1 Corcuff P. et Sanier M., « Politique publique et action stratégique en contexte de décentralisation. Aperçus d’un processus décisionnel après la bataille », Annales. Histoire, sciences sociales, vol. 55, no 4, 2000, p. 845-869.
2 Thévenot L., art. cité, 2015.
3 Nous avions observé ce colloque dans le cadre d’un travail étudiant qui a précédé la réalisation de la thèse dont cet ouvrage est issu. Nous le présentons ici dans la mesure où il regroupe les principaux protagonistes que nous retrouverons tout au long de ce chapitre dans une configuration proche de la définition sociologique d’une arène publique.
4 Voir Michel H., op. cit., 2006.
5 Fédération nationale des centres Protection amélioration conservation transformation de l’habitat – Associations de restauration immobilière.
6 Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale.
7 Fédération des associations pour l’insertion par le logement.
8 Union nationale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux.
9 Soulignons encore que ce colloque se tenait en 2001. Le représentant de la FAPIL s’exprimant ainsi est celui qui, trois ans plus tard, place cette question de l’instrumentalisation des associations comme un risque majeur (voir chapitre précédent).
10 Selon un motif critique bien analysé par Ian Hacking (Hacking I., The Social Constructions of What?, Cambridge, Harvard University Press, 1999).
11 Le Conseil national de l’habitat est une instance consultative auprès du ministre ayant en charge les questions d’habitat et de logement. Créée en 1983, il comprend différents « collèges » (représentants de l’administration ; représentants des élus et des collectivités locales ; représentants des organismes professionnels [constructeurs, maîtres d’œuvre, gestionnaires de logements, établissements financiers, organismes d’allocations familiales et notariat] ; représentants des associations d’usagers ; représentants des associations d’insertion et de défense des personnes en situation d’exclusion par le logement ; « personnalités qualifiées »).
12 Dewey J., Le public et ses problèmes, Œuvres philosophiques, II, Pau/Paris, Publications de l’université de Pau/Farrago/Éditions Léo Scheer, 2003 [1927].
13 La référence étant initialement mobilisée pour argumenter sur une obligation de moyens : de la même manière que l’accès à l’éducation suppose que l’État se dote des équipements nécessaires à la réalisation de ce droit, la reconnaissance du droit au logement suppose que l’État garantisse l’existence de logements accessibles et en nombre suffisant.
14 Hilgartner S. et Bosk C. L., « The Rise and Fall of Social Problems: A Public Arenas Model », American Journal of Sociology, vol. 94, no 1, 1988, p. 53-78; Cefaï D., art. cité, 1996.
15 Programme des 1res Assises nationales du logement, ministère de l’Emploi, du Travail et de la Cohésion sociale, juin 2004.
16 Le « plan Borloo » est le nom donné au projet présenté par Jean-Louis Borloo au gouvernement français le 30 juin 2004, aboutissant ensuite à la promulgation, le 18 juillet 2005, de la loi de programmation pour la cohésion sociale, versant législatif du plan de cohésion sociale.
17 L’« acte II de la décentralisation », porté par le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, s’est achevé avec le vote de la loi organique du 29 juillet 2004 relative à l’autonomie financière des collectivités territoriales et celui de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.
18 La loi « habitat pour tous » devait viser l’accession à la propriété (vente des logements locatifs sociaux à leurs locataires accession progressive via l’achat de parts de SCI de capitalisation), l’urbanisme et le foncier (mobilisation du foncier pour le logement social), le droit au logement (rôle accru de la commission de médiation), la modernisation du statut des organismes HLM (statut unifié des offices publics et des OPAC). Ce projet a abouti à la loi portant Engagement national sur le logement du 13 juillet 2006.
19 Thévenot L., art. cité, 2015.
20 Selon la notion développée par Charles Tilly, et reprise dans de nombreux travaux de sciences politiques, pour analyser les formes d’action collective (Tilly C., « Les origines du répertoire de l’action collective contemporaine en France et en Grande-Bretagne », Vingtième Siècle, no 4, 1984, p. 89-108).
