L’union de la Bretagne à la France : deux interprétations au xxe siècle
p. 625-639
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Texte intégral
1Au début du xxe siècle, trois événements vont rappeler le souvenir du mariage d’Anne de Bretagne avec Charles VIII en 1492, mariage qui préparait de façon inéluctable l’union du duché de Bretagne au royaume de France, officialisée par le traité de 1532. Ces trois événements scandent les premières décennies du siècle :
- 1911, l’inauguration en grande pompe d’un monument commémoratif commandé au sculpteur Jean Boucher pour orner l’hôtel de ville de Rennes ;
- 1922, la publication d’une Histoire de notre Bretagne, avec parmi les illustrations de Jeanne Malivel, deux gravures où elle prend position sur le fait historique et sur le monument de Rennes ;
- 1932, le dynamitage du monument par les activistes de la société secrète Gwen ha Du.
2Le monument et la gravure révèlent la vitalité dans les mémoires d’un événement vieux de quatre siècles et la dualité extrême des opinions face à ce fait historique.
1911, à Rennes, un monument commémoratif
3C’est dans le cadre d’une politique municipale ambitieuse que le monument de Jean Boucher va être réalisé. En 1908 une municipalité radical-socialiste a pris en main les destinées de Rennes, sous la direction d’un maire volontariste, Jean Janvier (1859-1923). Soucieux de moderniser sa ville, il s’attache aussi à en affermir l’image de capitale administrative et intellectuelle. C’est un radical fermement attaché à la République1 et fier de son ancrage dans le monde du travail2. Ni ses origines en Haute Bretagne (il est né près de Fougères), ni sa formation ouvrière (compagnon du Tour de France) ne l’ont fait entrer en contact avec les milieux bretons acteurs du réveil régionaliste, comme l’Union régionaliste bretonne née en 1898 sous l’égide d’Anatole Le Braz. On ignore si, même pendant son mandat, il a eu quelque écho de l’appel lancé par La Pensée bretonne, en 1913, ou s’il a lu les numéros de la revue Brug, qu’illustre Jean-Julien Lemordant, au moment même de la commande qui est faite à celui-ci de décorer le plafond du théâtre (l’artiste va jusqu’à aider financièrement son ami Émile Masson, le fondateur de la revue, sur la rétribution que lui a accordée la ville de Rennes3). Ses débuts en politique l’ont fait agir au niveau régional, mais pour fédérer les efforts d’entente républicaine en vue des élections municipales4, très loin des préoccupations à connotation régionaliste.
4Aussi, quand il envisage achèvement, aménagement et embellissement de l’hôtel de ville construit sur les plans de Jacques Gabriel après l’incendie de 1720, c’est pour en faire un monument à la hauteur de la destinée historique de la capitale de la Bretagne. La niche centrale, dans l’axe du beffroi, était vide depuis qu’en 1793 le groupe en bronze de Louis XV escorté de deux allégories, la Bretagne et la Santé, érigé en 1754 par Jean-Baptiste Lemoyne (1704-1778), avait été fondu.
5Aucun des projets lancés pour le remplacer au cours du xixe siècle n’a abouti. Dans les années 1880, il a été longuement question de placer dans la niche une statue du maire Jean Leperdit (1752-1829), ainsi honoré « pour l’amour de la patrie et de la liberté » qu’il incarne, pour son « culte de l’humanité, son énergie toute bretonne et son désintéressement absolu5 ». Un maire aurait remplacé le souverain. Sa statue est envisagée soit seule, soit accompagnée d’autres figures, ou deux allégories du commerce et de l’industrie, ou une allégorie de la Bretagne. En 1883, le maire Edgard Le Bastard (1836-1892) se dit hostile au projet Leperdit car selon lui « l’expérience indique que les statues politiques sont détruites tous les vingt ans » et il évoque déjà « un groupe allégorique montrant la réunion de la Bretagne à la France ». Il n’est pas suivi par son conseil municipal6.
6En 1893, bien qu’il ait toujours été hostile à l’idée de placer un personnage contemporain dans la niche, c’est Edgard Le Bastard lui-même que l’on veut y placer, il aurait été accompagné de deux nymphes déversant leurs urnes dans une vaste coquille7. Le sculpteur Emmanuel Dolivet (1854-1910) emporte le concours, mais finalement la statue est placée ailleurs.
7En 1896 le même Emmanuel Dolivet avait travaillé à la suite d’une initiative privée (un legs) à un groupe de trois personnages conçu dans l’esprit de l’œuvre primitive de Lemoyne. Il le rappelle en 1904 quand un autre projet est proposé, celui de Jean Boucher. En effet, Jean Janvier hérite d’un projet qui a reçu l’accord de la municipalité précédente (le 27 août 1904). À cette date, Jean Boucher avait ainsi présenté son idée au maire : « Le sujet à traduire en art serait la Bretagne se donnant à la France. Je rêve d’une France belle et sereine […] heureuse et fière [et d’une] Bretagne amenant à sa suite et lui faisant cortège d’une puissante originalité, tous les Bretons en leurs costumes si parfaitement significatifs. » La convention définitive en 1909 reprend à peu près les mêmes termes, la pensée du sculpteur s’est précisée sur ce « groupe allégorique, la France accueillant la Bretagne. Il comprendra huit personnages en bronze, deux personnages principaux, en haut la France représentée sous les traits d’une femme à l’allure majestueuse et altière, mais au visage exprimant la bonté et la générosité, puis à côté et plus bas, une autre femme figurant la Bretagne et venant dans une attitude de tendresse et d’amour mettre ses enfants sous l’égide protectrice de la mère patrie ».
