Les championnes du Miroir-Sprint (1967-1970) : des modèles de « filles réussies1 »
p. 231-248
Texte intégral
1Si les presses communistes ont bénéficié d’une importante diffusion dans les années d’après-guerre2, elles sont encore représentées dans le paysage médiatique à la fin des années 1960, grâce notamment à la diffusion de l’Humanité, quotidien rattaché au PCF. Néanmoins, à l’instar de ce quotidien, les titres de la presse engagée doivent faire face à une diminution de leurs tirages3. Parallèlement, la presse sportive rencontre un succès populaire, alors que le sport fait son entrée dans la culture de masse4. De son côté, la presse généraliste n’échappe pas non plus au phénomène sportif et accorde une place de plus en plus importante à la rubrique sportive. Les résultats et analyses produits par les journalistes ont pour ambition d’attirer et de fidéliser un lectorat5. La stratégie se révèle identique pour de nombreux titres de la presse communiste. Le sport y occupe une place considérable6 et l’implication dans l’organisation d’événements sportifs tels que le cross de l’Humanité est l’occasion d’assurer un support promotionnel pour le journal7. Mais dans le cadre de cette presse d’opinion, le traitement du sport répond également à des enjeux idéologiques. Il permet notamment la mise en scène de thématiques récurrentes dans la rhétorique communiste telles que le travail, le projet collectif et plus généralement, la formation de « l’homme nouveau8 ». À ce titre, l’Humanité s’engage dans une entreprise de démocratisation de la pratique sportive, qui doit jouer un rôle éducatif pour la jeunesse9. Depuis la Libération, le journal s’inscrit dans une logique d’acculturation en vue de permettre aux catégories populaires d’investir les pratiques dans le cadre d’une massification des pratiques inachevée10. Le sport et les sportifs prennent ainsi une place considérable dans les colonnes des journaux communistes. Néanmoins, au-delà des discours d’intention qui émaillent les tribunes, il est nécessaire de s’interroger sur les modes de pratiques et les formes d’engagement quand il s’agit de préciser les profils des futurs pratiquants. À ce titre, il paraît intéressant d’étudier la place accordée aux sportives et plus généralement la conception de la pratique à destination des femmes.
2Depuis l’entreprise de civilisation de la société soviétique menée par Staline, le modèle de la femme nouvelle11 (en écho à « l’homme nouveau ») valorise une image traditionnelle de la féminité en accordant une place prépondérante au rôle de mère et d’épouse, parallèlement à une activité de production. Ainsi, l’intégration de la femme des classes ouvrières et paysannes dans la société stalinienne passe par la valorisation de la maternité comme fonction sociale, mais aussi par de nouvelles possibilités de carrières. Au même moment en France, le secrétaire général du parti communiste français, Maurice Thorez, s’engage dans la célébration du culte de la famille, faisant passer la mère avant la travailleuse. Sa compagne, Jeanette Vermeersch, lance en 1956 une campagne contre le contrôle des naissances12. À la fin des années 1960, le PCF maintient cette position relativement conservatrice, malgré l’évolution des rapports sociaux de sexes autour de Mai 68. En effet, le féminisme est rejeté, malgré l’engagement des militantes13, car associé à la bourgeoisie. La question de la place des femmes est toujours subordonnée à la question plus générale de la révolution14. Cette pensée communiste peut-elle avoir une influence sur la manière de traiter la question des sportives, de leurs performances, de leur engagement dans les activités compétitives ? La manière de les montrer, d’en parler dans la presse communiste se démarque-t-elle de la presse sportive « traditionnelle » ?
3Cette étude se propose d’analyser, à travers le prisme du genre15, un hebdomadaire sportif d’obédience communiste16, Miroir-Sprint. Créé en 1946, le journal participe à la dynamique de la presse sportive spécialisée dès l’après-guerre. Témoin d’une vision engagée du sport, il se décline, à partir des années 1960, en plusieurs mensuels spécialisés (Miroir du football, Miroir de l’athlétisme, Miroir du cyclisme, Miroir du rugby). Cette diversification ne l’empêche pas, cependant, de connaître, à la fin de la décennie, une diminution progressive de son nombre de tirages, avant de disparaître en 197117. L’hebdomadaire demeure le défenseur des thèses mettant régulièrement en cause les dirigeants du sport français, ainsi que L’Équipe, mais de façon plus subtile, moins directe que lors des premières années de son existence. L’analyse exhaustive des numéros entre 1967 et 1970 révèle alors l’ambiguïté du discours et des représentations relatifs aux sportives, à mi-chemin entre tradition et modernité. Le versant conservateur aborde en effet les exigences esthétiques liées à la féminité des sportives et témoigne d’une volonté de préserver un modèle de féminité traditionnel, en accord avec les discours des dirigeants du PCF français de cette période. Néanmoins, la teneur idéologique du discours amène à parler des sportives de façon novatrice. Leurs performances, leur place dans les organisations sont traitées de telle façon qu’elles apparaissent au service des discours revendicatifs du journal. Les femmes semblent ici être incluses à la stratégie éditoriale, au même titre que les sportifs, dans la perspective de démocratisation de la pratique sportive (qui est défendue également dans l’Humanité).
4Les années qui englobent Mai 68 et la création du MLF s’avèrent particulièrement heuristiques pour mettre en évidence la dualité du discours à l’égard des sportives, puisqu’elles correspondent à un contexte d’émancipation des femmes, perceptible notamment à travers un intérêt accru pour la pratique sportive, ainsi qu’à l’émergence d’un militantisme radical au sein du féminisme. La place et la représentation des femmes dans un titre de presse communiste permettent alors d’envisager le degré de sensibilité de cette presse à ce réaménagement des rapports sociaux de sexes, et le poids respectif des enjeux économiques et idéologiques dans les choix éditoriaux.
De l’ombre à la lumière : une visibilité différente pour les sportives
Une visibilité « classique »
5La visibilité des sportives dans les colonnes du journal constitue un premier indicateur permettant de mettre à jour l’ambiguïté des discours et les enjeux sous-jacents. D’une part, les sportives sont quantitativement moins présentes que les sportifs. Le nombre de unes qui leur sont consacrées, cinq sur l’ensemble des numéros analysés, en témoigne. En outre, elles sont plus souvent présentes dans des rubriques mineures au sein du journal. Elles apparaissent plus régulièrement dans la chronique « Miroir du Monde », qui relate les actualités sportives internationales par l’intermédiaire d’anecdotes, que dans des dossiers thématiques ou des articles spécifiques, qui sont davantage consacrés à des portraits et des analyses. Ainsi, l’évocation des sportives se résume-t-elle parfois à quelques lignes sommaires listant les performances réalisées ou à des anecdotes qui ne concernent pas directement leur carrière sportive. La rubrique « Miroir du Monde » s’intéresse par exemple à leur entourage familial. En 1967, les journalistes évoquent « le mariage sportif de l’année » :
« La championne d’Italie de natation Daniela Beneck a épousé le champion d’Europe 1966 du 400 m haies, Roberto Frinolli. Les hurdlers semblent, du moins en ce qui concerne les sœurs Beneck, posséder un charme spécial. En effet, il y a quelques mois, la sœur cadette de Daniela, Anna, épousa un autre champion d’Europe du 400 m haies, Salvatore Morale18. »
6Cette visibilité semble néanmoins quantitativement supérieure à celle accordée par d’autres titres de presse (L’Équipe, mais aussi la presse magazine de l’époque : Mondial ou Paris Match). Autre constat qui renvoie à un traitement médiatique partagé, les sportives dont on parle sont rarement des anonymes. Marielle Goitschel, Claude Mandonnaud, Nicole Duclos, Colette Besson, Debbie Meyer ou Peggy Flemming sont mises en lumière. Toutes celles capables de réaliser d’authentiques exploits, de battre des records, comme celles qui « assureront la succession19 » font l’objet d’un intérêt à l’instar de Monique Noirot, qui fait partie de la « sève de l’athlétisme20 ». En prenant les championnes (existantes ou en devenir) comme modèles, le journal affiche sa volonté de donner l’exemple à la jeune génération et révèle, dans le même temps, la teneur idéologique du discours. Cet intérêt, voire cette fascination, porté sur les championnes témoigne de la conception communiste fondée sur la logique pyramidale ; une fascination somme toute paradoxale pour le haut niveau, car les communistes en dénoncent les limites et en même temps s’y réfèrent systématiquement, dans la perspective d’attiser la curiosité des lecteurs.
