4. « L’Europe » dans la production des programmes du PCF
Dirigeants communistes et dynamique de spécialisation (1973-1999)
p. 85-98
Texte intégral
« Je pense que, malgré tout, les élus sont confrontés aussi à cette question-là. Quand on travaille dans des grandes métropoles, dans des régions frontalières, les axes de transports tout ça, de plus en plus la dimension européenne est présente. […] Et puis vous voyez on peut pas évoquer l’actualité sans évoquer l’Europe. […] Ce sont des questions qui doivent obligatoirement monter. Je pense que politiquement ça peut être une force. Ce qui a été pendant très longtemps finalement un talon d’Achille peut devenir aujourd’hui une force. Parce que l’Europe telle qu’elle est agencée ne peut pas continuer longtemps comme ça. »
Entretien avec Marie-Pierre Vieu, conseillère régionale et membre du Comité exécutif national du PCF, 29/06/2011.
1Ces quelques mots, prononcés par une responsable communiste qui n’a jamais exercé de mandats européens ni même été en charge des questions européennes dans son parti, témoignent du long chemin parcouru au cours des dernières décennies1. Au moins au niveau du discours, l’intégration européenne semble s’être imposée avec la force de l’évidence comme un sujet incontournable sur lequel les rédacteurs des programmes électoraux ne peuvent plus faire l’impasse. Parmi les éléments du répertoire d’action des partis politiques, les programmes ont été quelque peu délaissés par les politistes français, y compris ceux travaillant sur le Parti communiste français (PCF). Si quelques-unes des études pionnières sur le communisme avaient consisté à restituer l’idéologie partisane2, elles pouvaient verser dans l’exégèse de textes et ne prêtaient pas une grande attention à leurs conditions de production. Plus récemment, cette lacune a été en partie comblée par des enquêtes sociologiques portant plus précisément sur la place dévolue aux intellectuels3, les écoles du parti et la crise du système de formation des cadres4, l’effondrement du « mode ecclésial de production doctrinale » précipitant le déclin de l’institution partisane5, ou encore les luttes pour la définition de la marque communiste dans les milieux partisans locaux6. Il nous semble que les programmes constituent un autre terrain possible d’exploration des transformations partisanes. Nous nous intéresserons ici plus particulièrement à ceux édités à l’occasion des élections européennes (de 1979 à 1999) car, à travers ce prisme, on peut saisir les modalités de la politisation7 d’un thème particulier et interroger les conditions permettant son inscription comme enjeu politique.
2Au préalable, étudier l’intégration européenne dans les programmes du PCF revient à constater de notables inflexions en termes de contenu : affichant des années durant une opposition très marquée à une Communauté économique européenne (CEE) intégrée au système d’alliance occidentale, les prises de position officielles du PCF ont construit progressivement un autre rapport à cette institution. Durant la Guerre froide, la mainmise que les États-Unis et l’Allemagne fédérale auraient exercée sur le pays via le Pacte atlantique et la CEE était identifiée comme la principale menace à repousser. Au PCF, la question européenne se résumait alors pour l’essentiel à la partition du continent en deux blocs, hypothéquant le maintien de la paix et de la sécurité. L’intégration communautaire, n’en constituant qu’une des dimensions, était perçue comme un élément de la stratégie du « camp impérialiste » pour surmonter ses rivalités internes et endiguer la montée en puissance des « forces anti-impérialistes » et donc du Mouvement communiste international (MCI). Il incombait alors à la classe ouvrière de s’ériger en gardienne de la souveraineté nationale, suivant une « loi » de l’histoire selon laquelle, au moins depuis la Révolution française, la classe sociale qui se trouve en perte de vitesse tendrait à sacrifier l’intérêt national, dont la défense serait mieux assurée par celle qui se trouve en phase d’ascension8. Cette analyse induisait une dénonciation radicale et globale de la CEE, à laquelle succède ensuite un discours incriminant davantage les politiques européennes mises en œuvre et quelques-uns des acteurs ou des organes censés les symboliser. C’est la « réorientation » des politiques de l’Union européenne qui est alors préconisée.
3Aussi, ce n’est que peu à peu que la Guerre froide et le fait communautaire sont découplés et qu’il paraît nécessaire de réserver à celui-ci un traitement spécifique. Un parti étant à la fois « un espace de concurrence objectivé entre des agents ainsi disposés qu’ils luttent pour la définition légitime du parti et pour le droit de parler au nom de l’entité et de la marque collective9 » et un « administrateur de sens10 », l’étude des programmes électoraux peut révéler les concurrences intrapartisanes et interpartisanes explicatives de la production des mots d’ordre. L’identification des problèmes devant être traités politiquement, leur traduction dans le langage du parti et les solutions préconisées dépendent des contraintes structurelles induites par le champ politique mais aussi des dispositions sociales des acteurs11. Avant de recevoir l’imprimatur de la direction partisane, les programmes électoraux sont l’aboutissement d’un travail mené au préalable par des spécialistes, dont la marge de jeu est sujette à des variations conjoncturelles dont nous tâcherons de rendre compte.