8Les archives sont muettes sur le choix du sculpteur Jean Boucher (1870-1939). Son origine rennaise (il est né tout près, à Cesson), la bourse de la ville dont il a bénéficié pour ses études à Paris ont évidemment joué (« faire acte de reconnaissance envers la ville à qui je dois ma carrière », écrit-il). Sa notoriété incontestable a pesé : deux fois médaillé au Salon des artistes français en 1896 et 1899, il a déjà réalisé des monuments à Saint-Brieuc (Charles Baratoux, 1904), Paimpol (Alfred de Courcy, 1905), Plouaret (François-Marie Luzel, 1906), Guernesey (Victor Hugo, 1908)8, premières œuvres d’une carrière officielle très riche. Emmanuel Le Ray (1859-1936), l’architecte de la ville de Rennes avec lequel il va travailler, loue sans réserve le sculpteur : « Il a su reproduire si exactement les traits du doux philosophe de Tréguier, il a su rendre si expressive la physionomie du grand poète et le camper sur son rocher de Guernesey de façon si originale9. » Le monument à Ernest Renan (Tréguier, 1903) lui a valu la célébrité, liée plus aux circonstances de la commande et aux violentes manifestations de l’inauguration, qu’à la qualité intrinsèque de la sculpture10. C’est une commande des Bleus de Bretagne, dont lui-même est membre, qui a été ressentie comme une provocation par les catholiques conservateurs. Cette appartenance ne pouvait qu’être sympathique à Jean Janvier qui signe la convention avec le sculpteur le 19 mars 1909. Le Breton, républicain radical Armand Dayot, créateur en 1899 des Bleus de Bretagne, qui a joué un rôle déterminant dans maintes commandes commémoratives en Bretagne, est allé lui-même constater, en tant qu’inspecteur général des Beaux-Arts, l’avancement du travail de Jean Boucher dans son atelier parisien le 5 mars 191011.
9Le monument de Rennes est donc pensé, au niveau de la municipalité comme de l’artiste, dans la même voie politique que celle qui a présidé au monument Renan à Tréguier, politique de centralisme et d’assimilation intégrale des régions qui constituent la nation. Les incidents provoqués par les répercussions de la loi de Séparation des Églises et de l’État, en 1903 et 1904, n’ont pas fait faiblir la détermination laïque. À Rennes, ces incidents ont d’ailleurs été limités.
10Dans cette ville, personne ne pensait déclencher des hostilités sur le front politique avec ce groupe de Jean Boucher. Au demeurant, il n’est question dans le projet que d’un groupe allégorique de la Bretagne et de la France. Or, il y a dans les commentaires contemporains une véritable dualité de lecture : réunion allégorique de la Bretagne à la France ou mariage d’Anne et de Charles VIII le 6 décembre 149112 ? Les archives ne portent aucune trace d’un glissement du projet en cours d’exécution, de l’évocation allégorique vers une représentation beaucoup plus concrètement historique. En août 1911 une commission municipale voit le groupe terminé chez le fondeur sans faire aucune remarque. Le 1er décembre 1911, après que le monument ait été inauguré, le rapport du maire évoque toujours « en haut de la composition [ ?], [les] deux grandes figures, la France et la Bretagne » et des félicitations sont adressées à Jean Boucher « qui sut si bien non dans un geste d’hommage mais bien dans un geste d’amour symboliser l’union de la Bretagne à la France »… L’insistance est ici une réponse aux critiques qui se sont élevées immédiatement après le dévoilement de la sculpture, et même avant.

Jean Boucher, La réunion de la Bretagne à la France, hôtel de ville de Rennes, bronze, 1911, photographie ancienne.

Jean Boucher, Le monument de Rennes, détail.
11La présentation des grandes fêtes organisées pour l’inauguration met l’accent, tant dans l’iconographie que dans les commentaires, sur le déroulement concret de la cérémonie du mariage. L’affiche annonçant l’inauguration reprenait la figure imaginée par Édouard Toudouze pour la tapisserie placée en 1900 dans la Grand’ Chambre du Palais de justice, une duchesse fièrement montée sur un destrier et abritée sous un dais herminé. Le « programme souvenir » des grandes fêtes des 28 et 29 octobre 191113 mettait en regard l’image du monument et une notice historique résumant les circonstances qui ont poussé la duchesse de Bretagne à consentir au mariage avec le roi de France. Là est sans doute l’origine de la lecture proprement historique (et non allégorique) qui est faite du monument.
