Chapitre VI. Multiplicité et imbrication des caisses
p. 157-185
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Texte intégral
1Fruit d’un équilibre obtenu difficilement, la loi a prévu trois catégories possibles d’organismes pour gérer les différents risques garantis par les Assurances sociales. Les caisses primaires de répartition couvrent l’assurance maladie et la maternité. Les unions régionales, avant tout organismes de réassurance à l’égard des caisses de répartition, prennent également en charge des dépenses de prévention, de soins aux invalides ainsi que les pensions d’invalidité pendant les cinq premières années d’invalidité. Enfin, les caisses primaires d’assurance vieillesse décès invalidité sont chargées du paiement des pensions vieillesses puis, à partir de 1941, de l’Allocation aux vieux travailleurs salariés (AVTS). Par ailleurs en faisant coexister caisses départementales et caisses d’affinité, la loi a favorisé la multiplication d’organismes de toutes sortes : il en découle une grande complexité dans le panorama général des Assurances sociales et cette caractéristique subsiste tout du long de leur existence.
2Malgré une relative stabilité dans le rapport entre ces deux grands groupes, le système évolue vers une rationalisation et une modernisation, au profit des caisses départementales.

3Note1
4À la fin de l’année 1930, 846 caisses primaires de répartition, caisses départementales comprises, sont ouvertes à travers le pays. Elles ne sont plus que 727 six ans plus tard – dont 80 caisses de capitalisation2 – puis 580 en fin 19453. Cette évolution va de pair avec une augmentation sensible des caisses les plus importantes au détriment des plus petites. Dès la fin de 1933, l’administration constate que les caisses aux faibles effectifs sont « très nombreuses mais ne groupent qu’une proportion extrêmement faible de l’effectif des assurés4 ». Cette tendance se poursuit jusqu’à la Libération :

5Durant ces années, le nombre de caisses départementales aux effectifs supérieurs à 100 000 personnes, passe de 7 à 20. En 1931, quatre caisses regroupaient entre 5 000 et 10 000 personnes ; il n’y en a plus qu’une fin 1938 et aucune en 1941. L’évolution est analogue pour les caisses d’affinité :

6Note5
7En 1936, les caisses primaires – elles regroupent alors 675 000 assurés d’une même profession – sont surtout implantées dans les secteurs de la métallurgie et de la mécanique (automobile, aviation, électricité industrielle) avec 2 030 000 assurés. Viennent ensuite le commerce, la banque, l’assurance et les journaux (160 000), suivis de la construction, du bâtiment et des travaux publics (78 000), puis des industries et du commerce de l’alimentation ainsi que des produits pharmaceutiques (62 000). Les industries chimiques (32 000), le caoutchouc, le papier et le carton (29 000) et enfin l’industrie du livre (22 500) ferment la marche. Le reliquat se répartit entre le textile, le travail des étoffes, les cuirs et peaux, le travail des métaux fins, la bijouterie, les professions libérales, les services publics et enfin les soins personnels et domestiques6. Ces chiffres soulignent l’importance des secteurs industriels les plus modernes dans le développement initial des assurances.
8L’examen du nombre d’affiliés montre aussi une progression générale des caisses les plus importantes, qu’il s’agisse de caisses départementales ou de caisses d’affinité. Fin 1937, 50 % des affiliés relèvent de caisses départementales regroupant plus de 100 000 adhérents ; ils sont 62,29 % à la fin 1945. Inversement, les caisses départementales, aux effectifs allant de 25 000 à 50 000 personnes, en accueillent 20 % en 1937 mais seulement 12,43 % en 1945. Les caisses d’affinité supérieures à 100 000 assurés qui, fin 1937, totalisent 16,46 % des assurés en regroupent 20, 57 % fin 1945. Ce sont donc les caisses importantes en nombre d’affiliés qui progressent le plus.
9Fin 1932, les caisses départementales regroupent plus des deux tiers des assurés dans 33 départements ; elles rassemblent 56 à 66 % des assurés dans 30 départements et moins de 50 % dans 13 autres. À cette date, les régions de Lille (Nord, Pas-de-Calais, Somme) et de Nancy (Meurthe-et-Moselle, Meuse, Territoire de Belfort, Haute-Saône et Vosges) sont celles pour lesquelles la proportion d’assurés aux caisses départementales est la plus faible : 38 à 48 %. À l’inverse, la région de Rennes (Côtes-du-Nord, Finistère, Ille-et-Vilaine, Mayenne, Sarthe) est celle où les affiliés aux caisses départementales sont les plus nombreux, soit 70 %. Pour le reste du pays, les effectifs des caisses départementales varient approximativement entre les deux tiers et la moitié du total7.
10Cette complexité se vérifie sur tout le territoire, à l’exception de l’Alsace et de la Lorraine. Dans chaque département, cohabitent, en moyenne, une dizaine de caisses. Dans l’Ain, la Loire et le Rhône, le nombre des caisses oscille entre 12 et 158. Sur 7 caisses qui fonctionnent dans l’Ain à partir de 1930, la caisse départementale devient vite la plus importante9 ; elle est gérée par un conseil d’administration de 24 membres : 12 représentent les salariés, 10 les employeurs et 2 les praticiens. Elle crée une Union de l’ensemble des caisses du département, destinée à veiller à l’application uniforme de la loi, signe du fait qu’il n’existe pas de barrière avec les caisses d’affinité. En Charente-inférieure, outre la caisse départementale, existent neuf caisses primaires : trois mutualistes interprofessionnelles, une CGT, une CFTC, une caisse patronale des industries maritimes constituée en 1929 par la Compagnie maritime Delmas Vieljeux et trois caisses agricoles. Dans ce département qui bénéficie depuis le milieu du xixe siècle d’un tissu mutualiste dense, 60 % des assurés choisissent pourtant l’anonymat de la caisse départementale ; ce taux est proche de la moyenne nationale. La faible industrialisation du département et son taux de syndicalisation limité expliquent la relative désaffection des assurés pour la caisse de la CGT mais pas pour la caisse mutualiste. Cégétistes et mutualistes siègent à la caisse départementale, présidée par un mutualiste, dont les administrateurs se répartissent entre 5 CGT confédérés, 1 CFTC, 5 mutualistes, 2 agriculteurs, 6 employeurs dont 1 agriculteur, 2 médecins et 4 membres honoraires.
11Dans l’Isère, 14 caisses d’affinité cohabitent avec la caisse départementale : 11 caisses d’entreprises, (Merlin-Gerin et des branches professionnelles telle que le papier ou l’électrochimie), une caisse mutualiste, une catholique et une caisse Le Travail10. Dans le Loiret, le rapport entre la caisse départementale et l’ensemble des caisses d’affinité est à peu près équilibré : environ 20 000 pour ces dernières, autant pour la caisse départementale11. Cinq caisses primaires existent en Loire-inférieure où 140 000 salariés sont immatriculés dès 1930. En 1933, la caisse départementale compte 73 000 inscrits, la caisse mutualiste 20 000 assurés et autant de mutualistes non affiliés aux Assurances sociales ; elle déplore cette dispersion. La caisse CFTC rassemble 13 000 assurés ; une autre, fondée en 1929 par la CRIFO, d’origine patronale, en regroupe 12 000. Installée à la Bourse du travail, la caisse CGT (10 500 adhérents) s’oppose au paritarisme, au motif que les salariés doivent apprendre à gérer eux-mêmes leur protection sociale ; elle connaît des débuts difficiles. Des caisses primaires d’usines, rattachées à ces cinq caisses principales, voient le jour aux Batignolles, aux Chantiers de Bretagne, à la Raffinerie de Chantenay, aux Chantiers de Penhoët, aux établissements Huard12.
12Dans la Marne, outre la caisse départementale existent 10 caisses primaires : 5 caisses patronales, 3 mutualistes, 1 créée par la CFTC, et 1 caisse agricole ; les liens entre mutualité et patronat y sont étroits. Une fois de plus, la caisse départementale l’emporte avec 65 % des assurés contre 22,39 % à l’Union mutualiste – on est ici proche de la moyenne nationale – et les mutualistes constituent la moitié de son conseil d’administration. La caisse CFTC, qui accueille un nombre d’assurés (5 845) largement supérieur à celui de ses effectifs départementaux (800 adhérents), se classe au troisième rang13. N’étant pas en mesure de constituer sa propre structure, la CGT intervient au sein de la caisse départementale. Neuf caisses primaires existent en 1931 dans l’Oise. Dans l’Orne, où le patronat industriel ne s’oppose pas à la loi, les mutualistes s’engagent en faveur de la réforme, non sans difficultés. La crise économique réduit les excédents financiers de la caisse départementale de 21,30 % à 3,60 %14. L’équilibre est rétabli en 1937 et la décennie se termine sur un bilan excédentaire, sans triomphalisme. Dans la Sarthe, la progression de la caisse départementale au détriment des caisses d’affinité est particulièrement sensible : 33 % en 1930, 43 % en 1935, 60 % à la Libération15. Dans les Pyrénées-Orientales, 5 caisses d’affinité cohabitent avec la caisse départementale : 2 sont dirigées par la CGT et l’Union mutualiste à Perpignan16.
13Les débuts de la caisse départementale de Montpellier se font sous l’égide des représentants ouvriers, du monde agricole et de la mutualité. Son premier président est remplacé en 1933 par Célestin Nicolas, également secrétaire de l’Union départementale CGT et président de la caisse Le Travail qui la présidera jusqu’à sa mort en 193917. À ses côtés, siègent des mutualistes connus tels Nestor de Casamajor et Charles Warnery. En 1939, est élu un nouveau président, Léon Jean, militant SFIO. De son côté, Étienne Antonelli, administrateur de la caisse Le Travail de Montpellier préside l’Union régionale des caisses d’Assurances sociales. Tous ces responsables conservent leurs fonctions pendant la guerre. L’Hérault est un bon exemple du rôle de lieu de rencontre joué par les caisses départementales entre mutualistes, patrons et syndicalistes. On constate parfois des anomalies, difficiles à expliquer. Ainsi, dans l’Hérault, une caisse unique joue de façon intermittente jusqu’en 1939, le rôle de caisse départementale de répartition, en lieu et place de celle de Montpellier.
