12. Faut-il appliquer les « 110 propositions » ?
Le Parti socialiste et les droits nouveaux des travailleurs (1972-1983)
p. 217-230
Texte intégral
« François Mitterrand ne croyait pas aux programmes. Il n’en voulait pas. Il a dû s’en accommoder. C’est contraint et forcé par Chevènement, il faut le dire, qu’il est entré dans la mécanique infernale des programmes. […] L’histoire a montré qu’on ne gagne pas avec un programme. Un programme est une illustration, est un catalogue, est un prospectus, mais la volonté politique, l’ambition politique, la certitude de la volonté de gouverner ensemble ne tenaient que partiellement à un programme dont tout le monde savait à l’avance ce qu’il y aurait dedans et ce qu’il n’y aurait pas. »
1À l’occasion d’un colloque célébrant les trente ans du 10 mai 1981, le mitterrandiste historique Pierre Joxe entreprit par ces quelques phrases de minimiser la contribution des programmes électoraux à la victoire de François Mitterrand1. L’ancien ministre expliqua par ailleurs que les discussions programmatiques menées avec le Parti communiste au cours des années 1970 n’avaient été au fond que de simples « opérations de vérification d’orientations politiques ». Pour appuyer cette idée, il affirma que de très nombreux sujets n’avaient pas soulevé de difficultés particulières entre les partis de gauche, car ils allaient de soi : cela aurait été notamment le cas de « l’évolution du droit social [et des] lois Auroux » de 1982, qui modifièrent une très grande partie du Code du travail. Les programmes électoraux n’auraient-ils donc qu’un usage purement tactique ? Les (dés) accords programmatiques ne porteraient-ils donc jamais sur le fond ? En fait, les propos de Pierre Joxe reconstruisent a posteriori un consensus qui n’existait pas sur le moment. Certes, dans les années 1970, les programmes électoraux (et au premier chef le Programme commun signé avec le Parti communiste en 1972) furent pour le PS un élément essentiel de sa stratégie de conquête du pouvoir2. Pendant toute la décennie, un très gros effort fut effectué pour les diffuser et les populariser, au point qu’ils furent ainsi systématiquement disponibles en librairie3. Auréolées par la victoire du 10 mai 1981, les « 110 propositions » du candidat Mitterrand ont ensuite acquis, au moins du côté de la gauche critique, un statut mémoriel remarquable4. Mais, avant comme après 1981, les débats concernant leur application furent vigoureux, y compris – surtout – à l’intérieur même du Parti socialiste. Au contraire de ce que sous-entend Pierre Joxe, jamais leur contenu et leur transformation en législation nouvelle ne sont allés de soi. À la rencontre de débats idéologiques et d’enjeux de pouvoir liés aux luttes d’appareil, elles ont été âprement discutées.
2Sur un autre plan, l’idée d’une rupture entre les projets de l’avant 1981 et les réalisations postérieures est également très largement répandue. Après une courte période d’état de grâce, les socialistes français, devant les réalités du pouvoir, auraient été contraints à un brutal virage idéologique, leur faisant abandonner les conceptions développées durant les années du Programme commun. Le « tournant de la rigueur » de mars 1983, le choix de l’Europe et du maintien dans le SME auraient inauguré une période de conversion d’une large partie des élites socialistes au libéralisme économique5, renvoyant dans les limbes l’ancien programme des années 1970. L’étude des projets de réforme du droit du travail élaborés par les socialistes avant et après 1981 conduit à sérieusement amender ce schéma narratif. Elle montre en effet la nécessité de prendre en compte les clivages internes au Parti socialiste, et surtout de contextualiser les programmes électoraux en les éclairant par l’opposition des diverses cultures politiques6 coexistant au sein du PS de ces années-là. Le jeu entre une culture politique majoritaire à coloration marxiste, conduisant à considérer les entreprises d’abord comme un enjeu de conflit de classes, et une culture politique minoritaire, couramment appelée « deuxième gauche7 », plus encline à valoriser compromis et négociation sociale, permet de comprendre les différences entre les réformes très modérées mises en place dans les entreprises privées après 1981, et les conceptions plus radicales développées auparavant dans les programmes. La raison en est aussi que la culture politique « deuxième gauche » avait de forts points de convergence avec les représentations dominantes au sein de la haute fonction publique de l’époque. Nous nous attacherons donc à expliquer tout d’abord les logiques qui ont joué au moment de la rédaction des programmes du PS, puis celles qui ont présidé à l’application de ces programmes dans le secteur privé.
La réforme de l’entreprise d’Épinay aux 110 propositions : une seule ligne programmatique cachant des conceptions divergentes
Changer la vie et le Programme commun : la confrontation sociale plutôt que la négociation
3Le congrès d’Épinay de 1971 avait fixé une tactique (l’union avec le Parti communiste), non une doctrine8. Mais la doctrine était induite par la tactique : pour s’allier avec le PCF, le PS avait besoin au préalable de se doter d’un programme fortement marqué à gauche. La rédaction en fut confiée au nouveau secrétaire au programme Jean-Pierre Chevènement, chef du Centre d’études, de recherches et d’éducation socialiste (CERES), l’aile gauche du parti. Celle-ci, dans ces années d’effervescence post-68, était proche d’une CFDT elle-même très partagée entre tentation gauchiste et attachement maintenu au contractualisme9. Le nouveau programme socialiste portait la marque du CERES, mélange d’un attachement très fort à l’héritage marxiste du socialisme français et d’idées venues de Mai 68. Un débat agita les sommets du parti autour du concept d’autogestion, que le CERES proposait d’introduire dans le nouveau programme, et qui était devenu, malgré le flou de ses contours – ou grâce à celui-ci – une référence incontournable pour la gauche non communiste10. Beaucoup de socialistes, au premier chef les anciens de la SFIO, étaient cependant sceptiques. Après des échanges animés, l’autogestion fut finalement intégrée au programme socialiste dans une perspective avant tout stratégique : elle était un élément fort du programme, mais était limitée à une « expérience » à mener dans le secteur nationalisé. Cette version fut entérinée officiellement en mars 1972, en même temps que le reste du programme Changer la vie11.