7Dans la même veine, les activités les plus régulièrement mises en avant sont des activités qui n’ont historiquement pas été fortement critiquées pour les femmes. La natation est, dès le début du XXe siècle, envisagée comme « le sport féminin par excellence », du fait de ses vertus hygiéniques et esthétiques21. Cette représentation de l’activité demeure dans Miroir-Sprint, comme en témoigne la légende d’une photographie de Sylvie Canet, championne de France du 100 mètres dos : « Sylvie Canet, la nouvelle reine de la nage sur le dos, au visage enjolivé de tâches de rousseur22. » De même, le ski de descente, lors de son développement à la fin des années 1920, n’est pas critiqué car les journalistes considèrent que cette activité renforce certaines qualités physiques associées à la féminité, telles que la grâce ou encore la souplesse23. Dans cette discipline, Marielle Goitschel, mais aussi les sœurs Lafforgue, Isabelle Mir ou encore Florence Steurer font l’objet d’articles réguliers et louangeurs, le ski féminin français étant même désigné comme le meilleur, « par sa méthode, par sa robustesse, par sa jeunesse24 ». M. Goitschel soutient de ce fait la comparaison avec Louison Bobet ou Jacques Anquetil :
« Lorsque Marielle remporte la descente de Schruns malgré une cheville incertaine et un entraînement contrarié, je pense – excusez-moi – à Louison Bobet remportant Paris-Roubaix, en 1956, malgré une blessure qui avait nécessité une opération et déréglé sa préparation. Marielle, comme Anquetil, se permet aussi d’annoncer la couleur. Dans le doute, elle a le courage ou le toupet de prédire son redressement et l’écrasement de ses adversaires25. »
8Si le ski féminin est une activité relativement présente dans le traitement médiatique, cette comparaison avec les grands champions cyclistes se révèle néanmoins originale en permettant de faire accéder les skieuses au même statut26. Cette comparaison avec les hommes, qui plus est, avec les meilleurs, relève d’une position avant-gardiste, et même féministe, à l’heure où les femmes revendiquent le droit à disposer de leur propre corps27. Alors que certaines caractéristiques de la représentation des sportives sont communes avec les autres titres de presse, le discours se fait donc plus ambigu dans les colonnes de Miroir-Sprint et confère aux sportives une nouvelle visibilité, révélatrice d’enjeux qui dépassent la fidélisation du lectorat.
Des sportives ambassadrices d’un nouveau modèle de pratique
9Ainsi, des activités qui sont par ailleurs critiquées au regard de leur incompatibilité avec la définition de la féminité, sont mises en lumière par l’intermédiaire de certains articles de Miroir-Sprint. C’est le cas notamment pour les sports collectifs, et plus particulièrement pour le football. En 1969, une footballeuse pose en tenue sportive avec un ballon sous le bras en une du journal28. Le même numéro consacre un dossier au football féminin autour de ce que le journal qualifie de premier match parisien29, après une période d’interruption depuis la fin des années 193030. Si les « tentatives anciennes étaient sans doute trop en avance sur l’époque et avaient un côté “suffragettes et ballon rond”31 », à la fin des années 1960, ce football offre un jeu « plaisant et d’un honnête niveau technique32 ». Gilles Delamarre, journaliste de Miroir-Sprint chargé de cette activité, s’engage même dans des propos féministes en concluant son article par ces mots :
« Les bastions tomberont un à un. Il suffisait au fond que les femmes soient persuadées que le football n’était pas incompatible avec leur constitution et leur physiologie. Pour le reste, il leur fallait vaincre la résistance sociale qui freine toute innovation33. »
10Les propos tenus sont novateurs au regard du traitement médiatique réservé à cette pratique dans les autres titres de presse. De façon générale, ses confrères tentent plutôt de prouver à leurs lecteurs masculins que les footballeuses ne sont pas des êtres à part mais de « vraies » femmes, en multipliant les commentaires sur le physique, les attributs et les rôles typiquement féminins34. Les pratiquantes servent ici d’exemple car elles représentent le modèle de jeu collectif plébiscité de façon systématique dans le journal. Ce type de jeu met en valeur un des éléments essentiels de la rhétorique communiste avec la centration sur le collectif plus que sur les individualités des championnes35. En outre, ce jeu plutôt offensif permet d’offrir une bonne qualité de spectacle, de divertissement, à la masse des spectateurs et apporte un argument à la démocratisation de la pratique.
11Dans la même perspective, certaines lanceuses de poids voient leur photographie publiée dans Miroir-Sprint, alors même que de nombreuses critiques dénoncent par ailleurs la « virilisation » engendrée par cette pratique. Ces lanceuses servent à nouveau de fer de lance aux idées que souhaite véhiculer le journal. La plupart d’entre elles sont en effet issues du bloc de l’Est et leurs résultats sont cités en exemple de la réussite du modèle sportif communiste. Nadejda Tchijova, « l’infirmière de Leningrad36 », voit sa photographie publiée, ainsi que sa rivale, Margitta Gummel, lanceuse issue de RDA37. Ce pays est régulièrement cité en exemple comme modèle de démocratisation de la pratique sportive :
« On peut rappeler que la RDA a réussi à combiner un réel sport de masse – le sport devenant un besoin pour tous les citoyens qui peuvent trouver les moyens de le satisfaire – avec une préparation rigoureuse de l’élite38. »
12L’organisation des Spartakiades est également valorisée comme manifestation de masse39. Pour défendre un modèle idéologique plus qu’un modèle de sportive, les journalistes n’hésitent pas à aller à l’encontre des discours dominants, jusqu’à justifier les cas d’hermaphrodisme40, au moment où se structurent les tests de féminité pour contrôler le corps des sportives41.