14Dans la Somme, outre la caisse départementale (56 000 adhérents) les assurés sont répartis en 6 caisses : trois professionnelles (3 000 adhérents), une CGT (9 000) et une CFTC (16 000). La caisse mutualiste (31 000 adhérents) vient en seconde position derrière la caisse départementale ; à cela, s’ajoutent 18 000 assurés agricoles et quelques caisses interdépartementales antérieures à 1930 qui s’étiolent18. La caisse CGT bondit de 6 000 assurés en 1930 à 42 000 en 1945, soit 18 % des 175 000 assurés, chiffre bien supérieur à celui de la moyenne nationale. On en ignore les raisons, mais sur le plan numérique, elle est la cinquième de toutes celles créées par la CGT en France19.
15Ces exemples montrent que l’un des grands débats ayant scandé la préparation de la loi, celui de la responsabilité de la gestion du système, a des suites inattendues. Il n’existe pas de séparation tranchée entre caisses départementales et d’affinité, des rapprochements s’opèrent. On ne peut s’en tenir au seul examen de leur poids numérique respectif. Personne n’a prévu la rencontre et l’engagement commun de patrons, de mutualistes et de syndicalistes dans les caisses départementales. Diffuse et difficile à mesurer, cette évolution est une caractéristique essentielle des Assurances sociales où différents acteurs apprennent à se connaître et à travailler ensemble, comme cela avait déjà été le cas avant 1914 au sein de la « nébuleuse réformatrice20 ». Sur ce plan, il existe une continuité dont bénéficiera la Sécurité sociale. Contrairement à ce que l’on avait imaginé avant 1930, les caisses d’affinité sont minoritaires sur le plan des effectifs. Mais, les acteurs sociaux comprennent vite leur intérêt à investir les caisses départementales. Il n’existe donc pas de ligne de démarcation définitive entre ces deux groupes et la pratique aidant, ils entretiennent des liens de plus en plus étroits. Patrons, mutualistes et syndicalistes prennent conscience de l’avantage d’agir dans le cadre des caisses départementales. Avant 1930, ils pensaient d’abord à s’assurer une certaine audience mais ensuite, à la lumière de l’expérience, cette question passe peu à peu au second plan. En institutionnalisant fortement la protection sociale, les Assurances sociales contribuent à modifier les mentalités de ceux qui les gèrent.
16De ce point de vue, les Assurances sociales sont aussi une alternative à la dérive corporatiste française, à la recherche d’un droit social commun organisé autour du salariat. Filles de leur temps, elles participent à la tentation corporatiste et planificatrice existant au sein des milieux dirigeants comme des élites réformatrices. D’autant que leur gestion, considérée comme un de leurs points faible a été confiée à des non bénéficiaires du système. Lors du renouvellement d’un administrateur de la caisse départementale de Charente-inférieure, un de ses collègues affirme que « les délégués ouvriers non assurés21, les mutualistes et employeurs seraient bien inspirés en laissant ledit poste à un assuré social, directement intéressé à la gestion de ses versements ». La question se pose tout particulièrement pour les mutualistes qui accaparent la direction de la plupart des organismes départementaux, régionaux et nationaux, des notables pour la plupart, alors que les Assurances sociales s’adressent aux salariés : d’où un décalage entre ceux qui bénéficient du système et ceux qui le gèrent. On retrouve ici à moindre échelle, la division du mouvement mutualiste entre gestionnaires et bénéficiaires, à l’œuvre depuis la constitution de la « mutualité impériale » par Napoléon III. En cela, le fonctionnement des assurances reste empreint de paternalisme, même si celles-ci tendent à s’en défaire. Moment d’apprentissage de la gestion des œuvres sociales par et pour les salariés, elles sont le début d’un système qui s’élargira avec la Sécurité sociale et les comités d’entreprise et constituent une transition entre les formes traditionnelles de paternalisme et la gestion syndicale voulue par une partie des promoteurs de la Sécurité sociale à la Libération.
Les Assurances sociales, lieu de rencontre des acteurs sociaux
17En province comme à Paris, les mutualistes prennent la direction d’un grand nombre de caisses. Président de l’Union mutualiste de la Manche en 1937, M. Douesnard préside également la caisse départementale. Président de la Société des ménages prévoyants de Versailles, (1929-1972) et de la Fédération mutualiste de Seine-et-Oise, René Aubert préside la Caisse complémentaire d’Assurances sociales du département22. Dans les Pyrénées-Orientales, la caisse départementale, installée dans les locaux de l’Union mutualiste, est gérée par un personnel commun à la mutualité et aux Assurances sociales. Président fondateur de l’Union mutualiste depuis 1900, Eugène Pams est également le premier président de la Caisse départementale, jusqu’à sa mort en 193223. Même chose dans le Rhône, où Eugène André, président de l’Union générale de la mutualité du Rhône (UGMR) depuis 1924, préside la Caisse régionale d’assurance vieillesse de Lyon ; il siège au Conseil supérieur des Assurances sociales24. Dans l’Indre-et-Loire, Émile Olivier, président de l’Union départementale mutualiste de 1917 à 1933, fondateur de la caisse départementale des Assurances sociales en est un des vice-présidents délégué tout en ayant accepté de multiples présidences dites sociales25.
18Nombre de responsables syndicalistes CGT et la CFTC exercent leur influence en siégeant dans les conseils d’administration des caisses départementales. Mais, ils ne peuvent rivaliser avec les mutualistes qui s’appuient sur des troupes bien plus nombreuses et qui disposent de réserves financières considérables. De plus, les mutualistes ont une longue expérience des responsabilités gestionnaires, ce qui n’est pas le cas des syndicalistes, élevés pour la plupart dans une culture contestataire et revendicative diamétralement opposée. Lieu de rencontre entre divers acteurs sociaux, les caisses départementales élargissent l’apprentissage de la gestion d’une protection sociale qui bénéficie à des couches croissantes de la population, où les mutualistes occupent le premier rôle.
19L’imbrication entre acteurs sociaux et administration de l’État est particulièrement poussée à la CIAS, gérée par un conseil d’administration provisoire de 30 membres nommés par le ministère du Travail, réunis mensuellement et dirigée par un Bureau de 12 membres choisis en son sein. Le provisoire y dure comme ailleurs. Prévue en janvier 1934, l’élection des administrateurs est reportée. Au sein du nouveau conseil désigné en mars 1935, Grasset, alors vice-président de la FNMF, estime que les assurés qui ont refusé de choisir une caisse d’affinité se sont exclus du droit de vote. Le secrétaire général rétorque que plus de trois quarts de ses assurés l’ont véritablement choisie. Affirmation discutable : comme en province, la majorité y est affiliée parce que c’était la seule dont ils avaient entendu parler.
20De 1930 à 1935, la présidence de la CIAS est assurée par Léon Heller, également à la tête de la FNMF depuis 1931. Fort actif, il jouit d’une autorité reconnue par tous. En février 1935, le conseil d’administration le félicite d’avoir presque toujours su aboutir, à des décisions unanimes. Jusqu’en 1935, il est assisté de quatre vice-présidents : Tarcy, président de l’Union des sociétés de secours mutuel de Seine-et-Oise, remplacé par Ehrbar ; Georges Buisson, (CGT) ; Vimeux secrétaire de la Fédération nationale de la Mutualité agricole, et Paul Schmitt secrétaire de l’Union parisienne de la CFTC, qui préside les rares séances tenues sans Léon Heller. Le secrétaire général Georges Yung, par ailleurs secrétaire général de la Fédération nationale des coopératives de consommation (FNCC) et de la FNMO, est secondé par Maignan, directeur de la Caisse de compensation des Allocations familiales de la Seine. La trésorerie est assurée par Romain Lavielle, secrétaire général de la FNMF puis, à partir de 1932, par Jean Derdinger, un des quatre vice-présidents de la FNMF, assisté de Boiscorjon, autre responsable de la Mutualité agricole. Dans ce premier bureau siègent aussi un représentant des professions agricoles et deux responsables CGT de la Seine, Gaston Guiraud et Jules Bled.
21En 1935, le conseil d’administration renouvelle partiellement le Bureau, l’étoffant de 15 membres et de 5 vice-présidents. Léon Heller conserve la présidence. Le patronat obtient une vice-présidence, aux côtés de Georges Buisson et Paul Schmitt. Les deux autres vice-présidences échoient à un représentant du secteur agricole et à un mutualiste. La trésorerie reste à Derdinger, assisté du confédéré Pierre Miniconi. Georges Yung et Maignan sont toujours secrétaires. Bled (CGT), Camy (CGT), Dessalles (imprimeur), Lockhart et Manier (Mutualité agricole) complètent ce Bureau. Les membres du conseil d’administration perçoivent des indemnités uniquement pour leurs déplacements, ce que certains représentants patronaux refusent. En octobre 1934, un relevé de présence fait apparaître la participation régulière au conseil de 16 administrateurs sur 30. De 1930 à avril 1934, 4 administrateurs n’y assistent jamais ; un autre, mutualiste, démissionnaire pour raisons de santé en avril 1932, n’est toujours pas remplacé au lendemain de son décès en juillet 1934.
22Nommé par le ministère du Travail qui exerce un contrôle effectif sur le système, un nouveau conseil d’administration, élargi à 48 membres, entre en fonction en mars 1935. La plupart des anciens sont reconduits. Parmi les sept nouveaux, 4 sont des représentants des professions agricoles. Ce conseil renouvelé est composé pour moitié d’administrateurs syndicalistes : 17 CGT, 5 CFTC – notamment Gaston Tessier, secrétaire de cette centrale et souvent absent – et, pour la première fois, deux représentants de la CGTU, Robert Doury et Édouard Finck, respectivement responsables des Fédérations des Métaux et des Produits chimiques. Dès leur arrivée, ils réclament des élections sous trois mois, en protestant contre le petit nombre de sièges qui leur est attribué. En fait, la CGTU est la seule organisation à n’avoir constitué aucune caisse. Ils exigent des comptes détaillés de l’ensemble des opérations passées, tout en estimant ne pas être liés par les informations dont ils disposent en raison de leur fonction. L’ordre du jour qu’ils déposent en ce sens ne recueille que leurs voix. Ils refusent ensuite les places qui leur sont proposées au Bureau de la CIAS. Souvent absents jusqu’en 1940 – Édouard Finck l’est d’avril 1936 à février 1937 –, ils défendent une orientation proche de celle des confédérés : hostilité aux placements financiers, préférence pour la gestion directe des œuvres sociales, défense du personnel. Privés de leur mandat par l’arrêté du 8 janvier 1940, ils sont remplacés le 17 février par deux confédérés, Roger Bertrand, directeur de la caisse de capitalisation Le Travail, vice-président de la FNCD, et Maxime Foulet, secrétaire du syndicat des Employés de la région parisienne. L’accent est donc mis sur les partenaires sociaux. Le poids de la CGT confédérée y est sans doute surreprésenté, en regard de ses capacités véritables de mobilisation. Inversement, même si la CGTU fait son entrée dans les instances dirigeantes avant même le Front populaire, son rôle y reste limité pour ne pas dire marginal. Il ne semble pas que le souffle de 1936 contribue à l’étoffer.