4Plus que l’autogestion, l’axe de ce dernier était en fait « la stratégie de rupture avec le capitalisme ». Celle-ci passait fondamentalement par la « refonte et […] l’extension du secteur public », lequel devait jouer un « rôle d’entraînement pour le reste de l’économie12 ». Le marxisme impeccable du programme conduisait à insister sur la primauté de la propriété du capital : le secteur privé n’était donc qu’un enjeu secondaire. Dans celui-ci, le nouveau « pouvoir des travailleurs » devait prendre la forme d’une capacité de « contrôle » : l’entreprise était vue avant tout comme le lieu de l’affrontement entre le pouvoir patronal (en fait pouvoir du capital) et le contre-pouvoir ouvrier13. Ce « contrôle des travailleurs » avait été lui aussi un objet de discorde, les plus modérés demandant que ce contrôle ne soit qu’un simple droit d’information (donc sans remise en cause de l’autorité du chef d’entreprise), les plus audacieux réclamant une « responsabilité de décision » pour les travailleurs. Le compromis finalement trouvé mit en avant le rôle du comité d’entreprise14, doté de la capacité de suspendre (mais pas d’annuler) certaines décisions patronales, concernant « l’embauche, le licenciement et les conditions de travail15 ». Silence était en revanche gardé sur la pratique de la négociation sociale : l’air du temps n’était pas à la valorisation des compromis entre acteurs sociaux. Ce programme socialiste de 1972 fut toutefois très vite éclipsé par la signature, le 27 juin 1972, du Programme commun de gouvernement entre le PS et le PCF16. Au-delà de la confiance partagée dans la capacité motrice du secteur public17, celui-ci témoignait de l’existence d’une communauté de vue concernant les entreprises privées. Il s’agissait de contester la toute-puissance patronale en affermissant un contre-pouvoir des salariés. De ce fait, les comités d’entreprise devaient avoir la faculté d’« intervenir directement contre toute décision concernant l’embauche, le licenciement, les conditions de travail18 ». Les désaccords importants portaient sur le secteur public : les socialistes se plaçaient dans « la perspective de l’autogestion », alors que les communistes défendaient la « gestion démocratique19 », laquelle renvoyait en fait aux conceptions développées par la CGT. L’autogestion était ainsi un élément permettant de proposer un horizon lointain capable de rivaliser avec la société communiste future, mais son utilisation restait avant tout stratégique : elle servait d’abord à se démarquer des communistes, et à l’occasion de prétexte pour bloquer les demandes de renégociation venues du PCF20.
L’échec de la greffe programmatique venue de la « deuxième gauche »
5Jusqu’à la rupture de l’union de la gauche en 1977, Changer la vie et le Programme commun furent simultanément les plates-formes programmatiques du PS, ses candidats défendant officiellement les deux textes devant les électeurs. Dans l’intervalle, le parti connut pourtant des apports extérieurs importants, mais sans que sa doctrine en soit fondamentalement changée. Après l’élection présidentielle de 1974, les « Assises du Socialisme », tenues en octobre de la même année, entérinèrent l’adhésion au PS de quelques importantes figures de la gauche non communiste, venues du PSU comme Michel Rocard, ou bien issues du syndicalisme CFDT comme Jacques Delors21. Les nouveaux venus ne formaient pas une population absolument homogène sur le plan des idées, mais quelques éléments les rapprochaient : l’héritage plus ou moins diffus du christianisme social22, la proximité avec la CFDT, l’attachement envers l’autonomie de la société civile par rapport à l’État. Surtout, ils avaient adhéré en espérant rendre le PS plus ardemment et sincèrement autogestionnaire. Ils ne voulurent pas cependant se constituer en mouvance autonome, et se dispersèrent entre les différents courants du PS. Les « Assises du Socialisme » trouvèrent un prolongement doctrinal dans un court texte, les « Quinze thèses sur l’autogestion », adoptées en juin 197523. Il ne s’agissait pas à proprement parler d’éléments programmatiques nouveaux (les textes de 1972 n’étaient pas modifiés), mais plutôt d’un effort destiné à manifester la place éminente de la notion dans la pensée socialiste. On y retrouvait l’affirmation que l’avancée vers le socialisme se ferait grâce aux nationalisations, à l’autogestion et à la planification démocratique : ce triptyque était le bagage commun de tous les socialistes de la décennie. Mais cet approfondissement autogestionnaire tourna très vite court, du fait des divergences entre les différentes sensibilités du parti. Les nouveaux adhérents des Assises, souvent accueillis sans enthousiasme excessif24, se heurtèrent à l’opposition croissante des dirigeants du CERES, qui stigmatisèrent de plus en plus ce qu’ils appelaient le « Courant des Assises » comme l’aile droite – voire droitière – du socialisme. En réaction, certains des nouveaux entrants choisirent progressivement de revendiquer plus fortement la spécificité de la « deuxième gauche » qu’ils entendaient incarner, alors que du côté des théoriciens de la CFDT se déroulait un effort intellectuel en vue de caractériser la différence entre la « vieille culture politique sociale-étatique » de la gauche française, commune au PS et au PCF (caractérisée par le couple centralisme/uniformité), et la nouvelle culture politique autogestionnaire destinée selon eux à la supplanter (fondée sur l’autonomie des acteurs par rapport à la tutelle de l’État)25. Durant la seconde moitié des années 1970, la négociation sociale, que des hauts fonctionnaires modernistes cherchaient par ailleurs depuis longtemps à valoriser26, fut ainsi de plus en plus mise en avant par la « deuxième gauche », alors que le reste des socialistes considérait tout cela avec circonspection. Au début de 1975, les réactions au rapport sur la réforme de l’entreprise rédigé par le centriste Pierre Sudreau, qui proposait de favoriser l’expression des salariés et l’« action contractuelle » des partenaires sociaux, témoignèrent de cette différence27. Le Comité directeur du PS le condamna sévèrement, n’y voyant que des « bonnes intentions » rendues vaines par l’absence de remise en cause du « pouvoir réel dans l’entreprise né de la propriété du capital28 ». Mais, dans le même temps, Jacques Delors se félicita d’y retrouver les propositions sur la contractualisation de la vie sociale (certes exprimées de manière « moins vigoureuse » que ce qu’il aurait souhaité29) défendues au même moment par son club « Échange et projets », lequel était justement fréquenté par de nombreux hauts-fonctionnaires modernistes30.
