De l’homme au martyr : les images « saintes » de Louis XVI en Grande-Bretagne
p. 163-174
Texte intégral
1L’exécution le 21 janvier 1793 de celui qui a régné dix-huit ans sur la France a constitué en Occident un événement majeur dont l’impact s’est traduit par un foisonnement de livres, magazines, estampes volantes, tableaux et objets divers. Il a interpellé dirigeants et populations d’une Europe qui connaissait le « tyrannicide » depuis l’Antiquité et où le « régicide » officiel n’avait été expérimenté que par les Britanniques le 30 janvier 1649. Or l’intérêt particulier de ces derniers envers Louis XVI et les siens s’est traduit dans la plus abondante et la plus diversifiée des iconographies étrangères conservées, celle qui a constitué un modèle fréquemment copié1. La mise à mort du roi de France et de Navarre déchu en constitue le pic de production2 et bien que les scènes historiques y dominent, les documents et objets laissent une grande place à l’élément religieux, certains poussant cette transfiguration de l’événement jusqu’au « martyre ».
2Ce processus de mutation de statut, de l’humain au divin, aboutit à une forme de sanctification du souverain français qui transforme l’image en véritable hagiographie, sens étymologique originel, au cœur d’un royaume anglican aux dogmes mêlant catholicisme et protestantisme. Dans une situation confessionnelle complexe où les catholiques jouissent de droits très contestés et limités, comment les auteurs sont-ils parvenus à faire accepter des représentations empruntant de nombreux codes à l’iconographie de la Contre-Réforme produite après le concile de Trente ? Pour le déterminer, nous analyserons d’abord les documents qui font de l’échafaud le prélude du Paradis par certains de leurs éléments, avant d’étudier plus spécifiquement les estampes d’Isaac Cruikshank et leurs reports sur céramique où les mots « martyre » et « martyr » sont mentionnés dans le titre.
« Et l’échafaud n’étoit qu’un degré vers les Cieux3 »
3Précédant l’exécution, la dernière entrevue du condamné à mort avec sa famille le 20 janvier 1793 participe étroitement à ce processus religieux pour de nombreux auteurs britanniques et italiens installés durablement à Londres4. En effet cette séparation familiale, après les vexations, l’emprisonnement et le procès, constitue l’une des étapes du chemin de croix de l’ancien roi, sa Passion christique5 dont l’ultime étape est la mise à mort publique devant un peuple impie.
4Les prisonniers, « du fait que, dans maintes civilisations, Dieu est identifié à la lumière6 », y apparaissent baignés d’une clarté divine qui se concentre parfois en « halo lumineux, qui, dans l’art du XVIIe siècle, auréole la tête des saints et remplace le nimbe7 » autour de la tête de Louis XVI. Certains auteurs font un autre emprunt à l’hagiographie post-tridentine en représentant le condamné à mort les yeux levés vers le Ciel, dans ce moment d’extase où s’effectue la communion totale avec Dieu8.
5Mais l’Italien Mariano Bovi, graveur et éditeur de dessins et d’estampes destinés à un public aisé, se révèle être le seul à franchir un degré supplémentaire vers la sanctification le 1er janvier 1794 en faisant usage du mot « Martyr » à titre comparatif et sans qualifier Louis XVI de tel9. Comme ses compatriotes il est imprégné par la symbolique catholique, également usitée par les Britanniques sur divers supports et copiée sur le continent européen10.
6Ces éléments mobilisés pour le 20 janvier 1793 le sont encore plus pour le lendemain où ils se superposent fréquemment au sein d’un même document, multipliant ainsi les similitudes entre l’hagiographie et l’image du condamné royal. En récitant une prière de sa prison à son lieu d’exécution publique, Louis XVI suit la tradition des martyrs catholiques et protestants, ce que soulignent de nombreuses légendes d’estampes dont celles de Charles Benazech et ses imitateurs. L’un d’eux, italien qui se cache sous le pseudonyme de Carlo Silanio, qualifie même la mise à mort de « supplice11 » et reprend ainsi les paroles papales en les dissociant12, ce qui suggère une probable connaissance de celles-ci. De même que la symbolique, les discours des catholiques se répandent, et l’échafaud, sur lequel le condamné a déjà un pied alors que l’autre le rattache encore à sa vie terrestre qui arrive à son terme, devient véritablement le premier degré vers le Paradis.
Fig. 1. – Charles Benazech, Le dernier moment de la Vie du Roy Louis XVI encouragé par son Confesseur Edgeworth, s. d., après 1795. Coll. part.