12Les photographies du monument ne permettent pas de percevoir précisément chaque composante du groupe, mais une photographie prise dans l’atelier de l’artiste livre un gros plan sur la tête de la France : l’expression est sévère, enfermée dans un voile serré, les traits sont peu féminins mais les cheveux pris dans une résille encadrant le visage sont bien ceux d’une femme, il ne s’agit pas de Charles VIII14…
13Mais qu’il s’agisse de la duchesse Anne ou de la Bretagne, du roi Charles VIII ou de la France, c’est la lecture guidée par la composition choisie par l’artiste qui donne sens, et il est le même dans les deux cas et soulève l’indignation de nombreux Bretons.

« Le programme souvenir » de la fête inaugurale, 1911, Cesson, centre Jean-Boucher.
14Le 29 octobre Le Breton de Paris publiait « une protestation » de l’Union régionaliste bretonne, déjà abondamment signée : protestation énergique « contre l’attitude humiliée donnée à la Bretagne vis-à-vis de la France […] attitude qui constitue à la fois une contre-vérité historique (la Bretagne n’ayant jamais été conquise ni dominée par la France, mais s’étant librement donnée à elle) et une véritable injure au patriotisme breton ». L’affront est ressenti par « tous les Bretons patriotes et vraiment indépendants » (sic). Dans le Journal des débats, l’auteur parisien parle de faute de goût et d’erreur historique, et conclut ainsi son article : « Si j’étais breton, je serais, je l’avoue, un peu agacé. » Dès le 27 septembre dans Les nouvelles rennaises, et le 8 octobre dans Le Breton de Paris, Jean Boucher répond à ses détracteurs15. Il insiste sur la liberté que lui a laissée son commanditaire, sur le sérieux historique de son enquête. Il ne dit rien de l’agenouillement de la duchesse Anne, mais, Breton lui-même, il se défend d’avoir voulu humilier la Bretagne.

Jean Boucher, tête de la France, photographie ancienne provenant de l’atelier de l’artiste, Cesson, Centre Jean-Boucher.
15Dans le groupe sculpté16, une grande oblique ascensionnelle souligne le long manteau de la Bretagne, qui part du socle et guide le regard jusqu’à l’accolade d’union. Agenouillée ? Non, car le coussin est là, non utilisé au premier plan, mais elle est dans une impossible position, à la fois debout et inclinée, dans un invraisemblable déséquilibre, tandis que la France solidement assise sur son trône se penche vers elle. La lecture qui est faite spontanément est l’agenouillement, c’est-à-dire l’humiliation. Elle appelle le souvenir concret de la duchesse se livrant au roi de France. Pour le moins, l’idée d’une telle pose était malencontreuse, étonnante de la part d’un Breton, mais en plus, l’exécution est des plus maladroites (à croire que le sculpteur, formé dans l’académisme le plus orthodoxe, a oublié les leçons de Poussin ou de David sur la nécessité de dessiner le nu sous le vêtement).
16Derrière le couple, la niche est remplie d’une véritable foule censée représenter les cinq régions de Bretagne, paysan, pêcheur, guerrier, « jusqu’au chouan des dernières années », avec coiffes, bragou braz et bizarre casque dit celte, mélange de folklore et d’histoire, couplé avec un réalisme puissant dans le traitement des visages. L’ensemble est hétéroclite et confus pour avoir trop voulu charger le message. « Tout ce qui exprime les caractères de notre vieille province, écrit Jean Boucher17, mysticisme, héroïsme, pauvreté, tradition, légende, idéalisme, génie. J’ai voulu encore rendre à jamais durable les costumes qui s’en vont et les expressions de physionomies régionales qui se perdent18. » Un critique souligne à juste raison « une œuvre grandiose [mais] dans un cadre trop petit pour la contenir ».
17Cette volonté de rendre hommage à la Bretagne entière se retrouve peu après dans la farandole que Jean-Julien Lemordant choisit comme sujet pour le plafond du théâtre. Chez Jean Boucher c’est l’accession de tout le peuple breton aux honneurs de la statuaire officielle, pour Lemordant c’est la danse populaire qui remplace les allégories et mythes traditionnels dans le grand décor. Mais l’intention de Jean Boucher est desservie par le manque de clarté du message collectif, tandis que la trop grande lisibilité du geste d’hommage soulève l’indignation…
18En juillet 1911, peu avant le dévoilement du groupe, quelques hommes annonçaient la fondation d’un nouveau parti, le parti nationaliste breton. Ils étaient présents, sifflant copieusement lors de l’inauguration. Parmi eux, Camille Le Mercier d’Erm…
1922, un livre et une gravure phare
19En octobre 1922 paraissait à Dinard, aux éditions de l’Hermine dirigées par le même Camille Le Mercier d’Erm (1888-1978), un tout petit livre (13,5 × 18,5 cm) intitulé Histoire de notre Bretagne. Le texte est signé C. Danio. C’est un pseudonyme pour Jeanne Coroller (1892-1944). Les illustrations sont de Jeanne Malivel (1895-1926).
