1 Eisenstein Sergueï M., « A.I. 28 » [Attraction intellectuelle 1928, inédit], CiNéMAS, vol. 11, no 2-3, « Eisenstein dans le texte », 2001, p. 147-160.
2 « Programmer » en tant qu’exercice épistémologique, c’est ainsi que nous comprenons encore aujourd’hui, par exemple, les propositions de Langlois. Voir Langlois Henri, Écrits de cinéma, Paris, Flammarion/Cinémathèque française, 2014 et le catalogue de l’exposition : Païni Dominique (dir.), Le Musée imaginaire d’Henri Langlois, Paris, Flammarion/Cinémathèque française, 2014.
3 Le Lion des Mogols et L’Affiche (1924), Le Double Amour (1925), Les Aventures de Robert Macaire (1925).
4 Mauprat et Au pays de George Sand (1926), Six et demi, onze et La Glace à trois faces (1927), La Chute de la maison Usher (1928).
5 Dans mes livres La Comédie musicale et la double vie du cinéma (2011) et La Machine à voir. À propos de cinéma, attraction, exhibition (2012), j’avais identifié à propos d’Epstein des « novellisations au sens large », c’est-à-dire des textes qui traduisaient des films en écriture poétique, par la description analytique de séquences, scènes et plans. Ces écrits étaient à l’origine des recensions de films dans des revues comme Cinéa ou Promenoir au début des années 1920. Ils privaient des films tels que Les Mystères de New York (Louis Gasnier, 1915) ou The Honor of His House (William C. De Mille, 1918) de leur simple déroulement narratif, en les transformant en une suite discontinue de révélations saisissantes. À la lecture de ces textes, on ne comprenait rien de la trame du film, qui pourtant en avait une, mais on saisissait en revanche l’expérience d’Epstein qui, dans la salle de cinéma, était confronté à des apparitions spectaculaires, dont les détails lui servaient à percer le sens profond des films. Ces textes, surtout dans Bonjour Cinéma (1921) et Le Cinématographe vu de l’Etna (1926), révélaient pour moi les composantes d’une « théorie générale du cinéma des attractions ».
6 « Grossissement », Promenoir no 1-2, février-mars 1921, puis dans Bonjour Cinéma et par la suite dans Écrits sur le cinéma, t. I, Paris, Seghers, coll. « Cinéma Club », 1974. « Le gros plan du son », La Technique cinématographique, 12 juin 1947 et « La féerie réelle », Spectateur, 21 janvier 1947, repris dans Écrits sur le cinéma, t. II, Paris, Seghers, coll. « Cinéma Club », 1975.
7 Au-delà des textes désormais canoniques sur l’œuvre de Jean Epstein (Leprohon Pierre, Jean Epstein, Paris, Seghers, 1964 ; Bordwell David, French Impressionist Cinema, New York, Arno Press, 1980 ; Abel Richard, French Cinema, The First Wave, 1915-1929, Princeton, Princeton University Press, 1984 ; Aumont Jacques (dir.), Jean Epstein – Cinéaste, poète, philosophe, Paris, Cinémathèque française, 1998 ; Wall-Romana Christophe, Jean Epstein – Corporeal Cinema and Film Philosophy, Manchester/New York, Manchester University Press, 2013 ; Keller Sarah et Paul Jason (dir.), Jean Epstein : Critical Essays and New Translations, Amsterdam, Amsterdam University Press, coll. « Film Theory in Media History », 2012), il faut rappeler deux contributions italiennes qui offrent des réflexions importantes, portées avec finesse et une grande justesse sur le « débat sur la photogénie » : Pescatore Guglielmo (dir.), Cinema & Cinema, no 64, « Fotogenia. La bellezza del cinema », 1992 et Vichi Laura, Jean Epstein, Milan, Il Castoro, 2003.
8 Epstein Jean, « Langue d’or », Revue mondiale, no 23, 1er décembre 1922, repris dans Le Cinématographe vu de l’Etna, Paris, Les Écrivains Réunis, 1926, puis Écrits sur le cinéma, t. I, op. cit.
