Les différents types de socialisation à l’œuvre dans le recrutement des professeurs du secondaire en Angleterre et en France
p. 17-39
Texte intégral
Introduction
1L’objet de ce chapitre est d’analyser les différentes logiques sociales qui sous-tendent l’accès au groupe professionnel des enseignants du secondaire général en France et en Angleterre (professeurs de collège et lycée). Plus exactement, en mobilisant une analyse comparative et en nous appuyant sur les résultats de plusieurs recherches dont une menée en Angleterre à la fin des années 1980 (cf. tableau 1), nous analyserons comment différents types de socialisations, qui peuvent se combiner entre eux, contribuent à façonner les trajectoires d’insertion professionnelle des personnes qui à un moment de leur parcours biographique ont « choisi » de devenir enseignant et d’accéder à ce groupe professionnel dans les deux pays étudiés. Le recours au concept de socialisation nous permet d’une part de montrer comment ces dernières agissent au niveau de l’insertion professionnelle des prétendants et d’autre part de comprendre les logiques institutionnelles à l’œuvre dans la reproduction de ce groupe professionnel. Dans un premier temps, pour faciliter l’analyse, nous partirons du cas anglais. Ensuite, nous comparerons les résultats avec ceux qui sont obtenus dans les trois enquêtes menées en France auprès des professeurs du secondaire recrutés dans une période comprise entre 1993 et 2006 et nous montrerons que des logiques similaires sont à l’œuvre, bien que les contextes de recrutement et de formation soient historiquement différents (Charles, 2005)1.
2Le rapport élevé à la discipline universitaire est un élément important pour comprendre le choix professionnel effectué par les futurs enseignants du secondaire, et il constitue même pour Jérôme Deauvieau, « le socle commun du mécanisme d’accès au métier enseignant » (Deauvieau, 2005, P. 38). Si cette dimension identificatoire à une discipline est bien réelle dans les parcours qui conduisent des personnes à devenir enseignant du secondaire et peut être saisie au travers des entretiens et des réponses à des questions liées à ce processus d’identification, il reste qu’elle est insuffisante pour comprendre les logiques qui commandent la reproduction du groupe professionnel des enseignants du secondaire général en Angleterre et en France. Comme nous allons le montrer, la mobilisation des concepts de socialisation primaire spécifique et anticipatrice que nous allons décrire brièvement est aussi nécessaire pour saisir les mécanismes d’accès au métier au cours de la période étudiée.
3La socialisation primaire peut être définie comme le processus par lequel un individu (enfant, adolescent puis jeune adulte) acquiert par le biais d’un apprentissage plus ou moins méthodique dispensé par sa famille un ensemble de dispositions (c’est-à-dire une manière de voir le monde et de se voir dans ce monde, un éthos de classe, des valeurs spécifiques à son milieu social et culturel) qui vont s’actualiser à un moment de son parcours biographique et faire en sorte que le métier de l’enseignement qu’il va choisir est alors perçu soit comme très désirable/enviable, soit adapté à ses attentes du moment. Cette définition de la socialisation est assez proche de celle qui est proposée par Durkheim (1980, p. 50) :
« L’éducation est l’action exercée par les générations adultes sur celles qui ne sont pas encore mûres pour la vie sociale. Elle a pour objet de susciter et de développer certains nombres d’états physiques, intellectuels et moraux que réclament de lui et la société politique dans son ensemble et le milieu spécial auquel il est particulièrement destiné […]. Il en résulte de ce qui précède que l’éducation consiste en une socialisation méthodique de la jeune génération. »
4Chez cet auteur, l’éducation
« a donc pour fonction de susciter chez l’enfant : 1) un certain nombre d’états physiques et mentaux que la société à laquelle il appartient considère comme ne devant être absents d’aucun de ses membres ; certains états physiques et mentaux que le groupe social particulier (caste, classe, famille, profession) considère également comme devant se retrouver chez tous ceux qui le forment. Ainsi, c’est la société, dans son ensemble, et chaque milieu social particulier, qui déterminent cet idéal que l’éducation réalise » (Durkheim, 1980, p. 50).
5Nous appellerons socialisation primaire spécifique le fait d’avoir été éduqué dans une famille dont au moins un des parents (père/mère) est ou était salarié du secteur public. Des travaux anciens et plus récents (de Singly et Thélot 1989 ; Charles et Kober, 1996 ; Charles et Clément 1997 ; Audier 2000 ; Charles et Legendre, 2006) ont montré l’importance que pouvait revêtir une socialisation primaire spécifique (appréhendée ici sous la forme d’une variable, c’est-à-dire le fait d’avoir un de ses parents salariés dans le secteur public) dans la détermination des choix professionnels et des modes de vie qui y sont associés. Bien que sous-estimé dans certains rapports ou recherches plus récentes (Obin 2003 ; Rayou et van Zanten, 2004) qui se sont intéressés aux modalités d’accès au groupe professionnel des enseignants du secondaire, nous verrons un peu plus loin que ce concept reste selon nous très important pour comprendre et rendre compte des logiques qui poussent des personnes à un moment de leur parcours biographique à vouloir rejoindre le secteur public et le groupe professionnel des enseignants en France mais également en Angleterre.
6Le concept de socialisation anticipatrice est emprunté à Merton (2001) et à sa théorie du groupe de référence. Nous entendons dans un premier temps le processus par lequel un individu apprend et intériorise les valeurs d’un groupe de référence auquel il désire appartenir. Il faut souligner une des spécificités actuelles des métiers de l’enseignement dans les deux pays étudiés : contrairement à d’autres professions, tous ceux qui y aspirent ont été mis en contacts prolongés au cours de l’enfance et de leur adolescence avec des adultes qui occupaient leur futur métier. Autrement dit, ils ont déjà été fortement imprégnés par le cadre d’exercice de leur future profession. En effet, ils ont été scolarisés entre six et huit ans au minimum à l’école maternelle et à l’école primaire et ils ont effectué également au minimum sept années dans l’enseignement secondaire. Au cours de ces quatorze années, ils ont donc été amenés à rencontrer de nombreux représentants de la profession qu’ils vont vouloir rejoindre à un moment de leur trajectoire biographique2. Ils ont même été soumis à leur action positive ou négative pendant de nombreux jours/heures. En d’autres termes, compte tenu de la durée de la scolarisation en France et en Angleterre, nous pensons que l’attraction pour leur futur métier est aussi liée à la manière dont leur scolarité s’est déroulée et à l’image qu’ils se sont faite du métier d’enseignant à travers la fréquentation de leurs différents professeurs. L’hypothèse, confirmée par les entretiens et les réponses des futurs enseignants à cette question dans les différentes enquêtes mais également par d’autres recherches sur les enseignants du secondaire (Charles et Clément 1997 ; Périer, 2004 ; Deauviau 2005 ; Charles et Legendre 2006 ; Charles 2009 ; Geay, 2010), était celle d’un rapport globalement positif chez ces derniers vis-à-vis de leur scolarité et des différents enseignants qui avaient participé à leur éducation. D’une certaine manière, il était peu probable et logique que des personnes qui auraient gardé globalement un mauvais souvenir à la fois de leurs enseignants et de leur scolarité aient pu être attirées par ce métier. Ainsi, une bonne scolarité à l’école primaire et secondaire (au niveau du vécu quotidien et des résultats scolaires globaux obtenus) est pratiquement nécessaire pour susciter l’envie de rejoindre ce groupe professionnel3. D’une certaine manière, on peut donc dire que les futurs enseignants ont pris leurs anciens professeurs comme modèles ou groupe de référence et qu’ils se sont en quelque sorte identifiés à certains d’entre eux et/ou à la discipline qu’ils enseignaient et dans laquelle ils réussissaient. Chez les futurs enseignants, ce processus d’identification professionnelle au cours de l’enfance et de l’adolescence est relativement important. Le fait qu’une majorité des futurs enseignants français enquêtés ait décidé de le devenir avant l’obtention du baccalauréat montre, entre autres, l’intensité du processus d’identification au groupe professionnel déjà à l’œuvre avant l’accès à l’université et la force d’attraction de ce groupe.
