Les trois aspects politiques du pèlerinage de Lourdes
p. 199-207
Texte intégral
Lourdes, sanctuaire des malades, lieu du spectacle de la souffrance
1Si le nom de Lourdes rappelle tout d’abord l’apparition de la Vierge et la guérison miraculeuse, ces deux sujets sont prioritairement traités dans les recherches sur Lourdes, tandis que les études anthropologiques sur le pèlerinage restent lacunaires. En fait, en arrivant pendant la saison du pèlerinage, c’est la présence prédominante des malades qui frappe. Le guide de tourisme Michelin de l’année 1980 décrit le site de Lourdes comme suit :
« Lourdes, ville religieuse de notoriété universelle, prend tout son caractère pendant les mois d’été, à la saison des pèlerinages. Les amples cérémonies, les processions, les malades que soulève une ardente espérance, lui donnent son climat spirituel1. »
2Quant au Manuel des Pèlerins de l’année 1992, publié sous la direction de l’Association Nationale des Directeurs Diocésains de Pèlerinage, on y lit les phrases suivantes sous la rubrique des « malades » :
« Dans nos villes et nos villages, les malades existent, mais on ne les voit guère. À Lourdes, on voit les malades, ils sont pèlerins avec nous. Ne les regardons pas avec curiosité, ne les photographions pas, mais essayons de les rencontrer fraternellement2. »
3En effet, Lourdes est souvent critiquée à cause de son « exhibition de la souffrance3 ».
4Dans cette communication, j’essaierai d’examiner les trois aspects « politiques » du pèlerinage pour le sanctuaire des malades, en distinguant trois étapes historiques : premièrement, la « politique » comme l’affaire d’État (des années 1870 aux années 1940), deuxièmement, la « politique » comme délibération sur le bien commun (des années 1880 aux années 1940), troisièmement, la « politique » identitaire (the identity politics) des minorités (des années 1950 à nos jours).
Les trois étapes historiques du pèlerinage des malades
Le début du pèlerinage des malades : offrir la souffrance pour le salut de la France
5C’est le Pèlerinage National, dirigé par les pères de la Congrégation des Augustins de l’Assomption et organisé par l’Association de Notre-Dame de Salut, qui a initié ce spectacle de la souffrance tel que nous le connaissons aujourd’hui, en lançant le premier pèlerinage des malades en 1874. Dans le Manuel-Souvenir du Pèlerinage National de l’année 1929, on explique les visées du Père Picard, fondateur du Pèlerinage National, comme suit :
« Il [Père Picard] avait étudié le plan d’une vaste Ligue catholique pour la défense de l’Église [...] ses associés seront toujours prêts à défendre les droits de l’Église dans la société [...] dans le même esprit, s’établit une humble association de dames qui fut d’abord et surtout association de prières et d’œuvres sociales, et devait peu à peu créer ou susciter toutes sortes d’organisations admirables : mouvements de foi et de pénitence pour le pays, pétitions pour les droits de Dieu et de l’Église, pèlerinages publics, œuvres de presse, Congrès pour l’enseignement, secours aux écoles et aux patronages, etc. Ce fut l’Association de Notre-Dame de Salut4... »
6Dans la France des années 1870, ceux qui s’opposaient au régime républicain et qui désiraient le retour à l’Ancien Régime, étaient activement partis en pèlerinage à Chartres et surtout à Paray-le-Monial, deux sanctuaires nationaux de la France catholique. À l’époque, les républicains arboraient leur conception de l’histoire en tant que lutte pour la liberté et l’égalité, qui corrige un passé marqué par les inégalités sociales, accomplit les promesses de la Révolution dans les douleurs de l’accouchement et réalise un avenir fondé sur les principes de liberté et d’égalité. Par contraste, les partisans de l’Église et de l’Ancien Régime interprétaient la Révolution française comme un châtiment infligé par Dieu, à cause de la désobéissance du roi de France qui n’avait pas exécuté le contrat avec le Christ du Sacré-Cœur. C’est donc pour demander pardon à Dieu et pour obtenir le salut de la France, c’est-à-dire le rétablissement du royaume catholique, que ces contre-révolutionnaires ont multiplié les pèlerinages. Autrement dit, le pèlerinage était le moyen de se sentir appartenir à un « nous », à un destin commun marqué par la culpabilité passée, un présent de souffrance et la rédemption future.