13Néanmoins, l’ambiguïté du discours demeure, par exemple lorsque les journalistes procèdent à une naturalisation de certaines qualités morales chez les joueuses de football :
« Elles sont plus friables et l’une d’elles, prévue en remplacement après la mi-temps, n’a pu faire son entrée sur le terrain à cause d’une crise de larmes qui la secoua inexplicablement dans le couloir menant des vestiaires à la pelouse42. »
14S’il n’existe pas d’argument d’ordre strictement médical pour interdire la pratique aux femmes43, une adaptation des règlements semble néanmoins nécessaire. Ainsi, pour diminuer les risques traumatiques liés à la fatigue, le temps de jeu doit être réduit et davantage partitionné pour les femmes44. Le discours oscille à nouveau entre une représentation traditionnelle de la féminité et la mise en valeur des sportives de façon originale, notamment pour servir une idéologie.
L’ambiguïté du modèle corporel
Du corps de rêve…
15Le corps des sportives a toujours fait l’objet d’une attention particulière dans la presse, systématiquement examiné à l’aune des critères de la féminité définis par la société à une époque donnée, a fortiori lorsqu’elles apparaissent dans la presse spécialisée45. Et Miroir-Sprint n’échappe pas à la règle. L’intérêt des journalistes pour les qualités esthétiques des sportives est évident et rappelle par là même que l’hebdomadaire est écrit par des hommes46 et s’adresse majoritairement aux hommes.
16Cette sensibilité au « charme féminin » est perceptible de plusieurs manières. La façon de désigner les sportives est l’indice le plus évident : la « sirène », la « reine », la « B. B. du sport », la « fée de la glace » sont des qualificatifs récurrents. Tous renvoient non seulement à un idéal de féminité traditionnel, mais aussi à un idéal de beauté évoquée par les initiales de Brigitte Bardot : une beauté plus « naturelle », que l’on peut définir, selon Georges Vigarello, comme « l’inverse d’un code trop éprouvant ou d’un labeur trop fastidieux47 », mais toute aussi désirable.
17La manière de parler du physique des sportives est également significative. Les commentaires portent alors aussi bien sur le visage que sur le corps et, là encore, les journalistes en font un portrait élogieux. Au-delà du « phénomène » « Kiki » Caron et de l’attraction qu’elle suscite auprès des médias de l’époque48, plusieurs autres sportives sont mises en valeur et bénéficient du même discours louangeur. En 1967, par exemple, la skieuse canadienne Nancy Greene est remarquée pour « sa très grande classe », mais aussi pour ses « yeux rieurs49 ». Lors des Jeux olympiques de Grenoble, c’est au tour de l’Autrichienne Olga Pall d’être couronnée de lauriers, non seulement pour « son grand talent de skieuse », mais aussi pour son physique : « Qui n’apprécierait pas son franc sourire, sa belle dentition et ses yeux ouverts lumineusement sous la noire parure de ses cheveux50 ? » Pour le journal, à n’en pas douter, la skieuse pourrait faire du cinéma. Les Françaises ne sont pas en reste. En 1969, le portrait des sœurs Lafforgue en ferait presque oublier qu’elles comptent parmi les meilleures skieuses mondiales51 : « Elles sont jumelles, elles ont vingt ans, elles sont jolies, yeux verts, cheveux blonds, tâches de rousseur discrètes. Lorsqu’elles sont en piste, le spectacle est déjà dans leur style élégant en finesse52. » Mais ces appréciations ne sont pas réservées aux skieuses. Les gymnastes53, les patineuses, comme les athlètes sont aussi particulièrement appréciées des journalistes de Miroir-Sprint, comme le souligne le titre évocateur de « joli cœur54 », en référence à l’athlète britannique, Lilian Board. Si le texte attenant (et non signé) permet d’apprendre qu’elle a 19 ans, qu’elle est spécialiste du 400 m et qu’elle est une potentielle membre de l’équipe nationale, il ne manque pas de rajouter que la jeune femme a « un sourire charmant » et que des « journalistes sportifs britanniques l’ont élu “athlète féminine”55 ». Quelque temps plus tard, le journaliste spécialiste de l’athlétisme, R. Pointu, attribue des qualités équivalentes à la sauteuse en hauteur allemande Rita Schmidt56. Le journal affiche toutefois une originalité en valorisant la beauté de sportives plus rarement mises en avant dans la presse spécialisée. Ainsi les activités de tradition masculine et/ou à caractère élitiste sont également représentées, par l’intermédiaire notamment de Marie-Claude Beaumont pour l’automobilisme57 et de Liliane Ory pour l’escrime58.
18Les descriptions des sportives mettent toutes en valeur les charmes et la beauté du corps féminin, sans négliger la musculature59, qui contribue à l’harmonie de la silhouette. Les journalistes ne cachent pas, d’ailleurs, leur « affection » pour les sportives qui présentent des muscles « dans le bon sens “féminin” du terme60 ! » C’est ce que rappelle Michel Félet dans un article à propos d’une athlète française en 1968 :
« Depuis 4 années déjà […], les habitués des bords de piste ont pu remarquer cette jeune silhouette [Nicole Montandon] à l’apparence fragile et aux attaches si fines qu’il semblerait qu’un coup de vent un peu brusque va briser cette jolie construction. Mais rassurez-vous, si la charpente présente un aspect frêle, les muscles, eux (dans le bon sens “féminin” du terme !), sont bien là, et la foulée pour être d’une suprême distinction n’en est pas moins puissante et efficace61. »
19Ce tour d’horizon des portraits de sportives semble montrer, à travers un attachement du journal à certaines normes esthétiques, un caractère conservateur en matière de définition des contours de la féminité, qui s’inscrit dans la filiation du discours du PCF de l’époque. Cependant, cette lecture mérite d’être nuancée pour plusieurs raisons. Tout d’abord, les qualificatifs utilisés pour désigner les sportives ne sont pas tant employés pour décrire le physique que pour souligner les prouesses, le talent. Princesse, reine, fée, sont aussi utilisées pour souligner le caractère d’exception des performances. De plus, les journalistes n’émettent aucune critique sur le physique ou la musculature de certaines sportives – pourtant controversées par ailleurs62 – dès lors que celle-ci fait partie de l’essence de l’activité, à l’image de ce commentaire concernant la lanceuse de poids soviétique Nadejda Tchijova (qui vient de battre le record du monde) :
« L’infirmière de Leningrad, avec une rare volonté, s’est prêtée à un rude travail hivernal qui lui a permis de compenser son désavantage en taille et en poids par rapport à ses rivales (lanceuses de la RDA) : pour une taille de 172 cm, elle ne pèse que 81 kg. Aux exercices de force, notamment avec la barre d’haltérophilie, presque toutes ses rivales et, surtout, Margitta Gummel, pourraient rendre beaucoup de points à la championne soviétique. Nadejda fait des flexions avec une barre de 70 kg sur les épaules alors que Gummel soulève 100 kg. C’est grâce à son extraordinaire technique, son rythme et sa vitesse qu’elle a réussi son exploit63. »
20Loin d’être critiquée, la championne soviétique semble faire l’objet d’admiration de la part du journaliste et l’ajout d’une photographie vient renforcer ce sentiment. De la même manière, la morphologie des nageuses des pays de l’Est ne fait l’objet d’aucune remarque, si ce n’est pour souligner les performances, comme le montre ce commentaire du 6 août 1969 : Gabriela Wetzo, « à la fois sensible et puissante », « est la première européenne à descendre sous la minute dans l’épreuve reine de la natation ». La RDA fait d’ailleurs ici figure d’exemple pour le journal, puisqu’elle réussit « à combiner un réel sport de masse […] avec une préparation rigoureuse de l’élite64 ». Les exemplarités étrangères (bloc de l’Est surtout) et la dénonciation capitaliste s’affichent comme une constante de la presse communiste en matière de sport et Miroir-Sprint n’y échappe pas. La valorisation des qualités esthétiques des sportives s’apparente donc plutôt à une stratégie éditoriale de séduction, à une façade destinée à rendre le journal attractif, qui masque un caractère beaucoup plus novateur lorsqu’est abordé le travail auquel est soumis le corps des sportives.