4La manière de problématiser les questions européennes est plus qu’une réaction aux transformations géopolitiques. Elle est l’expression de transformations internes au parti, celle de sa division du travail et du personnel en charge de la production des positions européennes, qu’une sociologie des programmes peut mettre au jour. Pour retracer l’histoire de la formation d’un groupe de spécialistes de l’intégration européenne, on peut mobiliser les outils de la sociologie des professions et des processus de professionnalisation. Pour Andrew Abbott, les professions répondent à un problème et sont liées à un ensemble de tâches12. Il nomme « juridiction » les liens unissant une profession et une sphère d’activités. Les frontières juridictionnelles ne sont pas fixées une fois pour toutes car elles sont constamment l’objet de luttes entre groupes professionnels, chacun d’entre eux concourant pour se voir reconnaître un droit à exercer dans une juridiction. Parfois un groupe professionnel détient le contrôle total d’une juridiction, d’autre fois il est subordonné à un autre. Des facteurs sociaux externes aux groupes étudiés comme des restructurations internes à un corps professionnel peuvent redessiner le tracé des frontières juridictionnelles. Effectivement, chaque sphère d’activités est sujette à des recompositions induisant une reformulation des problèmes posés, une requalification des compétences légitimes pour les traiter et donc une redéfinition des groupes professionnels habilités à les prendre en charge. Dans le cas présent, un ensemble de facteurs ont eu des répercussions sur la façon de problématiser le fait communautaire et ont contribué à l’émergence, relativement précaire, d’un groupe de spécialistes reconnus de « l’Europe ». Cette spécialisation a une incidence sur les rapports de force intrapartisans et sur les programmes. Nous nous penchons, d’abord, sur les fondements d’un découplage progressif entre le fait communautaire et la Guerre froide avant 1979, qui coïncide avec l’arrivé de nouveaux acteurs chargés d’apporter une expertise sur les questions communautaires. Par la suite, au cours des années 1980 et 1990, la configuration se modifie : des acteurs politiques multipositionnés (au sein de la direction partisane et au Parlement européen) parviennent à faire de l’intégration européenne un thème politique spécifique. Nous nous appuyons sur une analyse des acteurs, au moyen d’entretiens, d’un relevé de leurs publications et des traces de leurs activités laissées dans les archives du PCF.
La politisation du fait communautaire et l’émergence d’une juridiction sur l’intégration européenne avant 1979
5Durant les années 1970, une première dissociation entre les problèmes relatifs à la Guerre froide et à l’intégration européenne est esquissée. Elle s’inscrit dans un contexte plus général de repositionnement du PCF au sein du MCI et du champ politique français. Elle est aussi liée à des dynamiques de publicisation des questions concernant la CEE : le référendum de 1972 sur le premier élargissement du Marché commun puis l’élection européenne de 1979. En outre, c’est à cette période que le PCF envoie ses premiers élus siéger au Parlement européen : l’interdit frappant le parti lors de la désignation des délégués français dans cette assemblée est levé en 197313. Alors, une fraction du personnel partisan se spécialise dans les questions communautaires, participant à la politisation de ce thème. Le manifeste électoral de 1979 est le signe de leur action, tout en traduisant un certain état du rapport de forces à l’intérieur du parti.
6L’autonomisation des questions relatives à la CEE est corrélée à une transformation des équilibres intrapartisans. Depuis le début des années 1960, la direction communiste tente de renouer avec les autres forces de gauche afin de relégitimer le parti dans le champ politique national et de le hisser au rang de « parti de gouvernement ». Ceci engendre des heurts avec les dirigeants soviétiques et, de ce fait, rend possible un rapprochement avec le Parti communiste italien anticipant l’eurocommunisme de la seconde moitié des années 1970. Ces choix perturbent la configuration tripolaire établie au sommet du PCF : les dirigeants politiques (majoritairement issus du monde ouvrier) dominent l’ensemble, mais les intellectuels et les élus voient leur rôle s’affirmer, d’autant plus que le PCF devient un pôle d’attraction pour de nouveaux agents issus des couches moyennes salariées et intellectuelles. Dans les revues et les sections de travail, les intellectuels sont mis à contribution pour justifier au plan théorique la stratégie politique retenue, adoptant une posture de « conseillers du prince14 ». Les sections de politique extérieure (« Polex ») et économique jouent un rôle crucial dans cet aggiornamento. À la suite du 20e congrès (décembre 1972), la Polex est dirigée par Jean Kanapa. Agrégé de philosophie, il transite du pôle intellectuel (il dirigea La Nouvelle Critique) vers celui des dirigeants politiques. Conseiller plus ou moins officieux du secrétaire général Waldeck Rochet, il fit partie en 1967 du groupe de travail mis en place par le PCF et la Fédération de la gauche démocrate et socialiste pour harmoniser leurs positions respectives. S’agissant de la CEE, les rédacteurs de la plate-forme commune du 24 février 1968 s’accordaient pour réprouver « ses aspects monopolistiques et technocratiques », sans pour autant dissimuler leurs divergences sur les réponses à y apporter. Cet épisode constitue une étape d’un processus non-linéaire dont le point d’aboutissement est la signature du Programme commun quatre ans plus tard15. La participation française au projet communautaire y est présentée comme une nécessité, mais qui ne doit pas entraver la liberté d’action du gouvernement pour la réalisation de sa politique16. L’ascension de Jean Kanapa tient aussi à sa bonne connaissance des arcanes du MCI. Ancien correspondant de L’Humanité à Moscou, cette expérience aurait nourri en lui des interrogations sur le modèle soviétique. Il gagne la confiance de Waldeck Rochet puis de son successeur Georges Marchais dès lors qu’ils acquièrent la conviction que le soutien inconditionnel à l’Union soviétique obère l’élargissement de l’audience du PCF en France. Son adjoint à la Polex est Jacques Denis. Ancien peintre en bâtiment, il fait partie de la frange inférieure du pôle des dirigeants politiques : ex-secrétaire de Maurice Thorez, membre du Comité central (CC), il n’intègre pas l’exécutif partisan. Il est assez représentatif des permanents que compte alors la Polex : des militants ouvriers ayant adhéré un peu avant ou un peu après la Seconde Guerre mondiale, ayant souvent eu une expérience de la clandestinité durant la Résistance. Pour eux, « suivre » l’Europe occidentale consiste moins à acquérir des compétences expertes sur le Marché commun qu’à entretenir les contacts avec les autres partis communistes de cette aire géographique, à préparer les conférences du MCI pour coordonner la riposte « anti-impérialiste ». Faute de disposer d’un personnel spécialisé dans l’Europe communautaire, il est revenu à Jean Kanapa et Jacques Denis d’écrire un ouvrage devant préciser la doctrine du PCF sur ces questions17.