7Cependant, si ces facteurs identificatoires à l’école et ses représentants sont importants pour favoriser les orientations professionnelles des jeunes et moins jeunes vers la profession d’enseignant, ils sont une condition nécessaire mais pas suffisante pour rendre compte pleinement de ces orientations. En fait, il faut faire intervenir ici un autre type de socialisation anticipatrice au métier qui prend différents aspects selon les périodes historiques pour comprendre les forces à l’œuvre dans la logique qui fait se rencontrer deux processus : le processus d’orientation d’individus socialement situés qui sont attirés à un moment donné vers ce groupe professionnel et le processus institutionnel de sélection qui contrôle et filtre les nouveaux arrivants dans la profession. Actuellement, ces socialisations anticipatrices opèrent à travers l’ensemble des activités parascolaires/para éducatives, qui contribuent à l’encadrement des enfants/adolescents hors du temps scolaire à l’école (pionnicat, maître de demi-pension, aide-éducateur) ou en dehors de l’école (animateur de centres aérés, de colonies de vacances, animateur sportif, de musique, soutien scolaire dans une association…) et que les futurs enseignants ont pu effectuer avant leur entrée dans le groupe professionnel.
8Nous allons maintenant montrer dans un premier temps comment, en Angleterre, via la recherche menée sur les enseignants du secondaire recrutés et formés par l’université d’Oxford, nous avons été amenés à objectiver ces deux types de socialisation au sein de la population recrutée. Ensuite, nous verrons qu’ils se retrouvent également dans des proportions sensiblement équivalentes parmi les futurs professeurs du secondaire recrutés par les IUFM jusqu’à la réforme de 2010.
Tableau 1. – Récapitulatif des différentes enquêtes menées depuis 1988 sur les accédants au groupe professionnel des enseignants (lieux, période, publics, méthodes et collaboration éventuels)

La double exigence des recruteurs anglais vis-à-vis des futurs enseignants du secondaire
Quelques précisions sur le système d’enseignement supérieur et les modes de recrutement et de formation des professeurs au moment de l’enquête
9Au moment de la recherche menée en Angleterre, le champ de l’enseignement supérieur est constitué principalement en Grande-Bretagne par les universités, les Polytechnics, les « Colleges of Further Education ». Les Polytechnics étaient de jeunes institutions, créées en 1967 et contrôlées jusqu’à une période récente par les LEA. Ils furent initialement fondés à la fois pour accueillir les étudiants de plus en plus nombreux qui se présentaient aux portes des universités dans les années 1960 mais aussi pour permettre la naissance d’un secteur de l’enseignement supérieur dont les cours/diplômes soient plus orientés vers des applications pratiques et puissent s’adapter plus facilement aux contraintes du marché économiques que ceux délivrés par les universités. Si en 1968, 21 Polytechnics existaient, en 1990, on en trouve 30. Quant aux « Colleges of Further Education », ils peuvent aussi délivrer des formations menant à des diplômes universitaires et préparer des étudiants à devenir enseignants. Cependant, ces collèges, qui comprenaient les anciens collèges techniques, se caractérisaient en général par un enseignement débouchant plus fréquemment vers des diplômes de nature technique (Lawson et Silver, 1978).
10En Angleterre, c’est entre 1974 et 1980 que les modes de recrutement et de formation des enseignants du primaire et du secondaire vont s’unifier. En ce qui concerne les premiers, la formation professionnelle était bien devenue un passage obligé depuis 1925 mais il leur manquait encore une formation de type universitaire. À partir de 1980, ce manque sera en théorie comblé puisque les prétendants à l’enseignement primaire devront avoir suivi des études supérieures et obtenu au minimum une licence (Bachelor of Education, Bachlor of Arts ou Bachelor of Sciences). Quant aux seconds, déjà diplômés de l’université, ils ne pourront plus devenir enseignants en faisant l’impasse sur une formation professionnelle couronnée par l’obtention d’un certificat d’enseignement (le Post Graduate Certificate in Education ou PGCE) et devenue désormais obligatoire à partir de 1974. Avant cette date, seule la possession d’une licence était nécessaire pour enseigner dans une école secondaire, l’obtention d’un PGCE étant facultative. Du coup, à peine la moitié des enseignants issus de l’université avaient reçu une telle formation avant qu’elle ne devienne obligatoire (Judge, 1989).
11Au moment de l’enquête, il y a donc une diversification apparente des voies menant à l’enseignement secondaire. La première voie conduit à l’obtention d’une licence à vocation professionnelle, le Bachelor of Education ou B.Ed qui se prépare en quatre ans et recrute ses candidats sur la base de 2 « A » levels minimum. Ce diplôme a vu le jour en 1967 et ce sont les Polytechnics en premier qui ont pu proposer à leurs étudiants ce type de formation universitaire à vocation professionnelle (primaire et secondaire). La seconde voie recrute des candidats déjà titulaires d’une licence (degree), les forme pendant une année et les conduit à l’obtention du PGCE. Théoriquement, une personne désirant devenir professeur du secondaire peut donc y parvenir soit en préparant un B.Ed, soit après l’obtention de sa licence en obtenant un PGCE. Dans la pratique, les choses sont très différentes, car en 1987, sur l’ensemble des étudiants se destinant à devenir professeur du secondaire, 76,1 % préparait un PGCE et 23,9 % un B.Ed. Quant à la répartition des futurs professeurs du secondaire en formation professionnelle, une majorité d’entre eux est formée par les universités (53 %) et le reste par le secteur public qui comprend à l’époque les Polytechnics et la cinquantaine de collèges d’éducation en charge du recrutement et de la formation des enseignants.
12Pour finir ce rapide tableau, il faut avoir en tête que, contrairement au fonctionnement de la France, les candidats à l’enseignement primaire ou secondaire ne sont pas recrutés sur concours. Il postule dans trois institutions de formation au maximum et si leur dossier est retenu, ils sont convoqués à un entretien. Après celui-ci, une place peut leur être accordée et il peut la refuser. Par ailleurs, une fois qualifiés par les institutions, les futurs enseignants doivent trouver eux-mêmes un emploi sur le marché des professions de l’éducation4 que l’on peut qualifier de semi-libéral, car encadré par l’État. Ils ont cinq ans pour le faire, après cette période, s’ils n’ont pas exercé pendant une année, ils ne sont plus autorisés à enseigner dans une école publique.
L’excellence scolaire des futurs professeurs du secondaire en général et de l’université d’Oxford en particulier
13Le fait de pouvoir étudier le centre de formation des enseignants du secondaire de l’université d’Oxford et les attentes des recruteurs de cette institution située au sommet de la hiérarchie des établissements d’enseignement supérieur de la Grande-Bretagne était donc intéressant pour comprendre le type de personne qu’ils cherchaient à recruter et former à la fin des années 1980.
