Les ceintures du secret : la naissance d’une clandestinité de la drogue dans les villes françaises du premier vingtième siècle
p. 93-105
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Mots-clés : marginalité
Index géographique : France
Texte intégral
1Si l’expérience de la drogue n’implique pas toujours le cadre urbain1, il est indiscutable que la sociologie, la culture et le marché des stupéfiants se sont, dès le xixe siècle, prioritairement fixés dans la ville. Espace en voie d’expansion et de complexification, elle offrait aux usagers les riches ressources de ses espaces emboîtés, de ses réseaux multiples, de ses plaisirs foisonnants. A l’aube du xxe siècle, quand la loi constitue en pratique illégale l’usage et le commerce des stupéfiants, la drogue est donc déjà un fait socioculturel à large dominante urbaine, surtout concentré, pour la France, à Paris et dans quelques grands ports, tels Toulon ou Marseille.
2On voudrait montrer ici que le monde clandestin de la drogue qui se structure dans ces villes à compter des premières décennies du xxe siècle s’adosse à des réseaux préexistants (commerciaux, culturels, sociaux...) qui fonctionnaient déjà, pour bonne part, sur le mode de la dissimulation, et cerner par là le passage d’une culture urbaine du secret à une culture urbaine de la clandestinité. L’analyse de ce processus passe par celle des différents groupes sociaux impliqués dans ce mouvement de « clandestinisation », des effets de ce dernier sur le commerce, les pratiques, et la géographie de la drogue clandestine, du rôle, enfin, de la répression, dans sa configuration et dans sa pérennisation. Dans quelle mesure la naissance de ce monde clandestin ne relève-t-elle pas d’un effet plus ou moins indirect de contrôle social et policier ? Et par quels biais la ville offre-t-elle à ce contrôle un espace de quadrillage et de visibilité, mais aussi, de dissimulation et de résistance ?
3Éclairant les modalités de repérages et de filtrages effectués par la police, les sources judiciaires mobilisées (notamment les minutes des jugements correctionnels pour les départements de la Seine et des Bouches-du-Rhône) laissent entrevoir le caractère assez sélectif de cette clandestinité, qui semble concerner au premier chef les petits trafiquants de rue et quelques catégories spécifiques d’usagers. En contrepoint, le recours aux dossiers médicaux et aux témoignages personnels éclaire mieux d’autres groupes sociaux qui, certes voués à la dissimulation, échappent à la clandestinité stricto sensu, définie comme un véritable mode de vie. L’étude de l’émergence du monde souterrain de la drogue offre donc un exemple éclairant pour cerner les nuances et les degrés d’une expérience sociale de la clandestinité, qui recoupe ici très étroitement celle de marginalité. Tout à la fois subie et revendiquée, elle semble trouver dans la ville un espace ambivalent, entre protection et assignation.
4En France comme dans d’autres pays occidentaux, le processus de pénalisation des drogues s’est articulé à une lente et complexe mutation du regard social, en partie modelé par le discours des spécialistes et par celui des médias de masse2. Dès le milieu du xixe siècle, en effet, des médecins ont entrepris de dénoncer les effets propres à l’opium3 et aux opiacés4, – accoutumance, escalade, syndrome de manque en cas de suppression brutale–pour les appliquer ensuite à d’autres produits définis comme « stupéfiants », haschich5 et cocaïne6.A compter des années 1880-1890, leurs cris d’alarme sont relayés par la presse à sensation et par la littérature populaire, alors en plein essor7. Au début du xxe siècle, la pression internationale8 puis l’émotion des politiques font envisager une modification pénale du régime légal de ces produits jugés dangereux pour l’avenir de la race et l’élite de la nation. En 1908 est adopté un premier décret qui, complétant la loi de 1845 sur les substances vénéneuses9, vise à restreindre la vente et la circulation de l’opium. Appliqué à un produit unique, ne réglant pas la question de l’usage, il est vite jugé inefficace par la police et les autorités militaires, qui exigent une nouvelle loi pénale. Entre 1911 et 1915, plusieurs projets en ce sens sont présentés au Sénat et à la Chambre des députés. C’est finalement un texte de loi préparé par le gouvernement qui est adopté par les parlementaires, le 12 juillet 1916, sans opposition majeure de leur part. Dans le contexte de la guerre, le sanitarisme sourcilleux des autorités et la germanophobie exacerbée de l’opinion–on accuse les Allemands d’écouler clandestinement leurs drogues en France – ont facilité le vote d’une loi dont la portée demeurera de toute façon limitée, puisque l’usage de stupéfiants, certes en progression, demeure un fait très circonscrit, surtout en regard de l’alcoolisme. Ce texte est complété par le décret du 14 septembre 1916, qui, classant en trois catégories les substances vénéneuses, établit un tableau spécifique, le tableau B, pour les produits dits stupéfiants (opium et ses dérivés, cocaïne, haschich), qui relèvent eux du régime spécial de la loi du 12 juillet 1916.
