3. Le roman, la princesse et le président
Le « monarque républicain » et la symbolique lettrée en France
p. 65-81
Texte intégral
1L’univers volontiers enchanteur du politique s’est trouvé récemment peuplé de princesses littéraires. Un ancien président, énarque et académicien de surcroît, s’adonne aux joies du roman et narre les amours d’une jeune princesse britannique avec un monarque républicain, français et vieillissant. Le conte de fée emprunte au genre du roman psychologique. Un futur président, d’une génération différente et pétri de télévision, fustige quant à lui le roman fondateur du genre précité, s’étonne que La Princesse de Clèves puisse figurer au programme d’un concours administratif et avoue la souffrance par lui ressenti à la lecture d’un classique de la littérature française.
2De quoi La Princesse de Clèves fut-elle le nom ? Fallait-il lire dans l’appétence de l’un et le mépris de l’autre, la fin d’une époque ? Une question de génération et de scolarisation ? Un renouvellement des codes de la communication politique signant l’obsolescence d’une posture et l’enterrement d’une tradition, celle du Président-Lettré, rendant prégnant le passage d’une culture de l’écrit à celle de la vidéosphère ? Pour beaucoup d’observateurs, « l’affaire » fut considérée comme emblématique de la présidence sarkozyenne : mépris de la culture et des élites intellectuelles, assomption du pragmatisme au sommet de l’État. C’est le triomphe du « Sarkoberlusconisme1 » ou encore de ce que Pierre Legendre a pu nommer le « dogme » ou « l’Empire du management2 ». Mais par-delà les critiques, les propos jugés blasphématoires ont aussi suscité des formes plus originales de contestation. Le site web du Nouvel Observateur lance un Sarkothon afin d’offrir au président des livres3. Christophe Honoré réalise un film, La Belle Personne, librement inspiré du roman incriminé. Des mobilisations en forme de happenings se multiplient, notamment au moment de la protestation contre la réforme des universités : lecture-marathon du livre devant le Panthéon, le 16 février 2009, organisée par des universitaires de Paris 3 avec Louis Garrel : 6 h 15 de lecture pour aller au bout du texte. Enfin, un pin’s sur lequel on pouvait lire : « Je lis La Princesse de Clèves » est apparu au Salon du livre 2009.
3Par la magie du verbe élyséen, La Princesse de Clèves s’est donc retrouvée au cœur d’une mobilisation politique. Et avec elle, a ressurgi une mythologie -la littérature et son culte du « grand écrivain »– et, comme en creux, par contrepoint, une spécificité française : la propension des hommes politiques à vouloir capter le prestige de la littérature voire à légiférer le monde de l’inspiration4. Toutes choses que Jean-François Revel avait déjà notées dans un article de France Observateur de 1958 consacré à ceux qu’il nommait les « Stylistes au pouvoir ». À l’occasion de la réédition de son essai sur Le Style du Général, il précisait d’ailleurs sa lecture :
« Il faut bien comprendre que nous entendions tous les jours célébrer le génie littéraire du grand homme, promu au rang, non seulement de chef de l’État, mais de grammairien suprême et d’arbitre absolu de la langue française, comme les adulateurs devaient recommencer à la faire, du reste, en 1981, à propos de François Mitterrand. Au viol des foules et à l’usage politique du talent oratoire, qui remontent à l’Antiquité, s’ajoute en France, le snobisme littéraire des hommes politiques et de leurs flagorneurs5. »
4Au-delà du constat de la commune aspiration gaullienne et mitterrandienne à la grandeur et à l’immortalité littéraire, les réflexions de Jean-François Revel soulignent les profits recherchés par les hommes de pouvoir et les ressorts de ce tropisme hexagonal. Ce mariage du pouvoir et de la plume serait désormais largement dévoyé à des fins politiques, la littérature annexée aux logiques de carrières, ressource distinctive et élitiste cumulable avec d’autres qualités, œuvrant à ciseler les identités politiques et les profils symboliques, servant à bricoler les fondements d’une légitimité sur les modes épars et éclectiques de la vocation et de l’inspiration (de l’écrivain), du savoir et de l’expertise (du technocrate), de la tradition et du labeur (du métier ou de l’artisan). La généralisation de ce « prurit littéraire des politocrates6 » que les campagnes électorales ravivent incite alors à considérer cette tentation scripturale comme « une modalité d’exercice du métier politique7 ».
5Si cette dimension narcissique, stratégique et utilitariste ne peut être éludée, le « snobisme » constituant un ressort social et psychique bien décrit par La Recherche du Temps Perdu, sa labellisation « littéraire » invite néanmoins à un travail de contextualisation historique et culturel. Pourquoi la littérature s’inscrit-elle en France comme objet et instrument des stratégies mondaines et sociales, source de prestige et étalon de la reconnaissance ? Comment expliquer la permanence, sous la Ve République, au moins jusqu’à Nicolas Sarkozy, de la figure d’un Président-Lettré par rapport à ses homologues anglo-saxons par exemple ? Pourquoi cette –relative– singularité française (n’oublions pas que Churchill obtint le Prix Nobel de littérature en 1953, qu’un écrivain comme Vaclav Havel fut élu président de la République Tchèque, que Mario Vargas Llosa se présenta à l’élection présidentielle péruvienne…) ? Faut-il enfin considérer l’épuisement contemporain de ce modèle de grandeur politique et littéraire avec l’incarnation présidentielle sarkozyenne ?
6Enjeu de stratégies politiques et incomparable révélateur des positions, la symbolique lettrée renvoie à la question de la construction de la posture présidentielle et à sa maiestas. Elle est révélatrice de l’évolution de la stature du Souverain dans les représentations collectives et des dispositifs de légitimation du Prince à travers la manipulation de symboles. Car on ne saurait sous-estimer cet intense et polysémique travail du symbolique à l’œuvre dans le champ politique, univers qui sollicite à la fois la puissance sécurisante de la raison, la dynamique créatrice de l’imagination mais aussi les pulsions mobilisatrices et fédératrices des émotions8. Jouant sur tous ces registres, sollicitant les facultés cognitives du sujet aussi bien que les profondeurs de l’inconscient, la symbolique politique, omniprésente dans les procédures de mise en scène du politique, favorise aussi, par les dynamismes émotionnels qu’elle libère, la circulation des désirs comme l’a bien montré Philippe Braud dans son œuvre9.
7Plusieurs niveaux de lecture définissent alors les contours de cette intrigue. Un premier, à caractère historique, insiste sur l’importance des filiations et des hérédités. Il impose de questionner la tradition lettrée qui marque l’histoire politique en France depuis l’Ancien Régime et l’apparition d’un référentiel littéraire-monarchique. Un second, à dimension anthropologique, invite à appréhender la part de « merveilleux » qui persiste dans les sociétés contemporaines sécularisées et à déconstruire le processus de sacralisation du pouvoir en France sous la Ve République à travers la figure de son titulaire le plus éminent, le président de la République.