De l’actualisation du Programme commun aux « 110 propositions » : le refus des remises en cause
6En septembre 1977, les désaccords entre socialistes et communistes sur l’étendue à donner aux nationalisations servirent de prétexte à la fin du Programme commun. Le PS publia dans la foulée ses « propositions socialistes pour l’actualisation31 ». En matière de droits des travailleurs, elles s’inscrivaient dans la droite ligne des propositions précédentes : il ne fallait pas donner prise à l’accusation communiste de « virage à droite ». Les quelques nouveautés tendaient à renforcer le « contrôle » des travailleurs, en créant un « droit de faire obstacle à la mise en place ou de faire interrompre le fonctionnement de tout système ou outil de production dangereux pour les travailleurs », dévolu aux comités d’hygiène et de sécurité (CHS)32. La même idée était d’ailleurs également défendue par le PCF dans ses propres propositions d’actualisation33. L’influence syndicale était ici palpable, celle de la CGT aussi bien que de la CFDT34. Le « recentrage » de cette dernière, entamé en 1978, l’amena cependant à bien davantage insister sur deux autres de ses revendications, le droit d’expression des salariés et l’obligation de négocier dans l’entreprise, formes édulcorées d’une aspiration autogestionnaire qui, en cette fin de décennie, tendait à s’essouffler.
7Le dernier grand texte programmatique socialiste de la décennie 1971-1981 fut le Projet socialiste pour la France des années 8035. Comme pour Changer la vie, la rédaction en fut confiée à Jean-Pierre Chevènement. La contestation rocardienne, qui grandissait à l’approche de l’échéance de 1981, lui avait redonné, au congrès de Metz de 1979, le statut d’allié indispensable de François Mitterrand. La crispation des luttes de pouvoir entre courants rejaillit sur la rédaction du nouveau programme. Le député de Belfort fit table rase des travaux antérieurs, lesquels ménageaient les équilibres intérieurs du parti. Cela suscita les critiques acerbes des minoritaires rocardiens et mauroyistes, qui reprochèrent à Jean-Pierre Chevènement de n’avoir exprimé que ses propres idées, sans avoir fait aucun effort de synthèse36. Ils échouèrent cependant à faire modifier le texte, qui fut adopté en janvier 198037. Texte de combat à usage aussi bien interne qu’externe, le Projet socialiste reflétait donc d’abord les idées du CERES, lequel se posait en défenseur du socialisme authentique – et donc des programmes antérieurs – contre les dérives rocardiennes. Les mitterrandistes, avant tout désireux de rejeter les rocardiens sur leur droite, se contentèrent d’épurer le texte de ses « petites phrases » et de ses « excès38 ». Les questions liées au droit du travail se trouvèrent marquées par ce contexte polémique : à l’éloge de la limitation du pouvoir patronal s’ajouta le dénigrement de la négociation sociale39. Ce Projet socialiste ne constitua cependant pas le programme de François Mitterrand à l’élection présidentielle de 1981. Comme en 1974, il voulut se doter d’une plate-forme électorale indépendante, restée dans l’histoire sous le nom des « 110 propositions pour la France ». Elle fut rédigée par une petite cellule dirigée par Pierre Bérégovoy, l’ancien négociateur socialiste de l’actualisation du Programme commun, issu du PSU mais rallié à François Mitterrand40. À partir d’un inventaire de 400 points programmatiques issus des documents du parti rédigés depuis Épinay, furent extraites 81, puis 110 propositions41. Adoptées au Congrès de Créteil du 24 janvier 1981, elles furent présentées par Pierre Bérégovoy comme une esquisse des « grandes lignes » d’un futur « programme de gouvernement » qui ne vit en fait jamais le jour. Les droits des travailleurs dans les entreprises privées étaient traités par les propositions 60 et 6142 :
« 60) Le comité d’entreprise disposera de toutes les informations nécessaires sur la marche de l’entreprise. Pour l’embauche, le licenciement, l’organisation du travail, le plan de formation, les nouvelles techniques de production, il pourra exercer un droit de veto avec recours devant une nouvelle juridiction du travail.
61) Le comité d’hygiène et de sécurité aura le pouvoir d’arrêter un atelier ou un chantier pour raisons de sécurité. »
8On le voit, la continuité était forte avec les programmes précédents. Il y avait cependant une absente de taille, l’autogestion, devenue trop associée à la « deuxième gauche ». Le terme ne figurait plus que dans le « manifeste » servant d’introduction au programme lui-même. Le reflux de l’enthousiasme autogestionnaire, déjà sensible dans le Projet socialiste de l’année précédente, était net.
Les lois Auroux, revanche de la « deuxième gauche » ?