9 Par exemple, à la Cinémathèque québécoise, le 29 septembre 2013, j’avais proposé un parcours qui remontait les liens naturels que l’âge d’or du « court métrage français » avait jadis tracés : L’Hippocampe (Jean Painlevé, 1935), Le Tempestaire (Jean Epstein, 1947), L’Œuvre scientifique de Pasteur (Georges Rouquier et Jean Painlevé, 1947), Effort de productivité dans la fonderie (Edmond Floury [Jean Epstein], 1953). Voir à ce sujet : http://www.cinematheque.qc.ca/fr/programmation/projections?date=2013-09-29. Pour un parcours historique et documenté sur cette époque du cinéma, voir Fiant Antony et Hamery Roxane (dir.), Le Court Métrage français de 1945 à 1968 (2) – Documentaire, fiction : allers retours, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Le spectaculaire », 2008. Je voudrais aussi renvoyer au travail de recherche-création de Cloe Masotta (doctorante à la Pompeu Fabra Universitat) qui, en un calembour, reliait Epstein à Philippe Grandrieux (Cœur fidèle et La Vie nouvelle, 2002 ; tout comme La Glace à trois faces et Sombre, 1998) et, par là-même, Maya Deren au même Grandrieux. Cloe Masotta parlait, dans son opération d’excavation et de rapprochements, de « dialogues » entre les œuvres. Voir : http://cinentransit.com/en-torno-al-pensamiento-plastico-de-epstein-deren-y-grandrieux/.
10 C’est une piste qui a été travaillée par Tom Gunning, Scott MacDonald et William Uricchio, entre autres. Scott MacDonald, en particulier, développe cette idée de la (re) production de l’expérience de la nature dans des films « de non-fiction » à propos d’un programme de films dans le cadre de la rétrospective Unseen Cinema : des films qui misaient surtout sur la mobilité du point de vue, l’étonnement et la surprise chez le spectateur. Voir Macdonald Scott, « The Attractions of Nature in Early Cinema », dans Bruce Posner (dir.), Unseen Cinema – Early American Avant-Garde Film 1893-1941, New York, Anthology Film Archive, 2005, p. 56-63. Cet article s’inscrit par ailleurs dans la lignée de son livre The Garden in the Machine – A Field Guide to Independent Films about Place, Berkeley, University of California Press, 2001. Voir aussi Uricchio William, « Ways of Seeing – The New Vision of Early Nonfiction Film », dans Dann Hertogs et Nico de Klerk (dir.), Uncharted Territory – Essays on Early Non-Fiction Film, Amsterdam, Stichting Nederlands Filmmuseum, 1997, p. 119-131.
11 Dans cette même optique, il serait sans doute intéressant de penser le cinéma de Michael Snow en termes de prise de vue pure et d’attraction : deux cas probants par rapport à nos propos ici seraient Back and Forth (1969) et La Région centrale (1971).
12 Dans son article « Before Documentary – Early Non-Fiction Films and the View Aesthetic », dans Dann Hertogs et Nico de Klerk (dir.), Uncharted Territory, op. cit., p. 9-24, Tom Gunning suggère une distinction entre la toute première production de phantom ride et une autre qui lui aurait succédé dans les années 1910. Dans un premier temps, l’emphase était mise sur la vitesse et le danger ainsi que sur la sensation qu’ils étaient censés créer chez le spectateur ; dans un deuxième temps, la mobilité ne serait que le véhicule pour profiter du spectacle de la nature. Le mouvement et ses aléas semblent ne plus être aussi centraux et le spectacle se déplace davantage du côté du contenu de l’image.
13 Sur Jean Painlevé, voir Hamery Roxane, Jean Painlevé, le cinéma au cœur de la vie, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Le spectaculaire », 2009.
14 Voir néanmoins Painlevé Jean, « Cinéma et recherche », Conférence donnée au Palais de la Découverte, Paris, 22 octobre 1955. Publié dans Les Conférences du Palais de la découverte, Série A, no 219, 1956.
15 Epstein Jean, « Langue d’or », op. cit., p. 143. La puissance des lampes à arc employées dans les studios ne cessera de fasciner les pères de la pensée sur le cinéma : « Mûri, émaillé, et peint aux couleurs de la passion. Par touches d’ampères, la pensée s’imprime au front. » À propos de l’électricité dans la pensée d’Epstein, voir Paci Viva, La Comédie musicale et la double vie du cinéma, op. cit., p. 153-171.