Le jeu des médiations gaulliennes et les économies de la grandeur
8Sur le plan constitutionnel comme sur le plan politique, la fonction présidentielle sous la Ve République est marquée par la geste fondatrice du général de Gaulle. Les pouvoirs qui lui sont accordés par la Constitution fondent « l’éminence de ce pouvoir d’incarnation10 ». Immunisée contre les vicissitudes du parlementarisme des républiques passées, confortée par la réforme constitutionnelle de 1962, la fonction présidentielle est marquée du sceau de l’extraordinaire et d’une certaine transcendance. Elle impose alors, pour celui ou celle qui voudrait y prétendre, la détention de qualités héroïques, réelles ou supposées, seules susceptibles de lui permettre d’endosser légitimement et d’exercer avec talent l’écrasante et valorisante charge.
9À cette médiation intrinsèquement politique vient s’en adjoindre une seconde, plus subtile et apparemment moins contraignante, mais dont on ne peut sous-estimer le caractère implicitement normatif : la médiation littéraire. Sur ce point encore, l’institution présidentielle subit l’ombre portée de son premier titulaire et impose à ses successeurs un difficile et périlleux travail d’adaptation ou d’ajustement. Grandeur politique et grandeur littéraire se sont, à travers la présidence gaullienne, fécondées pour faire renaître une figure démiurgique et historique qui allie, sur un double mode charismatique, l’héroïsme du politique et le génie de l’écrivain, l’homme d’État et l’homme des mémoires d’État, celui qui fait l’histoire et celui qui raconte l’histoire11.
10Mais l’exceptionnalité de la stature gaullienne ne doit pas occulter l’attitude déférentielle de ses successeurs à l’égard de la littérature et de l’écriture. La fonction présidentielle sous la Ve République est prisonnière de cet imaginaire littéraire qui innerve en profondeur l’exercice du pouvoir au point de s’afficher sur les photographies officielles dont il colonise souvent l’arrière-plan. Le général de Gaulle a fixé un horizon indépassable et fondé l’écriture comme critère d’excellence. Il apparaît dans cette constellation mythologique comme le fondateur d’une dynastie ou d’une lignée de chefs d’État « littéraires ». Ceux qui endosseront à sa suite le rôle et en assumeront la charge resteront prisonniers de cette matrice qui unit le pouvoir politique et la littérature. Avec plus ou moins d’ostentation et de prétention, tous les élus –à l’exception notoire de Nicolas Sarkozy– feront allégeance à la littérature, exhiberont les signes d’une déférence admirative.
11Georges Pompidou, normalien et agrégé de lettres, s’inscrit pleinement dans cette filiation et fait paraître en 1961 une Anthologie de la poésie française, « une anthologie de banquier. Un portefeuille de valeurs sûres » selon le mot du journaliste Joseph Barsalou12. Ce « panthéon de papier13 » témoignait d’un classicisme qui contrastait avec les audaces du futur président dans le domaine de l’art contemporain mais attestait une indéniable affinité avec les genres littéraires et le « monde de l’inspiration ».
12À la veille de son élection en 1974, devant les invités d’un banquet de la Revue des Deux Mondes, Valéry Giscard d’Estaing donnait à son tour des gages à la littérature, livrait son Officiel des lectures et déclarait non sans ingénuité :
« Ma véritable ambition, ce serait une ambition littéraire. Si j’avais la certitude de pouvoir écrire, en quelques mois ou en quelques années, l’équivalent de l’œuvre de Guy de Maupassant ou de Gustave Flaubert, il est hors de doute que c’est vers cette sorte d’activité qu’avec joie je me tournerais14… »
13De la présidence de la République à l’Académie française, sa trajectoire emprunte au registre littéraire et lui rend hommage à de nombreuses reprises. Si son accès au rang d’Immortel a suscité une petite tempête sous la Coupole et dans le milieu germanopratin15, elle peut se lire comme le point d’aboutissement de cette ambition affichée. Valéry Giscard d’Estaing sera l’inventeur d’une posture nouvelle, celle du technocrate/écrivant, publiant dès le début de son septennat un essai vite métamorphosé en best-seller : Démocratie française. Le retrait du pouvoir signe alors le temps de l’autobiographie (Le pouvoir et la vie) mais aussi et surtout celui du roman (Le Passage, La Princesse et le président, La Victoire de la grande armée)16.
14Mais plus que tout autre, c’est véritablement François Mitterrand qui saura jouer avec brio la carte lettrée. Dès 1964 et la publication du Coup d’État permanent, il endosse une double posture de « littérateur » et d’« homme d’État » qui l’exhausse au rang de son rival gaullien. Toute sa trajectoire politique sous la Ve République est aussi liée à cette « façade littéraire » qu’il construit patiemment, de publications en déclarations. On ne compte plus les symboles qui émaillent sa biographie et sollicitent ce registre, de ses amitiés (Paul Guimard et Benoite Groult, Françoise Sagan, Marguerite Duras) et de ses visites aux grands écrivains (Ernst Jünger, Cioran, Michel Tournier) à ses essais (Le Coup d’État permanent, Ma Part de vérité, La Paille et le grain, L’Abeille et l’architecte…) en passant par sa posture de lecteur, initiée médiatiquement sur le plateau d’Apostrophes et immortalisée par Gisèle Freund à l’occasion de son portrait officiel : « Tenez compte pour mon portrait que je suis un écrivain avant d’être un homme politique », lui aurait enjoint François Mitterrand à cette occasion17.
15Sa participation à l’émission, Apostrophes, le 7 février 1975, contribua en effet à imposer cette image lettrée. Sa prestation fut jugée « éblouissante » par Jean Daniel qui évoquera le « frisson lamartinien18 » et « étincelante » par Bernard Pivot qui estime que
« par la suite, aucun autre invité prestigieux ne réussit à commenter avec autant de brio les œuvres choisies, leur style, leur singularité, leur postérité. Bien des gens ont affirmé que si cette émission avait eu lieu avant l’élection présidentielle de mai 1974, les deux cent ou trois cent mille voix qui séparaient François Mitterrand de Valéry Giscard d’Estaing eussent été comblées. Peut-être19 ».
16Cette apparition de François Mitterrand dans une émission littéraire ne fut pas sans conséquence sur le mode de fonctionnement du jeu politique lui-même. Il a ouvert une brèche, précédant de la sorte d’autres invités renommés tels que Valéry Giscard d’Estaing ou Raymond Barre. Cette première émission consacre François Mitterrand comme exceptionnel lector, fin lettré et brillant exégète. Sa seconde prestation, trois ans plus tard, au mois de septembre 1978, pour la publication de son livre L’Abeille et l’architecte, le consacre comme auctor, adoubé par Bernard Pivot et le groupe de pairs rassemblés (Patrick Modiano, Michel Tournier, Paul Guimard, Emmanuel Le Roy Ladurie). François Mitterrand saura d’ailleurs jouer de ces valeurs lettrées face au répertoire technocratique de son adversaire, dévalué par la crise économique persistance et la montée en puissance de valeurs post-matérialistes dans les sociétés occidentales. L’imaginaire mathématique, froid et désincarné tapi au cœur de la rhétorique giscardienne va se heurter à l’univers lettré, sensoriel et terrien du personnage mitterrandien. Enfin, si le legs de Jacques Chirac au monde de l’inspiration semble plus mince que celui de son prédécesseur, il ne sacrifie pas moins que son modèle gaullien au genre mémoriel, « ultime étape d’un cursus » ouvrant « la possibilité d’un ultime exploit, dans la réalisation virtuose d’un exercice associant rhétorique et politique en une conjugaison dont la “république des professeurs” était familière20 ».
