Prologue. Armée et milices à la veille de l’Indépendance
p. 29-40
Texte intégral
1Tracer l’histoire des armées de l’Indépendance demande une mise au point sur ce qui fut le réservoir de ses recrutements et la première forme de son organisation. Les cohortes républicaines n’apparaissent pas, en effet, ex nihilo, mais restent profondément tributaires des traditions militaires de l’Ancien Régime. Car le premier vivier des soldats de la république créole, tant au Venezuela qu’en Nouvelle-Grenade, fut la milice que les principaux Pueblos devaient mettre sur pied ; le moule de l’organisation militaire fut constitué par les régiments vétérans qui parsemaient le territoire de la capitainerie générale et de la vice-royauté. Dans cette perspective, il est essentiel de comprendre comment étaient mises sur pied les forces miliciennes des villages et des cités, leur mode de recrutement, leur organisation. Non moins importante est l’esquisse des profondes évolutions que connaît la fin du xviiie siècle pour saisir le passage de l’armée coloniale à la première armée nouvelle – qui fut, au vrai, l’histoire d’un échec.
2De la fin des années 1950 au début des années 1980, de nombreux travaux ont éclairé ces matières d’un jour nouveau pour toute l’aire hispanoaméricaine. L’étude de l’armée et des milices avait commencé brillamment avec les travaux de Lyle N. McAlister sur le fuero militar en Nouvelle Espagne1.
3Leon G. Campbell, pour le Pérou, Roberto Oñat et Carlos Roa pour le Chili, Gary Miller et Santiago-Gerardo Suárez, pour le Venezuela, Allan J. Kuethe et Juan Marchena Fernández pour la Nouvelle-Grenade ont permis de connaître la structure et les évolutions de l’outil militaire dans les pays qu’allait bouleverser la révolution bolivarienne. La plupart de ces travaux se fondent sur une abondante documentation de première main, disponible tant aux Archives des Indes de Séville ou aux Archives de Simancas que dans les archives nationales espagnoles ou hispano-américaines. Les sources utilisées – états de service, revues, état des forces, rôles d’engagement, recensements – éclairent les mutations sociales qui parcourent les corps locaux des milices.
4Mais il s’agit tout autant d’histoire politique, lorsque Allan J. Kuethe analyse les changements consécutifs à la révolte des Comuneros ; culturelle, lorsque Gary Miller décortique le sens de la loyauté chez les officiers de l’armée vénézuélienne ; ou économique, dès lors que Juan Marchena Fernández évalue la part financière des milices dans le budget des capitaineries. Les travaux ont, à vrai dire, porté surtout sur l’armée régulière, sans doute à cause de l’étonnante abondance des sources de première main. La milice, en revanche, a moins attiré l’attention alors qu’elle est l’organisation où se nouent d’essentielles stratégies de pouvoir, non seulement au sein des élites locales mais encore entre celles-ci et la Couronne d’une part et les différents groupes de couleur, d’autre part2.
Milices et réformes bourbonniennes
5Les milices sont des corps territoriaux de défense non professionnels chargés de lutter contre les agressions extérieures. Ces organisations relativement lâches sont structurées autour de deux sources de recrutement bien différenciées. Les élites locales, tout d’abord, constituent le vivier naturel de ses officiers, attirés par les privilèges et exemptions du fuero militar. Elles y patrimonialisent l’institution, y consolident, s’il y a lieu, leur statut patricien en le faisant reconnaître dans les filiations, les états de service, relations de mérites ou de pureté de sang. La participation à la milice atteste la qualité des vecinos, les personnes de bien ayant une résidence fixe et une activité reconnue dans la cité. Les hommes du rang sont pour la plupart des laboureurs libres (labradores) ou des péons des grands propriétaires terriens : dans ce dernier cas, les rapports de domination dans le cadre milicien redoublent le principe d’autorité social du grand hacendado sur ses péons. Les esclaves sont exclus de ces corps.
6La milice joue un rôle de contrôle politique pour l’institution impériale. Par son biais, la Couronne manifeste son pouvoir de lier les membres distingués des communautés d’habitants, les vecinos des Pueblos, à une obligation qu’elle impose. Si elle est, de manière quelque peu idéale, une représentation de la république locale, la milice y est aussi utilisée comme une soupape de sécurité pour la société. Y aboutissent, selon la formule consacrée, les gens sans aveux – vagos et malentretenidos – âgés de 15 à 45 ans. Les capitanes a guerra tiennent à jour, dans chaque district, des rôles de recensement des personnes appelées à se constituer en corps armés à la demande du monarque (llamamiento real). À cet effet, ils gardent des armes dans un magasin. Les milices urbaines forment des corps virtuels, qui n’ont, en règle commune, d’autre existence que scripturaire, sauf en cas d’attaque extérieure. Dans les campagnes, les capitaines-hacendados commandent leurs miliciens-péons, les encomenderos dirigent leurs Indiens, « les petits propriétaires, leurs fils et des habitants des villages3 ». Le goût des élites locales pour ces charges d’officier de milice s’explique aisément : elles signent sans conteste possible le prestige de leurs titulaires. Parmi la troupe, le sentiment est tout autre : la désaffection des laboureurs et des habitants de peu est proverbiale. L’obligation d’entraînement dominical après la messe, comme simples soldats, n’enthousiasme personne.