5L’adoption de celle-ci est sous-tendue par la péjoration du regard social vis-à-vis du toxicomane – le terme est forgé en 1909 –, assimilé souvent à un dégénéré irrécupérable, dont la constitution mentale serait structurellement défectueuse10, et qui se confond avec d’autres catégories de marginaux socialement réprouvés, homosexuels, prostituées ou délinquants de métier. Au tournant du siècle, la drogue entre donc, pour l’opinion commune, dans le champ des pratiques honteuses et malsaines, contraires aux nouveaux idéaux hygiénistes que cherche à promouvoir, notamment, la nouvelle éthique du sport11. Le terme même de drogue, synonyme neutre, à l’origine, de médicament, revêt à ce moment-là une connotation nettement péjorative, tout comme celui de stupéfiant, de drogué ou d’intoxiqué. Défi aux normes somatiques, dérèglement nuisible du corps et de l’esprit, les drogues se constituent progressivement en objets de répulsion. Ce climat d’opprobre induit déjà des comportements de repli et de dissimulation. Il incite également les médecins et les pharmaciens à se montrer plus vigilants dans la délivrance des produits. Les années 1880-1916 forment donc un tournant, qui voit les drogues faire l’objet d’un rejet croissant sans être encore tout à fait illicites.
6Dominante dans le champ du discours médical, politique et médiatique, cette vision négative est remise en question par certains usagers, d’opium tout particulièrement, qui, au moment même où le regard social s’assombrit, élaborent pour leur part un discours prosélyte structuré par la valorisation du secret. Forgée à la Belle Époque, cette véritable culture de l’opiomanie est essentiellement le fait d’anciens fonctionnaires ou militaires coloniaux convertis aux charmes du pavot et soucieux d’exalter par la plume les vertus de la « dive drogue ». Des auteurs tels Pierre Loti (1850-1923), Jules Boissière (1863-1897), Maurice Magre (1877-1942) ou Claude Farrère (1876-1957) tiennent ainsi le culte de la noire idole pour un plaisir noble et exigeant, réservé à une petite élite d’esprits supérieurs et dont on ne doit pas divulguer au tout-venant les pouvoirs et les rituels12.
7En réalité, il est abusif de parler d’une « aristocratie » de la drogue, comme n’hésitent pas à le faire certains : d’abord parce que l’opium peut lui aussi engendrer des toxicomanies pathologiques, mais aussi parce que son recrutement social reste hétérogène, touchant aussi bien les officiers de marine et les prostituées que les littérateurs et les femmes du monde. Il est vrai, cependant, que cette drogue favorise souvent une pratique plus ritualisée et plus esthétisée que celle du morphinomane ou du cocaïnomane, et que son usage, parfois assimilé à une véritable cérémonie sacrée, se déroule volontiers sur le mode d’un secret revendiqué. Aussi le monde informel des fumeurs d’opium s’apparente-t-il souvent, sous la plume de ces auteurs, à une véritable société secrète, avec ses codes et ses rites. Les fumeries d’opium qui s’établissent alors, à Paris et dans les grands ports, se caractérisent généralement par une localisation discrète (ruelles, arrière-cours, ateliers...), un éclairage tamisé, une atmosphère capitonnée de coussins et de divans, le silence presque complet13. Chez les particuliers, l’installation d’une fumerie personnelle obéit aux mêmes lois, privilégiant les pièces calmes et retirées, chambres isolées ou petits cabinets14, qui permettront d’apprécier la drogue dans toute la sérénité voulue.
8Dans les premières années du xxe siècle, le secret de la drogue se décline donc sur deux modes : l’un qui procède de la honte et du rejet, l’autre qui cherche à valoriser la dimension esthétique et culturelle des paradis artificiels. La loi de 1916 contribue à fondre ces deux facettes dans un moule négatif unique, celui de la délinquance. En effet, sont désormais interdits le port, la détention, la vente sans autorisation des produits du tableau B, ainsi que la falsification d’ordonnances pour s’en procurer. La « clandestinisation » du monde de la drogue trouve là sa véritable origine, même si l’usage en tant que tel n’a pas été constitué en délit, seul l’usage en société étant pénalisé. Mais la formule ciblait principalement les fumeries d’opium à vocation commerciale et sera interprétée dans un sens plutôt restrictif par la jurisprudence15. Toutefois, si le consommateur n’est pas directement visé, il pourra être atteint pénalement par les délits périphériques à l’usage.
9Ce dispositif, le législateur ne s’en est jamais caché, avait pour vocation de tarir le problème de la toxicomanie à la source, par assèchement progressif des circuits d’approvisionnement16. Mais pouvait-on dissocier si aisément le commerce de sa clientèle ? Pénaliser l’un, n’était-ce pas nécessairement entraîner l’autre vers l’univers de la délinquance et de la marge ? Loin de faire reculer la consommation, la pénalisation a eu pour principal effet de favoriser la naissance d’un univers clandestin des drogues, essentiellement urbain, et qui, à des degrés divers, implique le consommateur. Avant d’étudier les modalités de cette implication, on doit chercher à caractériser l’organisation de ce nouvel univers clandestin, qui trouve dans la ville un espace adéquat.
