Poésie et représentations grecques de l’artifice
p. 43-54
Texte intégral
1La contribution d’un helléniste à ce travail collectif pouvait consister soit à privilégier l’examen précis et approfondi d’un terme, d’une notion, d’un texte ou même d’un mythe donnés ayant rapport à la question de l’artifice, soit à tenter une sorte de synthèse des différentes manières dont les Grecs, depuis l’époque archaïque, ont pensé la dimension d’artefact de l’œuvre d’art, qu’elle soit musicale, picturale ou poétique. Au risque d’être excessivement cursif, on a choisi la deuxième voie, sans doute plus suggestive dans le cadre d’un parcours à la fois transhistorique et pluridisciplinaire. Puisqu’il s’agit des Grecs, l’intérêt d’une réflexion de cet ordre serait bien sûr de savoir ce dont nous avons hérité aussi bien que ce que nous avons perdu ou rejeté : comment les Grecs ont-ils articulé la part d’artifice propre à la création avec la très ancienne représentation du poète inspiré par les dieux ? Peut-on discerner dès l’origine, dès la période archaïque, les connotations négatives ou inquiétantes qui s’attachent à la pensée de l’artifice ?
2Comme la matière est vaste, la réflexion s’organisera selon trois approches distinguées par commodité, mais largement interdépendantes. Le caractère concentrique de ces trois approches s’autorise du fait qu’à l’époque archaïque et même classique, la notion d’artifice ne relève pas d’un domaine limité à la poétique au sens où nous l’entendons aujourd’hui, justement parce qu’il n’est pas encore constitué comme tel1.
Inspiration et artifice
3On distinguera donc d’abord un point de vue relevant de l’histoire des formes et des mots, selon lequel les Grecs passent progressivement d’un stade où le poète est investi d’un pouvoir quasiment magico-religieux2 à un stade beaucoup plus tardif (à la période hellénistique – celle des Alexandrins –, puis à l’époque de la Seconde Sophistique – celle de Philostrate, par exemple, ou du roman grec3), où s’autonomise un « espace littéraire » senti comme tel, où la mimêsis est parfois consciemment mimêsis de mimêsis et où l’espace de la référence est largement intertextuel4.
4À cet égard, il importe de souligner ce qui distingue la première ekphrasis dont nous disposons, la description du bouclier d’Achille forgé par Héphaïstos au chant XVIII de l’Iliade (v. 468-617), des ekphraseis tardives. D’une part, le texte homérique, loin d’évoquer un objet fini, rappelle de manière récurrente l’action fabricatrice du dieu-artisan5 et conserve à la description du bouclier une dynamique narrative6. D’autre part, excédant la dimension autoréférentielle du texte, les scènes représentées sur le bouclier d’Achille problématisent certaines des représentations du conflit et du droit qui hantent non seulement l’univers homérique, mais durablement la pensée grecque7.
5Ce cadre chronologique une fois posé, on constate que, dans le contexte de l’oralité archaïque, où chaque chant de l’aède ou du chœur rituel est une véritable réactualisation de la matière épique ou mélique sous l’effet d’une inspiration et d’une autorisation quasi-divines, le travail de composition de cette même matière se dit avec les métaphores de l’artisanat. S’il est vrai que les poètes de l’époque archaïque et même classique n’utilisent pas directement le verbe poiein et ses dérivés (poiêsis, poiêma, poiêtês) pour désigner leur propre activité, le modèle de la fabrication artisanale est bien présent à date très ancienne, plus ancienne qu’Homère lui-même, pour qualifier l’activité créatrice. On ne saurait donc parler d’une évolution historique qui conduirait de l’image de l’aède inspiré par les Muses à celle du poète technicien8.
6De ce point de vue, la mise en regard par Gregory Nagy du nom des deux poètes majeurs de l’époque archaïque est éloquente. Le nom d’Hésiode a souvent été interprété comme signifiant « celui qui émet la Voix » (Hêsi-odos) : le premier élément renverrait à la racine dont est issu le verbe hiêmi « émettre », récurrent à propos des Muses dans le proème de la Théogonie (v. 10, 43, 65, 67)9. Homère serait « celui qui ajuste [le chant] ensemble » (Hom-êros) : le deuxième élément de la composition, cette fois, procèderait de la racine indo-européenne *ar (* H2er-), qui signifie l’ajointement d’éléments divers et qui, comme d’ailleurs la racine * teks - (sur laquelle est formé tekhnê), est employée traditionnellement pour désigner l’activité du charpentier (tektôn)10. Pindare met d’ailleurs implicitement Homère au nombre des « doctes charpentiers » (tektones… sophoi) qui « assemblèrent » (harmosan) des « vers harmonieux » (Pythiques, 3, v. 113-114).
