiophonique mériterait aussi une attention particulière, en réponse aux travaux de Giordano Ferrari sur ce genre en Italie116, sachant que la France et sa RTF, puis son ORTF, relayés par le Programme musical de France-Culture ont permis à plus d’une centaine œuvres lyriques d’être créées sur les ondes avant que certaines ne connaissent la consécration de la scène ou à d’autres d’avoir été conjointement pensées pour la scène et la radio, notamment dans le cadre du Festival d’Avignon117. À ce sujet, les travaux de Fotopoulos Sotiris sur le théâtre musical en Avignon118 établissent des catégories et des classifications destinées à rapprocher des œuvres profondément atypiques et montrent comment Avignon fut l’un des hauts lieux de la création lyrique alternative dans les années 1970, avant que sa spécialisation dans le théâtre parlé et la disparition des structures institutionnelles hybrides n’enclenchent la dispersion de ces initiatives et leur effritement.
42Aussi, pour tenter d’apporter quelques réponses aux questions posées dans cette introduction, ouvrons le rideau sur un siècle de vie lyrique française, en espérant que les ambitions d’OPEFRA ne resteront pas dans les rayonnages des bibliothèques universitaires ou des bases de données des portails nationaux, mais serviront, à long terme, les œuvres d’un siècle riche et contrasté.
Notes de bas de page
1 Selon les statistiques par opéra sur le site Operabase, toutes époques confondues, Carmen est le deuxième opéra le plus joué au monde, et il faut attendre la 36e place pour retrouver un autre opéra français : Les Contes d’Hoffmann d’Offenbach. http://operabase.com/visual.cgi?lang=fr&splash=t, consulté en janvier 2015.
2 Leibovitz René, Histoire de l’opéra, Paris, Buchet/Chastel, 1987.
3 Ibid., p. 433 sqq.
4 Ibid., p. 313.
5 Milnes Rodney et Orrey Leslie, Histoire de l’opéra, trad. fr. C. Cheval, Londres/Paris, Thames & Hudson, 1991, p. 229-230.
6 Albèra Philippe, « L’Opéra », J.-J. Nattiez (dir.), Musiques. Une encyclopédie pour le XXIe siècle, vol. 1 « Musiques du XXe siècle », Arles, Actes Sud, 2003, p. 377-440.
7 Leibovitz René, op. cit., p. 437.
8 Ibid., p. 438.
9 Ibid.
10 Antoine Duhamel confesse avoir eu la révélation de l’opéra à travers Faust, découvert au milieu des années 1930, puis du Barbier de Séville, des Noces de Figaro jusqu’au choc de Pelléas. Piatier François, « Antoine Duhamel, un musicien des mots et des images », A. Duhamel, « Gambara », L’Avant-scène opéra/Opéra aujourd’hui, no 7A, 1995, p. 6-7.
11 Boulez Pierre, « Sprengt die Opernhäuser in die Luft ! », Der Spiegel, 25 septembre 1967, http://www.spiegel.de/spiegel/print/d-46353389.html, consulté en septembre 2014.
12 Debussy Claude, « De l’opéra et de ses rapports avec la musique » (Gil Blas, 9 mars 1903), Monsieur Croche et autres écrits, Paris, Gallimard, coll. « L’imaginaire », 1987, p. 115.
13 Dans sa préface à l’enregistrement de Pelléas et Mélisande en 1970. CBS 77324.
14 Leibovitz René, op. cit., p. 437.
15 France, États-Unis, ex-Tchécoslovaquie, Belgique, Suède, Finlande.
16 Halbreich Harry, « Les opéras du millénaire », Crescendo, no 44, 9 décembre 1999.
17 Voir notamment Agid Philippe et Tarondeau Jean-Claude, L’Opéra de Paris. Gouverner une grande institution culturelle, Paris, Vuibert, 2006.
18 Foucher Michel, « Géographie des maisons d’opéra, variations sur la culture lyrique et la géopolitique en Europe », M. Foucher (dir.), Les Ouvertures de l’opéra, une nouvelle géographie culturelle ?, Lyon, Presses universitaires de Lyon, 1996, p. 57.