20La première a écrit quelques nouvelles et un roman. La seconde est encoreinconnue, elle est à Paris où elle a passé le concours d’entrée à l’École des beaux-arts19, mais elle préfère les ateliers d’art sacré où elle admire particulièrement Georges Desvallières20. Depuis leur rencontre pendant la guerre, les deux jeunes femmes sont devenues amies. Elles communient dans une même foi et une pratique religieuse fervente, et surtout le même attachement à la cause bretonne. Jeanne Malivel adhère au Groupe régionaliste breton, y entraîne son amie, elle s’abonne à la revue Breiz Atao dès son lancement en 1919 et accueille dans son atelier parisien les réunions de la section de Paris qu’elle a contribué à organiser. Elle est séduite par l’enthousiasme revendicatif de ses militants, mais sans adhérer totalement à leur thèse séparatiste. Originaire de Loudéac, francophone, elle apprend le breton, comme bien d’autres militants, aux cours du soir donnés à la Sorbonne et sera une ardente militante du bilinguisme.

Annonce de la publication de l’Histoire de notre Bretagne aux éditions de l’Hermine, 1922.
21Le projet du livre est conçu par les deux femmes en 1918. Camille Le Mercier d’Erm, rencontré en 1919, adhère très vite au projet :
« Félicitations écrit-il à Jeanne Coroller le 16 août 1919, pour votre heureuse initiative que vous avez prise d’écrire et publier une Histoire de Bretagne artistiquement présentée et, j’en suis certain, du plus pur patriotisme breton. Il nous manque vraiment une bonne histoire nationale, animée de l’esprit national [adjectif deux fois souligné]. J’espère que vous allez nous la donner et je vous prie de me compter au nombre de vos souscripteurs21. »
22En fait, c’est lui qui va en être l’éditeur, et bien plus, le correcteur et l’inspirateur sur certains points22.
23Camille Le Mercier d’Erm s’est d’abord fait connaître comme poète symboliste, avant d’être le chantre des idées nationalistes. À Dinard, où il s’installe en 1919, il va diriger la Maison du livre breton, ou Maison de l’Hermine, et pouvoir mettre son talent d’éditeur au service de ses idées, nationalistes mais aussi socialistes, antimilitaristes et libertaires. En ce qui concerne son engagement dans la cause bretonne, il a édité ce qu’il appelle des ouvrages de fond sur la Bretagne (La Villemarqué, Luzel, Le Gonidec, Le Braz, Brizeux, Le Goffic, Vallée…). Parmi ses œuvres personnelles, l’anthologie Les bardes et poètes nationaux de la Bretagne armoricaine (1800-1914) est la plus importante. Cette Histoire de notre Bretagne s’inscrit donc dans un programme ambitieux et clairement défini. « Commander ses livres et ses imprimés à la Maison de l’Hermine, c’est servir la Bretagne et favoriser le développement de l’idée bretonne » recommande le bulletin de janvier 1922.
24La gestation du livre, travaillé en étroite collaboration entre l’écrivain, l’illustrateur et l’éditeur, dure quatre années, de 1919 à 1922. La communauté d’idées et l’entente sur l’objectif, faire connaître aux Bretons leur propre histoire, n’empêchent pas des discussions à propos soit d’opinions émises par l’écrivain, soit du choix des images.
25Pour ce travail Jeanne Malivel se livre à une recherche bibliographique et iconographique très sérieuse. Elle complète les données que ses amis lui procurent. Elle enrichit sa bibliothèque personnelle (en achetant par exemple à un pilawer des ouvrages d’Ogée, La Borderie et Levot). Elle se plonge dans le Barzaz Breiz. Elle recopie des passages qui lui paraissent intéressants, par exemple, à propos du mariage d’Anne de Bretagne et de Louis XII, quelques phrases de dom Taillandier : « Elle avait été offensée de la nécessité qui l’avait forcée d’aller à Langeais pour y épouser Charles VIII. Elle ne consentit à épouser Louis XII qu’à condition qu’il viendrait la chercher » et elle souligne énergiquement ce détail qui lui plaît… Elle étudie des photographies de statues, de tombeaux, elle va en voir, pour se familiariser avec les costumes de l’époque. Dans un carnet, elle note le terme de surcot et légende ainsi un croquis : « Un costume du xve siècle d’après un tombeau qui est daté de octobre 1488. Il y a encore des traces de peinture. » À la Bibliothèque nationale, elle scrute des miniatures.

Jeanne Malivel, étude d’un costume du xve siècle, encre, page de carnet, 17,3 × 11,2 cm, collection familiale.