7On songera parallèlement au spectre sémantique étudié par Françoise Frontisi dans son ouvrage sur les mythes de Dédale, archétype de l’artisan11. Ainsi, le verbe daidallô (« façonner avec art »), le substantif daidalon (« ouvrage d’art ») ou l’adjectif daidaleos (« artistement travaillé ») se retrouvent, chez Homère ou Hésiode, à propos d’artefacts aussi différents que les trépieds automates et les armes d’Achille fabriqués par Héphaïstos sur l’Olympe12, ou à propos de la première femme dans la Théogonie (v. 575, 581) et dans Les Travaux et Les Jours (v. 64).
8Or, le champ de daidallô (« façonner avec art »), recoupe en partie celui des termes issus de la racine *ar- et associe l’image du tissage à celle de la charpenterie :
Les diverses techniques mises en œuvre pour la réalisation du daidalon paraissent pensées selon un même modèle intellectuel. L’accent y est mis […] sur la relation entre l’ensemble et les parties. Découpage et assemblage en constituent les axes privilégiés. Ces deux opérations qui […] correspondent aux phases majeures du travail tant du charpentier que du métallurgiste dominent aussi l’ouvrage des artisans du textile13.
9L’image du poète inspiré par les Muses et celle du poète tisserand, ajusteur ou charpentier, témoignent donc de deux conceptions de l’activité poétique, apparemment antagonistes, mais qui semblent coexister dès le départ dans une tension peut-être déjà propre au geste créateur14. De ce double mouvement, pourrait réflexivement témoigner le déploiement même de la Théogonie d’Hésiode, depuis le long proème placé sous le signe insistant de l’inspiration des Muses – mieux vaudrait dire d’ailleurs de l’aspiration par les Muses –, jusqu’à l’infinie diversification de l’univers divin, puis humain organisé par le chant.
Puissance créatrice du signe
10Dans un deuxième temps, on se situera dans une perspective d’ordre philosophique au sens large, où se poserait la question du rapport entre langage et vérité (alêtheia).
11Il faudrait parler ici du débat sur l’interprétation des v. 27-28 de la Théogonie et des paroles adressées par les Muses au poète dans un contexte quasi-initiatique : « Si nous savons dire bien des mensonges (pseudea polla) équivalant à des réalités (etumoisin homoia) / nous savons, quand nous le voulons, proclamer des vérités (alêthea gêrusasthai). » Ces vers sont le centre d’un conflit d’interprétation aigu. Un point de traduction, d’abord : on a pu montrer de façon convaincante que l’adjectif homoios, dans ce contexte de poésie archaïque, marque l’équivalence et non la ressemblance15. Les fables inspirées par les Muses ne ressemblent pas (seulement) à des réalités ; elles valent pour les réalités mêmes. Par ailleurs, l’interprétation globale de ces deux vers est débattue : Hésiode polémique-t-il contre d’autres formes de poésie auxquelles la sienne s’oppose comme le vrai au faux, ou, plus probablement, suggère-t-il que son chant est un « mentir-vrai » et que la parole poétique, à travers la réactualisation qu’elle opère au sein de la performance orale, est constitutive de la vérité même du monde16, ou même que certaines vérités ne peuvent advenir que par le détour de la fable ou de la fiction ?
12Ce serait l’occasion, en franchissant un pas de plus, de s’interroger sur la tendance grecque à considérer la puissance du verbe comme créatrice de vérité indépendamment de toute réalité préexistante, empirique ou non. Cette tendance atteint son point extrême (et en même temps son point de rupture) avec les spéculations sophistiques, notamment celles de Gorgias, dont Barbara Cassin a bien montré qu’elles ne relevaient pas de la simple rhétorique, mais qu’elles constituaient une sorte d’anti-ontologie, c’est-à-dire de pure « logologie ». Le point de vue de Gorgias, dans les fragments du Traité du Non-Etre ou de l’Éloge d’Hélène, est que tout legein équivaut à un poein (d’où les apories liées à la possibilité de dire le non-être). Barbara Cassin cite notamment un passage du Traité du Non-Etre qui marque à quelle extrémité se situait la pensée de Gorgias17 : « Le discours (ho logos) n’est pas commémoratif du dehors, mais c’est le dehors qui devient le révélateur du discours (to ektos tou logou mênutikon ginetai)18. »
13Naturellement, Platon et Aristote réfuteront vigoureusement cette position : Platon au nom d’une métaphysique bien connue dont il sera question à propos de l’image, Aristote au nom du primat qu’il convient d’accorder non seulement au signifié et au référent, procédant tous deux d’une essence (legein, « parler », c’est parler de quelque chose, legein peri tinos, c’est-à-dire « signifier », sêmainein19), mais aussi, contre tout cratylisme ou toute pulsion éponymique, au nom de l’arbitraire du signe20. Du reste, cette position à propos du langage n’empêche pas Aristote de considérer l’œuvre d’art, produit de la mimêsis, comme une création analogique de la nature qui, parfois, « réalise (epitelei) ce que la nature (hê phusis) ne réussit pas à achever (apergasasthai) » (Physique, II, 199 a 15-17)21.