14Encore plus qu’au niveau national, les enseignants recrutés et issus des classes supérieures et intermédiaires étaient largement surreprésentés par rapport à leur poids dans la population active et la majorité d’entre eux avait eu d’excellents résultats lors de l’obtention de leur diplôme universitaire (Charles, 2005). L’excellence scolaire des recrues du département d’éducation de l’université d’Oxford apparaît quand on compare les mentions obtenues à leur premier diplôme universitaire (licence). Par rapport à l’ensemble des départements d’éducation des 30 universités, celui de l’université d’Oxford s’en distingue par une proportion nettement plus élevée d’étudiants titulaires d’une mention prestigieuse à leur licence (First ou 2.1). Ainsi, pour la période 1987-1989, ce dernier a recruté une majorité de candidats (56 %) dans cette situation, alors que l’ensemble des départements d’éducation des autres universités, n’a pu recruter qu’une minorité d’étudiants titulaires de ce type de mention (39,5 %, soit un écart important de 16,5 points). Cette sur représentation des étudiants détenteurs de bons résultats à leur licence est liée ici en partie à la politique de sélection des recruteurs qui, compte tenu de la position de leur institution dans le champ universitaire, peuvent se permettre de choisir en général les meilleurs candidats à l’enseignement secondaire.
Tableau 2. – Résultats comparés des mentions aux diplômes des étudiants préparant un PGCE dans les 30 départements universitaires d’éducation et le département d’éducation de l’université d’Oxford
Mention obtenue à la licence | Ensemble des départements d’éducation des Universités (Promotions 1986-1989) | Département d’éducation de l’Université d’Oxford (Promotions 1987-1990) |
First (Très bien) | 3,6 | 10,2 |
2. I (Bien) | 33,9 | 45,8 |
Total | 39,5 | 56 |
2. II (Assez bien) | 43,4 | 34,3 |
3rd (Passable) | 9 | 5,5 |
Pass (Passable) | 7,6 | 1,2 |
Others | 2,5 | 3 |
Total | 100 | 100 |
Effectifs | 15 286 | 430 |
Sources : Colonne 1, statistiques calculées à partir des données de l’UCET (Universities Council for the Education of Teachers), First destination survey of students completing University courses initial training for the teaching profession, 1988. Colonne 2 : calculs effectués à partir des données obtenues au département d’éducation de l’université d’Oxford.
15Par ailleurs, la réputation de l’université d’Oxford rejaillissant dans le département d’éducation, ce dernier dans un double mouvement d’une part attire les étudiants caractérisés par une très bonne réussite scolaire et issus de son université ou d’autres établissements supérieurs prestigieux et, d’autre part, détourne la fraction des candidats potentiels pour l’enseignement mais titulaire d’une licence obtenue dans un autre établissement de l’enseignement supérieur moins prestigieux (universités ou Polytechnics à l’époque). Entre 1984 et 1989, parmi l’ensemble des candidats recrutés finalement par le département d’éducation, 22,6 % étaient des étudiants de l’université d’Oxford5. Quant à la proportion des recrues issues des établissements d’enseignement supérieur récents (Polytechnics), pour la période de recrutement comprise entre 1987 et 1990, elle est très faible avec 10 % de l’ensemble6.
16Cependant, si dans un premier temps, les recruteurs du département d’éducation peuvent effectivement se permettre de recruter des candidats caractérisés par de bonnes, voire d’excellentes performances académiques, leurs critères de sélection ne sont pas exclusivement focalisés sur cet aspect bien au contraire. Si pour ne pas déroger à la réputation d’excellence de l’université, ils attachent beaucoup d’importance aux performances scolaires des postulants, celles-ci sont loin de constituer une condition suffisante pour se voir offrir une place. En effet, parmi l’ensemble des candidats diplômés de l’université d’Oxford qui postulera entre 1984 et 1988 pour préparer un PGCE dans le département d’éducation et qui offre donc ici toutes les garanties d’une réussite académique, 44,5 % se verront refuser l’accès au département après avoir présenté leur dossier et passer éventuellement un entretien de sélection.
Tableau 3. – Taux des candidats issus de l’université d’Oxford et acceptés par le département d’éducation de l’université pour devenir enseignant du secondaire
Années | Présentés | Reçus | Reçus finaux | % Reçus/Présentés |
1984-1985 | 149 | 67 | 37 | 45 |
1985-1986 | 79 | 45 | 29 | 57 |
1986-1987 | 75 | 48 | 26 | 64 |
1987-1988 | 78 | 48 | 25 | 61 |
1989-1990 | 78 | 47 | 35 | 60 |
Total 1984-1988 | 459 | 255 | 152 | 55,5 |
Sources : Statistiques obtenues à partir des archives du département d’éducation d’Oxford. Les reçus finaux constituent les étudiants de l’Université d’Oxford qui ont accepté la place qui leur était offerte.
À la recherche des indices d’un engagement pour la profession enseignante
17En fait, ce que montrent les commentaires des recruteurs relevés dans les archives de l’institution, c’est l’attention qu’ils portent au repérage chez les candidats d’indices susceptibles de montrer un intérêt et un dévouement « réel » pour leur future profession et les adolescents auxquels ils vont devoir se consacrer. Si la politique de recrutement du département d’éducation d’Oxford, montre bien l’importance accordée ici aux performances scolaires des candidats, elle indique aussi sa volonté de recruter des agents qui cumulent le maximum d’indices et de gages pour accéder à la profession, comme la familiarisation avec le milieu enseignant et/ou la chose scolaire, un bon rapport à l’école, un investissement dans les activités parascolaires, la pratique d’une activité sportive, musicale ou théâtrale. Sur ce point, les commentaires rédigés à propos des candidats reçus sont assez explicites.
« Ce fut un entretien intéressant, avec une personne compétente et confiante. Elle est très déterminée pour devenir enseignante et a fait tout ce qu’il fallait pour se préparer à le devenir, notamment en consacrant du temps dans une école pendant les vacances universitaires de Noël pour essayer de voir à quoi s’attendre quand on se met du côté de l’enseignant. Dans sa famille, on trouve des enseignants aussi elle sait à quoi s’attendre. Elle est sans aucun doute une étudiante en chimie très compétente, qui selon ses références devrait obtenir une mention très bien (first) à ses examens de fin d’année. Son engagement (commitment) semble provenir d’un milieu très chrétien. Elle est également impliquée dans un club pour jeunes enfants à Edinburgh. » (Candidate, 3 « A » levels, 10/15, licence de chimie, université d’Edinburgh, admise au département d’éducation de l’université d’Oxford pour devenir professeur de chimie.)
« Ses parents sont tous les deux impliqués dans l’enseignement et sa sœur est une étudiante en mathématiques qui suit notre formation. Elle a également été scolarisée dans une école publique (comprehensive school) aussi elle sait certainement ce qui l’attendra. Je la trouve dynamique, pleine d’énergie, enthousiaste et ayant une bonne expression. Je suis sûr qu’elle deviendra une bonne enseignante. » (Candidate, 3 « A » levels, 14/15, licence de mathématique à l’université d’Oxford [2.2], admise au département d’éducation de l’université d’Oxford pour devenir professeur de mathématique.)
« Excellent entretien – un caractère très naturel et sincère, sensible aux besoins des autres. Personnalité chaude mais calme, totalement engagé pour l’enseignement. Apportera considérablement à n’importe quelle école. Il a eu des expériences de travail avec des enfants handicapés et énormément d’expérience d’encadrement avec des jeunes. Intéressé par le sport – joueur de hockey et athlétisme. A répondu de manière réfléchie et avec une honnêteté rafraîchissante. » (Candidat, 3 « A » levels, 11/15, licence de géographie à l’université de Londres [2.1].)
« Entretien très impressionnant. E était détendu. Et a montré son sens de l’humour. Son père est principal d’un collège/lycée (comprehensive school) et il a fréquenté lui-même un établissement de ce type, aussi il sait à quoi s’attendre. Il a souligné l’importance pour les enseignants d’être enthousiaste et je pense que je peux déjà détecter que, quelle que soit l’école qu’il fréquentera, il y apportera une contribution forte et enthousiaste. » (Candidat, 3 « A » levels, 14/15, licence de maths à l’université d’Oxford [First].)