26Le livre consacre une dizaine de pages à la duchesse Anne ; trois illustrations la présentent. D’abord un portrait est mis en parallèle avec celui de Maximilien d’Autriche, le premier époux. À réception d’une documentation, elle répond à Jeanne Coroller : « Savez-vous que la carte d’Anne de Bretagne ressemble énormément à une petite copie que j’avais faite dans une bibliothèque ou un musée, je ne sais trop, et que j’ai retrouvée parmi mes notes et documents. Sans doute je l’ai faite d’après une miniature de l’époque. » Elle réalise un portrait d’un format presque carré (4,5 × 5,5 cm), cerné d’un trait ferme. Elle avoue être gênée par la nécessité d’encadrer ainsi, de limiter en quelque sorte cette personnalité qu’elle aime. Le visage s’enlève, sévère, ingrat sur un fond parsemé d’hermines. La gravure sur bois durcit les traits. Sa source probable est la miniature de Jean Bourdichon (1457-1521) dans les Heures d’Anne de Bretagne (où elle est représentée avec ses saintes patronnes).

Jeanne Malivel, « Anne de Bretagne », gravure sur bois, illustration d’Histoire de notre Bretagne, 1922.
27Dans un bandeau en tête de chapitre, elle illustre le voyage de la reine en Bretagne en 1505. Le texte évoque « un vrai triomphe. Tous les Bretons acclament leur souveraine, saluant en elle l’incarnation suprême de leur nationalité ». L’image est moins démonstrative : un couple de paysans suit la cavalière, droite sur sa monture toute noire, des paysans agenouillés semblent tendre des draps sous les pieds de son cheval.
28L’œuvre majeure, en pleine page, est l’évocation de l’union de la Bretagne à la France. Même si le format est réduit (9 × 13 cm), l’œuvre a des qualités monumentales (on pourrait l’agrandir au format de l’affiche). Mariage, union ? L’évocation des deux personnages mêle habilement histoire et symbole. Le souverain tout de noir vêtu, porte une longue robe et une cape fleurdelisée, il est coiffé d’un bonnet phrygien. Elle, en blanc et noir, arbore un costume dont les passementeries et les broderies très simples signifient l’appartenance bretonne, tandis que les sabots évoquent la fameuse chanson populaire.

Jeanne Malivel, « L’union de la Bretagne à la France », gravure sur bois, illustration d’Histoire de notre Bretagne, 1922.
29Les attitudes expriment les sentiments de façon très claire : pour elle le désespoir impuissant, pour lui la cupidité. D’une main aux allures de griffe, il lui empoigne le bras, de l’autre il s’apprête à saisir l’aumônière. Tout est dit de l’obligation dans laquelle s’est trouvée la jeune fille dont les troupes ont été défaites, « la mort dans l’âme [d’]accepter pour époux son ennemi vainqueur » et de l’intérêt du roi de France à annexer le duché.
30Le récit de Jeanne Coroller, concis, limpide, prend parti sans ambiguïté. La rédaction a été longuement discutée et l’éditeur approuve totalement ce parti, en jugeant, lui, qu’elle en est « restée sur le terrain de la documentation, sans prétendre émettre ni soutenir aucune thèse ni hypothèse personnelle. Vous vous êtes contentée de poser d’abord les points d’interrogation […]. Dans tout cela vous ne prenez pas parti, vous restez neutre23 ». L’illustration de Jeanne Malivel est tout aussi partiale. Les deux figures s’imposent pleinement ; elles se dressent sur un fond abstrait où les larges coups de gouge du graveur créent une sorte de tourbillon qui, d’auréole autour de la tête d’Anne de Bretagne, devient un maëlstrom qui l’entraîne, et son pays avec elle.
31L’adéquation entre le message et la forme donne sa force convaincante à l’image. Le recours à la gravure sur bois de fil, pour toute l’illustration du livre, lui prête une rusticité et une violence qui mettent Jeanne Malivel au premier rang parmi les graveurs contemporains, qui, à la suite de Gauguin, ont exploité la saveur et la force de cette technique primitive.
32Parmi les dernières gravures de l’Histoire de notre Bretagne, une image également en pleine page répond au groupe de Jean Boucher à l’hôtel de ville de Rennes. Elle accompagne le texte virulent de Jeanne Coroller :
« Notre vieille capitale, dernier rempart de l’indépendance nationale en 1491, s’est vu infliger l’opprobre d’un monument qui constitue un véritable défiau patriotisme breton. Ce groupe en bronze, œuvre poncive de l’art officiel, fausse et prétentieuse dans sa conception, anachronique et injurieuse dans sa réalisation, prétendait symboliser l’union de la Bretagne à la France en présentant le personnage de la Bretagne humblement prosterné sur les marches du trône. Alors que nos Ducs avaient toujours refusé de prêter au roi l’hommage lige, ne consentant à lui rendre que l’hommage simple, debout, la couronne au front et l’épée au côté, il avait suffide la fantaisie d’un sculpteur mal documenté ou mal intentionné, pour consacrer une humiliation qui ne fut jamais tolérée dans l’histoire. »
33Elle ne cite même pas le nom de Jean Boucher. Elle poursuit en énumérant : « L’Union régionaliste bretonne, la Fédération régionaliste de Bretagne, le Gorsedd des bardes, les Bretons de Paris, le Parti nationaliste breton firent entendre des protestations indignées. » Elle signale l’arrestation de Camille Le Mercier d’Erm pour sa manifestation contre le monument et conclut sur une autre manifestation, un peu plus tard, de la Fédération des étudiants bretons sous la direction de Fanch Gourvil, qui ont chanté devant le monument outrageant l’hymne héroïque Sao Breiz Izel (« Debout Bretagne »).