… au corps productif des sportives : entraînement et souffrance physique pour une maîtrise technique
21Une lecture approfondie des articles permet de voir le corps des sportives non plus sous l’angle de l’esthétique et de la beauté, mais sous l’angle du travail et de l’effort. Devenir la meilleure se mérite. Il faut « se battre » pour y arriver. Miroir-Sprint multiplie alors les exemples, en prenant notamment appui sur les sportives de haut niveau pour montrer qu’à force de courage et de persévérance, le travail finit par payer.
22Ce sont tout d’abord les efforts et la souffrance endurés lors des entraînements qui sont rappelés :
« “Et de nouveau commença pour elle l’emploi du temps habituel : école, entraînement, ballet… puis enfin, ses efforts pris en considération par les arbitres lui rapportèrent en 1966 à Bratislava la 2e place en Europe65”, avant de conquérir une seconde place au Championnat du monde quelques semaines plus tard. »
23En 1967, à un an des olympiades, la patineuse Est-Allemande Gaby Seyfert se positionne ainsi comme une candidate sérieuse pour un titre olympique et, pour l’hebdomadaire, cette position n’est que juste récompense pour tous les efforts réalisés au cours des dernières années. Les skieuses comme les athlètes françaises sont, à ce titre, régulièrement mises à l’honneur. La skieuse Florence Steurer, par exemple, porte déjà sur son visage les stigmates de l’entraînement et de la compétition en dépit de son jeune âge (17 ans) :
« On voit dans ses yeux défiler des tempêtes. Son menton s’allonge, ses mâchoires se contractent et son sourire de jeune fille, un sourire qu’on croyait inaltérable, soudain disparaît. On lui a tant demandé de se battre, on lui a tant répété de serrer les dents qu’elle se fait agressive66. »
24Le cas de C. Besson est également intéressant. Dès la fin de l’année 1966, le journal rappelle les conditions d’entraînement spartiates que lui réservait son entraîneur :
« À Font-Romeu, dans le frimas pyrénéen, alors que la presque totalité des sélectionnées olympiques blottissaient leurs muscles précieux dans les chambres douillettes du lycée, il força la tendre demoiselle Besson à dormir sous la tente. La résistance au confort entrait dans ses plans67. »
25Trois ans plus tard, Miroir-Sprint a suivi l’athlète lors d’un entraînement et donne au lecteur la cadence :
« Entraînement en “fractionné long” : “Elle court maintenant en longues foulées souples, ses cheveux noirs au vent, la bouche entrouverte […]. Essoufflée après l’effort, elle repasse lentement son survêtement, interroge du regard son entraîneur qui, d’un mouvement de tête, lui fait signe que ça va ; puis elle revient s’asseoir près de ses camarades. Un quart d’heure plus tard elle se remet en piste et le même cérémonial recommence. […] Colette est fatiguée, avoue franchement qu’elle ‘ en a marre’. Mais son entraîneur ne lui accorde aucune trêve. Il n’a d’ailleurs pas à insister. Sa protégée bougonne un peu mais retourne sur la cendrée… Voilà quatre heures et demie que cela dure…”68. »
26Ces sportives de haut niveau sont présentées comme des modèles de volonté et persévérance.
27Mais pour le directeur du journal, M. Vidal, M. Goitschel est certainement le meilleur exemple de réussite sportive, l’incarnation d’une réussite au sens où le sport lui a permis de pleinement s’épanouir. En 1967, il s’attarde sur un événement qui semble avoir été peu remarqué à l’époque : la victoire de la Française dans la descente de l’Arlberg-Kandahar. « Une victoire de plus ou de moins penseront peut-être certains blasés. Erreur : celle-là est une grande victoire, une victoire exceptionnelle69. » Et voici les raisons que le rédacteur expose : cette victoire apparaît comme celle du courage, car M. Goitschel a chuté lourdement dans cette même descente lors d’un entraînement, ce qui lui a valu un traumatisme crânien. Lorsqu’elle rechausse les skis deux semaines plus tard, elle ne tombe pas et prend les plus gros risques pour remporter la course.
« Certains penseront peut-être que ce “garçon manqué” est un casse-cou quelque peu inconscient. Ils auraient grand tort. D’abord Marielle est loin d’être un garçon manqué. À moins que l’expression signifie seulement qu’elle est une fille réussie70. »
28L’année suivante, pendant les Jeux de Grenoble, la skieuse compte parmi les « champions d’exception », au même titre que Jean-Claude Killy et est même comparée à l’emblématique joueur de football tricolore Raymond Kopa71.
29Finalement, derrière les élogieuses descriptions concernant la beauté des sportives, c’est un autre discours et une autre vision du corps qui sont mis en valeur : celle du travail et du mérite. La victoire est le fruit du travail et nul n’est prodige, comme le rappelle Gilles Delamarre dans un article en septembre 1968, consacré à la natation américaine et, en particulier, à ses championnes.
« La presse française prompte à s’enthousiasmer, qualifie volontiers la jeune Debbie Meyer (16 ans) de prodige ou de phénomène72. Le journaliste propose une autre hypothèse : Non, Debbie Meyer est seulement la première d’une génération de nageuses elles-mêmes en avance sur les autres nages mondiales. […] Placée à l’âge de 12 ans, sous la direction de l’entraîneur Sherman Shavoo du club de Sacramento, elle nage 4 heures par jour. Mais elle n’est pas isolée73. »
Moralité et vie sportive
30Au-delà de l’aspect physique, la représentation des sportives dans le journal repose également sur leurs qualités morales, qui permettent de dessiner les contours du rôle social dévolu à ces femmes. L’ambiguïté des discours est à nouveau de mise dans la mesure où la description de ce rôle oscille entre valorisation de la femme épouse et mère et une mise en lumière de femmes actives, épanouies.
