Chapitre II. Un conflit vénéto-ottoman (1645-1669)
p. 37-59
Texte intégral
Nous fîmes de grands combats, mais ceux-ci, à côté de la bataille de Candie, ne sont que des lieux de promenade et des jardins de plaisance […] ; dans les mille sept cents royaumes [qui existèrent] depuis la chute d’Adam sur terre, il n’y eut guère – et il n’existera pas – d’aussi grandes batailles que celle qui se déroula à Candie […]. Les combattants musulmans volaient [alors] comme les oiseaux […] dans les feux de mines […]. L’armée victorieuse s’installait à peine dans les parties détruites des bastions se trouvant à l’extérieur de cette forteresse, que le sang et la vie des hommes coulaient comme un fleuve ; de nombreux martyrs en étaient extraits jour par jour. Par ailleurs, à l’intérieur de la forteresse, les ennemis mourraient, et ils étaient pris de peur et de terreur à cause des coups de canon, des bombes et des boulets, ainsi que des flèches qui tombaient du ciel1.
Evliyâ Tchélébi
Je ne doute pas qu’on n’ait vu des sièges de ville qui ont été comme le théâtre de toutes les ruses imaginables de la guerre et qui ont même épuisé, il me semble, toutes les forces de Mars, tant du côté des assiégeants que des assiégés ; mais je puis dire qu’on en a jamais vu aucun, ni même qu’on n’en verra peut être jamais, où les défenseurs aient paru plus constants ni plus généreux à conserver leur liberté contre des forces redoutables que les Vénitiens dans Candie, ni des barbares plus opiniâtres, ni plus téméraires, plus inventifs, ni plus cruels dans la continuation de leurs attaques que les Turcs devant cette ville2.
François Savinien D’Alquié
1L’annonce du troisième siège en règle de Candie, à partir du printemps 1667, suscita un véritable émoi en Europe, particulièrement dans les pays catholiques où la diplomatie pontificale et celle de la Sérénissime étaient très actives. De ce fait, ces deux dernières années du conflit semblent largement privilégiées dans l’historiographie en regard des vingt-deux qui précédèrent cet ultime épisode dont la grandeur tragique intéressa au plus haut point les contemporains, comme en atteste l’abondante production écrite et iconographique.
2Le récit du capitaine Domenisse couvre une période encore plus réduite d’un point de vue chronologique, puisqu’il relate la seule intervention française de l’été 1669. Il est donc nécessaire de replacer le Mémoire des choses les plus remarquables qui se sont faites au voyage de Candie dans un contexte beaucoup plus large, pour mieux saisir les enjeux et les grandes phases de cette cinquième guerre vénéto-ottomane3.
La conquête de « l’île de Crète »
3La Crète était au début du xviie siècle un bastion militaire et commercial avancé de la République de Venise4 : il s’agissait, selon l’expression de Jean Bérenger, de « l’une des perles de l’empire vénitien5 ». L’île avait été tour à tour sous domination musulmane6, byzantine, puis vénitienne. Concédée au marquis Boniface de Montferrat, lors du démantèlement de l’Empire byzantin à la suite de la quatrième croisade, elle fut achetée par la Sérénissime en 12047. Elle était alors la clé de la mer Égée, ayant résisté depuis plus de quatre siècles et demi aux tentatives de conquêtes des Génois, aux assauts des Turcs, notamment en 1538 et en 15678, ainsi qu’aux nombreuses révoltes de la population crétoise orthodoxe. Cette terre, qui demeurait une colonie importante, était sous la responsabilité d’un provéditeur, un général gouverneur. Il résidait dans la ville la plus importante, Candie, sur la côte septentrionale.
4Pour les Ottomans, depuis la conquête de Chypre en 15719, l’île s’avérait un véritable obstacle sur les routes maritimes en direction de possessions vitales telles que l’Arabie, l’Égypte et l’Afrique du Nord. La situation internationale des premières décennies du xviie siècle encourageait de surcroît le padichah à s’étendre en Méditerranée orientale10. En effet, les victoires répétées des Turcs contre les Safavides à Bagdad et la guerre de Trente Ans (1618-1648), qui affectèrent profondément la République dans ses relations commerciales, encouragèrent Murad IV à tenter la conquête de l’île. Dans les dernières années de son existence, le sultan n’attendait qu’une occasion pour reprendre les hostilités avec Venise.
5Le casus belli ne fut pourtant offert qu’à son successeur, Ibrahim Ier, à la suite d’un incident provoqué au mois de septembre 1644 par le corso maltais11. Le richissime chef des eunuques, Sümbül Agha, destitué par le sultan, avait embarqué avec ses trésors sur un vaisseau accompagné de deux navires et de sept caïques pour se rendre en Égypte, province réservée à la retraite des eunuques. Ce personnage avait emmené avec lui l’une des nourrices du harem impérial ainsi que le fils de cette dernière, Mehmed12, qui devaient se rendre à La Mecque en compagnie de pèlerins, de négociants, de trente femmes et de six cents hommes d’équipage et soldats. Ce convoi, pressé d’arriver à temps pour le pèlerinage, fut cependant pris en chasse par la flotte maltaise, composée de six galères, au large de Rhodes. Le capitaine du navire, Ibrahim Tchélébi, Sümbül Agha et près de la moitié des hommes furent tués dans l’abordage. Mehmed, le nouveau cadi de La Mecque, les femmes et les trésors de l’eunuque furent saisis et conduits à Kalismene, un port qui se trouvait sur la côte méridionale de Crète. Cette affaire, qui fi t grand bruit à Istanbul, permit aussitôt au sultan de mettre en accusation les Vénitiens et de déclarer la guerre à Malte. Après de longs préparatifs, une armada composée de 416 bâtiments et de 50 000 hommes13 mit le cap vers les Dardanelles14 et gagna la Crète, mouillant devant la place de San Teodoro qui fut prise immédiatement.
6Si la conquête d’une grande partie de l’île se révéla assez rapide avec la prise de La Canée, après deux mois d’un siège meurtrier en août 1645, et de Rethymnon, en novembre 1646, il n’en fut pas de même de la principale cité du regno. L’armée ottomane tenta en vain d’assiéger Candie du 1er mai au 10 novembre 1648, alors qu’elle contrôlait déjà presque toute la partie occidentale de l’île15. Les Turcs de Gazi Deli Hüseyin avaient réussi dans un premier temps à couper l’aqueduc qui alimentait la place en eau, à partir des sources d’Aghia Irini. Ils s’étaient ensuite emparés temporairement des ouvrages de Santa Maria et de Mocenigo, mais n’avaient pas pu les conserver, échouant également dans leur attaque du fort de San Dimitri. Face à l’ampleur de leurs pertes, victimes d’intrigues au sein du commandement, ils avaient dû se résigner à lever le siège. Une deuxième tentative, du 21 août au 6 octobre 1649, n’eut pas plus de succès que la première, la place résistant à toutes les tentatives d’assaut16, alors qu’une partie de l’armée turque, confrontée au manque de fournitures, était agitée par des mutineries. Dans les années qui suivirent17, les Ottomans lancèrent de nombreuses attaques en direction des murs de Candie, notamment en 1653, 1654, 1655, où ils tentèrent de s’emparer du fort de San Dimitri.