10Le monde souterrain de la drogue, c’est d’abord un marché illicite, dont la structuration s’effectue en trois temps : dès les années 1910, les premiers circuits illégaux se mettent en place, pour contrer le resserrement de la vigilance médicale et les effets du décret de 1908. Dans les années 1920, suite à l’adoption de la loi de 1916, ces circuits sont amenés à se développer. À compter des années 1930, le trafic est pris en main par des filières corses et marseillaises, elles-mêmes adossées à des réseaux internationaux pour qui la France constitue une plaque tournante entre l’Asie, l’Europe et les États-Unis. Étroitement contrôlé par le crime organisé, ce marché de la drogue s’imbrique dans des filières déjà existantes (proxénétisme, jeu, trafics divers...), ce qui signifie aussi qu’il trouve des espaces d’accueil déjà préétablis.
11La géographie de ce marché est d’abord liée aux impératifs de circulation des matières premières : les ports de l’Atlantique et de la Méditerranée où débarquent et repartent clandestinement les produits, forment les principaux maillons de cette chaîne dont l’échelle est internationale. Premier port français, interface entre l’Orient et l’Occident, Marseille est, durant toute la période, la principale porte d’entrée des produits, opium et haschich surtout, en provenant d’Asie, d’Afrique du Nord ou du Moyen Orient. Les villes proches des frontières suisses et allemandes sont également des lieux par où transitent clandestinement la cocaïne et la morphine fabriquées par les laboratoires d’outre-Rhin. À l’autre bout du circuit, c’est Le Havre qui réceptionne les produits destiné au marché nord-américain. Dans la période, il est de plus en plus fréquent que ces produits arrivés bruts soient transformés sur le sol français par des laboratoires clandestins qui se sont installés dans le sud de la France et en région parisienne. Entre ces deux pôles, Paris constitue un passage obligé, à la fois du fait de la structure en étoile du réseau de transports, et de l’organisation des réseaux délinquants. A elle seule, la capitale alimente plus de la moitié des statistiques d’arrestations et de saisie en matière de drogues entre 1917 et 1939.
12A ces atouts de position, il convient d’articuler des éléments de nature plus sociologique. A Toulon, par exemple, c’est la présence de la marine coloniale, réputée pour son opiomanie, qui constitue la ville en centre névralgique du trafic et de l’usage. Dans les ports, plus largement, transite toute une population de marins et de voyageurs qui, parfois, ne dédaignent pas l’attrait des paradis artificiels, souvent associés au commerce érotique : Nantes, Brest, Le Havre, Marseille sont réputées pour abriter de nombreuses fumeries d’opium, parfois abritées dans des bordels ou dans des maisons de passe. Premier marché français des drogues, Paris est aussi la capitale de tous les plaisirs. Plus encore qu’à Marseille, la drogue s’y implante en liaison étroite avec le monde de la prostitution et des établissements de nuit. Scène artistique et culturelle dynamique, elle polarise une population d’écrivains et d’artistes, de bohèmes et de gens du monde qui, volontiers noctambules, de mœurs souvent libres, aiment parfois nourrir leurs plaisirs d’excitants chimiques. Leurs déplacements suscitent parfois d’éphémères « villégiatures de la drogue17 », notamment, l’été, sur la Côte d’Azur ou sur la côte Basque18. Foyers du trafic et de l’usage, ces villes forment, à l’échelle nationale, les pôles d’approvisionnement pour l’ensemble des consommateurs de stupéfiants, y compris provinciaux et ruraux, souvent contraints de s’y rendre pour renouveler leurs stocks19.
13À une échelle plus fine, on remarque que le trafic et la sociabilité des drogues sont concentrés dans quelques quartiers dotés d’atouts spécifiques. Le plus souvent anciens et populaires, ils se caractérisent par l’étroitesse des rues, l’entassement humain, la complexité topographique : c’est le cas de Montmartre/Pigalle à Paris, du quartier du Vieux Panier, à Marseille, ou encore du Mourillon, à Toulon. Si cette physionomie favorise le trafic, ces quartiers se distinguent aussi par leur sociologie : le trafic de la drogue s’y installe à la fois parce qu’il est progressivement contrôlé par les éléments délinquants des classes populaires qui y résident, et parce qu’il trouve là un vivier de clientèle, notamment les prostituées et leurs clients, ou encore les fêtards qui fréquentent bars et dancings, dont certains peuvent être homosexuels.
14C’est l’addition de ces atouts qui semble propre à fixer le marché des drogues : a contrario, on sait par exemple que les stupéfiants circulent abondamment, dans le quartier parisien de Montparnasse, très fréquenté par la bohème artistique, mais sans que ce quartier fasse l’objet d’un trafic véritablement professionnalisé, sans doute parce qu’il demeure trop bourgeois, et moins diversifié que Montmartre dans la gamme des établissements de plaisir. On notera aussi que ces nouveaux « quartiers de la drogue » sont toujours des quartiers déjà connus et fréquentés à d’autres titres : l’entre-deux-guerres ne voit pas émerger de véritables ghettos entièrement dominés par le commerce et la consommation des stupéfiants, tels qu’il en existera dans certaines grandes villes de la fin du xxe siècle20.