7Le pèlerinage des malades du Pèlerinage National s’est justement situé dans ce contexte historique. Les membres de l’Association de Notre-Dame de Salut se sont vus forcés d’aller chercher des pauvres-malades auprès de la classe ouvrière afin de les conduire gratuitement à Lourdes par souscription. Le Père Vincent de Paul Bailly a expliqué le but de ce pèlerinage dans un rapport général annuel du 2 février 1881, intitulé La rançon de la France :
« La Vierge du Salut vous a proposé alors, au lieu des souffrances volontaires, qu’on offre si maigrement, de payer la rançon avec les souffrances involontaires de la maladie, vous demandant d’élever ces douleurs au rang illustre des pénitences volontaires par les sentiments généreux donnés aux malades [...] Il fallait des souffrances terribles [...] L’accroissement des malades, [...] l’accroissement des miracles [...] nous font espérer que Notre-Dame de Salut a trouvé là notre rançon pour l’offrir à son Fils5. »
8Ce scénario du salut s’appuie sur les deux conceptions : primo, la souffrance innocente des ouvriers pauvres, victimes d’un système social injuste, possède le même pouvoir rédempteur que la douleur du Christ subie sur la Croix ; secondo, la guérison miraculeuse est un signe que Dieu accepte la souffrance en offrande et qu’il promet aux fidèles le salut de la France. La pratique des pèlerinages des malades incarnait ces conceptions et, en même temps, visait à former un « nous » national en accueillant des pauvres malades ouvriers et en leur donnant un rôle important dans l’histoire du salut de la France. Le pèlerinage des malades, rite pour le salut de la France, venait ainsi contester la conception historique des républicains et revendiquait l’authenticité du « nous » catholique face à celui des républicains. L’enjeu était de donner forme à un groupe national et de déterminer une exégèse officielle de sa propre histoire, à savoir de son identité.
9Le nombre des malades du Pèlerinage National a rapidement augmenté, atteignant en 1880 le chiffre de 959 – qui deviendra la moyenne – et les pèlerinages diocésains ont suivi son exemple. Dans un article intitulé « Notre-Dame de Lourdes en 1880 », paru dans les Annales de Notre-Dame de Lourdes, bulletin du sanctuaire, on trouve des phrases suivantes :
« Le pèlerinage de Notre-Dame de Lourdes a subi, surtout depuis trois ans, une de ses transformations les plus grandes et les plus touchantes [...] cette année, un pèlerinage n’eût pas paru complet, sans les malades qui en sont devenus, d’une manière générale, le complément indispensable et les joyaux... Le meilleur moyen et le plus court de refaire les familles, les paroisses, serait un pèlerinage à Lourdes6... »
10Il indique que la principale préoccupation des pèlerinages diocésains n’a pas été de sauver la France mais de réactiver la vie paroissiale. Au delà de cette différence, cependant, on distingue le même intérêt pour la création d’une identité collective.
Les appels à la société contemporaine de l’Hospitalité Notre-Dame de Salut et de l’Hospitalité Notre-Dame de Lourdes : de « Noblesse oblige » à « être disponible »
11L’antagonisme entre les républicains et les partisans de l’Église catholique, dont l’enjeu n’était ni plus ni moins que la capacité d’encadrement de la vie quotidienne des « Français », a pris fin avec la séparation de l’Église et de l’État et la politique de l’Union sacrée pendant la Première Guerre Mondiale. Cependant le pèlerinage des malades de Lourdes n’est pas tombé en décadence. Au contraire, il s’est développé et a pris une nouvelle tournure. C’est l’Hospitalité de Notre-Dame de Salut qui lui a donné son nouveau visage.
12Au début du pèlerinage des malades, les religieuses des Petites Sœurs de l’Assomption et les membres des Dames Servantes des Pauvres, association créée pour assister la première, soignaient les malades. Mais dans les années 1880, quand le nombre des malades inscrits au Pèlerinage National a vivement augmenté, il est devenu nécessaire d’organiser un groupe des bénévoles qui s’en chargerait au quotidien, d’où la naissance de l’Hospitalité de Notre-Dame de Salut. Son origine a été expliquée dans un ouvrage d’André Rebsomen, Cinquante ans d’Hospitalité (1880-1930), comme suit :
« Pendant ce temps, raconte le R. P. V. de P. Bailly, deux fils des Croisés, MM. de l’Épinois et de Combettes du Luc [...] furent émus : ils allèrent trouver la Direction :
“Voulez-vous nos services ?”
“Oui, soyez les domestiques des pauvres.”
Ils reçurent, pendant trois jours, le baptême du feu des serviteurs de la charité. Et à la fin du Pèlerinage, suivant leur expression, ils étaient empoignés.