Autonomie et ambivalence des images
14Le dernier cercle à parcourir relève d’un point de vue anthropologique, centré sur le statut de l’image et de l’effigie, qu’il s’agisse des objets cultuels, de la statuaire en général, mais aussi des différentes fictions poétiques où le thème de l’image et du double est central. Les études de Jean-Pierre Vernant dans ce domaine sont éclairantes22 et partent d’un constat capital : « La catégorie de la représentation figurée n’est pas une donnée immédiate de l’esprit humain, un fait de nature, constant et universel23. » Pour les Grecs d’avant la coupure platonicienne, l’effigie est sentie comme un véritable double doué de vie, d’une vie parfois plus réelle que la réalité même qu’elle évoque, justement parce qu’elle est parée de la kharis, cette grâce due à l’art qui l’anime d’un éclat quasiment divin24.
15C’est à Platon que l’on doit la dévaluation radicale non seulement de la réalité visible, reflet du monde idéal dans la Caverne, mais aussi la condamnation conséquente de toute forme de mimêsis, vouée par essence à éloigner d’un palier supplémentaire l’homme de la vérité. L’image devient nécessairement la copie dégradée et parfois terriblement fallacieuse d’une réalité préexistante, elle-même confuse et illusoire. Il est important de noter que, pour Platon, toute forme de mimêsis est une fabrique d’images (République, 599 a 7 : eidôlôn dêmiourgia), c’est-à-dire d’illusions, qu’il s’agisse des arts plastiques, de la poésie épique ou dramatique, de la musique et de la danse. Il faudra attendre Plotin pour que le monde visible ainsi que ses représentations par l’artiste redeviennent, pour qui sait les observer, des lieux d’appréhension immédiate du vrai25.
16Les analyses de Jean-Pierre Vernant ont, comme toujours, une admirable force de persuasion. Néanmoins, pour en rester à un plan anthropologique, mais peut-être moins nettement historique, la question semble devoir se poser de savoir si l’ambivalence de l’idole, de l’effigie, de l’image n’est pas toujours déjà latente dans les représentations que les Grecs s’en sont faites depuis Homère. Cette ambivalence originelle ne serait nullement contradictoire, d’ailleurs, avec la thèse d’un glissement progressif de l’image (et notamment de l’image fabriquée) de la sphère de l’essence à celle de l’illusion, car elle supposerait justement qu’on lui reconnaisse des pouvoirs et même parfois une capacité d’autonomie tendanciellement inquiétants. Il n’est pas indifférent, à cet égard, que cette ambivalence s’incarne, si l’on peut dire, dans des figures féminines dont la puissance de tromperie (apatê) et la duplicité sont marquées dès le départ26.
17On songera, bien sûr, en renvoyant aux analyses décisives de Nicole Loraux27, à la première femme d’Hésiode, ce « beau mal » (Théogonie, v. 585 : kalon kakon) façonné par Héphaïstos sur les ordres de Zeus, pour punir les mortels des ruses trop bénéfiques de Prométhée. Impossible d’analyser ici en détail la double version de la création de Pandora, qui d’ailleurs n’est nommée que dans Les Travaux et les Jours (v. 81)28. Même si cette semblance tout à la fois de « vierge » et de « déesse » (Théogonie, v. 572, Les Travaux et les Jours, v. 62-63)29 est transfigurée par la kharis que lui « verse » Aphrodite (Les Travaux et Les Jours, v. 65 ; cf. v. 73 et Théogonie, v. 583), le texte hésiodique retrouve le vocabulaire de l’habileté artisanale étudié par Françoise Frontisi : dans la Théogonie, le voile dont l’enveloppe Athéna est « savamment brodé » (v. 575 : daidaleên), « une merveille pour les yeux » (thauma idesthai) ; le diadème d’or ouvré par Héphaïstos, « merveille pour les yeux » lui aussi, est orné de « ciselures savantes » (v. 581 : daidala polla) ; dans Les Travaux et Les Jours, Athéna reçoit l’ordre de lui apprendre à tisser une toile « aux mille desseins » (v. 64 : poludaidalon)30.
18Surtout, la créature forgée par les dieux est présentée comme un pur artefact ; partant, la « race des femmes » comme close sur soi qui en est issue est également marquée du sceau originel de l’artifice :
C’est de celle-là (ek tês), en effet, que provient la race des femmes, femelles de leur espèce (genos gunaikôn thêluteraôn) ; / oui, c’est d’elle que proviennent, pernicieuses, la race et les tribus des femmes (genos kai phula gunaikôn). (v. 590-591)
19On s’attardera un instant également sur la figure d’Hélène, redoutablement ambivalente dès Homère, et dont l’ambivalence même nourrira le mythe du dédoublement mis en scène par Euripide dans la tragédie éponyme. Dans cette version, selon laquelle seul un fantôme d’Hélène, un double, un eidôlon, serait allé à Troie et aurait causé tant de morts, Euripide pose très clairement, à travers une série d’effets à la fois dramatiques et textuels, la question de la prééminence de l’apparence, du signe, du mot sur la chose même. L’intrigue repose sur l’opposition entre la fausse Hélène, faite d’éther par le vouloir d’Héra, tantôt appelée « fantôme » (eidôlon) ou « apparence » (dokêsis)31, tantôt opposée à la véritable selon la polarité, chère à la langue grecque, entre le « nom » (onoma) et la « chose » (pragma) ou le « corps » (sôma).