15Un traitement statistique réalisé à partir des jugements correctionnels parisiens et marseillais permet de dresser le portrait-robot des principaux acteurs de cette scène, du moins ceux qui furent arrêtés et jugés – et dont la représentativité doit, bien évidemment, être questionnée21 : de sexe masculin dans 80 % des cas, le trafiquant est plutôt jeune sans être adolescent (l’âge moyen est de 32 ans), généralement célibataire (à 65.5 %) et sans enfant (à 81 % )22. Les professions annoncées (parfois une formation initiale plus qu’une activité réelle) signalent une origine majoritairement populaire ou petite bourgeoise : on dénombre 22 % d’ouvriers et de petits artisans, 10 % de métiers de la restauration, 7 % de petits commerçants, 13 % de « professions commerciales », (courtiers ou représentants de commerce). Mais la présence de professions médicales (9 %) et d’artistes (10 %) signale que la tentation du trafic illégal a pu concerner des catégories sociales moins traditionnellement vouées à la délinquance. Une petite majorité d’inculpés (51.5 %) est née en province, près de 20 % hors du territoire français. La plupart (76 %) déclinent une adresse parisienne, et parmi ceux-ci, près de 60 % habitent à Montmartre ou dans les quartiers limitrophes des IXe, Xe et XVIIe arrondissements de Paris. A Marseille, le profil est très comparable. Seul le nombre très élevé de naissance à l’étranger (près de 62 % du fichier) distingue la très cosmopolite cité phocéenne. La coloration populaire est également plus accentuée, du fait de la quasi-absence de professions médicales et artistiques.
16Sur la base de ces statistiques, rien ne semble vraiment distinguer nos trafiquants de drogues de la masse des petits délinquants ordinaires, tels qu’ont pu les caractériser, pour une période un peu antérieure, Jean-Claude Farcy et Francis Dérnier23. La relative faiblesse des peines prononcées (6 mois de prison en moyenne) donne à penser qu’il s’agit essentiellement de petits revendeurs de rue, arrêtés avec de faibles quantités de drogues. Les « gros bonnets » du trafic, qui, à compter des années trente, font régulièrement la une des journaux24, sont peu présents devant les tribunaux : nous ne recensons, entre 1917 et 1937, que 19 inculpés sur 825 condamnés au maximum légal des deux ans de prison. De ces résultats, on peut déduire que ce sont avant tout les petits dealers qui sont plus spécialement vulnérables à la répression, à la fois parce qu’ils sont très concentrés spatialement, ce qui facilite les opérations des agents spécialisés de la Brigade Mondaine25, et parce que cette facilité incite ces derniers à aller toujours « pêcher dans les mêmes eaux26 ».
17En effet, les rapports de police retrouvés pour les années trente montrent bien que les établissements qui accueillent le trafic–bars, dancings ou restaurants, tels ceux, à Paris, du Boulevard Clichy : la brasserie Graf ou le café Cyrano – sont parfaitement connus, répertoriés, et surveillés par la police, et qu’il y a, tout au long de la période une relative stabilité de cette géographie. Voilà qui souligne, indirectement, une relative tolérance des pouvoirs publics, autant par impuissance matérielle (la douzaine d’inspecteurs spécialisés de la Brigade des Stupéfiants et la dizaine d’inspecteurs de la Sûreté Générale ne peuvent exercer un contrôle très serré), que par stratégie répressive : l’infiltration de ce monde bien balisé facilite les coups de filet ponctuels et permet, à l’occasion, de remonter les filières jusqu’aux grossistes. Aussi cette « clandestinité » apparaît-elle toute relative. Elle est, en vérité, partiellement visible, et assez vulnérable, puisque ces petits trafiquants de rue sont les principales victimes de l’application de la loi de 1916. Bon an, mal an, ils forment en effet des deux tiers aux trois quarts des inculpés parisiens, et sont toujours plus lourdement condamnés que les usagers, alors même que la loi n’établissait pas d’échelle différenciée de pénalité selon la nature du délit.
18Ainsi, s’il existe bien une clandestinité urbaine de la drogue qui se structure autour du trafic et du trafiquant, il reste plus difficile de déterminer dans quelle mesure l’usager lui-même peut s’insérer dans cet univers, et s’il en constitue un élément contingent ou un rouage essentiel. En réalité, on repère tout un dégradé de situations qui rend difficile de penser l’univers de la drogue comme un ensemble socialement et spatialement homogène, nécessairement voué à la clandestinité, malgré ce que laissent entendre les médias ou la littérature médicale lorsqu’ils évoquent une véritable « franc-maçonnerie de la drogue27 », fédérée par une sociabilité de la dissimulation et s’apparentant à une sorte d’enfer souterrain, où s’égarent d’innocentes victimes28.