34La gravure de Jeanne Malivel est une réplique au monument et son titre « La Bretagne de demain » imagine l’avenir : le trône royal est vide au premier plan et une allégorie de la Bretagne lève les bras, comme ailée, entourée des représentants du peuple breton24. Une seule figure du groupe sculpté est reprise, c’est le paysan en bragou braz, adossé au bord de la niche. L’image est assez plate, le graveur n’a pas la même verve que dans le registre de la dénonciation.
35L’éditeur, Camille Le Mercier d’Erm, devait l’apprécier puisqu’il l’a utilisée, sans en prévenir l’artiste, pour illustrer un numéro de sa publication Les Humbles. La Bretagne libertaire25.

Jeanne Malivel, « La Bretagne de demain », gravure sur bois, illustration d’Histoire de notre Bretagne, 1922.
36À la sortie du livre, Jeanne Malivel attend la critique avec impatience. Elle ne va pas manquer. Dans la critique la plus hostile au parti de Jeanne Coroller, celle qui paraît dans l’Ouest-Éclair le 19 mars 1923, Jean de Cognets s’attaque surtout au texte, mais sait choisir l’image la plus forte, et s’indigne « lorsqu’il contemple au beau milieu du livre une image vraiment infâme, qui symbolise l’union par force de la Bretagne avec l’Ennemi onze fois séculaire. Et voici ce que représente cette image : une petite Bretonne en sabots pleure et détourne la tête, tandis qu’une manière de Tartuffe, coiffé d’un bonnet phrygien et vêtu d’un manteau fleurdelisé lui saisit l’épaule d’une main crispée comme une serre, tandis que l’autre main s’avance pour lui arracher sa bourse ».
37Cette réaction gêne Jeanne Malivel qui ne croyait pas en avoir tant dit. Elle se défendra d’avoir voulu exprimer des convictions séparatistes (« ce n’est pas la France que j’ai voulu blâmer mais les gouvernements qui sont aussi détestables à toutes les époques », écrit-elle le 26 mars 1923). Elle prend très vite quelque distance à l’égard des positions de Jeanne Coroller. Dès le 1er janvier 1923 elle écrivait au libraire quimpérois Maurice Le Dault : « Cela me fait plaisir d’avoir votre appréciation sur Histoire de notre Bretagne. Il m’aurait plu de travailler pour quelque chose de moins haineux […]. Son influence eût été plus profonde et plus bienfaisante si son esprit avait été moins tendancieux26. » Elle ne renie rien de son travail (« une expérience et un début, un travail qui m’a beaucoup intéressée »), mais en émettant de telles réserves, elle semble oublier qu’elle a eu tout le texte à sa disposition pour imaginer ses illustrations… Après sa mort, sa famille s’oppose à la réutilisation de ses bois pour une nouvelle édition.
1932, la destruction du monument de Jean Boucher
38Jeanne Malivel avait proposé une réplique à la sculpture de Rennes. Elle est morte depuis six ans quand, dans la nuit du 7 août 1932, année du quatrième centenaire du traité d’union, les activistes du groupe Gwen ha Du dynamitaient « le monument rennais de la honte nationale ». La charge importante a dispersé corps et têtes27, concrétisant de façon radicale les oppositions qui s’étaient exprimées en 1911. Certains morceaux sont récupérés28. Le reste est évacué au plus vite, vendu au poids, le bronze étant évalué deux francs le kilo29.
39Curieusement, c’est surtout alors que le monument est détruit, que des critiques d’ordre esthétique s’expriment. Dans Le Charivari du 13 août 1932 on le qualifie de « triste et vilain fouillis de faux bronze […] ce fouillis, cette omelette » et l’auteur n’est pas loin de justifier l’acte de vandalisme par la faute d’avoir voulu « faire entrer vingt personnages – et symboliques encore – dans la simple alvéole qui jadis porta la statue du roi. Dès l’inauguration de cette tarte, tout homme de goût aurait frémi disons de regret. Mais l’homme breton sentait plus vivement la bêtise d’une œuvre qui contredisait l’histoire même. Cette Bretagne agenouillée, cette duchesse de douze ans représentée sous les traits d’une femme de vingt ans, ce mépris de la vérité historique30 ».

Jean Boucher, Tête de vieille femme, bronze, H : 48 cm, L : 32 cm, P : 42 cm, 1911, fragment du monument de La réunion de la Bretagne à la France détruit en 1932, Rennes, musée des Beaux-Arts, photographie ancienne.
40Des lettres indignées affluent à l’hôtel de ville, qui offrent, certaines, de l’argent pour refaire le monument. Et c’est à le refaire que l’on pense sérieusement avant la Seconde Guerre mondiale. Le principe de la reconstruction a été voté dès 1934 (le 12 novembre), après une reprise de contact avec Jean Boucher, dont les archives ne précisent pas la date : il écrit le 14 novembre qu’il « travaille à la maquette depuis trois mois, toute occupation cessante » et dès le 7 juillet une commission municipale était allée à Paris, avait vu et approuvé (sans réserve) la maquette.