7Promoteur d’une prise de distance critique vis-à-vis de l’Union soviétique, Jean Kanapa organise au même moment une refonte de la Polex qui est concomitante d’une reformulation des termes dans lesquels le problème de l’intégration est posé. En mai 1973, devant le CC, il recommande des actions communes aux forces de gauche (y compris non-communistes) de la CEE pour démocratiser les organes communautaires et faire émerger une « Europe indépendante » refusant la logique des blocs18. Après les compliments rituels sur la qualité du rapport, les orateurs successifs dressent un compte-rendu de la situation politique dans leurs fédérations. L’objet du rapport est donc très peu discuté, ce qui procède entre autres du haut niveau de compétences que requiert, aux yeux des acteurs, l’habilitation à parler de politique européenne. L’importance du propos ayant peut-être échappée à l’assistance, Jacques Denis l’interpelle et enfonce le clou. Dorénavant, l’intégration européenne ne peut plus être appréhendée avec pour unique prisme la dimension « sécuritaire ».
« Cela nous appelle à être extrêmement offensif, parce que cela permet de voir toute la différence avec le passé. C’est pas la première fois que nous sommes amenés à nous préoccuper beaucoup des questions européennes. Pendant des années, le Comité central a été amené à avoir par exemple à son ordre du jour la question allemande. Et nous devions le faire dans un moment où la question était telle que nous pouvions nous trouver placés devant une explosion en Europe. Le danger était que ces problèmes soient si brûlants que nous puissions avoir une guerre mondiale à partir de la situation allemande. Nous mesurons par la simple comparaison de cela qu’aujourd’hui nous nous trouvons devant des tâches nouvelles. C’est-à-dire que les conséquences des batailles menées et les changements survenus dans le monde permettent désormais de poser les choses dans des termes extrêmement offensifs et en même temps constructifs19. »
8L’ouverture d’une juridiction spécialisée sur l’Europe communautaire se concrétise avec l’accession d’élus PCF au Parlement européen. De nouvelles tâches voient le jour et requièrent le recrutement de collaborateurs pour les prendre en charge. Ils sont plus jeunes et dotés de titres scolaires élevés. Daniel Debatisse et Sylvain Dreyfus sont titulaires d’un DES de sciences économiques. Le premier anime le collectif de la Polex consacré à la CEE tandis que le second conduit le groupe « Europe » de la section économique. Ils sont affectés au secrétariat de la délégation du PCF au Parlement européen. Gérard Streiff, 24 ans, est un des nouveaux permanents recrutés. Fils de boulanger, il s’est rapproché des communistes lors de son passage à l’Institut d’études politiques de Strasbourg. Il achève un cursus à l’Institut des hautes études européennes. Gérard Laprat, de deux ans son cadet, est fils d’un professeur de droit. Membre de l’Union des étudiants communistes et de l’Union nationale des étudiants de France à Lyon, ayant entamé une thèse en droit mais s’étant vu refusé un poste d’assistant, il renonce petit à petit à la carrière universitaire. Les deux hommes décrivent leur embauche comme s’étant produite dans une certaine précipitation, qu’ils imputent à l’urgence de la situation créée par l’irruption soudaine d’élus PCF au Parlement européen :
« Mais ça n’a pas duré dix minutes. En dix minutes on m’a dit : “Absolument, on a besoin de quelqu’un, on sait exactement pourquoi.” Et donc je me suis retrouvé sans l’avoir voulu permanent du PCF. On raconte toujours, les biographies etc. Je n’ai rien eu de tout ça. […] On m’a dit : “On a du travail pour toi, on sait exactement, on a des députés européens depuis peu et tu vas travailler pour les députés européens20.” »
9La première tâche de Gérard Streiff consiste à enseigner aux nouveaux eurodéputés les rudiments des institutions communautaires, mais ensuite, il se consacre essentiellement à la Polex où il devient secrétaire de Jean Kanapa en charge des questions européennes. Gérard Laprat, pour sa part, assiste les députés européens dans leurs missions nationales et communautaires et participe aux activités de la Polex. Les questions ayant trait à la CEE étant faiblement institutionnalisées au sein du parti, aucun bureau ne lui est initialement affecté :
« On n’avait pas de bureau pour ce truc : “Parlement européen.” Où est-ce qu’on allait nous mettre ? Alors moi j’ai tout connu. Je travaillais chez moi. Je partageais un bureau avec une des secrétaires d’un membre du Bureau politique à Colonel-Fabien. Et puis j’avais un bureau à l’Assemblée nationale. […] Les bureaux, qui sont un truc purement matériel, traduisaient le fait qu’on n’avait pas de place pour ces gens-là. “Où est-ce qu’on allait les mettre finalement ? Qu’est-ce qu’ils allaient faire21 ?” »
10À l’approche de la campagne européenne de 1979, ces acteurs écrivent un ouvrage destiné aux militants et qui compile le travail accumulé dans la période précédente22. Mais l’écriture du manifeste électoral, texte destiné à un public plus large, relève aussi de la juridiction des « politiques » et suppose l’implication de dirigeants vérifiant sa parfaite conformité à la « ligne ». Or, au même moment, celle-ci tend à être redéfinie. Depuis le milieu des années 1970, une frange croissante de la direction partisane s’inquiète d’une forme de dénaturation du parti déstabilisant les équilibres internes tandis que les gains électoraux que la stratégie unitaire devait apporter ne sont pas engrangés23. Pire encore, le PCF tend à être ravalé à la seconde place à gauche, derrière le Parti socialiste (PS). L’échec de l’actualisation du Programme commun puis des élections législatives de 1978 aiguisent les tensions internes tandis que la direction semble de plus en plus soucieuse de réaffirmer l’identité ouvrière et révolutionnaire du PCF. La parenthèse de l’eurocommunisme est refermée et un réalignement sur la politique soviétique se profile24. Cette évolution est accélérée par la mort de Jean Kanapa. Son successeur, Maxime Gremetz, symbolise l’ascension d’un nouveau personnel politique d’origine ouvrière dans le sillage de Georges Marchais. Dès lors, la première élection européenne au suffrage universel direct est surtout perçue comme une occasion de tester la nouvelle stratégie de réidentification révolutionnaire insistant sur tout ce qui distingue le PCF du PS.