19Dans l’entre-deux-guerres, il existe encore un nombre important, quoique difficile à quantifier, d’usagers de stupéfiants dont la toxicomanie est d’origine strictement médicale ou procède d’une automédication à visée psychothérapeutique. Souvent bien insérés socialement, d’origine parfois bourgeoise, usant de stupéfiants comme de médicaments, ces individus, qui peuvent être des ruraux ou des habitants de petites villes, se procurent le plus souvent la drogue par la filière pharmaceutique, en usant d’ordonnances légales ou falsifiées, et n’ont guère, à l’origine du moins, de contacts avec le marché souterrain. Parallèlement à ce dernier, il existe en effet tout un réseau d’officines plus ou moins complaisantes, y compris dans les communes de taille modeste. Le toxicomane rétif à l’univers du trafic pourra également recourir à divers subterfuges : envois de drogues par courrier29, voire par pneumatiques, achats effectués par des tiers, souvent des domestiques30, livraison directe en appartement... Il est vrai qu’une dépendance prolongée ou une rupture d’approvisionnement peuvent tendre nécessaire le recours au moins ponctuel aux trafiquants. Il est vrai aussi que cette catégorie de toxicomanes n’est pas à l’abri de poursuites judiciaires : 14.75 % des inculpations parisiennes concernent des fraudes à l’ordonnance. Toutefois la drogue peut ici provoquer des désordres intimes, si elle peut inciter à des attitudes de dissimulation comme à des actes illégaux, elle ne ressortit pas à proprement parler d’une clandestinité.
20Le cas des usages hédonistes et festifs est plus complexe, dans la mesure où ils sont souvent liés à la fréquentation de lieux eux-mêmes semi-clandestins (maisons de passe, bars ou dancings, établissements homosexuels...), qui peuvent abriter des opérations de petit trafic. Dans ce cas, il y a une interpénétration ponctuelle de différentes formes de marginalités/clandestinités, mais là encore, elle n’engage pas un mode de vie. Il est vrai, en revanche, que la valorisation du secret dont pouvaient déjà se revendiquer certains esthètes toxicophiles de la Belle Époque, s’est parfois trouvée renforcée de l’interdiction légale, qui ajoutait un agréable parfum de transgression à l’expérience en elle-même sulfureuse de la drogue. L’écrivaine Mireille Havet le reconnaît implicitement en remarquant par exemple : « Finies [...] les fumeries comme d’éternels pieds de nez [que l’on croit] à la morale bourgeoise et à la Préfecture31. » Se rappelant sa visite dans une fumerie d’opium de Bastia, en 1922, elle évoque bien cette atmosphère « clandestine » qui, désormais, entoure l’usage des drogues :
« Il fallait, pour gagner la maison, des précautions d’apache, afin, paraît-il de ne pas se faire remarquer. Nous glissions dans des rues noires. Des ombres soudaines jaillissaient des portes cochères. On se croyait suivi. On faisait un autre détour32. »
21Mais l’on voit aussi que cette culture du secret s’articule plus directement au risque répressif, qui renforce le développement de pratiques fédérées par « l’entre-soi », la méfiance vis-à-vis du monde extérieur, une identité quasi communautaire. Une trajectoire individuelle fait particulièrement bien ressortir ces différentes particularités. Elle nous est rapportée par un médecin, à propos d’un artiste lyrique qui a découvert la drogue dans les milieux montmartrois :
« F.R. [...] est entraîné par un camarade dans une maison dénommée par les habitués “Renifl’Hôtel” [il n’a compris que plus tard le sens de cette enseigne, en apprenant que tous les locataires, y compris le patron et la patronne, se droguaient]. Il s’y trouve en présence de toute une bande d’individus “aux yeux agrandis, aux pupilles dilatées, qui lui demandent de leur chanter Fumée d’opium, La Coco, Place Pigalle ou toute autre chanson qu’il connaît contenant des allusions aux drogues”. F.R. retourne souvent dans cette maison. On lui offre, bien entendu, la “prise de coco”33. »
22Mot de passe, jargon d’initié, références musicales, solidarité de groupe, établissement plus ou moins dissimulé : le monde de la drogue en vient à se structurer ici à la manière d’une société secrète, dotée de rites et de codes spécifiques–l’argot, notamment, s’enrichit dans la période34. Imposé par l’interdit pénal autant que par l’opprobre sociale qui pèse sur le drogué, cet impératif du secret fait parfois l’objet d’une requalification positive par les individus eux-mêmes, dans un processus d’inversion du stigmate déjà analysé pat Erwin Goffman35. Fondée sur un subtil dialecte de dissimulation mais aussi de reconnaissance entre pairs, cette culture trouve dans la ville un espace adéquat, qui permet d’échappet aux regards tout en bénéficiant de réseaux efficaces et actifs.
