Chapitre I. Changer de patrie. L’annexion de 1860
p. 19-65
Texte intégral
1En février 1860, le journaliste Charles-Ferdinand Lapierre met par écrit ses impressions sur Nice, où il est venu prendre quelques jours de repos :
À mon arrivée, j’étais un peu abasourdi par les révélations extraordinaires que contenaient sur le comté de Nice certains journaux de Paris. Ils ne parlaient que d’annexion, de manifestations, d’agitation, d’intrigues, etc., et je voyais une population paisible jusqu’à l’indolence et paraissant fort indifférente à toutes ces grandes combinaisons politiques, où elle jouait cependant le principal rôle ; je demandais à un marchand de Nice : « Eh bien ! vous allez devenir Français… » – Et il me répondait, avec l’insouciance la plus naturelle, et dans cet idiome provençal qui est l’italien de pays [sic], « que c’était possible. » – Mais, peu à peu et sous l’influence de l’attention générale dont ils étaient l’objet, les habitants se sont réveillés et se sont occupés des destinées qu’on leur préparait. Deux partis se sont formés, représentés par deux journaux : la Gazette de Nice et l’Avenir de Nice, et la lutte s’est engagée assez vive.
Tous les matins, la Gazette de Nice déclarait urbi et orbi que la population était italienne, qu’elle resterait italienne et qu’elle ne cesserait d’être fidèle au roi Victor-Emmanuel. Tous les jours, à la même heure, l’Avenir de Nice affirmait que la population était française et qu’elle appelait de tous ses vœux l’annexion à la France. Ceux qui étaient de l’avis de la Gazette trouvaient que l’Avenir radotait, et réciproquement.
Ces pauvres diables de Niçois, noyés dans une population cosmopolite de Français, d’Anglais, de Russes, d’Allemands, ne savaient comment discerner leur véritable nationalité à travers les souvenirs contradictoires de leur histoire, les habitudes prises et les influences que maintenait sans cesse le voisinage de la France. Les incitations leur venaient de tous côtés, dans tous les sens, et ils n’étaient pas éloignés de demander qu’on les fît ce qu’on voudrait, pourvu qu’il fût arrêté une fois pour toutes ce qu’ils seraient1.
2Ainsi que le montre ce témoignage, l’annexion du comté de Nice à la France en 1860 a provoqué, dès sa réalisation, de vifs débats. Comme en Savoie, il en a résulté une vision très contrastée du rattachement, assimilé soit à un désir profond des populations concernées soit, a contrario, à un acte arbitraire imposé unilatéralement par un pouvoir bonapartiste décrit comme exagérément despotique2. L’annexion est ainsi devenue un événement fondateur mais aussi controversé de l’histoire du comté de Nice et il convient de le déconstruire pour mieux en saisir les mécanismes, le sens et la portée.
3Évoquées lors de l’entrevue de Plombières, le 21 juillet 1858, entre Napoléon III et Cavour, les cessions de la Savoie et du comté de Nice constituent une contrepartie de l’aide apportée par la France au royaume de Piémont-Sardaigne contre l’Autriche. Confirmées par le traité de Turin du 24 mars 1860, les annexions sont entérinées par un plébiscite, qui se déroule dans le comté de Nice les 15 et 16 avril. À la suite d’un vote positif, le territoire est annexé à la France le 14 juin 18603.
4L’annexion constitue un objet d’étude délicat, en raison des nombreux enjeux politiques qui lui ont été assignés depuis. Nous utiliserons d’ailleurs ici le sens « neutre » du mot tel qu’il est employé au XIXe siècle, « annexer : joindre à » selon le Littré, le terme prenant une connotation péjorative à partir de 1870, où il devient synonyme de « violation brutale du droit des gens » et se trouve dès lors peu à peu remplacé par « rattachement4 ». Nous avons néanmoins choisi d’employer ce terme d’« annexion » car il est le plus utilisé, à l’époque des faits, pour désigner le changement de souveraineté.
5Les annexions de Nice et de la Savoie n’ont pas été décidées par les populations concernées, mais par leur souverain, Victor-Emmanuel II5. Il convient dès lors de l’aborder comme un événement auquel les acteurs locaux ont dû s’adapter et qu’ils ont su s’approprier6. La nécessité d’étudier les adaptations par lesquelles les acteurs sociaux ont tenté de maîtriser les bouleversements provoqués par les changements de souveraineté a été déjà soulignée par Denise Turrel7. Les populations ne sont pas restées passives face au changement de souveraineté et leurs réactions, comme les stratégies qu’elles ont pu mettre en œuvre, révèlent leurs pratiques et leurs représentations politiques, à un moment charnière de leur histoire. L’annexion de 1860 constitue en cela un point d’observation privilégié pour aborder l’étude des pratiques politiques du Second Empire en voie de libéralisation et interroger les phénomènes de politisation et de démocratisation qui caractérisent la France de la seconde moitié du XIXe siècle8.
6Comment se déroule l’annexion de 1860 ? Quelles en sont les conséquences sur le paysage politique local ? Que nous apprend-elle sur le fonctionnement du régime impérial ? Nous nous efforcerons ici de comprendre la réussite mais aussi les limites de l’annexion, en termes d’acceptation d’une nouvelle souveraineté, de construction identitaire et mémorielle et d’apprentissage de nouvelles normes et procédures politiques. Cinq phases chronologiques ont été distinguées : le temps des hésitations (de janvier à mars), la marche vers le plébiscite (mars-avril), le vote et ses conséquences (d’avril à septembre), les débuts de l’intégration symbolique, puis ceux de l’intégration politique.
Une ville à la croisée des chemins
7Si les interrogations sur l’avenir du comté de Nice se multiplient dès 1859, les premiers mois de l’année 1860 sont marqués, comme en Savoie, par une forte effervescence politique9. Jusqu’à la confirmation officielle de l’annexion à la France, le 24 mars, des rumeurs contradictoires structurent les actes et les discours des différents partis et acteurs politiques locaux tout en entretenant un climat d’incertitude. L’espace politique voit alors s’affronter de plus en plus durement deux partis antagonistes : les « annexionnistes », ou « parti français », et les « anti-annexionnistes », ou « parti italien », organisés autour de journaux qui structurent la vie partisane.
8Selon le recensement du 31 décembre 1857, la ville compte 44 091 habitants, dont 5 524 Italiens non niçois, 2 461 hivernants étrangers et un millier de Français établis à Nice10. De nombreux républicains français se sont en effet réfugiés dans le comté après le 2 décembre 185111. Cette particularité de la population, due à la position frontalière de la ville, doit être prise en compte : certains Français, ceux qui ont fui le coup d’État de 1851, sont opposés au rattachement tandis que d’autres constituent au contraire un relais de l’action du parti annexionniste et de l’administration impériale. Les Italiens non niçois, pour leur part, sont majoritairement opposés à l’annexion. Chaque parti accuse l’autre d’être manipulé par des non Niçois et d’être, par conséquent, illégitime pour décider du sort de la ville, tout en se revendiquant comme étant le seul à représenter les « vrais » Niçois.
Les partisans de la France
9Le parti français commence à se structurer à Nice en décembre 1847 autour d’un groupe de libéraux, propriétaires d’un quotidien francophone, L’Écho des Alpes-Maritimes, rebaptisé ensuite L’Avenir de Nice12. En janvier 1860, son tirage est de 950 exemplaires, chiffre assez important pour une ville de 44 000 habitants13. Le journal est dirigé par deux Niçois, nés dans les années 1810 et qui ont fait leurs études en France : Augustin Carlone et Victor Juge. Ils sont épaulés par un publiciste français, Albin Mazon.
10Les trajectoires de Carlone et Juge montrent l’ouverture d’une partie des élites niçoises vers la France. Augustin Carlone est né à Nice en 1812, d’un père directeur de banque. Il fait ses études au collège royal de Tournon, en Ardèche. Reçu bachelier ès lettres, il étudie ensuite le droit à Paris, sans obtenir cependant sa licence. De retour à Nice, il est propriétaire et banquier. Il fonde L’Écho des Alpes-Maritimes dont le premier numéro sort en janvier 1848 avec Victor Juge, avant d’être élu conseiller municipal et vice-syndic de Nice en février 184914. Victor Juge, pour sa part, est né à Nice en 1817, sous le nom de Giuge, ensuite francisé15. Après des études à l’École des Mines de Paris, il exerce la profession d’ingénieur architecte à Nice16. Albin Mazon, enfin, est un publiciste de profession, originaire de l’Ardèche, où il a peut-être fait la connaissance de Carlone. Il rejoint L’Avenir de Nice en 1855. La majorité des autres membres du parti français appartiennent au monde du commerce ou de la banque. Certains sont nés en France tandis que d’autres y ont fait leurs études.
11Le quotidien, d’abord proche des idées libérales modérées, est favorable à la Deuxième République17. Critique envers Turin, il participe aux troubles de mai 1851 dus à la suppression des franchises du port de Nice18. Il accueille très froidement le coup d’État du 2 décembre 1851 et, en 1852, le quotidien soutient les républicains français réfugiés à Nice19. L’Avenir de Nice se montre dès lors hostile au gouvernement français et vigoureusement anti-bonapartiste. À partir de 1855, cependant, il devient progressivement favorable au régime de Napoléon III même si, en janvier 1860, le quotidien se qualifie de « libéral20 ».
12Le consul de France à Nice, Léon Pillet, joue également un rôle important au cours de cette période21. Orléaniste rallié au bonapartisme, il soutient activement les « idées françaises » à partir d’août 1859, mais fait preuve d’une certaine maladresse. Les relations du consul de France sont assez mauvaises avec les dirigeants de L’Avenir de Nice.
13Les arguments des annexionnistes révèlent leur conception de la nation. Ils justifient leur position en insistant tout d’abord sur l’importance des relations commerciales du comté avec la France22. À leurs yeux, la douane empêche les négociants de vendre leurs produits outre Var et freine le développement de l’agriculture, de l’industrie et du commerce dans le comté. Les difficultés et le coût des communications gêneraient les relations commerciales avec le Piémont, tandis que le Var et les Basses-Alpes constitueraient a contrario le débouché « naturel » des produits fabriqués à Nice. Les partisans de la France affirment également que les ouvriers de Nice et de l’arrière-pays vont massivement chercher du travail en France, notamment à Marseille et à Toulon, où ils sont attirés « par une communauté naturelle de langage, de mœurs et de sympathies23 ». L’annexion ne ferait donc que développer les liens économiques et culturels déjà existant entre le comté de Nice et la France, tandis que le maintien au sein du royaume de Piémont-Sardaigne ne pourrait que freiner le développement de la ville et du comté. Les partisans de la France reprennent ici, mais à leur profit, le discours libre-échangiste des théoriciens de l’unité italienne.
14Les partisans de la France dénoncent également le caractère artificiel de la frontière, le fleuve Var étant particulièrement facile à franchir tandis que les Alpes constituent à leurs yeux « la seule et véritable limite naturelle » avec l’Italie24. Plus facilement défendable, la frontière des Alpes mettrait le comté à l’abri des invasions. Cette dimension naturelle de la frontière est renforcée par des arguments ethnolinguistiques : la « race » et la langue des populations du comté sont provençales, donc françaises, car la « colonie marseillaise », dont la population du comté serait originaire, se serait arrêtée au cours de l’Antiquité à la « barrière naturelle » que forment les Alpes, entre la Gaule et l’Italie. Victor Juge estime ainsi que « l’ancienne désignation de Nice de Provence caractérise parfaitement la nationalité de notre pays25 ». L’idée selon laquelle les races et les langues doivent délimiter les frontières entre les États, idée souvent qualifiée de conception « allemande » de la citoyenneté26, est ici employée par les partisans de la France, à un moment où la notion de « frontière linguistique » est en train d’apparaître27 et où la notion de « nationalité » évolue fortement28.
15Les arguments historiques, en revanche, sont peu développés. Juge se contente de rappeler l’origine marseillaise de Nice et son appartenance à la Gaule Narbonnaise puis à la Provence jusqu’en 1388, avant d’évoquer le décret de la Convention Nationale du 31 janvier 1793 prononçant la « réunion » du comté à la République. La quête des origines historiques, pourtant importante dans l’argumentaire national contemporain, est ici peu développée29. Soit Victor Juge considère la nationalité française du comté de Nice comme évidente sur le plan historique, soit il l’estime au contraire trop discutable pour vouloir s’y attarder.
16Les partisans de la France accusent enfin le gouvernement de Turin d’avoir négligé le comté de Nice concernant, notamment les voies de communication. La supériorité de la législation, de l’administration et de l’éducation françaises, jugées plus efficaces, est a contrario particulièrement valorisée. En définitive, l’annexion à la France est présentée comme un événement à la fois naturel et profitable pour le comté de Nice et ses habitants.