11Les injonctions contradictoires adressées aux rédacteurs du manifeste sont symptomatiques des flottements au sommet de l’institution. Un groupe de travail est réuni sous la houlette de Jacques Denis, Maxime Gremetz et Charles Fiterman, considéré comme le numéro deux du parti. Les spécialistes de « l’Europe » et des diverses sections de travail sont mis à contribution pour lister les revendications susceptibles de séduire un large nombre de cibles électorales. La consigne est la suivante : être à la fois critique sur le bilan de la CEE et « montrer l’Europe que nous voulons25 ». S’y ajoute un impératif supplémentaire : aucune proposition ne doit induire une extension des compétences communautaires. Jacques Denis s’ouvre de la difficulté à respecter cette instruction :
« Le point fait bien montrer que les premiers apports sont, comme c’était prévisible, assez disparates et appellent beaucoup de travail.
D’abord du point de vue de notre orientation. Puisque dans l’ensemble nous n’échappons pas encore au danger signalé par Georges (il y a lieu de poser les revendications sensibles en rendant clair que le vote est l’occasion de les soutenir en s’adressant à qui de droit, c’est-à-dire au pouvoir giscardien et pas à Bruxelles ou Strasbourg)26. »
12Les dirigeants qui pilotent le groupe de travail s’attellent à une opération de « transtylisation », c’est-à-dire de réduction et de simplification de la production des experts afin de l’ajuster à l’espace de réception élargi auquel le programme est destiné27. Ceci est justifié par des motifs tout autant esthétiques (« une certaine unité de conception, de style28 ») que politiques (l’évacuation de propositions jugées contraires à la « ligne »). La finalisation relève de la seule juridiction des « politiques » : elle est opérée en marge d’une session du CC. Elle recèle un enjeu politique, celui de fournir à un public peu initié aux questions communautaires un décryptage politique du sens de cette élection inédite et le convaincre de l’importance de se mobiliser. Ce souci est explicité par Maxime Gremetz lorsqu’il commente la version finale du manifeste devant le CC :
« Il faut pas se cacher que c’est très compliqué l’Europe et que certains essaient de compliquer au maximum. Donc il faut tout à la fois, nous, prendre en compte, essayer d’expliquer aussi simplement que possible de quoi il retourne et ne pas vouloir tout dire29. »
13Pour ce faire, les rédacteurs ont dû s’efforcer d’établir une continuité entre les enjeux du scrutin européen et les enjeux politiques proprement nationaux, qui les intéressent au premier chef tout en aidant à familiariser les sympathisants à cette élection. Celle-ci est présentée comme l’occasion de sanctionner le « virage à droite » du PS, dont les accointances supposées avec le gouvernement giscardien sont énumérées tout au long de la campagne, et jusque dans l’introduction du manifeste. Ce sont bien les anciens électeurs communistes « égarés » vers le vote PS qui sont les destinataires prioritaires du programme, comme le martèle le représentant de la fédération du Finistère, en reprenant une formule des années 1920 :
« Moi, mon opinion, à cette élection européenne, ce que nous allons faire c’est surtout, comme aurait dit feu mon père, plumer la volaille socialiste. [rires dans la salle] C’est là que nous avons à gagner30. »
14De l’autre côté du spectre politique, le ton polémique adopté par deux anciens Premiers ministres, Jacques Chirac et Michel Debré, au nom du Rassemblement pour la République, légitime pour partie les thèses communistes contre la supranationalité tout en avivant au fur et à mesure une compétition pour le titre de meilleur défenseur de l’indépendance nationale. Mais il reste encore à identifier le point d’ancrage de la mobilisation, le problème qui doit permettre de rendre plus concrètes les « menaces » que la CEE ferait planer sur le pays. C’est le projet d’élargissement de la Communauté à l’Espagne et au Portugal qui est censé remplir cet office, comme le confie Maxime Gremetz :
« Nous choisissons tout de suite de mettre comme grande question essentielle la question de l’élargissement. Parce qu’il s’agit de la question la plus sensible mais je dirais aussi la plus compréhensible. […] C’est donc, je dirais, la question centrale de ce document : ils veulent pousser, avec l’élargissement, à l’intégration européenne31. »
15La spécialisation ne crée pas mécaniquement de tensions au sein du parti : les spécialistes se mettent au service d’une direction, qui les appuie en raison de son besoin en connaissances spécialisées. On peut emprunter à Patrice Pinell l’analogie avec l’histoire de la constitution des spécialités dans le champ médical : « La spécialisation est contestable dans son principe parce que, en poussant le médecin à limiter l’étendue de ses connaissances à un domaine restreint, elle rétrécit son champ de vision de la pathologie et limite du même coup ses compétences en matière de diagnostic, l’exposant dans sa pratique à l’erreur32. » Autrement dit, la légitimité de la spécialisation n’est reconnue que lorsque les généralistes des institutions dominantes la perçoivent comme une conséquence inéluctable du progrès des connaissances. Ensuite, le savoir spécialisé ne s’impose pas immédiatement comme le plus légitime, y compris aux yeux des spécialistes eux-mêmes, d’autant plus qu’ils ont intériorisé leurs places dans la division des tâches. Patrice Pinell remarque que les médecins spécialistes ont longtemps continué d’adhérer à un système de valeurs les reléguant derrière les généralistes. Dans le discours des acteurs qui nous intéressent, la coupure entre les experts et les « politiques » est régulièrement rappelée et la détention par les seconds du monopole de l’homologation de la « ligne » n’est pas contestée. Politiquement, la position dominée des spécialistes se traduit par leur absence de la liste des candidats. Parmi ces derniers, le plus sensibilisé aux questions européennes, Jacques Denis, est plus âgé et, en tant que membre du CC, non dépourvu de ressources politiques. Mais il n’est placé qu’en dix-neuvième position, avant d’être éloigné à la vingt-septième place et de perdre son mandat parlementaire en 1984.