18On le voit, ces indices de l’engagement des candidats pour leur future profession, soulignés et recherchés de manière récurrente par les recruteurs du département d’éducation dans leurs commentaires et appréciations, témoignent en quelque sorte de leurs dispositions positives vis-à-vis de la profession enseignante, de ses contraintes professionnelles futures mais aussi de ses valeurs et de son style de vie. Il ne faut donc pas sous-estimer ici le poids joué par ces propriétés sociales que les agents sont amenés à mettre en avant d’une manière ou d’une autre (activités parascolaires, famille dans l’enseignement, activités sportives et culturelles diverses et variées, reconversion du secteur privé vers le secteur public qui indique un sacrifice financier et montre son envie de se dévouer aux autres…) au cours de l’entretien de sélection. Elles jouent bien souvent un rôle déterminant dans le processus de cooptation. La part prise par la socialisation primaire spécifique (le fait ici d’avoir de la famille ou un de ses parents dans l’enseignement) ou anticipatrice (le fait d’avoir encadré des jeunes à travers différents types d’activités parascolaires et éducatives) dans ce processus est déterminante, notamment dans certaines disciplines, telles les mathématiques, la biologie, la géographie, les langues modernes, qui à l’époque attirent un nombre relativement faible de candidatures. Souvent, à travers elles, un candidat arrive à compenser une réussite scolaire moyenne ou déficiente.
« Mlle B nous est apparue comme ayant une personnalité intéressante et agréable avec un désir sincère de faire carrière dans l’enseignement secondaire. Ses résultats académiques sont solides bien que son potentiel pour devenir enseignante réside plus dans ses qualités personnelles que dans ses capacités intellectuelles (intellectual powers). Son français à l’oral était hésitant car elle ne l’avait pas pratiqué depuis 18 mois. Cependant, elle a travaillé en France comme assistante (dans un lycée). Elle pratique à la fois le sport et la musique. Tout bien considéré, nous avons décidé qu’elle vaut la peine d’avoir une place en dépit de nos doutes sur son français à l’oral. » (Candidate, 3 « A » levels, 9/15, licence de français, université de Nottingham [2.2].)
« Une exceptionnelle mathématicienne à l’école qui trouva les cours à Cambridge difficiles. C’est une personne raisonnée, mature et plaisante qui apportera une bonne contribution à la profession enseignante. Elle a passé du temps à travailler dans un centre pour jeunes à Belfast, sa ville natale. Plus, récemment, dans le cadre d’une association bénévole, elle est intervenue auprès des jeunes en Jamaïque. Au cours de son séjour en Jamaïque, elle a pu travailler avec des enfants qui trouvaient les mathématiques difficiles et elle a trouvé du plaisir à pouvoir les aider. Elle a été responsable de l’association du collège chrétien et a été impliquée dans plusieurs activités sportives. » (Candidate, 4 « A » levels, 20/20, licence de mathématiques à l’université de Cambridge, III [mention la plus basse].)
19De même, les recruteurs ne sont pas insensibles aux reconversions de personnes qui ont tenté leurs chances dans le secteur privé. Le fait que des personnes délaissent ce secteur et ses avantages (financiers) est à leurs yeux un indicateur fort de l’engagement du candidat pour la profession enseignante et ses valeurs spécifiques qui mettent en avant le don de soi pour les autres (travailler pour et avec les autres) et font passer en arrière-plan les avantages matériels.
« Une personne sensible et mature avec le potentiel pour être un très bon enseignant. Après avoir obtenu une brochette de « A » levels avec son établissement scolaire (comprehensive school), il est allé à Cambridge et a obtenu une mention très bien à sa licence d’ingénieur. Ensuite, il est parti travailler avec British Rail comme ingénieur civil. Il réalise que son désir de travailler avec et pour des personnes peut être satisfait avec l’enseignement, d’où sa candidature. Ses expériences de travail avec les jeunes personnes via le scoutisme et des centres aérés montrent un engagement honnête pour l’enseignement. Ses intérêts très divers qui vont du sport au théâtre seront utiles dans l’enseignement. » (Candidat, 3 « A » levels, 15/15, licence de physique à université de Cambridge [First].)
20Sur ce point, et bien qu’ils soient structurés différemment, on observe en Angleterre comme en France, une césure assez nette entre le secteur public et le secteur privé. En Angleterre, c’est d’abord à travers les commentaires des recruteurs que l’on peut constater la force exercée sur des personnes par le fait d’avoir été socialisé dans un univers où les valeurs du secteur public étaient présentes et incarnées par au moins un des parents.
« Une candidate prometteuse. Après des résultats à ses “A” levels décevant, T a totalement fait ses preuves en obtenant une mention très bien en chimie appliquée à l’université de Salford l’année dernière. Elle a commencé un travail à temps plein l’automne dernier. Elle sent maintenant que l’environnement industriel ne lui apporte pas suffisamment de satisfactions et est déterminée à enseigner, une chose qui était envisageable depuis longtemps. Sa mère est enseignante, aussi elle sait ce qui l’attend. C’est une personne vivante qui a eu beaucoup d’expériences avec les jeunes à Liverpool et Salford, notamment en travaillant régulièrement avec des enfants handicapés et dans le besoin. Elle est très impliquée socialement peut-être à cause de ses origines catholiques. Je sens qu’elle a une personnalité positive et de l’enthousiasme pour son sujet qui sera bien reçu en classe. » (Candidate, 3 « A » levels, 6/10, licence de chimie à l’université de Salford [First].)
« Une personne intéressante à interviewer. Elle a l’intention de tourner le dos au monde lucratif de la comptabilité après trois années où elle a essayé d’en sortir. Elle revendique un intérêt ancien et un savoir-faire en science, bien qu’elle soit passée de la physique à la chimie à la fin de sa première année à Bristol. De fait, elle a de bonnes connaissances en sciences et appréciera le défi consistant à enseigner une diversité de sujets scientifiques. Sa famille comprend un certain nombre d’enseignants aussi elle sait tout à fait à quoi s’attendre et est bien au courant des questions éducatives. Personne sportive et bonne communicante. » (Candidate, 3 « A » levels, 11/15, licence de chimie à l’université de Bristol [2.1].)
21Plus généralement, les résultats de l’enquête quantitative menée auprès des futurs enseignants du secondaire de l’université d’Oxford vont confirmer l’importance de la socialisation primaire spécifique7 et de la socialisation anticipatrice parmi ces derniers. Seulement 28,8 % d’entre eux n’ont connu aucune de ces formes de socialisation, par contre plus d’un tiers d’entre eux en a connu deux (36,5 %) ou une (34,9 %).
Tableau 4. – Comparaison des types de socialisation reçus par les futurs enseignants du secondaire formés par l’Université d’Oxford
Type de socialisation reçue | Socialisation primaire spécifique (1) | Socialisation anticipatrice (2) | Angleterre (PGCE) 1988-1989 |
Socialisation spécifique double | + | + | 36,5 |
Socialisation simple (Primaire spécifique) | + | --- | 25,8 |
Socialisation simple (Anticipatrice) | --- | + | 9,1 |
Aucune socialisation spécifique | --- | --- | 28,8 |
Total | 100 | ||
Effectif | 66 |
Source : Enquête Oxford 1988-1989.
(1) A au moins un de ses parents salarié dans le secteur public
(2) A eu au moins une activité para-éducative avec des enfants/adolescents. Pour l’Angleterre, sont compris dans ce type d’activité, le fait d’avoir été animateur de centres aérés/colonies de vacances, d’avoir été Sunday school teachers, d’avoir aidé à l’encadrement d’enfants mentalement ou physiquement handicapés, d’avoir aidé bénévolement dans une école.