41On ne change pas le sculpteur ; on ne change pas le programme31 : il s’agit d’un « autre monument qui lui aussi symboliserait cette union définitive de la Bretagne à la France ».
« Anne de Bretagne debout sur les marches au bas de la niche centrale offre avec fierté à la France en les poussant devant elle ce qu’elle a de plus cher, ses enfants, personnifiés par un marin breton et une Bretonne, et la France également debout tend vers eux ses bras pour les accueillir. Dominant la scène, une seule grande figure sur la stèle de la niche centrale, symbolisera la Bretagne elle-même qui demeure tandis que se succèdent les événements de l’Histoire. »
42Dans quelques pages d’un petit cahier d’écolier conservé aux Archives municipales de Rennes, Jean Boucher de sa grande écriture appliquée, développe une pensée assez confuse sur l’allégorie de la Bretagne qui va dominer le groupe : « La légende qui se receuille [sic] depuis des siècles, où vivent nos forêts profondes et mystérieuses les âmes des chevaliers de la “table ronde”, Merlin et Mélusine, qui assiste sans regrets et qui continuera éternellement indépendants et fidèles au beau pays de France. » La photographie de l’esquisse, seule trace que nous ayons du projet, montre une composition simple, conçue dans l’esprit du groupe initial du xviiie siècle. Le contrat signé le 5 août 1937 précise les dimensions des figures de bronze, 4 × 4,50 m, et les délais imposés pour l’exécution : deux ans.

Jean Boucher, esquisse pour le deuxième monument, vers 1937 (œuvre disparue), photographie ancienne provenant de l’atelier de l’artiste, Cesson, centre Jean Boucher.
43Mais la réalisation va traîner, d’abord à cause des exigences du préfet à propos du financement, une telle dépense ne pouvant qu’être imputée sur des ressources extraordinaires (et non sur l’exercice en cours, comme l’avait prévu initialement la municipalité) et surtout à cause de l’intervention de l’administration des Beaux-Arts qui exige du sculpteur qu’il revoie son projet pour l’adapter parfaitement aux dimensions de la niche. Jean Boucher refusant ce remaniement (2 août 1938), l’exécution finale ne sera pas faite avant la déclaration de guerre… Au grand dépit du sculpteur qui voulait en faire son œuvre testament : « C’est sur elle que je veux que la postérité me juge » écrivait-il en 1937. Il meurt le 17 juin 1939.
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44Et ainsi la niche de l’hôtel de ville de Rennes est restée vide, elle l’est toujours… Le groupe de Jean Boucher arrivait au terme de l’époque qu’on a appelée de la statuomanie ; il n’honorait pas un homme mais commémorait un événement historique. Commande publique, monumentale, inaugurée avec tout l’apparat officiel, il était conçu pour franchir les siècles. Sa durée de vie a juste dépassé les vingt années32. La leçon évidente est que l’œuvre publique, proposée en permanence au regard de tous, doit susciter une adhésion minimale ou au moins l’indifférence33, les pouvoirs publics ne peuvent imposer une statuaire qui déplaît, ne fût-ce qu’à une minorité…
45La gravure de Jeanne Malivel, petite, fragile, cachée au creux d’un livre enfoui dans les bibliothèques, elle, survit, peut-être encore à 1 500 exemplaires, le tirage initial du livre. Et Histoire de notre Bretagne a été rééditée en 1997, trouvant de nouveaux lecteurs. La gravure de « l’Union de la Bretagne à la France » s’impose toujours, relation directe, intime de l’auteur avec son lecteur, quelle que soit l’opinion de celui-ci sur l’événement lui-même, elle s’impose à cause de la force du message en parfaite adéquation avec une remarquable réussite plastique34.
Notes de bas de page
1 Il fut brocardé comme « chef des blocards », c’est-à-dire du bloc des gauches (Jean-Yves Andrieux et Catherine Laurent, introduction de Quelques souvenirs, Jean Janvier maire de Rennes, Rennes, 2000, p. 19).
2 Entrepreneur en bâtiment, il est représenté sur un chantier, serrant la main d’un ouvrier, dans un panneau du décor peint pour la maison du peuple par Camille Godet (1879-1966) en 1925.
3 Sur cette commande du plafond du théâtre de Rennes, Arch. mun. Rennes, Mx 255. André Cariou, Jean-Julien Lemordant, Quimper, 2006.
4 Dans le cadre d’un comité d’union républicaine créé en 1906.
5 Toutes les citations sont puisées dans le dossier 1 M 11 des Archives municipales de Rennes.
6 Le buste de Jean Leperdit par David d’Angers avait été placé à l’hôtel de ville en 1848. Sa statue par Emmanuel Dolivet est inaugurée en 1892 place du Champ-Jacquet.
7 Béatrice Gastinel, « Un siècle de sculptures commémoratives à Rennes », La sculpture dans l’Ouest, de l’âge du fer à nos jours, Arts de l’Ouest, Rennes, 1993.