9Après la victoire de François Mitterrand le 10 mai 1981, puis la « vague rose » des législatives de juin, le gouvernement de Pierre Mauroy fut chargé de mettre en œuvre les « 110 propositions pour la France », officiellement érigées par le président de la République en « charte de l’action gouvernementale43 ». Pourtant, elles ne furent pas immédiatement transposées dans la législation. Lors du premier conseil des ministres de son septennat, François Mitterrand commanda en effet un rapport sur les droits nouveaux des travailleurs au nouveau ministre du Travail, le jeune maire de Roanne Jean Auroux. Cela était-il déjà une prise de distance par rapport à son programme ? Cette décision eut en tous cas comme conséquence de ne plus faire des « 110 propositions » la seule référence du gouvernement, puisqu’un texte nouveau – le rapport Auroux – vint les contredire plutôt que les confirmer.
Le rapport Auroux, œuvre des experts proches de la « deuxième gauche »
10L’existence même d’un hiatus entre le rapport Auroux et les promesses présidentielles est a priori surprenante, car la commande n’avait pas échu à un expert extérieur, jouissant d’une certaine liberté, mais à un ministre, supposé appliquer la ligne gouvernementale, à savoir, dans ce cas, les « 110 propositions ». Jean Auroux, bien que mitterrandiste, adopta pourtant très vite une ligne politique qui renvoyait plus aux idées de la minorité du dernier congrès qu’aux éléments du programme présidentiel. Pourquoi un tel renversement ? Cela tient à ce que le rapport se trouva pris en charge par un petit groupe de hauts fonctionnaires très proches de la « deuxième gauche », occupant les positions clés dans les cabinets de Jean Auroux et de Pierre Mauroy44. Ceux-ci cumulaient une très forte légitimité professionnelle avec une activité militante souvent ancienne. Hauts fonctionnaires et experts reconnus des questions sociales, ils tirèrent argument de cette position pour écarter ce qui ne leur paraissait pas réaliste. Militants de la « deuxième gauche », ils purent mettre en avant leurs propres conceptions45. Syndicalement, ils penchaient vers la CFDT46, tandis que leurs inclinations politiques allaient bien plus vers Michel Rocard et Jacques Delors que vers Jean-Pierre Chevènement ou même François Mitterrand. Cela reflétait la proximité entretenue par la « deuxième gauche » avec beaucoup d’experts du social qui travaillaient dans les administrations en charge de ce secteur. Bernard Brunhes était le personnage central de cette configuration. Ce statisticien de formation avait exercé de 1976 à 1981, comme Jacques Delors avant lui, les fonctions de chef du service des affaires sociales du Commissariat général du Plan, et comme lui, il devint, dans la foulée, conseiller social du Premier ministre. Militant syndical très actif du côté de la CFDT et de l’action sociale, c’était un proche de Michel Rocard, qu’il avait un moment appuyé dans son ambition présidentielle. Militant socialiste, il ne se sentait pourtant pas tenu par les programmes antérieurs :
« J’ai été nommé [au cabinet de Pierre Mauroy] le 21 mai (officiellement le 23-24). La semaine d’après, pour mes fonctions précédentes, je devais faire une conférence […] organisée par […] un grand cabinet de formation professionnelle [et] décidée depuis plusieurs mois […]. Je me suis donc retrouvé dans cette salle avec beaucoup plus de gens que prévus, venus écouter […] le conseiller social du Premier ministre. […] Je fais un discours, je dis : “voilà ce qu’on va faire”, j’ai un peu inventé, je n’avais pas appris par cœur les 110 propositions ! En gros ce qu’on avait envie de faire, ce dont j’avais discuté avec Mauroy et Delors. Ensuite, une question [est venue de la salle] : “M. Brunhes, est-ce que comme prévu dans les 110 propositions on va donner le veto au comité d’entreprise sur les licenciements ?” Je n’ai pas réfléchi dix secondes, j’ai dit : “Non, je peux vous assurer que le gouvernement ne fera jamais ça.” Je n’avais demandé l’avis de personne47. »
11Laissé entièrement libre de constituer son équipe, il fit venir auprès de lui ses collaborateurs du Plan, tandis que son ancien bras droit, Michel Praderie, un ancien du PSU qui avait prêté la main à « Échange et projets », prenait la direction du cabinet de Jean Auroux48. Dans ce dernier figurait l’autre personnage essentiel de l’élaboration des lois Auroux, une jeune haut fonctionnaire nommée Martine Aubry. Sortie quelques années auparavant très bien classée de l’ENA, la fille de Jacques Delors avait fait le choix atypique du ministère du Travail, et, par la suite, avait également participé aux travaux d’« Échange et projets ».
12Pour répondre à la commande présidentielle, le cabinet de Jean Auroux – en fait Martine Aubry – délaissa les programmes antérieurs du PS49. C’est en réalité l’influence de la CFDT et de Jacques Delors qui dominait dans le rapport rendu au président de la République à la mi-septembre50. Le ministre du Travail y écrivait sa volonté de rendre les travailleurs « citoyens à part entière » et « acteurs du changement » dans l’entreprise, mais il se tenait soigneusement éloigné de toute tentation radicale. « Il n’est pas question de remettre en cause dans le secteur privé l’unité de direction et de décision dans l’entreprise » était-il ainsi affirmé51, alors que le mot d’autogestion n’était pas employé. Bien loin de toute idée de confrontation, ses deux principales propositions avaient pour objectif de favoriser compromis et dialogue social : il s’agissait de l’instauration d’un droit d’expression des salariés sur leurs conditions de travail, et d’une obligation de négocier dans l’entreprise, deux mesures venues de la CFDT. En revanche, les « 110 propositions » mitterrandiennes n’étaient pas reprises. Le droit de veto du comité d’entreprise était explicitement condamné comme étant une « formule de blocage ». Il lui était préféré un droit d’alerte, jugé plus souple et plus efficace52. Quant au droit d’arrêter les machines, le rapport ne l’abordait que dans les annexes, en soulignant les « problèmes délicats » posés par cette question.