7Dès 1650, ils avaient commencé à établir quelques points d’appui autour de la ville, afin d’en contrôler les accès, que ce soit au Lazzareto, près de Castro ou en bord de mer. En 1652, Candia nova avait enfin vu le jour au sud de la cité. Il s’agissait d’un véritable camp retranché permanent, doté de cinq bastions, qui pouvait assurer la subsistance des troupes stationnées dans les alentours. De leur côté, les Vénitiens ne restèrent pas inactifs, mais les campagnes qu’ils menèrent en 1647 en direction de La Canée et Rethymnon tournèrent à leur désavantage, malgré l’envoi de renforts importants ayant conduit à quelques succès initiaux. Leur incapacité à tenir l’arrière-pays entraîna dès 1656 la perte de l’ensemble des places de l’île qu’ils contrôlaient encore, à l’exception de celles qu’ils parvinrent à conserver après le traité de 166918.
8La cité de Candie put donc rester l’un des points d’ancrage principaux de la flotte vénitienne, flotte qui ne cessait d’être une menace pesant lourdement sur le transport des hommes et des subsistances à destination de l’armée ottomane stationnée en Crète.
Un enjeu fondamental : le contrôle des mers
9La maîtrise des mers fut tout au long du conflit un enjeu de première importance pour les deux belligérants. Candie avait été assez rapidement coupée de son hinterland, constamment menacée par les incursions, puis par l’occupation turque : la seule voie de communication avec les autres possessions vénitiennes restait celle de mer, à partir de l’île de Standia19. Une telle situation rendait le contrôle des flots essentiel pour la République, qui devait également protéger ses points d’appui de Cerigo20, Zante, Céphalonie et Corfou.
10Dès 164721, malgré la mort de Tommaso Morosini, la bannière de Saint-Marc connut ses premiers succès en mer Egée en forçant l’entrée du port de Cismes, où un convoi ottoman à destination de la Crète fut détruit. La campagne suivante s’avéra plus mitigée. La flotte commandée par Giambattista Grimani dut faire face à une forte tempête près de

4. Le Levante vénitien en 1669
11Psara, mais la marine vénitienne, après remise en état de l’escadre, parvint à atteindre les Dardanelles pour tenter de les bloquer22. Les galères turques réussirent en revanche à franchir le détroit en 1649, mais furent attaquées par la marine adverse dans le port de Fochies23. Renforcé par des navires venus de Smyrne, d’Alexandrie et de Barbarie, le Kapudan pacha fut malgré tout capable de rallier La Canée.
12Les Vénitiens, plus que jamais, cherchaient coûte que coûte à empêcher le ravitaillement des troupes ottomanes présentes en Crète. Disposant d’un excellent réseau d’informateurs dans l’ensemble du Levant, ils s’efforçaient de détruire les convois de l’adversaire, comme en 1650, à Malvoisie24, où Luigi Mocenigo malmena une flotte ennemie stationnée dans le port, tout en s’efforçant de maintenir le blocus du détroit qu’il mit en place dès le mois de mars. Les Turcs réussirent néanmoins, une fois encore, à ravitailler la Crète.
13Moins d’un an plus tard, le 10 juillet 1651, Alvise Mocenigo remportait près de Paros une importante victoire sur la flotte de la Porte, qui avait passé le détroit, mais la campagne de 1652 ne s’illustra que par le pillage de Chios, alors que celle de 1653 n’aboutit qu’à un gros accrochage près de Rhodes25. Le capitano delle navi, Giuseppe Dolfin, fut en revanche tenu en échec en 1654 dans les Dardanelles26, même si un convoi de ravitaillement en provenance d’Alexandrie fut intercepté près de La Canée, pendant que les navires de la Religion, le 4 avril, sortaient victorieux d’un combat près de Rhodes.
14Les Vénitiens avaient alors fait de gros efforts pour armer vaisseaux, galères et galéasses. Ils ne contrôlaient plus, en dehors de Candie, que quelques forteresses isolées du regno. La reconquête d’une partie des positions perdues ne pouvait réussir qu’à condition de bloquer l’arrivée des renforts ennemis. En 1655, Morosini attaqua certes Égine, pilla Volos27, mais détacha puis rejoignit Lazzaro Mocenigo pour aller à nouveau bloquer les détroits. Le 21 juin, les Vénitiens battirent la flotte adverse à la sortie des Dardanelles, sans pouvoir toutefois empêcher le passage d’un convoi ottoman qui prit la mer en plein hiver. Un nouvel affrontement eut lieu dans des circonstances analogues, le 26 juin 1656. Il s’acheva par une victoire écrasante de la flotte commandée par Lorenzo Marcello, qui coula ou prit près de soixante-dix navires ottomans, semant la consternation dans la capitale de l’empire28. Les Vénitiens s’emparèrent dans la foulée de Ténédos et de Lemnos, en juillet et en août, deux positions stratégiques de première importance29.
15C’est à partir de ces positions avancées, en 1657, qu’ils tentèrent cette fois non plus seulement de bloquer mais de forcer les détroits, où une partie de la flotte adverse reconstituée venait de mouiller. Les Vénitiens et leurs alliés, profitant des vents favorables, entrèrent dans les Dardanelles, le 17 juillet 1657, afin d’aller bombarder la capitale30. Lazzaro Mocenigo, qui commandait les unités engagées, fut cependant tué, entraînant le retrait des navires de la Sérénissime pris sous le feu des batteries côtières et engagés dans une mêlée inextricable avec les bâtiments ennemis. Quelques semaines plus tard, malgré l’importance des pertes subies les 17, 18 et 19 juillet, les Turcs reprenaient l’initiative en s’emparant de Ténédos le 31 août, puis de Lemnos le 12 novembre.
16Les Vénitiens, par la suite, ne furent plus vraiment en mesure de bloquer ni de menacer durablement les Dardanelles. La Porte, particulièrement après le désastre de 1656, avait en effet entrepris de gros efforts de construction et d’armement navals. À l’initiative de Mehmed Pacha, la flotte avait été modernisée en utilisant les compétences de renégats pour augmenter l’artillerie embarquée et renforcer la solidité des bâtiments. La marine ottomane put ainsi faire face de manière plus efficace aux Vénitiens et au corso chrétien, qui s’était fortement développé depuis le début des hostilités, à l’instar de la course barbaresque. Elle avait fort à faire : les Morosini, Giorgio et Francesco, menèrent des opérations particulièrement audacieuses comme à Torone, Cismes et Castel-Russo en 1659, Skiathos en 1660 ou à Chios en août 1661. En 1662, ils parvinrent même à incendier une partie du convoi d’Alexandrie.
17Les Vénitiens, de leur côté, furent contraints de consacrer une partie importante de leurs moyens maritimes à la protection de leurs routes d’approvisionnement, dont la survie de Candie dépendait. En 1666, les Turcs paralysèrent ainsi la marine adverse qui, au lendemain d’une grande opération en Crète, dut concentrer l’essentiel de ses vaisseaux à protéger Zante que l’on pensait menacée. Morosini dut également faire face à une tentative ottomane en direction de Cerigo, en 1667, alors que les navires des puissances chrétiennes engagées dans le conflit s’efforçaient de maintenir le blocus de la baie de La Canée. Le sort de la dernière des grandes places du regno allait dès lors se jouer sur terre, d’autant que plus de vingt années de guerre avaient fini par éroder les capacités navales de la Sérénissime, confrontée à des difficultés financières croissantes31.