23Si les drogues ont pu trouver dans cette clandestinité imposée matière à renforcer leur attrait, il n’est pas certain, cependant, que cette obligation du secret ait toujours été bien supportée. A compter de 1916, les risques de perquisitions et d’arrestations deviennent réels, même s’ils ne pèsent pas identiquement sur toutes les catégories d’usagers. Ils ont de quoi effaroucher tous ceux qui ne goûtent pas au sel de la transgression, surtout dans un espace urbain très largement poreux, traversé par le regard de l’autre. On connaît ainsi plusieurs cas d’opiomanes victimes des dénonciations de leurs voisins ou de leurs concierges, eux-mêmes alertés par l’odeur ou des mœurs jugées « étranges36 ». S’ils ne renoncent pas tout bonnement à la drogue, les usagers sont contraints de bricoler pour s’adapter et doivent souvent modifier leurs habitudes, notamment en simplifiant le matériel et le décor37 ou bien en raccourcissant le temps consacré à leur trouble pratique. C’est la solution adoptée par un couple opiomane, dont les pratiques sont ainsi décrites pat un rapport de police :
« La fumerie dure environ de 3h30 à 5h30 de l’après-midi et en sortant de leur salle à manger, ils renferment soigneusement leur matériel puis lavent leurs cendriers de cuivre puis ils vont à la cuisine se laver les dents qu’ils se parfument à l’eau de Cologne pour dissiper l’odeur de la fumerie38. »
24L’altération du rituel ne provoque-t-elle celle du plaisir ? On sait au moins que les obstacles nés de la pénalisation ont fortement contribué au déclin de la fumerie d’opium, cette drogue ayant été progressivement remplacée par la cocaïne et surtout l’héroïne, qui devient dominante dans toutes les statistiques à compter des années trente39. Plus discrète, plus rapide, leur consommation en prise ou en injection semblait mieux convenir aux nouveaux impératifs de discrétion, du moins tant qu’elle n’occasionnait pas de pathologies trop visibles. Intoxiqué à la morphine dans les années trente, l’éditeur Léon Pierre-Quint prend ainsi l’habitude de se piquer plusieurs fois par jour, entre deux rendez-vous, deux déjeuners d’affaires, dans des WC publics ou des taxis, parfois directement à travers ses vêtements40. Ici, l’usage de stupéfiants n’est plus vécu sur le mode d’une rupture cérémonielle, impliquant un rituel et des lieux spécifiques : réduit aux gestuelles les plus simples, il se dilue jusqu’à devenir presque invisible. Seuls quelques stigmates physiques (teint cadavérique, pupilles dilatées, chair scarifiée...) et les menues preuves matérielles du délit (seringue, petit paquet de drogues...) peuvent encore signaler le drogué au regard d’autrui. La clandestinité tend à réduire l’acte à sa dimension la plus minimale.
25Dans les cas de dépendances pathologiques et prolongées, toutefois, la drogue peut devenir le trait structurant d’un véritable mode de vie, entièrement organisé autour de son usage, voire de son commerce, puisque certains consommateurs sont parfois contraints de se livrer à des activités de petit trafic pour financer leur propre toxicomanie. C’est sans doute là qu’on touche à une véritable dimension de clandestinité. Un exemple nous en est fourni par l’artiste lyrique évoqué plus haut, et qui, d’abord simple usager occasionnel, en vient à fréquenter de manière presque exclusive tout un univers marginal souterrain fédéré par la drogue :
« [il] rencontre dans ces milieux un ancien camarade qui fait trafic de drogues sous le couvert d’une fabrique de jouet. C’est un mutilé de guerre, trépané, qui prend beaucoup d’héroïne et de cocaïne en prise. Bien qu’il ait des ordonnances médicales, sa femme achète clandestinement à Montmartre de grandes quantités de drogues qu’elle revend ensuite avec bénéfice [...]. Déchu, misérable, X accepte d’être engagé dans cette curieuse fabrique au pair, c’est-à-dire qu’il travaillera jours et nuits blanches de la cocaïne, sans aucun salaire ; il recevra abri et nourriture et de la drogue tant qu’il voudra, sans se priver41 ».
26Durant une brève période, ce toxicomane vit dans une sorte de communauté clandestine qui combine usage et trafic. Les sources policières signalent d’autres « refuges d’intoxiqués42 » du même type, ou encore des « maisons de toxicomanes43 », souvent de misérables hôtels garnis qui semblent parfois préfigurer les cracks bouses de la fin du xxe siècle. A Paris, ils sont concentrés dans quelques rues de la Butte Montmartre, notamment la rue Frochot, l’impasse Élysées des Beaux-arts ou, la rue Ménessier. À Marseille, on en trouve d’identiques dans le quartier du Vieux Port. Certaines trajectoires inscrivent, concrètement, dans la succession des changements d’adresse, la dégradation sociale où peut conduire la drogue : longtemps résidente de l’élégante rue Raynouard, dans le XVIe arrondissement de Paris, l’écrivaine Mireille Havet, expulsée de son appartement en 1930, finit sa misérable vie de toxicomane dans les hôtels sordides de Montmartre et de Montparnasse, où elle retrouve d’autres intoxiqués, tout aussi pauvres et déchus qu’elle44.