Lecture : Parmi les étudiants préparant un PGCE à l’université d’Oxford, 28,8 % n’avait connu aucune socialisation spécifique, 9,1 % avaient eu une socialisation anticipatrice, 25,8 % une socialisation primaire spécifique et 36,5 % pouvait se prévaloir d’une double socialisation (primaire spécifique et anticipatrice).
22Le très fort accent mis ici par les recruteurs du département d’Oxford sur les qualités extrascolaires des personnes recrutées pour l’enseignement secondaire ne peut que surprendre un observateur extérieur français, habitué à l’image du professeur du secondaire auquel on demande depuis des décennies aussi bien au niveau des épreuves du concours, de la formation en CPR8/IUFM qu’au sein des établissements où il exercera de montrer en priorité sa maîtrise des savoirs à transmettre et des techniques inhérentes à cette transmission. Cette demande particulière ne devient compréhensible que si on a en tête l’ensemble des missions professionnelles allouées aux enseignants anglais du secondaire, la nature des missions et le temps de travail réel effectué au sein d’un établissement. En effet, le temps de présence obligatoire dans les établissements scolaires est nettement plus élevé. À l’époque, un professeur anglais à plein-temps doit passer 195 jours dans son établissement pour une durée annuelle de travail équivalente à 1 265 heures. Autrement dit, pour chaque journée passée dans son établissement, il doit y rester au minimum 6 h 30. Un professeur français (capétien) devra être présent au minimum 648 heures dans l’établissement, la période durant laquelle il devra effectuer ses heures d’enseignement s’étalant sur 180 jours (36 semaines9). S’il était présent tous les jours scolaires, son temps de présence dans l’établissement serait alors équivalent à 3 h 40 par jour, soit pratiquement deux fois moins de temps que son collègue anglais.
23Par ailleurs, l’éventail des tâches10 obligatoires attribuées aux professeurs anglais est sans commune mesure avec celui de leurs homologues français. L’analyse comparative des missions assignées aux enseignants de ces deux pays est assez éclairante (Charles, 2005, p. 66-69). Ce qui ressort ici, ce sont les trois types de missions attribuées à l’enseignant du secondaire en Angleterre : d’un côté une mission classique d’enseignement, de transmission des connaissances/savoirs, de l’autre une mission éducative et de socialisation des élèves dont ils doivent s’occuper aussi en dehors de leurs heures de cours, enfin une mission de management de la communauté éducative (recrutement et évaluation des pairs et des autres personnels travaillant dans l’établissement, animation des réunions, encadrement éventuel des équipes éducatives, gestion des absences, etc.). En France, malgré les deux massifications qui caractérisent l’enseignement secondaire depuis 1960 (la mise en place du collège unique, et l’ouverture du second cycle à partir de 1986), c’est le modèle historique du lycée qui s’est imposé, avec une forte division du travail entre les différents acteurs de la communauté éducative (Savoie, 2002 ; Éducation et Formation, 2003). Le modèle professoral dominant s’inspire du professeur agrégé auquel l’institution demande essentiellement de transmettre des connaissances, les questions relatives à la vie scolaire, à l’encadrement des élèves en dehors des cours étant du domaine du conseiller principal d’éducation (CPE) et de son équipe vie scolaire11, quant aux questions liées au management de l’établissement, elles relèvent essentiellement de l’équipe de direction12.
24Du coup, l’insistance paradoxale des recruteurs du département d’éducation d’Oxford pour essayer de trouver des personnes qui détiennent les deux types de qualité requise pour occuper le poste d’enseignant du secondaire devient plus compréhensible car ces derniers ont en tête l’ensemble des missions qui attendent les futurs professeurs lorsqu’ils sont recrutés par un établissement. En soulignant chez les candidats leurs pratiques sportives et culturelles, leurs engagements associatifs ou bénévoles auprès des enfants/adolescents, leur origine familiale liée au secteur public (famille dans l’enseignement notamment), leur renoncement éventuel à une carrière lucrative dans le secteur privé (attachement au service public), ils dévoilent leurs attentes et celles du groupe professionnel des enseignants vis-à-vis des nouvelles recrues. Cette recherche d’indices susceptibles d’exprimer l’engagement des postulants pour la dimension éducative du métier conforte le groupe dans les valeurs spécifiques qui le définissent et dont il peut se réclamer. Il s’agit de former et pérenniser une identité professionnelle. Par ailleurs, le repérage de ces indices chez les candidats par les recruteurs contribue aussi à les rassurer dans leur choix et à restreindre la marge d’incertitude quant à sa pertinence.
Lors d’un entretien avec un professeur du département d’éducation de l’université d’Oxford, chargé du recrutement des futurs enseignants en physique, ce dernier interrogé sur ces critères de sélection, exprima des attentes identiques à celles relevées dans les rapports rédigés sur les candidats par ses collègues en charge du recrutement des futurs professeurs des autres disciplines (chimie, maths, biologie, langues modernes, littérature anglaise, histoire, géographie).
Q : « Quels sont vos critères de sélection ?
– R : Je pense que c’est très difficile de répondre rapidement. Évidemment, nous prenons en compte la qualité de leurs résultats scolaires. Mais c’est plus, je pense, le fait de voir s’ils montrent un intérêt, un engagement pour être enseignant, s’ils ont pu avoir une expérience quelconque de travail avec les enfants. Je pense que c’est très important, mais néanmoins si une personne de 21 ans est sortie directement de l’école et puis a passé trois années à l’université, il se peut qu’elle ait eu beaucoup de difficultés pour trouver du temps pour travailler avec des enfants ou dans ce que nous appelons le travail bénévole (voluntary work). Aussi, je ne pense pas qu’il faille exclure des personnes qui ont été trop occupées par d’autres activités. Mais c’est clairement un indicateur important notamment quand vous regardez le document sur le recrutement de la commission CATE*. Le document de la commission CATE insiste spécifiquement pour identifier ceux qui ont eu une expérience avec les jeunes dans le secteur informel. Par ailleurs, nous regardons avec attention les références pour voir encore si elles indiquent des signes de la personnalité, que ce soient des aspects positifs ou négatifs sur celle-ci. »
* Council for the Accreditation of Teacher ou CATE, commission mise en place en 1984 qui était sous l’autorité du ministère de l’Éducation et de la Science. Cette commission dont les membres étaient nommés par le secrétaire d’état pour l’éducation stipulait de façons précises et selon quels critères les enseignants devaient être formés.
25Les deux types de socialisation objectivée à la fin des années 1980 au sein des futurs enseignants du secondaire formés par l’université d’Oxford se retrouvent-ils parmi les futurs enseignants du secondaire formés par les IUFM entre 1991 et 2006 ? Si c’est bien le cas, quel est le poids/l’intensité de ces deux types de socialisation au sein de cette population et de quelle manière se distribuent-ils ?
Les enseignants du secondaire français : des socialisations également très prégnantes malgré un mode de recrutement très différent
26En France, avec la réforme instituant les IUFM en 1991, les candidats désirant devenir professeur du secondaire peuvent y préparer les concours qui donnent accès au professorat13. Jusqu’en 2010, si formellement toutes les licences sont valables pour se présenter à un des concours, dans la réalité, il est pratiquement nécessaire d’avoir un diplôme (au minimum une licence) correspondant ou relativement proche de la discipline que l’on souhaite enseigner. L’année de préparation au concours proposée par les IUFM n’est pas obligatoire, mais une forte majorité des lauréats l’a effectuée. Pour les futurs agrégés, la préparation au concours se fait à l’université et jusqu’en 2010, il fallait être titulaire d’une maîtrise (master 1) pour la passer.