Tradition lettrée et « littérarisation du pouvoir »
17Comment expliquer alors l’existence de cette forme d’hérédité politico-littéraire ? L’important réside dans l’inscription de ces trajectoires politiques dans une tradition croisée qui serait constitutive d’une certaine « spécificité française », celle des écrivains tentés par la gloire politique et celle des politiques tentés par la grandeur littéraire. Singularité que résume bien Roland Barthes à propos du général de Gaulle. Évoquant l’« immunité poétique21 » dont il jouissait, Roland Barthes soulignait une étrange transmutation à laquelle se livrait la critique qui, opérant « un curieux –et précieux– va-et-vient : […] passe son temps à renflouer l’écrivain par le politique, le politique par l’écrivain22 ». Pour lui, la complaisance de la critique n’est pas seulement circonstancielle. Elle plonge au cœur des rapports noués entre les intellectuels et le pouvoir en France depuis plusieurs siècles. À ses yeux, l’admiration unanime pour le don d’écrivain du général peut se lire comme un « trait quasi sociologique » et le révélateur d’une fascination : celle des élites pour un écrivain au pouvoir, et au pouvoir suprême.
18Ce mariage du politique et du littéraire doit être appréhendé à l’aune du référentiel littéraire/monarchique qui s’est progressivement cristallisé en France. Ce « principe monarchique à tendance absolutiste23 » aliène l’histoire politique française depuis plusieurs siècles. Il oblige à lire la prétention littéraire du général de Gaulle et de ses successeurs comme l’incarnation de cette emprise.
19En déterminer les contours, c’est souligner le travail d’édification des qualités attendues du président par le titulaire du rôle, son aptitude à façonner les croyances par le langage, les mots et les symboles, et donc par extension, sa capacité à construire de façon sémiologique la fonction présidentielle et la réalité politique. Le président de la République en effet ne fonctionne pas seulement comme instance constitutionnelle mais relève également de la catégorie des « constructions symboliques » :
« Dans cette perspective, le président apparaît, dans l’univers des représentations politiques, comme une référence structurante qui modèle et mobilise des attentes, offre un support à de multiples projections, fonde un ancrage sur des valeurs24. »
20Indissociable de dispositifs narratifs, la fiction/fonction présidentielle est prisonnière des récits qui l’ont précédée et façonnée. Située au centre de la toile des signes qu’elle condense, la posture élyséenne est le produit du temps, des valeurs consolidées et du principe dialogique qui voit différentes narrations s’entrecroiser et se répondre. Partie prenante dans le processus de sédimentation du référentiel littéraire-monarchique, le président de la République en est aussi l’émanation. Ce jeu croisé de narrations est devenu source de cristallisation identitaire bien mise en évidence par les travaux de l’historiographie.
21Car les liens entre le pouvoir, l’État et la symbolique lettrée ne sont pas neufs en France. Ils renvoient à une configuration singulière, celle d’une « littérarisation du pouvoir25 ». Ils s’inscrivent dans une histoire de longue durée où, au fil des siècles se sont nouées des représentations mentales associées aux « Lettres », convoquant alors, par capillarité, les figures de l’auteur et du « grand écrivain ».
22Le XVIIe siècle marque avec éclat cet usage du livre et de la symbolique lettrée dans le jeu politique. Les « mazarinades », pamphlets politiques commandités par les grands aristocrates du royaume de France pour combattre l’influence jugée excessive de Mazarin, illustrent le versant critique26. Mais au pouvoir de corrosion prêté au livre et aux libelles27, il faut opposer leur propension légitimatrice dans la « fabrication de la gloire » de Louis XIV28. Enfin le patronage monarchique s’étendit avec la constitution des académies, renforçant une forme de dépendance clientélaire bien mise en évidence par Alain Viala :
« L’État systématise son mécénat ; en même temps, il engage une récupération méthodique du mouvement académique et limite le progrès des droits des auteurs. En d’autres termes, il défavorise ce qui pouvait donner à l’écrivain un statut conséquent (la propriété littéraire), détourne les activités spécifiques du monde des littérateurs à son profit (les académies) et impose une structure propre à rendre les auteurs dépendants de lui (le mécénat royal institué). L’absolutisme s’efforçait de faire de l’écrivain une des pièces de son appareil et en combattait l’autonomie29. »
23Cette volonté d’emprise ou de captation du prestige des lettres au profit du pouvoir monarchique initia, de façon paradoxale, un long processus d’autonomisation. C’est dans la dépendance et le renoncement à des formes anciennes d’autonomie que résident les germes de cette émancipation et de cette expansion du littéraire. Et les littérateurs tireront profit de cette situation :
« D’une absence utile de statut, ils en sont venus à toucher les dividendes d’un statut à forte valeur ajoutée. Tellement bien qu’au bout du chemin la littérature deviendra, comme on sait, ce refuge et ce tribunal moral, cet espace critique qui s’impose au XVIIIe siècle avec l’opinion publique. Le service loyal, et parfois le mime du pouvoir, a conduit à la floraison d’un contre-pouvoir30. »
24Parallèlement à cette instrumentalisation de la littérature et des arts, la société de Cour, avec la promotion de l’étiquette et l’art de la conversation, va jouer à son tour un rôle prépondérant dans la cristallisation politico-littéraire. À la suite de Norbert Elias, André Burguière insiste sur son influence dans la formation du « génie français », où le tour d’esprit abstrait se conjugue à la figure de l’homme de lettres31. La société de Cour et celle des salons32 ont favorisé l’éclosion de cet acteur hybride et la fiction d’une démocratie de l’esprit, l’essor d’une République des Lettres. En se diffusant, l’idéal de distinction intellectuelle pose non seulement les prémisses d’une intégration culturelle croissante des élites, assure la promotion d’une communauté de pensées et des valeurs partagées, mais plus encore, contribue à accroître la proximité entre hommes de lettres et hommes de pouvoir.
25En exacerbant le sentiment de convertibilité des ressources et des compétences, en contribuant à leur circulation, la distinction culturelle entraîne une confusion des rôles. Entre élite intellectuelle et élite politique s’établit alors « un lien de fascination réciproque » :
« En ne considérant que le surmoi politique présent, avec une étonnante continuité, dans la figure de l’intellectuel engagé, de Voltaire à Foucault, on oublie son complément : le surmoi littéraire de l’homme politique, soucieux plus que jamais, à l’heure où les enjeux présidentiels et l’investissement médiatique renforcent les effets d’image, de décliner ses titres de noblesse dans l’ordre de l’esprit et du goût33. »
26Mais au-delà de toute visée tactique ou stratégique, cette assomption de la littérature atteste la prégnance d’une culture et de valeurs lettrées désormais considérées comme constitutives de l’identité française : mystique de la création, héroïsme de l’esprit, culte désintéressé du savoir, des arts et des lettres, idéal de l’honnête homme dont Montaigne a été le théoricien et l’incarnation exemplaire34.