Les partisans de l’Italie
17En 1860, les adversaires de l’annexion se regroupent essentiellement autour de deux quotidiens. Le premier, Il Nizzardo, a été fondé en 1853. Rédigé en langue italienne, il est de tendance « démocrate », proche des idées de Garibaldi et de Mazzini30. Le général italien né à Nice est un partisan indéfectible de l’italianité de sa ville natale. Le second journal, la Gazette de Nice, est dirigé par un riche propriétaire rentier, Gonzague Arson. Rédigé en langue française, il est plus proche de la gauche modérée et des idées de Cavour31. Il est soutenu par le gouvernement piémontais. Les partisans de l’Italie bénéficient, du moins dans un premier temps, de l’appui du gouverneur de la province de Nice, le marquis Maxime Di Montezemolo.
18Politiquement, le parti « anti-annexionniste » rassemble des tendances très diverses, qu’il s’agisse de l’extrême-gauche garibaldienne, des libéraux, ou de la droite conservatrice, qui se retrouvent sur le terrain anti-annexionniste pour des raisons distinctes. La droite, tout comme le clergé et l’aristocratie32, est profondément attachée à la dynastie de Savoie et donc opposée à l’idée de rompre les liens avec elle33. Les partisans de Garibaldi sont, pour leur part, convaincus de l’italianité de Nice, qui doit selon eux participer à l’unité de la péninsule. Les libéraux, enfin, rejettent le Second Empire en raison de son autoritarisme.
19Certaines catégories sociales se montrent plus particulièrement opposées à l’annexion. C’est notamment le cas des militaires34, des employés de l’administration, des ouvriers du port, des ecclésiastiques et surtout des hommes de lois, juges, avocats ou huissiers35. Les fonctionnaires et juristes niçois, formés à l’université de Turin, risquent en effet de voir leur position sociale profondément remise en cause en cas d’annexion, tandis que les ouvriers, sensibles aux idées de Garibaldi, sont partisans de l’unité italienne, à l’image de toute la gauche. Les ecclésiastiques, enfin, sont attachés à Rome et à leur appartenance au clergé italien.
20Des sociétés secrètes italiennes, comme l’Associazione unitaria italiana, ont peut-être agi en faveur du maintien de Nice en Italie36. Les adversaires de l’annexion reçoivent enfin le soutien de certains émigrés français, comme Alphonse Karr, ainsi que celui des membres de colonies étrangères, notamment russes et anglaises. Les émigrés et réfugiés politiques italiens, libéraux originaires de toute l’Italie qui se sont réfugiés dans le royaume de Piémont-Sardaigne après l’échec des révolutions de 1848-184937, paraissent avoir agi massivement contre le rattachement à la France.
21L’identité des principaux meneurs du parti italien demeure difficile à établir. Certains noms reviennent cependant dans la presse. C’est le cas de Benjamin Camous, médecin-major du second bataillon de la Garde nationale et membre de la rédaction du Nizzardo38, de Joseph Deidery, colonel de la Garde nationale, qui héberge Garibaldi lors de son passage à Nice en novembre 185939, de Maxime Cordero de Montezemolo, sénateur, gouverneur de la province de Nice à partir du mois de décembre et frère du député de la province, Henri de Montezemolo40, enfin d’Eugène Emanuel, rédacteur au Nizzardo41. Garibaldi est farouchement opposé à l’annexion de sa ville natale par la France du Second Empire et des manifestations pro-italiennes ont lieu lors de son passage à Nice, en novembre 1859. Les figures les plus actives sont cependant celles du conseiller municipal Henri Verani-Masin et du député Charles Laurenti-Robaudi.
22Les partisans de l’Italie s’efforcent de réfuter les arguments de leurs adversaires. En octobre-novembre 1859, la Gazette de Nice conteste les chiffres avancés par les annexionnistes visant à démontrer que la ville est négligée par Turin, paye trop d’impôts et a intérêt matériellement à être annexée à la France. Jusqu’au mois de mars, le quotidien affirme que l’annexion n’aura pas lieu, contrairement à ce qu’avance son adversaire. Dans cette perspective, il cite abondamment des journaux étrangers et des missives diplomatiques en se montrant particulièrement attentif à la position de l’Angleterre, effectivement opposée à tout accroissement du territoire français.
23Comme leurs adversaires, les partisans de l’Italie exposent leurs arguments dans un ouvrage, Nice et l’Italie, coécrit par Eugène Emanuel, publiciste au Nizzardo et « auteur de divers travaux historiques sur Nice » et H. G. Montferrier, rédacteur en chef de la Gazette de Nice42. Cet ouvrage, écrit par deux acteurs opposés à l’annexion, révèle leur conception de la « nationalité ».
24Contrairement à leurs adversaires, Emanuel et Montferrier utilisent massivement des arguments historiques pour démontrer l’italianité du comté de Nice. L’ensemble de son histoire, depuis l’antiquité romaine, est ainsi appelée en renfort pour démontrer que les Niçois ont toujours appartenu à « la grande famille italienne » et ont le droit de « participer à la nationalité italienne43 ». Les conflits de Nice avec les comtes de Provence, au cours du Moyen Âge, sont particulièrement montés en épingle tandis que la fidélité de la ville aux princes de Savoie au cours de l’époque moderne est fortement soulignée. L’annexion du comté de Nice, lors de la période révolutionnaire, est présentée comme un acte arbitraire et non comme une adhésion volontaire de la population à la France.
25En se fondant sur les travaux de Giovenale Vegezzi-Ruscalla consacrés à la nationalité de Nice, les anti-annexionnistes soulignent que le dialecte niçois s’est italianisé et ne peut plus être considéré comme du provençal44. Ils rappellent que l’italien est la langue officielle de Nice depuis le XVIe siècle et que de nombreux auteurs originaires du comté ont écrit en italien, qui est la « langue naturelle » des Niçois45.
26Les figures de Catherine Ségurane et de Giuseppe Garibaldi sont largement mobilisées et mises au service de l’italianité du comté. Catherine Ségurane est une lavandière qui, en 1543, lors du siège franco-turc de Nice, aurait arraché un drapeau aux assaillants. Incarnant le « patriotisme populaire » local46, cette figure féminine allégorique symbolise ici la nationalité et l’attachement de la ville à la Maison de Savoie. Le rôle du « héros des deux mondes » dans la construction de l’unité italienne est présenté comme une autre preuve irréfutable de l’attachement de la ville à l’Italie. L’interaction de l’identité locale avec l’identité nationale se fait ici au bénéfice d’une nationalité italienne fortement affirmée.
27Les arguments des partisans du maintien de Nice au sein de l’Italie montrent que ceux-ci, contrairement à leurs adversaires, insistent sur l’histoire de la ville et de son territoire pour justifier leur refus de l’annexion. Ils s’efforcent avant tout de prouver que Nice est italienne par son passé et sa culture. La dimension sentimentale, patriotique, l’emporte, dans leur discours, sur les avantages matériels et économiques que la ville peut espérer de son annexion.
Une ville divisée
28La situation politique dans le comté commence à se tendre à partir de 1859. Dès la fin de l’année, face aux affirmations du parti français, les adversaires de l’annexion multiplient les initiatives destinées à montrer leur opposition. Le 28 septembre, le conseil municipal de Nice vote, sur proposition de deux de ses membres, Henri Verani-Masin et Charles Laurenti-Robaudi, une adresse à Victor-Emmanuel II proclamant l’attachement de la ville au roi et à la patrie italienne. Le 20 octobre, les officiers de la Garde nationale félicitent le conseil municipal pour sa déclaration et proclament leur fidélité au roi, à la patrie et à la dynastie de Savoie47. Le lendemain, les représentants des sociétés ouvrières de la ville publient un texte allant dans le même sens48.
29L’atmosphère devient particulièrement confuse entre janvier et mars 1860, en raison des nombreuses informations et rumeurs contradictoires véhiculées par la presse, qui affirment ou démentent la proximité de l’annexion. La population, pour autant que l’on puisse en juger, est divisée face à la perspective de l’annexion. Les sources se montrent très contradictoires. À la fin du mois de mars 1860, le préfet du Var affirme que la majorité des populations rurales attend l’annexion avec impatience, tandis qu’une minorité subirait l’influence des propriétaires anti-annexionnistes. En ville, les petits commerçants, les ouvriers non politisés et les principaux négociants seraient favorables au changement de souveraineté tandis que la bourgeoisie, les hommes de loi et les classes populaires influencées par les idées mazziniennes y seraient opposées49. Selon d’autres sources, cependant, les élites auraient été indifférentes, voire hostiles, à l’annexion, tandis que la majoriré de la population aurait été plutôt favorable à l’Italie50. La confrontation des sources indique que la population est hésitante, voire hostile, au mieux divisée, sur la question de l’annexion.
30L’administration piémontaise joue un rôle ambigu au cours de cette période. Jusqu’à la fin du mois de mars 1860, le gouvernement piémontais et le gouverneur Maxime Di Montezemolo encouragent les tendances anti-annexionnistes, à Nice comme en Savoie51. Cavour pense alors pouvoir conserver les deux provinces et des agents piémontais agissent dans le comté de Nice contre le changement de souveraineté, tandis que l’administration réagit vivement aux articles de L’Avenir de Nice. Albin Mazon est expulsé à la fin du mois de janvier 1860 en raison de ses prises de position pro-françaises. À la suite de cette affaire, le marquis Maxime Di Montezemolo interdit au journal toute discussion sur l’annexion52. Le quotidien poursuit néanmoins sa campagne et, le 10 février 1860, il est saisi dans ses bureaux, à la poste et dans les cafés53. Ce n’est qu’après le 24 mars, date de la signature du traité de Turin, que Cavour et l’administration piémontaise agissent en faveur de la réussite du vote mais, même alors, les autorités demeurent très vigilantes afin d’éviter des troubles. Le 25 mars 1860, un ressortissant français qui protestait contre des partisans de l’Italie criant devant le Théâtre Tiranty « À bas l’empereur » et « Vive Orsini », est arrêté par les carabiniers et les agents de police54. L’attitude de l’administration piémontaise reflète ici les hésitations de Cavour, qui tente alors de « sauver Nice55 ».
31Les élections municipales et provinciales qui se déroulent à Nice les 15 et 22 janvier 1860 provoquent une première confrontation ouverte entre les partisans de la France et ceux de l’Italie. Ces derniers s’efforcent de profiter de ces scrutins pour démontrer l’opposition de la population à l’annexion. L’Avenir de Nice refuse de considérer ces votes sous un angle politique56. Il publie néanmoins la liste d’un Comité du Commerce, sur laquelle figurent les noms de plusieurs partisans de la France57. Les résultats sont globalement favorables aux anti-annexionnistes58, mais ils doivent être pris avec précaution. Outre que le suffrage est censitaire, la participation est particulièrement faible, avec un taux de 46,4 % seulement59. Les élections au conseil provincial, équivalent du conseil général français, sont également défavorables aux annexionnistes. Le 12 février, le syndic de Nice, François Malausséna, alors hostile au changement de souveraineté, est reconduit dans ses fonctions60. Les partisans de l’annexion ne baissent pas les bras et, comme souvent au XIXe siècle, se servent du théâtre pour faire connaître leurs opinions61. Le 5 février, au Théâtre Tiranty, fréquenté par le parti français, la salle applaudit l’orchestre quand il joue « l’air de la reine Hortense », hymne officieux du Second Empire, lors d’un entracte62.
32Les partisans de l’Italie s’efforcent de démontrer l’attachement de la population niçoise au royaume de Piémont-Sardaigne et à la Maison de Savoie. Le 6 février, une manifestation anti-annexionniste rassemblant au moins 400 personnes se déroule au Théâtre Royal, fréquenté par le parti italien : l’orchestre joue Viva il Re, tandis que le parterre crie « Vive l’Italie », « Vive Victor-Emmanuel », « Vive Cavour », « Viva Nizza italiana » et « Abbasso il tiranno63 ». Le 8 février, toujours au Théâtre Royal, un concert est donné à l’occasion de la fête du Statuto, la Constitution du royaume de Piémont-Sardaigne. La fille de Garibaldi, Teresa, ainsi qu’un ancien colonel de la Garde nationale, Joseph Deidery, et le député Charles Laurenti-Robaudi, tous anti-annexionnistes, sont présents. Des cris de « Vive le Roi », « Vive l’Italie » et « Vive Nice italienne » sont lancés par le public. L’orchestre joue l’hymne national piémontais et les spectateurs se découvrent lorsqu’un buste du roi, couronné de fleurs et entouré de lumières, apparaît au centre de la scène. Signe de l’état de tension qui règne alors, des incidents éclatent en ville64.