19 Schneider Michel, La Comédie de la culture, Paris, Le Seuil, 1993, p. 31.
20 Ibid., p. 32.
21 Voir notamment la carte de la fréquentation des maisons d’opéra en Europe (1991), ibid., p. 60.
22 Brossmann Jean-Pierre, « L’avenir de l’opéra », M. Foucher (dir.), op. cit., p. 93.
23 Schneider Michel, op. cit., p. 48.
24 Ibid., p. 196.
25 Voir Ory Pascal, L’Aventure culturelle française 1945-1989, Paris, Flammarion, 1989, p. 54-55.
26 Ibid., p. 62.
27 Saint-Pulgent Maryvonne de, Le Syndrome de l’opéra, Paris, Robert Laffont, coll. « Accords », 1991, p. 331.
28 Schneider Michel, op. cit., p. 197.
29 Cohen-Levinas Danielle, Le Présent de l’opéra au XXe siècle. Chemin vers de nouvelles utopies, Villeurbanne, Art édition/Art entreprise, 1994, p. 345.
30 Brossmann Jean-Pierre, « L’avenir de l’opéra », art. cit., p. 93.
31 Voir Urfalino Philippe, « Les politiques culturelles : mécénat caché et académies invisibles », L’Année sociologique, no 34, 1989, p. 100-101.
32 Menger Pierre-Michel, « Art, politisation et action publique », Sociétés et représentations, no 11, février 2001, p. 171.
33 Fulcher Jane, Le Grand Opéra en France : un art politique, trad. fr. J.-P. Bardos, Paris, Belin, 1988, p. 125.
34 Moulinier Pierre, Les Politiques publiques de la culture en France, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 1999, p. 20.
35 On se rappelle la harangue de Michel Schneider, qualifiant le terme création de « mot rebattu jusqu’à l’écœurement », op. cit., p. 48.
36 Lesure François « Introduction : l’art lyrique », Dictionnaire musical des villes de province, Paris, Klincksieck, 1999, p. 25-26.
37 « Le Rêve est l’aube du drame lyrique de notre temps et avec lui commence la vraie réforme du théâtre musical français » (Koechlin Charles, « Le théâtre, du Rêve à Pelléas et à Pénélope » [conférence du 3 février 1916 chez Jeanne Herscher-Clément], M. Duchesneau [éd.], Esthétique et langage musical, Sprimont, Mardaga, 2006, p. 63).
38 Debussy Claude, « Opéras » (La Revue blanche, 15 mai 1901), op. cit. p. 38-43.
39 Debussy Claude, « Pourquoi j’ai écrit “Pelléas” » (avril 1902), op. cit. p. 63.
40 Debussy Claude, « De l’opéra et de ses rapports avec la musique », art. cit., p. 66.
41 Debussy Claude, « L’orientation musicale » (Musica, octobre 1902), op. cit., p. 66.
42 Ibid.
43 Debussy Claude, « L’Opéra de demain » (Excelsior, 15 septembre 1913, p. r. p. C.-H. Meltzer, New York, 1908), op. cit., p. 328.
44 Koechlin Charles, « Le Théâtre, du Rêve à Pelléas et à Pénélope », art. cit., p. 53.
45 Ibid., p. 54.
46 Charles Koechlin le note dès 1916, ibid., p. 57.
47 Rouché Jacques, « L’Opéra et les mœurs nouvelles », La Revue des deux mondes, juillet 1932, p. 76.
48 Landormy Paul et Barraud Henry, p. r. p. J. Bruyr, « L’Exposition ouvre, elle est ouverte », Le Guide musical, XXIII, no 35, 28 mai 1937, p. 809.
49 Voir Auzolle Cécile, « La création lyrique à la Réunion des théâtres lyriques nationaux (1936-1972) », S. Chaouche, D. Herlin et S. Serre (dir.), L’Opéra de Paris, la Comédie-Française et l’Opéra-Comique : approches comparées (1669-2010), Paris, École des Chartes, coll. « Études et rencontres », no 38, 2012, p. 219-238.
50 Landormy Paul et Barraud Henry, « L’Exposition ouvre… », art. cit., p. 809.
51 Ibid.
52 Ibid.
53 Ibid.
54 Voir Auzolle Cécile, « Massenet au Palais Garnier dans l’entre-deux-guerres : l’action de Jacques Rouché », J.-C. Branger et V. Giroud (dir.), Massenet aujourd’hui : héritage et postérité, Saint-Étienne, Publications de l’université de Saint-Étienne, 2014, p. 213-233.