7À partir de la seconde moitié du xviiie siècle, la milice jouit d’une considération neuve qui s’explique par la création bourbonienne de « milices disciplinées ». À la suite des déconvenues de la guerre de Sept Ans, la Couronne a décidé de créer des corps auxiliaires visant à appuyer les troupes régulières lors des attaques étrangères (et plus précisément anglaises). Le comte de Ricla, envoyé à La Havane, forge le modèle de ces milicias disciplinadas dont le Reglamento para las Milicias de Infantería y Caballería de la isla de Cuba (1769) est le bréviaire. Sa philosophie, résumée par Allan J. Kuethe, consiste à « développer, par une combinaison de leadership effectif, d’entraînement régulier et d’orgueil corporatiste, un corps de citoyens capables, en temps de crise, d’aider à la défense militaire. » 4Après de bons débuts, la tentative fut un relatif échec. Néanmoins, la consultation des états de service des miliciens vénézuéliens ayant eu un destin manifeste pendant la révolution révèle que nombre d’entre eux prêtèrent le service actif contre les Anglais, notamment dans l’île de Trinidad, ou contre l’expédition de Francisco de Miranda en 18065. Ces milices disciplinées restaient cantonnées à un rôle d’appui des troupes professionnelles ; elles ne jouèrent jamais le rôle décisif des unités portègnes lors des attaque anglaises contre Buenos Aires en 1806 et 1807.
8Si les milicias disciplinadas furent d’une efficacité limitée, elles connurent un grand succès parmi les sociétés locales. L’afflux d’argent destiné à leur mise du pied irrigua les économies. Des titres et des distinctions étaient attachés à leur commandement6. Certains privilèges codifiés sous Charles III furent en outre étendus par les règlements cubains à tous les soldats. Parmi les avantages du fuero militar particulier à ces unités, on compte l’exemption des peines infamantes (vergüenza pública) ou du châtiment par le fouet ; le droit de porter des armes défensives et certaines offensives ; la dispense de l’exercice de charges publiques7, etc.
9Les corps de milices, « urbains » ou « disciplinés », constituaient des groupes médiateurs entre la Couronne et les Pueblos qui financaient, armaient et habillaient leurs représentations armées. L’évergétisme se donnait libre cours pour équiper les compagnies. Ces pratiques plaçaient de fait les unités au service des citoyens principaux. Santiago Mariño, futur caudillo « populaire » de l’Indépendance, proposa ainsi de payer les uniformes des soldats de sa compagnie 8 à Margarita pour une somme – rondelette – de 200 pesos9. Ces stratégies amusèrent Humboldt :
« On s’étonne de voir, jusque dans les petites cités de province, tous les négociants transformés en colonels, en capitaines et en sergents-majors. Comme le grade de colonel donne le droit au traitement et au titre de seigneurie, que les gens répètent sans cesse dans les conversations privées, on conçoit que ce soit ce qui contribue le plus au bonheur de la vie domestique, et pour cela, les Créoles consentent les sacrifices les plus extraordinaires10. »
10Les milices ne se contentent pas de ratifier l’ordre social, elles retrouvent naturellement la structure corporatiste et « raciale » de la société : milices fondées sur une communauté de métier, milices à cheval pour le patriciat, mais aussi milices de Blancs, de morenos, pardos, au Venezuela, les mêmes associées aux unités de « toutes les couleurs » dans le nuevo Reino caraïbe en raison d’un métissage généralisé qui ne permettait plus de segmenter par castas de manière satisfaisante11.
11À ce titre, et parce que le fuero pardo égalait celui réservé aux Blancs, elles furent des institutions fondamentales pour les métis de sang africain dans leurs stratégies d’accès à la république des Espagnols12.
12Une ambiguïté traverse ces corps, qui en explique les mutations et les évolutions à la fin du xviiie siècle et au début du xixe siècle. Malgré l’identité d’intérêt entre la Couronne et les élites locales, ces unités aux mains des patriciens menacent potentiellement les faibles institutions monarchiques. Par ricochet, l’entraînement et le savoir dispensés le dimanche aux groupes subalternes, Noirs, mulâtres et pardos, donne la capacité aux castas de se retourner contre les Blancs13. La Couronne se trouve ainsi prise dans une contradiction insoluble : à vouloir assurer à moindre coût la défense des Indes, elle accorde des prérogatives exceptionnelles à un ensemble de grandes familles créoles dont elle ne peut se passer pour le contrôle territorial. Afin de limiter les risques d’autonomisation, un certain nombre de soldats vétérans puisés dans les cadres inférieurs de l’armée régulière, secondent – ou surveillent – les officiers et de sous-officiers de milice. Si le colonel est un volontaire, son sergent-major et son adjudant sont des vétérans. Les passerelles entre les troupes réglées et les milices existent donc : elles autorisent une surveillance externe de la part de l’armée régulière, tout en instruisant efficacement la troupe. Quant à l’antagonisme entre les élites locales et les gens de couleur, attesté à Caracas par exemple14, il ne présente guère de danger immédiat dans la mesure où les charges d’officiers supérieurs et subalternes ne pouvaient être assumées ni par des Noirs, ni par des pardos.
