« Régions rouges » : fiefs électoraux du PCI. Quelques réflexions sur les origines et le déclin d’un enracinement politique et socio-identitaire
p. 87-101
Texte intégral
Questions préliminaires
1Avant d’analyser plus en détail les « Régions rouges », que ce soit à travers leurs origines historiques, ou les raisons de leur enracinement durable politique et socio-identitaire à l’échelle locale, il nous semble difficile de faire l’économie d’un bref rappel des derniers résultats électoraux1. Ces nouveaux éléments nous permettrons de mieux comprendre quelques-unes des raisons qui en expliquent le déclin. Nous tenterons tout à la fois de décrire brièvement ce phénomène, d’évoquer ce qu’il reste de cet héritage politique, et de retracer la place prise par ce dernier dans l’histoire politique, économique et sociale italienne.
2Précisons que les « Régions rouges » se calquent sur les limites actuelles des régions d’Émilie-Romagne, de Toscane, d’Ombrie et des Marches centro-septentrionales. Toutefois, le sens du terme « Régions rouges » n’est pas réductible à sa seule acception géographique. Il désigne notamment une catégorie employée – bien plus en Italie qu’ailleurs en Europe – pour l’analyse des événements politiques. Ce terme est à ce jour encore largement usité dans le domaine de la recherche électorale.
3Cette extension de sens, est à relier à une réalité historique : les régions évoquées plus haut, ayant précisément servi de terreau à l’enracinement de la « subculture rouge ». Le sujet sera développé plus amplement par la suite. Ces régions devinrent le « fief électoral » du Parti communiste italien (PCI) au sortir de la Seconde Guerre mondiale. La disparition du parti en question n’ayant, dans les faits, nullement affecté l’enracinement de la gauche post-communiste dans ces régions. Il ne serait pas inutile, arrivé à ce point, de préciser que des termes tels que « fiefs », « bastions », « citadelles », pour évoquer les « Régions rouges », sont entrés dans le jargon commun en Italie. Plus remarquable encore, ces derniers ne sont pas employés uniquement par les médias, mais sont également utilisés indifféremment2 par des analystes et des spécialistes.
4Alors, pourquoi faire appel à des faits empruntés à l’actualité pour traiter de ce sujet ? Tout commence quelques années plus tôt, certains observateurs ayant noté localement les symptômes d’un « effondrement » de la force électorale des « Régions rouges ». Effondrement que les derniers rendez-vous électoraux ont révélé dans toute son ampleur. En effet, les résultats obtenus par la gauche lors des élections européennes et administratives de 2009, ainsi que lors des régionales de 2010, ont définitivement mis en pièces l’idée même de « fiefs », de « bastions électoraux », de « citadelles imprenables » de la gauche3.
5Les chiffres suivants nous permettront de mieux cerner l’ampleur de cette situation de crise, qui a commencé avec les européennes de 2009 : le Parti démocrate perd alors 6,8 % des voix en Émilie-Romagne, véritable « fief historique4 » des « Régions rouges », auxquelles s’ajoutait une chute des voix de l’ordre de 8,1 % en Toscane, de 10,5 % en Ombrie et de 11,5 % dans les Marches. Rappelons que le Parti démocrate a été crée en 2007 par l’agrégation d’une bonne partie d’anciens membres du PCI, fondateurs du PDS-DS5 d’une part, ainsi que de catholiques de centre gauche issus de la Démocratie chrétienne (DC)6 d’autre part. La redistribution de ces voix ne s’est pas uniquement réalisée au profit de quelques mouvances de centre gauche. Les électeurs ont également reporté leurs voix sur des partis de centre droit, et plus particulièrement sur la Lega Nord, ou « Ligue du Nord pour l’indépendance de la Padania ». Umberto Bossi donne forme à son parti dès 1989, d’abord sous la forme d’une fédération comprenant divers mouvements autonomistes/séparatistes puis officiellement en 1991.
6L’un des symptômes emblématiques de cette mutation est visible en Ombrie ainsi que dans les Marches où, pour la première fois, le centre-droit dépassa le centre gauche7 ! Ce regain d’intérêt pour le discours politique porté par le centre-droit, ne se limite par à l’intérêt croissant porté au parti l’Italia dei Valori (IdV). Le parti fut créé en 1998 par l’ex-magistrat Antonio Di Pietro. Celui-ci fut le principal protagoniste de l’opération judiciaire Mani pulite (« mains propres »), au début des années 1990, en ouvrant la saison nommée Tangentopoli qui a signé en Italie la fin de la soi-disant première République.
7Il faudra cependant attendre la tenue des élections administratives, la même année, pour pouvoir considérer pleinement l’ampleur de la crise du centre-gauche. En effet, ce dernier perd dès le premier tour les provinces de Piacenza et de Macerata, et est mis en ballottage dans trois des provinces de l’Émilie-Romagne, trois de la Toscane et deux des Marches. Notons également que le centre-gauche est aussi en ballotage dans des villes symboles de l’Italia di Mezzo, telles que Bologne et Florence. Il en est de même pour la ville et la province de Ferrare. La mairie de Ferrare finira toutefois par retomber dans l’escarcelle du centre-gauche, à l’issue d’un vote très serré. Nous pourrions aisément continuer les exemples visant à illustrer, à l’échelle nationale, le fort affaiblissement du centre-gauche et du PD8. Un grand nombre de territoires considérés comme de véritables bastions rouges, ont été perdus ou conservés in extremis, au terme de ces élections.