20Mais l’une des richesses de la pièce vient du fait qu’Euripide, en bon Tragique, complique l’opposition philosophique bien établie entre onoma et sôma : à plusieurs reprises, en effet, le partage entre la fausse Hélène et la véritable vacille, comme si, s’agissant d’Hélène, c’était bien le double, le fantôme pour qui tant de guerriers se sont battus, qui était lesté du plus grand poids de réalité (que dire d’intéressant, en effet, de la véritable Hélène, demeurée dix ans en Egypte à regarder la mer ?).
21Je citerai simplement deux exemples de ces brouillages32 : aux v. 66-67 de la pièce, l’héroïne oppose son « nom » (onoma) diffamé et son « corps » (sôma), épargné par la honte, puisqu’il est resté en Egypte ; mais, aux v. 383-385, Hélène se lamente sur les malheurs causés par son « corps » (demas), alors qu’on attendrait, bien sûr, la mention du « fantôme » (eidôlon) ou du « nom » (onoma). Au v. 583, Ménélas demande à Hélène, qui lui apprend que son « fantôme » seul (eidôlon) est allé à Troie (v. 582) : « Et qui fabrique ainsi des corps (sômata) doués de regard33 ? », tandis que, cinq vers plus bas (v. 588), son épouse affirme : « Le nom (onoma) peut être partout, pas le corps (sôma). »
22Ces vacillements, ces tremblements du texte sont d’une grande portée, et l’on sait que l’interprétation du mythe de la double Hélène est inépuisable. Pour Nicole Loraux, par exemple, la fausse Hélène serait « le fantôme de la sexualité34 », c’est-à-dire une allégorie du fantasme amoureux, dont l’objet, déréalisé à mesure même du désir qu’il inspire, est d’autant plus absenté qu’il est investi. Mais on peut aussi voir, dans ce même mythe, une autre allégorie, celle de la toute-puissance du signe, doué d’un pouvoir d’ubiquité que la chose même n’aura jamais, comme l’a remarqué avec beaucoup de pertinence Emmanuel Terray dans sa lecture d’Euripide35 :
Hélène nous donne une double leçon […] La pièce dévoile au grand jour l’absurdité de la guerre : des milliers d’hommes se sont entre-tués afin de s’emparer d’une illusion. Dire que ces guerriers sont morts pour une ombre, c’est assurément retirer tout sens à leur destin, mais c’est aussi exalter la puissance de l’ombre, puisque, pour celle-ci, ils ont effectivement péri. La cause irréelle a engendré des effets qui sont, eux, tout à fait réels […] En regard, le séjour de la véritable Hélène en Égypte est resté parfaitement stérile […] La supériorité de l’apparence tient en partie au rapport très intime qu’elle entretient avec le langage. Les êtres et les choses occupent par nature un site, une place unique et déterminée dans l’espace et dans le temps ; si la vérité a besoin de leur concours pour triompher de l’erreur, il faut que la confrontation se tienne en ce lieu, afin qu’ils puissent rendre leur arbitrage. Partout ailleurs, ils sont absents, et la vérité risque d’avoir le dessous. L’apparence au contraire bénéficie d’une sorte d’ubiquité, puisque le nom suffit à l’évoquer.
23Enfin, en franchissant le pas déjà esquissé dans le texte d’Emmanuel Terray, on notera qu’Hélène tend à n’être plus qu’un nom, que le motif de l’eidôlon, de l’image, se fond dans celui d’un pur signifiant doué d’une étonnante labilité, comme l’avait déjà chanté Ronsard, retrouvant les jeux éponymiques d’Eschyle sur le nom d’Hélène36. Hélène ne serait donc plus qu’« Hélène », un onoma dont la fascination traverse les époques37, et ce n’est donc pas du tout un hasard si Gorgias lui a consacré un traité où il célèbre la vertu substitutive du verbe, aussi puissante que celles des images.
24Avançons, pour conclure, les quelques propositions suivantes. L’Antiquité grecque a connu dès le départ la coexistence de deux conceptions complémentaires de l’activité poétique, placée sous le double signe de l’inspiration divine et de la fabrication artisanale. L’image sculptée ou peinte, conçue d’abord comme un substitut doué de présence, a oscillé ensuite entre le statut de construction mimétique signifiante et celui de décalque tendanciellement illusoire et trompeur, et cette oscillation concerne aussi l’écriture, dont Platon nous rappelle, dans le Phèdre, à quel point il est « terrible » (deinon) qu’elle ressemble à ce point à la peinture et à son simulacre de vie38. Mais cette évolution n’a pas empêché les Grecs d’être durablement sensibles à la puissance des artefacts et à leur capacité parfois menaçante d’autonomisation.