27Ces exemples montrent que la période cristallise un nouvel underworld45 urbain de la drogue où les usagers se trouvent associés aux filières du trafic souterrain, et, parfois instrumentalisés par elles, du fait de la lourde dépendance matérielle et physiologique dont ils sont victimes. Ici, il n’est plus question de la marge élitiste, revendiquée comme telle par l’opiomane début de siècle, mais d’une clandestinité souvent sordide, fruit indirect d’une pénalisation qui marginalise les catégories les plus fragiles d’usagers. Si cet univers forme désormais une facette incontournable du monde de la drogue, il demeure socialement et spatialement circonscrit, réduit à quelques quartiers, voire à quelques rues. Seuls sont concernés les usagers lourdement dépendants, et qui ne bénéficient d’aucuns filets sociaux ou matériels. Parmi eux, les prostituées toxicomanes, souvent elles-mêmes revendeuses, et sous la coupe du proxénète-trafiquant, apparaissent comme les figures les plus pathétiques de cet univers. A contrario, un écrivain bourgeois, reconnu, et mondain, tel Jean Cocteau, a pu demeurer opiomane durant deux décennies, sans entretenir avec cet univers souterrain d’autres rapports que ceux, très ponctuels, de l’approvisionnement. Ses « vices » privés, opium et pédérastie, demeurent des secrets nobles, épargnés par les stigmates de la clandestinité honteuse, même si l’auteur d’Orphée eut, en 1936, des comptes à tendre à la justice46.
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28Dans les premières décennies du xxe siècle, la drogue devient un élément constitutif des clandestinités urbaines, en conjuguant la double dimension d’un marché souterrain et d’une sociabilité marginale. Spatialement inscrite dans la ville, très vulnérable à la répression, mais plus ou moins tolérée parce que difficile à déloger, cette clandestinité de la drogue reflète l’ambivalence du visage contemporain de la ville, à la fois espace de liberté, de dérobade aux contraintes collectives, mais aussi lieu des relâchements délétères du lien social, parfois jusqu’à la déchéance poussée. Si ce monde n’est pas aussi homogène que le suggèrent les représentations, et s’il n’implique durablement qu’une minorité d’individus, il n’en matérialise pas moins, à l’échelle de la ville, un espace caché qui prend parfois, pour les plus fragiles, l’allure d’un véritable enfermement.
Notes de bas de page
1 Les hippies des années 1960-1970, par exemple, ont parfois favorisé les cadres naturels, s’inspirant notamment de vieilles pratiques chamaniques.
2 Ce processus a été largement analysé par Jean-Jacques Yvorel, dans Les poisons de l’esprit, drogues et drogués en France au xixe siècle, Paris, Quai Voltaire, 1992, dont nous reprenons ici les principales analyses.
3 L’opium est le suc, séché et purifié, du pavot.
4 La morphine, principal alcaloïde de l’opium, isolé en 1807, et l’héroïne, dérivé de la morphine mis au point par les laboratoires Bayer en 1899.
5 Résine d’une variété de chanvre tropical, le cannabis sativa.
6 Principal alcaloïde de la coca, isolé en 1857.
7 Voir par exemple le reportage du Petit Journal, le 5 juillet 1903, ou des romans tels Les Possédés de la morphine de Maurice Talmeyr, Paris, E. Plou, 1892.
8 Les conférences de Shanghai (1909) et de La Haye (1911-1912) obligent les pays signataires à se doter de législations prohibitionnistes. Les États-Unis adoptent le Harrison Narcotic Act en 1914, la Grande-Bretagne le Dangerous Drug act en 1920.
9 La loi sur les pharmacies du 19-25 juillet 1945 et l’ordonnance des 29 octobre-8 novembre 1946 obligent déjà le pharmacien à tenir un registre spécial pour la délivrance ces « substances vénéneuses » (c’est-à-dire des poisons, dont les « stupéfiants » ne sont, à l’époque, qu’une sous-catégorie).
10 Cf. Jean.-Jacques Yvorel, op. cit., p. 197 - 206.
11 Cf. Georges Vigarello, Le sain et le malsain, Seuil, 1993.
12 Dans la description que donne Théophile Gautier de sa première soirée au Club des Hachichins en 1845, le caractère secret de la cérémonie était déjà suggéré. Cf. Théophile Gautier, Le Club des Hachichins, 1846, réed. Paris, Gallimard, coll. » la Pléiade », p. 1005.
13 Voir par exemple Fabrice Delphi, L’opium à Paris, Paris, F. Juven, 1907.
14 Voir la description d’un petit entresol du Palais Royal découvert par la police en 1913, A D Seine, D3U6 151, 25 mars 1913. Voir aussi la description d’un autre appartement dont une pièce est aménagée en fumerie d’opium, AD Seine D1U6 1403, 14 mai 1917.