8Et les résultats obtenus par la Lega Nord dans les « Régions rouges » illustrent parfaitement ce revers électoral. En effet, le parti de Bossi réalise d’excellents scores en Émilie-Romagne, rassemblant 11,08 % des voix contre seulement 3,37 % quatre ans auparavant, lors des précédentes élections européennes. Il réalise également une belle percée dans d’autres régions, passant de moins de 1 % des voix en 2004, à 4,32 % en Toscane, 3,56 % en Ombrie et 5,47 % dans les Marches. Les dirigeants du PD et des gauches sont alarmés par le changement de stratégie de la Lega Nord. En effet, cette dernière ne s’adresse plus uniquement à la petite et moyenne entreprise, aux artisans ou aux commerçants (traditionnellement très implantés dans les zones rouges) mais interpelle à présent également la classe populaire, les ouvriers, les employés ainsi que les retraités. Ces classes sociales, qui votaient traditionnellement à gauche, finissent par voir dans la Lega Nord un parti à même de s’impliquer durablement dans la lutte contre la dégradation urbaine et l’insécurité, cela malgré le ton parfois xénophobe de leurs discours. Soulignons à ce propos que le contexte urbain est marqué par la multiplication de conflits opposant certains immigrés aux classes populaires. Enfin, notons également que la coalition du centre-droit tient un tout autre discours sur des thématiques touchant aux services et à la protection sociale, auparavant « chasse gardée » des « Régions rouges ». Ce nouveau positionnement a très probablement achevé de séduire un nouvel électorat. Cette situation de fuite d’une partie de l’électorat des « Régions rouges » vers le centre-droit s’est accentuée plus encore à l’issue des élections régionales de 2010. Notons effectivement, que la coalition du centre-droit gagne deux nouvelles régions (le Latium et le Piémont). Le centre-gauche quant à lui, réussit néanmoins à conserver, parfois difficilement, un grand nombre de ses régions. Cependant à l’échelle nationale, il nous apparaît raisonnable de soutenir l’idée selon laquelle ces élections seraient une victoire du centre-droit9. Le PdL (Popolo delle Libertà)10, emmené par Silvio Berlusconi, concentre la grande partie des votes (31 % des voix). Les scores réalisés par le parti du Cavaliere accusent néanmoins une légère baisse en comparaison avec les européennes de 2009. Le PD, quant à lui, comptabilise 27,1 % des votes, et se classe deuxième, enregistrant toutefois une légère hausse des scores depuis les européennes de 2009 et les régionales de 2005.
9Il convient de souligner que les forces politiques centrales de la péninsule enregistrent toutes deux une nette perte de vitesse depuis les élections régionales de 2005. Il sera de ce fait nécessaire de mener une réflexion sur les raisons qui ont présidé à la montée en puissance de partis plus modestes tels que l’IdV de Di Pietro, parti qui a rassemblé 7 % des voix aux régionales de 2010 : score certes inférieur à celui enregistré aux européennes de l’année précédente, quoiqu’étant en nette progression, depuis les dernières européennes, en 2005 (+ 5,5 % de voix). C’est toutefois la Lega Nord qui réalise la progression la plus spectaculaire, rassemblant en 2010 12,7 % des voix contre 5, 7 % en 2005, soit un bon de 7 points. Ce revers électoral pour le PdL et le PD est à placer également sous le signe de l’abstention11 qui a touché très durement ces élections et révélé l’existence d’une crise secouant l’opinion. L’IdV et la Lega Nord ont bénéficié, quant à eux, de la combinaison de deux phénomènes, à savoir l’enclenchement par les citoyens d’un processus de mise de distance de la politique dite « traditionnelle », doublé d’un sentiment de défiance à l’encontre des institutions elles-mêmes (il s’agit effectivement du taux d’abstention, 64,2 %, le plus fort jamais enregistré depuis le second après-guerre). La Lega s’est donc affirmée massivement, autant dans les régions du nord de l’Italie que dans celles des Apennins, ce qui est plus remarquable encore. Citons par exemple deux bastions des « Régions rouges » : la Toscane et l’Émilie-Romagne. La Lega Nord recueille 13,70 % des suffrages en Émilie-Romagne. L’IdV, quant à lui, réussit à capter 6,40 % des voix. Mais la progression la plus notable du parti de Di Pietro est réalisée en Toscane où il multiplie le score réalisé en 2005 par plus de 10, passant de 0,88 % à 9,42 % ! La Lega Nord, quant à elle, fait son entrée au conseil régional de Toscane avec 6,5 % des voix contre 1,7 % en 2005.
10Notons que la Lega Nord a fait montre d’une importante capacité d’opposition aux partis dits « bourgeois » et faiblement enracinés dans le territoire (tels que le PdL), dans des zones où la tradition politique locale a toujours préféré, au contraire, les partis à fort enracinement territorial. Par ailleurs, la Lega a également déployé une capacité d’expansion notable sur des terres où les partis dits « populaires » et héritiers de la « subculture rouge » étaient indiscutablement dominants, de longues années après la Seconde Guerre mondiale12. Il serait intéressant de réfléchir également aux moyens que mettra en œuvre la Lega pour négocier ce nouveau virage. Mais cela n’est pas l’objet de notre réflexion.
11La crise des « Régions rouges » est désormais une réalité13 qui n’a pas manqué de modifier la perception et le rapport du/au territoire. Ce sont les médias qui ont évoqué en premier, et avec insistance, « la fin du système féodal rouge ». Parlant tout à la fois de « bastions rouges vaincus », de « coucher de soleil définitif de la longue hégémonie rouge », « d’effondrement des Régions rouges » de « fin du monopole politique rouge » ou encore de la fin des maggioranze bulgare. Enfin, il a également été question de petites villes rouges, transformées en « terrain de bataille politique ouverte et paritaire ».