Notes de bas de page
1 Fr. Frazier remarque que l’on ne trouve pas dans l’Athènes classique de tekhnai poiêtikai comparables aux nombreuses tekhnai rhêtorikai attestées (Poétique et création littéraire en Grèce ancienne. La découverte d’un « nouveau monde », Besançon, Presses universitaires de Franche-Comté, 2009, p. 16 : « Les réflexions sur la poésie de l’époque classique ne sont pas d’ordre technique, mais philosophique. »)
2 Detienne M., Les Maîtres de vérité dans la Grèce archaïque, Paris, Maspero, 1967, rééd., Paris, La Découverte, 1981.
3 Voir Zeitlin F. I., « The Poetics of Eros : Nature, Art and Imitation in Longus’ Daphnis and Chloe », Halperin D., Winkler J. et Zeitlin F. I. (éd.), Before Sexuality. The Construction of Erotic Experience in the Ancient Greek World, Princeton, Princeton University Press, 1990, p. 417-464 ; « Gardens of Desire in Longus’ Daphnis and Chloe : Nature, Art and Imitation », Tatum J. (éd.), The Search for the Ancient Novel, Baltimore, The Johns Hopkins University Press, 1994, p. 148-170 ; Alaux J. et Létoublon F., « La grotte et la source. Paysage naturel et artifice dans Daphnis et Chloé et Leucippé et Clitophon », Pouderon B. (éd.), Lieux, décors et paysages de l’ancien roman des origines à Byzance, Lyon et Paris, Maison de l’Orient et de la Méditerranée, 2005, p. 57-74.
4 Voir, sur Philostrate, Blanchard M.-E., « Problèmes du texte et du tableau : les limites de l’imitation à l’époque hellénistique et sous l’empire », Cassin B. (éd.), Le Plaisir de Parler, Paris, Les Éditions de Minuit, 1986 (p. 131-154), p. 147. Point de vue opposé à propos des eikones : Hadot P., préface à Philostrate, Galerie de tableaux, Bougot A. (trad.) et Lissarrague F. (trad. rév.), Paris, Les Belles Lettres, 1991, p. vii-xxii.
5 Iliade, XVIII : poiei … pantose daidallôn (v. 478-479), poiei daidala polla (v. 482), poiêse (v. 490, 573, 587), eteuxe/teuxe (v. 483, 609), etithei (v. 541, 550, 561, 607), poikille (v. 590).
6 Frazier Fr., op. cit., p. 11-12. Cf. Aubriot D., « Représentation plastique et récit poétique : le Bouclier d’Achille ou les œuvres d’art en miroir », Chefdor M. (éd.), De la palette à l’écritoire, Nantes, 1997, p. 25-35 ; « Imago Iliadis. Le Bouclier d’Achille et la poésie de l’Iliade », Kernos, 12, 1999, p. 9-56 ; « Autour des représentations artistiques chez Homère. Fausse description, vraie narration : dieu et poète », Gaia, 7, 2003, p. 135-146.
7 Voir Loraux N., La Cité divisée, Paris, Payot, 1997.
8 Voir Bouvier D., « Quand le poète était encore un charpentier… Aux origines du concept de poésie », Heidmann U. (éd.), Poétiques comparées des mythes. De l’Antiquité à la modernité, Lausanne, Payot, 2003, p. 225-266.
9 Voir West M. L., Hesiod. Theogony, Edited with Prolegomena and Commentary, Oxford, Oxford University Press, 1971, p. 161 ; Chantraine P., Dictionnaire étymologique de la langue grecque. Histoire des mots, Paris, Klincksieck, 1968, p. 417 (le second terme serait *Fodê, « voix »). Pour une autre interprétation, voir Bader F., « Le liage, la peausserie et les poètes-chanteurs Homère et Hésiode : la racine *seh2- “lier” », Bulletin de la société de linguistique de Paris, 85, 1990, p. 1-59 : le premier élément se rattacherait à une racine signifiant « coudre », « lier », mais jouerait secondairement avec la racine signifiant « lancer », « émettre » ; le deuxième élément combinerait la racine de la « voix » et celle du « chemin » (hodos). Pour Meier-Brügger M., « Zu Hesiods Namen », Glotta, 68, 1990, p. 62-67 (p. 66), le nom d’Hésiode signifierait « der, welcher sich über Wege (Reisen ?) freut » : non pas « celui qui émet la voix », donc, mais « celui qui aime la voie ».