L’exaltation républicaine du « génie français »
27Les multiples tentations littéraires des hommes politiques doivent aussi être reliées à une topique : celle de la République des lettres qui associe une part de l’identité française à son génie littéraire. Le tropisme présidentiel pour la littérature ne saurait se concevoir sans le culte –républicain– des écrivains et la célébration de l’écriture. Ainsi s’est progressivement constitué un socle mythologique marqué par des figures tutélaires, des actes héroïques et des scènes fondatrices. Il produit un « grand récit » : celui d’une France, nation littéraire comme le titrait Priscilla Parkhurst Ferguson35.
28Déjà Alexis de Tocqueville pointait dans L’Ancien Régime et la Révolution ce phénomène, consacrant l’une de ses parties à étudier « comment, vers le milieu du XVIIIe siècle, les hommes de lettres devinrent les principaux hommes politiques du pays, et des effets qui en résultèrent36 ». Ce constat est patent pour la première moitié du XIXe siècle où, au cours de la période orléaniste, s’opère une forme de politisation de la vie intellectuelle ou une littérarisation de la vie politique comme en témoigne la floraison de politiciens littérateurs ou de littérateurs politiciens tels que Guizot, Michelet, Thiers, Villemain, Cousin, Jouffroy37. L’interpénétration des élites politiques et intellectuelles est encore renforcée par leur coprésence dans la capitale, favorisant l’essor d’une littérature nationale38.
29La mise en scène de l’addiction littéraire au sommet de l’État ne saurait donc être déconnectée des valeurs et des pratiques qui irriguent le champ politique. Il convient de ne pas oublier le magistère exercé par les clercs en France, par la centralité, au moins depuis l’affaire Dreyfus, de la figure de l’intellectuel classique, défenseur des valeurs de vérité et de justice conforme à l’ethos défini par Julien Benda dans La Trahison des clercs. La « scène primitive » dreyfusarde a assuré la visibilité de la tribune (le « J’accuse » de Zola) et initié l’essor des manifestes et des pétitions39. Loin de contribuer à la dilution de l’auteur ou du sujet, ces modalités d’intervention insistent au contraire sur le capital personnel objectivé dans le nom (et éventuellement dans les titres affichés). Elles visent à peser sur le « tribunal de l’opinion » par une logique de médiatisation et de spectacularisation. Il en va de même pour les essais et plus encore pour les pamphlets qui, s’ils s’inscrivent dans une autre temporalité, moins marquée par son immédiateté, n’en assurent pas moins la promotion de l’auteur. La topique pamphlétaire analysée par Marc Angenot condense bien les caractéristiques d’une parole solitaire et automandatée, caractérisée par un ethos fait d’héroïsme et d’indignation40.
30Leurs auteurs, à l’image de l’intellectuel prophétique sartrien, font désormais pleinement partie du jeu politique qu’ils façonnent à leur façon. Comme le souligne Murray Edelman,
« on peut penser que la prééminence, dans la vie intellectuelle française, de certaines figures littéraires et artistiques porteuses de messages politiques nettement circonscrits –Sartre, Camus, Simone de Beauvoir, Beckett, Céline, Picasso, etc.– a concouru à construire un type de spectacle dont le rôle a été beaucoup plus central qu’aux États-Unis. Ces personnages, à tout le moins, ont fourni d’autres motifs de fierté nationale aux citoyens français qui craignaient un déclin de la puissance militaire de leur pays ou la réduction de son influence par rapport aux siècles précédents41 ».
31La comparaison avec les États-Unis est à cet égard éloquente. Aux États-Unis sévit en effet une vieille tradition d’anti-intellectualisme. Celle-ci s’enracine dans la faiblesse de l’influence et du prestige social et politique des intellectuels, engendrant une longue habitude de dénonciation des intellectuels perçus comme « eggheads » selon l’expression de Louis Bromfield. Déclarations ironiques, comme celle du vice-président Spiro T. Agnew s’en prenant à la « veulerie des snobs intellectuels » et travaux explorant cette tradition à la suite de l’ouvrage de Richard Hofstader, Anti-intellectualisme in American Life publié en 1963, alimentent une forme de doxa dont on ne compte plus, comme le souligne David Schalk, les variations sur ce thème42. Les États-Unis constituent un terrain particulier qui, imprégné d’un individualisme ancestral, ont érigé l’efficacité en idéal. À la suite de Daniel J. Boorstin, Richard Hofstader a bien décrit ce climat, emprunt d’anti-utopisme et d’anti-intellectualisme, valorisant davantage le sens pratique que la spéculation théorique.
32La visibilité des intellectuels et le pouvoir d’influence dont on les crédite en France restent liés aux modes d’agrégation et de socialisation43. Exemplaires à cet égard le poids et le prestige d’une institution comme l’École normale supérieure dans la sélection des élites intellectuelle et politique. La rue d’Ulm restera un vivier politique majeur jusqu’à la création de l’École nationale d’administration aux lendemains de la seconde guerre mondiale44. Creuset de cette « noblesse d’État », l’ENS fournit son lot de ministres et de présidents du Conseil tout au long des IIIe et IVe Républiques et même, sous la Ve République, un président, Georges Pompidou et plusieurs premiers ministres comme Laurent Fabius ou Alain Juppé. À la différence de son prédécesseur, Georges Pompidou présente toutes les caractéristiques de la méritocratie tertio-républicaine, pur produit de la « République des professeurs » selon la célèbre expression d’Albert Thibaudet. Reçu au huitième rang en 1931 à l’École normale supérieure et premier à l’agrégation de lettres en 1934, il passera de l’enseignement à la politique dans une trajectoire quelque peu comparable à celle d’un Édouard Herriot trente neuf ans plus tôt45.
33Si les normaliens restent sous la IIIe République proportionnellement peu nombreux au sein du Palais Bourbon, ils investissent rapidement les sphères du pouvoir, notamment à l’époque du Cartel des gauches qui propulse un certain d’entre eux dans les ministères. Se trouve accréditée, notamment dans la presse de droite, l’idée d’une École normale supérieure métamorphosée en école des cadres des grands partis de gauche46. L’École normale supérieure constitue sans doute un vivier de l’élite politique, administrative, intellectuelle mais elle reste bien, à cette époque, en concurrence avec l’École libre de Science Politique et le barreau47.