Le poids des origines statutaires
27Quand on prend en compte la distribution et le poids des salariés du secteur public dans la structure de la population active française, ce groupe professionnel recrute plus fortement qu’il ne le devrait des personnes dont au moins un des parents est salarié de ce secteur. Dans l’enquête de l’IUFM de Créteil, parmi les pères et les mères des enseignants recensés, respectivement 35,2 % et 52,5 % d’entre eux étaient salariés de l’État ou des collectivités locales alors qu’au niveau national, ces taux étaient de 17 % pour les hommes et 29 % pour les femmes (Enquête Emploi 1999, Insee), soit des écarts de 18,2 et 23,5 points. Plus généralement, les résultats de différentes enquêtes menées entre 1993 et 2005 indiquent que le groupe professionnel des enseignants recrute une majorité d’individus dont au moins un des parents appartient au secteur public (cf. tableau 5).
Tableau 5. – Comparaison entre 1993 et 2005 de la proportion des futurs enseignants du secondaire qui ont connu une socialisation primaire spécifique
Type de socialisation | IUFM d’Alsace (1993/4) | IUFM de Créteil (2002/3) | IUFM de Créteil (2005/6) |
Socialisation primaire spécifique dont parent(s) enseignant(s) | 50,9 % | 57,6 % | 62,4 % |
Effectif | 492 | 398 | 488 |
Lecture du tableau : Parmi l’ensemble des futurs professeurs du secondaire recrutés par l’IUFM de Créteil en 2002/3, 57,6 % ont au moins un de ses parents (père/mère) salarié dans le secteur public (27,8 % avaient un de ses parents enseignant).
28De même, les entretiens montrent qu’ils ont été soumis à un processus de socialisation primaire spécifique qui, au moment de leur insertion/conversion professionnelle, les a conduits à trouver plus attractif ce secteur par rapport à celui du privé. Le fait d’évoluer d’un univers familial où au moins un des parents n’est pas ou n’a pas été soumis à l’insécurité de l’emploi et à la concurrence a contribué sans nul doute à rendre le secteur public plus attractif à leurs yeux et à se reconnaître dans ses valeurs (Fougère et Pouget, 2003). Depuis une dizaine d’années, les étudiants dont au moins un des parents appartient à la fonction publique semblent donc montrer une propension plus forte que les étudiants dont les parents sont issus du secteur privé à être attirés et/ou être admis par le secteur public en général et les professions de l’enseignement en particulier.
29Plus généralement, ce qui apparaît ici c’est aussi la force de cette socialisation primaire dans l’orientation professionnelle des futurs agents de l’État étudiés. Dans les familles où au moins un des parents est fonctionnaire, il se transmet souvent à la fois un statut et une culture professionnelle, c’est-à-dire une façon de voir, penser et sentir son travail mais aussi de se représenter soi-même comme agent public ayant un certain rôle à jouer dans la société (rôle qui les différencie très fortement des salariés du privé). Cette façon de voir le marché du travail et de s’y situer, on peut l’observer sous la forme de représentations sociales particulières, voire d’une certaine éthique professionnelle spécifique, exprimée sous le registre de la morale, mais aussi au niveau de pratiques sociales très concrètes.
« Moi, j’ai toujours, j’avais toujours des valeurs qui me rapprochaient plus du public et je me disais que je n’irais jamais dans le privé. Ce qui fait que le jour où je me suis retrouvé dans une entreprise japonaise je me suis dit que je m’étais trompé lourdement parce que je n’avais rien à y faire. Rien ne m’avait jamais préparé à cette idée et je me rendais compte que l’argent qui était la contrepartie du fait d’être là, c’était pas la valeur pour laquelle j’avais fonctionné depuis que je faisais des études. » (Père principal de collège, mère institutrice, un frère au CNED qui dirige un service, bac C à 19 ans, DESS de gestion, obtient son Capes à 27 ans après avoir travaillé un an dans le privé.)
30C’est sensiblement le même discours que tiendra ce futur professeur d’économie qui avant de se rabattre sur l’enseignement avait eu par contre une expérience d’encadrement dans le privé pendant deux ans.
« J’ai travaillé dans une banque et puis je me sentais décalé par rapport à mon éducation. J’ai travaillé peu de temps en fait, deux ans, mais ça suffit déjà pour te marquer, pour que tu voies un peu. En fait, ce que je faisais en termes de fonction me plaisait mais disons que c’était le but ultime de mon travail qui ne me plaisait pas. Je me sentais en décalage, en termes d’utilité sociale et tout. Je me posais plein de questions… On a eu des expériences dans le privé et puis finalement les influences, les motivations personnelles et puis peut-être aussi certainement des influences familiales, parce que moi je suis d’une famille de profs, comme Jean et François [deux autres capétiens], et tout ça nous a fait changer de voie. » (Grands-parents enseignants, père agrégé de mathématiques, mère chargée de mission à l’Unesco, un frère ingénieur, une sœur professeur des écoles, bac B avec mention, DESS d’économie. Salarié deux années dans le privé dans le secteur de la communication, obtient son Capes à 28 ans.)
31Ici, on voit agir la socialisation primaire spécifique comme une force de rappel. Elle est bien souvent à l’origine des reconversions professionnelles chez des personnes (fréquemment des femmes mais pas toujours) qui, attirées à la sortie de leurs études par le secteur privé et ses rémunérations, se sont finalement rabattues au bout d’un certain temps vers le secteur public dans lequel elles se sentaient plus à l’aise dans la mesure où il correspondait plus au style de vie et aux valeurs qu’elles avaient pu connaître à travers un de leurs parents. Par ailleurs, pour certains enseignants, la proximité que constitue le fait d’avoir un de ses parents (ou les deux) salarié(s) dans le groupe professionnel qu’ils vont finalement rejoindre aura parfois eu pour effet paradoxal de restreindre leur choix des possibles et des pensables. Baignés depuis leur enfance dans ce milieu, ils en arrivent à décrire leur insertion professionnelle dans l’éducation nationale comme quelque chose de « naturel », qui va de soi, le secteur privé n’ayant jamais été envisagé comme une alternative vraiment sérieuse. C’est notamment le cas de cette future PE, titulaire d’une maîtrise d’histoire et dont les deux parents sont enseignants et fortement impliqués dans l’action syndicale.
Mais aussi de la socialisation anticipatrice
32En France, globalement, les procédures de sélection pour l’année de préparation aux différents concours portent essentiellement sur un examen du dossier des candidats afin de déterminer s’ils ont un cursus universitaire qui correspond à la discipline enseignée. Ensuite, les recruteurs prennent en compte la qualité du parcours scolaire. Il n’est pratiquement jamais procédé à des épreuves écrites (QCM ou dissertation) pour départager les postulants quand ces derniers sont trop nombreux et les entretiens de sélection sont très rarement pratiqués14. De même, les activités para-éducatives/scolaires ne sont pas prises en considération dans la sélection. Ce qui est recherché ici c’est principalement l’excellence scolaire des candidats qui souhaitent intégrer une des préparations au concours proposées par les différents IUFM/universités. Il va sans dire que, les épreuves des concours menant à l’obtention du Capes et de l’agrégation ne prennent pas non plus en considération les indices d’une socialisation anticipatrice au métier aussi bien aux épreuves écrites qu’aux oraux. Contrairement aux recruteurs anglais, les Français ne recherchent absolument pas chez les candidats les indices d’un engagement pour le métier et cela reste vrai quelles que soient les différentes étapes du processus de leur recrutement. Or, ce qui est remarquable ici dans le cas français, c’est qu’une majorité des futurs enseignants du secondaire a eu au moins une activité para-éducative avant d’obtenir son concours. Ainsi, bien que l’institution ne prenne pas en compte la socialisation anticipatrice comme un de ses critères de sélection des futurs enseignants du secondaire, il est malgré tout fortement présent chez eux. En effet, quelle que soit la période considérée, une majorité des lauréats a connu une socialisation de ce type (cf. tableau 6).