21 En ce sens, ils rejoignent la notion de group style développée par Paul Lichterman et Nina Eliasoph. Contre la conception de représentations collectives guidant les conduites ou d’un choix de moyens pour faire porter une action collective, ils montrent comment les activités ordinaires au sein d’un collectif sont structurées par un certain « style », ordonnant des manières de penser et d’agir (voir Eliasoph N. et Lichterman P., « Culture in Interaction », American Journal of Sociology, no 108, 2003, p. 735-794 et Eliasoph N., L’évitement du politique. Comment les Américains produisent l’apathie dans la vie quotidienne, Paris, Economica, 2010).
22 Celles du Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées, mais aussi un avis de 2003 du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (CNLE), les avis de 2003 et 2004 du Conseil économique et social.
23 Le texte indique ainsi qu’« en vue des échéances électorales des régionales de 2004, les principaux responsables politiques ont été consultés. MM. Hollande et Raffarin se sont prononcés en faveur d’un droit au logement opposable et effectif ».
24 Là encore, en nous abstenant d’attribuer l’initiative de ce groupe de travail à un groupe plutôt qu’un autre, nous puissions indiquer que la proposition en faveur de l’opposabilité juridique du droit au logement, qui a trouvé une traduction avec la loi dite DALO en 2007, a été particulièrement portée, au sein du Haut comité pour le logement des personnes défavorisées, par Paul Bouchet, ancien avocat et membre du Conseil d’État, qui était alors président d’ATD Quart Monde et membre du Haut comité pour le logement des personnes défavorisées.
25 La première supposant de disposer d’une convention d’équivalence fondant les évaluations de ce qui est juste et ce qui ne l’est pas, la seconde faisant l’économie de cette question pour en appeler à faire cesser un état de souffrance pour lequel la question de la justice ne se pose même pas. Voir Boltanski L., La souffrance à distance. Morale humanitaire, médias et politique, Paris, Métailié, 1993.
26 Sur ce point, on peut renvoyer à l’analyse de Vincent Descombes sur la « querelle des droits subjectifs », et sur l’importance de distinguer une version libérale du sujet en tant que sujet de droit – un sujet qui doit être libre de manifester sa volonté –, et le sujet juridique en tant qu’attributaire de droits « qui ne sont en rien subjectifs, puisqu’ils ne manifestent pas l’indépendance de l’individu à l’égard de la puissance étatique dont il attend divers bienfaits justement qualifiés de “providentiels” » (Descombes V., Le complément de sujet. Enquête sur le fait d’agir de soi-même, Paris, Gallimard, 2004, p. 430). Parmi les argumentaires mobilisés dans les réunions que nous avons observées, certains prennent appui sur la délimitation d’un individu libéral, valorisant l’exercice de la volonté d’individus, tandis que d’autres relèvent davantage de la revendication de l’égal accès de tous à des biens qui doivent être garantis par des institutions. Le fait de poser le logement comme un élément fondamental pour l’exercice d’autres droits fondamentaux, constitutifs d’un état de dignité, relève clairement d’une grammaire libérale, tout comme le mécanisme essentiel de l’opposabilité juridique, qui suppose l’instauration de voies de recours, par lesquelles un individu doit faire valoir le droit qui ne lui a pas été reconnu.
27 Argumentaire pour la plateforme « Pour un droit au logement opposable », 19/05/2004.
28 Blondiaux L., « Démocratie locale et participation citoyenne : la promesse et le piège », Mouvements, vol. 5, no 18, 2001, p. 44-51 ; Blondiaux L., « La démocratie participative, sous conditions et malgré tout. Un plaidoyer paradoxal en faveur de l’innovation démocratique », Mouvements, no 50, 2007, p. 118-129 ; Bacqué M.-H., Rey H. et Sintomer Y., op. cit., 2005.
29 Dans son éthique de la discussion, Habermas confère à la procédure de l’argumentation la place d’un impératif catégorique : elle définit les conditions d’une discussion ouverte et argumentée, assurant « la recherche coopérative de la vérité dans laquelle seule peut valoir la force sans contrainte du meilleur argument » (Habermas J., De l’éthique de la discussion, Paris, Éditions du Cerf, 1992, p. 18).