“Si vous le voulez... nous serons une armée. Nous ferons comme les Chevaliers Hospitaliers de Saint-Jean pour les malades de Jérusalem. Voulez-vous bénir notre recrutement et nous accueillir comme les Frères du Salut ?”
“Voulez-vous obéir ?”
“De tout cœur.”
“Eh bien ! soyez bénis et travaillons ensemble”7 ! »
13Il s’agit d’une citation de mémoire du comte de Beauchamp, président de l’Hospitalité de Notre-Dame de Lourdes à cette époque. Cette anecdote montre que l’Hospitalité de Notre-Dame de Salut a eu pour but le rétablissement d’une sorte d’ordre de chevalerie. Il était spécifié dans ses statuts que « les personnes de la classe élevée doivent donner en France l’exemple du dévouement et du sacrifice8 ». Ainsi ses membres ont été d’abord recrutés parmi les hommes de la haute société et son objectif a été de restaurer le lien social traditionnel entre les deux classes séparées et opposées, les riches et les pauvres, en conformité avec le principe de « Noblesse oblige ».
14L’Hospitalité a été donc créée non seulement au profit des malades assistant au Pèlerinage National mais aussi pour le bienfait de la justice sociale. En étudiant les notices nécrologiques de ses membres, groupées dans un livret en 1904, on remarque que ces derniers appartenaient souvent aux trois organisations suivantes : la Société de St. Vincent de Paul, l’Œuvre des Cercles catholiques d’ouvriers et le Tiers Ordre franciscain. Ces trois organisations relèvent du courant du catholicisme social, dont les préoccupations ont convergé vers les problèmes de la pauvreté qui ébranlaient alors la société française. En opposition à la voie républicaine qui allait tenter d’y répondre par des secours économiques dans le cadre d’œuvres sociales exécutées par l’État-providence, certains partisans du catholicisme social ont entrepris de les résoudre selon la morale communautaire qui soutenait les services publics sous l’Ancien Régime. Ils ont considéré que l’activité charitable exercée par les gens de la haute société unirait des classes inégales, en nourrissant des sentiments positifs les unes pour les autres. L’activité de l’Hospitalité de Notre-Dame de Salut a été conçue comme un acte de charité et c’est pourquoi elle devait être une organisation non pas de femmes mais d’hommes ayant des responsabilités sociales.
15Cependant, à mesure que les années s’écoulaient, ces préoccupations politiques se modifièrent : d’abord du fait de la participation importante des femmes à l’Hospitalité de Notre-Dame de Salut ; puis de l’adoption de ce système d’hospitalité par des pèlerinages diocésains dans les années 1890 ; enfin, à partir de 1885, sous l’impulsion de la fondation de l’Hospitalité de Notre-Dame de Lourdes sous la direction des pères du sanctuaire. Ces trois raisons mettent en lumière la diversité des membres des hospitalités. L’intention première des initiateurs de l’Hospitalité de Notre-Dame de Salut a ainsi été dépassée. La fondation des branches féminines de l’Hospitalité de Notre-Dame de Salut a modifié sa mission politique. Avec la participation des gens du peuple et de la classe ouvrière aux hospitalités, l’Hospitalité ne pouvait plus maintenir son rêve de réconciliation des classes selon l’idéal paternaliste de « Noblesse oblige ».
16Quant au fonctionnement de l’Hospitalité de Notre-Dame de Lourdes, il était essentiel non seulement aux activités des hospitalités mais aussi au monde du pèlerinage des malades de Lourdes. Tandis que les membres de l’Hospitalité de Notre-Dame de Salut et des hospitalités diocésaines n’avaient qu’à supporter leurs propres malades, l’Hospitalité de Notre-Dame de Lourdes, relevant non pas de chaque groupe de pèlerinage mais du sanctuaire, a connu des difficulté, au début, à circonscrire les malades à assister. Cependant cette difficulté signifiait en même temps que l’activité de l’Hospitalité de Notre-Dame de Lourdes avait la possibilité de dépasser l’intimité communautaire close. En effet chaque hospitalité en est arrivée à réclamer de ses membres une attitude de disponibilité, afin d’être prêts à répondre à l’appel des autres. L’Hospitalité de Notre-Dame de Lourdes a ainsi réussi à élargir la connotation des « autres », des autres « intimes » aux autres « étrangers ». Le principe de l’activité des hospitalités a changé du « Noblesse oblige », obligation interne aux membres d’une communauté, à « être disponible », morale destinée à tout un chacun et agissant de manière inconditionnelle et bénévole.