Les défenses de Candie
18Candie était défendue, en 1666, par une importante garnison, qui atteignait les quatorze mille hommes, ainsi que par une flotte de trente-cinq navires provenant de Venise, du Saint-Siège, de Malte, de Naples et de Sicile32. La ville, qui avait déjà subi plusieurs attaques depuis le début de la guerre33, avait été puissamment fortifiée, les défenses ayant été constamment améliorées.
19Dès la fin du xve siècle, les Vénitiens s’étaient attachés à renforcer les murailles héritées de l’époque byzantine34. À partir de 1518, ils entamèrent un vaste programme de reconstruction des places fortes du regno, afin de faire face au développement de l’artillerie35. Ils mirent alors en place les principaux éléments de la nouvelle enceinte de Candie, en s’appuyant sur la nature et la forme des terrains qui offraient de nombreux atouts. On attribue cependant à l’architecte véronais, Michele Sanmicheli36, la conception d’ensemble de la place forte. Conçu vers 1538-1539, le projet fut progressivement réalisé dans les années 1540-1550. Ce n’est toutefois pas avant les années 1560 que le système défensif connut un premier stade d’achèvement, sous la conduite de Giulio Savorgnano, qui remania et développa les fortifications existantes afin d’en corriger les faiblesses37. La Sérénissime, face à la conjoncture, avait débloqué des sommes importantes, consacrant en 1561 plus de 20 000 ducats au perfectionnement de la place.
20Les Vénitiens ne cessèrent par la suite d’améliorer les défenses de la cité, en construisant notamment de nouveaux ouvrages, tels le cavalier Zani, achevé en 1614 et aménagé pour épauler le bastion de la Sabionera, l’un des principaux points faibles du système défensif38. Candie fut également entourée d’ouvrages à cornes, de ravelins et de palissades exécutés sous la direction de Camillo Gonzaga, puis de Francesco De Wert, un ingénieur des Provinces-Unies passé au service de la République en 1638. C’est lui, qui en quatre mois, à partir d’avril 1646, acheva l’essentiel des éléments extérieurs qui vinrent s’ajouter au fort San Dimitri, seul ouvrage avancé d’importance à avoir été terminé dès la fin du xvie siècle.
21Les fortifications, notamment après les deux premiers sièges et les diverses tentatives d’assaut menés en vain par les armées de la Porte, furent constamment réparées, renforcées et améliorées. En 1664-1665, Antonio Priuli fit ainsi entreprendre d’importants travaux afin de renforcer les défenses là où elles paraissaient les plus imparfaites, à la Sabionera et à San Andrea.
22Face à l’imminence d’une opération d’envergure, la République envoya également d’importants renforts, à la fin 1665, alors même que la peste venait d’affaiblir les troupes ottomanes. Le marquis Ghiron Francesco Villa39, dit le marquis de Ville par les chroniqueurs français, avait tout juste reçu le commandement de l’infanterie vénitienne. Lieutenant-général des armées du roi de France, général de la cavalerie de Savoie, il s’était efforcé de renforcer la discipline et de réorganiser les troupes de terre40. En décembre 1665, il s’était rendu en Crète, à partir de Zante, avec plus de 3 000 hommes transférés des garnisons de Dalmatie ou levés en Bavière. Après un débarquement difficile, ces troupes s’étaient dirigées vers La Canée, en vain, étant contraintes de rembarquer et de rejoindre Standia en mars 1666. Par la suite, en avril de la même année, le marquis tenta de desserrer l’étau autour de la cité en occupant des positions avancées qu’il avait fait fortifier, alors que corsaires et levanti opérèrent dans le même temps de nombreux coups de main dans toute l’île. Au début de juin 1666, les Vénitiens durent toutefois abandonner ces lignes, face aux assauts répétés des Ottomans, rembarquant les troupes de Dalmatie mais laissant d’importants renforts dans la place.

5. Planche tirée du Journal de l’expédition de M. de La Feuillade pour le secours de Candie, Lyon, 1669
Légende de la planche
23A. Le bastion de Saint-André.
241. La brèche.
252. Les deux retranchements.
263. Le grand retranchement qui embrasse aussi l’Écossaise.
274. La porte de Saint-André.
285. La demi-lune ou le réduit de Saint-André, sur lequel les Turcs ont élevé une batterie de quatre pièces.
296. L’endroit ou était le fort avancé pour couvrir la demi-lune.
307. Les redoutes et les autres logements que les Turcs ont faits avec les terres apportées en cet endroit et vers l’Écossaise sur le sable.
318. L’ouvrage de Priuli, ruiné, où les Turcs ont une batterie de quatre mortiers. La place de la petite tour appelée Priula, où les ennemis ont une batterie de cinq pièces qui bat la porte de Saint-André et les redoutes qui sont au devant de l’Écossaise. Elle a été enclouée.
329. L’Écossaise.
3310. Les batteries des ennemis, du côté de Saint-André.
3411. Les redoutes des Vénitiens au devant de l’Écossaise et de la porte Saint-André.
3512. Demi-redoute.
3613. Le petit arsenal.
3714. Le grand arsenal.
3815. Le cavalier Barbaro, élevé sur deux commandements.
39B. La Sablonnière.
4016. Ses deux retranchements.
4117. Le cavalier de Zane.
4218. Les redoutes des ennemis.
4319. Leurs batteries du côté de la Sablonnière.
4420. Le cavalier qu’ils tâchent d’enlever.
4521. Logement des Janissaires. Les dehors de la Sablonnière étaient une grande redoute, à la pointe du bastion, sur le fossé de la fausse braie, et une autre petite vis-à-vis, fort avancée.
4622. L’ouvrage de Molina.
4723. L’ouvrage Barbaro.
48C. Le bastion de la Victoire.
4924. Son cavalier.
5025. Le Fort-Royal, ou de Saint-Dimitre.
5126. Ses demi-lunes.
5227. Son Ravelin.
5328. L’ouvrage de Priuli ou de Sainte-Mariede-la-Presa.
5429. Le fort de Crève-Cœur.
55D. Le bastion de Jésus.
5630. Sa retirade.
5731. La Palma.
5832. Le ravelin de Saint-Nicolas.
59E. Le bastion de Martiningue.
6033. Son cavalier.
6134. Son ouvrage couronné, appelé Sainte-Marie.
6235. Le ravelin de Bethléem.
63F. Le bastion de Bethléem.
6436. Demi-lune de Mocenigo.
6537. Le ravelin de Panigra.
66G. Le bastion de Panigra.
6738. Sa retirade.
6839. Ouvrage de Panigra.
6940. Le ravelin du Saint-Esprit.
7041. La brèche du même ravelin.
7142. La fraise de Morosini, ruinée.
Le troisième siège de Candie : 1667-1669
72Ce n’est qu’avec le traité de paix de Vasvár-Eisenburg (10 août 1664), qui permit d’établir une paix entre la maison d’Autriche et la Porte, que le grand vizir, Fazıl Ahmed Pacha, put se consacrer à la conquête totale de l’île. Malgré les multiples propositions de paix faites par les émissaires de Venise, entre 1662 et 1665 notamment, les Turcs semblaient en effet bien décidés à s’emparer de Candie. Après de longs préparatifs, une expédition ottomane de grande envergure prit donc la mer en mai 1666, à partir de la Morée, et, le 3 novembre, le grand vizir, nommé commandant en chef pour l’occasion, débarqua à La Canée avec le gros des forces et du matériel de guerre rassemblés pour soutenir une opération qui s’annonçait difficile. L’armée ottomane, qui avait mis des mois à concentrer ses moyens, avait mobilisé des renforts de toutes les provinces, en provenance du Maghreb, d’Égypte, d’Anatolie et des Balkans41. Du matériel avait également été acheté en abondance aux Anglais et aux Hollandais42.