7La proximité du roi avec le Seigneur et avec la sainteté est exprimée par celle de son confesseur rappelant qu’il est un descendant direct de saint Louis, unique monarque français canonisé, même si cinq siècles les séparent13. Le jeu des couleurs met en relief le haut du corps, siège de l’émotion et de l’âme qui se détache par sa blancheur symbole de pureté14, singularité visuelle plaçant le condamné hors du commun des mortels et le rapprochant du divin.
8Permettant aux auteurs de se conformer à la réalité historique tout en lui octroyant un sens religieux, ce contraste lumineux se trouve utilisé de façon similaire sur presque tous les documents, dont ceux où le condamné est représenté debout sur l’estrade. La présence de la guillotine y devient plus écrasante, symbole de la mort imminente d’un homme en communion avec un Dieu auquel il confie son âme, l’instrument de mort se transforme en fenêtre ouverte sur le Ciel. C’est à cet instant, alors qu’il prononce d’ultimes paroles abondamment citées et conformes à la tradition du martyre, pardon et proclamation d’innocence, que Louis XVI subit “The Martyrdom” selon Isaac Cruikshank. Cette première scène historique, publiée deux semaines après l’événement, a été imitée à huit reprises, avec des réinterprétations personnelles qui sortent de la dualité instaurée par leur modèle.
9Parmi eux, l’éditeur Robert Sayer introduit le 25 mars 1793 la notion de « chrétien » et en pare le condamné qui masque l’instrument de mort par sa stature, au centre d’un rectangle de lumière divine dont la position est irréelle, sur ce document où il mêle symboles et vocabulaire sacrificiels, comme Cruikshank et Silanio15. Son homologue William Lane fait un usage très important de ces mots dans le commentaire de son placard débutant par “Massacre” et usant des mêmes termes que Sayer, partiellement réemployés par Bovi neuf mois plus tard, signe d’une circulation longue du vocabulaire16.
Fig. 2. – Isaac Cruikshank et Silanio, Louis the XVI. King of France. Attempting to Adress the Populace, at the Place of Execution. Jan[uar]y 21st 1793, Londres, 1793, British Museum.
10Ces auteurs et éditeurs restent pourtant en deçà de William Dent qui semble avoir créé la première satire sur le 21 janvier 1793 et donc le premier document représentant l’événement, seulement quatre jours après qu’il s’est produit17. Comme dans la peinture espagnole du XVIIe siècle, le caricaturiste suspend le temps alors que le couperet se trouve sur le cou encore intact du condamné « pour laisser entrevoir la gloire à venir et la reconnaissance sublime de la grandeur du saint18 ». Mots et symboles circulant entre les documents, ces allusions christiques et hagiographiques, même ténues, indiquent, par leur répétitivité, qu’elles sont acceptées par la population britannique et ont un impact sur la formation de l’opinion publique. Dans cette sanctification qui ne dit pas son nom et où Louis XVI montre sa piété et son courage face à une mort injuste, les auteurs privilégient les événements antérieurs à l’acte même de la décapitation.
11Ils répugnent à représenter l’instant ultime, celui du sang qui coule19, mis en scène de façon spectaculaire par James Gillray pour provoquer un choc émotionnel basé sur l’horreur de l’exécution20. Les œuvres de Cruikshank sont révélatrices de cette dichotomie, passant dans l’ordre chronologique de leur production de la douceur à la violence, évolution qui se traduit dans l’usage différencié du vocabulaire sacrificiel dans leur titre.
Le roi martyr et son martyre
12Le caricaturiste a ainsi montré The Martyrdom, la mort « en haine de la foi », d’un homme dont la fonction régalienne est rappelée sur une scène historique annoncée quatre jours avant sa publication dans le Morning Chronicle21. Face à la sombre guillotine et inondé de lumière céleste, le condamné fait face seul à son destin avec un calme qui contraste avec la foule déshumanisée et joyeuse dont n’apparaît pourtant qu’une petite main rose portant un clairon, des baïonnettes levées et un drapeau blanc. En cet instant rendu très solennel, sa main droite sur le cœur, il lève son bras gauche en prononçant ses ultimes paroles. Les lames bleues, celle de la guillotine plus sombre que celles des baïonnettes et de la hallebarde, évoquent le Ciel alors que le bois de l’estrade et de l’instrument de décapitation impose sa massivité par sa couleur marron foncé, gamme chromatique limitée où l’auteur matérialise les rayons divins en jaune, couleur identique à celle des clairons [cahier central, figure 3].