23En septembre 1936, le conseil d’administration de la CIAS accueille un médecin et un pharmacien comme conseillers techniques et représentant des professions médicales ; 3 administrateurs agricoles sont remplacés, notamment par un représentant de la caisse Citroën. En mars 1937, 4 nouveaux administrateurs arrivent au titre de la section agricole. Le nouveau conseil connaît un taux de participation plus élevé que le précédent, environ deux tiers. Romain Lavielle y siège plus régulièrement que Georges Buisson ou Oreste Capocci. Léon Heller, Georges Yung et Marcel Martin dominent les débats ; les deux premiers obtiennent souvent le consensus, à la différence d’Oreste Capocci, de Georges Buisson, des deux syndicalistes unitaires ainsi que des deux mutualistes, Camus et Grasset. Plusieurs commissions de travail spécialisées sont mises en place : commission du personnel, du service social, des immeubles, commission financière, de discipline et du restaurant du personnel. Georges Yung assiste à la quasi-totalité de ces commissions, alors que Léon Heller ne suit que les deux premières.
24Directeur de la CIAS depuis ses premiers pas, Georges Chandet, qui a travaillé auparavant à la préfecture de la Seine, est remplacé en novembre 1934 par Marcel Martin. Après avoir débuté à la sous-préfecture de Coulommiers, celui-ci avait été affecté en 1918 à l’Office de reconstitution industrielle puis en 1924 à l’Office public d’Habitations à bon marché de la Seine. Administrateur de l’Union des coopératives de consommation (UDC), il est élu en 1930, vice-président de la caisse Le Travail de la Seine. Il dirigera la CIAS jusqu’à son éviction par le gouvernement de Vichy en 1942, sans doute en raison de son appartenance à la franc-maçonnerie26. Il est le symbole des relations entre la CGT confédérée et le mouvement coopératif sur le dossier des Assurances sociales : la Fédération nationale des coopératives de consommation (FNCC) soutient plusieurs caisses Le Travail27. La présence de Georges Yung, secrétaire de la FNCC, vice-président de la FNMO et vice-président du Comité général d’entente de la mutualité et des Assurances sociales est un autre signe de ces liens. En 1943, Georges Yung succédera à André Garczynski à la tête de la FNCD. Secrétaire général de l’Union des caisses primaires d’Assurances sociales maladie maternité de Paris, Georges Yung sera nommé en 1944 au Comité technique de l’Institut national d’action sanitaire des Assurances sociales puis suivra les premiers pas de la Sécurité sociale. L’instauration du régime de Vichy a peu modifié la direction de la CIAS. Les véritables changements se feront à la Libération.
Conflits entre caisses
25La multiplicité des caisses est source de conflits, notamment sur la question du recrutement, toute caisse nouvelle empiétant inévitablement sur celles qui existent déjà. La division des cotisants en cinq catégories aggrave ces rivalités. Sont particulièrement convoités les travailleurs des quatrième et cinquième catégories, aux cotisations supérieures, les plus intéressants sur le plan financier. En marge du système, des conflits peuvent également découler des modifications des prestations entraînées par la législation.
26En Haute-Garonne, cohabitent 15 caisses de répartition et 3 caisses de capitalisation gérant les risques vieillesse et invalidité. Leurs origines sont multiples : mutualiste, ouvrière, patronale, professionnelle et syndicale. En juillet 1933, le Foyer garonnais, constitué sous l’égide de la caisse de secours mutuels agricole, entre en conflit avec la caisse départementale qui enregistre alors un tassement du nombre de ses assurés. L’affaire est d’autant plus grave qu’il est reproché au Foyer garonnais de faire une « propagande intense, voire frauduleuse ». Un accord signé en 1930 les engage à ne pas faire de publicité pour attirer les assurés, mais le Foyer garonnais, fondé ultérieurement, ne se sent pas concerné par ce texte. Une commission d’enquête puis une enquête de police vérifient si le Foyer garonnais n’a pas contraint certains assurés à changer de caisse. L’affaire se termine par un non-lieu. Par la suite, les rapports entre les deux caisses s’amélioreront avant que le Foyer garonnais ne soit dissous. Ses adhérents rejoindront alors la caisse départementale, signe du renforcement de ces dernières face aux caisses d’affinité28.
27La nature et le niveau des prestations provoquent également des conflits. Deux compagnies houillères, l’une à Commentry-Fourchambault (Allier) et Decazeville (Aveyron), l’autre à Forges de Châtillon-Commentry et Neuves-Maisons (Meurthe-et-Moselle) ont instauré un régime d’allocations familiales, plus avantageux que celui de la loi du 11 mars 1932. Cette loi impose à ces compagnies des obligations nouvelles : extension des allocations à tous les enfants et non seulement ceux directement à charge ; extension des allocations jusqu’à 16 ans aux enfants poursuivant leurs études au-delà de l’âge de scolarité obligatoire, placés en apprentissage, infirmes, ou atteints d’une maladie chronique. Devant ces charges supplémentaires, les Compagnies décident de supprimer trois avantages non prévus par la loi de 1932, qu’elles avaient accordés. L’orphelin de père, ayant à sa charge des frères ou sœurs en bas âge ou infirmes, cesse d’être considéré comme chef de famille et perd le bénéfice d’une l’allocation. Les allocations familiales, accordées jusqu’alors aux ouvriers malades pendant le temps où ils recevaient l’indemnité statutaire de la société de secours mutuels, sont supprimées. Enfin, en cas d’absence volontaire de l’ouvrier de moins de trois jours, les allocations familiales, autrefois intégralement payées, sont supprimées29.
28Le 10 septembre 1933, Paul Oustry, responsable départemental de la CGT confédérée, commente à Gransac le refus des Forges de Châtillon-Commentry de consentir aux revendications syndicales et demande au préfet d’intervenir. Selon les deux Compagnies, la loi du 11 mars 1932 a « apporté quelques aggravations aux conditions d’octroi » des prestations et la situation ne permet pas d’envisager une augmentation nouvelle des charges. « Dorénavant, la Compagnie ne versera plus d’allocations aux enfants exclus des catégories définies par la loi [et] rien non plus pour les journées d’absence ou de maladie. » Elle continuera à verser l’allocation maxima correspondant à 25 % de travail, à tout allocataire ayant normalement travaillé dans le mois. La loi du 11 mars 1932 « ne saurait… créer l’obligation d’assumer des charges supérieures à celles qu’elle définit ». Le député socialiste Paul Ramadier prévient le préfet qu’il en saisit le ministre du Travail. Dans une longue lettre aux deux Compagnies, le préfet évoque « l’émotion très réelle » provoquée par ces décisions. Les avantages découlant de la loi du 11 mars 1932 semblent « de portée assez réduite », en comparaison de la suppression des allocations aux ouvriers malades dans un contexte de réduction du travail pour des salariés proches de la misère. D’autant qu’à la différence d’autres bassins miniers, aucune augmentation salariale n’a été accordée par les Houillères de l’Aveyron30.
29Le Directeur de Commentry-Fourchambault et Decazeville affirme avoir voulu atténuer le plus possible les conséquences de la crise pour le personnel, tout en sachant que ces efforts « n’ont pas suffi à épargner… une très pénible réduction de ses ressources. Si le législateur [a] voulu que la loi du 11 mars 1932 ne soit pas une occasion de restreindre systématiquement ce qui était antérieurement fait, il n’a pu avoir pour intention d’interdire des ajustements dans la limite de ce qui est fait bénévolement en sus des minima obligatoires ». La Compagnie versera désormais aux familles nombreuses des allocations de 20 francs par mois pour trois enfants ; 60 francs pour quatre enfants ; 120 francs pour cinq enfants et 60 francs par enfant en plus des allocations provenant de celles des Assurances sociales ou de la Caisse de secours des mineurs. Les Forges de Châtillon-Commentry font des propositions analogues. Paul Ramadier salue ce geste et s’étonne que les syndicats ouvriers ne considèrent pas cette concession comme digne de quelque considération. Mais le syndicat des mineurs du bassin d’Aubin rejette un « avantage extrêmement médiocre » qui ne concerne que 10 % du personnel.
30Le préfet souligne au ministre du Travail la nécessité d’informer les Compagnies que leurs décisions étant contraires au texte législatif, elles doivent rectifier leur attitude. Dans un courrier aux Compagnies, le ministère développe une argumentation analogue à celle du préfet. « Aucune raison ne paraît s’opposer à ce que votre Compagnie rétablisse les avantages précédemment accordés aux ouvriers des houillères d’Aubin… Dans la négative, il serait à craindre que la Commission supérieure des Allocations familiales se refuse à donner un avis favorable au maintien du service particulier de votre compagnie, ce maintien devant priver les ouvriers d’avantages dont ils bénéficieraient si la compagnie devait adhérer à la caisse interprofessionnelle albigeoise. Sans doute votre compagnie accorde d’autres avantages tels que des allocations d’un taux supérieur pour les familles de trois enfants, mais il est douteux que ces avantages compensent la suppression absolue des allocations familiales en cas de maladie. » Le 4 octobre 1934, le ministère accorde son agrément au service d’allocations familiales des Mines de Decazeville, à condition qu’elles ne réduisent pas le taux des allocations fournies sans autorisation du ministre du Travail. Elles devront satisfaire « aux obligations imposées aux services particuliers d’allocations familiales par le décret du 14 mars 1933 ». La Direction du Travail accorde un agrément analogue au service des Allocations familiales des Mines d’Aubin mais pas avant le 6 septembre 193531. Deux ans furent nécessaires pour trouver une solution.