73Le grand vizir se rendit ensuite aux abords de Candie, où il ordonna la construction de nouveaux ouvrages afin de se rapprocher des murs de la place, sous la conduite de Zülfikâr Agha, maître des mâtins des janissaires43. À la fin mai 1667, les premiers travaux d’approche étaient déjà bien avancés. Les troupes ottomanes s’étaient concentrées, pour l’essentiel, entre l’ouvrage à corne de Sainte-Marie et la mer, à l’ouest de la ville, dans la vallée formée par le cour du Giosiro. Le grand vizir avait amené avec lui une puissante artillerie 44 issue de la fonderie impériale, mais une grande partie des pièces fut par la suite coulée sur place, à Inadiye, à quelques kilomètres à l’est de Candie où travaillaient, jours et nuits, « trois mille ouvriers spécialisés45 ».
74Durant tout l’été 1667, l’attaque des assiégeants se développa en direction du ravelin de Mocenigo, en avant du bastion de Betelem, et face aux ouvrages avancés qui couvraient le bastion de la Panigra. À la fin août, les Turcs commencèrent à étendre leurs travaux en direction de la mer, essentiellement pour y installer quelques canons afin de battre le port de Dermata. À l’est de la place, du côté du Lazaret, ils établirent un camp et commencèrent également à installer des batteries pour menacer le port principal, tout en essayant d’atteindre le bastion de la Sabionera et le fort de San Dimitri. Les Turcs avaient déjà bien entamé les défenses du côté

6. Delineation der Statt Candia, welche von Türcken unter dem Commando des Gran Visir attackirt von 25 May bis auf dato den 20 Septris Anno 1667 und 1668 (À la fin 1667, les bastions de San Andrea et de Sabionera n’ont pas encore été attaqués.)
75du bastion de la Panigra, à l’automne 1667, mais les Vénitiens réussirent à réparer de manière satisfaisante le bastion lui-même, malgré la perte des ouvrages avancés.
76À partir du début 1668, les Ottomans décidèrent cependant d’infléchir la direction de leurs attaques, sans pour autant abandonner ce qui avait déjà été entrepris. Les 19 et 20 janvier, si l’on suit le récit de D’Alquié, ils entamèrent de nouveaux travaux d’approche en direction des secteurs qui assuraient la jonction entre les fortifications bastionnées et les défenses littorales, c’est-à-dire ceux de San Andrea, à l’Ouest, et de Sabionera, à l’Est. Une tradition bien établie assure que ces changements furent la conséquence de la désertion, en novembre 1667, du colonel Andrea Barozzi ou Barotsis, qui fournit les plans de la place aux Turcs. Il aurait ainsi persuadé le grand vizir de diriger ses attaques vers ces bastions qu’il considérait comme les plus faibles46. Cette inflexion répondait de toute manière à d’évidents impératifs tactiques, face à l’enlisement des attaques, mais également à des raisons d’ordre stratégique, tant l’utilisation des deux ports de la cité s’avèrait vitale pour les assiégés. En attaquant les bastions les plus proches de la mer, les assiégeants se trouvaient plus à même de tenir sous leur feu les barques qui assuraient la liaison avec la « fosse » de Candie et au-delà avec Standia, qu’ils tentèrent en vain de surprendre en mars 166847. En avril, les Ottomans avaient en tout cas complètement achevé leurs travaux face à la mer, aménageant toute une série de batteries côtières et de retranchements, à tel point qu’il fallut ouvrir une seconde entrée dans le port de Dermata pour se protéger du feu continuel des canons.
77Lors de l’arrivée du marquis de Saint-André, qui remplaça le marquis de Ville en août 1668, les mines et les tirs turcs avaient déjà commencé à sérieusement affaiblir les défenses du côté de San Andrea, la progression ottomane étant plus lente du côté de la Sabionera. Les pertes étaient très importantes des deux côtés : la sortie générale menée par les assiégés, le 24 septembre, avait certes dérangé les premières lignes turques, mais s’était achevée dans un bain de sang des deux côtés, le provéditeur Battaglia y trouvant même la mort. La garnison, au début de l’année 1669, était en tout cas très affaiblie.
78Candie, à cette date, abritait environ 7 000 combattants, alors qu’il ne restait plus que 4 000 habitants vivant dans une cité dévastée et astreints au service des armes, sous peine de mort48. L’armée ottomane rassemblait vraisemblablement 40 000 hommes, dont 20 000 combattants tout au plus.

7. Candie pour la 3e fois attaquée de l’armée ottomane, et deffendüe par celle de la Sérénissime Rép. de Venise… Par Antoine De Fer, Paris, 1669
79L’habileté des ingénieurs au service de la République, passés maîtres dans l’art de défendre la place, permit cependant de faire face à l’« opiniâtreté des Turcs », dont les travaux ne cessaient de progresser malgré les sorties des assiégés, les mines et les « fourneaux ». Les Vénitiens avaient été contraints de faire sauter le bastion de San Andrea, complètement ruiné. Ils s’étaient au préalable retirés à l’abri d’un nouveau retranchement bastionné, construit en arrière du précédent.
80L’arrivée de renforts permit également de prolonger la résistance. En mai 1669, les 3 000 hommes du comte de Waldeck, levés au nom du duc de Brunswick-Lüneburg, vinrent renforcer la garnison et relever des troupes épuisées et décimées par les incessants combats, alors que Venise venait de recevoir un important contingent de Dalmatie. Quant à l’arrivée, le 19 juin 1669, des 6 000 hommes envoyés par Louis XIV, suivis de 1700 Bavarois quelques jours après, elle apparut comme le dernier espoir de la place alors que les Turcs recevaient eux-mêmes des troupes fraîches.
81L’échec de la sortie générale menée par les Français dans la nuit du 24 au 25 juin 1669, l’inefficacité du bombardement naval du 25 juillet, la mésentente permanente entre les généraux vénitiens et français, suivis du rembarquement des troupes envoyées par le Très Chrétien, le 20 août, vinrent cependant mettre un terme à toute espérance de sauver la ville assiégée. Le 15 juillet, les tirs continuels de l’artillerie du grand vizir avaient déjà entraîné un premier abandon temporaire des postes de San Andrea. De façon analogue, l’assaut de grande ampleur ordonné par le grand vizir le 24 août poussa une partie des défenseurs à fuir, les Turcs n’ayant été que difficilement repoussés par les troupes du comte de Waldeck, lui-même décédé le 8 août des suites de ses blessures. Les « retirades » construites par les Vénitiens et les Français avaient été de plus entamées, alors que les bombardements des assiégeants n’avaient cessé de croître en intensité, comme le 3 septembre, en pleine négociation, où ils atteignirent leur apogée. Il ne restait plus alors que 3 000 défenseurs dans la cité. Lors du conseil de guerre du 27 août,

8. L’attaque de San Andrea en août 1669
82Morosini prit donc la décision d’embarquer les malades et commença à faire transporter les richesses de la ville sur les vaisseaux.