16La trajectoire ultérieure de certains spécialistes montre une spécialisation à l’intégration européenne qui se poursuit professionnellement dans les décennies qui suivent. Jean-Claude Thomas est collaborateur parlementaire avant de réussir un concours de la fonction publique européenne. Il a été encouragé à s’y présenter par Gérard Laprat, devenu secrétaire général du groupe parlementaire avant d’être lui-même promu à un poste de directeur dans l’administration du Parlement européen. Au groupe communiste, Gérard Laprat avait pris le relais de Daniel Debatisse et Sylvain Dreyfus. D’après lui, c’est le refus de ces derniers de s’installer durablement à Luxembourg qui explique ce remaniement. Daniel Debatisse (qui rejoint le cabinet ministériel de Charles Fiterman puis le Forum alternatives européennes, club créé par l’ancien ministre après son départ du PCF en 1994, tout en poursuivant ses activités de recherche au CNRS) ou Sylvain Dreyfus (qui se reconvertit comme avocat) n’ont donc pas de trajectoire européenne. Il en va de même de Gérard Streiff qui, entré au CC en 1979 et demeurant permanent, est affecté à d’autres tâches que l’intégration européenne. En revanche, l’existence d’une juridiction spécialisée dans les questions communautaires, elle, demeure un acquis des années 1970.
La reconnaissance unanime de la singularité des questions liées à l’intégration européenne au sein de la direction du PCF (1979-1999)
17Il ne suffit pas qu’une juridiction spécialisée ait émergé pour que l’intégration européenne soit considérée comme un sujet politique à part entière. Il faut encore que ce thème soit pris en charge par le corps dirigeant et érigé en problème politique spécifique. Or, au sein de l’exécutif partisan, l’intérêt pour la thématique communautaire en tant que telle est assez faible. Mais peu à peu ceux de ses membres qui se succèdent à la tête de la délégation au Parlement européen développent des compétences européennes. La production des positions européennes du PCF est donc toujours prise dans une dynamique entre spécialistes et « politiques », dans une négociation entre des agents occupant des positions partisanes hétérogènes. Cette dynamique intrapartisane, associée aux transformations géopolitiques (l’écroulement de l’Union soviétique et du bloc de l’Est, le traité de Maastricht) et à celles de la compétition électorale, conduit à l’évacuation du discours traditionnel du PCF sur l’intégration européenne.