13Était-ce donc une prise du pouvoir par une technocratie « deuxième gauche » ? Un adjoint de Bernard Brunhes à Matignon, René Cessieux, a évoqué devant nous l’existence d’un « rempart technocratique » qui aurait empêché les « très grosses bêtises53 ». Mais il faut aussi faire observer que les membres du gouvernement n’ont pas cherché à passer outre les avis de leurs conseillers. Le ministre du Travail semble avoir en tout cas été très rapidement convaincu, puisqu’il apparaît avoir abandonné l’idée d’un veto dès le début du mois de juillet54. Le président de la République ne lui opposa pas de résistance perceptible. Mais, dans tout ce dossier, c’était en fait le Premier ministre qui était en première ligne. Or, sans appartenir à la « deuxième gauche », Pierre Mauroy avait fait partie des minoritaires du précédent congrès socialiste. Surtout, il se montra constamment attaché à revaloriser la négociation sociale, sollicitant de manière inédite les partenaires sociaux dans toutes les grandes réformes sociales qu’il menait (ainsi la retraite à 60 ans ou la réduction de la durée du travail). Il se voulait également très prudent sur le plan économique : « les mesures que prendra le Gouvernement ne doivent pas avoir de répercussions trop fortes sur les entreprises qui doivent continuer à “tourner” », déclara-t-il ainsi à ses collaborateurs lors de la toute première réunion de cabinet qui suivit son installation à Matignon55. Sur beaucoup de points, les positions du Premier ministre rencontraient donc les représentations des experts « deuxième gauche ». Si peu de temps après le 10 mai 1981, le gouvernement pouvait cependant difficilement se permettre d’afficher que certaines des promesses présidentielles ne seraient pas tenues. Dès lors, le discours ministériel fut évasif et fluctuant. Le 20 août, Jean Auroux déclara à la télévision qu’il était opposé au droit de veto du comité d’entreprise56, mais quelques jours plus tard, après que les grandes lignes de son projet eurent été publiées dans la presse, il affirma qu’il n’y avait pas de « décision définitive » à ce sujet57. La deuxième proposition emblématique du candidat Mitterrand, le droit d’arrêter une machine dangereuse, ne semble pas avoir eu alors un statut aussi sensible : elle n’était alors tout simplement plus évoquée.
Le Parti socialiste, gardien du programme présidentiel
14Après la publication du rapport Auroux, le ministère du travail s’employa à le traduire en projets de loi, lesquels furent discutés à l’Assemblée nationale à partir du mois d’avril 1982. Avant cela, les équipes ministérielles négligèrent à peu près complètement de consulter les parlementaires socialistes et la direction du parti elle-même. Bernard Brunhes l’avoue sans détour :
« Le problème c’est qu’on avait une majorité absolue, […] et qu’on avait un peu le sentiment qu’ils avaleraient tout. […] Il n’y avait pas besoin de discuter avec le Parlement, de toute façon on savait qu’il voterait tout. […] Une fois que l’on avait l’accord entre nous, que l’on avait l’accord des syndicats, qu’on avait l’accord interministériel, qu’on avait consulté qui il fallait… C’est vrai, je trouvais plus utile de consulter les DRH de grands groupes sur tel ou tel aspect des lois Auroux que de consulter les parlementaires. Les parlementaires ont gueulé, et ils ont eu raison58. »
15Cette marginalisation du parti et du groupe amena Jean-Paul Bachy, délégué national du PS pour le travail et l’emploi, à écrire au Premier ministre pour la déplorer :
« Beaucoup de bonnes idées et de dossiers ont été mis au point depuis longtemps par le Parti, lui expliqua-t-il ainsi. Il serait dommage qu’ils ne soient pas utilisés. D’une façon générale, je ne te cache pas que beaucoup de camarades de l’équipe que j’ai constituée depuis plusieurs années, ainsi que moi-même, nous nous sentons aujourd’hui quelque peu sous-utilisés. C’est, à mon avis, dommage, dans la mesure où beaucoup d’entre nous ont une compétence réelle sur les questions que le Gouvernement est appelé à résoudre59. »
16Mais, face à la redoutable équipe d’experts dirigée par Bernard Brunhes, l’argument de la compétence était bien peu susceptible de porter. Le parti eut plus de succès en utilisant un registre argumentaire plus spécifiquement politique, dans un contexte où les « 110 propositions » (re)devenaient un enjeu de lutte entre courants. Au printemps 1982, Michel Rocard n’hésitait déjà plus à affirmer que ces dernières, reflétant en fait le Programme commun des années de croissance, ne pouvaient pas être appliquées en temps de crise60. En revanche, parmi la majorité des élus, le raisonnement politique (tenir ses promesses pour être crédible et s’assurer la fidélité des électeurs), comme les identités de courant, valorisaient le respect des « 110 propositions ». Ils eurent l’occasion de reprendre la main au moment du débat parlementaire. Avant d’être officiellement discutés en séance, les textes de lois furent en effet examinés au préalable par les parlementaires socialistes, au sein d’un groupe de travail présidé par Michel Coffineau, député du Val-d’Oise et membre du CERES. Ce groupe avança de nombreuses propositions de modification, plus conformes à l’esprit des programmes précédents. Elles alarmèrent immédiatement l’équipe sociale de Matignon, où l’on jugea « dramatique pour l’économie française, mais aussi pour l’évolution future des rapports sociaux, qu’une surenchère au parlement déforme l’esprit qui anime le rapport Auroux61 ». Après de rudes négociations, le groupe socialiste accepta, le 27 avril 1982, « sur la proposition de Pierre Joxe », président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, « de se ranger à la position du gouvernement62 ».