13Les considérations stratégiques et l’histoire des soulèvements créoles commandent le nombre et la répartition des miliciens sur le territoire de la vice-royauté de Nouvelle-Grenade. Alors que les côtes caraïbes, dont l’intérêt procède de la continuelle menace des puissances européennes, de la piraterie et du commerce illicite15, sont largement dotées de milices disciplinées, l’intérieur des terres se trouve presque déserté par ces forces. En conséquence, les régions de l’interface océanique et les espaces de frontière possèdent une solide culture militaire. Les soldats y sont bien acceptés et insérés dans la cité par le biais privilégié des mariages. Ils participent à la vie sociale patricienne, au sein des tertulias, des bals, des réceptions. De ce point de vue, le contraste entre la capitainerie générale de Caracas et l’intérieur néo-grenadin de la vice-royauté est notable. En 1804, au Venezuela, les milices américaines comptent 10 885 hommes selon le voyageur français Depons, concentrés surtout dans les ports (Puerto Cabello, La Guaira, Cumaná, Barcelona, Maracaibo, Margarita ou encore le port fluvial d’Angostura). Par opposition, des provinces entières sont à peu près dépourvues de présence armée, comme les Llanos ou les Andes colombiennes.
14Au total, le poids relatif des dix mille miliciens sur une population de 850 000 Vénézuéliens est d’une faiblesse insigne, comparé à la présence militaire dans les pays européens ou même dans les Antilles non espagnoles. Evidemment, il faut nuancer ces affirmations selon les régions. Les corps très nombreux organisés à Cumaná veillent sur une région au contact presque immédiat avec la piraterie et le commerce illicite alimentés par les Anglais de Trinidad. Dans ces régions, où la présence des troupes régulières et des milices est ancienne, de vieilles familles, à la fidélité de fer, peuplent les compagnies de milices de père en fils. Cette tradition « républicaine » du service militaire renforce la loyauté des milices vénézuéliennes lors des crises et des révoltes qui ont secoué la Capitainerie : secousses de la révolte des Comuneros, qui touchent les provinces « frontalières » avec l’Audience de Bogota ; révoltes serviles de 1795, à Coro, etc. Comme le note Santiago-Gerardo Suárez, aucune suspicion impériale ne vint y troubler l’activité des milices comme ce fut le cas en Nouvelle-Grenade16. L’alliance de la Couronne avec les élites locales s’est forgée dans les épreuves guerrières, qui rendent prestigieux le service armé, à l’inverse du cas néo-grenadin. Les documents conservés aux Archives de Simancas illustrent le caractère patrimonial de la gestion des situations. Les institutions impériales favorisent, en pratique, la transmition héréditaire des charges. À chaque vacance de poste, une liste de trois noms – la terna – est proposée à la capitainerie générale. À Margarita, par exemple, la quatrième compagnie des milices de Margarita est aux mains de la famille Arismendi17. Cette dernière y côtoie les autres grandes lignées de l’île, les Marcano, Silva, Guevara. À Cumaná, les Sucre occupent les places dominantes18.
15En revanche, le manque de confiance dans les troupes de milices créoles du Reino explique l’évolution des effectifs et leur répartition sur le territoire de la Nouvelle-Grenade pendant la réforme militaire bourbonienne. D’après Allan J. Kuethe19, un tournant dans la répartition des forces armées fut pris après la révolte des Comuneros du Socorro en 178120. Les milices disciplinées furent utilisées à la réduction de la rébellion ; par la suite elles servirent de façon récurrente à des tâches de maintien de l’ordre intérieur. Ces missions ingrates auraient rompu le prestige attaché au service milicien, si l’on en juge dans les archives par la qualité « médiocre » de ceux qui en avaient le commandement. Par réaction, le vice-roi réformateur Caballero y Góngora décida de confier le soin de la défense intérieure à des unités régulières – dont le Batallón auxiliar de Bogota créé à cette fin – pour faire pression sur les milices locales. Cette situation propre au Socorro bloqua la création des corps disciplinés là où ils manquaient, en Antioquia, à Pamplona, à Tunja et à Mariquita21. Le vice-roi Gil y Lemos put dissoudre sans problème la plupart des milices de l’intérieur du pays en 1789, puisque l’ordre semblait régner. Tant et si bien que le nombre total de miliciens en Nouvelle-Grenade atteignait péniblement 7 740 hommes pour une population sensiblement supérieure à celle de la capitainerie générale du Venezuela.
16Cette politique explique sans doute le dédain de la majeure partie des élites créoles du Reino pour les choses militaires. Il faut bien sûr nuancer cette affirmation par région ; les côtes stratégiques des Caraïbes, comme au Venezuela et pour les mêmes raisons, bénéficient de nombreuses unités. En 1804, la vice-royauté 22 possède des milices disciplinées à Riohacha, Santa Marta, Valledupar, Carthagène des Indes, Tolú, Panamá, Natá, Portobelo, Chagres, Jaén, Loja et Barbacoas. L’énumération est éclairante : l’Audience de Santafé ne comporte aucun corps éloigné des franges côtières.
Heurs et malheurs de l’Ejército de Dotación
17La relative tranquillité dont ont joui les Indes Occidentales pendant les trois siècles de domination espagnole explique la faiblesse de la présence militaire sur son sol. L’armée d’Amérique – el Ejército de América – est subdivisée en deux parties. D’une part, l’armée de dotation – el Ejército de Dotación – est constituée par les régiments casernés aux points stratégiques du continent ; elle est essentiellement défensive et s’émousse dans une vie de garnison dont la routine est proverbiale. D’autre part, une armée de renfort – Ejército de Refuerzo – permet de soutenir les troupes résidentes en cas d’agression extérieure. L’unité tactique des armées est le régiment, composé de deux bataillons de neuf à douze compagnies d’une centaine d’hommes chacune, suivant les lieux et les époques. Dans le ressort de l’Audience de Santafé, les effectifs varient assez peu, de 4 284 hommes en 1772 à 3 573 en 1804. Au Venezuela, le capitaine général commande entre 2 000 et 2 500 hommes, suivant les périodes23. Au total, stationnent en permanence entre 5 500 et 7 000 soldats professionnels dans la vice-royauté. Ces effectifs sont modestes, surtout si on les compare aux 12 000 soldats britanniques destinés à la défense des modestes West Indies. La stabilité de l’Amérique espagnole reposait moins sur des forces de coercition impressionnantes que sur des équilibres politiques.