10 Nagy G., Greek Mythology and Poetics, Ithaca, Cornell University Press, 1990, p. 47 ; Le Meilleur des Achéens. La Fabrique du héros dans la poésie grecque archaïque (The Best of the Achaeans : Concepts of the Hero in Archaic Greece, 1979), Loraux N. et Carlier J. (trad.), Paris, Le Seuil, 1994 p. 342-347 ; « Autorité et auteur dans la Théogonie hésiodique », Blaise F., Judet de La Combe P. et Rousseau Ph. (éd.), Le Métier du mythe. Lectures d’Hésiode, Lille, Presses Universitaires du Septentrion, 1996, p. 41-52, notamment p. 43-44. Significativement, le proème de la Théogonie reprend également ce champ métaphorique, parallèlement aux formes issues de hiêmi (v. 29, 39). Sur la répartition des différents termes entre le grec et le latin, voir Nagy G., Le Meilleur des Achéens…, p. 346-347, § 13 n. 1 : le latin n’a plus le verbe dont ars est dérivé (sur l’étymologie d’ars, voir Gavoille É., Ars. Étude sémantique de Plaute à Cicéron, Louvain, Peeters, 2000, p. 19-31), mais texo (« “construire, joindre” dans l’ancien latin, “tisser” dans la langue plus récente » ; cf. Benveniste É., Vocabulaire des institutions indo-européennes, Paris, Les Éditions de Minuit, 1969, I, p. 11, à propos du débat autour de texo et taksen sanskrit, « “tissage” et “charpentage” paraissant irréductibles à une technique commune ») ; le grec n’a plus le verbe dont tekhnê est dérivé, mais arariskô ; voir aussi p. 346, § 12 n. 3, sur le lien entre Harmonie (et peut-être Arès) et la racine *ar-.
11 Frontisi-Ducroux Fr., Dédale. Mythologie de l’artisan en Grèce ancienne, (Paris, Maspero, 1975) rééd., Paris, La Découverte, 2000.
12 Iliade, XVIII : sur les six occurrences de mots formés sur la racine daid- dans cet épisode, deux se rapportent aux trépieds, puis au siège sur lequel Thétis est invitée à s’asseoir (v. 379, 390), trois au travail des armes d’Achille (v. 479, 482, 612) et un seul aux œuvres d’Héphaïstos en général (v. 400). On notera aussi, dans cet épisode, la présence des servantes d’or douées de voix et de pensée, qui assistent le dieu (v. 417-420). Pour un autre emploi de daidaleos dans l’Iliade, voir VIII, v. 195, à propos de la cuirasse de Diomède, œuvre du dieu. Sur les automates d’Héphaïstos et ses œuvres en général, voir Marcinkowski A. et Wilgaux J., « Automates et créatures artificielles d’Héphaïstos : entre science et fiction », Techniques et culture, 43-44, Mythes. L’origine des manières de faire, décembre 2004.
13 Frontisi-Ducroux Fr., op. cit., p. 61. Sur l’ambivalence du statut de l’artisan en Grèce et chez Platon même, voir Vidal-Naquet P., « Étude d’une ambiguïté : les artisans dans la cité platonicienne », Le Chasseur Noir. Formes de pensée et formes de société dans le monde grec, Paris, Maspéro, 1981, p. 289-316, notamment p. 301 et 308 (rappelons au passage que la mêtis a partie liée avec la souveraineté, à commencer par celle de Zeus dans la Théogonie). Sur le dêmioergos, voir aussi Nagy G., Le Meilleur des Achéens…, p. 343-347, et Odyssée, XVII, v. 381-387 : « devin, médecin, charpentier et aède font partie de ceux qui « œuvrent pour le dêmos ».
14 Voir Loraux P., Le Tempo de la pensée, Paris, Le Seuil, 1993, p. 354 : « Toujours la pensée ira dans deux directions, du côté de l’énergie, du côté de la nostalgie. On dira même que penser, c’est éprouver l’indistinction de l’une et de l’autre, une délimitation floue entre la pensée travaillant à l’articulation, à la médiation, etc., et la pensée entretenant une persistance du rêve où elle fusionne avec l’Un, l’Absolu, l’Infini. »
15 Voir Heiden B., « The Muses’ Uncanny Lies : Hesiod, Theogony 27 and Its Translators », American Journal of Philology, 128, 2007, p. 153-176.
16 Voir Blaise F., Judet de La Combe P. et Rousseau Ph. (éd.), Le Métier du mythe. Lectures d’Hésiode, Lille, Presses Universitaires du Septentrion, 1996, p. 15-70. Sur la nature de la mimêsis dans la performance poétique archaïque, voir (entre autres analyses) Nagy G., La Poésie en acte. Homère et autres chants (Poetry as Performance. Homer and beyond, 1996), Bouffartigue J. (trad.), Paris, Belin, 2000, p. 124-125 : « La mimésis, au sens le plus ancien du terme, exige que l’identité du locuteur se fonde dans son rôle de locuteur, tout comme les identités des destinataires et des objets de la parole doivent se fondre dans leurs rôles respectifs. Si la fusion a bien lieu, alors le modèle n’est pas simplement copié, c’est-à-dire imité. Il est remodelé, c’est-à-dire réactualisé. »
17 Sextus Empiricus, Adversus mathematicos, VII, 85 : cf. Cassin B., L’Effet sophistique, Paris, Gallimard, 1995, p. 133-140.