13Fils d’un Jacobite22, défenseur de la lignée masculine et catholique de Charles Ier pour le trône britannique, Isaac Cruikshank est particulièrement sensible aux atteintes physiques à l’encontre des monarques23. Réagissant sous le choc, quinze jours après l’exécution, il crée la troisième estampe publiée sur ce sujet, tout auteur confondu, et se révèle le seul à ériger cette décapitation en « Martyre », idéal « d’authentique et ultime imitation du Christ24 ».
14Il choisit ensuite, le 12 février 1793, de transférer le vocabulaire des saints du supplice sur le supplicié et de montrer un « martyr », ce qui lui permet d’élaborer un document plus politique que le précédent25. Pour ce faire, il adapte The Victim of Equality dont il modifie le second terme du titre mais conserve initialement les positions et attitudes des personnages, mettant en lumière, comme dans le théâtre espagnol du XVIIe siècle, « la scène de décollation [...] représentation par excellence du martyre26 ».
Fig. 3. – The Victim of Equality, s. l., 1793, British Museum.
15Irréaliste par la section doublement incurvée de la tête, cette estampe, qui a été publiée le même jour que The Martyrdom, fait de la guillotine sans couperet une grande fenêtre ouverte sur le Ciel. Le duc occupe la place du roi sur ce dernier document, brandissant la tête décapitée à l’ombre de la composition, symbole de la noirceur de cet acte, alors que sa main éclairée est posée sur le billot, lien fort avec l’instrument de mort.
16En votant la mort du roi, Philippe-Égalité se fait persécuteur et peut être considéré comme le bourreau de son cousin. L’usage du nom « Égalité » qui lui a été conféré par la commune de Paris le 15 septembre 1792, brise son lien avec la noblesse et insiste sur l’aspect niveleur de la République, contraire aux conceptions politiques de la majorité de la société britannique. Dans cette première version qui est probablement l’épreuve d’essai et ne porte pas son nom mais où son trait est identifiable, Cruikshank choisit de ne pas représenter le sang, comme son modèle27. Il évacue par contre les spectateurs pour se concentrer sur l’essentiel, le duc, dont le costume civil s’est mué en costume de grenadier de la Garde nationale, qui tient la tête décapitée du roi, le chapeau sur la tête en signe d’irrespect.
Fig. 4. – Isaac Cruikshank, The Martyr of Equality, Londres, Fores, 1793, Musée Carnavalet.
17En ôtant les paroles du défunt citées sur The Martyrdom pour les remplacer par un sous-titre destiné à effrayer la population britannique, “Behold the Progress of our System” [« Contemplez le Progrès de notre Système »], il lie indéfectiblement la République au régicide et affirme son loyalisme envers le régime monarchique28. Il s’éloigne ensuite plus nettement des deux documents du 1er février en plaçant le liquide rouge au cœur de la seconde version, celle qui a finalement été éditée. Le sang se déverse alors abondamment sur la sombre estrade et cerne Philippe-Égalité qu’il a éclaboussé au visage, marque indélébile de sa trahison et présage de sa mort prochaine29. Tout en conservant l’habillement de garde national, il inverse la position du duc et réintroduit la foule en rendant la topographie plus floue. Des troupes aux mines patibulaires, liées au duc par leurs vêtements, encadrent l’échafaud sans assurer une sécurité inutile. Tous les spectateurs célèbrent cette exécution en soulevant leurs couvre-chefs, à l’image de Philippe-Égalité [cahier central, figure 4].
18Pourtant, très loin de la contemplation, la vision incite au dégoût et à l’horreur, rappel de « ces figures douloureuses », où l’on « voyait le sang ruisseler », représentées sur les fresques murales et tableaux religieux catholiques post-tridentins30. Les martyrs y servent de modèles pour des chrétiens que leurs souffrances associent « à la Passion du Sauveur31 », à l’instar de la représentation de Cruikshank, qui rappelle en outre le meurtre biblique d’Abel par Caïn, préfiguration de la mort du Christ32. Provoqué par la jalousie, ce fratricide perpétré par le cadet sur l’aîné au sein des enfants mâles d’Adam et Ève a eu de nombreux échos dans l’art médiéval et les pièces de William Shakespeare33, fonds iconographique et littéraire dont les Britanniques étaient imprégnés. Sur un pichet du Staffordshire produit en 1793 ou 1794, l’inscription « Ici je vois la victime sanglante Par un Frère condamnée à mort Tous en vain plaidant pour la pitié La pitié n’osa pas s’éveiller34 » renforce d’ailleurs cette allusion à la Genèse et stigmatise un ennemi de l’intérieur sévissant au cœur des familles royales des deux côtés de la Manche.