15 Ainsi par exemple, un couple fumant en commun à son domicile ne relèvera pas de ce cas de figure. Voir la jurisprudence établie par le procureur de la République du tribunal de Toulon, AN BB18 2666 (428 A 22).
16 Voir la déclaration en ce sens du député Arthur Mille, JO, Débats parlementaires, Chambre des députés, 13 novembre 1913, p. 77.
17 Comme le déplorent en 1921 les Drs Courtois-Suffit et Giroux, Bulletin de l’Académie de Médecine, 21 juin 1921.
18 ANF7 14832, rapport du brigadier Métra, 1er août 1935.
19 Voir le cas d’un toxicomane Orléanais qui se fait envoyer de la drogue depuis Paris, ANF 14837, rapport policier du 3 octobre 1930. Voir aussi l’arrestation d’un toxicomane parisien venu se fournir à Marseille, AD Bouches-du-Rhône, 208U31/24, 4 mars 1927.
20 Tels, à Paris, les quartiers Goutte d’Or, Marx Dormoy ou Stalingrad.
21 On a retenu, pour l’établissement de ce fichier, les individus inculpés de vente et cession de stupéfiants. Un second fichier, constitué d’inculpés pour port et détention, comprend vraisemblablement un certain nombre de petits trafiquants qu’on ne peut pas toujours identifier en tant que tels. Au vrai, le portrait-robot qui s’en dégage ne diffère pas fondamentalement du fichier « trafiquant », alors qu’il est nettement distinct pour la catégorie des « usagers ».
22 La source est peut-être lacunaire sur ce point.
23 Francis Démier, Jean-Claude Farcy, Regards sur la délinquance parisienne à la fin du xixe siècle. Rapport de recherche sur Us jugements correctionnels du Tribunal de la Seine (années 1888-1894), Centre d’Histoire de la France contemporaine, université de Paris X Nanterre, 1997, dact., 255 P.
24 Notamment Paris-Soir, qui, à compter de la deuxième moitié des années trente, accorde une place croissante au thème du trafic international des drogues.
25 Voir AD Bouches-du-Rhône, 208U3140, interrogatoire du 20 juin 1930.
26 Selon l’expression de Marie-Danielle Baré, Toxicomanie et délinquance, Paris, CESDIP, 1994, p. 17.
27 Voir par exemple Amélie Buvat-Cottin, Considérations sur les toxicomanies, Paris, E. Le François. 1936, p. 20.
28 Sur ce thème, voir par exemple, L’Intransigeant, « Intoxiquis », 10 octobre 1936.
29 Parfois à l’échelle internationale. Voir une affaire de commerce postal d’opium entre Paris et Londres, jugée le 13 avril 1917 à Paris, AD Seine, D1U6, 1398.
30 Voir une affaire jugée à Paris le 25 mai 1917, AD Seine D1U6 \ 1405.
31 Mireille Havet, journal intime, 20 octobre 1925, Fond Cocteau, université Paul-Valéry.
32 Idem, Journal, t. 2, Paris, Éd. Claire Paulhan, 2005, p. 289.
33 Jules Ghelerter, op. cit., p. 62.
34 Les équivalences les plus répandues à l’époque sont, pour l’opium, « l’étoffe noire », la « confiture », le « thé », pour la cocaïne, la « neige », la « reniflette », pour l’héroïne ou la morphine, la « came », la « bigornette », parfois aussi une simple initiale, H ou M.
35 Erving Goffman, Stigmate, Les usages sociaux des handicaps (1963), coll. « Le Sens commun », Paris, Éd. de Minuit, 1975.
36 Voir AD Seine, D3U6147, 21 octobre 1912. On retrouve le même type de témoignages dans une affaire jugée à Marseille en 1927, AD Bouches-du-Rhône, 208U31 26.
37 Voir Candide, « L’opium pour tous », 9 janvier 1936.
38 AD Bouches-du-Rhône, 208U31 9, rapport du 6 juillet 1925.
39 Nous avons établi des statistiques à partir des drogues mentionnées dans les jugements. Elles recoupent celles des médecins et de la police.
40 Léon-Pierre Quint (J. Basque), Journal d’une double libération, Paris, La Table ronde, 1954.
41 Jules Ghelerter, Les toxicomanies, étude médico-sociale, Paris, Librairie Louis Arnette, 1929, p. 66.
42 AN F7 14832, rapport du 28 juin 1937.
43 Jules Ghelerter, op. cit., p. 46.
44 Voir notamment une lettre de Mireille Havet à Ludmilla Savitsky, 9 avril 1931 et une lettre de sa sœur Christiane à leur propriétaire Auguste Perret, 8 août 1930, archives privées de D. Tiry.
45 Selon le terme qu’utilise le sociologue américain Alfred Lindensmith pour décrire, à la même époque, le monde de la drogue dans les grandes villes américaines. Alfred Lindensmith, The nature of opiate addiction, Chicago, 1937.
46 Cf. Emmanuelle Retaillaud-Bajac, La pipe d’Orphée, Jean Cocteau et l’opium, Paris, Hachette, 2003, p. 191.
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