18Les spécialistes de « l’Europe » restent dominés dans la hiérarchie partisane, même si leur spécialisation fait d’eux des interlocuteurs incontournables sur les questions européennes. Certains eurodéputés jouent un rôle de passeurs entre eux et la direction partisane. Le mandat parlementaire européen étant l’un des moins valorisés, c’est surtout ceux qui par ailleurs siègent dans les instances exécutives du parti qui peuvent occuper cette place d’intercesseurs. C’est le cas de Gustave Ansart, premier chef de file de la délégation du PCF au Parlement européen. Ouvrier métallurgiste de profession, il est simultanément député national et un des hauts dirigeants de la puissante fédération du Nord. En 1981, le flambeau est transmis à René Piquet, dont la particularité est de n’avoir pour seul mandat électif que celui de député européen. Mécanicien automobile puis ouvrier métallurgiste, il est le cadet du Bureau politique (BP) lorsqu’il le rejoint en 1964. Régulièrement candidat aux élections dans le Midi Toulousain, la difficulté à arracher au PS un mandat parlementaire dans cette région explique sa sélection en position éligible à l’élection européenne de 197933. Dans son souvenir, autant il bénéficiait d’une grande autonomie dans la gestion de l’activité de la délégation parlementaire, du fait de la relative indifférence que le Parlement européen inspirait au reste de la direction partisane, autant il devait faire preuve d’un grand sens du compromis lorsqu’il œuvrait à la rédaction des programmes électoraux. Intervenant en sa double qualité de généraliste et de spécialiste, dans la juridiction réservée aux « politiques », la subordination des questions européennes aux questions nationales lui est rappelée. Chargé du rapport inaugurant la campagne européenne de 1984, il est mis en minorité au BP. Il lui est, en effet, reproché de se focaliser excessivement sur les questions européennes en tant que telles :
« Il n’y avait pas de désaccord avec les idées que je formulais concernant l’Europe. Mais en gros, on me dit : “René, c’est pas ça le problème, il faut déjà qu’on règle en France…” […] Moi je voulais qu’on en fasse une véritable bataille politique européenne : le Parti communiste dans la bataille européenne. […] On ne perçoit pas la dimension du problème européen, la question que pose l’existence de ces institutions, de leur transformation, de leur devenir34. »
19La singularité des questions européennes et la nécessité de formuler des contre-propositions précises apparaissent davantage en 1989. La tête de liste, Philippe Herzog, présente un profil atypique. Âgé de 49 ans, polytechnicien et professeur d’économie, il dirige la section économique tout en siégeant au BP. En somme, il constitue un cas d’accession d’un spécialiste à l’une des instances politiques par excellence. Comme d’autres économistes du parti, il fait l’analyse que la politique du PCF en matière européenne doit être approfondie au moment où le projet de marché unique européen est mis à l’agenda politique. Il dirige un ouvrage à ce sujet peu avant l’élection européenne de 198935. Il réunit des contributeurs de plusieurs sections de travail, mais est plutôt piloté par la section économique. Peu connu du grand public, sa désignation comme tête de liste étonne. Dans une conjoncture de forte délégitimation du personnel politique d’origine ouvrière, elle résulte de la volonté de montrer que le PCF dispose lui aussi de responsables ayant des compétences expertes36. Ses titres universitaires sont d’ailleurs régulièrement rappelés. Cette plongée dans la compétition électorale et dans le monde parlementaire ne feront que distendre un peu plus ses liens avec le reste de la direction. Durant la campagne, il s’oppose à Georges Marchais et quelques autres qui lui reprochent de tenir un discours insuffisamment clair politiquement car trop axé sur des contre-propositions supposées trop peu saillantes voire déstabilisantes pour l’électorat communiste. Ces accrocs annoncent sa dissidence : « L’Europe a été plus la cerise sur le gâteau, le catalyseur de ma rupture37. » Fondateur du think tank Confrontations Europe, il quitte le PCF en 1996.
20Du fait de la relance de l’intégration européenne ainsi que de la dislocation de l’Union soviétique et du bloc communiste qui frappe d’obsolescence la grille de lecture des problèmes internationaux jusqu’ici en vigueur, ceux des responsables partisans pouvant attester de la détention d’une compétence spécifique sur les questions communautaires accumulent un capital qui se réévalue et gagnent une autonomie plus grande dans la formulation des axes de campagne. Une figure émerge alors : celle de Francis Wurtz. Issu de cette génération de militants jeunes et diplômés ayant rejoint le PCF dans la dynamique de l’aggiornamento, il est recruté dès les années 1970 par la fédération du Bas-Rhin puis au secrétariat de Georges Marchais. Cette proximité au secrétaire général est probablement à l’origine de son entrée au CC et de son élection au Parlement européen en 1979. Il reconnaît toutefois que son investissement parlementaire n’a pas été immédiat tant ses autres tâches l’accaparaient. Promu au BP en 1990, puis à la tête de la Polex, sa mission consiste à imaginer une politique étrangère opérationnelle à la suite de la chute du Mur de Berlin. Tête de liste à l’élection européenne de 1994, il est dans la foulée l’un des artisans de l’adhésion des eurodéputés PCF au groupe de la Gauche unitaire européenne, qu’il présidera de 1999 à 2009. À la différence de Philippe Herzog, Francis Wurtz n’a pas fait un long passage préalable par le pôle intellectuel puisqu’il a réalisé toute son ascension au plus près des dirigeants politiques. De plus, il détient beaucoup moins de ressources extrapartisanes, ce qui entretient sa loyauté indéfectible au parti et le prédispose à vouloir concilier innovations doctrinales et préservation des fondamentaux du PCF. Ayant intégré les règles en vigueur dans l’institution parlementaire, il est celui des dirigeants communistes qui correspond le mieux au qualificatif de « professionnel de l’Europe38 » comme en atteste la définition qu’il donne de son rôle de député :
« C’est tout simplement pas possible de dire : “Je définis ici une position et après j’entre dans un milieu plurinational où les problèmes se posent différemment d’une fois sur l’autre, et j’applique des directives.” C’est tout simplement impossible. Il faut qu’il y ait une orientation, qu’on défende une orientation avec intelligence, faculté d’adaptation, acceptation du compromis, créativité. Sinon, on ne fait plus une politique d’aujourd’hui39. »
21La latitude d’action qui lui est concédée est d’autant plus grande qu’il a acquis une compétence européenne qui lui est unanimement reconnue et qu’aucun autre responsable communiste ne peut lui disputer. Bien après la retraite politique de son mentor, Georges Marchais, il demeure le pilier de la politique européenne du PCF, partant du principe que l’intégration européenne serait une bonne idée mais que le cours des politiques faites en son nom devrait être réorienté dans le sens d’une « Europe sociale » (notion qui se substitue à celle d’« Europe des travailleurs ») et non plus « libérale ». Cette reformulation doit beaucoup aux contraintes internes au champ politique national. Francis Wurtz rappelle que durant la campagne référendaire sur le traité de Maastricht une « voix respectable de la droite » (il cite Philippe Séguin) formulait des thèses sur la souveraineté nationale qui pouvaient faire écho à celles des communistes. Or, elle s’est effacée ensuite, ne laissant plus qu’une « droite non respectable » avec laquelle il serait coûteux d’être assimilé. D’autant qu’à partir du milieu des années 1990, la stratégie nationale du PCF subit des modifications. En 1994, après l’intronisation de Robert Hue comme secrétaire national, un « pacte unitaire pour le progrès » est proposé aux autres partis de gauche. L’heure étant à la « mutation40 » tout ce qui peut renouveler le langage d’institution est encouragé. Compensant l’usure de l’appareil de production doctrinale, lessivé par les conflits et les départs successifs, la direction renouvelée se singularise par un usage ostensible des instruments modernes de communication. Les analyses du sondeur Stéphane Rozès, identifiant une défiance des citoyens envers la représentation politique sur fond de mutations du capitalisme, sont régulièrement exposées dans L’Humanité voire même à la tribune du Congrès en 1996. Pourtant, il n’est pas certain que la désignation de Robert Hue soit à l’origine d’une inflation des commandes de sondages41. Ce qui change à coup sûr est la visibilité qui leur est donnée, l’usage politique que le secrétaire national en fait dans les luttes internes pour convaincre que la « mutation » est la seule voie de salut possible. Cette méthode se retournera ensuite contre lui dans la mesure où, lorsque la décrue électorale s’accélérera, il lui sera reproché d’avoir dérogé à son statut en se laissant duper par les mirages de la communication.