34Quelles sont alors les raisons de cette valorisation, largement admise et entretenue, de l’univers littéraire ? Comment l’écrivain est-il devenu le médiateur privilégié des rapports entre la société et l’invisible ? Pour Éric Walter et Jean-Marie Goulemot, c’est du côté de l’alphabétisation généralisée, de l’école obligatoire, de ce travail sur les « textes français » qui, depuis la fin du XIXe siècle, mobilise la conscience nationale en même temps qu’elle légitime l’État-nation républicain qu’il faut regarder pour tenter de comprendre la complicité qui associe l’homme de plume et l’homme d’État48. Pour Antoine Compagnon, c’est la connexion entre le culte du grand écrivain et l’émergence d’une histoire littéraire sous l’égide de Lanson qui rend compte de cette religion littéraire au cœur du catéchisme républicain49. Michel Trebitsch insiste sur la part « fondamentale de la culture dans l’élaboration de l’idéal républicain50 ». Proposant une vision synthétique, Pascal Ory montre de quelle façon la politique culturelle en France est marquée par un long héritage et reste liée à une conception du pouvoir fortement centralisée et à la place de la « culture » dans l’affirmation d’un modèle national puis républicain. Elle doit alors être envisagée comme le point de confluence de trois modes d’action politique51 : une ligne monarchique d’abord, centralisatrice et parisienne, où s’affirme la continuité avec l’Ancien Régime à travers l’existence d’un État mécène qui valorise le rôle du prince ou des pouvoirs publics, entretient, protège ou pensionne les artistes ; une ligne libérale ensuite qui matérialise l’application aux politiques et institutions culturelles des principes de 1789, élaborée autour de la figure de l’artiste individuel, introduisant des postulats nouveaux tels que la noblesse de l’acte créateur ou la valorisation de la notion d’avant-garde ; une ligne démocratique enfin, héritière du projet civique des Lumières où la « démocratisation » de la culture, encouragée par le Front Populaire trouve dans le ministère Malraux une forme de consécration.
Le pouvoir, la plume et le sacré
35La présence de la symbolique lettrée renvoie donc à une tradition politique bien identifiée. Mais elle est une invitation à convoquer un autre horizon de recherche, celui que fixait dès 1924 Marc Bloch dans Les Rois Thaumaturges, partant à la recherche du « merveilleux monarchique » et invitant à « pénétrer les croyances et les fables qui fleurirent autour des maisons princières52 ». Explorer les fondements du pouvoir présidentiel et ses liens avec la littérature impose de questionner la dimension magique qui s’attache à la fonction et le substrat politico-religieux qui nimbe l’exercice du pouvoir d’État en France sous la Ve République. Comme l’écrivait d’ailleurs Jacques Julliard dans la « mort du roi » à propos de la disparition de François Mitterrand, « la notion de pouvoir pur constitue un tel scandale pour les esprits libres, et même plus largement pour l’esprit démocratique moderne, qu’il faut bien que s’y greffe une part de grâce surnaturelle, une espèce de mana qui rende acceptable à nos propres yeux la part de démission qu’elle implique53 ».
36Cette association du pouvoir et du sacré, prégnante sous l’Ancien Régime avec les pouvoirs thaumaturgiques du Roi, s’est évidemment estompée avec l’instauration de la République, la laïcisation de l’État et la sécularisation de la société française. Pourtant l’institution présidentielle, tant par les attentes qu’elle suscite, par la mémoire dont elle est porteuse et qu’elle ravive, que par les fonctions qu’elle assume, atteste bien cette part, sans doute évanescente ou résiduelle, mais incontestable de sacré.
37À la différence d’autres pays, tels les États-Unis où le religieux est omniprésent à travers l’existence d’une religion civile, le culte de la Constitution et des Pères fondateurs54, du Royaume Uni, où c’est la monarchie qui aimante cette religiosité diffuse, en France, c’est bien l’État et son premier titulaire qui se trouvent baignés par ce halo de sacralisation. À la façon d’un symptôme, celle-ci a ressurgi avec force au moment des funérailles de François Mitterrand, les commentateurs multipliant les variations sur ce thème : « Le président, la République et Dieu » titrait Émile Poulat dans Esprit au mois de mai 1996 tandis que Paul Yonnet rappelait le climat de dévotion qui s’établit au moment de la « mort et transfiguration » de l’ancien président55.
38La fonction présidentielle reste indissociable d’une forme d’attente messianique dans l’ensemble du corps social. Cette aspiration a d’ailleurs précédé la geste gaullienne comme le rappelle Francine Muel-Dreyfus. Une campagne en faveur d’un retour de Pétain au pouvoir avait été menée de tous les bords politiques dès les années trente. Convoquant la figure du Sauveur, Raoul Girardet rappelle l’importance des mythes d’héroïsation dans la société et leur activation pendant la campagne présidentielle56. La figure du chef de l’État n’est plus dissociable de ce système d’attentes qui la renvoie du côté du mystère et de l’extraordinaire : « Le prestige ne peut aller sans mystère, notait le général de Gaulle, car l’on révère peu ce que l’on connaît trop bien57. » Les espérances que suscite la figure élyséenne, en termes d’action, d’initiative, de rupture avec l’ordre social ordinaire, dessinent alors les travaux héroïques auxquels se trouve voué le futur président. Les réalisations grandioses et épiques, seules susceptibles d’être assumées et surmontées par une personnalité exceptionnelle, érigeraient le président en démiurge capable de transformer le monde. Cette dimension prométhéenne, désormais consubstantielle au rôle, est particulièrement mise en scène dans les mémoires des hommes politiques qui orchestrent avec force cette thématique, confortant l’idée d’une entrée en politique comme « entrée dans le sacré58 ».
39Surface de projections et « d’expectations » démesurées59, le chef de l’État, prisonnier d’un rôle envahissant, doit donc incarner une posture olympienne conforme à la fois aux exigences fantasmatiques de l’électorat mais aussi à la sacralité du rôle politique. Plus que tout autre protagoniste de la scène politique, il se trouve bien au contact d’un sacré qui, tel que l’appréhende Durkheim, se définit moins par ses contenus religieux que par la rupture radicale qui le sépare de l’expérience profane ordinaire. On ne peut à cet égard occulter l’existence, dans les sociétés modernes, techniciennes et rationnelles, de schémas langagiers et de postures magiques. Et plus qu’aucun autre, le président de la République se doit d’incarner cette double dimension politique et méta-politique.
40Visionnaire et voyant, depuis la geste rimbaldienne, l’écrivain se trouve doté d’une lucidité extrême, d’une forme de prescience, à l’interface du monde des hommes et du monde des dieux dont il livre ou dévoile les arcanes. Les travaux de Paul Bénichou ont bien mis en évidence la sacralisation de l’écrivain et le mouvement qui s’est opéré, faisant du philosophe puis du poète, les successeurs des théologiens60. Pour Roland Barthes, « l’écrivain participe du prêtre61 ». Ici la mystique de l’inspiration embraye avec la part secrète, mystérieuse du monde et investit le poète ou l’écrivain d’un savoir mais aussi d’un pouvoir sans pareil. Fort de son savoir, il fixe les directions à suivre, il enchante le monde. Plus que jamais, les privilèges magiques du voyant ne sont pas sans consonance avec ceux reconnus et attendus du président. Lui aussi a partie liée avec le secret (d’État), avec le mystère, avec la part d’ombre que recèle l’exercice du pouvoir. Par ailleurs, le président comme l’écrivain est un médiateur. Sa stature olympienne lui confère une place éminente qui l’investit en guide. Il incarne les idéaux de la société et de la République. Au-dessus des turbulences politiciennes, il rassure, exorcise les angoisses et les peurs, maîtrise et désamorce les conflits et les violences. Il donne à rêver en entretenant les croyances et les illusions indispensables au fonctionnement pacifique des sociétés. La symbolique littéraire fonctionne comme opérateur de sacralité et consacre le président en officiant, captant une légitimité suprapolitique.