18 Cassin B. (éd.), Le Plaisir de Parler, Paris, Les Éditions de Minuit, 1986, p. 17 (je cite la traduction la plus récente : Cassin B., L’Effet sophistique, p. 138). Voir aussi Cassin B. (éd.), Positions de la sophistique, Paris, Vrin, 1986, p. 131-132, et Platon, Euthydème, 284 a-e. Cette autonomie créatrice du langage s’exprime même chez Eschyle, c’est-à-dire au sein d’un genre aussi fondamentalement mimétique et critique que la tragédie attique : voir Judet de La Combe P., Les tragédies grecques sont-elles tragiques ?, Paris, Bayard, 2010, p. 204-211 ; p. 306-310 (« Eschyle traite les mots comme des événements et non comme des signes notant un réel qui leur serait extérieur »).
19 Voir notamment Cassin B. (éd.), Le Plaisir de Parler, p. 7.
20 Rappelons par exemple au passage l’analyse des onomata dans la Poétique (57 a 13-14) : le nommé Théodore (Théo-dôros) n’est pas un cadeau des dieux, et Kall-(h) ippos n’a rien de chevalin (cf. De L’Interprétation, 16 a 19-29). Voir Aristote, La Poétique, Dupont-Roc R. et Lallot J. (éd., trad., n.), Paris, Le Seuil, 1980, p. 328-330 (« aucun nom, fût-il composé de parties signifiantes identifiables, ne doit être pris pour un énoncé »).
21 Voir Aristote, La Poétique, Lambin G. (trad., introd., n.), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2008, p. 138-139. Cf. Aristote, Métaphysique, Z, 1032 a 12-13 ; 1032 a 32-1032 b 1. Voir aussi plus largement, Zagdoun M. -A., L’Esthétique d’Aristote, Paris, Cnrs éditions, 2011, p. 69-91.
22 Vernant J. -P., Religions, histoires, raisons, Paris, Maspéro, 1979, p. 105-137 ; Figures, idoles, masques, Paris, Julliard, 1990, p. 17-82 ; Mythe et pensée chez les Grecs (Paris, Maspéro, 1965) rééd., Paris, La Découverte, 1990, p. 322-338 ; Entre mythe et politique, Paris, Le Seuil, 1996, p. 357-422.
23 Vernant J. -P., Entre mythe et politique, p. 379.
24 Dans une autre optique, voir Bettini M., Le Portrait de l’amant (e) (Il ritratto dell’amante), Bouffartigue G. (trad.), Paris, Belin, 2011, notamment p. 58-61, 106, 113 : « l’image vaut plus que sa “ressemblance” » (p. 58) ; elle est « un signe entaché de réalité » (p. 60) ; elle tient plus, en somme, de la synecdoque que de la métaphore.
25 Hadot P., Plotin ou la simplicité du regard, Paris, Gallimard, 1997, p. 47-69. Voir notamment Plotin, I, 6, 9, où l’identification non-médiatisée de l’âme à Esprit universel prend comme modèle le sculpteur (cf. V, 8, 1, 38) ; V, 8, 2, 9-26 (à propos d’Hélène) ; V, 8, 6, 3 (à propos des hiéroglyphes).
26 Sur les accointances entre la tekhnê et le féminin, voir Vidal-Naquet P., op. cit., p. 315, sur République, X, 620c, où, dans le mythe d’Er, l’âme d’Epeios, l’inventeur du cheval de Troie revêt la condition d’une « femme artisane » (tekhnikês gunaikos) et sur le rôle de Thétis auprès d’Héphaïstos au chant XVIII de l’Iliade (v. 395 sqq.). Cf. supra note 13.
27 Loraux N., Les Enfants d’Athéna. Idées athéniennes sur la citoyenneté et la division des sexes (Paris, Maspero, 1981) rééd., Paris, Le Seuil, 1990, p. 75-117.
28 Hésiode, Théogonie, v. 570-612 ; Les Travaux et les Jours, v. 42-89. Pour la Théogonie, les traductions sont celles de A. Bonnafé (Hésiode. Théogonie. La naissance des dieux, précédé d’un essai de Jean-Pierre Vernant, Paris, Rivages, 1981). G. Lambin (Le Chanteur Hésiode, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2012, p. 120) considère que la version des Travaux, beaucoup plus complexe, est nettement moins marquée par une misogynie univoque, et refuse donc de traiter les deux versions comme un tout.
29 Cf. Les Travaux et le Jours, v. 62, à propos de Pandora (athanatêis de theêis eis ôpa eiskein) et Iliade, III, v. 158, à propos d’Hélène (ainôs athanatêisi theêis eis ôpa eoiken).