31La timidité, la modestie constituent les qualités morales les plus valorisées. Lorsque le journaliste rapporte les propos de la skieuse, Marie-Christine Debourse, il évoque par exemple « la timidité et la goguenardise des jeunes filles de son âge74 ». Clotilde Lambert, lanceuse de javelot est dépeinte comme « jolie et timide75 ». Nicole Duclos, quant à elle, « est toujours aussi charmante, aussi modeste, aussi gentille76 ». Mais ces qualités ne sont pas strictement associées à la féminité, dans la mesure où elles apparaissent également essentielles dans les descriptions des sportifs. Elles répondent en effet aux devoirs qui sont ceux de « l’homme nouveau », capable de s’émanciper peu à peu de l’oppression de la société existante77. La description faite du tennisman Georges Goven est proche de celle des sportives, combinant à la fois des détails sur l’aspect physique et la valorisation de la modestie de ce joueur : « On a appris à connaître ce visage juvénile, que l’effort vieillit dans l’action, ces yeux bleus très clairs, ces cheveux mi-longs qui volent au vent du court, un sourire, et au fond, une grande modestie78. » Ainsi, dans le choix des sportifs et sportives mis(e)s en valeur, ce ne sont pas uniquement ceux qui font des coups d’éclat qui apparaissent. En 1967, un portrait de Bernard Maroquin dévoile un sportif dans l’ombre de Michel Jazy, dont la « gloire, qui n’a pas encore atteint des proportions monumentales, continue de s’abriter dans la modestie d’une blouse grise79 ». Si les championnes sont valorisées dans l’objectif de séduire le lectorat, d’autres sportives s’inscrivent en opposition avec le modèle de la « star » et participent à la valorisation de la dimension collective. Interrogée sur son duel avec C. Besson, N. Duclos souligne qu’elle « ne voudrait pas que cela tourne à l’attraction de foire, au numéro. D’ailleurs, pour elle, l’athlétisme n’est qu’un loisir. Et un loisir peut se partager avec n’importe qui80 ». Ces qualités morales s’intègrent donc parfaitement dans la rhétorique communiste. L’enjeu est alors de défendre la démocratisation de la pratique sportive, ainsi que la conception d’un autre sport, qui aurait vocation à éduquer la jeunesse pour une nouvelle société.
32Pour les femmes, ces qualités sont en outre associées à leur rôle essentiel au sein de la structure familiale. Lorsque l’Italienne Paola Figni remporte le cross international féminin de Vichy, elle est présentée comme « un magnifique exemple pour les femmes sportives du monde entier » après avoir déclaré que pour que « sa joie et son bonheur soient complets, il lui faudrait réussir à allier ses rôles de mère et de championne81 ». Les portraits plus fouillés qui sont dressés de certaines sportives sont l’occasion d’insister sur cette vie familiale. Après son titre de championne de France du 400 mètres face à C. Besson, N. Duclos est désignée comme une « merveilleuse championne et femme » dans un article qui relate sa vie quotidienne aux côtés de son mari, intitulé « Un titre en deux personnes82 ». Le journaliste présente la complémentarité qui organise son couple et rappelle que l’athlétisme ne l’empêche pas d’effectuer les tâches ménagères et d’avoir envie d’un enfant. De façon générale, les maris sont très présents dans l’entourage des sportives et le désir de maternité de ces dernières est régulièrement évoqué. Cette représentation des sportives répond au modèle de féminité défendu par le PCF en 1970 selon lequel « il faut admettre que la femme puisse être à la fois, mère, travailleuse, citoyenne. Il faut admettre qu’une femme puisse accéder, selon ses désirs, à la connaissance, à la culture tout en étant mère de famille. Pour qu’elle en ait les moyens, cela suppose (entre autres conditions) que la maternité soit reconnue comme fonction sociale83 ».
33Les femmes sportives de Miroir-Sprint incarnent le modèle de la « femme nouvelle ». Si leur vie familiale est mise en exergue, les journalistes insistent également sur la vie étudiante ou professionnelle qu’elles mènent en parallèle. Ils mettent particulièrement en lumière les sportives issues de la classe ouvrière. Ainsi, il n’est pas rare de voir mentionné, en parallèle des résultats sportifs obtenus, l’emploi occupé : Eliane Camacaris, pratiquante de cross, est également coloriste dans l’industrie chimique84 ; Nelly Reb, footballeuse, travaille à la chaîne chez Fiat85. L’appartenance de classe est ici nécessaire à l’idéologie sous-jacente au discours, et prend le pas sur le sexe. Ce modèle de féminité renvoie à celui de la « femme nouvelle », à la fois mère, épouse, éducatrice et chargée de transmettre les valeurs d’une nouvelle société, mais participant également à l’effort de production. Le courage de « la petite Steurer » est souligné lorsqu’elle mène de front études secondaires et compétition de haut niveau en ski86. Cette qualité est valorisée pour toutes les sportives qui appartiennent à la classe ouvrière afin de démontrer les nécessaires évolutions du monde sportif pour démocratiser la pratique. À ce titre, N. Duclos, « petite employée de mairie87 », malgré des résultats en demi-teinte, fait l’objet d’articles aussi nombreux et élogieux que ceux consacrés à C. Besson. Qualifiée, avec son entraîneur Saint-Omer, de « jansénistes de l’athlétisme88 », cette dernière apparaît comme une athlète qui « court en futuriste. En avance sur son temps par rapport à sa spécialité, elle est également en avance par rapport à ce qui se pratique chez les hommes, sur notre continent et hors des USA ». Face à elle, N. Duclos « s’efforcera de maintenir le contact le plus longtemps possible quand elle ne la précédera pas d’un minuscule centième de seconde. À moins qu’elle ne réalise son vœu le plus cher qui est de mettre au monde un enfant89 ». Deux modèles s’opposent et illustrent l’ambiguïté du discours : celui de la championne prête à tout sacrifier pour la performance et qui permet de défendre la valeur du travail tout en attirant le lectorat ; et celui d’une femme qui parvient à mener de front vie sportive et vie privée qui illustre le modèle de la « femme nouvelle » telle que définie par le PCF à la fin des années 1960. Au travers des parcours de ces sportives, il s’agit en définitive de défendre une évolution du sport vers le professionnalisme, condition essentielle à la conciliation des études, du travail et du sport de haut niveau, et donc de démocratisation du sport, par opposition à l’amateurisme « bourgeois ». Le journal se fait notamment l’écho de l’abandon de certaines carrières sportives, particulièrement pour les nageuses, et se révèle très critique au sujet de ce qui est qualifié de « politique élitiste » au sein de la Fédération française de natation90. Dans cette perspective de démocratisation du sport, le sport féminin doit être reconnu au même titre que le sport masculin. L’enjeu est de donner les moyens à tous les pratiquants d’accéder à une pratique de haut niveau, y compris les femmes. Le journal soutient par exemple les joueuses de tennis qui revendiquent que la valeur des prix des tournois soit plus équitable avec celle des hommes91. Il prend également position sur la nécessité pour la Fédération française de basket-ball de financer le déplacement des basketteuses au championnat du monde92. L’absence des femmes aux postes-clés du sport est aussi dénoncée comme un frein à la démocratisation de la pratique.