22À cet égard, la liste « Bouge l’Europe » présentée en 1999 et composée pour moitié de non-communistes apparaît comme un coup politique. Le manifeste se veut novateur par la procédure d’adoption contournant les instances régulières du parti et par son contenu. De tous ceux publiés par le PCF lors des scrutins européens, il est celui où la thématique européenne est la plus présente et où les contre-propositions sont les plus nombreuses42. Pour remédier à « la crise de la représentation politique », la liste s’y définit sur un mode consensuel : « Fondatrice de pratiques politiques neuves pour aller de l’avant vers la république des citoyennes et des citoyens, la république de la solidarité, de la société métissée de notre temps et vers la communauté réconciliée des Européens pour une perspective de développement partagé et des rapports de codéveloppement avec les peuples du Sud, pour un message d’ouverture et d’espérance, constructif et généreux, porté en France, en Europe et dans le monde. » Il traduit une forme de « néo-communisme » qui s’apparente à une sorte d’« humanisme multiforme43 » moins clivant, et résultant d’une incapacité d’une direction, elle-même divisée, à unifier le groupe partisan autour d’un discours commun apte à le distinguer des autres. L’une des conséquences non-maîtrisées de cette reproblématisation des questions européennes est que celles-ci sont utilisées comme ressources par les divers détracteurs de la direction dans les luttes internes pour la définition de la marque partisane.
23Au-delà des péripéties de la « mutation », l’un des acquis de la période est la reconnaissance unanime de la nécessité de réserver un traitement spécifique aux questions européennes, ce qui transparaît dans l’organigramme du PCF à partir de 1994. Un « collectif de coordination » en voie d’autonomisation vis-à-vis du secteur de la politique internationale est créé mais, jusqu’ici il peine à s’institutionnaliser et doit partager sa juridiction avec des structures concurrentes participant à l’élaboration des positions européennes du PCF. Ainsi, la confection des programmes électoraux est signifiante politiquement en tant qu’elle reflète des choix stratégiques qui sont au cœur des luttes pour la redéfinition de la marque communiste.
Notes de bas de page
1 Je remercie Karim Fertikh et Mathieu Hauchecorne pour leur relecture attentive d’une version antérieure de ce texte et les nombreuses remarques et suggestions qu’ils y ont apportées.
2 Touchard J., « Introduction à l’idéologie communiste », Les cahiers de la FNSP, no 175, 1969, p. 83-106 ; Bon F., « Structure de l’idéologie communiste », Les cahiers de la FNSP, no 175, 1969, p. 107-140 ; Labbé D., Le Discours communiste, Paris, Presses de la FNSP, 1977.
3 Matonti F., Intellectuels communistes. Essai sur l’obéissance politique, La Nouvelle Critique (1967-1980), Paris, La Découverte, 2005.
4 Ethuin N., À l’école du parti. L’éducation et la formation des militants et des cadres du Parti communiste français (1970-2003), thèse de science politique, université Lille 2, 2003.
5 Pudal B., Un monde défait. Les communistes français de 1956 à nos jours, Bellecombe-en-Bauges, Éditions du Croquant, 2009.
6 Mischi J., Structuration et désagrégation du communisme français (1920-2002). Usages sociaux du parti et travail partisan en milieu populaire, thèse de science politique, EHESS, 2002 ; Mischi J., Le Communisme désarmé. Le PCF et les classes populaires depuis les années 1970, Marseille, Agone, 2014.
7 Des usages possibles de la notion de politisation énoncés par Jacques Lagroye, nous retiendrons celui-ci : « l’inscription d’un problème social, médical, culturel, voire “purement technique” (du point de vue des techniciens s’entend) dans la liste des questions traitées par les institutions explicitement politiques » : « Les processus de politisation », Lagroye J. (dir.), La Politisation, Paris, Belin, 2003, p. 367.
8 Cet élément doctrinal est rappelé par l’historien Maurice Agulhon, opérant un retour réflexif sur son expérience d’ancien militant communiste : « Sur la culture communiste dans les années cinquante », Cefaï D. (dir.), Cultures politiques, Paris, PUF, 2001, p. 273-298.