55 Jolivet : Dolorès ou le miracle de la femme laide (Opéra de Lyon, 1960) ; Daniel-Lesur : Andréa del Sarto (Opéra de Marseille, 1969) et Ondine (Opéra de Paris/Théâtre des Champs Élysées, 1982) et Messiaen : Saint François d’Assise (Opéra de Paris, 1983).
56 Ory Pascal, op. cit., p. 126.
57 Milhaud Darius, « La création de “Bolivar” telle que l’a conçue Darius Milhaud », Le Monde, 13 mai 1950.
58 Auzolle Cécile, « Les créations d’opéra français à l’opéra de Paris entre 1945 et 1955 », M. Noiray et S. Serre (dir.), Le Répertoire de l’Opéra de Paris (1671-2009). Analyse et interprétation, Paris, École des Chartes, coll. « études et rencontres », no 32, 2010, p. 103-113.
59 Jean Prodromidès, p. r. p. H. Pierrakos, « Itinéraire d’un compositeur », L’Avant-scène opéra/Opéra aujourd’hui, no 1A : « Jean Prodromidès. La Noche triste », 1991, p. 10-11.
60 Boucher Thierry G., « L’architecture des théâtres lyriques en France depuis 1945 », D. Pistone (dir.), Le Théâtre lyrique en France 1945-1985, Paris, Champion, 1987, p. 37-42.
61 Gachet Jacqueline, Les Représentations lyriques aux arènes de Béziers de 1898 à 1911 (dir. Jacques Chailley), thèse de l’université Paris-IV, 1976.
62 Entre 1974 et 2000. Voir les archives en ligne du festival : http://www.festival-avignon.com/fr/recherche/?recherche=theatre+musical&search_year=&search_genre=Th%E9%E2tre+musical&search_place=&Submit=OK, consulté en janvier 2015.
63 Ory Pascal, op. cit., p. 153.
64 Ibid., p. 180.
65 Voir notamment Rio Marie-Noëlle et Rostain Michel, L’Opéra mort ou vif, Paris, Recherches/Encres, 1982 ; Durney Daniel, « Le théâtre musical français », D. Pistone (dir.), op. cit., p. 75-112.
66 Voir Philippe Hersant, p.r. p. H. Pierrakos, L’Avant-scène opéra/Opéra aujourd’hui, no 8 : « Philippe Hersant. Le Château des Carpathes », septembre 1997, p. 4.
67 Ibid., p. 8.
68 Ory Pascal, op. cit., p. 209.
69 Ory compare même l’académisme de l’Opéra à celui de l’IRCAM, ibid., p. 53.
70 Maurice Ohana, p. r. p. J.-C. Marti, L’Avant-scène opéra/Opéra aujourd’hui, no 3 : « Maurice Ohana. La Célestine », octobre 1991, p. 4.
71 Ferrari Giordano, « Préface », G. Ferrari (dir.), L’Opéra éclaté La dramaturgie musicale entre 1969 et 1984, Paris, L’Harmattan, 2006, p. 5.
72 Delhaye Cyrille, « Électroacoustique et dramaturgie musicale : Kyldex I de Schöffer, Henry et Nilolaïs », ibid., p. 52.
73 Ferrari Giordano, « Préface », G. Ferrari (dir.), Pour une scène actuelle, Paris, L’Harmattan, 2009, p. 6.
74 Cohen-Levinas Danielle, « Le théâtre musical : métaphore ou métonymie », D. Cohen-Levinas, Le Présent de l’opéra…, op. cit., p. 185.
75 Ibid., p. 190.
76 Pour comprendre les débats de cette période, voir « Aujourd’hui l’Opéra », Recherches, no 42, janvier 1980, et Rio Marie-Noëlle et Rostain Michel, op. cit.
77 Gindt Antoine, « Aperçu sur le langage scénique de Georges Aperghis : une écriture du désir », L. Feneyrou (dir.), Musique et dramaturgie. Esthétique de la représentation au XXe siècle, Paris, Publications de la Sorbonne, 2003, p. 445.