34Du point de vue de la morale, les femmes sportives du Miroir-Sprint sont donc l’illustration des crispations du PCF sur une position conservatrice face à un féminisme dénoncé comme « bourgeois ». Mais elles illustrent également le modèle de la « femme nouvelle » associée au projet de changement de la société. Elles sont alors les figures emblématiques d’un argumentaire en faveur du changement dans le monde sportif pour correspondre à ce projet de société. Cette évolution vers un sport désigné comme « éducatif » est nécessaire car elle constitue notamment un vecteur d’épanouissement pour les sportives, comme en témoigne la réaction de Maryvonne Dupureur, à la suite de sa participation au cross de l’Humanité, « après deux ans d’absence et une seconde maternité » :
« Elle offrait toujours le visage merveilleusement épanoui et stable de l’athlète sachant ajuster ses espérances à ses moyens du moment. Tout comme les Jeux Européens en salle, le cross de l’Humanité n’était pas pour elle un but mais une possibilité de se mieux connaître93. »
35Dans cet article, le journaliste bouleverse les normes de genre en mettant en scène un mari spectateur de la course de sa femme. Si la défense d’un épanouissement des femmes par le sport présente un caractère novateur, elle repose avant tout sur la volonté de démocratiser la pratique et de faire du sport un moyen d’éducation des masses. Ainsi, évoquant M. Goitschel, M. Vidal conclut : « L’accomplissement d’un être grâce au sport est la plus belle des victoires : celle du sport qui parvient là à sa finalité profonde94. » Les sportives sont donc pour partie mises au service d’une revendication de démocratisation du sport par la professionnalisation.
Conclusion
36Le discours à l’égard des sportives dans ce titre appartenant à la sphère de la presse communiste est marqué du sceau de l’ambiguïté. Au regard du nombre et de la place occupée par les articles évoquant le sport des femmes, ainsi que par la mise en valeur des championnes, le traitement médiatique des sportives se révèle plutôt classique, leur accordant une visibilité moindre et centrée sur les athlètes les plus performantes. En revanche, en s’intéressant à des pratiques sportives critiquées dans les autres titres de presse, Miroir-Sprint marque une première originalité. Cette originalité est de nouveau présente dans l’analyse qualitative des discours. Tant du point de vue physique que moral, la description des sportives oscille entre une description des normes traditionnelles de féminité et des propos originaux, novateurs. Cette ambiguïté reflète la stratégie éditoriale du journal. Dans un contexte économique de crise pour Miroir-Sprint, l’enjeu de fidéliser le lectorat impose d’évoquer prioritairement les résultats qui intéressent les spectateurs. En outre, les discours sur la féminité ne peuvent aller à l’encontre des représentations sociales au risque de choquer les lecteurs. Sur ce point, la tradition apparaît renforcée chez certains journalistes, et renvoie à la conception de la féminité défendue par le PCF. Mais l’autre enjeu éditorial de cette presse est idéologique. Ainsi, l’analyse genrée des discours met en lumière que les sportives peuvent être utilisées soit à des fins de défense de valeurs propres à la rhétorique communiste (le travail, l’effort, le collectif), soit comme l’illustration de la réussite d’un modèle d’organisation du sport, celui du bloc de l’Est. Ce modèle repose sur une démocratisation de la pratique qui inclut les femmes, et doit passer par une véritable professionnalisation. Les sportives sont ainsi au cœur d’un argumentaire au service d’une rénovation du sport français, qui s’intègre dans un projet plus global de transformation de la société. Ainsi, en 1969, M. Vidal tient des propos féministes95, mais en rappelant que le « sport est une conquête sociale d’importance96 ». Les femmes sont alors assimilées aux « millions d’hommes qui sont encore brimés et misérables à travers le monde » et pour lesquels le sport reste inaccessible97.
37L’analyse genrée de cette presse d’opinion apparaît donc heuristique à plusieurs niveaux. Du point de vue de l’histoire des femmes et du genre, elle permet d’envisager la contribution de ce type de presse à l’évolution des représentations sociales des sportives et plus généralement, des contours du modèle dominant de féminité98. Au regard de l’histoire culturelle, et plus précisément de l’analyse des presses communistes, elle apporte des indicateurs supplémentaires en vue de mesurer la teneur idéologique du discours. En ce sens, il apparaît nécessaire d’engager une démarche comparative avec d’autres titres de presse pour mesurer la spécificité du discours produit. En outre, les enjeux idéologiques sous-jacents se révèlent également dans la complémentarité de « l’homme nouveau » et de la « femme nouvelle », ce qui engage à poursuivre cette recherche dans la direction d’une approche comparée des discours sur les sportifs et sur les sportives au sein de ce journal.
Notes de bas de page
1 En référence à l’expression utilisée par Maurice Vidal dans un article consacré à Marielle Goitschel. M. Vidal, « Viva Marielle », Miroir-Sprint, 6 mars 1967.
2 F. D’Almeida, C. Delporte, Histoire des médias en France de la Grande Guerre à nos jours, Paris, Flammarion, 2010.
3 C. Bellanger et al. (dir.), Histoire générale de la presse française, Paris, PUF, 5 volumes, 1969-1976.
4 M. Attali (dir.), Sports et médias. Du XIXe siècle à nos jours, Biarritz, Atlantica, 2010.
5 F. D’Almeida, C. Delporte, op. cit., 2010.
6 M. Attali, T. Chapron, « Le sport au carrefour des idéologies : le cas du Figaro et de l’Humanité (1945-1952) », É. Combeau-Mari, Sport et presse en France (XIXe-XXe siècles), Paris, Le Publieur, 2007, p. 266-283.
7 M. Attali, « Le cross de l’Humanité : un événement médiatique, sportif et idéologique (1933-1957) », M. Attali (dir.), op. cit., 2010, p. 393-409.
8 Le mythe de l’homme nouveau est développé sous Staline et « organise l’héroïsme du prolétaire de choc, le stakhanoviste, puis du soldat rouge ». S. Courtois (dir.), Dictionnaire du communisme, Paris, Larousse, 2007, article « Homme nouveau ».
9 Nous renvoyons à l’article de M. Attali dans cet ouvrage.
10 P. Chantelat, P. Tétart, « La « première » sportivisation. Croissance, renouvellement et clivages sociaux (1958-1975) », P. Tétart (dir.), Histoire du sport en France. De la Libération à nos jours, Paris, Vuibert, 2007, p. 33-61.
11 B. Studer, « La femme nouvelle », M. Dreyfus et al. (dir.), Le siècle des communismes, Paris, Les Éditions de l’Atelier, 2004, p. 565-581.
12 S. Courtois (dir.), op. cit.
13 Nombre des militantes du MLF viennent des organisations maoïstes ou trotskistes. Des tendances révolutionnaires se développent au début des années 1970, liées à la Ligue communiste et à la Gauche révolutionnaire. Mais le PCF cherche plutôt à contrer l’activité de ces féministes au sein du parti. Cf. M. Zancarini-Fournel, « Les féminismes : des mouvements autonomes ? », E. Gubin et al. (dir.), Le siècle des féminismes, Paris, Les Éditions de l’Atelier/Les Éditions Ouvrières, 2004, p. 227-238.
14 P. Rigoulot, « Femmes, socialisme, islamisme », Les Cahiers d’histoire sociale, no 19, 2002, p. 3-6.
15 Cette lecture genrée du journal s’inscrit dans la dynamique des travaux sur l’histoire genrée du sport et se propose d’éclairer les zones d’ombre souvent laissées par les historien(ne)s lorsqu’ils ou elles s’intéressent à la presse sportive et/ou féminine.
16 Il est publié par les Éditions J, sous contrôle du Parti communiste. Cf. E. Seidler, Le sport et la presse, Paris, A. Colin, 1964.