83Le Sénat avait délégué un émissaire auprès de la porte, dès le début de l’été 1668, afin de négocier secrètement une paix. Malade, Andrea Valier avait été remplacé par Alvise Molin. Ce dernier avait réussi à gagner Larissa, où résidait le sultan, avant d’être envoyé par les Turcs à La Canée.
84K. M. Setton, à partir de la correspondance secrète avec le Sénat, a bien montré toute la complexité de la situation ainsi que l’importance des rapports de force régnant au sein des instances politiques de la République49. Les négociations entamées achoppaient principalement sur la question de

9. La place de Candie. Das lange bestrittene Königreich Candia von anno 1645 biss 1669, Francfort, D. Fievet, 1670. Gravure de Mathaeus Merian « le jeune »
85la « partition » du regno, c’est-à-dire la conservation de places en Crète. Les Vénitiens souhaitaient pouvoir négocier en position de force et avaient beaucoup espéré des secours envoyés par les puissances occidentales. La situation de la cité assiégée ne leur laissait plus guère le choix.
86Le 5 ou le 6 septembre 166950, après de courtes négociations, le traité marquant la fin à la guerre de Candie fut conclu, mettant un terme à quatre siècles et demi de présence vénitienne. D’après les accords passés, la cité de Candie devait être laissée à la disposition du grand vizir « pour en disposer absolument à sa volonté51 ». Il donnait douze 52 jours à la population et aux défenseurs pour quitter la ville en emportant leurs biens et quarante jours pour évacuer Standia. La garnison était de son côté autorisée à sortir de la place, « enseignes déployées », en emportant ses bagages ainsi que les « vases sacrés et ornements des églises ». Les Vénitiens étaient par ailleurs tenus de laisser dans la place toute l’artillerie et les munitions, à l’exception de 40 pièces qu’ils pourraient conserver à titre « de présent ». Le sultan obtenait donc la suzeraineté sur la totalité de l’île de Crète, à l’exception des trois forteresses de Souda, Grabusa et Spinalonga qu’il laissait aux Vénitiens. Ces derniers conservaient également la forteresse et le territoire de Klis, pris en 1648, et tout ce dont ils s’étaient emparés en Dalmatie et en Albanie depuis le début de la guerre. Ils n’étaient par ailleurs plus tenus de payer tribut pour les îles de l’archipel et de Grèce, ainsi que pour Zante et Céphalonie. Enfin, les Vénitiens s’engageaient à envoyer un ambassadeur à Istanbul pour ratifier le traité, pour rétablir le commerce et pour négocier la libération des prisonniers et des esclaves des deux partis.
87Le 27 septembre 1669, les derniers défenseurs quittaient finalement la place. Candie, après plus de deux années de siège, avait subi près de 69 assauts, les assiégés ayant entrepris plus de 80 sorties. On avait pu dénombrer 1 364 explosions de mines et de fourneaux. Au total, plus de 120 000 sujets de la Porte y perdirent la vie, dont près de 25 000 janissaires, contre 29 000 à 30 000 Vénitiens, alliés ou volontaires53.
Mythes et réalités de la « guerre turque » à travers le siège de Candie
88Dans les mois qui suivirent la reddition, toute une série de textes relatifs à la défense de Candie fut publiée à travers l’Europe. Les dernières phases du siège avaient tenu en haleine une bonne partie de l’opinion, notamment par le biais des nouvelles publiées dans les gazettes54. Les belles gravures d’Antoine de Fer, celles de Jailliot, de Duval 55 ou de Merian dans le Saint-Empire, largement diffusées, montrent assez l’intérêt d’un public pour un combat qui dépassait le cadre ordinaire des récits de bataille et des attaques de place.
89Les textes du temps, en langue française, donnent en général une image fortement héroïsée de la défense de la cité, répondant il est vrai à la demande d’un lectorat volontiers séduit par la geste nobiliaire d’un duc de La Feuillade, d’un marquis de Ville ou d’un comte de Waldeck. L’affrontement revêtait également, selon leurs auteurs, une indéniable dimension religieuse, répondant en cela à bon nombre de topoï participant de la rhétorique de la « guerre turque », que les travaux de Géraud Poumarède 56 ont permis de relativiser en soulignant la complexité des motivations et des engagements. Les motifs qui poussèrent ces hommes à gagner la Crète reposent en effet sur un faisceau de causes multiples, dont la défense de la chrétienté put être, pour certains, un élément déterminant parmi d’autres. Ce type de combattants ne représentait de toute façon pas la majorité de ceux qui défendirent la place. Le recrutement des mercenaires, tel que le pratiquait la Sérénissime, n’était guère compatible avec des motivations à dominante exclusivement idéologique ou religieuse, même si cet élément n’est pas à exclure en totalité.
90La guerre contre les Turcs n’était cependant pas une forme de guerre ordinaire. Le siège de Candie, entre autres caractéristiques, fut indéniablement marquée par l’exacerbation de la violence. Le témoignage du capitaine Domenisse est à ce titre éloquent. Les listes des morts et des blessés parmi les gentilshommes ayant participé à l’expédition de La Feuillade, dressées par F. S. D’Alquié, mettent également en évidence l’importance des pertes, puisque pas loin des deux tiers des volontaires y trouvèrent la mort, dont 120 lors de la seule sortie du 16 décembre 166857. Le même D’Alquié, rapportant des propos tenus par le marquis de Saint-André pour dissuader La Feuillade de tenter l’aventure, indique aussi que lors d’une précédente action, dont il ne précise pas la date, l’infanterie vénitienne avait déjà perdu près de 600 hommes sur les 800 engagés. Quant au régiment de Savoie, il ne disposait plus que de 2 000 hommes valides en janvier 1669, après quelques mois de présence. Enfin, Evliyâ Tchélébi, dans son inimitable style, insiste de son côté sur l’ampleur des pertes subies par l’armée ottomane, particulièrement lors de l’explosion des mines et des fourneaux, art que maîtrisaient à la perfection les ingénieurs au service de la République, tels le fameux Catelan ou le chevalier de Loubatiers, dont les noms reviennent de manière récurrente dans les Mémoires du voyage de Monsieur le marquis de Ville.
91L’importance des pertes subies joua de toute évidence un rôle déterminant dans l’évolution du moral des combattants des deux camps. À l’enthousiasme des premiers mois succéda peu à peu un sentiment de lassitude face à un siège qui s’éternisait, tout en prélevant quotidiennement son lourd tribut. La question des renforts, les besoins en vivres et en munitions devinrent vite primordiaux et jouèrent de plus en plus fortement sur l’état d’esprit des troupes engagées. Le récit du capitaine Domenisse apporte d’ailleurs un éclairage particulièrement révélateur en laissant transparaître une atmosphère générale de lassitude, voire de démoralisation, propre aux dernières semaines de combats dans une ville dévastée.