30 Je reprends la traduction de F. Frontisi (op. cit., p. 48).
31 Mais non mimêma, si l’on en croit la lecture de C. Amiech (Euripide, Hélène, Amiech C. [éd., trad., n.], Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2011) : voir v. 74-75, où il faudrait lire, contre Triclinius, misêma, « objet de haine » ; v. 875, où il faudrait garder, contre Henri Estienne, timêma, « le prix de la victoire »).
32 Voir Alaux J., Lectures tragiques d’Homère, Paris, Belin, 2007, p. 132-133.
33 Sur cette expression, voir Bettini M., Je est l’autre ? Sur les traces du double dans la culture ancienne, Bouffartigue G. (trad.), Paris, Belin, coll. « L’Antiquité au présent », 2012, p. 31
34 Loraux N., Les Expériences de Tirésias. Le féminin et l’homme grec, Paris, Gallimard, 1989, p. 232-252.
35 Terray E., La Politique dans la caverne, Paris, Le Seuil, 1990, p. 360 (cf. Euripide, Hélène, v. 588, cité supra). Cf. Ernst Bloch à propos de Hofmannsthal : « C’est l’Hélène troyenne et non l’égyptienne qui a marché derrière les étendards… Et les rôles sont dès lors faciles à inverser : l’inconsistante sirène de Troie, à laquelle se rattache tout un monde de fautes, des souffrances, mais surtout d’espoir, prend dans cette étrange aporie une consistance presque réelle, tandis que la réalité se change pour ainsi dire en mirage. » (Le Principe Espérance [Das Prinzip Hoffnung], Wuilmart I. [trad.], I, Paris, Gallimard, 1976, p. 223-225, cité par Cassin B., L’Effet sophistique, p. 80-81.)
36 Eschyle, Agamemnon, v. 689-690 (Hélène « ravisseuse de vaisseaux », hele-nas, « ravisseuse d’hommes », hel-andros, « ravisseuse de cités », hele-ptolis ; voir Bollack J. et Judet de La Combe P., L’Agamemnon d’Eschyle. Le texte et ses interprétations, vol. 2, Lille, Presses Universitaires du Septentrion, 1982, p. 31-32 : les deux premières épithètes nient aussi les noms de Méné-las et de Pâris-Alex-andros) ; Ronsard, Sonnets pour Hélène (Smith M. [éd.], Genève-Paris, Droz-Minard, 1970), II, 9, v. 1-3 : « Ny la douce pitié [eleos ; cf. Gorgias, Eloge d’Hélène, 7 : eleêtheiê], ny le pleur lamentable/Ne t’ont baillé ton nom : ton nom Grec vient d’oster/, De ravir, de tuer, de piller, d’emporter […] » ; le nom d’Hélène est dérivé du radical sur lequel est formé l’aoriste helein (« saisir », « supprimer », « tuer »), hel-. Symétriquement, voir I, 3, v. 1 (« Ma douce Helene, non, mais bien ma douce haleine… »), qui annonce Marcel Duchamp (Belle haleine. Eau de voilette, 1921). On notera le renversement saisissant et profondément plotinien opéré par Yves Bonnefoy (citant Ronsard), pour qui « Hélène est l’autre nom d’une voix en deçà du “leurre des mots” » et témoigne « d’une unité à retrouver en deçà du signe » (Labarthe P., « Yves Bonnefoy et le don de la citation : un vers de Ronsard dans Les Planches courbes », Illouz J. -N. [éd.], L’Offrande lyrique, Paris, Hermann, 2009, p. 339-357). Cf., à propos de Troie et d’Hélène dans l’œuvre d’Yves Bonnefoy, Starobinski J., L’Encre de la mélancolie, Paris, Le Seuil, coll. « La Librairie du XXIe siècle », 2012, p. 331-337.
37 Au hasard des lectures, deux exemples, presque fortuits donc, de jeux sur le signifiant d’Hélène, chez deux auteurs en partie contemporaines et que pourtant tout oppose, sauf d’avoir été femmes, et amantes : de Vilmorin L., L’Alphabet des aveux, Paris, Gallimard, 1954, p. 10 (« ABI ABI / G AC CD ME OBI / E WQ REV FUI /…/ LN MA FY LHR LET » = « Abbaye, abbaye / J’ai assez cédé, aimé, obéi / Et double vécu et rêvé et fui / … / Hélène aima et fit grec [s] et la chair et l’été ») ; M. Duras, L’Amant, Paris, Les Éditions de Minuit, 1984, p. 90 (« Elle. Hélène L. Hélène Lagonelle… »).
38 Platon, Phèdre, 275 d. Voir les remarques pénétrantes de M. Bettini à propos du Phèdre (Le Portrait de l’amant(e), p. 248-249) : le discours écrit lui-même, privé de « père », devient un eidôlon potentiellement trompeur de la parole vive.
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