17« Être disponible » revenait à définir un code de comportement demandé aux membres des hospitalités, puis à influencer l’ensemble du monde du pèlerinage de Lourdes. Actuellement, les fidèles de ce monde prononcent souvent et tout naturellement le mot de « disponible » ou de « disponibilité » afin d’exprimer leur vœu de l’être ou d’apprécier les autres qui le sont.
18En outre, l’activité de l’hospitalité comprenait deux éléments opposés aux normes sociales dominantes. Premièrement, un aspect critique de la distribution sexuée des rôles, la « disponibilité » étant considérée comme une « caractéristique féminine » et par la suite comme une composante principale de la « famille » au XIXe siècle en France. En attribuant cette « caractéristique féminine » au sexe masculin comme norme, l’activité de l’hospitalité en est arrivée à se modifier, donc à féminiser une image d’un sexe fort dans le monde du pèlerinage des malades.
19Deuxièmement, son activité a développé une fonction critique de la médicalisation de la société. Au XIXe siècle, les médecins ont commencé à jouer un rôle social en administrant des soins dans le but de réaliser une société hautement productive. Ils devinrent ainsi les interlocuteurs exclusifs à solliciter en cas de maladie. En opposition à ce courant, l’activité de l’hospitalité a tenté de dégager les malades des mains des médecins et de les libérer de leur rôle de « bon patient ». Il faut ajouter que les médecins catholiques avaient et ont encore tendance à valoriser le pèlerinage de Lourdes au nom de la libre volonté des malades, ce qui ne pourrait guère être approuvé du point de vue de l’augmentation de la productivité.
La nouvelle vague des pèlerinages des malades et des personnes handicapées : contester l’exclusion des improductifs de la vie sociale et la privatisation de la souffrance personnelle
20Après la Seconde Guerre Mondiale, c’est le troisième aspect politique qui a émergé au premier plan du monde du pèlerinage des malades, à mesure que la voix des malades devenait plus forte. Surtout dans les années 1970, à la suite du Concile Vatican II, la pastorale des malades a été révisée. Lourdes est devenue son terrain privilégié à cause de la présence importante des malades. Les malades se sont procurés plus d’occasions de parler et ont exprimé leur vœu d’avoir plus de contacts avec des pèlerins bien-portants au lieu d’être traités en tant qu’offrandes sous la dénomination de « nos Seigneurs les malades ». D’autre part, Lourdes a été choisie comme un terrain d’application privilégié de la réforme du sacrement de l’Onction des malades. Les rapports, conservés aux Archives des Sanctuaires de Lourdes, révèlent que les études réalisées à cette occasion ont permis d’approfondir la réflexion sur l’aspect « improductif » de la vie humaine et ont fait prendre conscience de la nécessité de l’intégrer tant dans la vie sociale que dans la vie personnelle. Ainsi la spiritualité du pèlerinage des malades a changé son intention originelle d’offrir la souffrance des malades à Dieu, pour laisser place à une volonté de vivre ensemble, de faire face aux souffrances des autres sans plus chercher à s’en dérober. Dans la foulée, le nombre des groupes du pèlerinage des malades et des handicapés, organisés soit par eux-mêmes soit par leurs soutiens, a augmenté. Leurs participants souhaitent être vus et entendus dans le sanctuaire de Lourdes, espace ouvert à tous où se déroule, depuis cent ans, « le spectacle de la souffrance », afin de faire reconnaître leur présence dans l’espace commun. On peut compter parmi eux, par exemple, le pèlerinage « Foi et Lumière », le pèlerinage des enfants handicapés mentaux, et « Lourdes – Cancer – Espérance », celui des cancéreux.
21Cette nouvelle vague du pèlerinage refuse l’exclusion des malades et des handicapés de la vie commune, et vise à contester la tendance qui prétend protéger la vie « privée » – littéralement « être privé » du droit d’exister dans la société – des malades, des handicapés et de leur famille, en les isolant dans leur souffrance privée. Dans la société contemporaine où l’on poursuit la productivité en tant que valeur primordiale, l’incapacité, la maladie, la sénilité et la mort sont exclues, comme affaires privées, de la sphère publique de la vie humaine. Afin de contester ces valeurs, le monde du pèlerinage des malades tente de créer un cadre de vie commun aussi bien pour les bien-portants que pour les malades en incluant les « affaires privées » de chacun dans un espace public, ouvert à tous. Il est permis de dire que la formation de cet espace public, qui n’exclurait personne ni rien et dont n’importe qui et quoi seraient titulaires, a été rendue possible grâce à la norme du « être disponible », mentionnée ci-dessus, qui oriente depuis longtemps le monde du pèlerinage des malades de Lourdes.