92Les passages que consacre F. S. D’Alquié aux conditions de vie à l’intérieur de Candie mettent en évidence les difficultés financières qui accablaient le trésor de Saint-Marc58. Les troupes ne percevaient plus leurs soldes et avaient obtenu, en contrepartie, des vivres et des provisions, ce qui provoqua quelques mécontentements et mouvements de grogne dans l’infanterie de la République. Le provéditeur de la place s’était réservé l’exclusivité du commerce des denrées, qu’il vendait à des prix très élevés, diminuant d’autant le montant des soldes. S’ajoutait à cela, selon le capitaine Domenisse, le manque d’artillerie et de munitions pour défendre la cité face à des ennemis de plus en plus proches des murs de la ville et dont les bombardements continus provoquaient un « carnage terrible59 ».

10. Fazıl Ahmed Pacha Köprülü (1635-1676) d’après Das lange bestrittene Königreich Candia…, op. cit.
Ce portrait ne correspond en rien aux descriptions connues du grand vizir. Il est avant tout le reflet d’une perception très traditionnelle du Turc, celle qui ne voit en lui qu’un « barbare » fondamentalement cruel et brutal. Une gravure italienne plus tardive souligne au contraire la rondeur et la douceur des traits de cet ancien professeur de madrasa.
93Evliyâ Tchélébi apporte, quant à lui, un précieux témoignage sur les désertions qui affectèrent le camp vénitien, bien qu’il soit à manier avec circonspection. En chroniqueur des dernières mois du conflit, il signale les transfuges qui gagnaient, toujours plus nombreux selon lui, Candia nova. Il souligne naturellement le bon accueil que les Turcs leur réservaient. Après avoir été interrogés sur la situation de la place, les fuyards étaient habillés de neuf et recevaient « de nombreux cadeaux et présents de la part du grand vizir au cœur généreux60 ». Face à la longueur du siège, il va même jusqu’à affirmer que « le nombre de déserteurs mécréants augmente quotidiennement », au point que dans les dernières semaines du siège « les infidèles commencent à sortir de plus en plus nombreux de la forteresse pour fuir la famine, la peur et la terreur qui règnent61 » à l’intérieur. Selon Theocharis Detorakis62, le grand vizir aurait dépensé 700 000 pièces d’or pour encourager les défections, D’Alquié se faisant l’écho, de son côté, des billets envoyés par les Turcs dans la place afin d’inciter les défenseurs à changer de camp63. Domenisse lui même évoque l’engagement au service du grand vizir d’un « bombardier mal traité du commandant de la place », qui aurait permis aux Turcs d’utiliser à leur tour une sorte de mortier de siège qu’avait introduit le marquis de Ville. Plus généralement, le capitaine indique, en exagérant, que « quasi tous leurs canonniers avaient déserté64 » pour servir l’ennemi.
94Les désertions obéissaient visiblement à des logiques fort différentes en fonction des individualités. D’Alquié rapporte, par exemple, qu’en juillet 1668, « quelques-uns de nos soldats, qui avaient déserté, dardaient, parmi la grêle épaisse des flèches que les Turcs faisaient pleuvoir dans la place, des pièces de bois sur lesquelles ils avaient gravé certains caractères qui découvraient les desseins des Turcs65 ». Evliyâ Tchélébi s’étend aussi sur les changements de camps opérés par quelques soldats, changements qui apparaissaient comme la forme la plus radicale d’abandon en choisissant soit « d’embrasser la foi musulmane », comme ce « Français beau comme le soleil du matin envahissant l’univers66 », soit « de devenir sujets ottomans dans les montagnes d’Asfakiye, tout en ayant le droit de conserver leur religion67 ». La fuite individuelle ou collective, la conversion 68 et le choix d’entrer au service du sultan avaient donc pu finir par apparaître aux yeux de certains défenseurs de Candie comme une réponse aux difficultés du siège, comme un geste de survie, voire parfois de désespoir69. Ces passages à l’ennemi sont cependant difficilement quantifiables et rendent délicate toute analyse en profondeur. Ils permettent en tout cas de mieux cerner une des réalités de ce conflit, au-delà de la seule trahison de Barozzi.
95Les témoignages concernant l’état d’esprit de l’armée ottomane sont plus rares, faute de sources aisément accessibles. Dès 1649, des mutineries avaient affecté les janissaires, entraînant la levée du siège de la ville. Au printemps 1668, Paul Rycaut, consul de la Levant Compagny à Smyrne, avait pu noter « mutinies and seditions in the camp and part of the Spahees and Janizaries to withdraw from the trenches70 ». Heneage Finch, comte de Winchilsea, remarquait quant à lui, en novembre 1668, que les Ottomans avaient du lever des troupes « par force », ce « qui ne leur était jamais arrivé71 ». Concernant les derniers mois du siège, Evliyâ Tchélébi reste encore une fois un informateur privilégié, notamment quand il évoque les murmures sévissant au sein des troupes. L’enthousiasme du grand vizir semblait s’être émoussé, laissant place à un profond pessimisme. Le sentiment général d’épuisement, décrit par le voyageur ottoman, avait même semble-t-il fini par gagner tout le camp turc, miné par le doute. L’impatience d’une partie des forces musulmanes donna ainsi lieu à quelques révoltes parmi les « volontaires d’Anatolie72 », mais toucha aussi la capitale73. Le grand vizir réussit cependant à rétablir l’ordre, d’abord par la répression74, puis grâce à l’envoi de secours75, et enfin par la distribution de présents impériaux76, si l’on en croit Evliyâ.
96F. S. D’Alquié, enfin, signale quelques passages de transfuges dans le camp vénitien, mais, faute de précisions, il reste bien difficile d’en savoir davantage, d’autant qu’il laisse entendre, comme Domenisse, le caractère exceptionnel que pouvait représenter la capture d’un janissaire vivant, tant les combats étaient meurtriers et sans merci.
Notes de bas de page
1 Evliyâ Tchélébi, La guerre des Turcs…, op. cit., p. 197-198.
2 F. S. D’Alquié, Les mémoires du voyage de Monsieur le Marquis de Ville…, op. cit., Ire partie, p. 452.
3 Pour une vision globale de la guerre de Candie : E. Eickhoff, Venedig, Wien und die Osmanen…, op. cit., p. 17-48 ; K. M. Setton, Venice, Austria and the Turks…, op. cit., p. 37-171 ; Gaetano Cozzi, « La guerra di Candia (1645-1669) », G. Cozzi, M. Knapton, G. Scarabello, La Repubblica di Venezia nell’età moderna…, op. cit., p. 117-127 ; ibidem, « Dalla riscoperta della pace all’inestiguibile sogno di dominio », G. Benzoni et G. Cozzi (dir.) Storia di Venezia, t. VII, La Venezia barrocco, Rome, Utet, 1997, p. 26-43.
4 Venezia e la difesa del Levante…, op. cit., p. 97-107. Cf. aussi Michel Lassithiotakis, « L’Isola di Candia, piu d’ogn’altra lontana. Aspects matériels et culturels de l’insularité en Crète à la fin de la période vénitienne (1570 env.-1669) », N. Vatin et G. Veinstein (dir.), Insularités ottomanes, Paris, Maisonneuve et Larose, 2004, p. 43-67. Ce travail met bien en évidence l’importance des ressources économiques et militaires de la Crète, ainsi que son intérêt stratégique pour Venise.