17Pourtant, tout n’était pas encore réglé. Tout en imposant la discipline aux députés socialistes, Pierre Joxe s’était saisi de la question spécifique du droit du CHS à arrêter les machines63. Depuis les « 110 propositions », cette mesure avait connu bien des avanies : absente dans un premier temps absente des projets de loi, elle était réapparue au cours des travaux de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, qui permirent aux députés socialistes de donner de la voix, mais pas de renverser complètement la situation. Les discussions avaient en effet abouti à un compromis, sous la forme d’un droit de retrait individuel des salariés en cas de danger grave et immédiat64. Cette solution correspondait aux recommandations les plus récentes de l’OIT65, mais elle ne contenta pas Pierre Joxe, qui s’appuya sur la lettre des 110 propositions pour la rejeter66. Lors de sa réunion du 27 avril, le président du groupe socialiste réussit donc à faire renvoyer la question au bureau exécutif du parti. Celui-ci se réunit le lendemain et procéda à l’audition de Jean Auroux, qui avait demandé à pouvoir défendre lui-même son projet67. Il dut s’employer pour en défendre la cohérence, et pour faire valoir qu’il ne fallait pas le remettre en cause pour un point isolé68. À la différence de ce qui s’était passé jusque là dans les cercles ministériels, le débat qui suivit fut beaucoup plus politique que technique69. Comme le releva Michel Coffineau lui-même, il était assez clair que le droit de retrait était la meilleure formule du point de vue juridique. Mais cela revenait formellement à abandonner une promesse de campagne de François Mitterrand. Pouvait-on se le permettre ? Lionel Jospin trancha pour la négative, au motif que ce serait un manquement politique singulièrement grand de renoncer à un engagement qui avait été formulé de façon si précise. Dès lors, il importait de travailler pour limiter ses effets pervers, mais il était hors de question de l’abandonner. Le bureau exécutif se rallia à cette présentation des choses, et se prononça en conséquence à l’unanimité pour que le texte de la future loi soit conforme à l’engagement « pris devant le pays70 ». La logique prévalant avant 1981, appuyée sur les rapports de force entre courants et sur la prééminence de la « première gauche » sur la « deuxième gauche », venait de reprendre le dessus. Cela fut cependant sans lendemain. Le gouvernement s’employa à trouver une solution allant dans le sens indiqué par le bureau exécutif, mais peina à faire émerger une formule satisfaisante71. Après des prises de position publiques contradictoires de Pierre Mauroy72 et de Lionel Jospin73, Jean Auroux se félicita, fin mai 1982, d’avoir trouvé la « formule miracle » susceptible de « réconcilier » les positions du Premier ministre, de la majorité74. Elle ne fit pas long feu : le texte finalement adopté à l’automne correspondit mot pour mot au « droit de retrait » issu de la délibération de la commission des affaires sociales du mois d’avril. Faute d’archives, il n’est guère possible d’en dire plus sur cette tentative de conciliation, de même que sur l’influence de François Mitterrand dans tous ces débats75. La confrontation entre le parti et le gouvernement tend cependant à suggérer que le président ne s’est pas impliqué directement dans la querelle, et n’a pas cherché à maintenir coûte que coûte ses anciennes promesses.
18L’histoire des lois Auroux montre en définitive le statut paradoxal qu’ont eu les « 110 propositions ». Par sa nature même, le programme électoral de François Mitterrand était pensé pour séduire les électeurs, mais il avait aussi un usage à l’intérieur du PS. Reflet des luttes de courant et des enjeux de pouvoir l’ayant traversé au cours de la décennie 1970, il n’était pas considéré par tous avec la même révérence. Après 1981, la logique militante en valorisa le respect fidèle, tandis que le Premier ministre prit soin de mettre en scène le caractère scrupuleux de leur mise en œuvre76. Pourtant, les anciennes promesses, au moment de rédiger une nouvelle législation, ne pesèrent que fort peu, ou du moins pas plus que les revendications syndicales ou patronales : elles n’étaient qu’une contrainte parmi bien d’autres. Le PS, qui en était le défenseur le plus ardent, n’était pas en mesure d’infléchir la logique même des textes qu’il devait voter. Elles ne tardèrent pas à se révéler comme une source d’embarras pour un gouvernement qui, dès l’origine, privilégia la voie de la négociation à celle de la confrontation sociale.
19Ce processus législatif témoigne en fait de la transformation des équilibres entre cultures politiques au sein du PS. Avant 1981, le marxisme de la « première gauche » prévalait. Il avait l’avantage d’ancrer nettement le PS à gauche et de faciliter l’alliance avec le PCF. La culture politique de la « deuxième gauche », valorisant la négociation sociale, convergeait sur ce point avec la frange de la droite et du centre-droit qui se voulait socialement progressiste. Battue à Metz par l’alliance à gauche entre le CERES et le courant Mitterrand, elle put après 1981 imposer ses idées en profitant de sa proximité avec une frange importante de la haute fonction publique, et de son accès aux postes clé de responsabilité, dans le sillage de Bernard Brunhes. La pratique de la négociation sociale étant par ailleurs au cœur des représentations défendues par la CFDT, une coalition efficace se mit en place pour élaborer des lois Auroux en définitive très modérées, reprenant beaucoup de travaux administratifs antérieurs. Cela ne veut cependant pas dire que cette coalition fut à cette époque partout capable d’imposer ses vues. Sur la réduction la durée légale du travail à 39 heures hebdomadaires, les experts « deuxième gauche » furent par exemple battus77. La différence essentielle entre les deux réformes est à trouver dans l’implication du président de la République, preuve, s’il en fallait, de sa place déterminante dans le régime politique de la Ve République.