Le rappel à l’ordre politique et culturel
41Candidat autoproclamé de la rupture, Nicolas Sarkozy, à peine élu, avait entrepris de briser les codes compassés de l’institution présidentielle. Tout dans sa mise en scène du pouvoir invitait à opérer un glissement de la « littérarisation » vers la « cinématographisation ». Et de traquer alors les symptômes de cette incarnation nouvelle qui culminait dans la figure prototypique de « l’hyperprésident62 » : la starisation du personnage jusqu’au diminutif, le registre de la vedettisation et la profusion des signes ostentatoires, le souci des apparences et l’importance de l’hexis corporelle, « jogging à la Marathon Man » et « gestuelle expressive façon Actors Studio63 ». Rien ne semble plus échapper à l’emprise de cette cinévision, à cette matrice hollywoodienne qui accouche des Olympiens chers à Edgar Morin. Aux images sépias du pouvoir, postures statiques pour « héros épiques », celles de De Gaulle ou de Mitterrand figés dans la gangue des mots et pétrifiés par l’histoire, a succédé le film de la post-modernité, celui de l’hyperprésidence sarkozyenne : mouvements syncopés, vitesse, mobilité, rapidité. Aux grands récits et aux affrontements idéologiques, la rhétorique compassionnelle, l’empathie et la surexposition de la vie privée. À la figure du Prince machiavélien, Mitterrand le « Florentin », la Star, « Sarko, l’Hollywoodien » : à rebours du processus de symbolisation littéraire…
42Oubliés les gages donnés à la littérature à travers la publication de livres : Georges Mandel, le moine de la Politique, Témoignage, Libre64. Mais s’agissait-il au fond, pour Nicolas Sarkozy, de rendre hommage au livre ou de se conformer aux règles de la communication politique invitant tout prétendant au pouvoir au « devoir de publier » ? N’y avait-il pas, dans cette stratégie politico-éditoriale une part d’usurpation que symbolise bien la publication par le ministre du budget de l’époque d’un livre sur Georges Mandel, figure montante de la IIIe République, résistant assassiné par la Milice en 1944 ?
43Si cette parution témoigne du cursus ascendant suivi par l’impétrant politique, elle marque, entre le biographe et son personnage, une commune volonté de captation du prestige lié à la littérature. En effet, comme le rappelle Jean-François Sirinelli, Georges Mandel n’hésita pas à usurper le titre de normalien, au cours de la session de printemps du Conseil général de la Gironde le 2 mai 1923, tant le rayonnement de l’École est grand à cette époque65. Quant au biographe, il pose en auteur même s’il lui arrive d’avouer le travail de scribe opéré par quelque plume de l’ombre. Paul-Marie Couteaux, qui fut le ghost writer de Jean-Pierre Chevènement de 1988 à 1991 puis de Philippe Seguin entre 1993 et 1996, relate une anecdote à propos de Nicolas Sarkozy croisé dans le bureau de Roger Karoutchi à l’hôtel de Lassay :
« Je n’avais pas lu son livre mais je n’ai pas pu m’empêcher de lui faire des compliments bêtes de courtisan en le félicitant pour ce qu’il avait écrit. Etonné, il m’interroge : “Ah ? Vous l’avez lu ? Vous l’avez-lu ?” J’étais piégé, obligé de feindre. Il insiste : “Jusqu’au bout ?” Un peu embêté, je lui rétorque que oui. Il me regarde, surpris, et me dit d’un ton admiratif : “Ah, quel courage vous avez… moi je n’y suis pas arrivé66 !” »
44Tout incite à penser le rapport de Nicolas Sarkozy à la symbolique lettrée sous l’angle stratégique et utilitariste. Si le candidat ne répugnait pas à poser en auteur, le président n’hésite pas, comme ses prédécesseurs à poser sur fond de bibliothèque et de rayonnage pour sa photographie officielle.
45Certes, la plupart des commentaires se sont intéressés aux conditions de production du portrait. Signé par Philippe Warrin, photographe des « people », celui-ci fut interprété comme un élément signifiant du glissement vers la vedettisation ou la « peopolisation » de la vie politique67. La séance de pose présidentielle, qui aurait été réglée en quelques minutes, a été présentée comme un « épisode délibérément marginal68 » bien qu’incontournable dans l’album médiatique, déjà bien fourni, du locataire de l’Élysée. La mise en scène du corps officiel sarkozyen, immobilisé le temps d’une obturation, tranche évidemment avec les représentations habituelles d’un corps mobile, actif, courant et soufflant, bondissant vers le perron de l’Élysée au retour d’un jogging aux premiers temps de son quinquennat, entre « culte de la performance69 » et fantasme d’ubiquité. Le corps du président témoigne de cette « immense opération de désymbolisation » : « Aucun piédestal : je suis comme vous, je ressens les mêmes affects, éprouve les mêmes goûts, poursuis les mêmes plaisirs70. »
46Si la photographie officielle ne fut qu’une parenthèse dans la course présidentielle de Nicolas Sarkozy, elle vaut néanmoins comme rappel de l’institution. Une exigence normative à laquelle le nouveau président ne pouvait (ne souhaitait ?) totalement se soustraire. S’il est difficile d’évaluer la sincérité de cet hommage indiciel au livre, on ne peut néanmoins que constater l’injonction qui pèse sur le titulaire de la fonction et les profits par lui pressentis à annexer la littérature dans son opération de reconquête politique en endossant des habits neufs sur fond de « révolution culturelle ». Plus que jamais, le rappel à l’ordre de l’institution s’est révélé redoutable pour celui qui voulait la violenter.
47En effet, après l’affaire suscitée par ses déclarations sur La Princesses de Clèves, le président semble avoir entrepris de se convertir, sous l’aiguillon de son épouse, à la culture. Face à la défiance engendrée par le style « sarkozyen », il revient à une conception plus traditionnelle de l’exercice en renouant avec une certaine solennité consubstantielle à la monarchie républicaine. Cet ajustement stratégique, dit de « représidentialisation », vise à gommer l’ostentation des premiers pas, les signes extérieurs de la jouissance du nouveau souverain au profit d’un sérieux ajusté à la pratique de ses prédécesseurs. À l’hyper-président, omniprésent et hyperactif, a succédé un chef d’État en retrait : Elision –relative– de la vie privée, parole publique parcimonieuse, économie présentielle et discursive qui amène le président à gommer de son discours les expressions triviales au profit de l’imparfait du subjonctif.
48Ce respect soudain pour les règles –de la grammaire et de la syntaxe comme de la civilité– s’accompagne d’un exhibitionnisme lettré. Au point de susciter l’admiration de Frantz-Olivier Giesbert, homme de livres, essayiste et romancier, dans son texte pourtant corrosif sur M. le Président. Dans le chapitre final, le directeur du Point relate une rencontre avec le Président le 14 février 2011. L’essentiel de la conversation semble porter sur la littérature et tourne au name dropping : Hans Magnus Enzensbergger, Laurent Binet pour les contemporains mais aussi tous les classiques Corneille, Racine, Hugo, Dumas, Stendhal, Maupassant ou encore Steinbeck, Camus, Proust, Borges, Sartre, Céline… Eclectisme qui finit par épater son biographe : « Ce n’est pas l’homme que je croyais connaître. Celui qui a tenu des propos détestables sur La Princesse de Clèves71. » Évoquant in fine un « numéro de haute voltige littéraire », Giesberg termine pourtant son opus sur un mea culpa :
« Depuis un quart de siècle que je le fréquente, Nicolas Sarkozy ne m’a jamais laissé entrevoir cet aspect-là de son univers personnel. S’il avait juste potassé quelques fiches dans les jours qui précèdent, je l’aurais démasqué. Si sa science est récente, ce que je subodore, il a déjà beaucoup lu. Mais bon, contrairement à la légende que j’ai contribué à entretenir, il est tout sauf inculte : quitte à passer définitivement pour un gogo ou un couillon, je dois à la vérité de le reconnaître72. »
49Par la magie d’un grand oral de français, voilà le Président, aux yeux de son biographe, –partiellement– réhabilité.