33Le 11 mars, enfin, une messe est célébrée par l’abbé Albert Cougnet à l’église Saint-Jean-Baptiste, dite église du Vœu, pour obtenir de Dieu qu’il éloigne la « catastrophe » qui menace la ville, c’est-à-dire l’annexion65. Cette église avait été édifiée pour remercier la Vierge d’avoir protégé la ville contre le choléra lors de l’épidémie de 183266. Des cocardes italiennes et des bulletins imprimés « Viva Nizza italiana » et « Viva il Re Galantumo », surnom de Victor-Emmanuel II, sont distribués pour l’occasion par des vendeurs du Nizzardo et, après la cérémonie, une manifestation d’au moins 500 personnes défile de l’église à l’hôtel de ville. Arrivés devant ce dernier, les manifestants réclament le drapeau de la commune et le buste du roi, qui leur sont refusés. Un membre du défilé parvient cependant à pénétrer dans les locaux de la garde nationale, brandit un buste du roi et lui fait faire des saluts à la foule, qui l’acclame. Dans l’après-midi, une farandole d’une centaine de personnes au moins parcourt la ville. La soirée est marquée par des troubles au Théâtre Tiranty : tandis que des partisans de l’Italie crient « Viva l’Italia » et « Viva Nizza italiana », ceux de la France répliquent « Vive la France » et « Vive l’Empereur ». Une rixe éclate dans le parterre et un piquet de soldats doit rétablir l’ordre67.
34Outre la division de la population, ces manifestations montrent la volonté des deux partis d’occuper l’espace public et de prouver que la population niçoise est favorable ou opposée au changement de souveraineté. Faute de sources, leurs compositions et leur importance demeurent impossibles à connaître. Chaque parti dénie toute représentativité au parti adverse. Le parti français accuse les manifestations du parti italien d’être organisées par le gouvernement piémontais ou des sociétés secrètes italiennes et d’être composées essentiellement d’enfants et d’employés de l’administration. Les manifestations anti-annexionnistes ne rassembleraient qu’une minorité de « Niçois » et n’auraient donc aucune valeur68. Les cris poussés par les partisans de l’Italie montrent un réel attachement à la monarchie piémontaise et à la nation italienne, autant qu’un fort rejet du despotisme bonapartiste.
La marche vers le plébiscite
35Le 14 mars 1860, L’Avenir de Nice annonce « avec certitude » que l’annexion du comté de Nice et de la Savoie à la France est « définitivement consentie » par le gouvernement piémontais et engage la population à garder son calme jusqu’à l’arrivée des troupes française69. Un traité secret est conclu à Turin le 14 mars 1860 et le consul de France à Nice, Léon Pillet, en a vraisemblablement informé les rédacteurs du quotidien. Le 26 mars, L’Avenir de Nice annonce la signature officielle du traité d’annexion à Turin deux jours auparavant, ainsi que la tenue imminente d’un plébiscite70. Un envoyé spécial de l’empereur, chargé de préparer l’annexion, le sénateur corse Pierre-Marie Pietri, ancien préfet de police de Paris, arrive à Nice le même jour71. Le 1er avril, les premières troupes françaises défilent à Nice72. L’annexion étant désormais certaine, les partis et acteurs politiques revoient leur position dans la perspective du futur changement de souveraineté.
Divisions, pressions et ralliements
36La perspective de l’annexion provoque une division de la municipalité. Le 15 mars, la junte municipale, qui constitue l’exécutif du conseil communal, décide d’envoyer au roi Victor-Emmanuel II une députation et une adresse lui demandant de ne pas consentir à la cession du comté ou, à défaut, de faire en sorte que la ville et le comté soient « neutralisés » tout en demeurant sous la souveraineté de la Maison de Savoie73. Cette proposition avait été également avancée par Cavour et par l’ancien ministre piémontais Luigi Des Ambrois de Névache. Le lendemain, huit des quarante membres du conseil municipal protestent contre la décision de la junte et, quelques jours plus tard, le conseiller municipal Auguste Gal, partisan de la France, donne sa démission74. Les trois-quarts du conseil municipal, dont le syndic François Malausséna, restent donc opposés au changement de souveraineté. Ses délégués sont reçus le 20 mars par Cavour et Victor-Emmanuel II, qui leur exposent l’impossibilité d’accéder à leur demande75.
37Le sénateur Pierre-Marie Pietri, envoyé spécial de l’empereur à Nice pour préparer le plébiscite d’annexion, joue un rôle décisif au cours de cette période. Arrivé à Nice le 26 mars et accompagné de son secrétaire Nicolas Rapetti, chef de bureau au Ministère d’État, Pietri entreprend de rassurer les différents acteurs locaux réticents en recevant leurs doléances et leurs vœux pour la période succédant à l’annexion76. En avril, plusieurs commerçants de la ville lui remettent une pétition à l’Empereur « pour le prier de prendre en considération les intérêts du commerce qui, momentanément pourrait avoir à souffrir des conséquences transitoires de l’annexion77 ». Il reçoit de nombreuses délégations des différentes corporations et corps constitués de la ville. Le 10 avril, il accueille les curés des paroisses de Nice, une délégation des membres du chapitre de la cathédrale de la ville et le syndicat des courtiers et agents de change78. L’Avenir de Nice publie tous les comptes-rendus de ces visites afin de montrer à la population que les autorités constituées, rassurées, soutiennent désormais l’annexion. L’action de Pierre-Marie Pietri paraît avoir été couronnée de succès. Peu de jours avant le plébiscite, Louis Lubonis, gouverneur provisoire de Nice, rend hommage à son action79. Albin Mazon, pour sa part, rapporte que le sénateur se mit en rapport avec toutes les « personnes notables » du pays et parvint à rallier les indécis et les hostiles80. Comme l’a souligné Michel Bottin, l’administration impériale met alors en œuvre une politique de « conciliation » avec les opposants à l’annexion, afin d’assurer la réussite du changement de souveraineté81.
38Comme le sénateur Armand Laity en Savoie, Pierre-Marie Pietri a joué un rôle décisif dans le succès du plébiscite82. Envoyé par Napoléon III, Pietri peut parler en son nom et bénéficie d’une légitimité de parole que n’ont pas les membres du parti français. Le caractère officieux de sa mission lui permet de ne pas brusquer les autorités piémontaises et les partisans de l’Italie. Corse et italianophone, bonapartiste de gauche favorable à la cause italienne83 et connu pour ses talents de diplomate, il est également plus à même que le consul de France de rallier les indécis et les membres du parti italien. La mission du sénateur permet ainsi à l’Empire de rallier les notables conservateurs ou libéraux, le clergé et les corporations afin d’assurer le succès du plébiscite. Surtout, par ses promesses, Pietri parvient à rassurer les notables dont le pouvoir d’influence et d’entraînement sur le reste de la population, notamment en milieu rural, reste déterminant alors que 65 % de la population du comté vit dans l’arrière-pays.
39Les autorités piémontaises se montrent elles aussi très actives au cours de cette période. La proclamation de Victor-Emmanuel II, le 1er avril 1860, est particulièrement décisive. Le souverain y délie les populations de Savoie et du comté de Nice de leur serment de fidélité et annonce officiellement la tenue d’un plébiscite84. Les légitimistes ne peuvent plus se prévaloir de leur fidélité au roi pour refuser l’annexion, même si le souverain n’appelle pas explicitement à voter en faveur du changement de souveraineté.
40Victor-Emmanuel II assure qu’il regrette de devoir se séparer de provinces « qui ont longtemps fait partie des États de [ses] ancêtres et auxquelles tant de souvenirs [le] rattachent », mais il expose que les changements territoriaux provoqués par les guerres d’Italie justifient les revendications de Napoléon III. Le souverain souligne que « le développement du commerce, la rapidité et la facilité des communications augmentent chaque jour davantage l’importance et le nombre des rapports de la Savoie et de Nice avec la France », tout en assurant que « de grandes affinités de race, de langage et de mœurs rendent ces rapports de plus en plus intimes et naturels ». Victor-Emmanuel II utilise donc les mêmes arguments économiques et ethnolinguistiques que le parti français afin de souligner le caractère inévitable de l’annexion.
41Le plébiscite doit conférer une légitimité populaire, voire démocratique, à l’annexion. Le roi de Piémont-Sardaigne assure que le changement de souveraineté aura lieu « avec l’adhésion des populations et la sanction du Parlement » et sera « le résultat de votre libre consentement ». Le plébiscite d’annexion répond ainsi aux votes des populations d’Italie centrale85. Pour ne pas gêner le scrutin, Victor-Emmanuel II annonce la nomination de fonctionnaires originaires du comté, jusqu’au changement effectif de souveraineté. Louis Lubonis, avocat né à Nice en 1815, devient gouverneur provisoire de la province le même jour86. On peut penser, selon ce texte, que le plébiscite doit être libre et refléter la volonté des populations, le remplacement des fonctionnaires par des Niçois constituant un gage de neutralité de la part de l’administration piémontaise.
42Le souverain de Piémont-Sardaigne souligne enfin que l’annexion doit créer un lien particulier entre la France et l’Italie, « un lien de plus entre deux nations dont la mission est de travailler de concert au développement de la civilisation87 ». Il s’agit de sortir l’événement de son cadre strictement local pour l’insérer dans celui, plus global, des relations entre la France et l’Italie. L’enjeu dépasse ainsi l’avenir du seul comté de Nice, qui devient un gage de l’amitié entre les deux nations.
43Le 3 avril, L’Avenir de Nice change de titre pour devenir Le Messager de Nice, en hommage au journal du même nom publié dans la ville sous le Premier Empire. Pour le quotidien, la proclamation du roi signifie que « le temps des luttes et des épreuves est […] arrivé à son terme88 ».
44L’administration provisoire, composée de Niçois, se met en place mais le nouveau gouverneur Lubonis commet rapidement un impair. S’adressant à la population le 5 avril, pour confirmer la tenue d’un plébiscite et appeler les habitants au calme et à l’obéissance, il demande aux opposants à l’annexion de cesser leur activité au nom de l’intérêt de la patrie et de se soumettre à la volonté du roi89. Le texte provoque aussitôt la désapprobation du gouvernement piémontais et la colère du parti italien : par son caractère trop ouvertement favorable au changement de souveraineté, le gouverneur provisoire contredit la position officielle de Turin, selon laquelle les populations concernées doivent pouvoir voter en toute indépendance90. La polémique montre l’ambigüité qui entoure d’ores et déjà le plébiscite : officiellement, les populations concernées doivent pouvoir choisir librement mais, officieusement, le gouvernement piémontais souhaite que le résultat du vote soit positif. Encore faut-il ne pas le dire trop clairement. Le 8 avril, le syndic de Nice, François Malausséna, appelle lui aussi à accepter l’annexion par dévouement envers le roi et la cause de l’unité italienne91.
45La proclamation du syndic, comme celle du gouverneur provisoire, tous deux ralliés au changement de souveraineté auquel ils étaient d’abord hostiles, permettent de bien cerner l’évolution des élites : ayant compris que l’annexion allait se produire, elles s’y rallient par pragmatisme, au nom de leur fidélité envers le roi et de leur attachement à la cause italienne. Le rattachement à la France est, dès lors, présenté comme un sacrifice nécessaire mais douloureux, fait sur l’autel de l’unité de la péninsule. Les deux textes évoquent peu la francité linguistique ou culturelle des habitants du comté de Nice.
46À la suite de ces déclarations, la plupart des autorités et des notabilités apportent officiellement leur soutien à l’annexion. Le 9 avril, l’évêque de Nice Jean-Pierre Sola publie une circulaire adressée aux curés dans laquelle il leur demande de recommander aux fidèles de voter en faveur de l’annexion92. La « communauté de mœurs, de langage et d’intérêts commerciaux » entre l’arrondissement de Nice et la France est soulignée. Le lendemain, les curés des paroisses de la ville se rendent auprès de Pierre-Marie Pietri pour l’assurer de leur dévouement envers l’empereur93. Le 14 avril, la communauté juive de Nice, regroupée au sein de l’Université Israélite, apporte son soutien au changement de souveraineté94. De très nombreux notables de l’arrière-pays se rendent auprès de Pietri pour faire connaître leur ralliement, tandis que plusieurs communes, corporations, cercles ou corps constitués font publier des adresses à l’empereur, dans lesquelles ils expriment leur satisfaction d’être bientôt réunis à la France95. La majorité des autorités sociales se prononcent et agissent à présent en faveur du changement de souveraineté. Le gouvernement français est parvenu à s’assurer de leur soutien, indispensable pour assurer la réussite du plébiscite, mais aussi la gestion et la direction du comté de Nice après le changement de souveraineté.