17 Pour plus d’informations concernant ce journal, nous renvoyons à l’article d’Évelyne Combeau-Mari dans cet ouvrage.
18 Miroir du Monde, « Les sœurs Beneck et les hurdlers », Miroir-Sprint, 17 avril 1967, p. 27.
19 « Bénédicte Duprez bat Kiki Caron », Miroir-Sprint, 28 mars 1967, p. 15.
20 « La sève de l’athlétisme », Miroir-Sprint, 10 avril 1967, p. 3.
21 T. Terret, « La natation et l’émancipation féminine au début du siècle », Jeux et sports dans l’histoire, Paris, CTHS, 1992, p. 269-293.
22 J. Konrads, « La natation française, c’est quelques champions… », Miroir-Sprint, 29 juillet 1969, p. 19.
23 M. Attali, N. Bazoge, G. Gautier, « « Bolides » et « amazones » ». Une revue du ski alpin dans les années 1930 », C. Ottogalli-Mazzacavallo, J. Saint-Martin (dir.), Femmes et hommes dans les sports de montagne. Au-delà des différences, Grenoble, MSH-Alpes, 2009, p. 291-304.
24 J. Bobet, « Number one », Miroir-Sprint, 20 janvier 1967, p. 21.
25 Ibid.
26 Ce terme de « championne » n’a en effet historiquement été que peu utilisé pour désigner les sportives. N. Bazoge, J. Gaucher, C. Ottogalli-Mazzacavallo, S. Jamain, « Les sportives des jeux de Paris en mots », T. Terret (dir.), Les paris des Jeux olympiques de 1924, Biarritz, Atlantica, 2008, p. 1217-1237.
27 Dans les années 1920, le journal qui se qualifiait de « féminin », Ève, utilisait le même artifice pour dénoncer l’inanité des préjugés de l’infériorité féminine. Sous couvert du sous-titre « féminin », le journal défendait finalement une position féministe peu courante pour l’époque. C. Ottogalli-Mazzacavallo, S. Jamain-Samson, N. Bazoge, « « Avec des exemples nous ferons des adeptes ». Regard du journal féminin Ève sur les sportives (1920-1939) », M. Attali, op. cit., 2010, p. 721-732.
28 Miroir-Sprint, 18 novembre 1969.
29 G. Delamarre, « Ces jeunes filles qui rêvaient de football », Miroir-Sprint, 18 novembre 1969, p. 9-10.
30 L. Prudhomme-Poncet, Histoire du football féminin au XXe siècle, Paris, L’Harmattan, 2003.
31 G. Delamarre, op. cit., 18 novembre 1969, p. 9.
32 R. Pointu, « Les femmes et le football », Miroir-Sprint, 20 septembre 1970, p. 4.
33 G. Delamarre, op. cit., 18 novembre 1969, p. 10.
34 L. Prudhomme-Poncet, op. cit., 2003.
35 « Le point de vue collectif est plus enthousiasmant encore. Ce ne sont que “une deux” dès que l’occasion se présente, déviations, centres en retrait. La passe est mise en honneur, l’individualisme banni », G. Delamarre, op. cit., 18 novembre 1969, p. 10.
36 « La course aux 20 mètres ! », Miroir-Sprint, 3 juin 1969, p. 30.
37 R. Pointu, « La ruée vers l’or », Miroir-Sprint, 9 septembre 1969, p. 24.
38 « Gabriela Wetzko, Roland Matthes, la RDA », Miroir-Sprint, 26 août 1969, p. 27.
39 « La RDA : raisons des succès », Miroir-Sprint, 5 août 1969, p. 30-31.
40 L’hermaphrodisme fait davantage l’objet, dans le journal, d’explications médicales que de vives critiques. Cf. « Miroir du Monde – Exclue de Kiev », Miroir-Sprint, 25 septembre 1967.
41 Le premier type de contrôle systématique par l’intermédiaire de l’examen gynécologique fut mis en place aux championnats d’Europe d’athlétisme à Budapest en 1966. C. Louveau, A. Bohuon, « Le test de féminité, analyseur du procès de virilisation fait aux sportives », T. Terret (dir), Sport et genre. Volume 1 : À la conquête d’une citadelle masculine, Paris, L’Harmattan, 2005, p. 87-132.
42 R. Pointu, op. cit., 20 septembre 1970, p. 4.
43 Un médecin mexicain affirme que la pratique du football rend les femmes stériles, ce qui conduit à un avis contraire du journal : « Il ne reste plus aux femmes qu’à tricoter les maillots de leurs époux et se consoler en pratiquant des sports plus doux, comme le cyclisme, le basket ou le hockey. Selon ce professeur, naturellement, qui est le seul, à notre connaissance à affirmer ces dangers. Dans de nombreux pays, des médecins éminents ont des avis diamétralement contraires ». Cf. « Football sans frontières – Mexique – football féminin dangereux », Miroir-Sprint, 8 décembre 1970, p. 26.
44 R. Pointu, op. cit., 20 septembre 1970.
45 On pourrait citer, par exemple, le cas des joueuses de football dans l’entre-deux-guerres, soumises aux nombreuses critiques de masculinisation dans L’Auto, tandis que les joueuses de tennis ou nageuses font l’objet de louanges ou d’admiration. S. Jamain-Samson, Sport, genre et vêtement sportif : une histoire culturelle du paraître vestimentaire (fin XIXe siècle – début des années 1970), thèse de l’université Lyon I, 2008.
46 À l’instar de la plupart des journaux sportifs de l’époque. La présence des femmes dans le journalisme sportif à l’aube des années 1970 est quasi-inexistante. J.-P. Callède, « Le journalisme de sport en France : une “loi du genre” ? », A. Roger, T. Terret, Sport et genre – Volume 4, Paris, L’Harmattan, 2005, p. 187-219.
47 G. Vigarello, Histoire de la beauté. Le corps et l’art d’embellir de la Renaissance à nos jours, Paris, Le Seuil, 2004, p. 227. B. Bardot renouvelle les critères esthétiques en incarnant, dès les années 1950, une beauté plus provocante et en même temps plus naturelle, bouleversant le registre esthétique comme le registre des comportements. Cf. G. Vigarello, op. cit., 2004, en particulier, dans la dernière partie de l’ouvrage, la section 3 « Le “plus bel objet de consommation” », p. 225-237.
48 A. Vélez, « “Kiki” Caron, phénomène des années 1960 », T. Terret (dir.), Sport et genre – Volume 2, Paris, L’Harmattan, p. 121-136.
49 J. Bobet, « Number one », Miroir-Sprint, 23 janvier 1967, p. 21.
50 « Les Yeux d’Olga », Miroir-Sprint, 5 mars 1968, p. 26.
51 Ingrid Lafforgue remporte notamment une victoire en slalom, comptant pour la coupe du monde, à Saint Gervais en janvier 1969, et finit 5e au classement général cette année-là. Sa sœur Britt finit 26e (elle était 19e en 1968).