50Dans l’étude des représentations politiques l’important n’est donc pas tant de savoir si François Mitterrand est un écrivain ou Nicolas Sarkozy un grand lecteur de Céline mais de constater l’existence de cette posture lettrée comme constante de position, d’en mesurer l’économie et l’efficacité politique, de la même façon que « si personne n’a jamais su si le roi de France guérissait les écrouelles […] il a été essentiel, pendant des siècles, qu’on le crût73 ».
51La passion affectée par les présidents sous la Ve République pour la littérature n’exclut ni la sincérité ni le goût d’une mise en scène à des fins de communication. Elle n’élude pas non plus la quête de dividendes symboliques susceptibles d’être recueillies tant elle reste, comme l’analyse Pierre Bourdieu dans La Distinction, la forme par excellence de la « culture désintéressée » et, par là-même, la plus légitime « des marques de distinction » par rapport aux autres classes74. Si on ne peut exclure ni la « bonne volonté culturelle » ni l’intentionnalité cynique dans cette convocation des Lettres, on ne peut négliger totalement le poids des pratiques sédimentées et des représentations mentales que les symboliques modernes révèlent et actualisent. Elles définissent la « surcharge du rôle » qui caractérise l’institution présidentielle en France75 et façonnent la « façade littéraire » du pouvoir, obligeant son premier titulaire à payer un tribut à la littérarité.
Notes de bas de page
1 Musso P., Sarkoberlusconisme, la crise finale ?, La Tour d’Aigues, Éditions de l’Aube, 2011.
2 Legendre P., Dominium Mundi. L’Empire du management, Paris, Mille et une nuits, 2007.
3 « Le 28 janvier, Nicolas Sarkozy aura 54 ans, et il souffre d’une maladie, l’allergie à la littérature. C’est pourquoi nous lançons une grande opération thérapeutique : redonner le gout de la lecture à l’ennemi personnel de Mme de La Fayette. » Le nouvelobs. com, 21 janvier 2009.
4 Pensons aux déclarations d’Éric Raoult voulant contraindre le Prix Goncourt à un « devoir de réserve » après les propos de la lauréate Marie N’Diaye contre Nicolas Sarkozy en 2009.
5 Revel J.-F., Le Style du général, Bruxelles, Éditions Complexe, 1988 (1re édition 1959), p. 22-23.
6 Bazin J. F. et Mace-Scarron J., Les Politocrates. Vie, mœurs et coutumes de la classe politique, Paris, Le Seuil, 1993, p. 155.
7 Le Bart C., « L’écriture comme modalité d’exercice du métier politique », Revue française de science politique, vol. 48, février 1998.
8 Braud Ph., L’émotion en politique, Paris, Presses de Sciences Po, 1996.
9 Braud Ph., Le Suffrage universel contre la démocratie, Paris PUF, 1980 et Le Jardin des délices démocratiques, Paris, Presses de la Fondation nationale de Science politique, 1991 ; Petit traité des émotions, sentiments et passions politiques, Paris, A. Colin, 2007.
10 Donegani J. M. et Sadoun M., La Ve République, naissance et mort, Paris, Gallimard, coll. « Foliohistoire », 1998, p. 80.
11 Nora P., « Les mémoires d’État. De Commynes à de Gaulle », Nora P. (dir.), Les Lieux de Mémoire, Paris, Gallimard, coll. « Quarto », tome 1, 1997, p. 1383-1427.
12 Cité par Roussel E., « Le fonctionnaire et le banquier. Les paradoxes de Georges Pompidou », in Culture et action chez Georges Pompidou, Groshens J. C. et Sirinelli J.-F. (dir.)., Paris, PUF, 2000, p. 55.
13 Ibid., p. 55.
14 Confession rapportée par L’Année politique, 1974, p. 33. Voir aussi Kechichian P., « M. Giscard d’Estaing candidat à l’immortalité littéraire », Le Monde, 11 novembre 2003.
15 Maurice Druon, gaulliste historique et secrétaire perpétuel honoraire de l’Académie française dénoncera le jeudi 13 novembre 2003 dans les colonnes du Figaro littéraire « Une étrange candidature », assurément à ses yeux plus politique que littéraire.
16 Giscard d’Estaing V., Le Pouvoir et la vie, tome 1 La Rencontre (1988), tome 2 L’Affrontement (1991), tome 3 Choisir (2006) Paris, Cie 12, Le passage, Paris, Robert Laffont, 1994 ; La Princesse et le Président, Paris, Éd. de Fallois, 2009, La Victoire de la Grande armée, Paris, 2010,
17 « La France socialiste », Paris Match, 3 juillet 1981.
18 Daniel J., « Pourquoi pas Lamartine ? », Lettre no 14 de l’Institut François Mitterrand, 18 janvier 2006.
19 Pivot B., « Silence absolu sur le plateau », Lettre no 14 de l’institut François Mitterrand, 19 janvier 2006.
20 Neveu E., « Le sceptre, le masque et la plume », Mots/Les langages du politique, no 32, septembre 1992, p. 9.
21 Barthes R., « De Gaulle, les Français et la littérature », Œuvres complètes, t. I, 1945-1965, Paris, Le Seuil, 1993, p. 830.
22 Ibid, p. 830.
23 Yonnet P., « “Je ne vous quitterai pas.” Mort et transfiguration d’un Président », Le Débat, septembre-octobre 1996, p. 42.
24 Braud Ph., « La réactivation du mythe présidentiel. Effets de langage et manipulations symboliques », in Le Président de la République. Usages et genèses d’une institution, Lacroix B. et Lagroye J. (dir.), Paris, Presses de la Fondation Nationale des Sciences Politiques, 1992, p. 377.
25 Jouhaud C., Les pouvoirs de la littérature : Histoire d’un paradoxe, Paris, Gallimard, 2000, p. 368.
26 Jouhaud C., Mazarinades, la fronde des mots, Paris, Aubier, 1985.
27 Darnton R., Le Diable dans un bénitier. L’art de la calomnie en France, 1650-1800, Paris, Gallimard, 2010.
28 Burke P., Louis XIV. La fabrication de la gloire, Paris, Le Seuil, 1995.
29 Viala A., Naissance de l’écrivain, Sociologie de la littérature classique, Paris, Éditions de Minuit, 1985, p. 103.
30 Jouhaud C., Les pouvoirs de la littérature, op. cit., p. 367.
31 Burguière A., « Processus de civilisation et processus national chez Norbert Elias », Garrigou A. et Lacroix B. (dir.), Norbert Elias, la politique et l’histoire, Paris, La Découverte, 1997, p. 145-165.