Tableau 6. – Comparaison entre 1993 et 2005 de la proportion des futurs enseignants du secondaire qui ont connu une socialisation anticipatrice
Type de socialisation | IUFM d’Alsace (1993-1994) | IUFM de Créteil (2002-2003) | IUFM de Créteil (2005-2006) |
Socialisation anticipatrice | 54,1 | 54,3 | 53,1 |
Effectif | 492 | 398 | 488 |
Tableau 7. – Comparaison des types de socialisation reçus par les futurs enseignants selon l’ordre d’enseignement, la période de recrutement et le pays d’origine

Source : Colonnes 1 et 5 : enquête Oxford 1988-1990 ; colonnes 2 et 6 : enquête IUFM d’Alsace 1993-1994 ; colonne 3 : enquête IUFM de Créteil 2003 (Capétiens et agrégés uniquement), colonne 4 : enquête IUFM de Créteil 2005 (Capétiens et egrégés uniquement).
(1) A au moins un de ses parents salarié dans le secteur public.
(2) A eu au moins une activité para-éducative avec des enfants/adolescents. Pour l’Angleterre sont compris dans ce type d’activité, le fait d’avoir été animateur de centres aérés/colonies de vacances, d’avoir été Sunday school teachers, d’avoir aidé à l’encadrement d’enfants mentalement ou physiquement handicapés, d’avoir aidé bénévolement dans une école.
Lecture : Parmi les étudiants préparant un PGCE, 28.8 % n’a connu aucune socialisation spécifique, un tiers 9 %,1 a eu une socialisation anticipatrice, 25,8 % une socialisation primaire spécifique et 36,5 % pouvait se prévaloir d’une double socialisation (primaire spécifique et anticipatrice).
33En définitive, comme pour les professeurs du secondaire anglais étudiés, et quelle que soit la période considérée, on constate que seulement une petite fraction des futurs enseignants du secondaire n’a pas été socialisée de manière spécifique en amont (cf. tableau 7). Quelle que soit la période considérée, ils ne sont respectivement que 25,3 % et 20,3 % et 19,9 % dans cette situation. Tous les autres ont connu une socialisation spécifique double (respectivement 29,5 %, 30,7 % et 35,3 %) ou simple. Ainsi, 20,6 % et 24,4 % et 27,1 % peuvent se prévaloir uniquement d’une socialisation primaire et 24,6 %, 23,6 % et 17,8 % seulement d’une socialisation primaire anticipatrice.
Des logiques analogues dans les deux pays malgré des histoires spécifiques
34Quand on compare maintenant le poids respectif des différents types de socialisation à l’œuvre dans la détermination des dispositions conduisant des personnes à devenir enseignant du secondaire en France et en Angleterre, on est ici frappé par les analogies qui émergent entre ces deux pays15. Ainsi, chez les professeurs du secondaire de ces deux pays, une fraction importante n’a connu qu’une socialisation primaire spécifique puisqu’ils sont 25,8 %, 20,6 % et 23,6 % et 27,1 % dans cette situation. D’un autre côté, les futurs professeurs du secondaire de l’université d’Oxford sont plus souvent caractérisés par une double socialisation que leurs pairs d’origine française sauf pour la dernière période : 36,5 % contre 29,5 % et 30,7 % et 35,3 % en France. Par contre, ils sont nettement moins nombreux à n’avoir connu qu’une socialisation anticipatrice (9,1 % contre 24,6 % et 23,6 %). Par ailleurs, la prise en compte explicite dans le processus de recrutement des futurs professeurs du secondaire anglais des activités para-éducatives qu’ils ont pu effectuer avant de postuler ne semble pas renforcer ici le poids de cette socialisation anticipatrice dans ce processus. En effet, chez les professeurs du secondaire anglais recensés 45,6 % d’entre eux ont connu une socialisation anticipatrice contre 54,1 %, 54,3 % et 53,1 % chez leurs pairs français. Cependant, compte tenu de la spécificité du département d’éducation de l’université d’Oxford et de la position dominante occupée par cette université dans le champ de l’enseignement supérieur, les étudiants recrutés par ce Département sont en fait très proches au niveau de leurs propriétés sociales et scolaires des étudiants français qui vont devenir agrégés. D’une certaine manière, il est donc plus juste de les comparer avec ces derniers. La comparaison montre alors que respectivement 32,5 % 35,9 % et 39 % des agrégés ont connu une socialisation anticipatrice en 1993-1994, 2003-2004 et 2005-2006, soit des écarts de 13,1, 9,7 et 6,6 points avec leurs pairs d’Oxford. Il semblerait bien ici que la prise en compte explicite de la socialisation anticipatrice dans les critères de sélection des recruteurs du département d’éducation d’Oxford n’ait pas été sans effet sur les propriétés sociales de leurs recrues.
35On le voit dans ces deux pays, l’accès au groupe professionnel des enseignants répond à des logiques particulières dans lesquelles interviennent à des degrés divers d’une part deux types de socialisation spécifique qui orientent des individus vers ce groupe et, d’autre part, des institutions en charge du recrutement, qui selon leur position dans le champ de l’enseignement supérieur ont également leur mot à dire sur le type de recrues qu’elles souhaitent accueillir et former à un moment donné. La place occupée par les institutions dans le processus de cooptation des pairs, notamment les critères de sélection qu’elles sont amenées à mettre en place explicitement pour choisir leurs recrues ne sont pas sans conséquence sur les droits d’entrée dans un groupe professionnel qui prévalent à un moment donné. Pour comprendre les logiques sociales qui conditionnent la reproduction du groupe professionnel des enseignants à un moment donné, il nous paraît donc essentiel d’analyser le processus dialectique qui conduit d’une part des individus à vouloir devenir enseignant et à lutter entre eux pour rejoindre ce groupe et d’autre part les logiques institutionnelles à l’œuvre dans la sélection des recrues. Dans les deux pays étudiés, nous pouvons constater le poids joué par la socialisation primaire spécifique (la transmission statutaire) et la socialisation anticipatrice dans ce processus. De même, les institutions responsables du recrutement et de la formation des enseignants jouent aussi un rôle actif à jouer dans la définition des propriétés sociales des individus qu’elles souhaitaient recruter16.
36Si l’identification disciplinaire (« l’amour » de la discipline et/ou l’envie de l’enseigner) est bien un élément indispensable pour comprendre les logiques à l’œuvre dans le processus d’orientation vers les professions d’enseignants du secondaire, il ne faut pas oublier d’une part que les conditions de cette identification sont très inégalement distribuées chez les étudiants compte tenu des types de scolarisations différenciés qui les caractérisent. D’autre part, elle est aussi partie liée avec les socialisations « primaire spécifique » et « anticipatrice » qui tiennent également leur place dans ce processus. Autrement dit, si l’identification disciplinaire est bien une condition nécessaire qui a toutes les apparences d’une explication « naturelle » facilement intelligible pour la compréhension des trajectoires menant au professorat du secondaire, elle est loin de constituer à elle seule une condition suffisante capable d’expliquer les raisons qui poussent des individus à vouloir enseigner la discipline qu’ils/elles ont étudiée à l’université et qu’ils/elles ont appréciée. La mobilisation des concepts de socialisation primaire spécifique et anticipatrice garde ici toute son importance pour appréhender la manière dont se construisent les trajectoires menant au professorat du secondaire et le processus identificatoire à la discipline. Chacun à leur manière, ces deux types de socialisation vont contribuer à favoriser, renforcer ou construire en partie chez des individus l’émergence de cette identification disciplinaire qui les poussera à un moment de leur trajectoire biographique à vouloir rejoindre le groupe professionnel des enseignants du secondaire.