12Ainsi, le scénario politique actuel invite observateurs et analystes à engager une mise à jour des perceptions habituellement employées pour décrypter la vie politique italienne. À ce sujet, il convient de reconnaître que la réflexion était jusqu’alors davantage formulée en des termes empruntés aux sciences politiques et à la sociologie qu’à l’histoire. Qu’il s’agisse de l’extraordinaire longévité des « Régions rouges », de leur enracinement social, de la longue survie de leur modèle de gouvernance locale, ce malgré la disparition du PCI.
Subculture rouge : aux origines d’un enracinement
13Au niveau territorial, le système politique italien s’est forgé sur l’existence de deux subcultures dites « blanche » et « rouge ». Elles ont pris racine dans l’Italie centro-septentrionale des débuts du XXe siècle. L’heure était alors à la mise en œuvre d’un processus de mobilisation politique des masses au travers de différentes expériences administratives municipales catholiques et socialistes. Ces deux subcultures sont entrées en crise dans la dernière décennie du siècle passé. La subculture blanche, d’inspiration catholique, s’enracine dans les territoires du nord-est de la péninsule. Elle s’exprime au sein de la DC et s’écroule subitement au début des années 1990. La subculture rouge, quant à elle, est fondée par le parti socialiste. Elle sera par la suite presque entièrement dominée par le Parti communiste. Cette subculture a été bien plus tenace que la précédente.
14La subculture est une catégorie complexe à définir. Employée bien plus largement et fréquemment en Italie qu’ailleurs, elle préside à bon nombre d’interprétations de son système politique. Enfin, ce concept de subculture bénéficie d’une bibliographie très riche. Comme nous pouvons le constater, le terme de « subculture rouge » n’est pas nouveau. Le phénomène bénéficie effectivement, depuis 30 ans, du croisement d’un très grand nombre de lectures différentes. À l’analyse économique a succédé celle de type sociologique, pour être finalement passé au crible des sciences politiques, donnant lieu à des analyses électorales.
15Vers la moitié des années 1970, économistes et sociologues perçurent la grande vitalité du modèle de petite entreprise qui fleurissait sur les territoires de l’Italie centrale. Cette découverte de l’Italia di Mezzo mit fin à une ère caractérisée par des lectures binaires de la société italienne, scindée précédemment entre un nord industrialisé et un sud sous-développé. Un modèle alternatif au fordisme avait effectivement pris corps en Italie centrale. Parfaitement adapté à la réalité régionale, il donnait à observer l’existence d’un lien solide entre les entreprises locales, le territoire et les institutions locales. Ce modèle faisait parfaitement écho à l’expression de la culture politique et des traditions locales. Arnaldo Bagnasco fut le premier à parler des « Trois Italies14 » en 1977. Il démontra de quelle manière « une réalité économique pleine et entière avait émergé entre le triangle industrialisé du nord, et le sous-développement du sud », réalité qu’un « grand nombre de recherches économiques et sociologiques nous a aidé à mieux comprendre, nous permettant de saisir en quoi la différenciation territoriale, fut un élément crucial de la genèse complexe de la société italienne15 ».
16Dix années plus tard, c’est au tour de Giacomo Becattini d’introduire le terme de « districts industriels », constatant, avec Giuliano Bianchi, que « le développement d’une troisième Italie a été une surprise pour tous. Si sa découverte fut accueillie bruyamment par les économistes, elle n’en demeurait pas moins cruciale, selon nous, pour les sociologues, les géographes, puis plus tard, pour les hommes politiques, tributaires culturellement parlant, des catégories préexistantes et de bien d’autres encore16 ».
17Les économistes firent « bande à part », souhaitant se distinguer des sociologues, qui, Carlo Triglia en tête, recherchèrent les raisons du succès de l’économie généralisée dans le cadre de la crise structurelle du capitalisme. Les sociologues partaient du principe que les « districts industriels » ne pouvaient uniquement découler d’une logique économique. Ils devaient également être considérés comme des phénomènes liés au territoire, à ses expressions culturelles, à sa dimension locale, à ses institutions et aux politiques qui y étaient mises en œuvre. Ces études invitèrent les spécialistes en sciences politiques à s’interroger à leur tour sur les raisons expliquant le solide enracinement des partis de masse dans les régions d’Italie centrale : le PCI dans les « Régions rouges » ou DC dans la Vénétie et le Nord-Est17, régions au cœur desquelles se développaient les petites entreprises.
18Ces nombreux travaux eurent pour effet de faire entrer définitivement la définition de « subculture politique » dans le champ de la recherche sociologique et des sciences politiques, subcultures, dont Paolo Farneti soulignait les valeurs idéologiques au début des années 1970. Il saluait également leur capacité à générer des espaces autonomes à l’intérieur de l’État national et bourgeois18. Dans le même temps, ne tardèrent pas à émerger des grilles d’analyses de ce nouveau phénomène. Elles se référaient autant aux traditions, aux normes et au langage comme facteurs de régulation entre les individus, qu’aux rapports que cette subculture entretenait avec l’État. Cette dernière n’était pas uniquement reliée au monde politique. Elle s’ancrait également dans un réseau plus vaste et solidaire, à l’échelle locale, que ce soit en lien avec le monde associatif ou celui des affaires. Avec l’avènement des années 1980, la définition fut rendue plus complexe. L’accent fut mis davantage sur la dimension territoriale contenue dans le fait même d’appartenir à une subculture. Il était désormais admis que la subculture ne rendait pas uniquement compte d’une forme spécifique de culture ou de participation politique car elle constituait en soi un système politique local à part entière qui s’inscrivait comme tel dans le projet national, ce qui constituait un exercice d’intégration parfaitement orchestré19. Selon la définition de Trigilia :
« La subculture territoriale est à considérer comme un système politique local à part entière dont la mise en œuvre passe par l’établissement d’une force politique fédératrice, largement plébiscitée par ses représentants et adhérents. Elle se définit également par une capacité élevée d’intégration et de médiation des divers intérêts locaux. Ce qui suppose la préexistence d’un solide réseau institutionnel (partis, Églises, groupes d’intérêts, structures d’assistance, d’action culturelle et de loisir), coordonné par les forces politiques dominantes à l’échelle locale, tout en étant rattaché au système politique central20. »
19Définition complexe qui n’a pas manqué de susciter une confrontation entre spécialistes, lorsqu’elle était brandie afin de démontrer l’existence d’un lien incontestable entre l’expression de la subculture politique et le développement économique, au travers des petites entreprises. Argument qui conduit certains d’entre eux à considérer que les deux subcultures blanches et rouges devaient être comprises comme étant les deux faces d’une même médaille. D’autres au contraire, voyaient dans cette définition la confirmation des différences existant entre les deux subcultures, différences également perceptibles entre les styles politiques adoptés par la DC et le PCI21.
