Représentations du littérateur et de la littérature dans les romans de Louis Guilloux

Yann Martin

doi:10.4000/books.pur.54372

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Représentations du littérateur et de la littérature dans les romans de Louis Guilloux

Yann Martin

p. 55-67

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1Littérateur. Homme de lettres. Auteur. Écrivain. De profession. Mais aussi du dimanche. Ou encore plumitif. Écrivaillon, écrivailleur, écrivassier. Ou même scribouillard, gratte-papier. La langue française n’est pas avare pour désigner celui qui écrit. Plus ou moins familiers, plus ou moins soutenus, plus ou moins péjoratifs, tous ces mots appartiennent au même champ lexical.

2La littérature est un sujet d’occupation et de préoccupation important pour bon nombre de personnages de l’œuvre romanesque de Louis Guilloux. Ils sont en tout cas suffisamment nombreux pour que leur représentation fasse sens. Notre intention n’est pas de séparer le bon grain de l’ivraie, d’accorder des titres de noblesse à tel ou tel. Comme l’écrivait Chesterton, « on oublie trop souvent qu’un méchant poète est toujours un poète, de même qu’un méchant homme est encore un homme » ; mettre en scène dans un cadre romanesque, des personnages pratiquant l’écriture n’a rien d’extraordinaire. Il s’agit même sa

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1 Le Sang Noir, Le Jeu de Patience et Les Batailles Perdues.

2 Citons deux exemples extérieurs à la trilogie historique : dans Parpagnacco, le capitaine Eriksen abandonne son projet d’ouvrage historique sur la conjuration espagnole de 1618 et dans La Confrontation, M. Truffaud renonce à faire représenter sa pièce de théâtre à clés, intitulée Le Monument.

3 Qu’un personnage romanesque débine le genre auquel il appartient oblige à se poser quelques questions quant aux liens que l’auteur entretient pour sa part avec son matériau. Si l’on se remémore les considérations ironiques de Nicolas Maesker dans Les Batailles Perdues, on peut légitimement se demander à quel point Guilloux adhère à sa pratique littéraire.

4 Notons au passage que Cripure est le premier personnage (d’une longue série) à remettre en question, voire à condamner le rôle des idées dans l’Histoire. Dans Le Jeu de Patience, plusieurs personnages s’en prennent aux penseurs et aux idées, sans aller nécessairement jusqu’au pessimisme stirnérien de Cripure : Yves de Lancieux parle des « hommes à idées responsables de tout le mal dans le monde » (II, p. 101). Voir aussi dans Les Batailles Perdues le romancier Cardinal qui dit que, selon Chateaubriand, « l’invasion des idées sera pire que celle des barbares » (p. 89). On retrouve ici les notions de simplicité et d’ignorance qui vont se développer après Le Sang Noir. Ajoutons immédiatement que les critiques qui précèdent ne sont pas les manifestations d’un quelconque populisme, au sens moderne que ce mot a pris. Guilloux est tout sauf un ennemi de la pensée, un sectateur de l’instinct.

5 Petite digression biographique : il n’est pas à exclure que le personnage de Cardinal soit une façon pour Guilloux de se moquer de lui-même, puisque l’auteur des Batailles Perdues avait l’habitude envahissante d’accumuler lui aussi les documents.

6 « Peut-être y avait-il quelque chose d’un peu romanesque dans le cas de Cantoni ? », p. 305.

7 « Tous mes romans […] ne sont que de laborieux mensonges », p. 307.

8 « Il avait renoncé au roman, genre épuisé », p. 309.

9 À force de transposer, Cardinal ne sait plus inventer, c’est-à-dire s’affranchir du réel. Même si M. Truffaud dans La Confrontation n’est pas un romancier professionnel, il éprouve la même sensation que Cardinal, puisque sa pièce n’est, elle aussi, qu’une transposition de ses relations avec Gérard Ollivier, l’ami disparu.

10 La notation sur le mépris comme signe distinctif des maîtres fait penser à Cripure dans Le Sang noir.

11 « Lui quand il lisait un roman (cela lui arrivait tout de même parfois, quand il était fatigué de penser), il aimait bien mettre la radio », p. 171.

12 Né dans la fange = nez dans la fange, p. 43 ; mais le nom de plume choisi par Eugène prête à rire également : « Quand même : Labourbe… et la fange ! » (idem). La référence à la révolutionnaire Jeanne Labourbe semble très lointaine.

13 Tiens, comme Guilloux…

14 « Il y a certainement dans l’article de Schlumberger […] quelque chose de très vrai qui mérite réflexion », Carnets 1921-1944, p. 145 (1937).

15 Une notation de Guilloux dans ses Carnets prouve qu’il a été très sensible à certaines critiques : « Dans les propos de Rodin, cette remarque capitale : “Les critiques justes… sont celles qui vous confirmeront dans un doute dont vous étiez assiégé” », Carnets 1921-1944, p. 58 (1929).

16 « Ah non, je n’aime pas ça » répète plusieurs fois Marco (p. 345).

17 Bernhard T., La Cave (1976), Paris, Gallimard, 2002, coll. « L’Imaginaire », traduction d’Albert Kohn, p. 39-40.

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Référence numérique du chapitre

Martin, Y. (2012). Représentations du littérateur et de la littérature dans les romans de Louis Guilloux. In M. Frédéric & M. Touret (éds.), L’atelier de Louis Guilloux (1‑). Presses universitaires de Rennes. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pur.54381

Martin, Yann. « Représentations du littérateur et de la littérature dans les romans de Louis Guilloux ». In L’atelier de Louis Guilloux, édité par Madeleine Frédéric et Michèle Touret. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2012. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pur.54381.

Martin, Yann. « Représentations du littérateur et de la littérature dans les romans de Louis Guilloux ». L’atelier de Louis Guilloux, édité par Madeleine Frédéric et Michèle Touret, Presses universitaires de Rennes, 2012, https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pur.54381.

Référence numérique du livre

Frédéric, M., & Touret, M. (éds.). (2012). L’atelier de Louis Guilloux (1‑). Presses universitaires de Rennes. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pur.54372

Frédéric, Madeleine, et Michèle Touret, éd. L’atelier de Louis Guilloux. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2012. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pur.54372.

Frédéric, Madeleine, et Michèle Touret, éditeurs. L’atelier de Louis Guilloux. Presses universitaires de Rennes, 2012, https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.pur.54372.

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