32 Lilti A., Le monde des salons. Sociabilité et mondanité à Paris au XVIIIe siècle, Paris, Fayard, 2005.
33 Burguière A., « Processus de civilisation et processus national chez Norbert Elias », article cité, p. 154.
34 Burguière A., Histoire de la France. Les formes de la Culture, Burguière A. et Revel J. (dir.), Paris, Le Seuil, 1993, p. 109.
35 Parkhurst Ferguson P., La France, nation littéraire, Bruxelles, Labor, 1991.
36 Tocqueville A. de, L’Ancien régime et la Révolution, Paris, Gallimard, 1967, Livre III, chapitre I.
37 Bourdieu P., Les règles de l’art. Genèse et structure du champ littéraire, Paris, Le Seuil, 1992, p. 187-188.
38 Thiesse A.-M., La création des identités nationales. Europe XVIIIe-XXe siècle, Paris, Le Seuil, 1999.
39 Sirinelli J.-F., Intellectuels et passions françaises. Manifestes et pétitions au XXe siècle, Paris, Gallimard, 1996.
40 Angenot M., La parole pamphlétaire. Contribution à la typologie des discours modernes, Paris, Payot, 1982. Voir aussi M. Hastings, J. Rennes et C. Passard (dir.), « Que devient le pamphlet ? », Mots/Les langages du politique, no 91, novembre 2009. Pour ces derniers par exemple, le pamphlétaire constitue « en quelque sorte une variation de la figure traditionnelle de l’intellectuel prophétique, que sa posture critique engageait à titre personnel sur des causes particulières au nom de valeurs universelles », « Les mutations du pamphlet dans la France contemporaine », article cité, p. 11.
41 Edelman M., Pièces et règles du jeu politique, Paris, Le Seuil, 1991, p. 16-17.
42 Schalk D., « Intellectual, intellectuel ? Le cas américain », Leymarie M. et Sirinelli J.-F., L’Histoire des intellectuels aujourd’hui, Paris, Puf, 2003, p. 473-487.
43 Rieffel R., La Tribu des clercs. Les intellectuels sous la Ve République. 1958-1990, Paris, Calmann-Lévy, 1994.
44 Sirinelli J.-F., Génération intellectuelle. Khâgneux et normaliens dans l’entre-deux guerres, Paris, Fayard, 1988.
45 Sirinelli J.-F., « Un boursier conquérant », Groshens J.-C. et Sirinelli J.-F. (dir.), Culture et action chez Georges Pompidou, Paris, Puf, 2000, p. 20.
46 Ibid., p. 133. La présence des normaliens dans les gouvernements de la IIIe République restera relativement stable. En 1932, le cabinet Herriot compte quatre normaliens – Herriot, Painlevé, Berthod, Mistler – et comme d’ailleurs le premier gouvernement Blum en 1936 – Blum, Delbos, Bastid et Perrin.
47 Dogan M., « Les filières et la carrière politique en France », Revue française de sociologie, VIII, 1967, p. 468-492.
48 Goulemot J.-M. et Walter E., « Les centenaires de Voltaire et Rousseau. Les deux champions des Lumières », Nora P. (dir.), Les Lieux de Mémoire, Tome 1, La République, Paris, Gallimard, coll. « Quarto », 1997, p. 379.
49 Compagnon A., La Troisième République des Lettres, Paris, Le Seuil, 1983.
50 Trebitsch M., « Les intellectuels », Duclert V. et Prochasson C. (dir.), Dictionnaire critique de la République, Paris, Flammarion, 2007, p. 737.
51 Ory P., « Politiques culturelles avant la lettre : trois lignes françaises de la Révolution au Front populaire », Moulin R., (dir.), Sociologie de l’Art, Paris, La Documentation française, 1986, p. 23-30.
52 Bloch M., Les Rois thaumaturges. Études sur le caractère surnaturel attribué à la puissance royale, particulièrement en France et en Angleterre, Paris, Gallimard, 1983, p. 19, (1re édition, Strasbourg, 1924.)
53 Julliard J., « La mort du roi. De de Gaulle à Mitterrand », Julliard J. (dir.), La mort du roi. Essai d’ethnographie politique comparée, Paris, Gallimard, 1999, p. 35.
54 Mcnaught M. B., La religion civile américaine. De Reagan à Obama, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2009.
55 Yonnet P., « » Je ne vous quitterai pas ». Mort et transfiguration d’un Président », Le Débat, septembre-octobre 1996, p. 31-48.
56 Girardet R., Mythes et mythologies politiques, Paris, Le Seuil, 1986.
57 De Gaulle C., Le fil de l’épée, Paris, Plon, 1983, p. 78.
58 Neveu É., « Le sceptre, les masques et la plume », op. cit., p. 12.
59 Braud Ph., « La réactivation du mythe présidentiel. Effets de langage et manipulations symboliques », in Le président de la République, Usages et genèses d’une institution, op. cit., p. 378.
60 Bénichou P., Le Sacre de l’écrivain, 1750-1830, Paris, Corti, 1996, p. 275-276.
61 Barthes R., « Écrivains et écrivants », op. cit., p. 1281.
62 Maigret E., L’Hyperprésident, Paris, Armand Colin, 2008.
63 Lipovetsky G. et Serroy J., « Sarko, l’Hollywoodien », Le Monde, 11 décembre 2007.
64 Voir notamment, Sarkozy N., Georges Mandel, le moine de la politique, Paris, Grasset, 1994 ; Libre, Paris, XO, 2001 ; Témoignage, Paris, XO, 2006 ; Ensemble, Paris, XO, 2007.
65 Sirinelli J.-F., Khâgneux et normaliens, op. cit., p. 128-129.
66 « Plume politique, un métier à l’ombre du pouvoir », [http:/investigation.blog.lemonde.fr/2009/04/03/bruno-fay-2/].
67 Dakhlia J., Politique people, Paris, Bréal, 2008.
68 Mongin O. et Vigarello G., Sarkozy, corps et âme d’un président, Paris, Perrin, 2008, p. 30.
69 Ehrenberg A., Le culte de la performance, Paris, Hachette Littératures, 1991.
70 Mongin O. et Vigarello G., Sarkozy, corps et âme d’un président, op. cit., p. 18.
71 Giesbert F.-O., M. Le président. Scènes de la vie politique, 2005-2011, Paris, Flammarion, 2011, p. 279
72 Ibid, p. 281
73 Revel J., « La Cour », Nora P., Les Lieux de mémoire, op. cit., p. 3145.
74 Bourdieu P., La Distinction, critique sociale du jugement, Paris, Éditions de Minuit, 1979.
75 La « surcharge du rôle » implique « une étroite codification du langage et des comportements qui ne pèse pas seulement sur le titulaire de la charge, mais également, en raison d’un effet d’anticipation, sur les candidats qui abordent avec la meilleure crédibilité la compétition en vue de l’élection présidentielle. » Braud Ph., « La réactivation du mythe présidentiel. Effets de langage et manipulations symboliques », article cité, p. 378.
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