20Il nous semble à ce point important d’insister sur l’enracinement local qui caractérise ces deux subcultures, prenant la forme d’« installations territoriales ». Elles investissent, à l’époque giolittienne22, des institutions telles que les mairies catholiques et socialistes, véritables piliers à l’échelon territorial. Les deux subcultures dotent ces institutions de bon nombre de composantes communautaires à tel point qu’identité politique et identité territoriale se superposent.
21Comme l’a bien exposé Mario Caciagli, ces deux subcultures deviennent ainsi des « cultures politiques locales ». Elles sont les garantes d’une orientation politique et d’une continuité dans les choix électoraux en faveur d’une force politique déterminée. Elle a pour mission d’intégrer (le mot est important), à l’échelle d’un territoire historiquement et territorialement défini, et dans un système complexe, des individus provenant de classes sociales différentes. Ce dernier est composé d’institutions et de structures, de comportements et de représentations, de normes sociales et de langages partagés, de croyances et de symboles, de valeurs et de règles, de mythes et rites, de comportements se répétant au fil des années23.
Comment le PCI s’est-il établi dans les territoires du centre-nord de la péninsule ?
22Je commencerai par mettre en évidence une donnée encore trop négligée par l’historiographie, à savoir la grande habileté mise en œuvre par le PCI afin de se hisser en tête des élections, dans les territoires du centre-nord de la péninsule. Le parti œuvra à travers l’action de cellules, très actives localement, cherchant à recruter le plus possible dans une période cruciale. J’entends parler de la guerre civile qui sévit en Italie de 1943 à 1945. Staline dira en 1945, comme nous le rapporte Milovan Djilas, que « quiconque possède un territoire y établit son propre système social24 ». Une phrase éclairante au regard du choc idéologique, militaire et politique qu’a été la guerre froide, donnant à voir deux modèles de société. Staline ajoutait, en se référant plus spécifiquement aux pays occupés par l’Armée rouge, que « tout pays exporte son système social là où son armée peut avancer25 ». Rappelons néanmoins que l’Italie ne fut pas libérée par l’Armée rouge, mais par les Alliés. Cependant, la nécessité de bâtir sur les ruines du fascisme, la place croissante prise par la Résistance, l’effondrement de la Ligne gothique, et la reprise de l’avancé des alliés vers le Nord, sont autant d’éléments qui ont permis au PCI de s’affirmer en Italie comme le parti communiste le plus important d’Occident.
23Le PCI a trouvé dans les territoires bordant la barrière des Apennins une terre d’élection. Le parti devient rapidement majoritaire dans les terres de métayage. Son influence s’étendit par la suite aux villes.
24L’historiographie des origines du PCI dans les « Régions rouges » s’est la plupart du temps cantonnée à des analyses généralistes, insistant plus particulièrement sur l’échelle nationale, analyses qui n’ont toutefois pas omis de rendre compte de la forme spécifique prise par l’action des militants sur ces terres, ni même d’évoquer l’apport singulier des campagnes et des métayers à l’affirmation du PCI comme parti de masse. Ces derniers se référaient au modèle porté par le leader communiste Palmiro Togliatti26. Il nous semble cependant que la recherche historique devrait commencer par s’intéresser à la présence du parti fasciste sur ces territoires, aux capacités déployées par ce dernier pour mobiliser les masses, et à l’apport significatif des intellectuels surtout dans la trame particulièrement complexe des rapports et implications ayant marqué le passage « du noir au rouge27 » durant cette période délicate qu’a été la guerre civile28. Il serait ainsi plus simple de faire émerger par la suite l’implication locale du PCI comme étant l’expression d’une foi sécularisée, le rôle joué par l’intelligentsia urbaine ainsi que la préexistence d’une subculture politique paysanne. Nous serions ainsi à même de reconstruire enfin de façon concrète, et au travers d’une étude systématique de la « machine du parti » (c’est-à-dire l’appareil administratif), comment une action durable de contrôle sur ces réalités put en découler. Et enfin, de quelle manière le PCI put procéder à la conquête du pouvoir local en commençant par les petites communes rurales.
Pourquoi le système des « Régions rouges » dura si longtemps ?