16 Sur le Muséum national d’histoire naturelle à Paris, on pourra consulter notamment : Laissus Yves, Le Muséum national d’histoire naturelle, Paris, Gallimard, 1995 ; Limoges Camille, « The Development of the Museum d’histoire naturelle of Paris », dans Robert Fox et Georges Weisz (dir.), The Organization of Science and Technology in France, 1808-1914, Cambridge, Cambridge University Press, 1980, p. 211-240 ; Schnitter Claude, « Le développement du Muséum national d’histoire naturelle de Paris au cours de la seconde moitié du XIXe siècle : se transformer ou périr », Revue d’histoire des sciences, vol. 49, no 1, 1996, p. 53-98. Plus généralement, sur la relation entre vulgarisation scientifique, spectacle, cinéma et musée, voir Griffiths Alison, Shivers Down Your Spine : Cinema, Museums and Immersive View, New York, Columbia University Press, 2008. Pour un compte-rendu d’époque des conférences illustrées au Museum, voir D., « Conférences populaires du Muséum », La Nature, Trentième année, premier semestre, no 1489 à 1514, 1902, p. 334. Article accessible en ligne : http://cnum.cnam.fr/CGI/fpage.cgi?4KY28.58/338/100/532/0/0
17 Dans mon ouvrage La Machine à voir. À propos de cinéma, attraction, exhibition, op. cit., un passage important est dédié à Herzog et aux prises de vues pures.
18 Dulac Germaine, « L’essence du cinéma. L’idée visuelle », Les Cahiers du mois, no 16-17, 1925, p. 62-63.
19 Epstein Jean, « La Féerie réelle », op. cit., p. 44-45.
20 Voir le film de Michael Snow, La Région centrale (1971) et celui de Babette Mangolte, There ? Where ? (1979). De cette dernière, voir également What Maisie Knew (1975), dont le début semble dialoguer avec La Chute de la maison Usher. Cette génération de cinéastes expérimentaux a d’ailleurs profité des projections de films d’avant-garde français qui eurent lieu au MoMA à New York dans les années 1970.
21 Macdonald Scott, A Critical Cinema 2 – Interviews with Independent Filmmakers, Berkeley, University of California Press, 1992, p. 220-248.
22 On peut également faire référence à ses films R.R. (2007) ou Small Roads (2012).
23 Intervention de James Benning à propos du film au « AV Festival. International of art, music and film » en Angleterre. URL: http://www.avfestival.co.uk/ et http://www.youtube.com/watch?v=1MqGt7OuOxE.
24 Voir « Le contrepoint du son » et « Le gros plan du son », La Technique cinématographique, 12 juin 1947, repris dans Écrits sur le cinema, t. II, op. cit., p. 104-114.
25 Voir à ce propos les textes de Laura Vichi et de Chiara Tognolotti dans le présent ouvrage.
26 Sitney Paul Adams, « Structural Film », Visionary Film. The American Avant-Garde 1943-1978, Oxford University Press, 1979, p. 369-397 (trad. fr. : Le Cinéma visionnaire, Paris, Paris Expérimental, coll. « Classiques de l’Avant-Garde », 2002).
27 Claudia Slanar rapporte ainsi une déclaration de James Benning évoquant sa rencontre, et l’inspiration qui en est née, avec les films de Deren. Slanar Claudia, « Taking Position. Did you ever hear that cricket sound? (1973) to 3 minutes on the dangers of film recording (1975) », dans Barbara Pichler et Claudia Slanar (dir.), James Benning, Vienne, FilmmuseumSynemaPublicationen, 2007, p. 8. Dans la famille de l’expérimental, Maya Deren comme Stan Brakhage représentent une approche particulière du film structurel. Par leur veine poétique et expressive, ils se détachent de la voie conceptuelle et, sur la perception des qualités du film, des films structurels purs.
28 Les recherches d’André Habib sur les réseaux de la cinéphilie, dont le texte présent dans ce volume articule quelques idées et retombées de recherche, pourront ouvrir d’autres pistes visant à reconstruire la circulation des films d’Epstein aux États-Unis, par exemple. Ainsi certaines proximités évidentes – Meshes of the afternoon/Finis Terrae/La Chute de la maison Usher – pourraient être étudiées davantage.
29 Voir Méchoulan Éric, « Intermédialités : Le temps des illusions perdues », Intermédialités. Histoire et théories des arts, des lettres et des techniques, no 1, « Naître », 2003, p. 9-27.