31Les conflits de ce type furent nombreux, nés de l’éparpillement des caisses et de leur mosaïque. De plus, la nécessité de répondre aux besoins de catégories particulières contribua à accentuer cette dispersion, comme le montre le cas du personnel communal.
Des assurés particuliers, le personnel communal
32L’application de la réforme sur les Assurances au personnel municipal soulève de nombreuses questions : comment assurer la transition avec les régimes antérieurs ? À quelle date et comment les Conseils municipaux modifient-ils le statut de leur personnel ? Quand procède-t-on à l’immatriculation des assurés ? Durant cette période transitoire, quelles sont les relations entre les municipalités et leur personnel ? La palette varie entre accord réel, consentement tacite, conflit larvé et vives tensions.
33L’article 49 de la loi stipule qu’elles concernent tous les agents municipaux et départementaux – agents, employés, ouvriers commissionnés, etc. – et qu’elles doivent maintenir les droits acquis, tout en soulageant les finances locales qui ont pris jusqu’alors en charge les risques maladies. Les mairies peuvent maintenir le régime particulier ou choisir l’affiliation au régime général, après consultation des assurés. Des règles de coordination sont prévues pour passer d’un régime à l’autre et établir un système transitoire. À partir de juin 1931, un décret d’application précise que les collectivités publiques doivent modifier ou compléter le statut de leur personnel de façon à « accorder des prestations équivalentes pour chaque risque à celles qui sont déjà prévues par le régime général, sans que les prestations de même nature déjà accordées puissent être réduites ou supprimées32 ». La loi est donc applicable au personnel municipal mais les autorités locales ne montreront aucun empressement à le faire, comme le montre l’exemple de Dijon.
34Dirigée par Gaston Gérard de 1919 à 1935, la municipalité radicale-socialiste de Dijon emploie 350 personnes. Le 28 novembre 1931, le Conseil municipal choisit le régime général pour les risques couverts par la répartition maladie et maternité. La ville prend à sa charge 30 % de la contribution des employés. Auparavant, elle versait en cas de maladie, 3 mois de salaires complets et sans contrepartie, 3 mois à demi-salaire. Ces 30 % représentent l’économie faite par la ville qui ne paie plus les trois mois à demi-salaire, désormais pris en charge par les Assurances sociales. En outre, la ville abaisse de 15 à 2 ans le délai d’affiliation nécessaire pour ouvrir des droits à la pension invalidité. En janvier 1934, elle n’a toujours pas procédé à l’immatriculation de son personnel qui manifeste son mécontentement à travers l’Amicale de la police et l’Union des employés et ouvriers commissionnés. Entre octobre 1931 et juin 1934, ses employés demandent dans une dizaine de lettres adressées à la municipalité qu’elle prenne intégralement en charge les risques maladie, « comme à Reims ». Ils veulent aussi pouvoir exprimer leurs revendications et être consultés par écrit sur la répartition des contributions et le mode d’application de la loi. La décision d’immatriculer les travailleurs municipaux par la collectivité à partir du 1er mai 1934, « a surpris tous les agents municipaux ; n’ayant pas été consultés, nous ne pouvons être d’accord et ne le sommes pas plus que sur le principe de leur application ». À la veille des élections municipales de 1935, le problème n’est toujours pas réglé. À Dijon comme ailleurs, la question des assurances ne figure pas lors de cette consultation qui coïncide pourtant avec leur réforme administrative33.
35Dans la région parisienne, l’action commune de Lucien Jayat, secrétaire du Syndicat CGT confédéré des personnels communaux de la Région parisienne et d’Henri Sellier, secrétaire général de l’Union des maires socialistes de la Seine, a permis une solution plus rapide. Jusqu’alors, les employés territoriaux accédaient à une couverture maladie et à une retraite essentiellement par l’intermédiaire d’une société de secours mutuels ou d’une association catégorielle. En 1932, bien que la loi soit applicable depuis deux ans, rien n’a été fait. En octobre 1932, Lucien Jayat rencontre Henri Sellier qui l’informe de l’opposition des ministères de l’Intérieur et des Finances à élargir la loi aux agents de l’État, en raison du coût d’une telle mesure. En revanche, le ministère du Travail serait favorable à une application immédiate de la loi, surtout si ces agents s’organisaient sous la forme de sociétés de secours mutuels spécifique, administrées de façon paritaire par les employés et les municipalités. De telles sociétés feraient office de caisses. Après s’être informés auprès de plusieurs caisses d’Assurances sociales, les deux hommes créent, en octobre 1933, la Caisse mutuelle du personnel des communes, établissements publics et services concédés de la région parisienne. Avec Henri Sellier pour président et Lucien Jayat comme secrétaire, elle est dirigée par un conseil d’administration de 11 membres, six représentants du personnel communal et cinq des communes. Le 1er janvier 1934, la Caisse verse ses premières prestations à 3 000 assurés34.
36Cet exemple a sans doute été suivi, au moins par les plus grandes villes de province. Mais en l’absence de statut national du personnel communal et départemental, toute forme généralisée de protection envers des personnels aux statuts variés reste aléatoire. Néanmoins, à travers un regroupement progressif de leurs différentes caisses, les assurances continuent leur lente homogénéisation.
Regroupements régionaux et nationaux
37En raison des risques financiers, les caisses doivent s’assurer à l’échelon départemental, régional ou national. Quelle que soit leur nature, caisses départementales et caisses d’affinité tendent à se regrouper en fédérations ou unions régionales qui adhèrent elles-mêmes à une organisation nationale. Les Assurances se constituent ainsi peu à peu en une institution nationale. Son fonctionnement réclame des règles de solidarité entre les organismes qui y collaborent, en particulier dans les domaines coûteux des risques maladie, maternité et des soins aux invalides. Antérieurement à la Sécurité sociale, ce système d’une grande diversité originelle, se fonde en un seul ensemble dans un processus qui n’est pas achevé en 1945. La notion de système national de protection sociale, si nouvelle, est difficile à admettre. Elle se heurte à l’existence de régimes particuliers (ou régimes spéciaux) datant d’avant la réforme et aux conflits engendrés par les enjeux de pouvoir concernant la gestion des caisses.
38En 1935, une quinzaine d’Unions ou de Fédérations régionales de réassurance sont destinées à développer des réalisations sociales. En 1945, elles regroupent un nombre d’adhérents correspondant à celui de l’ensemble des caisses de leur circonscription35. Des Unions de caisses régionales pour la capitalisation viennent en aide aux caisses en difficulté. Ainsi, en octobre 1935 est créée à Montpellier une Union régionale des caisses maladie et maternité appelée à couvrir cinq départements – Aude, Aveyron, Gard, Hérault et Pyrénées-Orientales – présidée par Étienne Antonelli. À partir du 1er juillet 1936, elle assure le paiement des pensions d’invalidité, du ressort des caisses de capitalisation, par le biais des caisses primaires, coopère à des actions d’hygiène sociale et soutient les caisses de répartition déficitaires non prises en charge par la Caisse générale de garantie36. Les services de l’Union sont contrôlés par le ministère des Finances, qui nomme ses administrateurs par arrêté. En juin 1939, cette Union envisage de s’associer avec son organisation sœur de la région parisienne pour développer des colonies de vacances. De leur côté, les 12 caisses primaires de l’Hérault ont formé depuis 1937 une Union libre37. Quant aux mutualistes, la CGT et la CFTC, ils mettent également sur pied leurs structures nationales.
39Ces Unions régionales adhèrent à la Fédération nationale des caisses départementales (FNCD). À la fin de 1930 se constitue l’Union régionale des Caisses départementales du Sud-Ouest, dont le siège est à Limoges. La caisse de Charente-Inférieure y adhère en 1932 ; ses administrateurs critiqueront ultérieurement son fonctionnement qu’ils jugeront trop coûteux. La Fédération régionale des caisses départementales de l’Ouest (FRCDO), association régie par la loi de 1901, naît à Rennes, en octobre 1931, à l’initiative des caisses des Côtes-du-Nord, du Finistère, de l’Ille-et-Vilaine, du Morbihan et de la Sarthe. Elles sont rejointes en 1932 par la Loire-Inférieure, le Maine-et-Loire et la Mayenne puis jusqu’en 1935 par le Calvados, la Manche, l’Orne et la Vendée. De 1936 à 1945, la FRCDO perd la caisse de la Mayenne mais accueille celles de l’Eure, de l’Indre-et-Loire et de la Seine-Inférieure. Présidée de 1934 à 1943, par André Garczynski, elle fonctionne avec régularité jusqu’à la fin de la guerre. Réunis à Paris les 24 et 25 avril 1945, ses 11 représentants se prononcent à l’unanimité « pour l’institution, d’un organisme unique de Sécurité sociale » et donc une caisse unique. Cinq d’entre eux s’opposent à la prise en charge des Allocations familiales par le nouveau système38.
40Dans la Sarthe comme ailleurs, le patronat refuse un système jugé « étatique ». Il cherche à coopérer avec la mutualité tout en défendant le principe d’une gestion paritaire des caisses. Dès juillet 1930, André Garczynski, patron d’une entreprise d’électricité du Mans, prend une part essentielle à la nouvelle organisation des assurances. Il préside la caisse départementale, l’Union des caisses départementales puis, au plan régional, l’Union de réassurance pour l’Eure-et-Loir, la Mayenne, l’Orne, la Sarthe et, à partir de 1935, l’Ille-et-Vilaine. En avril 1934, il accède à la présidence de la FNCD. Administrateur de la Caisse de garantie, il siège aussi au Comité d’entente des Assurances sociales et au Conseil supérieur d’hygiène sociale. Écouté et respecté, travaillant avec des personnalités venues de milieux différents comme Georges Yung, il sait aussi jouer de ses relations personnelles, notamment avec Marcel Bernard.