25Pour tenter d’expliquer de manière synthétique les raisons de la longue durée, même par rapport aux autres réalités européennes, le cas de l’Italie recourt souvent à un modèle d’interprétation de la société basée sur des clivages29, fractures dont l’Italie républicaine héritera plus tard (État/Église, capital/travail, ville et campagne). Bien qu’ayant été véritablement « congelées » quelque temps par le fascisme entre les deux guerres, ces dernières finissent par remonter à la surface en 1945. Si bien que certains spécialistes ont établi des analogies entre les élections de 1919 et de 1946, date à laquelle l’Italie devient officiellement une république. Elle enregistre alors une augmentation du corps électoral, passant de 11 à 23 millions de citoyens (les femmes accèdent désormais au vote). Toutefois, l’attachement des citoyens aux clivages traditionnels reste intact, les opposant sur des sujets tels que la classe sociale ou la religion. La guerre froide exacerbe ces divisions, contribuant à l’élaboration de mythes et à la propagation de systèmes de valeurs30. Chacun des partis conçoit sa communication et construit son identité en fonction d’une conception de ce qu’il estime être le bien ou le mal, discours qui a eu pour effet de polariser fortement l’électorat, autant à droite qu’à gauche, exposant de ce fait les électeurs à un perpétuel mouvement de légitimation/déligitimation31 de la politique nationale. Chaque parti se proclame être le bien. Le parti adverse incarnant par conséquent le mal. La notion de parti en Italie avait ainsi vocation à substituer à une culture moderne de la citoyenneté, une « subculture » de l’appartenance, « remplaçant les antiques carences de l’État en matière d’autorité et d’identité nationale, mais que le seul procès fait à la modernisation ne réussit pas à combler32 ». Le clivage des marchés électoraux en est un effet immédiat, les partis politiques finissant par jouer la carte d’une compétition électorale exacerbée, afin de conserver leur terrain d’influence, leurs fiefs.
26Certaines recherches ont expliqué la persistance de ces clivages dans le temps par la structure même de la famille italienne. Elles insistent sur le fait que les opinions politiques s’y transmettaient héréditairement de père en fils. Il s’agit d’une évidence dans le cas des familles d’appartenance communiste, au cours des premières décennies du second après-guerre. La famille jouait alors une telle fonction de stabilisation du vote que ce dernier finissait par devenir un choix d’appartenance33. Ce facteur a joué un rôle déterminant durant de longues années. Par ailleurs, la cristallisation du PCI dans des zones dépourvues du classique « prolétariat d’usine » constitue également une composante de solidité de l’enracinement de ce parti dans les régions d’Italie centrale. Ainsi donc, le PCI s’installa dans des régions comptant plus de métayers que d’ouvriers, zones qui cultivaient déjà une forte tradition socialiste, et au sein desquelles le parti fasciste était fortement implanté dans l’entre-deux-guerres. Le PCI y devient un parti d’intégration sociale, mettant en œuvre à l’échelle locale une puissante machine du pouvoir.
27Le PCI fonde son action politique locale sur un syncrétisme politique : empruntant autant au socialisme qu’au fascisme. En effet, s’il multiplie l’implantation d’organisations à l’échelle locale (maisons du peuple, associations), il convient de rappeler que bon nombre de ces associations, chères aux socialistes, avaient été occupées, utilisées et développés auparavant par le Parti national fasciste.
28Il est difficile de saisir ce en quoi la subculture rouge est si singulière en Italie sans faire référence auparavant à cet héritage mixte. Elle constitue une véritable clé d’interprétation historiographique. La « praxis » selon Togliatti doit passer par la mise en œuvre d’une véritable synergie entre le parti et la société. Pour ce faire, le PCI s’organise, et tout en martelant l’idéologie communiste comme réponse aux anciennes fractures socio-culturelles, il introduit des formes de gestion du pouvoir décrites comme étant « globales » « différentes » et « identitaires », par opposition à celles de nature institutionnelle (catholiques ou autres). On pourrait utiliser, pour qualifier ce mode de gouvernance, la catégorie/définition de « parti-société » : un chef-d’œuvre de « rationalité » politique accompli par Palmiro Togliatti34.
29Cette subculture devint progressivement une culture politique territoriale qui permit de créer un système politique local à part entière. Ce dernier se fonde sur la suprématie d’un parti, une solide organisation de la société civile, ainsi qu’une forte capacité de médiation entre les différents intérêts. Ainsi créé, ce système politique permet la mise en œuvre d’une épaisse trame institutionnelle, soutenue par un réseau dense d’organisations collatérales, elles-mêmes coordonnées par le parti dominant. Parti qui contrôle et gouverne à l’échelle locale, tout en maintenant des rapports étroits avec le système politique central.
30Une rapide comparaison avec la culture communiste française peut aider à mieux percevoir la « culture rouge » italienne dans sa spécificité. Cette dernière est très loin de puiser ses racines exclusivement au sein du prolétariat ouvrier. Il en va tout autrement de la culture communiste française dont Marc Lazar brosse le portrait dans ses travaux35. Il y évoque les bastions du PCF et démontre de quelle manière la culture ouvrière avait forgé celle des banlieues parisiennes, culture dont le déclin avait été accéléré par la désindustrialisation de la région entre les années 1970 et 1980 pour finalement être emporté plus tard avec l’effondrement de l’URSS. Bien que le PCF ait résisté localement dans certaines mairies, remarquons cependant qu’aucune culture politique communiste n’a jamais plus existé à l’échelle régionale. Force est de constater, que si la culture politique territoriale enracinée dans les « Régions rouges » a duré bien plus longtemps en Italie qu’ailleurs en Europe, cela tient précisément en sa singularité.
31Les classes moyennes, les travailleurs agricoles et plus encore les métayers, étaient considérés dans l’Italia di mezzo comme les catégories sociales de référence. Encore une fois, la « ceinture rouge du métayage » était au cœur des « Régions rouges » en Italie. La subculture rouge trouve dans ces terres l’essentiel de sa large base électorale et par là même une garantie de sa survie. Parmi les valeurs de cette tradition rurale figure en premier lieu l’éthique qui guidera l’esprit d’initiative et stimulera le nouveau modèle de développement guidé par le PCI, fondé sur les petites et moyennes entreprises industrielles. Je pense plus particulièrement à la naissance des « districts », composés de petites et moyennes entreprises implantées dans le territoire, et dans lesquelles les aspects économiques et sociaux s’interpénètrent profondément36. Togliatti joue sur le thème de l’intégration sociale pour contester ses adversaires, qui affirment qu’un parti prolétarien ne peut pas représenter la culture et les intérêts de la classe moyenne.