8 Corinne Prével-Montagne, La représentation des grands hommes dans la sculpture publique commémorative en Bretagne, 1685-1945, thèse de doctorat dactyl., université Rennes 2, 2005.
9 Rapport au nom du maire au conseil municipal, 5 avril 1909.
10 La puissance et la gloire, sculpteurs bretons 1900-1950, château de Kerjean, 1998.
11 Après cette visite, le sculpteur le déclare « enthousiaste ». Les archives sont muettes sur un rôle éventuel d’Armand Dayot dans la commande elle-même (on sait qu’il était intervenu auprès de Jean Janvier en faveur de J.-J. Lemordant). En 1937 Jean Boucher réalise un buste en l’honneur de Dayot à Paimpol.
12 Le Larousse mensuel commente « le mariage du roi et de la duchesse », n° 59, janvier 1912.
13 Un grand cortège historique de 500 personnes fait revivre l’événement, le cortège de la duchesse Anne rejoignant celui des ambassadeurs de Charles VIII. Dans le rôle d’Anne de Bretagne, une écuyère du cirque Bureau.
14 Parmi les fragments conservés aujourd’hui à Barentin, c’est pourtant une tête de Charles VIII qui est enregistrée.
15 « Ce que Jean Boucher dit de son œuvre », Les Nouvelles rennaises, 27 septembre 1911. « Autour d’un monument, la pensée du sculpteur », Le Breton de Paris, 8 octobre 1911.
16 Nous ne connaissons le groupe que par la photographie (et quelques fragments) : le plâtre original, qui faisait partie du don de Mme Boucher au musée des Beaux-Arts de Rennes, a disparu.
17 Les Nouvelles rennaises, 27 septembre 1911.
18 Dans un article très élogieux de l’Art et les artistes (juillet 1924), Gustave Kahn glisse rapidement sur le « grand bas-relief [sic] si ordonné dans sa disposition de foule joyeuse qui célèbre la réunion de la Bretagne à la France ».
19 La jeune étudiante rêve de rencontrer… Armand Dayot. Dans une lettre adressée à ses parents, elle relate qu’elle a rencontré le sculpteur Quillivic. Il « m’a dit, il serait bon que vous fassiez connaissance avec Armand Dayot (c’est bien ce que je pensais, mais le moyen !…). Armand Dayot est sous-secrétaire d’État aux B.-A, fait partie de la commission d’achats de l’État et a grand poids. Il est directeur de l’Art et les artistes et a lancé déjà un grand nombre d’artistes parmi lesquels M. Méheut, Lemordant, etc. » (archives familiales).
20 Denise Delouche, « Jeanne Malivel, une artiste telle qu’en ses lettres », ArMen, avril 1997.
21 Archives familiales.
22 D. Delouche, « À propos de l’Histoire de notre Bretagne (1922), étude des lettres de Jeanne Malivel et Camille Le Mercier d’Erm à Jeanne Coroller », Bretagne et peuples d’Europe. Textes réunis en l’honneur de Per Denez, Rennes, 1999, p. 169-186.
23 Lettre du 18 janvier 1921, archives familiales.
24 Les protestataires de 1911 avaient juré que « le monument serait enlevé et remplacé avec une Bretagne debout ».
25 Cette utilisation entraîne une vive protestation de l’écrivain et de l’artiste.
26 Biblio. mun. Rennes, ms. 1438/142.
27 Les lignes de fragilité liées à la fonte ont provoqué entre autres la décapitation de toutes les figures.
28 Des têtes sont aujourd’hui conservées à Barentin, à Cesson et au musée des Beaux-Arts de Rennes.
29 Il en coûtera 9 820 francs à la ville. Sophie Camenen et Véronique Hoyet, « Résonance. Union de la Bretagne à la France », D. Delouche (dir.), Mémoires sculptées, coll. « Arts de l’Ouest », 1992.
30 Mais en 1937 encore, le monument de Rennes est pour le Larousse mensuel l’une des œuvres qui caractérise le mieux l’art « idéo-réaliste » de Jean Boucher, n° 359, janvier 1937.
31 Dans le compte rendu des délibérations municipales, comme dans le texte de l’artiste, allusion est faite aux sacrifices consentis par les Bretons durant la Grande Guerre, argument qui avait accompagné les protestations indignées contre l’acte de vandalisme en 1932, argument qui renforce la volonté officielle d’un monument scellant l’union historique.
32 Au demeurant, s’il n’avait pas été détruit en 1932, le groupe en bronze eût probablement été fondu pendant l’Occupation…
33 Signalons en Bretagne, à Broons, la décapitation de la statue de Du Guesclin en 1989. Le socle est désormais vide, avec un graffiti rouge auprès du cartel officiel, qui signe la destruction : « Traitour, BZH » (à Saint-Pierre en Martinique, la statue de Joséphine de Beauharnais est elle aussi restée décapitée).
34 Je remercie pour leur aide Armelle Cordier, Dominique Divet et Élisabeth Renaud.
Auteur
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