9 Offerlé M., Les Partis politiques, Paris, PUF, 2012 [1987], p. 16.
10 Hastings M., « Partis politiques et administration du sens », inAndolfatto D., Greffet F. et Olivier L. (dir.), Les Partis politiques. Quelles perspectives ?, Paris, L’Harmattan, 2001, p. 21-36.
11 Offerlé M., Les Partis politiques, op. cit., p. 94.
12 Abbott A., The system of professions. An essay on the division of expert labour, Chicago, University of Chicago Press, 1988.
13 Avant 1979, les membres du Parlement européen étaient des parlementaires nationaux délégués par leurs pairs. Au sein des chambres parlementaires françaises, depuis 1973 seulement, les représentants de la France à l’Assemblée européenne étaient élus au scrutin proportionnel.
14 Pudal B., Prendre parti. Pour une sociologie historique du PCF., Paris, Presses de la FNSP, 1989, p. 281 sq. ; Matonti F., Intellectuels communistes. Essai sur l’obéissance politique. La Nouvelle Critique (1967-1980), op. cit.
15 Bergounioux A., Tartakowsky D. (dir.), L’Union sans unité. Le Programme commun de la gauche, 1963-1978, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2012.
16 Programme commun de gouvernement, Paris, Éditions sociales, 1972, p. 177-181.
17 Denis J., Kanapa J., Pour ou contre l’Europe ?, Paris, Éditions sociales, 1969.
18 Archives du PCF (APCF), fonds du CC, 261 J2 49, rapport de Jean Kanapa lors de la session des 25 et 26/05/1973.
19 APCF, fonds du CC, 4 AV 1979, enregistrement sonore de la session des 25 et 26/05/1973.
20 Entretien avec G. Laprat, 26/09/2012.
21 Ibid.
22 Debatisse D., Dreyfus S., Laprat G., Streiff G., Thomas J.-C., Europe : la France en jeu, Paris, Éditions sociales, 1979.
23 Pudal B., Prendre parti. Pour une sociologie historique du PCF, op. cit., p. 292-293 ; Pour un témoignage sur les équilibres au sein de la direction partisane : Hincker F., « Le groupe dirigeant du PCF dans les années 1970 », Communisme, no 10, 1986, p. 70-79.
24 Marcou L., Les Pieds d’argile. Le communisme mondial au présent. 1970-1986, Paris, Ramsay, 1986.
25 APCF, fonds Jacques Denis (inventaire en cours de tri), 357 J 47, exposé sur la préparation du projet de programme, 20.07.1978.
26 APCF, fonds Gérard Streiff (inventaire en cours de tri), 261 J 7/G. Streiff 2, lettre de Jacques Denis à Charles Fiterman, 11/08/1978.
27 Fertikh K., Le Congrès de Bad Godesberg. Contribution à une socio-histoire des programmes politiques, thèse de sciences sociales, EHESS, 2012, p. 322-346.
28 APCF, fonds Gérard Streiff (inventaire en cours de tri), 261 J 7/G. Streiff 2, lettre de Jacques Denis à Charles Fiterman, 11/08/1978.
29 APCF, fonds du CC, 4 AV 2626, enregistrement sonore de la session des 12 et 13/12/1978.
30 Ibid.
31 Ibid.
32 Pinell P., « Champ médical et processus de spécialisation », Actes de la recherche en sciences sociales, no 156-157, 2005, p. 17.
33 Lé nécessité de faire grandir l’influence du PCF dans cette région est la justification contenue dans la note du BP expliquant au CC les choix ayant présidé à la confection de la liste : APCF, fonds du CC, 261 J/2 54, les candidatures à l’Assemblée européenne.
34 Entretien avec R. Piquet, 03/11/2012.
35 Herzog P. (dir.), Europe 92. Construire autrement, autre chose, Paris, Éditions sociales, 1989.
36 Sur la valorisation de la « jeunesse » et des savoirs scientifiques et techniques comme ressources distinctives dans le champ politique, on peut se référer à l’exemple de Laurent Fabius, d’ailleurs tête de liste PS en 1989 : Sawicki F., « Laurent Fabius : du “Giscard de gauche” au “socialisme moderne”. Analyse de la formation d’une identité politique », Pôle sud, no 1, 1994, p. 35-60.
37 Entretien avec P. Herzog, 06/05/2008.
38 Georgakakis D. (dir.), Les Métiers de l’Europe. Acteurs et professionnalisations de l’Union européenne, Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, 2002 ; Beauvallet W., Profession : eurodéputé. Les élus français au Parlement européen et l’institutionnalisation d’une nouvelle figure élective (1979-2004), thèse de science politique, université Strasbourg 3 Robert Schuman, 2007.
39 Entretien avec F. Wurtz, 03/07/2009.
40 Hue R., Communisme : la mutation, Paris, Stock, 1995.
41 Stéphane Rozès rappelle que l’usage des sondages au PCF est ancien puisqu’il remonte aux enquêtes menées par Guy Michelat et Michel Simon dans les années 1960. Il dit avoir surtout développé, auprès du PCF, le recours aux enquêtes qualitatives. Entretien, 19/05/2011.
42 Manifeste pour l’élection européenne de 1999, « Manifeste des 87. Une volonté commune : donner un nouvel élan pour le changement » ; Reungoat E., « L’européanisation dans le texte : la place et le traitement de l’Europe dans les euromanifestes des partis français (1979-2009) », Petithomme M. (dir.), L’Européanisation de la compétition politique nationale. Adaptation et résistances en perspective comparée, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, 2011, p. 47-72.
43 Mischi J., Structuration et désagrégation du communisme français (1920-2002). Usages sociaux du parti et travail partisan en milieux populaires, op. cit., p. 818.
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