41Les relations d’André Garczynski avec la Mutualité sont distantes jus-qu’en 1932, date où elle soutient le projet de loi Dormann-Montigny visant à mutualiser les Assurances sociales par la suppression de l’obligation pour l’employeur d’exercer une retenue sur les salaires. Ce texte demande en outre que les groupements mutualistes soient habilités à gérer directement le système. En supprimant l’obligation et en confiant la gestion aux mutualistes, les Assurances sociales auraient été bouleversées et, sans doute, dénaturées.
42Sans faire mystère des imperfections de la loi, André Garczynski ne cesse de la défendre. Au plan local, il prône la gestion la plus souple possible des caisses ainsi que leur collaboration afin de limiter la concurrence et d’uniformiser cotisations et prestations. Favorable à des conventions avec les médecins et au soutien par les Assurances des œuvres de prévention, André Garczynski les exhorte à collaborer avec l’Office départemental d’hygiène. En tant que président de la FNCD, il ne cesse de combattre les tentatives de remise en cause par l’État de l’autonomie gestionnaire des caisses. Il insiste également auprès des pouvoirs publics sur la nécessité d’un renforcement, quantitatif et qualitatif, des services administratifs, prix à payer pour obtenir une meilleure rentrée des cotisations. Tirant le bilan de ses interventions au ministère du Travail de 1935 à 1939, il évoque une sévérité accrue à l’égard des employeurs récalcitrants, la demande d’une réduction du prélèvement de l’État sur les réserves des Unions régionales pour financer le risque invalidité et l’abandon d’une diminution des cotisations de 8 % à 7 %. Les sections agricoles dégageant des excédents, en 19361937, il est favorable à leur utilisation par les sections du commerce et de l’industrie, contrairement aux organisations agricoles. La guerre venue, André Garczynski continue d’animer la Caisse départementale de la Sarthe et la FNCD. Lors de la dernière réunion à laquelle il assiste à Paris, en mai 1943, on débat des moyens de prévenir le déficit du risque maladie. La FNCD, qui refuse d’économiser sur les « petits risques » difficiles à contrôler, espère une meilleure rentrée des cotisations par un renforcement des services administratifs. Elle réclame aussi que les caisses puissent contrôler elles-mêmes les employeurs, ainsi qu’un relèvement du plafond salarial des assujettis. Enfin, elle plaide en faveur d’une augmentation, de 0,45 % à 1 %, du taux de cotisation patronale ainsi que du financement de la retraite des vieux travailleurs par l’impôt. Il s’opère bien un mouvement d’homogénéisation des caisses, préfiguration de la Sécurité sociale.
43En étendant la protection, les Assurances sociales développent amplement la médicalisation de la population française, tout en contribuant de façon indirecte à une profonde transformation des établissements de soins et des hôpitaux ainsi qu’à l’essor d’un réseau de cliniques chirurgicales, souvent animées par des mutualistes39.
Les hôpitaux et le vote de la loi40
44Au xixe siècle, seuls les indigents pouvaient être hospitalisés, selon la tradition d’un accueil caritatif ancien. La loi du 15 juillet 1893 sur l’assistance médicale gratuite (AMG), la Charte de la mutualité (1er avril 1898) et la loi sur les accidents du travail du 9 avril 1898 favorisèrent l’élargissement de la clientèle hospitalière, provoquant des controverses au sein du Conseil supérieur de l’assistance publique, les accidentés du travail et les mutualistes ne pouvant en effet être rangés parmi les indigents. Aussi, le Conseil adopta trois principes : le caractère exceptionnel des malades payants, la possibilité pour les établissements de les admettre moyennant un prix variable, supérieur au coût de revient et l’acceptation, par le ministre de l’Intérieur, de la création de salles de malades payants. Les pouvoirs publics reprirent ces trois principes dans le règlement modèle des hôpitaux le 15 décembre 1899. Le financement public des hospitalisations des bénéficiaires de l’AMG fut également critiqué par les médecins généralistes car il les privait d’une partie de leur clientèle. De plus, en rompant le pacte moral entre le malade et le médecin, il leur enlevait une part de leur prestige social. Ce débat est relancé par les Assurances sociales.
45Le projet initial de Daniel Vincent prévoit seulement que les assurés sociaux aient droit « aux soins médicaux et aux interventions chirurgicales nécessaires41 ». Le projet de 1924 va dans le même sens, tout en admettant implicitement la possibilité d’hospitaliser les assurés sociaux42. Par l’intermédiaire du sénateur Claude Chauveau qui jouera un rôle important dans la mise au point de la loi, la Commission sénatoriale prévoit explicitement l’hospitalisation de ces derniers. « L’assurance maladie couvre les frais de médecine générale et spéciale, les frais pharmaceutiques et d’appareils, les frais d’hospitalisation et de traitement dans un établissement de cure et les frais d’interventions chirurgicales nécessaires43. » La loi de 1928 prévoit de plus que les frais d’hospitalisation seront « contenus dans des limites qui ne dépasseraient pas les tarifs pratiqués dans les établissements hospitaliers de l’assistance publique à l’égard des malades admis sur le régime de l’assistance médicale gratuite ou des accidentés du travail admis sur le régime de la loi du 9 avril 189844 ». Le Règlement général d’administration publique du 30 mars 1929 précise que les assurés sociaux ont le choix entre les établissements publics et les maisons de santé privées. Pour celles-ci, la liberté de choix du praticien est possible, alors qu’elle n’est pas autorisée dans les premiers en raison de leur caractère charitable.
46La loi de 1930 ne prévoit pas de mesures nouvelles relatives à l’hospitalisation des assurés sociaux mais elle oblige les caisses d’assurance maladie à passer des conventions avec les établissements de soins et à supporter les frais d’hospitalisation, abstraction faite des honoraires médicaux, dans des limites ne dépassant pas les tarifs les plus bas des malades payants45. Les Assurances sociales contribuent en effet à lever un paradoxe : jusqu’alors les classes modestes et les classes moyennes inférieures étaient pour la plupart évincées d’un système de soins qui prenait en charge les plus indigents, de même que les personnes à hauts revenus qui pouvaient être admis dans des établissements privés. Les mutualistes ont cherché une solution à ce problème en s’efforçant d’organiser la protection de ces groupes, mettant en place à la veille de la Première Guerre mondiale leurs premiers établissements de soins. Mais la solution mutualiste a aussi montré ses limites puisqu’en dépit de sa progression, en 1914, un Français sur 10 seulement appartenait à une société de secours mutuels. Les Assurances sociales s’adressant à un public beaucoup plus large, la composition du public admis dans les hôpitaux en est modifiée.
47La réforme est appliquée de façon diverse selon les établissements. Certains y voient une source de difficultés. À l’hôpital Saint-Louis de Paris, la loi « a amené un surcroît de travail et une grande complication d’écriture dans tous les services46 ». Plusieurs établissements créent des emplois pour faire face à l’accroissement des formalités. Toujours à Paris, l’Assistance publique constate une nette augmentation des admissions et des consultations. En 1930, 40 % des malades examinés en consultation à l’hôpital Tenon sont des assurés sociaux et cette tendance se poursuit. À Saint-Louis, 25 % des recettes proviennent des Assurances sociales et à l’hôpital Hérold, 16,5 % des consultations et 46,5 % des admissions sont soumises à leur régime.
48Cet afflux pousse les hôpitaux à entreprendre la modernisation de leurs équipements et l’amélioration du confort hôtelier. Selon l’Inspecteur général Sarraz-Bournet, « on ne doit pas oublier que les assurés sociaux ne sont pas considérés comme des indigents, que pour les attirer dans leurs établissements, les commissions administratives se sont appliquées à ne plus mériter le reproche de faire de la médecine d’indigents. Elles ont fait incontestablement un gros effort pour moderniser leurs services, quand elles n’ont pas été amenées à exécuter un programme de constructions nouvelles47 ». Un minimum de confort est nécessaire pour satisfaire les nouveaux admis. À l’hôpital Beaujon, « on ne doit plus, en salle commune, assister à la mort du voisin de lit ». Il faut « créer un état d’esprit modèle dans un hôpital moderne et modèle48 ».
49L’accroissement du remboursement des séjours provoque une révolution. La méthode de calcul des prix de journée reste approximative alors que les recettes augmentent. S’armant des décrets des 7 août 1934 et 13 juillet 1935, le législateur pose le principe d’une révision annuelle du prix de journée et réforme son mode de calcul49. La refonte du financement constitue une étape décisive dans l’évolution du statut des établissements de soins car elle marque une rupture avec la logique caritative. Désormais, l’hôpital est rémunéré pour son activité, il devient une organisation de soins50.
50La loi est floue sur la notion de remboursement des hospitalisations d’autant plus que le Conseil supérieur des Assurances sociales n’a pas encore harmonisé la méthode de calcul du prix de journée. Le Règlement général d’administration publique du 30 mars 1929 encadre le tarif opposable entre le prix de l’assistance médicale gratuite et celui des accidentés du travail. Cette méthode est défavorable aux assurés sociaux. Paul Cibrie, un des principaux représentants du syndicalisme médical, refuse toute amélioration du remboursement des hospitalisations qui reviendrait, selon lui, à inciter les assurés sociaux à se faire soigner dans les hôpitaux. Le Conseil supérieur finit par admettre l’application d’un pourcentage aux tarifs les plus bas des malades payants51 et propose un tarif limitatif équivalent à 70 % de la moyenne des prix de l’AMG pour les trois années précédentes52. Le ministre de tutelle suivra le Conseil le 7 août 1934. En fait, le nouveau système n’est satisfaisant ni pour les assurés, ni pour les établissements de soins. Le 30 novembre 1937, le tarif est relevé à 80 % du prix moyen de l’AMG pour les trois années précédentes mais la nouvelle réglementation laisse une part trop importante à la charge des assurés. Par ailleurs, le principe de la moyenne constitue un mode de calcul incohérent dans une période de forte inflation53. Un rapport préconise un tarif à 80 % du prix de l’AMG de l’année courante, alors que les pouvoirs publics demandent un tarif équivalent à 90 % de la moyenne de ce prix des trois années précédentes54.