37Compte tenu des logiques à l’œuvre dans la reproduction du groupe professionnel des enseignants, logiques que nous avons essayé d’objectiver ici et qui montrent l’importance des socialisations spécifiques dans ce processus de reproduction, on ne peut que constater sa fermeture relative et le poids de certains déterminismes sociaux qui pèsent actuellement sur cette reproduction. Par ailleurs, si pour les personnes issues des milieux populaires, l’accès au groupe professionnel est nettement moins fermé par exemple que celui des professions médicales en France, il faut souligner, l’importance que joue la socialisation anticipatrice chez ces personnes dans leur insertion professionnelle, car elle leur permet tout en finançant leurs études supérieures de se rapprocher d’un univers socialement éloigné. Du même coup, elle rend possibles et pensables des choix professionnels qui, sans elle, seraient restés dans le domaine de l’onirisme social. Enfin, dans le même ordre d’idées, il faut également insister sur le rôle déterminant joué par l’État et les politiques gouvernementales pour faciliter l’accès ou non aux activités parascolaires génératrices de socialisation anticipatrice. À cet égard, l’ancien système des postes de surveillants qui prévalait à cette époque, de même que la création éphémère du statut d’aide éducateur, ont joué ici un rôle essentiel en permettant à certaines personnes de se placer dans des dynamiques de mobilité sociale ascendante (Cadet et al., 2004 ; Charles 2006).
Notes de bas de page
1 L’analyse comparative qui mobilise ici deux pays dont les modes de recrutement des enseignants et la conception du métier se distinguent fortement est intéressante, car elle permet de montrer que, malgré ces différences et des temporalités d’investigation non synchroniques, les deux types de socialisations spécifiques objectivées étaient bien présents à des degrés divers chez les futurs professeurs au moment des enquêtes. Le fait que l’on ait pu objectiver ces socialisations à partir de 1998 en Angleterre et ensuite tout au long d’une période comprise entre 1993 et 2006 en France montre l’intérêt qu’il y a à mobiliser ces notions pour mieux appréhender à un moment donné les processus de reproduction de ce groupe professionnel. Bien que les modalités de recrutement et de formation des enseignants aient peu évolué entre 1998 et aujourd’hui en Angleterre, seule une nouvelle enquête serait à même de montrer si les résultats objectivés à cette époque sont toujours valables.
2 Pour ceux dont au moins un des parents au minimum est déjà enseignant, cette connaissance de l’univers enseignant est redoublée puisqu’ils ont également la vision de cet univers à travers celle de leur père/mère. Ils en connaissent donc assez intimement les côtés positifs et négatifs.
3 Cependant, il faut garder à l’esprit que tous les élèves qui gardent un bon souvenir de leurs professeurs et de leur scolarité n’ont pas voulu et ne sont pas devenus enseignants. Par contre, pour le devenir, ce rapport positif est pratiquement indispensable.
4 Ce système est très proche de celui des fonctionnaires territoriaux en France. Ces derniers, une fois qu’ils ont obtenu leur concours et qu’ils ont été formés, ont trois ans pour trouver un poste et conserver les bénéfices de leur formation et de l’obtention de leur concours. Ces deux éléments leur donnent le droit de postuler pour les postes auxquels ils sont nouvellement qualifiés.
5 Statistique calculée à partir des données obtenues dans les archives du département d’éducation d’Oxford.
6 Taux obtenu à partir des données des archives du département d’éducation d’Oxford. Le clivage entre les universités et les Polytechnics était déjà bien marqué puisqu’en 1980, sur l’ensemble des étudiants préparant un PGCE dans les universités, seulement 8,6 % provenaient d’un Polytechnic (Patrick et al., 1982, p. 25).
7 Parmi les étudiants du département d’éducation d’Oxford préparant un PGCE en 1988-1989, 36,4 % avaient au moins un de leurs parents enseignant. Ce taux est nettement plus élevé que celui trouvé dans l’étude portant sur l’ensemble des étudiants préparant un PGCE dans les universités d’Angleterre et du Pays de Galles en 1979-1980 (n = 4 348) où il atteignait à l’époque 23,8 %, soit tout de même pratiquement un quart des étudiants. (Source: The structure and process of initial teacher education within universities in England and Wale, op. cit., p. 20.)
8 Centre pédagogique régionaux, institutions chargées de la formation pratique des professeurs d’enseignement général (Capes, agrégés) avant la création des IUFM.
9 Nous nous basons sur l’horaire d’un capétien qui équivaut à 18 heures d’enseignement par semaine sur une année scolaire qui compte 36 semaines.
10 Dans un autre type de registre, on pourrait parler de référentiel de compétences ou de devoirs professionnels.
11 Il reste que dans certains établissements, les professeurs bien souvent poussés par la nécessité, sont obligés de s’emparer des missions éducatives et de s’investir dans des activités parascolaires pour fonctionner normalement. Par ailleurs, certains enseignants français, compte tenu de leur trajectoire biographique antérieure, sont amenés à mettre en avant « naturellement » cette dimension éducative dans leur enseignement et au sein de l’établissement.
12 En Angleterre, les fonctions de conseiller principal d’éducation ou de surveillant n’existent pas dans les établissements du secondaire. L’équivalent du poste de CPE est occupé par le « responsable d’une année » ou « Head of the Year », professeur qui enseigne souvent à mi-temps et qui a la charge de tous les élèves d’une année donnée. Parmi les autres fonctions rémunérées occupées par les professeurs, on trouve également les chefs de département (Head of the Department) qui coordonnent et supervisent le travail des professeurs d’une discipline donnée. Ils sont également responsables du travail effectué par les professeurs de leur département.
13 Contrairement aux concours menant au professorat des écoles qui sont académiques, les concours du secondaire sont nationaux. C’est-à-dire que les lauréats, une fois leur formation achevée avec succès, peuvent être affectés selon les besoins du service dans une académie déficitaire.
14 Sauf pour le concours de CPE où certains IUFM devant le nombre de candidats importants et leur capacité d’accueil limitée procèdent à une sélection écrite suivie d’un entretien et d’une analyse du dossier des candidats où les activités para-éducatives sont prises en compte dans les critères d’admissibilité.
15 C’est le même type de question qui a été posée aux futurs enseignants dans les enquêtes menées en France et en Angleterre. Ce qui nous a permis la comparaison des résultats et l’élaboration du tableau 7.
16 L’intensité de ce rôle dépend entre autres du contexte politique et démographique. Dans ce dernier cas de figure, quand le groupe professionnel des enseignants doit se renouveler fortement et rapidement, les critères de sélection des institutions peuvent s’assouplir pour faire face à la demande d’enseignants.
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La socialisation professionnelle des enseignants du secondaire
Ce livre est cité par
- (2014) Professeurs débutants. DOI: 10.3917/puf.peri.2014.01.0183
Ce chapitre est cité par
- (2014) Professeurs débutants. DOI: 10.3917/puf.peri.2014.01.0183
- Delcroix, Céline. (2017) Devenir enseignant-e du premier degré à Créteil. Spirale - Revue de recherches en éducation, N° 60. DOI: 10.3917/spir.060.0089
- Charles, Frédéric. Grövel, Angèle. (2020) Devenir élève officier de la Marine marchande : socialisations et dispositions sociales d’accès au métier. Carrefours de l'éducation, n° 49. DOI: 10.3917/cdle.049.0239
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