19Le prince de Galles héritier du trône de Grande-Bretagne étant proche des membres de l’opposition depuis 1780, cette analogie familiale s’avère particulièrement pertinente. Elle est complétée par l’emblème et la devise des rois britanniques au verso, qui encadrent « Que les véritables Britanniques conservent Leurs Droits Et épousent toujours la Cause de l’Église et du Roi Et de tout ce Qui constitue leurs Lois35 ». Le “French System” qui remplace “our System” désigne sa cible, une République française honnie dont les principes sont contraires aux idées politiques des clients des tavernes loyalistes. Utilisées par ces derniers, ces céramiques, signes du succès de l’œuvre de Cruikshank, amplifient ainsi la diffusion de son message politique auprès d’une grande partie de la population britannique à travers ce réseau social, que ce soit à Londres ou en province. Le contenu politique de la caricature est renforcé par ces multiples ajouts, de même que son but éducatif. Cette menace interne est matérialisée par la couleur rouge du pichet, celle du sang qui unit les membres des familles régnantes mais ne peut empêcher leur trahison par ambition et qui symbolise l’âme dans la Bible36. La version en réduction du premier pichet, sortie de moules identiques qui ont conduit les céramistes à rogner les décorations et à supprimer le liserai, atténue la gravité du 21 janvier 1793 par son verso, une scène satirique connue de James Gillray sur les aléas du mariage intitulée “Matrimony37”.
20Pourtant, en laissant place à l’horreur d’un régicide provoqué par un traître familial, Cruikshank choisit de faire disparaître le dialogue avec Dieu et la présence lumineuse du Ciel qui étaient au cœur de “the Martyrdom”. Dans cette dernière estampe, l’auteur empruntait plutôt à l’hagiographie du Moyen Âge, où le martyre n’est « rappelé [...] que par quelques attributs », ici l’instrument du supplice qu’est la guillotine38. En revanche, en érigeant Louis XVI en martyr, le caricaturiste s’inscrit dans la tradition des martyrologes protestants du XVIe siècle, genre qui dépérit très rapidement hormis chez les anglicans39, essentiellement chez les dissidents40. Le modèle iconographique est plutôt à rechercher du côté de la Contre-Réforme, où « l’image de la souffrance se présentait sans cesse aux yeux des fidèles41 ». Il se permet donc d’utiliser les codes graphiques de l’hagiographie sans user de l’ensemble du vocabulaire qui y est associé, le mot « saint » n’est jamais cité, à l’inverse de celui du « martyre et de son supplice ». Le premier terme est en effet trop polémique, car, bien que reconnu par le dogme anglican, il pose encore problème dans les pratiques car il se rattache à un catholicisme avec lequel les relations ne sont pas apaisées.
21L’utilisation du second terme pour l’ancien roi de France fait malgré tout débat, ce dont The European Magazine and London review de mars 1793 se fait l’écho dans un « essai » rédigé par « un descendant d’un Martyr42 ». Ce dernier critique l’usage des mots “martyr” et “martyrdom” pour qualifier le supplice de Charles Ier, et par extension pour celui de Louis XVI, leur mort n’étant pas liée à la religion. Exécutés pour des motifs purement politiques, les deux princes ne se sont vu offrir à aucun moment l’occasion de témoigner de leur foi devant leurs juges. Dans une société qui se sécularise, le sens des mots évolue et devient plus large, se détachant ainsi de son aspect religieux. Ce glissement sémantique se heurte à la réticence d’une frange de la population, au moment où l’usage du qualificatif de « martyr » pour Charles Ier se généralise dans l’iconographie43. De con côté, Cruikshank choisit d’utiliser à nouveau le terme de « martyre » en octobre 1793 pour décrire la mort de Marie-Antoinette44.