51Se pose également la question des accords liant les caisses d’assurances aux établissements de soins, causes de litiges. Dans le Nord, la Commission départementale s’oppose à plusieurs caisses interprofessionnelles au sujet des tarifs de responsabilité hospitaliers qu’elle juge trop élevés. À Rochefort, aucune convention n’a été signée entre la caisse et l’hôpital qui exige le remboursement, par cette dernière, de la totalité du prix de journée, supérieure au tarif de responsabilité55. Le Conseil supérieur des Assurances sociales finit par admettre la compétence des commissions départementales pour discuter le tarif de responsabilité tout en laissant au ministère du Travail le soin de trancher les litiges56. À Argenteuil, la plus importante ville usinière du département de la Seine (70 000 habitants en 1930), les premiers malades se présentent en octobre 1930 et une convention est signée entre la mairie et la CIAS en mars 1931. Pour les responsables de l’hôpital, il s’agit surtout d’un geste de bonne volonté. Ils n’admettent ces populations nouvelles que parce que la loi les y oblige. Si les assurés sont souvent démunis sur le plan économique, ce ne sont pourtant pas des indigents. Initialement, ces derniers ne sont en principe admis que dans des salles réservées. Mais les habitudes se modifient assez vite : en 1930, l’hôpital dispose de 216 lits et assure 800 entrées, quatre ans plus tard, les chiffres sont respectivement de 360 lits et 2 900 entrées ; en 1936, l’hôpital enregistre une augmentation de 65 % du nombre de ses malades. Par ailleurs, l’institution se modernise et commence à disposer d’un personnel qualifié57. Néanmoins, la réticence de la population à fréquenter naturellement ce type d’institution est plus longue à disparaître car son image de mouroir pour les pauvres et les indigents est tenace. Pour la majorité du monde du travail, jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, se soigner à l’hôpital reste un aveu de pauvreté, une obligation humiliante.
52Face à l’opposition radicale de la CSMF, les pouvoirs publics ont dû revenir en arrière pour faire passer l’essentiel de la loi. Ainsi amendée, elle renforce la socialisation de la dépense médicale : 17 % de la population était médicalement couverte en 1914 et 46 % en 1936. Les Assurances sociales contribuent à la modernisation des hôpitaux en accélérant leur ouverture à l’ensemble de la population, légalisée par la loi du 21 décembre 1941. Toutefois, dans la mesure où ce système obligatoire de protection délaisse certaines catégories de salariés, pour bon nombre d’assurés, il reste une loi de sous-protection58.
L’élargissement des prestations
53À travers le bilan de l’activité de la CIAS, il est possible d’esquisser un panorama général des prestations accordées par les Assurances sociales ainsi que des rapports entretenus par ces dernières avec l’assistance, le corps médical et les hôpitaux59.

54Les rapports avec l’Assistance publique commencent par être difficiles. Celle-ci exige de la CIAS le remboursement des frais d’hospitalisation et de consultations des assurés ; de son côté, la Caisse s’interroge sur la durée des hospitalisations. En 1932, après intervention du ministère du Travail, l’Assistance publique, soutenue par le préfet de la Seine, réclame 12 millions de francs à la CIAS. Léon Heller fait effectuer un premier versement de 6 millions et la question ne reparaît plus avant juin 1939. En 1943, on comptabilise 210 000 journées d’hospitalisation, et 180 000 en 1944.
55La signature d’une convention avec les praticiens hostiles au système du tiers payant est envisagée dès juillet 1930. Réaliste, Léon Heller, estime qu’il faudra la faire aboutir par le Comité d’entente. En 1930, le règlement intérieur de la CIAS prévoit une entente directe entre assurés et soignants ainsi que le règlement immédiat aux praticiens. Des « tarifs de responsabilité » – plus élevés dans la Seine (15 francs) que dans la Seine-et-Oise – sont aussi fixés. Mais un mois plus tard, la CIAS s’indigne des prétentions du Syndicat des médecins qui récuse les confrères envoyés par la mutualité et veut limiter le nombre des dispensaires parisiens. À l’issue d’une nouvelle négociation, un accord s’esquisse en novembre 1934, entre l’Union des caisses de la région parisienne et les syndicats médicaux. Depuis novembre 1932 la CIAS et la FNCD ont établi une nouvelle feuille type de maladie. La CIAS prescrit une durée limitée de dix jours de repos, pour éviter que les médecins, en prescrivant de façon automatique deux semaines, ne mettent à mal ses finances. En 1937, la CSMF demande que les assurés sociaux ne soient plus traités dans les dispensaires de la Croix-Rouge, « dont la concurrence inquiète les médecins ». La même année, des praticiens de Seine-et-Oise, hostiles à la réforme de l’Assistance médicale gratuite, se mettent en grève. En 1938, une Commission tripartite interdépartementale – où siègent des représentants des caisses, des médecins et de l’administration – établit les conventions et fixe les tarifs de responsabilité. Cette Commission qui examine aussi les litiges, souffre du manque d’assiduité des représentants des caisses, alors que ceux du corps médical et de l’administration sont présents.
56La maladie représente 9/10e des prestations obligatoires des Assurances sociales. La maternité, qui constitue le reste, prend annuellement en charge 20 000 à 25 000 mères. La maladie étant couverte pour une durée de six mois, se pose la question des assurés non rétablis à l’issue de ce délai. C’est notamment le cas pour les tuberculeux qui, en 1934, en constituent les deux tiers. Ce problème a déjà été soulevé en avril 1931, avant que les droits à une pension d’invalidité ne s’ouvrent en 1932. En avril 1934, la CIAS se résout à prolonger les soins « aux assurés susceptibles de guérison » et en juillet, elle prévoit 10 millions de francs pour les malades toujours atteints après six mois. De juillet 1933 à avril 1934, 1 310 dossiers de ce type sont acceptés sur 1482 présentés.
57En mai 1932, est discuté le cas des assurés chômeurs, pour lesquels rien n’est prévu en cas de maladie. Léon Heller propose à cet égard que les prestations soient normalement versées à ceux qui ont cotisé durant les 240 jours ayant précédé leur mise au chômage. En février 1933, à la question inédite de l’indemnisation des accidents sportifs, la CIAS s’en remet à une jurisprudence future. En septembre 1935, elle estime, suivant l’avis d’Étienne Antonelli, que l’article 4, relatif aux bénéficiaires des prestations, doit s’appliquer aux enfants adultérins et recueillis des assurés, mais sans prestations, ni attribution d’un carnet d’allaitement ainsi que, « après un examen bienveillant », à la « conjointe non légitimement mariée » d’un assuré. La CIAS doit répondre à de nouveaux besoins sociaux, mal maîtrisés et à des situations personnelles délicates. Elle ne sait que faire devant les sportifs à l’heure où le sport de masse fait ses premiers pas et on sent sa gêne devant la situation de femmes marginalisées.
58La CIAS ne fournit pas seulement des prestations obligatoires, car comme le dit Étienne Antonelli, elle courrait alors le risque d’être « avant tout et presque uniquement un service de versement d’indemnités de maladie ». Des prestations facultatives entrent en vigueur à partir de juillet 1932 : la plus importante est l’ouverture d’un centre de diagnostic, sur le modèle de ceux de Nantes et de Nancy, dirigé par le professeur Parisot, défenseur de la médecine préventive et de l’hygiène sociale. Le contrôle médical prend de l’ampleur. En 1932, la Caisse emploie un médecin inspecteur et 17 médecins/contrôleurs, auxquels s’ajoutent les consultations épisodiques, de plusieurs membres de l’Académie de médecine, que l’Inspection des finances juge dispendieuses. En 1935, le coût de ce poste est évalué à 4 % du montant des prestations versées. Les effectifs employés dans ce secteur – 262 personnes en 1935, 298 en 1936, 219 en 1937 et 227 en 1938 – sont pour les trois quarts constitués par les 165 infirmières/visiteuses en activité à cette dernière date. En 1937, 10 cabinets médicaux généralistes fonctionnent quotidiennement, auxquels s’ajoutent des cabinets spécialisés, dont 3 de radiologie60. Les praticiens appelés médecins/contrôleurs, outre leurs fonctions de contrôle, y ont un rôle préventif et curatif. En 1932, 152 000 dossiers sont examinés et 111 000 contrôles effectués par 36 médecins/contrôleurs ; 5 100 enquêtes sont opérées par 25 infirmières/visiteuses. En 1938, 383 000 dossiers sont traités au contrôle médical et 567 000 en 1944 mais la faiblesse des salaires proposés rend difficile le recrutement de médecins-conseils en 1945.
59Les statistiques semblent un bon moyen pour les praticiens rompus à la pratique de la réforme d’améliorer le contrôle médical exercé sur les assurés. Au congrès de la FNCD en mai 1939, le docteur Marx et le médecin-inspecteur de la CIAS Bernier plaident pour la constitution d’un service de statistique médicale, analogue à celui mis en place par la CIAS à Paris et en banlieue. Il recenserait les assurés et les ayants droit, selon le sexe et l’âge, établirait des tables de morbidité, des durées d’hospitalisation et d’incapacité de travail, mesurerait les types de traitements, évaluerait les prix de revient moyen pour détecter les abus. Enfin, en calculant le nombre d’avortements, il permettrait de mieux lutter contre la dénatalité. Mais, en raison de leur pauvreté en personnel, de nombreuses caisses hésitent à s’engager dans cette voie et se contentent de transmettre ces propositions au Comité d’entente. De leur côté, les Unions régionales envisagent de mettre sur pied leurs propres services. La possibilité de siéger dans les conseils d’administration des hôpitaux publics permettra d’exiger des statistiques sur les consultations faites et non enregistrées. Enfin, les exemples alsacien et lyonnais d’un service dentaire, relevés par un administrateur de la CIAS en avril 1934, sont suivis avec l’ouverture d’un cabinet à Paris en mai 1941.
60En 1934, Marcel Martin obtient l’adoption de mesures financières destinées à encourager la prévention : prime de 15 francs au BCG pour tous et à la vaccination anti-diphtérique qui éviterait 4000 morts annuelles chez les 2-6 ans. Lors du vote, seul un administrateur, favorable au respect de la liberté du médecin, s’est abstenu. À l’automne 1940, la CIAS met à l’étude l’organisation d’examens de santé systématiques pour les adolescents. Du printemps à octobre 1941, elle procède à l’examen radioscopique de 167 000 enfants, en collaboration avec les services d’hygiène de la Seine et de Seine-et-Oise ainsi qu’avec l’Inspection médicale de la préfecture de la Seine.