52 G. Delamarre, M. Besson, « Une semaine dans le blanc », Miroir-Sprint, 4 février 1969, p. 8.
53 « 4 médailles d’or pour Véra (Caslavska, Tchécoslovaquie), mais l’avenir appartient désormais aux cheveux fous et au joli minois de Natalia », numéro spécial JO Mexico, Miroir-Sprint, novembre 1968, p. 64-65. D’une façon plus générale, la grâce et la beauté des gymnastes sont souvent mises en avant.
54 « Un joli cœur », Miroir-Sprint, 27 février 1968.
55 Ibid.
56 Raymond Pointu fait notamment référence à « la démarche gracieuse » et la « jeune et jolie tête » de l’athlète. R. Pointu, « Face à face avec Rita Schmidt », Miroir-Sprint, 19 mars 1968, p. 5.
57 Le journal reconnaît la beauté de Marie-Claude Beaumont, la seule femme engagée dans la course des 1 000 km de Paris. « Marie-Claude [Beaumont] fait partie de ces femmes que l’on qualifie de très belle. Pourtant elle a choisi un métier peu propice à mettre en valeur le charme féminin… » D. Peressini, « 1 000 km de Paris. Une femme dans la course », Miroir-Sprint, 20 octobre 1970, p. 32-33.
58 Liliane Ory est présentée comme « une des grands espoirs de l’escrime féminine française [mais aussi], une jeune et bien charmante jeune femme de 22 ans ». « Liliane Ory : Peut-être pour Munich », Miroir-Sprint, 7 janvier 1969, p. 5. Si la France a une tradition duelliste et révèle de nombreux champions en escrime au cours du XXe siècle, l’activité se démocratise véritablement à partir des années 1960. C. Ottogalli, G. Six et T. Terret, Un pour tous, tous pour un. L’Histoire des championnats du monde d’escrime, Paris, Le Cherche Midi, 2010.
59 Les années 1960 bouleversent considérablement les normes en matière de références esthétiques, en particulier celles qui définissent les contours du masculin et du féminin. Des passerelles s’ouvrent peu à peu, à l’image de l’utilisation des vêtements unisexes, ou encore de la musculature. G. Vigarello, op. cit., 2004.
60 M. Félet, « 23’’5 : voilà Nicole Montandon, en toute élégance… », Miroir-Sprint, 6 août 1968.
61 Ibid.
62 Une morphologie loin des standards de la féminité, « hors normes », suscite l’inquiétude. C. Louveau et A. Bohuon, op. cit., 2005.
63 « La course aux 20 mètres ! », op. cit., 3 juin 1969.
64 « Gabriela Wetzko, Roland Matthes, la RDA », Miroir-Sprint, 26 août 1969.
65 H. Gast, « Lettre de RDA », Miroir-Sprint, 16 janvier 1967, p. 38-39.
66 J. Bobet, « Flo de dix à douze… », Miroir-Sprint, 13 février 1967, p. 35.
67 « Une victoire surprenante », Miroir-Sprint, décembre 1966.
68 G. Quiqueré, « Colette Besson définit son programme », Miroir-Sprint, 9 avril 1969, p. 24.
69 M. Vidal, « Viva Marielle », Miroir-Sprint, 6 mars 1967.
70 Ibid.
71 Élu Ballon d’or en 1958, R. Kopa est le troisième joueur et le premier Français à recevoir cette distinction.
72 G. Delamarre, « NON, Debbie Meyer et Catie Ball ne sont pas des prodiges », Miroir-Sprint, 4 septembre 1968.
73 Ibid.
74 « Avec la timidité et la goguenardise propres aux jeunes filles de son âge, elle dit en souriant délicieusement : J’ai eu beaucoup de chance de réussir dans les cinq épreuves, mais j’avais la “frite” », H. Quiqueré, « Deux grands espoirs… pour Munich », Miroir-Sprint, 19 août 1969, p. 22.
75 H. Quiqueré, « Un bel après-midi », Miroir-Sprint, 14 juillet 1969, p. 32.
76 R. Pointu, « Et arriva Nicole Duclos », Miroir-Sprint, 23 décembre 1969, p. 5.
77 S. Courtois (dir.), op. cit., 2007, article « Homme nouveau ».
78 G. Delamarre, « Georges Goven, le premier des nouveaux mousquetaires », Miroir-Sprint, 24 novembre 1970, p. 10.
79 En parallèle de son activité sportive, il occupe un emploi de comptable et participe aux activités du Syndicat agricole. Cf. R. Pointu, « La justification de Maroquin », Miroir-Sprint, 24 avril 1967, p. 3.
80 R. Pointu, op. cit., 23 décembre 1969, p. 5.
81 « La volonté d’une femme », Miroir-Sprint, 8 avril 1970.
82 H. Quiqueré, « Un titre en deux personnes », Miroir-Sprint, 29 juillet 1969, p. 26.
83 Y. Dumont, Les communistes et la condition de la femme, Paris, Éditions Sociales, 1970, p. 14-15.
84 R. Pointu, « Elianne Camacaris : championne grâce à son père », Miroir-Sprint, 18 février 1969, p. 15.
85 R. Pointu, « Nelly Reb : une “footballeuse” d’exportation », Miroir-Sprint, 27 septembre 1970, p. 18.
86 J. Bobet, op. cit., 13 février 1967, p. 35.
87 R. Pointu, op. cit., 23 décembre 1969.
88 Un « janséniste » désigne une personne qui manifeste une vertu austère en référence aux adeptes du jansénisme, mouvement religieux des XVIIe et XVIIIe siècles, fondé sur la doctrine de Jansénius.
89 R. Pointu, « Une “américaine” nommée Colette Besson », Miroir-Sprint, 6 octobre 1969, p. 6-7.
90 Marie-José Kersaudy, qui abandonne sa carrière en 1969 pour pouvoir poursuivre ses études en pharmacie, est citée en exemple. « Marie-José Kersaudy : un abandon logique », Miroir-Sprint, 26 août 1969.
91 « Tennis – La révolte des femmes », Miroir-Sprint, 13 septembre 1970, p. 7.
92 « Jacqueline Delachet et le basket en France », Miroir-Sprint, numéro spécial « Un an de sport », décembre 1970, p. 38-39.
93 R. Pointu, « Cross de l’Humanité. Mikitenko remplace le duel Nikolic-Dupureur », Miroir-Sprint, 3 avril 1967, p. 8.
94 M. Vidal, op. cit., 6 mars 1967, p. 2.
95 Il critique vivement les « misogynes qui fleurissent sur les terrains de sport », notamment parmi ses confrères journalistes qu’il estime trop centrés sur le physique des sportives et pas assez sur leurs performances. M. Vidal, « Être femme et sportive », Miroir-Sprint, 29 septembre 1969, p. 2-3.
96 Ibid., p. 2.
97 Ibid.
98 À l’instar d’autres travaux sur les médias : Le Temps des Médias, « La cause des femmes », no 12, 2009.
Auteurs
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Conflits ordinaires et rivalités nouvelles (1848-1853)
Sylvain Milbach
2008
L'évangélisation des Indiens du Mexique
Impact et réalité de la conquête spirituelle (xvie siècle)
Éric Roulet
2008
Les miroirs du silence
L'éducation des jeunes sourds dans l'Ouest, 1800-1934
Patrick Bourgalais
2008