18Cette armée est financée en partie par le trésor royal local (Real Hacienda) et en partie par les situados 24 lorsque les institutions locales ne peuvent faire face aux dépenses. L’arrivée chaotique des subsides contribue au mécontentement latent de troupes qui ne sont souvent payées que tous les quatre mois, et parfois une fois par an.
19La répartition des forces obéit, comme pour les milices disciplinées, à une logique de défense stratégique25. La plupart des troupes sont stationnées dans les grands ports de la façade caraïbe (Panamá, Carthagène, La Guaira), le long des grands axes fluviaux (Guayana), ou dans les capitales (Caracas, Bogota). En réalité, l’armée d’Amérique, qui avait touché le fond au début du xviiiesiècle26, trouve une forme de résurrection dans les réformes bourboniennes. L’un des plus imposants corps américains, le Régiment de Carthagène, appelé communément Fijo, est formé en 1736 à partir des compagnies présentes27, tandis que le Batallón Auxiliar de Santafé de Bogota est créé en 1783 28 pour renforcer le corps d’une trentaine de hallebardiers qui défendaient la capitale. Le rétablissement d’une compagnie d’infanterie à Popayán en 1792, à la suite du soulèvement de Barbacoas, confirme le choix des institutions vice-royales en faveur des troupes régulières29. La relative hostilité des élites locales vis-à-vis de ces dernières est bien compréhensible : non seulement dévoreuses de budget, les troupes de ligne sont aussi destinées à faire contrepoids aux milices contrôlées par les patriciens.
20Il faut toutefois se garder de conclusions trop générales. Si les tensions sont nettes entre l’armée et le corps de ville à Popayán voire à Santafé de Bogota, l’harmonie règne à Carthagène ou au Venezuela. Un mouvement continental justifie cette entente dans les ports : le nombre d’officiers créoles dépasse, dès avant 1800, celui des Péninsulaires. Il est vrai que les officiers supérieurs, au Venezuela par exemple, sont à 80 % espagnols, mais leur assise économique est si menacée, leur statut finalement si peu assuré, qu’ils déploient des stratégies d’alliance avec les principales familles des lieux où ils se trouvent cantonnés. Les Créoles composent en revanche la majorité des cadres moyens après 1800 (56,5 %) tandis que certains sous-officiers et les soldats sont plutôt des péninsulaires d’humble extraction voire des criminels comme les engagés des campañías presidiales. La plupart se sont unis à des Vénézuéliennes d’origine modeste. Gary Miller nous livre une image sans relief de la vie des officiers péninsulaires. Ces derniers ne sont ni riches, ni pauvres, et jouent un rôle politique négligeable30. Ils côtoient des cadets et des sous-officiers miliciens créoles qui sont leur antithèse, viennent des plus grandes familles et par conséquent brillent par un decorum et un faste qui ne peut que les humilier.
21Les officiers créoles n’appartiennent pas tous au patriciat. Nombreux sont ceux dont la qualité est qualifiée de conocida. C’est dire qu’ils ne font partie ni de l’élite ni du petit peuple blanc connu au Venezuela sous le nom de blancos de orilla. L’avancement des officiers péninsulaires, souvent issus du rang, est plus rapide que celui des Créoles, qui n’atteignent jamais les plus hauts grades. D’ailleurs, les oligarchies néo-grenadines ont moins investi l’armée régulière que leurs analogues vénézuéliennes. La limitation des possibilités de promotion dans l’échelle des grades réguliers n’est sans doute pas étrangère au manque d’attrait de la profession. Les fils du colonel des milices de Cumaná, Antonio de Sucre devinrent l’un lieutenant, l’autre capitaine de l’armée régulière, grades point médiocres, mais fort décevants pour la première famille du lieu31. Leur ascension dans les armées patriotes fut autrement fulgurante.
L’enrôlement des soldats
22L’obligation du service militaire existait en Castille et León depuis le moyen âge, comme en témoignent les lois de Partidas qui en fixent les limites et les obligations32. Il s’agissait d’une exigence impérative en cas d’attaque extérieure, comme le précisaient des cédules royales applicables à la cité de México en 1535. La prescription du service militaire fut incluse dans la Recopilación de Leyes de Indias en 1680. Les soldats étaient requis selon trois systèmes : la quinta, la leva et le sorteo33, à quoi s’ajoutait, bien entendu, le volontariat. En vertu de la quinta, chaque pueblo devait envoyer chaque année un certain nombre de jeunes gens au service de l’armée. En appoint à la quinta, la leva apportait du sang neuf aux bataillons34. Il s’agissait, en s’autorisant des Lois des Indes, de rafler les vagabonds des rues, ou ceux qui en avaient les signes extérieurs patents, pour les engager de force. Cette pratique affaiblissait l’armée : son efficacité et son prestige étaient minés par les enrôlés de force. Le tirage au sort ou sorteo, moment dramatique où on laissait au hasard le soin de désigner les futurs conscrits devant le peuple assemblé sur la grand-place (Plaza Mayor ou Plaza de Armas), était utilisé comme appoint de la quinta pour choisir parmi les quintos ceux qui partiraient pour de bon. En règle générale, le sorteo restait une mesure d’exception prise en cas de danger grave. Beaucoup de soldats des régiments « professionnels », pour utiliser un terme de plus en plus pertinent avec l’application des réformes bourboniennes, venaient d’Espagne et des Canaries, où l’on avait procédé à des recrutements spéciaux pour la capitainerie générale du Venezuela au tournant du siècle.