La préparation du vote
47Le soutien de la plupart des notables étant acquis, il reste à faire voter une population qui, pour la première fois, va s’exprimer dans le cadre du suffrage universel. Un Comité français, composé de propriétaires et de commerçants, est fondé le 25 mars en vue du plébiscite96 et un Comité Niçois, appelé également Comité central d’annexion ou Comité d’annexion, est créé le 12 avril97. Dirigé par le négociant Victor Tiranty, il met en place des « comités spéciaux » dans chaque paroisse, afin de réunir et de conduire les électeurs aux urnes98. Ces comités, dominés par les notables et les curés, jouent un rôle déterminant dans l’organisation du vote, notamment dans l’arrière-pays99. La date tardive de la formation de ces structures indique que leur but est essentiellement d’encadrer le vote en s’appuyant sur les autorités sociales traditionnelles, dans le cadre familier de la paroisse. Ils ne sont pas chargés de convaincre les électeurs, mais bien de les canaliser, afin que le vote soit une manifestation à la fois massive, enthousiaste et digne, c’est-à-dire conforme aux pratiques et à l’idéologie politiques du Second Empire.
48Le parti français s’efforce également de convaincre les électeurs. Une brochure intitulée Les avantages de l’annexion du comté de Nice à la France. Conversation entre Jean et le père Jacques est imprimée et distribuée afin de souligner les avantages matériels que la population recueillera du changement de souveraineté100. Une autre, Opinion du père Simon sur Nice État indépendant, met en scène un prêtre partisan de l’annexion101. Une cantate, intitulée l’Hymne à la France ou Chant des Niçois, est reproduite par la presse. Ses paroles, mises en musique par le compositeur français Léopold Amat, sont censées provenir d’une chanson populaire102. L’annexion y est présentée comme un retour à la mère patrie (« rentrer au foyer maternel »), tandis que la séparation de Nice et de la France est vue comme un accident et une anomalie auxquels l’annexion met fin (« Français et Niçois sont des frères, malgré plusieurs siècles d’adieu »). Fait nouveau, la cantate mobilise les souvenirs du Premier Empire (« L’enfant chéri de la Victoire, c’est un Niçois, c’est Masséna »). Elle rappelle enfin les origines provençales de Nice (« Nice, fille de Marseille103 »). Cette cantate est chantée lors des différentes manifestations qui se déroulent au moment du plébiscite. À côté de La Reine Hortense, elle mobilise l’identité et l’histoire locales en faveur de l’annexion104.
49Les demandes de récompenses ou de remboursement adressées à l’administration française après l’annexion permettent de connaître l’identité de plusieurs agents électoraux. Le maire de Puget-Théniers, Alexandre Ginésy, soutient ainsi activement le « mouvement annexionniste105 » et réclame au préfet une place de juge d’arrondissement pour son fils, qui appartient à la magistrature piémontaise. Des agents de conditions plus modestes s’efforcent également de tirer profit de la préparation du vote. Un instituteur de Guillaumes membre du Comité spécial d’annexion du canton, J. Jalabert, est envoyé par le sénateur Pietri et le consul de France dans l’arrondissement de Puget-Théniers au moment du plébiscite. Il demande en contrepartie un bureau d’écrivain public106. Le maire de Sospel, pour sa part, écrit au préfet pour obtenir le remboursement d’une somme de 201 francs dépensés par un agent employé par le sénateur Pietri pour l’annexion, sur la demande d’un délégué du Comité d’annexion de Nice. Le président du comité, Tiranty, a également promis à cet agent qu’il serait remboursé107. Le comte Eugène Spitalieri de Cessole use quant à lui de son influence et de sa fortune pour gagner de nombreux partisans à la France108.
50Les partisans de l’annexion s’efforcent d’inscrire le futur changement de souveraineté dans l’espace public en organisant une fête pour accueillir les deux premiers bataillons français qui arrivent à Nice, le 1er avril109. Les troupes sont ensuite casernées à la nouvelle manufacture des tabacs, route de Villefranche, à l’écart de la ville. Ces festivités permettent de franciser et d’impérialiser le cadre urbain par des cocardes et drapeaux français et par l’édification d’un arc de triomphe surmonté d’un aigle, symbole de l’Empire. Elles marquent une première prise de possession symbolique de la ville, mais seulement par les partisans de la France. Des incidents se déroulent d’ailleurs le soir même : des opposants à l’annexion parcourent la ville précédés d’une musique, les vitres d’un café annexionniste sont brisées et des hommes sifflent en passant devant l’Hôtel de France, où réside le sénateur Pietri110. Après la fête de la journée, les partisans de l’Italie ont organisé une contre-manifestation afin de se réapproprier le territoire municipal.
51Les partisans de la France commettent par ailleurs un certain nombre de maladresses, qui contribuent à entretenir une atmosphère de tensions. Le ton très polémique de L’Avenir de Nice lui attire des reproches de la Gazette de Nice, mais aussi du gouverneur Louis Lubonis et du consul de France Léon Pillet111. La violence des articles du journal annexionniste empêche la « conciliation » entre les différents partis que les autorités s’efforcent de promouvoir. Les notables conservateurs éprouvent en outre des réticences à adhérer à un parti dont les membres les plus éminents, Juge et Carlone, sont d’anciens partisans de la Seconde République.
Résistances et oppositions
52Après le 14 mars et l’annonce « officieuse » de l’annexion, les partisans de l’Italie luttent contre le rattachement, selon des modalités et des stratégies qui révèlent leur perception de l’événement et les représentations qu’ils contribuent à en forger. Des manifestations anti-annexionnistes sont organisées par des comités, signe que l’opposition se structure et s’organise. Un Comité national de Nice d’une trentaine de personnes au moins, composé de libéraux attachés à la dynastie, se déclare « permanent » vers le 17 mars et décide de se réunir tous les soirs112. Il organise une manifestation lors du départ des délégués de la junte municipale chargés de remettre l’adresse de la municipalité au roi. 250 personnes, au moins, les acclament lors de leur passage place Victor (actuelle place Garibaldi), aux cris de « Viva Nizza italiana » et « Viva il Re galantuomo113 ». Le 18 mars, une tentative de manifestation échoue au Théâtre Tiranty, défendu par des soldats et des carabiniers, mais une centaine de personnes, précédées d’une trompette, parcourent la ville en proférant des menaces contre les partisans de la France114.
53Les manifestations se transforment à la fin du mois de mars, lorsque le changement de souveraineté devient certain. Il ne s’agit plus alors pour les manifestants de lutter contre l’annexion, mais plutôt de marquer leur attachement à l’Italie et leur hostilité envers les partisans du changement de souveraineté, assimilés à des traîtres. Le 28 mars, un attroupement de 2 000 à 3 000 personnes, selon la Gazette de Nice, se produit devant les bureaux de L’Avenir de Nice : des cris « à bas l’Avenir » et « à bas les renégats » sont proférés, tandis que des manifestants essaient d’arracher l’enseigne de l’imprimerie, avant d’en être empêchés par des carabiniers115. Le 29 mars, plusieurs milliers de personnes, selon la Gazette, parcourent la ville avant de donner une sérénade à un adversaire de l’annexion, le capitaine Pagani116. Le même jour, un second rassemblement se dirige vers la maison de l’ancien colonel Joseph Deidery, où loge la fille de Garibaldi. Lorsque celle-ci paraît à la fenêtre en agitant un drapeau italien, elle est acclamée par la foule. Les dernières manifestations, les 30 et 31 mars, se déroulent à l’occasion du départ des troupes piémontaises et rassemblent, selon la Gazette, 3 000 à 4 000 personnes. Là encore, la foule acclame « Nice italienne », l’armée piémontaise et le roi117. Ces manifestations ne peuvent influer sur le déroulement des événements. Elles indiquent que leurs auteurs et ceux qui y participent cherchent à prouver et à montrer leur refus du changement, inéluctable, de souveraineté.
54D’autres micro-événements montrent la persistance des oppositions. À la fin du mois de mars, deux sociétaires du Cercle philharmonique de Nice refusent que des fonds soient alloués à la réception des officiers français et les autres membres de la direction du cercle doivent prendre ces frais à leur charge118. Vers la même date, des officiers de l’armée piémontaise demandent réparation à Victor Juge d’un article qu’ils jugent injurieux à leur égard et le publiciste doit présenter des excuses en signant une rétractation119.
55Les élections législatives du 25 mars 1860 constituent l’un des derniers moments d’affrontement entre les deux partis. Les seuls candidats pour les deux circonscriptions de Nice sont Joseph Garibaldi et Charles Laurenti-Robaudi, adversaires déclarés de l’annexion. L’Avenir de Nice, peut-être échaudé par les mauvais résultats de l’élection municipale, ne soutient pas de candidat et appelle à l’abstention120. Il Nizzardo, en revanche, mène une campagne très active afin que le nombre de votants soit suffisamment élevé pour rendre le scrutin valide121. Soit que les électeurs aient suivi la consigne de L’Avenir, soit qu’ils aient considéré que ces élections étaient à présent inutiles, le nombre de votants n’est pas suffisant pour valider les résultats : Garibaldi ne recueille que 407 voix pour 436 votants et 1 598 inscrits, soit une participation de 27,3 % ; Laurenti-Robaudi n’obtient que 273 voix sur 285 votants et 1 098 inscrits, soit une participation de 26 %122. Les résultats du second tour ne sont guère meilleurs : 430 suffrages pour Garibaldi et 129 pour Laurenti-Robaudi123.
56Malgré la faiblesse de leur légitimité, les deux députés de Nice font connaître au parlement du Turin l’opposition de leurs électeurs. Le 6 avril, Garibaldi déclenche un incident à la Chambre des députés en essayant d’interpeller le ministère au sujet de la cession de Nice à la France124. Le 12 avril, les deux députés dénoncent vivement les modalités du déroulement de l’annexion125. Le Messager publie en réponse une protestation des électeurs de Nice, qui désavouent les deux députés126.
57Le maintien du comté de Nice au sein de l’Italie devenant de moins en moins probable, la Gazette de Nice propose à nouveau, le 31 mars, que la ville et le comté soient érigés provisoirement en État indépendant, le temps que les tensions au sein de la ville s’apaisent et que les intérêts entre la France et le comté soient suffisamment proches pour que l’annexion se déroule « naturellement127 ». Il ne s’agit pas de refuser l’annexion, mais de la repousser à une date ultérieure. La proposition de la Gazette rencontre peu d’échos. L’évêque de Nice, Mgr Sola, dénonce les « menées par lesquelles des hommes aussi ennemis de l’Italie que de la France, et plus ennemis encore de la prospérité des Niçois, voudraient faire de cette province une république128 ». L’Avenir de Nice, pour sa part, refuse de « faire de Nice une nouvelle Venise, république oligarchique, livrée en pâture à des patriciens, plus ou moins munis de parchemins, aux clients et aux serviteurs bénévoles qui se seraient enrôlés à leur suite129 ». Le Second Empire est présenté comme un régime plus démocratique que ne le serait un comté de Nice gouverné par ses notables.
58À l’approche du plébiscite, les adversaires de l’annexion hésitent sur la stratégie à suivre. Au milieu du mois de mars, le Comité National de Nice envoie des agents dans l’arrière-pays pour préparer le vote130. Le 5 avril, cependant, il suspend ses activités en mettant en cause la présence des troupes françaises et la proclamation du gouverneur Lubonis, qui empêchent, selon lui, un déroulement normal du vote131. Le 9 avril, il appelle les électeurs à s’abstenir en dénonçant « l’illégalité de toutes les opérations relatives au plébiscite132 ». La Gazette de Nice dénonce pour sa part la « pression la plus intolérable » exercée sur les syndics et sur les « citoyens réputés jouir de quelques influences ». Affirmant que ses adversaires répandent « le bruit qu’on dresse des listes de proscription », elle recommande également l’abstention133. Il Nizzardo, enfin, dénonce dès le 3 avril les conditions dans lesquelles doit se dérouler le plébiscite. Les anti-annexionnistes renoncent donc à soutenir le « non ».
Le plébiscite et ses conséquences
59Le plébiscite des 15 et 16 avril constitue la clef de voûte du processus d’annexion. Le vote doit légitimer le changement de souveraineté aux yeux de l’opinion publique internationale et du parlement de Turin. Il est indispensable, pour Napoléon III comme pour Cavour, que le résultat du plébiscite soit le plus unanime possible134. Pour ce faire, les Italiens établis à Nice mais qui ne sont pas originaires de la ville ou du comté, et qui sont majoritairement hostiles à l’annexion, sont écartés du scrutin135. Seuls les « citoyens âgés de 21 ans au moins, appartenant par leur naissance ou leur origine au comté de Nice, habitant la commune depuis six mois, et n’ayant pas subi de condamnations pénales » sont autorisés à voter. Les six mois de résidence ne sont pas obligatoires pour les « Niçois notoirement connus qui rentreront pour se faire inscrire et prendre part au vote136 ». Il s’agit de réserver le vote aux seuls « vrais » Niçois, ce qui constitue une première exclusion de l’arrondissement de Nice hors de la communauté politique du royaume de Piémont-Sardaigne. La date du vote n’est révélée qu’une semaine auparavant, ce qui laisse très peu de temps aux adversaires du rattachement pour s’organiser.