Notes de bas de page
1 Colloque tenu au Sénat le 6 mai 2011. Retranscription d’après la retransmission télévisée diffusée sur LCP.
2 Tartakowsky D. et Bergounioux A. (dir.), L’Union sans unité : le Programme commun de la gauche, 1963-1978, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2012.
3 Parti socialiste, Changer la vie : programme de gouvernement du Parti socialiste, Paris, Flammarion, 1972 ; Changer la vie : programme de gouvernement et Programme commun de la gauche, Paris, Flammarion, 1972 ; Le Programme commun de gouvernement de la gauche : propositions socialistes pour l’actualisation, Paris, Flammarion, 1978 ; Projet socialiste pour la France des années 80, Paris, Club socialiste du livre, 1980.
4 Mauduit L. (dir.), Les 110 propositions : 1981-2011. Manuel critique à l’usage des citoyens qui rêvent encore de changer la vie, Paris, Don Quichotte, 2011. Voir également Manière de voir, no 124, août-septembre 2012.
5 Jobert B. et Théret B., « France : la consécration républicaine du néo-libéralisme », in Jobert B. (dir.), Le Tournant néo-libéral en Europe, Paris, L’Harmattan, 1994, p. 21-85 ; Cusset F., La Décennie : le grand cauchemar des années 1980, Paris, La Découverte, 2006.
6 Au sens d’ensemble de représentations, porteuses de normes et de valeurs, qui participent à l’identité d’un groupe ou d’une famille politique : Berstein S. (dir.), Les Cultures politiques en France, Paris, Le Seuil, 2003.
7 Duclert V., « La “deuxième gauche” », inBecker J.-J. et Candar G. (dir.), Histoire des gauches en France, Paris, La Découverte, 2004, p. 175-189.
8 Jalabert L., La Restructuration de la gauche socialiste en France des lendemains de mai 1968 du congrès de Pau du Parti socialiste de janvier 1975, mémoire pour l’habilitation à diriger des recherches, IEP de Paris, 2008.
9 Cayrol R., « L’univers politique des militants socialistes : une enquête sur les orientations, courants et tendances du Parti socialiste », Revue française de science politique, 1975, vol. 25, no 1, p. 47-49 ; sur la CFDT de l’après 1968, voir Georgi F., L’Invention de la CFDT 1957-1970. Syndicalisme, catholicisme et politique dans la France de l’expansion, Paris, Éditions de l’Atelier et CNRS éditions, 1995 ainsi que Defaud N., La CFDT, 1968-1995 : de l’autogestion au syndicalisme de proposition, Paris, Presses de Sciences-Po, 2009.
10 Georgi F. (dir.), Autogestion, la dernière utopie ?, Paris, Publications de la Sorbonne, 2003.
11 Jalabert L., op. cit., p. 318-323 et p. 580-582.
12 Parti socialiste, Changer la vie, op. cit., p. 44.
13 Cela est très visible dans la fiche argumentaire sur l’autogestion conçue en vue des élections législatives de 1973. Fondation Jean-Jaurès, Centre d’Archives Socialistes (par la suite FJJ-CAS), 3 EF 1.
14 FJJ-CAS, compte-rendu de la Convention de Suresnes, 12 mars 1972 matin, p. 11.
15 Parti socialiste, Changer la vie, op. cit., p. 67.
16 Parti socialiste, Parti communiste français, et Mouvement des radicaux de gauche, Programme commun de gouvernement, Paris, Flammarion, 1973.
17 Fulla M., « Le Programme commun de gouvernement : rupture économique ou artefact politique ? », in Tartakowsky D. et Bergounioux A. (dir.), op. cit., p. 67-82.
18 Parti socialiste, Parti communiste français, et Mouvement des radicaux de gauche, op. cit., p. 15-16.
19 Ibid., p. 48.
20 FJJ-CAS 2 RE 14, échange de courriers entre Georges Marchais et François Mitterrand, 13 et 21 octobre 1975.
21 Le Secrétaire général de la CFDT depuis 1971, Edmond Maire, occupa une place importante dans l’organisation des Assises. Kraus F., « Les Assises du socialisme ou l’échec d’une tentative de rénovation d’un parti », Notes de la Fondation Jean-Jaurès, no 31, juillet 2002.
22 Soulage V., « L’engagement politique des chrétiens de gauche, entre Parti socialiste, deuxième gauche et gauchisme », in Pelletier D. et Schlegel J.-L. (dir.), À la gauche du Christ : les chrétiens de gauche en France de 1945 à nos jours, Paris, Le Seuil, 2012, p. 425-446.
23 « Quinze thèses sur l’autogestion », Le Poing et la rose, supplément au no 45, 15 novembre 1975.
24 Kraus F., art. cité, p. 103-127.
25 Rosanvallon P. et Viveret P., Pour une nouvelle culture politique, Paris, Le Seuil, 1977, p. 83.
26 Moss B. H., « La réforme de la législation du travail sous la Ve République : un triomphe du modernisme ? », Le Mouvement social, no 148, juillet 1989, p. 63-91.
27 Chatriot A., « La réforme de l’entreprise. Du contrôle ouvrier à l’échec du projet modernisateur », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, no 114, avril-juin 2012, p. 183-197.
28 FJJ-CAS 2 RE 43, « Le Parti socialiste et l’entreprise », 14 mars 1975.
29 Le Nouvel Observateur, 17 février 1975.
30 Elles furent développées à de nombreuses reprises dans la revue éponyme du club entre 1975 et 1980 (no 4, 8, 10 et 21).
31 Parti socialiste, Propositions socialistes pour l’actualisation, op. cit.
32 Ibid., p. 54. Une disposition proche figurait dans une proposition de loi déposée par le PS en 1976 (proposition de loi no 2742, portant réforme du titre III du livre IV du code du travail relatif aux comités d’entreprise).