23Une revue de 1787, conservée aux Archives générales de Simancas, documente le cas précis du régiment auxiliaire de Santafé de Bogota. Les 725 hommes du corps, nous dit l’inspecteur des troupes, « […] sont en partie des quintos, et les autres, des recrues volontaires, ou des repris de justice : presque tous [sont] Européens, et très peu [viennent] de la Province de Carthagène ; [ils ont] de bonnes dispositions pour le maniement des armes, […] se trouvant tous bien assistés et disciplinés35 ». L’activité faible des garnisons explique la sagesse voire l’apathie de ces hommes. Leur mauvaise réputation en est le corollaire : l’ennui et la paresse sont les mots qui décrivent le plus souvent cette vie lente36. Celle des officiers n’est guère plus exaltante, comme le pointe un pamphlet de León de Arroyal, qui raille :
« Le corps des officiers généraux [est] assez nombreux pour commander toutes les armées au monde et maints régiments, bien que manquant d’hommes, sont entraînés aux fatigues militaires du bouclage de cheveux, au blanchissage de l’uniforme, […] et à l’oppression de leurs concitoyens37. »
24En cet âge soucieux d’utilité, la médiocrité des mœurs militaires est un cliché récurrent. Pourtant, l’officier jouit à la fin du xviiie siècle d’un prestige renouvelé, tandis qu’aux échelons les plus bas, les soldats ont perdu la réputation de soudards.
25Quant à l’origine géographique des hommes, un mouvement de fond, sensible dans toute l’Amérique, oriente l’évolution du recrutement : celui de l’américanisation progressive de l’armée. Le nombre des Créoles dépasse celui des Péninsulaires en 1780 pour compter en 1800 36,4 % de Péninsulaires, 60 % de Créoles et 3,5 % d’étrangers38. Dans le cas vénézuélien, tandis que les garnisons de Maracaibo sont majoritairement américaines, celles de Puerto Cabello, Caracas et La Guaira sont plutôt européennes.
26Concernant les relations entre pouvoirs civils et militaires, l’armée avait coutume de suivre sans broncher un pouvoir « civil » qui ne l’était pas, car le vice-roi était souvent un soldat qui avait le titre de capitaine général, alors même que le gouverneur militaire détenait la charge de président de l’Audience, cour de justice aux amples responsabilités administratives. En un sens, faire l’histoire de l’armée comme institution autonome est impossible, car le clivage entre pouvoirs civil et militaire n’existait pas sous l’Ancien Régime.
27Avec les ordonnances militaires de 176839, le rôle de l’armée de ligne s’affirme. Des unités contiennent les Indiens de la Guajira40. D’autres sont envoyées contrôler des frontières qui jusqu’alors étaient restées vierges de toute présence militaire. Le territoire chimila de la Sierra Nevada de Santa Marta demeurait hostile à la Couronne, jusqu’à ce que les Espagnols y mènent campagne dans les années 176041. Si les fronts de colonisation demeurent à peu près dépourvus de toute unité régulière, un effort, sans doute plus symbolique que réel, est fait pour manifester la présence du bras armé de la justice du roi dans les Llanos. À Barinas, par exemple, où une compagnie d’infanterie est implantée à partir de 1801. Des détachements cantonnés dans les casernes situées dans les villes (ciudades ou villas) parcourent les espaces immenses des plaines de l’arrière-pays caraïbe ou guyanais.
28Parmi les régiments casernés dans les grandes cités, la discipline et l’ordre paraissent de mieux en mieux respectés. On instruit les soldats désormais capables d’évolutions compliquées, tandis que les officiers tentent de mettre à jour leurs connaissances de l’art militaire. Les limites d’un tel apprentissage se font sentir à l’heure des premiers combats de l’Indépendance. Les évolutions complexes de l’ordre oblique cher à Frédéric II de Prusse y sont enseignés comme l’horizon indépassable de la science militaire. La Táctica 42 espagnole s’en fait l’écho fidèle : elle va rester longtemps le bréviaire des officiers de métier, y compris parmi les révolutionnaires les plus endurcis. Frédéric est encore un dieu ; le bruit des campagnes de Napoléon n’arrive qu’assourdi en Amérique au début du xixe siècle. La bibliothèque de Pascual Enrile, officier de marine né à Cuba, est à cet égard éclairante. Des traités techniques de fortifications y côtoient des Elementos de guerra, tandis que, signe de modernité, un Proiecto de Tactica (sic) en français, pourrait être l’Essai général de tactique de Guibert43. Mais la littérature courante du xviiie siècle domine. Les savants mouvements requis par la stratégie frédéricienne demandent des entraînements répétés, notamment les changements de formation. Ces derniers doivent être exécutés rapidement et sans heurts afin de faire du soldat une machine, qui lors de la bataille, puisse obéir aux ordres par réflexe, sans risque d’être submergé par la panique. À cet égard, le régiment auxiliaire de Santafé de Bogota fonctionne à merveille :
« [Le sergent-major] commanda l’exercice du feu avec quatre cents hommes qui étaient présents, hormis les nouvelles recrues, récemment arrivées au corps ; cet exercice fut commandé par Don Juan Josef Cavallero […] Les officiers comme la troupe montrèrent une bonne instruction. […] Le sergent-major […] brille dans l’accomplissement de ses devoirs, il est droit, travailleur et très appliqué ; les autres officiers remplissent sans faille leurs obligations respectives44. »
29La vocation défensive des régiments professionnels oriente ce jugement optimiste. L’activité guerrière étant faible, les soldats vivent au rythme d’exercices dont ils ne perçoivent plus l’utilité. D’ailleurs, plus que les soulèvements ou les tumultes, on craint la dissolution des corps par la maladie, l’ennui, l’alcoolisme et le jeu – vision sans doute convenue et stigmatisante – surtout dans les garnisons éloignées de Panamá.