78 Lonchampt Jacques, « Venet et Arman sculpteurs d’opéras. Géométrie et désordre lyriques », Le Monde, 22 janvier 1988.
79 Samama Guy, avant propos sans titre, La Flûte enchantée. L’Avant-scène opéra, no 1, janvierfévrier 1976, p. 3.
80 Ibid.
81 Ibid., p. 4.
82 Prodromidès : La Noche triste (1A) ; Marcel Landowski : Le Fou/Montségur (2A) ; Maurice Ohana : La Célestine (3A) ; Olivier Messiaen : Saint François d’Assise (4A) ; Claude Prey : Les Liaisons dangereuses (5A) ; Charles Chaynes : Jocaste (6A) ; Antoine Duhamel : Gambarra (7A) ; Philippe Hersant : Le Château des Carpathes (8A) ; Gérard Condé : La Chouette enrhumée (9A). La série n’a pas survécu à la fin de l’aide éditoriale de la SACD.
83 Voir Noël Anne-Marie, « Le théâtre lyrique à la radiodiffusion nationale », D. Pistone (dir.), op. cit., p. 427-438 ; Charles Chaynes, p. r. p. M. Texier, « Un compositeur au service des compositeurs », L’Avant-Scène Opéra/Opéra aujourd’hui, no 6 : « Charles Chaynes. Jocaste », 1994, p. 4-15 et « Charles Chaynes, compositeur d’opéras », p. r. p. B. Ramaut-Chevassus, Composer un opéra aujourd’hui, Saint-Étienne, Publications de l’université de Saint-Étienne, 2003, p. 69-78.
84 Lonchampt Jacques, « Douze spectacles de l’Opéra sur Antenne 2 en 1977-1978 », Le Monde, 19 mars 1977.
85 Ibid. Les deux œuvres manquantes sont Giselle et Roméo et Juliette de Tchaikovski, des ballets.
86 Ory Pascal, op. cit., p. 84.
87 Castanet Pierre-Albert, « Opera mundi (l’opéra pluraliste ou les vissicitudes socio-culturelles et socio-politiques de l’opéra contemporain) », B. Ramaut-Chevassus (dir.), op. cit., p. 89.
88 Comme en témoigne l’entretien accordé en 1981 par Marcel Landowski à Gérard Gastinel : « À propos du “Fou” », Landowski Marcel, Montségur/Le Fou, op. cit., p. 44-45.
89 Claude Prey, p. r. p. M. Texier, « Une distanciation variable », L’Avant-scène opéra/Opéra aujourd’hui, no 5 : « Claude Prey. Les Liaisons dangereuses », 1993, p. 6.
90 Voir notamment Burgelin Claude, « Littérature et Opéra : haine, amour et jalousie », M. Foucher (dir.), op. cit., p. 31.
91 Cohen-Levinas Danielle, op. cit., p. 31.
92 Un quart ou un cinquième de l’offre selon Foucher Michel, ibid., p. 71.
93 Voir à ce sujet la remarquable étude de Menger Pierre-Michel, « Art, politisation et action publique », « Artistes/politiques », Sociétés et représentations, no 11, 2001/1, p. 169-204.
94 Elle comporte trois opéras, créés dans des circonstances très différentes : Andréa del Sarto (1969), Ondine (1982) et La Reine morte (2005).
95 Alberà Philippe, « L’Opéra », art. cit., p. 378.
96 Gérard Condé, p. r. p. H. Cao, L’Avant-Scène opéra/Opéra aujourd’hui, no 9 : « Gérard Condé, La Chouette enrhumée », janvier 2004, p. 15.
97 Ce volume regroupe des communications prononcées lors des six premières journées d’étude du groupe de recherches OPEFRA (OPEra en FRAnce), créé en octobre 2009 sous l’égide de l’université de Poitiers (CRIHAM-ex GERHICO), de l’université Paris-Sorbonne (OMF), de la Réunion des opéras de France (ROF).
98 Olivier Philippe (dir.), « Opéra la diva et le souffleur », Autrement, no 71, Paris, juin 1985.
99 Notamment Philippe Olivier, Jacqueline Muller, Guy Hervais, Antoine Livio, Marie-France Castarède, Philippe Beaussant, Pierre-Michel Menger, Martin Kaltenecker, Sergio Segalini, Alain Duault, André Tubeuf, Stéphane Goldet, Guy Coutance, Michel Rostain, Tod Machover, György Ligeti, Monique Veaute, Maurizio Kagel, Pierre Boulez, Brigitte Massin…
100 Pistone D. (dir.), Le Théâtre lyrique…, op. cit.
101 Castanet Pierre-Albert, « Opera mundi (l’opéra pluraliste ou les vissicitudes socio-culturelles et socio-politiques de l’opéra contemporain) », art. cit., p. 79-105.