60Au cours de la campagne, les partisans de l’annexion insistent tout particulièrement sur l’importance de la participation, d’autant plus que leurs adversaires appellent à l’abstention. Le jour de vote, Le Messager de Nice souligne que « plus nous serons unanimes, plus nous assurerons la stabilité de notre nouvelle situation137 ». Le quotidien appelle ses adversaires à voter pour l’annexion au nom d’un « patriotisme bien entendu », puisque « voter aujourd’hui pour la France, c’est aussi voter pour l’Italie », en lui permettant de réaliser son unité138. Le journal annexionniste intègre ainsi l’intérêt local à des enjeux nationaux qui le dépassent.
Le déroulement du vote et les résultats
61Comme tous les scrutins du Second Empire, le plébiscite d’annexion est un vote fortement encadré139. C’est en outre la première fois que les habitants du comté votent au suffrage universel et, à Nice, le nombre d’inscrits passe de 2 700 (législatives de mars 1860) à 11 000 personnes. À côté des curés, des syndics et des notables, des « capitaines de quartiers » désignés par la municipalité sont chargés de faire inscrire les électeurs, notamment les ouvriers, sur les listes électorales140. Le premier jour du vote, à Nice et dans l’arrière-pays, les électeurs des paroisses rurales se rendent ensemble aux urnes, en défilés, avec des drapeaux et des tambours, précédés du curé, des notables, du syndic ou du capitaine de quartier, dans une ambiance de fête. Ils portent des cocardes et brandissent leur bulletin à leur chapeau141. Des farandoles, des musiques et des cris de « Vive la France ! Vive l’Empereur ! » sont signalés. Le vote, tel qu’il est décrit dans Le Messager de Nice, est festif et unanimiste, proche de la manifestation. Il vise à montrer la cohésion de la communauté et son consentement entier et public à l’annexion. Cette ambiance festive a un coût. Six mois après le vote, plusieurs agents électoraux de Sospel essaient de se faire rembourser les sommes qu’ils ont dépensées le jour du plébiscite. L’examen du document fait apparaître l’importance des dépenses de musique, de vin et de pain142.
62Le soir du second jour de vote, le 16 avril, une manifestation de 8 000 à 10 000 personnes, selon Le Messager, précédée de la musique et de la garde nationale, défile à Nice en chantant L’Hymne à La France. La foule porte des drapeaux et des torches, ainsi qu’un écriteau annonçant les résultats du vote à Nice : 6 810 oui et 11 non. La manifestation s’arrête sous les fenêtres de l’Hôtel de France où réside le sénateur Pietri. Une députation lui annonce officiellement les résultats143. Toute la ville vient ainsi proclamer sa décision au représentant de la France, qui semble d’ores et déjà avoir supplanté le gouverneur provisoire de la province en termes de légitimité.
63Le 19 avril, un grand dîner est donné par Pierre-Marie Pietri à l’Hôtel de France en présence des notables de la ville. Au dessert, Louis Lubonis porte un toast à la France et à Napoléon III en invoquant les « grandes affinités de race, de langage et de mœurs » entre le comté et la France. Le plébiscite sanctionne une double union : à la nation française et à la personne de l’empereur, « qui par son puissant génie a su élever la France à un si haut degré de prospérité et de gloire144 ».
64Les résultats du vote paraissent globalement satisfaisants pour l’administration : le taux de participation atteint 84,4 % et, par rapport aux votants, le oui obtient 99,3 % contre 0,6 % pour le non. 0,1 % des bulletins étaient blancs ou nuls. Seules trois communes se font remarquer par un nombre élevé de votes négatifs : Castellar (58), Gorbio (26) et Menton (54). À Nice, le nombre de bulletins blancs ou nuls, 25, est supérieur au nombre de non (11145).
65Ces résultats doivent cependant être nuancés. Le vote étant très encadré et l’opposition ayant appelé à l’abstention, il convient de prendre en compte cette dernière en comparant le nombre de bulletins oui au nombre d’électeurs inscrits146. Les résultats sont dès lors légèrement moins satisfaisants pour l’administration : 83,8 % des électeurs ont voté oui, tandis que 16,2 % ont préféré s’abstenir, voter non, blanc, ou nul. À titre de comparaison, en Savoie, 96,4 % des électeurs inscrits ont voté en faveur de l’annexion à la France147.
66En prenant pour critère le nombre de oui par rapport aux inscrits, plusieurs communes apparaissent plus réfractaires que les autres : La Brigue (27,1 % de oui seulement par rapport aux inscrits), Castellar et Gorbio (36 et 34,5 %), Sainte-Agnès et Tende (51,7 et 57,3 %), Breil et La Trinité-Victor (66,1 et 69,5 %). On distingue ensuite un groupe de neuf communes, dont Menton, où le oui se situe entre 70 et 79,99 % et un ensemble de douze communes, dont Nice, où ce taux est compris entre 80 et 89,99 %.
67Les communes les plus réfractaires se situent donc à l’est du comté, près de la future frontière italienne, tandis qu’une deuxième poche de résistance relative se trouve le long du littoral. Un troisième ensemble regroupe une poignée de communes dans la région de Saint-Sauveur et un certain nombre de localités isolées, plutôt situées dans l’arrière-pays, font également preuve de moins d’enthousiasme que les autres. Globalement, c’est l’ouest du comté, proche de l’ancienne frontière avec la France, ainsi que l’arrière-pays qui ont apporté un soutien quasi inconditionnel à l’annexion, soit que les habitants aient été effectivement partisans de l’annexion, soit que la pression des notables ralliés y ait été plus efficace. Déjà au début du XIXe siècle, les vallées de l’ouest du département, Estéron, Var, Tinée et Vésubie, étaient décrites par les récits de voyages comme étant plus « françaises » que celles de l’est, Bévéra et Roya, considérées comme étant plus « italiennes148 ».
68Malgré ces limites, les résultats sont globalement positifs pour l’administration française et pour les partisans de l’annexion. Le taux de participation, même s’il est plus faible qu’en Savoie, est suffisamment élevé. Il indique que la majorité des populations concernées approuvent le changement de souveraineté ou, du moins, l’acceptent et ne s’y opposent pas frontalement. Le plébiscite ne met cependant pas fin aux contestations et aux protestations des partisans de l’Italie.
Réactions et contestations
69Les partisans de l’annexion s’efforcent de minimiser l’importance des abstentions, signe de leur caractère crucial. Le Messager de Nice affirme ainsi que de nombreux militaires, retenus sous les drapeaux, n’ont pas pu prendre part au vote, de même que les bergers, les travailleurs émigrés en France, les malades et les infirmes149. Le quotidien ne reconnaît l’existence que de « quelques centaines » d’opposants et affirme que de nombreux électeurs ruraux ont été trompés par des « manœuvres déloyales ». Selon Augustin Carlone, Gonzague Arson, qui possède des terres et un château à Castellar, aurait utilisé l’influence dont il dispose sur les villageois. Le gouvernement piémontais aurait en outre envoyé des émissaires dans les vallées de la Roya et de la Bévéra, ainsi que dans la haute valle de la Vésubie, afin de pouvoir conserver ces territoires150.
70Les partisans de l’Italie, pour leur part, remettent en cause les conditions du vote. Avant même le scrutin, la Gazette de Nice dénonce les cantonniers et les gardes-champêtres de l’arrière-pays qui « continuent à parcourir la campagne pour rassembler les paysans qu’ils sont chargés d’amener dimanche prochain en farandole, tambour battant, drapeau français en tête à la votation ». Selon le quotidien, l’annexion est présentée aux électeurs ruraux comme un fait accompli et le plébiscite comme une simple formalité qu’il convient d’entériner. L’attitude du gouverneur, des syndics et de l’évêque, qui font campagne en faveur du oui, est dénoncée151.
71La Gazette accuse également les commissaires de quartiers qui « vont de maison en maison, pénètrent dans toutes les mansardes et là ils signifient les mêmes ordres qu’on donne dans les fermes », c’est-à-dire de voter pour l’annexion. Les républicains français réfugiés à Nice seraient particulièrement visés et certains commissaires n’hésitent pas, selon le journal, à « réveiller de douloureux souvenirs, que l’empereur Napoléon a pris soin d’effacer par l’acte d’amnistie le plus complet qui eût jamais paru avant cette époque ». Un commissaire de quartier aurait ainsi dit à un électeur que « s’il n’allait pas voter pour l’annexion, on l’enverrait à Cayenne152 ».
72Les anti-annexionnistes ne désarment pas après la proclamation des résultats. À la fin du mois d’avril, plusieurs personnes colportent et font signer une protestation contre « les prétendues irrégularités qui auraient entaché le vote du 15 et du 16 avril153 ». Quelques jours plus tard, des individus « parcourent les campagnes en disant que le vote du peuple de Nice va être annulé » et font signer des pétitions154.
73Les députés de l’arrondissement manifestent leur désaccord. Le lendemain du scrutin le député de Sospel, Henri de Montezemolo, parcourt les communes de Tende, La Brigue et Breil « pour combattre l’annexion », sans que l’on sache avec plus de précision en quoi consiste son action155. Avant le scrutin, il a écrit à plusieurs électeurs de Sospel, Tende, La Brigue, Saorge et Breil, pour leur demander de voter contre l’annexion156. Plusieurs habitants de Breil et de La Brigue protestent contre cette démarche en remettant à Pietri deux pétitions à l’encontre de leur député157.
74Les représentants de Nice, Garibaldi et Laurenti-Robaudi donnent leur démission de députés de Nice le 23 avril, en dénonçant la « violation manifeste de la liberté et de la régularité du vote et des promesses solennelles stipulées dans le traité de cession du 24 mars ». Ils estiment que le vote a eu lieu « dans un pays nominativement appartenant encore à l’État Sarde et libre de choisir entre celui-ci et la France, mais en fait au plein pouvoir de cette dernière puissance, dans un pays occupé militairement et soumis à toutes les influences de la force matérielle et de la pression morale ». Le vote fut, pour eux, un « acte de fraude et de violence158 ».
75Au Parlement de Turin, l’ancien ministre Urbano Rattazzi critique violemment la cession de Nice à la France le 26 mai. Dans sa réponse, Cavour affirme que la Savoie et le comté de Nice appartiennent bien à la France par la géographie et la culture. Il souligne que les pressions et les irrégularités ne peuvent expliquer à elles seules la quasi-unanimité des résultats159. Après de vifs débats, la Chambre des députés vote finalement, le 29 mai, la ratification du traité d’annexion, par 229 voix pour, 33 contre et 23 abstentions. Le Sénat procède de même le 10 juin. Dans leur rapport consacré à l’approbation de la cession de la Savoie et du comté de Nice à la France, les sénateurs Salmour, Cibrario, Galvagno et Ridolfi estiment que, par ses traditions historiques, sa langue et sa position topographique, Nice peut être considérée comme étant « plus française qu’italienne ». La cession du comté à la France est donc jugée conforme au « principe de nationalité160 ».
Incertitudes et déceptions
76Les deux mois situés entre le vote du plébiscite et la prise de possession officielle du comté de Nice par la France, le 14 juin, constituent une période de transition délicate. Le 27 avril, le sénateur Pietri décrit une sorte « d’interrègne de l’autorité », due au fait que l’administration piémontaise n’est plus légitime, tandis que l’administration française n’est pas encore installée161. Les anti-annexionnistes, comme nous l’avons vu, profitent de cette relative vacance du pouvoir pour exprimer leur opposition via des pétitions destinées à influencer les débats au parlement de Turin et contre lesquelles Pietri peine à agir.
77Cette atmosphère d’incertitude est particulièrement importante à Menton et à Roquebrune. Ces deux communes se trouvent dans une situation particulière puisque, depuis 1848 et leur révolte contre le prince de Monaco Florestan Ier, elles ont le statut de ville libre sous la protection du royaume de Piémont-Sardaigne162. Cette configuration favorise un certain climat d’incertitude au sein de l’opinion publique. En août 1860, le ministre des Affaires étrangères est ainsi informé que les populations de Menton et de Roquebrune « manifestent des inquiétudes au sujet de leur situation définitive ». Les partisans de l’Italie et ceux du prince de Monaco « cherchent à entretenir des doutes sur la future et complète assimilation de ces communes à la France163 ». Le ministre assure au préfet que ces bruits « n’ont aucun fondement » et lui demande de le faire savoir à la population164. La situation particulière de ces deux communes entretient néanmoins un certain espoir chez les adversaires les plus convaincus de l’annexion. Comme nous l’avons vu, Menton est la ville du département qui a donné le plus de bulletins non lors du plébiscite. La signature d’un accord entre Napoléon III et le prince Charles III, le 2 février 1861, met fin à cette période de doutes165.