30Au total, si des tensions sont perceptibles au sein du corps militaire, on doit reconnaître la portée et l’étendue des réformes bourboniennes dans le sens d’une professionnalisation et d’une spécialisation accrues. Les corps réguliers y gagnent en prestige, même si le bilan des effectifs et de la répartition des forces est décourageant. Du point de vue personnel, le métier offre peu de perspectives de promotion. En tant que corps, les forces armées ont une influence limitée sur les décisions des institutions monarchiques et a fortiori des cabildos. La présence numérique des soldats réguliers est trop faible, leur répartition sporadique et leurs tâches de défense trop intermittentes, pour en faire un ensemble qui pèse sur la vie coloniale, mis à part, sans doute, son impact fiscal. Restrepo a raison de souligner : « Les forces que le vice-roi de Santafé avait à ses ordres pour la défense de la vice-royauté étaient tout à fait insignifiantes45. » Sept mille hommes pour défendre un territoire cinq fois grand comme la France : autant dire bien peu de chose.
Notes de bas de page
1 L. N. McAlister, The « Fuero Militar » in New Spain, 1764-1800, Gainesville, University of Florida Press, 1957. Il faut ajouter ses articles « The Reorganization of the Army of New Spain, 1763-1766 », Hispanic American Historical Review, n° 33-1, 1953, p. 1-32 et « Social Structure and Social Change in New Spain », Hispanic American Historical Review, n° 43-3, 1963, p. 349-370. À propos de l’historiographie de ces travaux, on peut consulter l’introduction que fait A. J. Kuethe à son livre Reforma Militar y Sociedad en la Nueva Granada 1773-1808, Bogota, Banco de la República, 1993, p. 31 ss. L’article de synthèse de J. Marchena Fernández, « Armée et changement social en Amérique à la fin du xviiie siècle », L’Amérique Espagnole à l’époque des Lumières, Bordeaux, Presses du CNRS, 1987, p. 49-77 est précieux pour avoir une vue d’ensemble sur la situation de l’armée dans toute l’Amérique hispanique à la fin de la période coloniale, ainsi que Id., Oficiales y soldados en el Ejército de América, Séville, Escuela de Estudios Hispanoamericanos, 1983 ; Id., Ejército y milicias en el mundo colonial americano, Madrid, Mapfre, 1992 ; Id. et M. del C. Gómez Pérez, La Vida de Guarnición en las Ciudades Americanas de la Ilustración, Madrid, Ministerio de Defensa, 1992. Pour le Venezuela : S.-G. Suárez, Las Instituciones Militares Venezolanas del Período Hispánico en los Archivos, Caracas, Biblioteca de la Academia Nacional de la Historia, 1969 ; Id., Las Fuerzas armadas venezolanas en la Colonia, Caracas, 1979 ; Id., Las milicias : instituciones militares hispanoamericanas, Caracas, 1984 ; G. Miller, « Status and Loyalty of Regular Army Officers in Late Colonial Venezuela », Hispanic American Historical Review, n° 66-4, 1986, p. 667-696. Pour la Nouvelle-Grenade, outre les travaux d’Allan J. Kuethe, déjà cités, J. Marchena Fernández, La institución militar en Cartagena de Indias, 1700-1810, Séville, Escuela de Estudios Hispano americanos, 1982 ; Id., « The Social World of the Military in Peru and New Granada : The Colonial Oligarchies in Conflict, 1750-1810 », in John R. Fisher, Allan J. Kuethe, Anthony McFarlane (éd.), Reform and Insurrection in Bourbon New Granada and Peru, Baton Rouge, Louisiana State University Press, 1990, p. 54-95.
2 J. Marchena Fernández, « Armée et changement social en Amérique à la fin du xviiie siècle », op. cit., p. 55. Dans un autre cadre géographique, P. M. Voelz a analysé les rapports entre l’armée et les gens de couleur (et plus précisément les esclaves) Slave and Soldier. The Military impact of blacks in the Colonial Americas, New York, Londres, Garland Publishing, 1993. Les travaux sur ce thème sont nombreux en ce qui concerne l’espace hispano-américain, à partir de l’étude d’A. J. Kuethe, « The Status of the Free Pardo in the Disciplined Militia of New Granada », The Journal of Negro History, n° 56-2, 1971, p. 105-117 ; C. I. Archer, « Pardos, Indians, and the Army of New Spain : Inter-relationships and Conflicts, 1780-1810 », Journal of Latin American Studies, n° 6-2, 1974, p. 231-255 ; B. vinson III, « Race and Badge : Free-Colored Soldiers in the Colonial Mexican Militia », The Americas, n° 56-4, 2000, p. 471-496.