61Les mesures prises par la CIAS en direction des enfants sont votées à l’unanimité. En juillet 1933, des primes d’allaitement aux conjointes des assurés qui auraient dû être financées par les bonis, se heurtent au refus du ministère du Travail, en raison de leur coût trop élevé. Il est vrai qu’à la fin de 1933, elles atteignaient 7 millions de francs. Ce choix est cependant maintenu. Pour le mettre en œuvre, la CIAS, sur la suggestion d’Étienne Antonelli, achète des propriétés. En mai 1935, elle engage 1 million de francs pour organiser des cures d’air estivales en faveur des enfants « déficients » des assurés au chômage. Administrateur de la CGTU, Robert Doury approuve ce choix tout en en déplorant les restrictions (non-gratuité, absence de trousseau, non prise en charge des enfants de chômeurs partiels). Il demande un engagement de la CIAS de 3 millions de francs supplémentaires. En septembre 1935, plusieurs administrateurs se prononcent pour le soutien aux chômeurs partiels. Suivant les conseils d’un médecin ayant montré que 40 % des enfants bénéficiaires de ces cures d’air ont une « déficience avérée », la CIAS envisage de fonder ses propres centres pour organiser des « colonies sanitaires » entre avril et septembre, et pas seulement durant les congés scolaires. De telles structures exigent des investissements dans le contexte défavorable qui suit les décrets-lois d’octobre 1935. Mais la Caisse ne renonce pas. En 1936, des colonies sanitaires sont organisées dans des centres de cures thermales, en faveur de 2 157 bénéficiaires retenus sur 2 400 dossiers. Parmi les lieux de séjour, le Centre de Sées, dans l’Orne, ancien séminaire, est appelé à un grand développement. Acheté au début de 1937, réaménagé, il est dès l’été suivant le premier centre de la CIAS, capable d’accueillir le quart des effectifs. En septembre 1936, la Caisse hérite de la fondation Blum-Ribes (Montreuil-sous-Bois), en liquidation financière. Elle y accueille une trentaine de nourrissons « débiles ». Les acquisitions se poursuivent, avec le château de Fleurines (Oise) en 1937, un ancien hôtel à Saint-Honoré-les-Bains en 1938, puis le Centre d’Ondres (Landes), au début de 1939.
62Répartis en huit centres, 2 410 enfants bénéficient de ces colonies en 1937 et 2 673 en 1938. En 1939, des projets de colonies maritimes et de montagne sont à l’étude. Près de 3 000 bénéficiaires sont attendus pour la saison, en dépit de la réquisition de Sées où sont logés des républicains espagnols. Ils ne seront que 1 800 à s’y rendre. Après la désorganisation consécutive à la déclaration de guerre et au changement de régime, plusieurs centres sont occupés par les Jeunesses pétainistes. En février 1941, près de 300 enfants sont placés dans les centres de la CIAS, en zone Nord et Sud. En novembre 1945, les établissements de Fleurines, Sées, Dammartin, Brolles, ainsi que la pouponnière Blum/Ribes à Montreuil continuent d’accueillir enfants et bébés. Un service d’inspection sanitaire spécifique à ces établissements est envisagé. Au début 1946, un programme d’été est mis sur pied.
63La CIAS subventionne de nombreuses autres œuvres sociales. Dès son ouverture, elle consent, sans véritable projet d’ensemble, des prêts à divers organismes, parmi lesquels les HBM de la Seine. En principe limités aux établissements dont bénéficient les assurés, ils souffrent d’exception : ainsi, celui consenti en 1934, à la Compagnie générale transatlantique pour la construction du paquebot Normandie. En février 1933, une convention est préparée avec l’Office public d’hygiène sociale de la Seine (OPHS), aux termes de laquelle la CIAS s’engage à verser 600 000 francs. En fait, elle attend de connaître son véritable emploi et y renonce en octobre, car l’OPHS est en difficulté. Les subventions sont accordées en échange d’un siège au conseil d’administration des établissements concernés. En avril 1939, la CIAS ayant constaté le mauvais fonctionnement du Service social de Seine-et-Oise, prévoit d’y créer un Office de protection de la maternité et de l’enfance (OPME), analogue à celui de la Seine, qu’elle subventionne. Le même mois, sur la suggestion de Léon Heller, elle accorde une subvention d’1 million de francs à la clinique, dite Fondation du Mont-Valérien. À partir de la guerre, les subventions à ce type d’organismes se font rares.
64La CIAS intervient également sur le plan sanitaire. En février 1933, alors que la Caisse de garantie vient de lui refuser un prêt pour deux sanatoriums, Léon Heller propose la mise en route d’un plan sanitaire complet. Il obtient l’appui des administrateurs syndicalistes qui, à plusieurs reprises, se prononcent en faveur de l’achat d’établissements, plutôt que de prêts et de subventions. En juillet 1933, on décide d’acheter des établissements proches de Paris, pour les cures, le repos et les soins de pneumologie. À partir de décembre 1933, ces achats commencent pour un montant de 12 millions de francs : un château à Gretz-Armainvilliers destiné à servir de maison de repos pour les femmes, un autre à Dammartin-sur-Tigeaux, pour la collapsothérapie, (le pneumothorax), prévu pour 42 adultes, transformé plus tard en maison de repos et de convalescence. En 1938, le château de Brolles, à Bois-le-Roi, ouvre sous forme d’un préventorium pour 115 enfants, et 6 mères avec leurs bambins. L’achat de ces châteaux, toujours décidé à la quasi-unanimité du conseil, heurte certains administrateurs syndicalistes, mal à l’aise devant l’étalage d’une telle richesse foncière.
65En novembre 1937, grâce à ses 120 millions d’excédents dégagés l’année précédente, la CIAS met au point un plan sanitaire de deux ans, axé sur la prévention et destiné en priorité aux centres de cure. Les travaux engagés, avec l’accord du ministère de la Santé publique, à Bois-le-Roi, Sées, Fleurines, Saint-Honoré-les-Bains et Dammartin-sur-Tigeaux, aménagent préventoriums, maisons de repos et de convalescence. Mais ils suscitent des réserves de l’administration de tutelle : en juin 1939, la CIAS s’émeut du fait que le ministère du Travail ait institué une commission pour les suivre. Marcel Martin y voit une intrusion de l’État et Oreste Capocci propose, en signe de protestation, la démission collective du conseil d’administration. La tension retombée quelques mois plus tard, ce plan sanitaire est accepté en mai 1941 par le secrétaire d’État au Travail. En janvier 1946, il est à nouveau question d’un plan sanitaire d’ensemble.
66Les caisses d’Assurances sociales apprennent à coopérer avec d’autres organismes intervenant sur des terrains proches, en particulier celui de l’assistance. Elles dégagent des excédents dès les années 1931-1932, qu’elles commencent à utiliser immédiatement. Selon le ministère du Travail, qui ne rend pas public son mode de calcul, le système permet des rentrées importantes. Redistribuées dans l’assistance, elles sont estimées à 100 millions de francs en 1930-1931, 159 millions en 1932 et 170 en 193361. En 1934, ce soutien se ventile de la sorte :

67Note6262
68Il évolue l’année suivante au détriment de la lutte antituberculeuse et au profit de la création d’hôpitaux. Il est vrai aussi que la notion d’œuvres sociales d’intérêt général reste particulièrement floue, même si elle peut apparaître comme un élargissement des terrains occupés par la protection sociale.

69Note6363
70De 1943 à 1945, les pourcentages des subventions versées par les Unions régionales des caisses d’assurance maladie maternité à des « œuvres d’intérêt commun » varient considérablement.

71Note6464
72Ces variations semblent incohérentes. En particulier, que signifient les rubriques Divers et Compte spécial de santé publique qui absorbent une part très importante – près de la moitié pour l’un, près du quart pour l’autre – de ces excédents ? Tout se passe comme si les Assurances sociales constituaient une sorte de manne financière miraculeuse en ces temps difficiles dans laquelle puiseraient à volonté plusieurs administrations. Essentiellement financée grâce aux excédents des Assurances sociales, l’AVTS contribue à réduire leurs réserves. Durant ces trois années, les Assurances sociales ont été amenées à soutenir des secteurs qui ne relevaient pas nécessairement de leur domaine de compétence.
73En Charente-Inférieure, la caisse départementale signe une convention avec les services de l’Assistance médicale gratuite. Toutefois, comme le constate en 1934 le Conseil général, où les médecins sont influents, les Assurances sociales ne permettent pas de soulager l’AMG, « ce qui n’a rien d’étonnant puisque les assurés sociaux ne sont pas des indigents65 ». Dans l’Hérault, la caisse départementale participe à la prévention, en particulier celle de la tuberculose. Elle travaille de concert avec le Service départemental d’hygiène sociale qui lutte contre les « maladies sociales », tuberculose, maladies vénériennes et infantiles. Mais il n’est pas sûr que les deux organismes coordonnent vraiment leur action. En 1938, une enquête faite à la demande du ministère de la Santé sur l’outillage sanitaire du département montre la modestie de la participation des caisses. « Le Service départemental d’hygiène sociale admet gratuitement à toutes ses consultations les malades assurés sociaux, les surveille à domicile, s’occupe de leurs placements mais jusqu’ici les Assurances sociales [ne lui ont] jamais accordé une subvention quelconque… ce qui est fort regrettable… Leur rôle se borne à participer aux traitements » par le biais des prestations maladies66.
74Dans l’Oise, les dépenses nécessitées par la lutte antivénérienne s’élèvent à 229 772 francs en 1935. Le montant de la subvention du ministère de la Santé est alors de 72 221 francs ; en 1933, il était de 126 000. Les dépenses du Service rural antivénérien – 116 750 francs – que l’État ne soutient plus depuis deux ans ont été largement prises en charge par les Assurances sociales « qui ont versé une subvention de 60 000 francs, atténuant ainsi grandement les effets désastreux de la carence de l’État67 ». La caisse départementale qui dispose alors de réserves a versé 140 000 francs à l’Office départemental d’hygiène sociale, 60 000 francs au Service de prophylaxie antivénérienne, 20 000 francs pour l’enfance déficiente et 81 000 francs pour l’organisation de distributions gratuites de lait aux enfants sous alimentés et chétifs dans les écoles primaires68.