78L’économie locale se trouve perturbée par le changement de souveraineté. En prévision de la suppression de la douane, les commerçants ont arrêté de commander des marchandises et les magasins se trouvent vides166. Le sénateur Pietri fait distribuer des secours en bons de pain et demande au syndic de Nice d’entreprendre des travaux pour occuper la main-d’œuvre, en attendant que la situation se normalise167. Il s’inquiète surtout de la situation de la classe ouvrière, particulièrement sensible aux émissaires de Garibaldi, Rattazzi et Laurenti-Robaudi.
79Le problème du tracé de la frontière constitue une autre source de tensions. Bien qu’elles aient participé au plébiscite, les communes de la vallée de la Roya ne sont pas immédiatement fixées sur leur sort, la délimitation de la frontière ayant été confiée à une commission binationale168. Rapidement, des rumeurs assurant que ces communes resteront attachées au Piémont-Sardaigne circulent et provoquent l’inquiétude des habitants partisans de l’annexion. En mai 1860, 118 habitants de Saorge signent une protestation dans laquelle ils déclarent qu’étant « informés qu’on veut laisser cette commune séparée de Nice, son chef-lieu », ils refusent « une telle mesure qui leur porterait un grave dommage ». Ils rappellent qu’ils ont « voté à l’unanimité pour la France » et « entendent être Français169 ». Ce n’est donc pas seulement le non rattachement à la France, mais aussi la séparation d’avec Nice qui est invoquée. La ville constitue le principal débouché pour l’agriculture de Saorge et son maintien dans le royaume de Piémont-Sardaigne rendrait nécessaire la mise en place de nouveaux liens économiques et sociaux.
80Une fois le tracé connu, à la fin du mois de mai, plusieurs habitants de Tende et de La Brigue protestent contre leur maintien au sein du royaume de Piémont-Sardaigne. Des délégués de ces deux villages déclarent que la population est « décidée à verser jusqu’à la dernière goutte de son sang » plutôt que de laisser « annuler son vote170 ». Ils remettent à Pierre-Marie Pietri des adresses de protestation destinées à l’empereur. Un membre du conseil communal de Tende est envoyé par le comité d’annexion de la commune auprès du préfet afin de se procurer « les explications les plus précises relativement à l’annexion de l’arrondissement de Nice à la France171 ». Le délégué souligne que la population de la commune « se voit avec surprise entravée par une ligne de douane à peu de kilomètres de distance de Nice » et qu’elle risque d’être « tous les jours méprisée et insultée par le parti italien à chaque pas », sans compter « les dommages matériels qu’elle éprouverait dans l’écoulement de ses produits ». Le délégué est chargé de « faire tout ce qu’il croira devoir faire en faveur et dans l’intérêt de cette population, laquelle réclame à grands cris qu’il soit pourvu à l’exécution du vote émis pour la nationalité française ».
81L’administration piémontaise se montre assez brutale avec les partisans de l’annexion quand elle reprend les deux villages en main. Le 23 juin, des bersagliers et des carabiniers arrivent à La Brigue et annoncent aux habitants que leur commune et celle de Tende restent au Piémont. Selon le président du comité d’annexion de La Brigue, les militaires font enlever les drapeaux français des fenêtres, arrachent les insignes français des maisons avant de prendre aux habitants leurs « médailles de l’annexion » et leurs cocardes françaises. Certains habitants auraient été arrêtés pour avoir crié « Vive la France » et « Vive Napoléon III », tandis que le comité doit se dissoudre172. Quelques jours plus tard, le préfet rapporte que « quelques habitants de Tende et de Briga [sic] sont venus se réfugier à Nice, se disant menacés d’arrestation173 ». Le préfet leur recommande le calme et la modération et ne semble pas être inquiet. Il note cependant que ses efforts seraient « puissamment secondés par le gouvernement piémontais » si celui-ci obtenait de ses agents « de ne pas user de rigueur dans ces localités ».
82Le gouvernement piémontais s’efforce, de fait, d’apaiser les tensions. Au début du mois de juillet, le commissaire royal piémontais Giuseppe Pirinoli rencontre les habitants de La Brigue qui ont quitté leur commune. Il leur donne une recommandation adressée aux autorités piémontaises afin qu’ils « puissent rentrer dans leur patrie et y demeurer sans crainte d’être aucunement inquiétés174 ». Le commissaire royal estime que « ces individus ont quitté leur pays à cause d’une panique qui s’est emparée d’eux » et assure que « les bruits répandus par certains organes de la presse locale n’ont aucun fondement ». En juillet 1860, les communes de Breil, Sospel et Saorge accordent néanmoins un « droit de cité » aux habitants de Tende et La Brigue175.
83La frontière est fixée définitivement par une convention signée le 7 mars 1861176. Outre Tende et La Brigue, six communes perdent une partie de leur territoire, qui se trouve situé de l’autre côté de la frontière. En compensation, les propriétaires de Tende et de La Brigue sont exemptés de droit de douanes pour les récoltes de leurs terres177.
84Le changement de souveraineté bouleverse profondément la situation de plusieurs catégories sociales178. Les hommes de loi, magistrats, avocats et avoués, constituent le groupe socio-professionnel le plus durement touché. La suppression de la Cour d’appel, malgré les promesses et les demandes de Pietri, fait chuter brutalement le nombre de clients. Certains magistrats sont reclassés dans l’administration française tandis que d’autres choisissent le Piémont ou sont mis à la retraite179. La plupart d’entre eux, notamment ceux qui préfèrent rester à Nice, voient leur position sociale diminuer, à l’image de Louis Lubonis ou de l’ancien vice-président du tribunal civil de Nice, Adrien Faissole180. En octobre 1860, le procureur général d’Aix-en-Provence estime que cette suppression était inévitable en raison de la formation insuffisante de ces magistrats et de leur nombre trop élevé. Il note également qu’elle a permis d’affaiblir la partie de la bourgeoisie qui s’était montrée la plus hostile au changement de souveraineté et qui perd ainsi fortement de son influence181.
85L’administration française s’efforce par ailleurs de trouver un bon équilibre entre « Français » et « Niçois » dans la répartition des postes à pourvoir, laissés vacants par le départ des employés piémontais182. Elle essaie, à cette occasion, de rallier les notables les plus influents. Lorsqu’Adrien Barralis, ancien syndic de Nice, ancien député et ancien conseiller provincial, sollicite un poste de conseiller de préfecture à Nice183, le sénateur Pietri estime qu’il convient d’accéder à cette requête car il « jouit d’une certaine influence dans la montagne » et qu’il convient de le ménager184. Certains partisans de l’annexion qui espéraient des postes, comme Carlone ou Faissole, font cependant part de leur déception, s’estimant peu récompensés de leurs efforts185.
L’intégration symbolique
86Comme l’ont montré de nombreuses études, les fêtes représentent une pratique politique majeure au XIXe siècle. Visant à produire de la légitimité, elles constituent des cérémonies de mise en scène du pouvoir. Par leur dimension didactique, elles visent à créer ou à renforcer la cohésion nationale et la solidarité civique en ancrant le sentiment d’appartenance. Comme espace de sociabilité, enfin, elles mettent en œuvre des procédures de construction et de diffusion de systèmes de représentation du passé, permettent une occupation symbolique des espaces et soulignent l’emboîtement des consciences d’appartenance186. Comme l’a montré Alain Corbin, « l’expressionnisme de la fête autorise une exceptionnelle lisibilité des systèmes de représentation du politique187 ». Les fêtes politiques sont en outre particulièrement importantes pour le régime du Second Empire188.
Souvenirs du Premier Empire, défilés et fêtes de transition
87Au XIXe siècle, « toute instauration de régime est fil renoué ; elle exige donc l’accumulation des références mémorielles189 ». Les souvenirs du Premier Empire sont, de fait, particulièrement sollicités au cours de cette période afin de légitimer l’annexion, qui est présentée comme un « retour » du comté à la « mère patrie ». Le régime du Second Empire s’efforce de « faire disparaître toutes traces de célébrations et symboles antérieurs » afin d’imposer « de nouvelles représentations instrumentalisant la mémoire du Premier Empire190 ». Les souvenirs de celui-ci, ainsi que la légende napoléonienne, permettent de légitimer le pouvoir de Napoléon III191. Pour ce faire, les anciens soldats de la Révolution et du Premier Empire sont particulièrement sollicités192. Ils participent à une relecture-réécriture de l’histoire locale, nécessaire à la création d’une légitimité historique du nouveau régime à cette échelle.
88Les anciens soldats de Napoléon vivant dans le comté, regroupés en 1859 dans le Comité des médaillés de Sainte-Hélène de Nice193, sont très sollicités au cours de cette période. Au nombre de six cents en 1854, ces soldats ont participé aux manifestations pro-françaises, avant comme après le plébiscite194. En 1859 et en 1860, ils ont célébré un service commémoratif le 5 mai, jour anniversaire de la mort de Napoléon Ier et, le 4 juin 1860, ils ont assisté à une cérémonie commémorative à la cathédrale Sainte-Réparate, pour l’anniversaire de la bataille de Magenta195. Les soldats du Premier Empire ont joué un rôle non négligeable lors de la proclamation des résultats du plébiscite. À Tende, les médaillés de Sainte-Hélène, accompagnés de ceux de La Brigue, ont fait le tour du village, parfois portés sur des charrettes, avant d’aller au banquet organisé pour l’occasion. Après le repas, ils se sont réunis sur la place du village et, deux par deux, précédés de tambours et de drapeau, ont à nouveau fait le tour de la commune, suivis de toute la population196. Les anciens soldats de Napoléon Ier permettent, par leur présence, de rattacher le village et ses habitants à l’Empire et à la France.
89L’héritage du Premier Empire est également mis en exergue par la municipalité de Nice. Le 1er mai 1860, une adresse du conseil municipal assure à Napoléon III qu’il trouvera, en venant, les « traces glorieuses du grand fondateur de sa dynastie », qui a pris le commandement de l’armée d’Italie à Nice en 1796197. Le 27 juillet, une seconde adresse évoque « les soins religieux avec lesquels on a conservé à Nice les souvenirs et les traditions du premier Empire198 ». Lors de la première fête du 15 août célébrée à Nice, le maire François Malausséna appelle la population à s’inspirer « des grands souvenirs que la Saint-Napoléon rappelle » car « pour nos pères, sous le premier Empire, cette fête fut constamment un jour de joie et de bonheur199 ». L’appartenance de Nice au Premier Empire est ainsi mobilisée afin d’inscrire le nouveau régime dans la continuité de l’histoire locale. La fête du 15 août permet également d’unir la ville au reste de la nation française, qui célèbre la même fête au même moment200.
90Le théâtre et les chansons rappellent eux aussi les souvenirs du Premier Empire. Outre l’Hymne à la France, c’est le cas de Nice française, une pièce musicale jouée lors des fêtes de l’annexion et écrite par le poète français Théodore de Banville. L’allégorie de Nice y déclare à celle de la France :
« Car, fidèle à son cœur, depuis Napoléon,
Mon peuple n’a jamais oublié son vrai nom,
Et savait, en dépit de ces contraintes vaines,
Que ton sang généreux coulait dans mes veines201 ! »
91Plusieurs cérémonies publiques proclament au même moment l’adhésion des différents corps de la ville à la France et à l’Empire. Le 29 avril, une députation de la Garde nationale se réunit place Saint-François à l’initiative du commandant Léon Féraud, partisan de la France, pour porter au sénateur Pietri une adresse destinée à l’empereur202. La députation, précédée par sa musique, est composée de deux cents gardes nationaux portant une cocarde française, un drapeau français et des lauriers à leur fusil. La musique joue l’Hymne à la France et « l’air de la reine Hortense ». La députation se rend tout d’abord auprès du général Charles Auguste Froissard, puis auprès du consul de France. Elle va ensuite à l’église du Vœu, pavoisée de drapeaux français, pour entendre un Te Deum. Le cortège se rend enfin sur la place de l’hôtel de ville où il se sépare aux cris de « Vive la France », « Vive l’Empereur » et « Vive Nice française ». La Garde nationale, incarnation de la cité, rend ainsi hommage aux autorités françaises pour montrer son allégeance, tout en s’appropriant les différents lieux de pouvoirs de la ville. Son défilé constitue une sorte de réponse à celui des troupes françaises, le 1er avril. Il a aussi pour but de prouver la validité du vote des 15 et 16 avril. L’adresse est en effet une réplique « aux ennemis de notre pays, à ceux qui osent affirmer que notre amour et notre sympathie pour la France sont un mensonge, à ceux qui prétendent que l’élan patriotique et chaleureux qui s’est emparé de nos âmes, à la seule pensée d’être Français, a été l’œuvre de la corruption et de l’intimidation203 ! »
92Des fêtes privées proclament le soutien de certaines corporations au changement de souveraineté. Le 10 mai, un banquet est offert par les commerçants de Nice au sénateur Pietri. Un buste de l’empereur, entouré de fleurs et de drapeaux français, est placé en face de la table d’honneur204. Les discours prononcés et publiés par la presse permettent aux convives de définir et de divulguer les termes du contrat implicite qui lie les négociants au nouveau régime. Lors des toasts, un important négociant, Prosper Girard, rend hommage à Napoléon III, « à qui nous devons une éternelle reconnaissance pour nous avoir rendu notre nationalité perdue » et qui « en réunissant le comté de Nice à la France, va donner au commerce et à l’industrie cette impulsion qui leur manquait ». Pierre-Marie Pietri souligne en retour que « l’union du comté de Nice à la France n’est que l’accomplissement pacifique et régulier de ses destinées, gravées dans le sol, autant que dans la communauté des races, des aspirations, des intérêts, des vœux libres et unanimes de cette province205 ». En échange de leur soutien à l’annexion, les commerçants attendent de l’État qu’il encourage le commerce et l’industrie de la ville.