3 J. Marchena Fernández, Ejército y milicias…, op. cit., p. 105.
4 A. J. Kuethe, Reforma Militar…, op. cit., p. 92. Voir surtout, du même, Cuba, 1753-1815, Crown, Military and Society, Knoxville, The University of Tennessee Press, 1986, p. 25-49.
5 Base de données prosopographique de 91 miliciens constituée d’après l’ouvrage de V. Dávila, Hojas militares, Caracas, 1930, 2 v. qui publie les hojas de servicio des miliciens du Venezuela conservées à l’Archivo General de la Nación de Caracas. Sur les 91 miliciens, choisis par nous en raison de leur rôle dans les armées patriotes, dix, soit 11 % ont participé à l’écrasement du débarquement de Miranda, trois se trouvaient là lors de la prise de Trinidad par les Anglais (des gens de Cumaná). En tout, 44 ont servi dans ce que le document nomme des « actions de guerre », soit un peu plus de 48 %. Nous pensons que ces chiffres, peu significatifs en eux-mêmes, indiquent tout de même une certaine activité des milices dans la défense des territoires de la Couronne.
6 Les officiers avaient le droit de porter les mêmes insignes que ceux de l’armée régulière.
7 Voir le règlement des milices de Cuba de 1769, cité dans S.-G. Suárez, El ordenamiento militar de Indias, Caracas, Academia Nacional de Historia, 1971, p. 66-67.
8 Les milices urbaines de Margarita dont il devient capitaine en 1798, un an après l’éviction des Espagnols de Trinidad où il servait auparavant. AGS, Secretaria de guerra, v. 7194, dossier 57, bloc 1, fol. 2. 9.
9 Ibid.
10 Cité dans J. Marchena Fernández, « The Social World of the Military in Peru and New Granada : The Colonial Oligarchies in Conflict, 1750-1810 », op. cit., p. 62.
11 A. Múnera, El fracaso de la nación, op. cit., p. 76-110 ; J. Conde CaLderón, Espacio, sociedad y conflictos en la provincia de Cartagena, 1740-1815, Barranquilla, Universidad del Atlántico, 1999, p. 56-85 ; M. Herrera, Ordenar para controlar. Ordenamiento espacial y control político en las Llanuras del Caribe y en los Andes Centrales. Siglo xviii, Bogota, Instituto Colombiano de Antropología e Historia, 2002, chap. v-vi. Par ailleurs, nous savons que les races n’existent pas. Le terme est ici utilisé pour désigner une catégorie que manient les acteurs, afin d’éviter l’anachronisme que supposerait l’usage de la notion d’ethnie. Ce qui joue dans les interactions entre acteurs n’est pas tant l’identité culturelle que la valeur sociale et la classification juridique associées à certains traits de l’apparence physique (couleur, forme du visage, cheveux, etc.). Dans le monde hispanique, le terme de race est moins péjoratif que dans le contexte français, même si, dans son sens classique, il « est pris habituellement en mauvaise part », ou, comme le définit encore le Diccionario de la lengua castellana por la Real Academia Española (Madrid, 1817), il peut être synonyme de « genus, stirps, etiam generis macula vel ignominia. » Pour une brillante mise au point : E. Cunin, Identidades a flor de piel. Lo « negro » entre apariencias y pertenencias : categorías raciales y mestizaje en Cartagena, Bogota, ICANH, Universidad de los Andes, IFEA, Observatorio del Caribe Colombiano, 2003, p. 21 ss.
12 Les cédules royales de « gracias al sacar » permettaient depuis 1795 aux métis d’être tenus pour Blancs.
13 Le Real Consulado de Caracas attire l’attention des autorités espagnoles sur ce point en 1796 : « […] [N]o es de nuestro instituto y tendremos muy bien cuidado en abstenernos de entrar a discutir si las Milicias sean provechosas o inútiles ; pero si lo fuese, diríamos que las de Pardos y gente de color son a nuestro parecer muy perjudiciales al Estado en las circunstancias actuales, por las fatales consecuencias que pronostican con su instrucción en las armas […] », cité par J. Albi, La defensa de las Indias (1764-1799), Madrid, Cultura Hispánica, 1987, p. 118.
14 S.-G. Suárez, Las milicias…, op. cit., p. 212.
15 Ibid
16 S.-G. Suárez, Las milicias…, op. cit., p. 236..
17 AGS, Secretaria de guerra, v. 7194, dossier 57, fol. 107, document daté de 1798.
18 AGS, Secretaria de Guerra, v. 7295, dossier 7, document daté de 1800.
19 A. J. Kuethe, Reforma militar…, op. cit., p. 199-234.
20 Il s’agit du plateau de la cordillère centrale, qui porte les régions actuelles du Cundinamarca et du Boyacá.
21 A. J. Kuethe, Reforma militar…, op. cit., p. 225.
22 Sans le Venezuela, bien entendu.
23 À la veille de l’Indépendance, J. M. resTrepo donne le chiffre de 2 150 hommes. Historia de la Revolución de la República de Colombia, Medellín, Bedout, 1969, t. i, p. 28.