75Malgré la diversité des situations d’un département à l’autre, illustrée par ces quelques exemples, il y a bien eu une forte implication des Assurances sociales dans toutes les régions. Les organismes ont disposé de ressources financières considérables durant le premier tiers de leur existence et sans doute encore importantes par la suite. Par son ampleur, cette nouvelle protection obligatoire a entraîné un changement d’échelle par rapport aux systèmes caritatifs et de protection privée traditionnels. Par ailleurs, réunis pour la première fois dans un même ensemble, les principaux acteurs sociaux ne furent pas insensibles aux initiatives privées encore très présentes : rien d’étonnant si la plupart des responsables voulurent les aider, contribuant à une cohabitation qui n’était pas gagnée lors du vote de la loi.
Notes de bas de page
1 Rapport Croizat, p. 40. Les références complètes de ces rapports sont données dans la note 1 du chapitre 6.
2 Pierre Laroque, « La prévoyance » dans Protection de la faiblesse physique et sociale, Encyclopédie française, section A – Activités et fonctions de l’État, 1935.
3 Rapport Croizat, p. 39.
4 Rapport Jacquier p. 53.
5 Rapport Croizat, p. 40.
6 Rapport Ramadier et Pomaret, p. 58.
7 Rapport Frot, p. 101.
8 Olivier Faure, Dominique Dessertine, La Maladie entre libéralisme et solidarités, 1850-1940, Paris, Mutualité française, 1994, p. 43.
9 AD Ain, 15X1022, recherche de Pierrette Bérard ; CPAM de l’Ain, Des Assurances sociales à la Sécurité sociale, 1995.
10 AD Isère, 42X, recherche de Gilles Emprin.
11 AD Loiret, série X, recherche de Jean-Marie Flonnneau.
12 Jean-Luc Souchet, Texte d’étude sur l’histoire de la Caisse primaire d’assurance maladie de Nantes, Conservatoire national des arts et métiers/Centre régional des pays de Loire, 2001, p. 25 et 42.
13 Isabelle Adamczyk, Le Passage de la Mutualité à la Sécurité sociale dans la Marne. Enjeux politiques, syndicaux et mutualistes, maîtrise, université de Reims, 1989, p. 26-27.
14 Le Perche, 20 mai 1934, recherche de Gérard Bourdin.
15 AD Sarthe, 5X5, recherche de Gérard Boëldieu.
16 Edwige Praca, Les Sociétés de secours mutuels et leur union dans les Pyrénées-Orientales, xixe-xxe siècle, Canet, Trabucaire, 2000, p. 159.
17 AD Hérault, 10 W 390, recherche d’Hélène Chaubin.
18 « La conférence de Marcel Bernard à Péronne », Le Progrès de la Somme, 7 mars 1931, recherche d’Alain Trogneux.
19 AD Somme, KZ853, recherche d’Alain Trogneux.
20 Christian Topalov (dir.), Laboratoires du nouveau siècle. La nébuleuse réformatrice et ses réseaux en France (1880-1914), Paris, Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales, 1999.
21 Certains délégués ouvriers occupant des postes d’encadrement ont des revenus qui excèdent le plafond d’affiliation des Assurances sociales.
22 Michel Bertinot, De Salomon aux ménages prévoyants, Versailles, La Mutuelle les ménages prévoyants, 1994, p. 88-90.
23 Edwige Praca, Les Sociétés de secours mutuels…, op. cit. p. 158.
24 Jean Bennet, Biographies de personnalités mutualistes (xixe-xxe siècles), Paris, Mutualité française, 1987, p. 29.
25 Jean-Luc Souchet, La Mutualité tourangelle, creuset de solidarité, Tours, Mutualité de l’Indre-et- Loire, 2000, p. 135.
26 Jean Maitron (dir.), Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, Paris, les Éditions ouvrières, tome 35, 1989, p. 389 ; Véronique Lefebvre, Histoire de Caisses. L’assurance maladie, de la CIAS à la CPAM de Paris, Paris, CPAM de Paris/Public Histoire, 2001.
27 L’histoire, mal connue du mouvement coopératif durant l’entre-deux guerres, ne permet pas de voir comment s’exerce alors cette collaboration sur le terrain. Cf. Patricia Toucas, sous la direction de Michel Dreyfus, Les Coopérateurs. Deux siècles de pratiques coopératives, Paris, Éditions de l’Atelier, 2005, 432 p.
28 Bruno Ducos, Aux origines de la Sécurité sociale. Les Assurances sociales en Haute-Garonne (1928- 1936), Paris, Association pour l’étude de l’histoire de la Sécurité sociale, 1985, p. 35-38.
29 Rapport du préfet au ministère du Travail et de la Prévoyance sociale, 4 avril 1934, AD Aveyron, 5X6, recherche de Jean-Philippe Marcy.
30 AD Aveyron, 5 X6, recherche de Jean-Philippe Marcy.
31 Ministère du Travail au Directeur des Houillères de la Compagnie des Forges de Châtillon Commentry, 6 septembre 1935 et arrêté ministériel du même jour, AD Aveyron, 5 X6, recherche de Jean-Philippe Marcy.
32 Dominique Durand, « Soixante cinq ans d’actions sociales » supplément au n° 79 de La Mutuelle, journal des fonctionnaires des collectivités territoriales, Paris, décembre 1998.
33 AD Côte-d’Or, 30X, recherche de Jeanne Gillot-Voisin.
34 Dominique Durand, Une histoire de la fonction publique territoriale, Paris, la Dispute, 2004, p. 95-100.
35 Rapport Croizat, p. 43.
36 Selon l’article 71 du projet de loi de 1928, repris dans la loi 1930, est créée une Caisse générale de garantie. Relevant du ministère du Travail, cette Caisse est chargée de gérer un Fonds de garantie et de compensation, « destiné à couvrir les insuffisances annuelles de recettes des caisses d’assurance et à parer à leur insolvabilité », Étienne Antonelli, Guide pratique des Assurances sociales, Paris, Payot, 1928, p. 221.
37 AD Hérault, 10 W 390, recherche d’Hélène Chaubin.
38 Procès-verbaux de la FRCDO (1931-1945), boîte 20/104, archives du Centre régional d’archives de la Sécurité sociale du Mans, recherche de Gérard Boëldieu.
39 Jean-Paul Domin, « L’incidence de la loi de 1898 sur les hôpitaux : l’émergence d’une socialisation de la médecine hospitalière (1898-1940) », dans Michel Dreyfus, Bernard Gibaud, André Gueslin (dir.), Démocratie, solidarité et mutualité. Autour de la loi de 1898, Paris, Economica, 1999, p. 299-311.
40 Ce paragraphe repose, pour l’essentiel, sur les recherches de Jean-Paul Domin.
41 Documents parlementaires, Chambre des députés, annexe n° 2369, AN, F222056.
42 Discussion du projet de loi sur les Assurances sociales, JO -Chambre des Députés, 10 juillet 1924, p. 3329-3340.
43 AN, F22 2061, cité par Claude Chauveau, Rapport au nom de la Commission d’hygiène, de l’assistance, de l’assurance et de la prévoyance sociale du Sénat (1925).
44 Loi du 5 avril 1928, articles 4 et 6.
45 Pierre Poli, Les Répercussions de la législation des Assurances sociales sur l’Assistance publique, thèse de droit, Lille, 1931.
46 Compte moral pour l’année 1930 dans chacun des hôpitaux de l’Assistance publique.
47 Sarraz-Bournet, Rapport présenté à la commission des économies du ministre de la Santé publique, 10 août 1935, AN, F15 4282.
48 Compte moral pour l’année 1935 dans chacun des hôpitaux de l’Assistance publique.
49 Jean-Paul Domin, « La définition du prix de journée dans les hôpitaux publics, développement et professionnalisation d’une organisation de soins (1893-1945) », Actes des sixièmes journées d’histoire de la comptabilité et du management, université Paris-Sud, mars 2000, p. 164-179.
50 Jean-Paul Domin, « Les Assurances sociales et l’ouverture des hôpitaux à l’ensemble de la population : les prémices d’une politique globale de santé publique (1914-1941) », Revue française des Affaires sociales, volume LVI, n° 1, 2002, p. 133-154.
51 Conseil supérieur des Assurances sociales (CSAS), sous-section médico-pharmaceutique, réunion du 24 janvier 1933, AN, F22 2080.
52 CSAS, séance plénière, réunion du 5 mai 1934, AN, F22 2070.
53 Rapport de Monsieur Brouillet, AN, F22 2074.
54 Lettre du ministre du Travail, 22 avril 1938, AN, F22 2080.
55 AD Charentes maritimes, série X, recherche de Patricia Toucas.
56 CSAS, sous-sections juridique et médico-pharmaceutique réunies, séance plénière, réunion des 3 et 5 mars 1934, AN, F22 2070.
57 Archives de l’hôpital d’Argenteuil, recherche de Colette Gachet-Beckers.
58 Louis Picard, « Les rapports entre les médecins et les Assurances sociales (1930-1945). Le vote des lois des 5 avril 1928 et 30 avril 1930 », Actes du Colloque sur l’histoire de la Sécurité sociale (Brest, 1928), Paris, Association pour l’étude de la Sécurité sociale/Comité pour l’histoire de la Sécurité sociale (EHSS/CHSS) 1983, p. 153-171.
59 Archives de la CIAS, archives de la CPAM, recherche d’Alain Monchablon et Odile Zvenigorodsky.
60 Suivez le guide, 1937, brochure publiée par la CIAS.
61 Rapport Jacquier, p. 138.
62 Rapport Frossard, p. 64.
63 Rapport Lebas, p. 57.
64 Rapport Croizat, p. 39.
65 Recherche de Patricia Toucas.
66 AD Hérault, 10 W 390, recherche d’Hélène Chaubin.
67 AD Oise, Xp 2348 et Mp 260/2, recherche de Jean-Pierre Besse.
68 Ibidem.
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