32En conservant beaucoup des valeurs traditionnelles allant de la solidarité au sens d’appartenance communautaire, en passant par la centralisation des municipalités et de leurs politiques d’assistance, la subculture rouge italienne est un phénomène qui dépasse les classes sociales. Aussi se différencie-t-elle pleinement de l’exclusivité de la culture prolétaire, qui a vu le jour en banlieue parisienne. La subculture rouge italienne a été marquée quant à elle par une idéologie populaire progressiste, en totale cohérence avec la stratégie du « bloc social » de Togliatti. Cette stratégie contribua à transformer des régions principalement agricoles en régions industrielles, ce qui permettait à la subculture rouge et à son système de pouvoir local de s’inscrire durablement à l’échelon territorial, une fois le PCI disparu.
Déclin
33J’ai indiqué en propos introductif à quel point les trois élections évoquées ont donné encore plus d’évidence à la crise de l’implantation de la culture rouge dans ses fiefs historiques. Et bien que le jugement des urnes ne puisse être considéré comme la seule garantie de longévité d’un parti, il n’en reste pas moins un indicateur substantiel de son implantation. Nous pourrions même aller jusqu’à dire qu’il s’agit sans aucun doute de l’indice quantitatif par excellence. Les résultats enregistrés traduisent un changement sensible des comportements électoraux, à commencer par l’abstention qui a comptabilisé des taux records. Par ailleurs, le processus de « sécularisation » ou de « laïcisation » des intentions de vote rend ce dernier toujours moins identitaire.
34Car dans les faits, les partis et les familles (anciens piliers de la subculture rouge) ne sont plus moteurs de la mobilisation politique. Il en est de même des espaces de socialisation politique et d’intégration qu’étaient les maisons du peuple et les ARCI (Associazione Ricreativa Culturale Italiana). Ces associations devinrent avec le temps davantage des espaces de loisirs que des cellules de conquête de l’électorat. Le confort, longtemps généré par le système politique établi dans les « Régions rouges », a fait le terrain – surtout au sein des jeunes générations – d’une sorte de « laïcisation du vote ». La socialisation politique en perte de vitesse laissa place à un individualisme croissant. En outre, l’engagement politique cessa progressivement d’être un aspect central de la vie des jeunes. Ces derniers ne participant que fort peu à la vie politique. « L’anti Berlusconisme » représente désormais le principal facteur de cohésion de l’électorat dans ces territoires, balayant mythes et symboles politiques construits au cours du siècle passé.
35Enfin, les « districts » des « Régions rouges » ne sont plus ces modèles de développement local et de bonne gouvernance – salués auparavant par les observateurs étrangers – capables de conjuguer dynamismes et cohésion sociale. En effet, à ce jour, des villes comme Bologne, Modène, Florence, Pérouse, sont davantage connues, et décriées par les médias, pour les problèmes socio-économiques auxquelles elles sont confrontées : troubles de l’ordre public, problématiques migratoires, financiarisation progressives des coopératives, spéculation et affairisme dans l’univers de l’édilité, manque de transparence entre les acteurs politiques et le réseau d’entreprises locales, etc.
36Autant de raisons qui contribuent à assoir en 2010 la Lega Nord dans les « Régions rouges ». Toutefois le problème n’est pas nouveau. Et les « gouvernements rouges » rencontraient depuis longtemps des difficultés à répondre efficacement aux nouveaux défis soulevés par la mondialisation. Ajoutons à cela, l’impuissance chronique de ces systèmes de gouvernance, lorsqu’ils sont confrontés à des questions relatives à l’ordre public ou à l’immigration, thème dont la Lega a fait précisément son cheval de bataille.
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37Une analyse historique plus poussée permettrait de développer plus en détail les origines de ces « Régions rouges ». Elle révélerait également, dans toute leur complexité, les raisons qui leur ont permis de s’inscrire si profondément dans leurs territoires. Elle aiderait également à déterminer, si l’image positive dont ont bénéficié ces « Régions rouges » est à relier à un processus de politisation croissante de la société, ou à la capacité qu’avait cette subculture à se fondre dans des représentations traditionnelles. Une des raisons expliquant le succès de l’implantation de cette culture rouge nous semble tenir dans le monopole politique que le PCI a su imposer dans ces régions. Il tient également dans le mode de sélection du personnel politique local, choisi en fonction de son aptitude à répondre aux problèmes collectifs. Le parti contribuait activement à cette sélection qui reposait sur un ensemble de mythes, finissant par donner le jour à une véritable religion politique. Toutefois, l’attraction idéologique qu’exerçait le PCI finit par s’épuiser, s’affaiblir, puis se dissiper, une fois que ce dernier disparu du paysage politique. Cet affaissement du PCI et de l’idéologie ne détruisit pas pour autant l’assise territoriale préalablement acquise par les « Régions rouges ». Leurs dirigeants continuèrent en effet de garder encore longtemps la main mise sur leurs fiefs. Il serait cependant injuste de penser que cet affaiblissement n’eut pas de conséquences. Je pense tout d’abord à la tendance au repli sur soi caractéristique de cette classe politique. Elle est à mettre directement en relation avec la quasi-inexistence de partis d’opposition, de contradicteurs, qui auraient permis de stimuler le débat public. Par ailleurs, il convient de citer la dérive progressive de quelques réalités ou organismes des « Régions rouges » devenant, en quelque cas, de véritables « écuries politiques », autour desquelles gravitait un grand nombre d’hommes politiques locaux. Ainsi, des organismes contrôlés par le parti, des coopératives ou des institutions locales étaient prioritairement mis au service des ambitions personnelles de certains. Enfin, la difficulté dont faisaient montre les communes, provinces et régions à trouver des accords, engendrait une certaine inertie dans le choix des politiques publiques. Le mode de gestion des anciens réseaux d’entreprises municipales en est un exemple emblématique. En effet, au lieu de véhiculer l’innovation, ces anciennes entreprises devinrent progressivement des conservatoires, où ex-administrateurs locaux et hommes politiques étaient placés, empêchant inévitablement l’avènement de véritables changements. À l’heure de leur déclin, une recherche d’ampleur publiée récemment par des spécialistes en sciences politiques devrait nous permettre de commencer à réfléchir sur l’héritage de ces « Régions rouges » en termes de formes d’organisation, de comportements électoraux, de système de valeurs, d’appartenance territoriale, de patrimoine, de capital social, et enfin, de mémoires collectives37.