33 Parti communiste français, Programme commun de gouvernement actualisé, Paris, Éditions sociales, 1978, p. 69.
34 « Les solutions et propositions de la CGT », Le Peuple, no 1016, 15 au 30 juin 1977 ; « La plate-forme CFDT », Syndicalisme hebdo, no 1657, 16 juin 1977.
35 Parti socialiste, Projet socialiste, op. cit.
36 FJJ-CAS, carton 752, procès-verbal de la séance du 22 août 1979.
37 Le Poing et la rose, no 86, janvier-février 1980.
38 FJJ-CAS, carton 753, notes manuscrites de Laurent Fabius sur le projet socialiste, sans date.
39 Parti socialiste, Projet socialiste, op. cit., p. 227-244.
40 Castagnez N. et Morin G. (dir.), Pierre Bérégovoy en politique, Paris, Pepper-L’Harmattan, 2013.
41 Selon Serge Berstein, qui a pu consulter des documents issus du fonds Mitterrand des Archives Nationales auxquels nous n’avons pas eu accès. « Le programme présidentiel : les 110 propositions », inBerstein S., Milza P. et Bianco J.-L. (dir.), Les Années Mitterrand, les années du changement, 1981-1984, Paris, Perrin, 2001, p. 77-90.
42 La proposition 22 concernait quant à elle les moyens attribués aux syndicats.
43 Selon sa formule dans le message qu’il adressa au Parlement le 8 juillet 1981 : Berstein S., art. cité, p. 90.
44 Dagnaud M. et Mehl D., L’Élite rose, Paris, Ramsay, 1988.
45 Nous rejoignons donc ici P. Mathiot et F. Sawicki, qui ont pointé l’absence de « tournant technocratique » dans les cabinets ministériels de gauche au cours des années 1980. Opposer « technocrates » et « militants » n’a selon nous guère de sens ici : ce sont les mêmes personnes. Mathiot P. et Sawicki F., « Les membres des cabinets ministériels socialistes en France (1981-1993) : recrutement et reconversion. 1) Caractéristiques sociales et filières de recrutement », Revue française de science politique, vol. 49, no 1, 1999, p. 3-30.
46 C’était en général le cas des cabinets ministériels du gouvernement Mauroy. Dagnaud M. et Mehl D., op. cit., p. 62.
47 Entretien avec Bernard Brunhes, 13 mai 2008.
48 Dagnaud M. et Mehl D., op. cit., p. 87.
49 Nous nous permettons de renvoyer, pour plus de détails, à notre ouvrage Changer le travail pour changer la vie ? Genèse des lois Auroux, Paris, L’Harmattan/Fondation Jean-Jaurès, 2009.
50 Auroux J., Les Droits des travailleurs : rapport au Président de la République et au Premier ministre, Paris, La Documentation française, 1981.
51 Ibid., p. 4.
52 Ibid., p. 19.
53 Entretien avec René Cessieux, 21 mai 2008.
54 Archives personnelles de René Cessieux, carnet « juillet 1981 », notes prises durant une réunion avec le ministre du Travail, 9 juillet 1981.
55 Archives nationales (par la suite AN) 19850743/214, procès-verbal de la réunion de cabinet du 29 mai 1981.
56 Le Monde, 21 août 1981.
57 Le Monde, 5 septembre 1981.
58 Entretien avec Bernard Brunhes, 13 mai 2008.
59 AN 198590743/355, lettre de Jean-Paul Bachy à Pierre Mauroy, sans date (été 1981).
60 Il tint par exemple ce type de propos en avril 1982, à l’occasion d’un passage à la fédération socialiste du Vaucluse, à la grande fureur d’un responsable local qui en fit part immédiatement au premier secrétaire. FJJ-CAS, 2 PS 449, courrier d’Yves Arnaud à Lionel Jospin, 26 avril 1982.
61 AN 19850743/354, note de René Cessieux à Pierre Mauroy, 17 mars 1982.
62 FJJ-CAS, fonds Mauroy, carton « Durée du travail, droit des travailleurs », note de Richard Gradel à Pierre Mauroy, 28 avril 1982.
63 AN 19850743/354, note de René Cessieux à Pierre Mauroy, 27 avril 1982.
64 Assemblée nationale, Bulletin des commissions, septième législature, no 11, p. 881-883 (séance du 21 avril 1982), et AN 19850743/354, « Amendements sur la protection des salariés en cas de danger grave et imminent », sans date.
65 Convention no 155 de l’OIT, adoptée en juin 1981 (article 13).
66 Au grand désespoir de Bernard Brunhes, pour lequel le droit d’arrêter les machines dangereuses « faisait malheureusement partie des engagements du Président de la République ». AN 19850743/354, note de Bernard Brunhes à Pierre Mauroy, 19 avril 1982.
67 AN 19850743/354, note de René Cessieux à Pierre Mauroy, 27 avril 1982.
68 Entretien avec Jean Auroux, 4 avril 2008.
69 FJJ-CAS 6 FP 12.
70 FJJ-CAS 6 FP 13, « Rappel des décisions du bureau exécutif du 28 avril 1982 ».
71 AN 19850743/354, notes manuscrites de René Cessieux, fin avril 1982.
72 Le Monde des 23-24 mai 1982.
73 Le Monde du 25 mai 1982.
74 Le Monde des 30-31 mai 1982.
75 Nous n’avons pas trouvé trace d’une intervention présidentielle au sujet du droit d’arrêter les machines.
76 Mauroy P., C’est ici le chemin, Paris, Flammarion, 1982.
77 Tracol M., « La défaite des experts », Hypothèses, no 14, 2010, p. 109-118.
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