5 Jean Bérenger, « Les vicissitudes de l’alliance militaire franco-turque (1520-1800) », Revue internationale d’histoire militaire, 68, 1987, p. 24.
6 Un groupe de pirates, qui avait dû fuir Cordoue à la suite de la révolte dite du Faubourg, en 818, s’était d’abord installé à Alexandrie avant d’en être chassé. Ils décidèrent alors de s’établir dans l’île de Crète. Ils fondèrent, à l’endroit où ils avaient débarqué, une cité qui tira son nom – Chandax, devenue ensuite Candia – du fossé ou khandaq qu’ils avaient creusé pour en assurer la défense. La Crète vécut donc sous la domination musulmane de 827 à 961. C’était un émirat indépendant, qui reconnaissait la souveraineté du califat abbasside. Voir Robert Mantran, « Ikritish », EI, t. III, p. 1113-1114.
7 Démocratie Iliadou, « La Crète sous la domination vénitienne et lors de la conquête turque (1322-1684) », Studi Veneziana, 15, 1973, p. 451-584 ; Molly Greene, A Shared World : Christians and Muslims…, op. cit. ; ibidem, « Ruling an Island without a Navy. A comparative View of Venetian and Ottoman Crete », Oriente Moderno, xx (lxxxi), n.s. 1, 2001, p. 193-207.
8 Ils avaient alors assiégé La Canée.
9 Michel Lesure, Lépante, la crise de l’Empire ottoman, Paris, Julliard, 1974 ; Romano Canosa, Lepanto. Storia della « Lega santa » contro Turchi, Rome, Sapere, 2000.
10 Stanford Jay Shaw, History of the Ottoman Empire and Modern Turkey, t. 1 : Empire of the Gazis : the Rise and the Decline of the Ottoman Empire, 1280-1808, Cambridge, Cambridge University Press, 1976 ; R. Mantran, (dir.), Histoire de l’Empire ottoman, Paris, Fayard, 1989.
11 K. M. Setton, Venice, Austria and the Turks…, op. cit., p. 115-119.
12 Ce personnage, Mehmed, est resté célèbre en Europe sous le nom de Padre Ottomano. Les chevaliers de Malte l’avaient présenté, au lendemain de sa capture, comme étant un prince ottoman du nom d’Osman. Il avait été élevé dans la religion chrétienne et devint par la suite religieux dominicain sous le nom de Fra Domencio Ottomano. Sur cet épisode, voir entre autres Joseph von Hammer-Purgstall, Histoire de l’Empire ottoman : depuis son origine jusqu’à nos jours, traduit de l’allemand par J.-J. Heller, Paris, Bellizard, 1837, vol. X, p. 76 ; H. Missack Effendi, « Le père Ottoman », Revue d’histoire diplomatique, 17, 1903, p. 360-378 ; Clarence Dana Rouillard, The Turk in French History, Thought, and Literature (1520-1660), Paris, Bovin, 1941, p. 97 ; Dorothy Margaret Vaughan, Europe and the Turks : a Pattern of Alliances, 1350-1700, Liverpool, University Press, 1954, p. 256 ; K. M. Setton, Venice, Austria and the Turks…, op. cit., p. 111, n. 16.
13 Voir Ivan S. Dujcev (éd.), Avvisi di Ragusa : documenti sull’impero turco nell sec. xviisulla guerra di Candia, Rome, Pont. institutum orientalium studiorum, 1935, notamment le document xx, p. 13-15.
14 K. M. Setton, Venice, Austria and the Turks…, op. cit., p. 126.
15 Les Turcs échouèrent cependant devant Suda en 1645, 1646 et 1649, repoussés par le provéditeur Pietro Duodo.
16 Paolo Morachiello, « Candia. I baluardi del Regno », Venezia e la difesa del Levante…, op. cit., p. 133-143, p. 140-141.
17 Vénitiens et Ottomans s’étaient également affrontés en Dalmatie. Les Turcs avaient pris Novigrad en 1646, mais durent lever le siège de Sebenica en 1647 avant de perdre Clissa en 1648.
18 Les combats n’excluaient pas les négociations. Dès 1649, au moment du second siège de la ville, le grand vizir fit des propositions de paix qu’il assortissait à la cession de Candie. Les Vénitiens, en 1652, reprirent les tractations mais ne purent fléchir le divan qui exigeait l’abandon de la cité. Enfin, en 1662, alors que la Porte était engagée en Hongrie, des pourparlers furent à nouveau entamés, mais échouèrent en 1665, les Turcs acceptant pourtant de laisser Candie aux Vénitiens en échange de Tine, Suda, Spinalonga et Grabusa.
19 Aujourd’hui, l’île de Dia.
20 Cythère.
21 En 1646, Tommaso Morosini n’avait pas pu bloquer le détroit et fut mis en échec lors d’une attaque menée en baie de La Canée.
22 Tommaso Salmon Scozzese, Compendio dell’Antica e Moderna Istoria delle Republica di Venezia, Venise, Giambattista Albrizzi, 1754. Libro IV contente le cose avvenute fino alla fine dell’anno 1660. Le capitaine pacha fut décapité pour avoir échoué dans sa tentative de forcer le blocus.
23 Aujourd’hui Foca Belediyesi, près de Chios.
24 Monemvasia, dans le sud du Péloponnèse.
25 Géraud Poumarède, « Les infortunes de Sebastiano Molin, patricien vénitien et prisonnier de guerre à Constantinople au milieu du xviie siècle », Cahiers de la Méditerranée, vol. 65 : L’esclavage en Méditerranée à l’époque moderne, 2002, p. 273-300, p. 273-274. Molin, en 1653, participa à une opération infructueuse menée par Leonardo Foscolo contre le port de Malvoisie, en Morée, où se rassemblaient les convois ottomans à destination de La Canée. Il fut capturé le 16 mai 1654, lors du combat qui opposa Vénitiens et Turcs à la sortie des Dardanelles.
26 Le Capitaine de la Margarita, Zorzi de’ Bianchi, aurait trahi la République en gagnant la flotte ennemie, très supérieure en nombre. Il aurait ainsi décidé les Turcs à attaquer, le vent leur étant favorable.
27 Morosini essaya également de s’emparer de Malvoisie, en vain.
28 Seuls deux vaisseaux et quatorze galères avaient réussi à échapper au désastre
29 Ils réussirent également à battre les barbaresques d’Alger près de Chios, le 3 mai 1657, s’emparant même de Suazich.
30 Roger Charles Anderson, Naval Wars in the Levant : From the Battle of Lepanto to the Introduction of Steam (1559-1853), Liverpool, Liverpool University Press, 1953 ; Mario Nani Mocenigo, Storia della marina veneziana da Lepanto a la caduta della Republica, Rome, Ministère de la Marine, 1935 ; Roberto Barazutti, « La marine vénitienne face à la menace turque : 1645-1719 », Chronique d’histoire maritime, 60, 2006, p. 13-37.
31 L’activité barbaresque, la concurrence des Anglais et des Hollandais avaient de surcroît ruiné le commerce du Levante, dont le rétablissement était une priorité pour Venise : il ne pouvait passer que par la paix avec la Porte.
32 Voir Géraud Poumarède, « La question d’Orient au temps de Westphalie », L. Bély (dir.), Esprit de la diplomatie et diplomatie de l’esprit – L’Europe des traités de Westphalie, Paris, PUF, 2000, p. 363-390.