93Les cérémonies officielles, lors de la prise de possession de l’arrondissement de Nice par la France, le 14 juin 1860, concrétisent le changement de souveraineté. Le commissaire extraordinaire piémontais Giuseppe Pirinoli remet officiellement le territoire à Pierre-Marie Pietri, qui représente la France206. Le procès-verbal est signé dans le grand salon du palais du gouvernement en présence de Mgr Sola, du nouveau préfet des Alpes-Maritimes Roland Paulze d’Ivoy, du général Corréard, de Léon Pillet, du conseil municipal de Nice et des autres autorités civiles et militaires. Le drapeau piémontais est ramené après avoir été salué de vingt et un coups de canon puis le drapeau français est élevé et salué également par vingt et une détonations. Le sénateur Pietri procède à l’installation du préfet des Alpes-Maritimes et du sous-préfet de Puget-Théniers. Les commissaires extraordinaires et les autorités se rendent ensuite en cortège à la cathédrale où est chanté un Te Deum puis sur le Cours, où le général Corréard passe en revue le 90e régiment de ligne, un escadron de hussards et la gendarmerie. Le soir, la ville est illuminée. Ce n’est cependant que trois jours plus tard qu’ont lieu les festivités.
Les fêtes de l’annexion
94Les fêtes officielles de l’annexion se déroulent le 17 juin à Nice et dans le comté, le lendemain de celles qui ont eu lieu à Paris207. Le décalage entre la passation de pouvoir et les festivités s’explique certainement par la volonté que la fête ait lieu un dimanche, afin que l’assistance soit plus nombreuse et pour entourer la cérémonie de sacralité, à l’image de la fête officielle de l’Empire, fixée le 15 août, jour de l’Assomption de la Vierge208. Les festivités sont préparées par les autorités et Louis Lubonis remplit ici les fonctions de « metteur en scène » habituellement dévolues au préfet209. Le 12 juin, le gouverneur envoie aux différents syndics du comté une circulaire leur demandant d’assister, avec les conseillers municipaux et les fonctionnaires, à un Te Deum solennel dans l’église principale de la commune210. Ils doivent encourager et encadrer les festivités, afin de rendre la manifestation populaire, digne et solennelle. Toutes les autorités locales, notables et curés, doivent montrer leur ralliement au nouveau régime et à leur nouvelle patrie, afin d’entrainer les populations. Le gouverneur n’indique pas de programme précis et laisse à chaque syndic le choix de régler les détails.
95Si l’organisation des festivités révèle les attentes des organisateurs, leur récit par la presse permet de déterminer avec plus de précision le sens que les autorités souhaitent leur conférer. Le Messager de Nice, dans son numéro du 17 juin, souligne ainsi la signification de l’événement :
« Les fêtes auxquelles nous assisterons aujourd’hui n’ont pas seulement pour but de célébrer la fin d’un état de crise qui avait arrêté momentanément toutes les transactions ; elles ont une portée plus haute et une signification plus nette : le drapeau qui flotte sur nos édifices publics ne signifie pas seulement ordre et grandeur, il annonce surtout que Nice, négligée et abandonnée par le fait de sa position géographique à l’égard du Piémont, doit à dater d’aujourd’hui être entraînée par le grand mouvement de progrès qui maintient la France à la tête de la civilisation européenne.
Les salves d’artillerie qui ont salué l’annexion officielle n’ont pas été, pour le gouvernement de l’Empereur, la déclaration d’une simple prise de possession ; elles ont été aussi, de la part de la France, la proclamation d’un contrat auquel la France n’a jamais failli. Déjà Français par leurs aspirations, nos concitoyens sont appelés enfin à participer aux bienfaits équitablement répartis entre tous les membres de la grande famille dont S. M. l’Empereur est le chef auguste et vénéré ; Nice pourra bientôt reconnaître que, surtout en politique, l’intérêt bien entendu est toujours d’accord avec les inspirations du cœur.
La proclamation de M. le Préfet des Alpes-Maritimes nous annonce déjà une ère nouvelle pour notre pays ; à nous de nous rendre dignes des faveurs et des bienfaits qui nous sont réservés ; à nous de faciliter par un concours sincère et dévoué la tâche de l’administration. Qu’il n’y ait plus parmi nous d’autres rivalités que pour le bien, d’autre jalousie que pour la prospérité commune, pour le dévouement à l’Empereur. Célébrons donc la fête de l’Annexion avec toute le pompe possible : une nouvelle existence commence pour nous ; n’oublions jamais que nous devons à Napoléon III le suprême bonheur du retour à la mère-patrie211. »
96Le discours du quotidien montre toute la polysémie des fêtes du 17 juin, qui n’est pas sans rappeler celle des festivités du 15 août212. Les fêtes de l’annexion marquent ainsi pour Nice la fin des incertitudes, le début de la prospérité et la proclamation d’un « contrat » avec la France, mais aussi le retour à la mère patrie et la fin des rivalités au sein de la cité, c’est-à-dire le dépassement des clivages politiques grâce à l’action de l’empereur. Les fêtes de l’annexion sont donc porteuses de la même volonté de rupture avec le passé que celles du 15 août213, qu’il s’agisse du passé républicain pour ce dernier ou du passé monarchiste et piémontais pour le 17 juin. Elles inaugurent une ère nouvelle en rassemblant les habitants autour des souvenirs du Premier Empire et en occultant les autres héritages. Les notions de reconnaissance et de gratitude envers la France et l’empereur sont très présentes et, en cela, la fête du 17 juin constitue une réponse à la cérémonie parisienne de la veille qui mettait en scène « un souverain magnanime accueillant à bras ouverts ses enfants perdus214 ». Les fêtes du 17 juin constituent enfin un prolongement du plébiscite d’annexion. Comme celles du 15 août, par leur caractère unanimiste, elles sont une célébration et une réitération du plébiscite, un espace où le pouvoir met en scène l’adhésion de la population. Ces festivités apparaissent donc pleinement comme une fête de souveraineté, un espace où le groupe célèbre son harmonie en même temps qu’il conforte la légitimité du pouvoir215. Par cette première fête de souveraineté française, la ville tisse, avec Napoléon III et la France, les liens de fidélités qui viennent d’être rompus avec Victor-Emmanuel II et le royaume de Piémont-Sardaigne.
97Le déroulement des festivités ne présente par ailleurs rien de particulier216. Le 16 juin au soir a lieu une promenade aux flambeaux. Le lendemain, des jeux, des banquets et des attractions se déroulent dans toute la ville. La municipalité offre un banquet au sénateur Pietri, au préfet Roland Paulze d’Ivoy et aux autorités françaises. Elle fait distribuer des bons de pain, de pâtes et de viandes aux indigents, dons qui permettent au régime de montrer que l’empereur demeure fidèle à son image de sauveur du peuple, soucieux du sort des plus démunis. Le Comité central français organise également un banquet, au cours duquel des toasts sont portés à la France, à l’Empereur et au sénateur Pietri217. Le Cercle philharmonique, enfin, organise une soirée de réception des autorités, des officiers et des fonctionnaires français, au cours de laquelle des « hymnes patriotiques » sont chantés par les ouvriers de la ville. La soirée se termine par un bal, tandis que la ville est illuminée.
98Dans les autres communes du comté, les fêtes de l’annexion se déroulent selon un schéma comparable, à quelques variations près. À Utelle, elles ont lieu le 14 et le 17 juin et rassemblent la population, le clergé et la municipalité en une grande « manifestation patriotique218 ». Il s’agit là aussi de montrer l’unanimité de l’adhésion, à la fois populaire et notabiliaire, en rassemblant les habitants et les autorités afin de souligner la double légitimité de l’annexion. Les fêtes de Villefranche, pour leur part, ont lieu le 24 juin seulement219, la commune ayant décidé de les repousser de huit jours afin qu’elles ne soient pas concurrencées par celles de Nice. Le Messager souligne particulièrement la présence de vétérans du Premier Empire et assure avoir vu un médaillé de Sainte-Hélène pleurer de joie en admirant la grande aigle qui surmontait la hampe du drapeau de l’Hôtel-de-Ville de Villefranche. La décoration de la ville vise à franciser et à « impérialiser » l’espace public : des drapeaux français sont placés aux fenêtres et un arc de triomphe surmonté du buste de l’empereur est élevé sur la place du port. La musique souligne le caractère national et local des festivités, à travers « l’air de la reine Hortense » et le Chant des Niçois, joués par la musique du 90e régiment. À cinq heures, un bal champêtre est ouvert sur la place du port, devant l’arc de triomphe de verdure.
99La politique festive de la municipalité de Nice se caractérise enfin par un abandon significatif : dès le mois de mai, la junte municipale décide de ne plus célébrer la fête du Statuto220. Il devenait en effet impossible de commémorer, dans une ville qui allait bientôt devenir française, une date symbolique aussi forte, véritable « fête nationale de l’Italie libérale221 », alors même que le plébiscite venait d’être voté. La rupture avec le passé italien est ainsi consommée.
Le voyage de Napoléon III et de l’impératrice Eugénie
100Le voyage de l’empereur et de l’impératrice à Nice, du 12 au 14 septembre 1860, clôt le temps des festivités liées à l’annexion. Plusieurs études ont été consacrées à la fonction politique des voyages de chef d’État, en termes de mise en scène du pouvoir notamment222, et Bernard Ménager a souligné l’importance de ceux de Napoléon III pour encourager, enraciner ou fortifier le « bonapartisme populaire223 ». Pour Alain Corbin, le rituel de l’entrée royale ou impériale participe « à la construction des nouvelles représentations du territoire224 ». Les voyages de Napoléon III se présentent comme des « plébiscites continus » ; ils participent d’une sorte de démocratie directe mais réduisent la participation du peuple « à une forme d’adhésion festive dans laquelle il ne se manifeste que sous les espèces d’une masse unanime ». L’avènement de « l’homme-peuple » se prolonge dans la célébration du « peuple-uni225 ».
101La proclamation du préfet Roland Paulze d’Ivoy annonçant la venue du couple impérial souligne le sens conféré à ce voyage. Elle indique que « leurs Majestés, touchées du mouvement unanime au milieu duquel deux belles provinces sont venues accroître la force de leur Empire », souhaitent « cimenter à leur tour, par leur présence, une indissoluble union226 ». Le voyage constitue ainsi une réponse aux fêtes de l’annexion. Il s’agit, pour l’empereur, de valider le contrat moral contracté par la ville lors de ces festivités, tout en venant se ressourcer dans la légitimité populaire, fondement du régime bonapartiste. Le préfet souligne également l’enjeu que représente pour les populations le bon déroulement des festivités et l’accueil fait à Napoléon III : ce sont « les instincts populaires, ces guides constants de sa politique, qui lui inspireront ici, comme partout, les grandes décisions d’intérêt général qui nous tiennent encore dans l’attente ». Il s’agit donc, pour la ville, de montrer clairement son adhésion si elle souhaite obtenir par la suite les travaux et les subsides qu’elle réclame.