Conclusion : les trois aspects « politiques » du pèlerinage des malades
22Ainsi l’histoire du pèlerinage des malades de Lourdes pourrait être considérée comme un mouvement continuel exploité par les organisateurs pour manifester leur attitude politique, en répondant aux nécessités sociales les plus urgentes du moment, par le moyen de la présence des malades. Le pèlerinage de Lourdes a commencé d’abord comme un mouvement politique qui prétendait disposer du pouvoir officiel et authentique d’encadrer la vie communautaire des Français et de leur fournir une histoire commune. Ce mouvement s’est ensuite tourné vers la délibération politique sur le bien commun avec les militants du catholicisme social qui essayaient de résoudre des problèmes sociaux en établissant de bonnes relations entre deux classes opposées. Ils avaient conscience de leurs responsabilités d’hommes publics et tentaient de prendre l’initiative dans le domaine des intérêts publics. Désormais, lors du pèlerinage des malades de Lourdes, ce sont des malades et des handicapés qui construisent un nouvel espace pour la politique identitaire des minorités.
23Cette évolution a changé la nature politique du terrain de Lourdes. Le pèlerinage s’est présenté au commencement en tant que lieu politique lié à l’histoire nationale, aux réseaux des diocèses, à l’intérêt public, aux hautes classes de la société et à leur responsabilité sociale ; il s’est transformé par la suite en espace ouvert où pourraient apparaître les faibles, stigmatisés à cause de leur improductivité. De plus, la place de la souffrance au milieu du pèlerinage des malades a également connu une mutation. Elle avait d’abord été le sacrifice officiel, puis a été traitée comme un problème commun à résoudre au moyen de la délibération, et maintenant est devenue un objet susceptible d’être porté dans l’espace public et un facteur de disponibilité. Cette évolution permet aujourd’hui d’expliquer les différences sémantiques entre « exploiter l’utilité de la souffrance », « régler la souffrance » et « vivre avec la souffrance ».
Bibliographie
Bibliographie
Association Notre-Dame de Salut, Manuel-souvenir du Pèlerinage National à Lourdes, Paris, Au Secrétariat de l’Œuvre, 1929.
Ensemble à Lourdes. Manuel des Pèlerin, Paris, Tardy, 1992.
Guide de Tourisme Michelin. Pyrénées, Paris, Pneu Michelin, 1980.
Terado Junko, L’Univers du pèlerinage des malades à Lourdes, Tokyo, Chisen shokan, 2006, 556 p. (en japonais) ; une recension écrite par Fabienne Duteil-Ogata et Jean-Pierre Berthon, in Archives de Sciences Sociales des Religions, no 142, avril-juin 2008, p. 306-308.
– « Qui est mon prochain ? La construction du lien social dans les activités des Hospitalités de Lourdes », in Revue d’Histoire de l’Église de France, no 237, juillet-décembre 2010, p. 489-505.
« Malades à Lourdes. Quelques témoignages », in Recherches sur Lourdes, no 48, 1974.
« Notre-Dame de Lourdes en 1880 », in Annales de Notre-Dame de Lourdes, 1880.
Rebsomen A., Cinquante ans d’Hospitalité (1880-1930), Paris, Spes, 1930. Statuts et coutumiers de l’Hospitalité de Notre-Dame de Salut, 1885.
Notes de bas de page
1 Guide de Tourisme Michelin. Pyrénées, Paris, Pneu Michelin, 1980, p. 122.
2 Ensemble à Lourdes. Manuel des Pèlerin, Paris, Tardy, 1992, p. 49.
3 « Malades à Lourdes. Quelques témoignages », in Recherches sur Lourdes, n. 48, 1974, p. 199.
4 Association Notre-Dame de Salut, Manuel-souvenir du Pèlerinage National à Lourdes, Paris, Au Secrétariat de l’Œuvre, 1929, p. 263f.
5 Op. cit., p. 7-10.
6 « Notre-Dame de Lourdes en 1880 », in Annales de Notre-Dame de Lourdes, 1880, p. 259, 262.
7 Rebsomen A., Cinquante ans d’Hospitalité (1880-1930), Paris, Spes, 1930, p. 34.
8 Statuts et coutumiers de l’Hospitalité de Notre-Dame de Salut, 1885, p. 8.
Auteur
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