22Bien que minoritaires par rapport à l’ensemble de la production sur l’exécution de Louis XVI, ces représentations élaborées par Isaac Cruikshank semblent avoir eu un grand impact. Réactions à vif, elles ne résultent pas d’une construction du milieu émigré français ou de la culture artistique des Italiens installés à Londres, mais elles ont été créées par un Britannique qui fait essentiellement appel à un fonds iconographique catholique, celui de la Contre-Réforme. Cet emprunt non revendiqué ne rebute cependant pas une population majoritairement anglicane et hostile au catholicisme qui reçoit favorablement cette image, en dépit de quelques réticences, car Cruikshank et les autres artistes qui usent du vocabulaire et des symboles sacrificiels prennent garde de ne jamais utiliser le mot « saint ». Cette subtilité lexicale leur permet d’ériger Louis XVI en « martyr » et de transfigurer sa mise à mort en « martyre » sans choquer un public confronté depuis le règne d’Elisabeth Ire à une iconographie catholique militante au service du combat anti-protestant45. Les auteurs britanniques, initiateurs de cette hagiographie sécularisée, n’ont pourtant pas eu la volonté de donner une image univoque de Louis XVI, même si sous la diversité de leurs représentations apparaît une constante. Dieu accompagne le condamné jusqu’au sacrifice ultime, d’un emprisonnement à un trépas où il a imité « Jésus portant sa croix [...] modèle qui apprend à souffrir et à mourir », et ceux qui célèbrent cette décapitation sacrilège sont voués à la damnation, qu’ils soient Français ou Britanniques46.
Notes de bas de page
1 Marina Bujoli, Louis XVI dans l’iconographie révolutionnaire, mémoire de maîtrise, Université de Provence, 1994, p. 65 et Annexe 10, p. xlii.
2 Marina Bujoli, Louis XVI dans les documents iconographiques et objets produits en Grande-Bretagne : une certaine image de la monarchie, de la France et des Français, Lille, ANRT, 2005, p. 79 et Annexe 2a, Année de l’événement représenté et genre du document, p. 618.
3 BnF Louis XVI no 211, gravé par Philipp Audinet et édité par M. De Mervé à une date inconnue, 16,5 x 9,5 cm, qui reprend sans le citer un document de 1787 peu diffusé qui ne mentionnait que le titre royal de Louis XVI, Musée Garinet, Inv. 899.11.1403, gravé par Antoine Carrée d’après Jean-Jacques François Le Barbier l’aîné, 60 x 40 cm, catalogue de l’Exposition 4 siècles d’estampes XVe-XVIIIe siècles, Châlons-en-Champagne, 10 février au 26 août 2012, Châlons-en-Champagne, 2012, p. 98.
4 Ceux qui ne le font pas ne représentent que 16 % de la production sur le 20 janvier 1793.
5 Jean-Paul Roux, Le roi. Mythes et symboles, Paris, Fayard, 1995, p. 261. Pour certains auteurs, le 20 janvier s’inscrit dans un diptyque, en pendant du 21 janvier 1793, alors que Benazech et ses imitateurs créent une série de quatre estampes contenant également la séparation familiale provisoire du 29 septembre 1792, suite à des travaux au Temple, et la comparution du 26 décembre à la Convention. Mariano Bovi l’inscrit même dans une suite de six gravures qui débute avec la fuite de Varennes le 21 juin 1791, se poursuit avec la famille au Temple trois jours après l’exécution du roi, la séparation du Dauphin d’avec sa famille le 3 juillet 1793, Marie-Antoinette transférée du Temple à la Conciergerie le 2 août 1793 et son procès le 14 octobre 1793, intégralement rééditée en 1806, cf intra note 9.
6 Umberto Eco (dir.), Histoire de la beauté, Paris, Flammarion, 2004, p. 102.
7 Émile Mâle, L’Art religieux de la fin du XVIe siècle, du XVIIe siècle et du XVIIIe siècle. Étude sur l’iconographie après le concile de Trente (Italie, France, Espagne, Flandres), Paris, Armand Colin, 1951, p. 152.