102 Trois volumes d’actes ont été publiés. Concernent la France : 2/14 communications du premier volume, 1/11 du deuxième et 8/13 du troisième, mais 5 d’entre elles concernent Pas si de Stefano Gervasoni.
103 Feneyrou L. (dir.), Musique et dramaturgie, Paris, Publications de la Sorbonne, 2003.
104 Voir aussi Durney Daniel, Les Compositions scéniques de Georges Aperghis, une écriture dramatique, de la musique, thèse d’Habilitation, 2 vol., Paris, EHESS, 1996, téléchargeable sur http://www.aperghis.com/txt.html, consulté en janvier 2015.
105 Voir aussi Gindt A. (dir.), Aperghis, le corps musical, Arles, Actes Sud, 1990.
106 Le Répertoire de l’Opéra de Paris (1671-2009), Analyse et interprétation, Paris, École des Chartes, coll. « études et rencontres », no 32, 2010, et L’Opéra de Paris, la Comédie-Française et l’Opéra-Comique : approches comparées (1669-2010), Paris, École des Chartes, coll. « Études et rencontres », no 38, 2012.
107 http://chronopera.free.fr/index.php?, consulté en janvier 2015.
108 Lacombe Hervé, Géographie de l’opéra au XXe siècle, Paris, Fayard, 2007.
109 http://www.legifrance.gouv.fr/jopdf/common/jo_pdf.jsp?numJO=0&dateJO=19590726&numTexte=&pageDebut=07413&pageFin=, consulté en janvier 2015.
110 Voir notamment de Moulinier Pierre, Les Politiques publiques de la culture en France, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 1999, et Politique culturelle et décentralisation, Paris, L’Harmattan, 2002.
111 http://www.legifrance.gouv.fr/jopdf/common/jo_pdf.jsp?numJO=0&dateJO=19820511&numTexte=&pageDebut=01346& pageFin=, consulté en janvier 2015.
112 http://www.irpmf.cnrs.fr/IMG/pdf/opera_et_mondialisation.pdf, consulté en janvier 2015.
113 Böll André, « L’Art lyrique », Rendez-Vous des Théâtres du Monde, Publication du Théâtre des Nations, Paris, no 3/1957, p. 12.
114 Voir Peslin Daniela, Le Théâtre des Nations une aventure théâtrale à redécouvrir, Paris, L’Harmattan, coll. « L’Univers théâtral », 2009, p. 349-375, et Aslan Odette, Paris, capitale mondiale du théâtre, Paris, CNRS éditions, 2009.
115 Voir deux numéros de la revue belge Alternatives théâtrales qui, à trente ans d’écart, font le point sur cette question : « L’Opéra aujourd’hui », no 16-17, novembre 1983 puis « Le théâtre à l’opéra, la voix au théâtre », no 113-114, 2e trimestre 2012.
116 Voir Ferrari Giordano, « Opéras radiophoniques, un genre de dramaturgie musicale », L. Feneyrou (dir.), Musique et dramaturgie, op. cit., p. 639-651.
117 Outre les archives répertoriées sur le site du festival cité supra, on retrouvera un dépouillement des programmes jusqu’en 1974 dans « 1925-1975 : Cinquante ans de musique classique à la radio », Les Cahiers d’Histoire de la radiodiffusion, cahier thématique, no 95, janvier-mars 2008, 250 p., et de 1969 à 1985 dans deux contributions à l’ouvrage de Pistone D. (dir.), Le Théâtre lyrique français…, op. cit. : Noël Anne-Marie, « Le théâtre lyrique à la radiodiffusion nationale », p. 436-438, à compléter par le relevé des productions avignonnaises de Durney Daniel, « Le théâtre musical français », p. 87-89.
118 Sotiris Fotopoulos, Les Différents Types de théâtre musical au festival d’Avignon entre 1969 et 1979, mémoire de maîtrise, Strasbourg, UHHS, 1989. Contient une liste des œuvres de théâtre musical créées en Avignon de 1969 à 1979.
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