38Les deux subcultures blanche et rouge appartiennent désormais au passé. Comme l’écrit avec lucidité Caciagli, « il faudra très certainement leur consacrer une épitaphe38 », ce qui revient à souligner que « le travail des historiens, est loin d’être fini sur ces questions39 ! ».
Notes de bas de page
1 Il s’agit des élections européennes et administratives de 2009, ainsi que des élections régionales de 2010.
2 Je garde bien en mémoire, les nuances très intéressantes que Serge Berstein a induites entre les termes fiefs, bastions, citadelles en conclusion du colloque de Poitiers.
3 Quelques articles de presse à ce sujet : A. Cazzullo, « Il PD e lo smottamento nelle “terre rosse”. Noi non siamo più lo zoccolo duro », Corriere della sera, 9 juin 2009 ; C. Panella, « E’finita l’era delle regioni rosse e della buona amministrazione della sinistra », L’Occidentale, 9 juin 2009 ; M. Smargiassi, « La frana delle regoni rosse in Umbria e Marche addio primato », Repubblica, 9 juin 2009 ; M.-G. Maglie, « Ora i democratici scricchiolano anche in Appenino », Il Giornale, 23 juin 2009.
4 Je n’oublie pas, évidemment, la victoire de Giorgio Guazzaloca aux municipales de Bologne en 1999, contre Silvia Bartolini. Victoire historique qui mit, pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, une coalition de centre droit à la tête de la ville de Bologne.
5 Le PDS (« Partito Democratico della Sinistra » ou Parti démocratique de gauche) naît de la dissolution du PCI. Il est composé de la majorité des inscrits en 1991. Le PDS fut également dissout en 1998 pour se transformer en un parti de gauche plus modéré, le DS (« Democratici di Sinistra » [Démocrates de gauche]). Il fut à son tour remanié en 2007, pour donner naissance au PD actuel.
6 Les principaux partis fondateurs du PD sont le DS ainsi que le parti « Democrazia e Libertà-La Margherita ». En d’autres termes, il s’agit de la rencontre de représentants de la culture post-communiste/social-démocratique et de démocrates chrétiens. L’adjonction de quelques courants libéraux-fédéralistes et environnementalistes a achevé de circonscrire le cadre idéologique de cette nouvelle formation politique.
7 Cf. Le site internet du ministère de l’Intérieur de la République italienne (onglet « élections »), [www.interno.it].
8 L. Ricolfi, « Ma il Pd non sa contare », La Stampa, 24 juin 2009.
9 L. Ricolfi, « Ma il Pd non sa contare », La Stampa, 24 juin 2009.
10 Ce parti de centre droit a été créé et est actuellement conduit par Silvio Berlusconi. Il est né de la fusion des partis « Forza Italia » et « Alleanza Nazionale » ; ainsi que de quelques ex-socilialistes, ex-catholiques DC et d’autres mouvements ou personnalités du centre droit.
11 Pour compléter le tableau, il conviendrait de rendre compte du succès connu par la Lega dans les fiefs rouges de l’Émilie-Romagne. Les positions du PD ont été raillées par les Grillini, membres du mouvement fondé par le comique, acteur et blogueur activiste politique, Beppe Grillo, lesquels ont recuilli plus de 7 % des votes.
12 Cf. I. Diamanti, « La forza del Carroccio. Un partito normale », La Repubblica, 30 mars 2010 ; A. Statera, « La Grande Padania all’orizzonte », La Repubblica, 30 mars 2010 ; A. Panebianco, « Popolare e borghese », Corriere della sera, 31 mars 2010.
13 Une des premières analyses réalisées en sciences politiques sur ce phénomène est due à M. Caciagli, « Toscana. Il declino della subcultura rossa », dans Elezioni regionali del ’90 : un punto di svolta ? a cura di P. Feltrin e A. Politi, Venezia-Mestre, Fondazione Corazzin, doc. no 2, 1990, p. 15-22. Nous renvoyons également à une autre contribution du même auteur : « La destinée de la “subculture rouge” dans le Centre-Nord de l’Italie », Politix, no 30, 1995, p. 45-60 ; « Toscanes rouges : du PSI au PCI, du PCI au PDS », dans Cultures politiques, a cura di D. Cefai, Paris, PUF, 2001, p. 299-315.
14 Cf. A. Bagnasco, Tre Italie : la problematica territoriale dello sviluppo italiano, Bologna, Il Mulino, 1977.
15 P. v. (édition plus récente, 1992). La traduction en français est mienne.
16 G. Becattini et G. Bianchi, « I distretti industriali nel dibattito sull’economia italiana », dans Mercato e forze locali : il distretto industriale, a cura di Giacomo Becattini, Bologna, Il Mulino, 1987, p. 169 (la traduction française est mienne). Du même auteur, voyez également : Modelli locali di sviluppo, Bologna, Il Mulino, 1989. Et plus récemment : Il calabrone Italia. Ricerche e ragionamenti sulla peculiarità economica italiana, Bologna, Il Mulino, 2007.