8 Ibid., p. 193.
9 The King’s Departure from his Disconsolate Family – La Séparation du Roi d’avec sa Famille Désolée, British Museum, Department of Prints and Drawings, 1917-12-8-997, 39,5 x 54,5 cm. Vendue 2 livres 2 shillings en couleurs, prix figurant dans le Catalogue de vente de Mariano Bovi reproduit en intégralité dans Marina Bujoli, Louis XVI dans les documents iconographiques, op. cit., p. 651-667. La légende bilingue précise que « Louis alone, seem superior to the horror and despair that surrounded him, and tears himself from such mild links, with the Fortitude of a Martyr – Louis seul, au milieu de l’horreur et du désespoir qui l’environnent, semble supérieur à son affreuse situation, et il s’arrache pour la dernière fois à ces liens si doux, avec toute la résignation et le courage d’un Martir. » Cette estampe a été reprise par plusieurs graveurs, succès qui a dépassé les frontières de la Grande-Bretagne mais le commentaire finissant par « Martyr » a été abandonné, hormis sur l’estampe choisie pour a graphic History of Louis the Sixteenth, and the royal Family of France; represented in six large Engravings from celebrated pictures, painted on the spot by D. Pelegrini, and engraved by M. Bovi with a Brief History of the Suferings of the Royal Family, collected from the most authentic information, London, Printed by J. G. Barnard 57, Snow-Hill, and sold by all Book and Print-Sellers, 1806. Le bilinguisme des gravures de qualité existait avant 1789 car les marchés des deux côtés de la Manche étaient les plus importants d’Europe, Jean Adhémar, Graphic Art of the 18th Century, New York, McGraw-Hill, 1964, p. 174.
10 Marina Bujoli, Louis XVI dans les documents iconographiques, op. cit., p. 351-386.
11 Le dernier moment de la Vie du Roy Louis XVI Encouragé par son Confesseur Edgeworth a la vue de son supplice tandis que le General Santerre en presse L’execution le 21 janvier 1793, publiée par Darbi à une date inconnue postérieure au 1er février 1795 car la première gravure de son modèle Charles Benazech a paru à cette date, 35 x 46 cm, BnF, vidéodisque laser des collections révolutionnaires, 6 008.
12 « Le roi très Chrétien Louis XVI a été condamné au dernier supplice par une conjuration impie, et ce jugement s’est exécuté », extrait du discours de Pie VI au Consistoire du 17 juin 1793, cité dans Georges Minois, Le couteau et le poison. L’assassinat politique en Europe (1400-1800), Paris, Fayard, 1997, p. 326-327.
13 Le texte « Fils de Saint-Louis Montez au Ciel ! » a été repris sur de nombreux documents, et, sous la Restauration, sur une gravure éditée par le « bureau de propagation des bonnes images » où Louis XVI tient la main d’Edgeworth dans la rue, au pied de la guillotine, alors qu’un ange rayonnant lui offre une couronne de lauriers, Musée Carnavalet, Histoire, 21 janvier 1793.
14 Édouard Urech, Dictionnaire des symboles chrétiens, Neufchâtel, Delachaux et Niestlé, 1972, p. 157.
15 Louis the xvi. King of France. Attempting to Adress the Populace, at the Place of Execution. Jan[uar]y 21st 1793 [« Louis XVI. Roi de France. Tentant de s’Adresser à la Populace, sur le Lieu de l’Exécution. 21 janvier 1793 »], British Museum, Department of Prints and Drawings, 2010-7081-1256. Légende sous le titre : This Unfortunate Monarch ascended the Scaffold, with the greatest resignation and Christian Fortitude [« Cet Infortuné Monarque gravit l’Échafaud, avec la plus grande résignation, et la plus grande force d’Ame Chrétienne »].
16 Il évoque en effet la « Christian heroic Fortitude » [« Force d’âme héroïque d’un Chrétien »]. Or les auteurs qui ont repris deux de ses vignettes, jusqu’au Danemark et au Québec, ont parfois réutilisé ce vocabulaire, d’où une large diffusion de ces termes : Marina Bujoli, Louis XVI dans les documents iconographiques, op. cit., p. 327-342.
17 Hell Broke Loose or the Murder of Louis [« L’enfer s’est déchaîné ou le meurtre de Louis »], publiée le 25 janvier 1793 (date difficile à lire mais plus probable que le 25 juin) par J. Aitken, 25 x 34 cm, Musée de la révolution française de Vizille, 1989-98.
18 Anne Teulade, « Déplacement, encadrement, sublimation. Le corps martyrisé dans la peinture et le théâtre espagnols du XVIIe siècle », littératures classiques, no 76, 2010, p. 73. James Gillray dans The Zenith of French Glory The Pinnacle of Liberty [« Le Zenith de la Gloire Française Le Pinacle de la Liberté »], publiée le 12 février 1793 chez Hannah Humphrey, se place un peu avant, le couperet est en haut de la guillotine et le bourreau le fait descendre en tournant la roue, erreur de configuration qui permet au caricaturiste de retarder l’instant ultime, BnF, Vidéodisque laser des collections révolutionnaires, 14 908.