33 F. S. D’Alquié, op. cit., Ire partie, p. 150-151 ; Des-Roches, Journal véritable de ce qui s’est passé en Candie…, op. cit., p. 67.
34 P. Morachiello, « Candia. I baluardi del Regno », art. cit., p. 133-143 et Ioanna Steriotou, « Le fortezze del regno di Candia. L’organizzazione, i progetti, la costruzione », Venezia e Creta…, op. cit., 1998, p. 283-302.
35 Sous la conduite de Giano Campofregoso et de Gabriele Tadino de Martinengo.
36 David Hemsoll et Paul Davies, Michele Sanmicheli, Milan, Electa-Mondadori, 2004.
37 Il reçoit l’approbation du sénat en décembre 1563.
38 Les défenses s’appuyaient sur sept bastions principaux : la Sabionera, Vituri, Gesù, Martinengo, Betelem, Panigra et San Andrea. Selon Evliyâ Tchélébi, l’allure de l’enceinte était de forme triangulaire. La cité de Candie, puissamment fortifiée, était entourée selon lui de « douze » bastions et de bastions plus petits. Voir Evliyâ Tchélébi, op. cit., p. 269. Les fortifications de Candie sont sinon étudiées de manière plus rigoureuse et scientifque dans W. Bigge, Der Kampf um Candia…, op. cit., p. 121 ; C. Terlinden, Le pape Clément IX et la guerre…, op. cit., p. 117-120 ; Venezia e la difesa…, op. cit., qui contient une très riche iconographie.
39 F. S. D’Alquié, op. cit, IIIe partie, p. 109, 177. Le marquis François de Ville quitte la Crète le 21 avril 1668. Il meurt en 1670.
40 Le marquis s’efforça notamment de renforcer le corps des bombardiers, affaibli par les pertes et les désertions.
41 Evliyâ tente dans sa relation de voyage de comptabiliser les forces turques présentes en Crète. Voir Evliyâ Tchélébi, La guerre des Turcs…, op. cit., p. 178, 181, 184, 185 et 188.
42 C. Terlinden, Le pape Clément IX et la guerre de Candie…, op. cit., p. 126-127.
43 F. S. D’Alquié n’hésite pas à louer les activités de cet officier turc : « On donna ordre […] à Siliscar Aga Zagarzibassi, qui avait de renom d’être bon guerrier et fort entendu aux fortifications, de continuer les travaux, qui restaient à faire du côté de la demi-lune de Mocenigo. » F. S. D’Alquié, op. cit., Ire partie, p. 175.
44 C. Terlinden, Le pape Clément IX et la guerre de Candie…, op. cit., p. 116.
45 Evliyâ Tchélébi, op. cit., p. 202, n. 153.
46 Giuseppe Gullino, « Tradimento e ragion di stato nella caduta di Candia », Venezia e la difesa del levante…, op. cit., p. 146.
47 Les Vénitiens ayant eu vent de l’expédition, les galères turques furent surprises par Morosini qui libéra une centaine d’esclaves chrétiens.
48 En 1636, d’après Lorenzo Contarini, la ville comptait 12 662 habitants. D’après « Tabella demografica : regno di Candia », Venezia e la difesa del levante…, op. cit., p. 107. Domenisse affirme avoir vu des femmes combattre les Turcs, appelées au son de la « cloche de Saint-Marc », « avec un pot en tête et leur esponton à la main ». Elles étaient organisées en escouade de cinquante.
49 K. M. Setton, Venice, Austria and the Turks…, op. cit., p. 206-229.
50 Mémoire des choses les plus remarquables…, p. 46. Voir aussi K. M. Setton, op. cit., p. 227-228, qui avance la date du 5 septembre. La majeure partie des historiens italiens indique cependant la date du 6.
51 Voir F. S. D’Alquié, op. cit., IIIe partie, p. 308.
52 Mémoire des choses les plus remarquables…, p. 46.
53 G. Gullino, « Tradimento e ragion di stato nelle caduta di Candia », art. cit., p. 146. Près de 280 patriciens trouvèrent la mort dans la défense de la Crète, soit un quart du grand conseil.
54 La Gazette de Londres et la Gazette d’Amsterdam y font régulièrement allusion.
55 La ville de Candie pour la 3e fois attaquée de l’armée ottomane et deffenduë par celle de la Sérénissime Rép. de Venise, Paris, Antoine de Fer, 1669, 62 x 91 cm. ; Plan de Candie dessiné sur les lieux par un des plus fameux ingénieurs de la Sérénissime République de Venise…, Paris, Hubert Jailliot, 1669, 62 x 97 cm ; Candie… soumise au Grand Seigneur Mehemet IV l’an 1669…, Paris, Du Val, 1677, 51 x 39,5 cm.
56 G. Poumarède, Pour en finir avec la croisade…, op. cit., p. 275-306.
57 Voir par exemple F. S. D’Alquié, op. cit., IIIe partie, p. 243-252.
58 Ibidem, IIIe partie, p. 271.
59 Mémoire des choses les plus remarquables…, p. 24. Voir également Evliyâ Tchélébi, op. cit., p. 239-240.
60 Evliyâ Tchélébi, op. cit., p. 198.
61 Ibidem, p. 218.
62 Th. Detorakis, History of Crete…, op. cit., p. 241.
63 F. S. D’Alquié, op. cit., Ire partie, p. 359. « Les Turcs […] attachèrent pendant quelques jours des billets écrits en français et en italien à une grande quantité de flèches qu’ils jetèrent dans la ville, par lesquels ils sollicitaient les soldats à déserter, leur promettant de grandes récompenses et un très bon traitement. »
64 Mémoire des choses les plus remarquables…, p. 22. Domenisse fait état de 4 000 « reniés » passés au service des Turcs.
65 F. S. D’Alquié, op. cit., Ire partie, p. 204.
66 Evliyâ Tchélébi, op. cit., p. 239.
67 Ibidem, p. 211.
68 Cf. Bartolomé Bennassar, « Conversion ou reniement ? Modalités d’une adhésion ambiguë des Chrétiens à l’Islam », Annales ESC, 43, 1988, p. 1349-1366 et ibidem et Lucile Bennassar, Les Chrétiens d’Allah. L’histoire extraordinaire des renégats, xvie-xviie siècles, Paris, 1989, notamment p. 237-266 et p. 414-426.
69 G. Poumarède, Pour en finir avec la croisade…, op. cit., p. 595-606.
70 D’après K. M. Setton, Venice, Austria and the Turks…, op. cit., p. 208.
71 Ibidem, p. 212.
72 Evliyâ Tchélébi, op. cit., p. 204.
73 Ibidem, p. 213.
74 Ibid., p. 240-241. La guerre de position aurait rendu impatient un groupe de soldats désigné par le terme sergengetchdi. Le grand vizir dut réprimer deux révoltes au cours de l’année 1669. Voir Mehmed Râchid, Târıh-i Râchid, Istanbul, 1740-1741, vol. 1, p. 222-223, 228-229.
75 Evliyâ Tchélébi, op. cit., p. 192.
76 Ibidem, p. 205.
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L'éducation des jeunes sourds dans l'Ouest, 1800-1934
Patrick Bourgalais
2008