24 Un situado est un transfert financier d’une province américaine à une autre afin d’équilibrer les comptes des régions les plus pauvres par l’afflux d’argent et d’or des régions minières. Ils viennent, dans ce cas, de l’île de Cuba. Les situations particulières sont d’une terrible complexité. Voir G. Morazzini Pérez-Enciso (éd.), Real Cedula de Intendencia de Ejército y Real Hacienda 8 de Diciembre 1776, Caracas, Presidencia de la República, 1976, p. 37.
25 Pour les données en Nouvelle-Grenade, cf. C. Riaño, Historia extensa de Colombia, t. xviii. Historia militar, t. i : 1810-1815, Bogota, Ediciones Lerner, 1971, p. 21. Pour le Venezuela, on a utilisé S.-G. Suárez, Las Instituciones Militares Venezolanas del Período Hispánico en los Archivos, Caracas, Academia Nacional de la Historia, 1969, p. 78 ss. ; F. Depons, Voyage à la partie orientale de la Terre-Ferme dans l’Amérique méridionale…, op. cit., t. ii, p. 89-91 et J. Marchena Fernández, Ejército y milicias en el mundo colonial americano, op. cit., p. 113 ss.
26 Voir à ce sujet l’introduction suggestive de J. Semprún et A. Bullón de Mendoza, el ejército realista en la independencia de América, Madrid, Mapfre, 1992.
27 J. Albi, la defensa de las Indias (1764-1799), Madrid, Cultura Hispánica, 1987, p. 82.
28 A. J. Kuethe, Refoma militar…, op. cit., p. 223.
29 J.-P. Minaudier, « Une région minière de la colonie à l’Indépendance : Barbacoas 1750-1830 (économie, société, vie politique locale) », Bulletin de l’Institut Français d’Etudes Andines, n° 17-2, 1988, p. 81-104, ici p. 98-102 et R. Earle, « Indian Rebellion and Bourbon Reform in New Granada : Riots in Pasto, 1780-1800 », Hispanic American Historical Review, n° 73-1, 1993, p. 99-124.
30 G. Miller, « Status and Loyalty… », op. cit.
31 Selon G. Miller, cet exemple illustre les difficultés des Créoles pour atteindre des postes élevés dans l’armée de garnison. Vicente de Sucre est le père de Antonio José de Sucre, grand maréchal d’Ayacucho. « Status and Loyalty… », op. cit., p. 683.
32 Part. 2, 19 et 2, 23, cité dans A. García-Gallo, estudios de historia del derecho indiano, Madrid, Instituto Nacional de Estudios Jurídicos, 1972, notamment le chapitre consacré au « Derecho militar indiano », p. 749 ss.
33 Sur ces points, voir ibid., p. 745 et E. Christiansen, The Origins of Military Power in Spain 1800-1854, Londres, Oxford University Press, 1967, p. 4-12.
34 S.-G. Suárez, Las Instituciones Militares Venezolanas…, op. cit., p. 78, en donne des exemples précis.
35 Revue du « Regimiento de Infanteria auxiliar del nuebo Reyno de Granada », Santafé de Bogota, 19-21 décembre 1787, AGS, Secretaria de Guerra, t. 7299, dossier 18, fol. 73.
36 Malgré son objet, qui est de dénoncer l’organisation militaire de l’Ancien Régime, le premier texte de la Junte de Caracas visant à organiser les forces de la cité, évoque bien ce genre de vie. Organización militar para la defensa y seguridad de la Provincia de Caracas propuesta por la junta de guerra, aprobada y man-dada executar por la Suprema Conservadora de los Derechos del Sr. D. Fernando VII en Venezuela, Caracas, Imprenta de Gallagher y Lame, 1810.
37 Pan y toros cité dans E. Christiansen, The Origins of Military Power in Spain 1800-1854, op. cit., p. 4.
38 J. Marchena Fernández, Oficiales y soldados…, op. cit., p. 113. Ces chiffres concernent toute l’Amérique.
39 Intitulées : Ordenanzas de Su Majestad para el Régimen, Disciplina, Subordinación y Servicio de sus Ejércitos.
40 A. J. Kuethe, op. cit., p. 285 ss. et id., « The Pacification Campaign on the Riohacha Frontier, 1772-1779 », Hispanic American Historical Review, n° 50-3, 1970, p. 467-481.
41 M. Herrera, Ordenar para controlar…, op. cit., p. 280-284.
42 Datant de la fin du xviiie siècle, elle est rééditée à Madrid au début du siècle dans les Reglamentos para el ejercicio y maniobras de Infantería, Madrid, 1805, Artillería, Madrid, 1806, avec un complément de F. San Juan, El tratado de táctica de infantería ligera et Caballería, Madrid, 1815. Bolívar envoie encore ces deux tomes de Táctica à Páez en 1817 (Bolívar à Páez, Angostura, le 4 octobre 1817, dans OL, xiv, p. 324).
43 AGNC, Archivo anexo, Secuestros, t. i, fol. 435r.
44 Revue du « Regimiento de Infanteria auxiliar del nuebo Reyno de Granada », Santafé de Bogota, 19-21 décembre 1787, AGS, Secretaria de Guerra, t. 7299, dossier 18, fol. 73-74.
45 Historia de la Revolución de la República de Colombia, Medellín, Bedout, 1969, t. i, p. 28.
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