30 Cette propension de responsables administratifs à constituer les représentants comme des êtres qui se disputent les uns et les autres, et à se grandir en retour dans leur capacité à se situer au-dessus de leurs différends, peut être rapprochée des remarques, recueillies par Julien Damon, faites par des responsables administratifs des Affaires sociales, pour tourner en dérision le « concours du plus pauvre » auquel se livrent les associations qui se sont imposées, au cours des années 1990, comme les propriétaires du problème public constitué autour de la « question sdf » (Damon J., La question SDF, Paris, PUF, 2002).
31 Fung A. et Wright E. O., « Le contre-pouvoir dans la démocratie participative et délibérative », inBacqué M.-H., Rey H. et Sintomer Y. (dir.), Gestion de proximité et démocratie participative. Une perspective comparative, Paris, La Découverte, 2005, p. 49-80.
32 Lascoumes P., « Des acteurs aux prises avec le “Grenelle Environnement”. Ni innovation politique, ni simulation démocratique, une approche pragmatique des travaux du Groupe V », Participations, vol. 1, no 1, 2011, p. 277-310.
33 Par opposition aux attentes qui pèsent au sein de dispositifs valorisant la formation d’un consensus au sein de groupes d’intérêts : voir Cheyns E., « Multi-stakeholders for sustainable agriculture : The limits of the “inclusiveness” paradigm », inPonte S., Verstergaard J. et Gibbon P. (dir.), Governing through standards : Origins, drivers and limits, Londres, Palgrave, 2011.
34 Les travaux qui, dans un dialogue critique avec les approches délibératives, entendent faire valoir le caractère inévitablement agonistique des échanges démocratiques, nous semblent intéressants dans la mesure où ils pointent l’existence, et plus encore sans doute, la valeur à accorder à l’expression de différends irréductibles, en laissant toutefois ouverte la question des modalités de leur mise en commun (Mouffe C., « Deliberative Democracy or Agonistic Pluralism ? », Social Research, vol. 66, no 3, 1999, p. 745-758).
35 Pour une synthèse de travaux sur le renouvellement des formes du militantisme, questionnant des oppositions trop marquées entre nouvelles formes d’organisations plus « horizontales » par rapport à de plus traditionnelles, « verticales », voir notamment : Barbot J., Doidy E., Renou G., Siméant J. et Stavo-Debauge J., « Y a-t-il de nouveaux mouvements militants ? », Mouvements, no 3, 1999, p. 32-45 ; Collovald A., « Transformation du militantisme ou transformation dans le militantisme ? », inCollovald A. (dir.), L’humanitaire ou le management des dévouements, Rennes, PUR, 2002, p. 9-13.
36 Jeannine Barbot a analysé l’émergence d’un « front commun » associatif sur les questions du sida. Elle analyse la structuration des « formes d’engagement » des différents collectifs impliqués dans ce front commun, constituées de manière relationnelle, et reposant sur une certaine manière d’articuler des modes d’action privilégiés, des enjeux et des choix d’identification publiques, pour envisager ensuite les dynamiques qui président à leur regroupement, selon des configurations variables en fonction notamment de la nature des objets engagés dans ces regroupements (Barbot J., Les malades en mouvements. La médecine et la science à l’épreuve du sida, Paris, Éditions Balland, 2002).
37 Julien Charles a ainsi analysé, dans une maison médicale créée au sein d’un quartier défavorisé et portant l’ambition d’une transformation des pratiques médicales et d’autogestion, la charge que représente, notamment pour de nouveaux salariés, cette visée d’une participation forte, soutenue par des biens militants (Charles J., Une participation éprouvante. Enquêtes sur l’autogestion, le management participatif, la participation citoyenne et l’empowerment, thèse de doctorat de sociologie, Paris/Louvain-La-Neuve, EHESS/UCL, 2012).
38 Alice Mazeaud a analysé les effets de la mise en place d’un dispositif participatif sur des formes de cogestion ou de « corporatisme à la française », associant par des relations anciennes et solides des représentants du ministère de l’Éducation et certains syndicats enseignants. Elle décrit comment s’est opérée, à l’issue d’un grand débat organisé sur l’école, la reprise du jeu routinier, associant des partenaires traditionnels des processus de décision (Mazeaud A., « “Le débat national sur l’avenir de l’École” ou des partenaires sociaux à l’épreuve de la démocratie participative », Politix, vol. 3, no 75, 2006, p. 143-162).