17 Cf. C. Trigilia, Grandi partiti e piccole imprese. Comunisti e democristiani nelle regioni a economia diffusa, Bologna, Il Mulino, 1986.
18 Cf. P. Farneti, Sistema politico e società civile. Saggi di teoria e ricerca politica, Torino, Edizioni Giappichelli, 1971, p. 281-319.
19 Cf. C. Trigilia, « Le subculture politiche territoriali », dans Quaderni della Fondazione Feltrinelli, 16, 1981.
20 Cf. Grandi partiti e piccole imprese, p. 47-48. Francesco Ramella reprend cette même analyse dans son livre Cuore rosso, Viaggio politico nell’Italia del Mezzo, Rome, Donzelli, coll. « Saggine », 2005, p. 26-27 (la traduction en français est mienne).
21 Nous vous renvoyons à l’étude de P. Messina, regolazione politica dello sviluppo locale : Veneto ed Emilia Romagna a confronto, Torino, Utet, 2001.
22 Sur les origines des subcultures, et plus particulièrement la culture blanche, de I. Diamanti et G. Riccamboni, La parabola del voto bianco. Elezioni e società in Veneto (1946-1992), Vicenza, Neri Pozza, 1992 ; Riccamboni, « Ritorno al futuro ? La transizione nell’ex-subcultura “bianca” », dans Le elezioni della transizione, a cura di G. Gangemi e G. Riccamboni, Torino, Utet, 1997 ; C. Trigilia, Grandi partiti e piccole imprese, op. cit., p. 108-124. Sur la culture rouge, voir le récent ouvrage de F. Ramella, Cuore rosso, Viaggio politico nell’Italia del Mezzo, bibliographie comprise. Sur l’héritage des subcultures blanches et rouges en Vénétie et en Toscane, voir le récent et excellent ouvrage collectif L’Eredità. Le subculture politiche della Toscana e del Veneto, sous la direction de Carlo Baccetti e Patrizia Messina, Novara, Liviana, 2009.
23 Citons à ce propos l’ouvrage de Mario Caciagli, dans lequel il avance, à notre sens, la définition la plus pertinente de la subculture politique. Nous signalons parmi les ouvrages notables de cet auteur : « Approssimazione alle culture politiche locali. Problemi di analisi ed esperienze di ricerca », Il Politico, no 2, 1988, p. 269-292 ; « Quante Italie ? Persistenza e trasformazione delle culture politiche subnazionali », Polis, no 3, 1988, p. 429-457 ; Regioni d’Europa. Devoluzioni, regionalismi, integrazione europea, Bologna, Il Mulino, (nouvelle édition) 2006. Voir également l’article rédigé par ce dernier en français en 1995, dans la revue Politix. Cf. P. Allum, « Cultura o opinioni ? Su alcuni dubbi epistemologici », Il Politico, no 2, 1988, p. 261-268.
24 M. Djilas, Gespräche mit Stalin, Frankfurt am Main, 1962, p. 146.
25 Ibid.
26 L’ouvrage de M. Lazar apporte à ce sujet une analyse intéressante : Maisons rouges. Les partis communistes en France et en Italie de la Libération à nos jours, Paris, Aubier, 1992, p. 202 et suiv.
27 R. De Felice, Rosso e nero, Milano, Baldini & Castoldi, 1995.
28 Cf. C. Pavone, Una guerra civile. Saggio storico sulla moralità nella Resistenza, Torino, Bollati Boringhieri, 1991. Voir également sur ces questions les réfléxions critiques très interessantes et éclaraintes de R. Vivarelli, Fascismo e storia d’Italia, Bologna, il Mulino, 2008, p. 181-197 et 199-210.
29 Sur ce point, il convient de se référer à l’incontournable analyse de S. Rokkan, Cittadini, elezioni, partiti, Bologna, Il Mulino, 1970 (plus particulièrement le 3e chapitre).
30 Cf. F. Andreucci, Falce e martello : identità e linguaggi dei comunisti italiani fra stalinismo e guerra fredda, Bononia University Press, 2005. Voir aussi de M. Degl’Innocenti, il Mito di Stalin. Comunisti e socialisti nell’Italia del dopoguerra, Manduria Bari Roma, Lacaita, 2005.
31 Cf. Due nazioni. Legittimazione e delegittimazione nella storia dell’Italia contemporanea, sous la direction de Loreto Di Nucci e Ernesto Galli Della Loggia, Bologna, Il Mulino, 2003.
32 G. Gozzini, « Dinamiche elettorali e spazi sociali del Pci (1946-1963) », Memoria e ricerca, juin 1997, no 9, p. 110.
33 Cf. Un’Italia minore. Famiglia, istruzione e tradizioni civiche in Valdelsa, a cura di Paul Ginsborg e Francesco Ramella, Firenze, Giunti, 1999.
34 Cf. P. Togliatti, Il Partito, a cura di R. Ledda, Roma, Editori Riuniti (ediz. 1972), p. 105.
35 Cf. M. Lazar, Maisons rouges, op. cit., Paris, Perrin, 2002.
36 B. Bianchi, I distretti industriali, op. cit.
37 Nous avons eu le privilège de pouvoir consulter cet ouvrage à peine terminé. Il nous apparaît que ce dernier pourrait ouvrir des perspectives d’étude intéressantes et originales sur le thème de l’héritage laissé par les deux subcultures, cf. C. Baccetti, P. Messina, L’eredità. Le subculture politiche della Toscana e del Veneto. Liviana Editore, 2009.
38 M. Caciagli, « Che resta ? », dans C. Baccetti, P. Messina, L’eredità, op. cit., p. 213 (la traduction française est mienne).
39 Ibid.
Auteur
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