19 Seuls 20 % des 49 documents sur le 21 janvier le font, soit dix estampes dont deux satires où le liquide de vie se trouve évacué et une scène historique où l’absence de couleurs gomme partiellement l’impact de sa représentation.
20 The Blood of the Murderer crying out for Vengeance [« Le Sang de la Victime réclamant Vengeance »], publiée le 16 février 1793 par Hannah Humphrey, 35 x 26 cm, British Museum, Department of Prints and Drawings, Catalogue of Personal and political Caricatures, 8 309. Le sang s’élève en volutes vers les cieux, discours du défunt exhortant la Grande-Bretagne à intervenir en France.
21 The Martyrdom of Louis XVI, King of France: I Forgive my Enemies I Die Innocent !!! [« Le Martyre de Louis XVI, Roi de France : Je Pardonne à mes Ennemis Je Meurs Innocent !!! »], publiée le 1er février 1793 par S. W. Fores, BnF, Vidéodisque laser des collections révolutionnaires, 6 072 en couleurs et BnF, De Vinck, 5 155 en noir.
22 Hanns Hammelmann, Book illustrators in Eighteenth-century England, New Haven et Londres, Yale University Press for the Paul Mellon Center for Studies in British Art, 1975, p. 28.
23 Marina Bujoli-Minetti, « Menaces sur la vie de Louis XVI : anticipations britanniques », Récits, images, représentations du présent et de l’avenir, Mélanges offerts à Bernard Cousin, Aix-en-Provence, Presses universitaires de Provence, 2014.
24 Anne Dillon, The Construction of Martyrdom in the English Catholic Community, 1535-1603, Aldershot, Ashgate, St Andrews studies in Reformation History, 2002, p. 371.
25 The Victim of Equality, publiée le 1er février 1793, sans adresse d’édition ni d’auteur, 21 x 18 cm, British Museum, Department of Prints and Drawings, Catalogue of Personal and political Caricatures, 8 298.
26 Anne Teulade, « Déplacement, encadrement, sublimation... », art. cit., p. 59.
27 Isaac Cruikshank, The Martyr of Equality, gravure éditée par S. W. Fores, 1793, 24,5 x 22 cm, Musée Carnavalet, Caricatures anglaises.
28 « Le Martyre » suit sa première dénonciation du vote mêlant affliction familiale, références à Shakespeare et à Charles Ier, le duc s’apprêtant à décapiter son cousin avec la hache du bourreau. “The Near in Blood, the nearer bloody”, soit « Le plus proche par les liens du Sang [est] le plus vite sanguinaire », publiée le 26 janvier 1793 par S. W. Fores, 21,5 x 32,5 cm, BnF, Vidéodisque laser des collections révolutionnaires, 6266.
29 Isaak Cruikshank, The Martyr of Equality, Londres, 1793, 24,5 x 22 cm, BnF, Vidéodisque laser des collections révolutionnaires, 6 264.
30 Émile Mâle, L’Art religieux, op. cit., p. 148.
31 Ibid.
32 Élisa de Halleux, Iconographie de la Renaissance italienne, Paris, Flammarion, 2004, p. 56.
33 Antonio Dominguez Leiva, Décapitations. Du culte des crânes au cinéma gore, Paris, PUF, 2004, p. 51-54.
34 Brighton Art Gallery, Willett-373, porcelaine faisant 24,5 centimètres de haut. Inscription originale : “Here I see the victim bleeding By a Brother doom’d to die All in vain for pity pleading Pity dare not lift her eye.”
35 “May Britons true Their Rights pursue And e[v]’er espouce the Cause Of Church and King And every thing That constitutes their Laws.”
36 Genèse, IX, 4 et Lévitique, I, 5.
37 Vizille, Musée de la Révolution française, 1900-32, faisant 14 cm de haut, moulé en 1793 ou 1794.
38 Émile Mâle, L’Art religieux, op. cit., p. 147.
39 Marc Belissa, Monique Cottret (dir.), Le Martyre Moyen Âge Temps modernes, Paris, Kimé, 2010, p. 8.
40 Brad Stephan Gregory, Salvation at Stake Christian Martyrdom in Early Modern Europe, Cambridge-Londres, Harvard University Press, 2001 (2e éd.), p. 195.
41 Ibid., p. 148.
42 The European magazine and London review, “Essay on Martyrdom by the Descendant of a Martyr”, p. 184-187: “One instance of the wrong application is in the case of King Charles I, who is denominated the Royal Martyr... In some writings, the motion being unquestionably taken from the fate of Charles the First, the late unhappy sovereign of France is called a martyr. But here is another perversion of the word, for Louis was never questioned about religion at all, nor had he it in his option to live or die upon specific conditions” [« Un exemple de ce mauvais usage réside dans le cas du roi Charles Ier, qui est appelé le Martyr Royal... Dans certains écrits, le mouvement découlant incontestablement du sort de Charles Ier, le défunt malheureux souverain de France est nommé un martyr. Mais ici se trouve une nouvelle perversion du mot, car Louis n’a jamais été interrogé sur la religion, ni n’a eu comme option de vivre ou mourir dans des conditions spécifiques »]. L’Annual Register, magazine d’opposition des Whigs, compare le sort de Louis XVI à celui de Charles Ier en usant du qualificatif “unfortunate”, figurant également sur plusieurs estampes (Marina Bujoli, Louis XVI dans les documents iconographiques, op. cit., p. 320).
43 Voir la caricature relatant la coalition Fox-North où figure “the head of Charles, Martyr”, publiée le 8 mars 1784 par M. Smith, 20 x 25 cm, British Museum, Department of Prints and Drawings, Catalogue of Personal and political Caricatures, 6641. Ce processus s’est développé suite à la célébration de « Charles the Martyr » sous la Restauration de Charles II et James II le 30 janvier, date anniversaire de l’exécution royale, officialisée dans le Book of Common Prayer, mention supprimée suite à la Révolution de 1688 et réintroduite en 1980 (voir la contribution d’Andrew Lacey dans le présent volume).
44 The Martyrdom of Marie Antoinette Queen of France Oct.r 16. 1793 [« Le Martyre de Marie-Antoinette Reine de France 16 octobre 1793 »], publiée le 28 par S. W. Fores, 22,5 x 19 cm, Musée Carnavalet, Caricatures anglaises, 16 octobre 1793. L’appellation « martyre » a été reprise pour celle-ci alors que le terme « mort » a été utilisé pour Louis XVI, sur un placard flamand sans date ni référence d’édition, BnF, De Vinck, 5 920. Cruikshank a également créé une scène historique, The Last Interview between Louis XVI, King of France, and his Family [« La Dernière Entrevue entre Louis XVI, Roi de France, et sa Famille »], éditée le 8 mars 1793 par S. W. Fores, la seconde publiée sur ce sujet tous auteurs confondus, où il fait des références nettes au catholicisme en représentant un chapelet et un rosaire, British Museum, Department of Prints and Drawings, Catalogue of Personal and political Caricatures, 8 312.
45 Anne Dillon, The Construction of Martyrdom, op. cit., p. 120-121.
46 Émile Mâle, L’Art religieux, op. cit., p. 114. « Martyr » est en outre cité sur une scène allégorique, Louis XVI Martir apparaît a Louis XVII son fils Roy de France et de Navarre, British Museum, Department of Prints and Drawings, 1931-4-13-272, dont la diffusion semble avoir été limitée. Les palmes du martyre figurent sur cinq portraits : deux de Madame Élisabeth (BnF, vidéodisque des collections révolutionnaires, 6 576 et De Vinck, 5 812), un du Dauphin (BnF, N2, Louis XVII, 71), un de Louis XVI surmontant son testament (BnF, vidéodisque des collections révolutionnaires, 21 057) et un portrait collectif du roi et de sa famille, (BnF, N2, Louis XVI, 200).
Auteur
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Un constructeur de la France du xxe siècle
La Société Auxiliaire d'Entreprises (SAE) et la naissance de la grande entreprise française de bâtiment (1924-1974)
Pierre Jambard
2008
Ouvriers bretons
Conflits d'usines, conflits identitaires en Bretagne dans les années 1968
Vincent Porhel
2008
L'intrusion balnéaire
Les populations littorales bretonnes et vendéennes face au tourisme (1800-1945)
Johan Vincent
2008
L'individu dans la famille à Rome au ive siècle
D'après l'œuvre d'Ambroise de Milan
Dominique Lhuillier-Martinetti
2008
L'éveil politique de la Savoie
Conflits ordinaires et rivalités nouvelles (1848-1853)
Sylvain Milbach
2008
L'évangélisation des Indiens du Mexique
Impact et réalité de la conquête spirituelle (xvie siècle)
Éric Roulet
2008
Les miroirs du silence
L'éducation des jeunes sourds dans l'Ouest, 1800-1934
Patrick Bourgalais
2008