102L’empereur et l’impératrice débarquent à Villefranche le 12 septembre 1860. Le choix d’un port militaire souligne d’ores et déjà la dimension de souveraineté du voyage. Le couple est accueilli par le préfet, le maire et la municipalité de cette ville. Les souvenirs du Premier Empire sont particulièrement mobilisés. Le Messager de Nice évoque les « sentiments de gratitude d’un peuple qui se souvient des gloires et des bienfaits du premier Empire ». Il assure avoir entendu « des centaines de vieillards », nés sous le Premier Empire, manifester leur joie de pouvoir à présent « mourir citoyens de la plus généreuse et de la plus respectée des nations227 ». La présence de ces hommes permet de souligner la continuité entre le Premier et le Second Empire et de renforcer la thématique du retour à la mère patrie.
103À Nice, la municipalité accueille l’empereur à l’entrée de la place Victor, rebaptisée place Napoléon en août, et lui offre les clefs de la ville. Le choix de cette place permet également d’établir un lien avec le Premier Empire. C’est en effet à cet endroit que Napoléon Ier a rassemblé ses troupes au début de la campagne d’Italie, en 1796, et la place portait déjà ce nom sous le Premier Empire228. Il s’agit ainsi de revenir à la situation antérieure à 1814, date du retour du comté au royaume de Piémont-Sardaigne. La monumentalité de l’architecture et le poids du passé permettent de solenniser la cérémonie tandis que des différents drapeaux des corps constitués, corporations, quartiers et communes, soulignent l’unanimité de l’adhésion du comté.
104L’empereur et l’impératrice passent tout d’abord sous un arc de triomphe monumental surmonté d’aigles et érigé sur la place. Ils parcourent ensuite les boulevards du Pont-Vieux et du Pont-Neuf, la place Charles-Albert, la place des Phocéens et la rue Saint-François-de-Paule avant d’arriver sur le Cours. Ce trajet leur permet d’accomplir un demi-tour de la ville en reliant ses deux places principales. À l’entrée du Cours, un second arc de triomphe, de dimension plus modeste et fleuri, est dédié à l’impératrice. Le couple impérial est accueilli par des pécheurs et leurs épouses en costume traditionnel. Il s’agit ici de souligner l’adhésion des classes populaires au régime, mais aussi celle de la culture locale, symbolisée par la femme du pécheur en costume « pittoresque ». L’empereur et l’impératrice sont logés au palais du gouverneur où ont lieu les réceptions officielles. Celles-ci commencent par une députation de jeunes filles et se poursuivent par l’hommage des maires du comté. Le soir, la ville est illuminée et un bal est organisé. Le lendemain, Napoléon III et Eugénie visitent la plaine du Var avant de partir pour la Corse. Un feu d’artifice clôt les cérémonies.
105Selon Le Messager de Nice, l’enthousiasme de la population a prouvé à l’empereur et à l’impératrice que si « Nice est rentrée d’hier dans la grande famille française, elle n’en était jamais sortie par le cœur229 ». Le quotidien souligne la continuité avec le Premier Empire et la légitimité de l’annexion en rappelant que le département « compte parmi ses citoyens toute une génération née sous le premier Empire » qui, assure-t-il, « sentait peser sur elle, presque à l’égal d’une infortune, l’interim qui la séparait d’un passé regretté ». En échange de cette fidélité au Premier Empire et de cet enthousiasme populaire, la France et l’empereur apportent à Nice richesse et prospérité puisque « ce culte du passé, ces réminiscences de fidélité, cet entraînement qui poussaient irrésistiblement notre population vers la France » ont déjà reçu une « prompte rémunération » et que la population a été « comblée de bienfaits aussi grandioses qu’inattendus ». Le voyage de l’empereur et de l’impératrice referme définitivement la parenthèse ouverte par la restitution du comté de Nice au Piémont en 1814. Nice, redevenue française, comme au temps de la Grande Nation230, peut à présent retrouver et exalter ses souvenirs du Premier Empire.
106Il faut naturellement se méfier des comptes-rendus officiels, nécessairement élogieux, et critiquer le sens qu’ils confèrent aux festivités231. Ces fêtes sont néanmoins dotées d’une valeur didactique précise, tendant à ancrer l’idée selon laquelle l’annexion rend au comté de Nice sa véritable nationalité, tout en scellant l’adhésion du peuple à la France, au gouvernement impérial et à la personne de l’empereur. Les fêtes de l’annexion, comme le voyage du couple impérial, explicitent ainsi l’entrée de Nice dans le corps symbolique de la nation française, son allégeance à la personne de Napoléon III et son adhésion au régime du Second Empire.
L’intégration politique
107De décembre 1860 à février 1861, l’ancien comté de Nice connaît une série de scrutins qui construisent en partie son intégration politique à la nation française232. Les élections législatives de décembre 1860 constituent, pour les habitants comme pour les notables, un nouveau moment d’apprentissage des normes et des pratiques politiques françaises et impériales, notamment de la candidature officielle, après l’expérience particulière du plébiscite. Elles représentent également un enjeu majeur pour l’administration, qui doit confirmer le succès du plébiscite d’annexion en favorisant l’élection d’un homme à la fois populaire et partisan de l’Empire. Les élections locales, cantonales et municipales, permettent de déterminer dans quelle mesure l’annexion s’est accompagnée, ou non, d’un renouvellement des hommes politique locaux.
Les candidats aux élections législatives de décembre 1860
108La date des élections législatives est fixée le 14 novembre aux 9 et 10 décembre 1860. Les habitants de l’ancien comté, divisé en deux arrondissements, celui de Nice et celui de Puget-Théniers, doivent élire un seul député, contre quatre auparavant. Le scrutin est uninominal à deux tours233.
109Compte tenu du contexte particulier créé par l’annexion, l’administration hésite à désigner un candidat officiel234. Dès la fin du mois d’avril, Pierre-Marie Pietri écrit au ministre des Affaires étrangères pour insister sur la nécessité de se montrer prudent quant au choix du candidat à la députation. Il rapporte que des « considérations tirées, non pas seulement des ambitions qui se remuent ici, mais bien d’intérêts personnels qu’il s’agit de ménager », lui imposent « la plus grande réserve » à ce sujet235. Pietri souhaite que le ministre obtienne de l’empereur et du ministre de l’Intérieur qu’aucun choix ne soit fait « avant que des renseignements positifs soient pris sur chaque candidat ». Il indique également que le comte Henry Avigdor, ancien député au Parlement de Turin, s’est déjà déclaré candidat et a commencé à faire campagne en affirmant qu’il bénéficie de l’autorisation de l’empereur.
110Peut-être en raison du succès du plébiscite d’annexion ou pour ne pas brusquer la population et les élites locales, l’administration choisit dans un premier temps de rester neutre236. Cinq candidats décident dès lors de se présenter : le négociant en huiles Désiré Pollonnais, le comte Henry Avigdor, le comte Eugène Spitalieri de Cessole, l’avocat Rastoin-Brémond et l’ancien secrétaire du sénateur Pietri, Pierre Nicolas Rapetti237.
111Les professions de foi des candidats reflètent leur sensibilité politique globalement modérée. Désiré Pollonnais souligne sa position sociale, son indépendance financière, son « esprit de conciliation » et sa modération. Ses séjours fréquents à Paris, « au centre même de l’Administration publique », lui permettent « de consacrer tout [son] temps aux intérêts considérables auxquels se rattachent le passé et l’avenir de Nice ». Le candidat souligne également que, s’il honore « le culte des souvenirs qui attachaient Nice à la noble maison de Savoie », il est fier également « d’appartenir à cette glorieuse nation française à l’initiative de laquelle l’Italie devra son indépendance ». Il assure enfin que « l’intérêt de notre pays […] doit le rattacher énergiquement au gouvernement impérial238 ».
112Le comte Eugène Spitalieri de Cessole s’engage essentiellement à défendre les intérêts locaux. Soulignant aux électeurs qu’il est « issu d’une famille niçoise » et qu’il demeure « constamment parmi [eux] », il rappelle l’engagement de son père dans la défense des « anciennes franchises du comté de Nice ». Rastoin-Brémond assure qu’il se consacrera à la défense des « intérêts légitimes » de ses concitoyens et promet qu’il suivra « avec dévouement le drapeau de l’Empereur, le seul qui ne conduise pas à l’abîme239 ».
113Henry Avigdor, enfin, rappelle qu’il a défendu les « franchises commerciales » de Nice au Parlement de Turin, avant de souligner qu’il a déjà prouvé ses sympathies envers la France en tant que rapporteur du traité entre celle-ci et le Piémont en 1851 et en 1852. Il proclame également son « dévouement inaltérable » à Napoléon III « à qui la noble Italie doit son indépendance » et dont il a soutenu la candidature en novembre 1848. Il assure cependant aussi qu’il a « conservé [son] indépendance » et insiste sur la nécessité de développer les voies de communication comme d’encourager le commerce et l’industrie240. De tous les candidats, Henry Avigdor est le seul à avoir été déjà député.
114Tous les candidats souhaitent visiblement profiter de la nouvelle configuration créée par le changement de souveraineté pour débuter ou relancer une carrière politique. Soulignant leur attachement à la France et à l’Empire, ils font valoir leur enracinement local et leur détermination à défendre les intérêts de l’ancien comté, mais ils ne peuvent pas être considérés comme étant hostile au régime bonapartiste.
115Cette abondance de candidatures pousse cependant l’administration à réagir et, le 1er décembre 1860, Roland Paulze d’Ivoy fait savoir que le gouvernement a choisi l’ancien gouverneur provisoire, Louis Lubonis, comme candidat officiel241. Le préfet assure aux électeurs que la multiplicité des candidatures tendait à « jeter parmi [eux] la confusion la plus regrettable » et risquait d’entraîner « comme une sorte de désordre moral dans les esprits ». Or le gouvernement ne souhaite pas que les électeurs demeurent « plus longtemps livrés à ces incertitudes pénibles242 ». Le représentant du gouvernement rappelle le rôle de Lubonis lors de l’annexion et assure qu’il est le plus apte pour « en seconder tous les développements243 ». Rapetti, Rastoin-Brémond, Pollonnais et le comte de Cessole retirent aussitôt leurs candidatures244. Henry Avigdor, en revanche, maintient la sienne. François Malausséna, un temps pressenti, ne se déclare finalement pas candidat245.
116Louis Lubonis constitue, a priori, un bon candidat pour l’administration. Né à Nice en 1815, il est le fils d’un commissaire de police de cette ville et a épousé une Française en 1858. Docteur en droit, il a fait ses études au collège des Jésuites de Nice puis à l’université de Turin. Il a ensuite accompli sa carrière à la cour d’appel de Nice, tout en étant avocat des pauvres. Conseiller provincial de 1852 à 1859, sa fortune est évaluée, en 1860, à 6 000 francs246. Le candidat présente le double avantage d’être à la fois un notable établi et un homme déjà connu de la population grâce à ses fonctions passées, ce qui doit faciliter son élection. Il s’agit également, pour l’administration, de montrer qu’elle sait récompenser les efforts d’un homme initialement opposé à l’annexion et dont les intérêts personnels ont été lourdement remis en cause par le changement de souveraineté. Plus encore, ses fonctions antérieures l’ont confirmé comme étant une personne fidèle aux intérêts impériaux. En outre, il constitue un homme relativement neuf par rapport à Malausséna, ancien adversaire de l’annexion et ancien syndic, dont le loyalisme est encore douteux.
117Henry Avigdor, pour sa part, est né à Nice en 1814. Membre d’une vieille famille juive niçoise, il est le fils d’Isaac Samuel Avigdor, négociant propriétaire, et le frère des banquiers Jules et Septime Avigdor. Député de Novi Ligure, dans le Piémont, de 1850 à 1853, il a vécu à Paris où il représentait, comme chargé d’affaires, la république de Saint-Marin et la principauté de Monaco, tout en louant des appartements à Nice. Converti au catholicisme, il est également propriétaire du château de Bures et a été maire de Morainvilliers, dans les Yvelines247. Henry Avigdor a des atouts importants : il a déjà une expérience politique et appartient à une importante famille de Nice. Son profil ne peut que gêner la préfecture : bien placé pour remporter le scrutin, il bénéficie déjà d’une réelle légitimité politique, ce qui en fait un relai peu sûr pour l’administration.
118 Le Messager de Nice soutient activement le candidat officiel. Le quotidien affirme que le succès de toute autre candidature ne pourrait être que « l’expression d’une fraction plus ou moins notable » de la population, « presque un succès de parti ». Or, souligne le journal, « l’annexion a détruit tous les partis248 ». L’élection doit marquer la fin de l’affrontement entre les mouvements annexionniste et anti-annexionniste et permettre la désignation d’un député qui dépasse ce clivage. Lubonis a, en ce sens, un profil idéal car, s’il a mis en œuvre l’annexion en tant que gouverneur, il n’a jamais été membre du parti français et a accepté celle-ci par devoir plus que par conviction.
Le déroulement de la campagne
119Le déroulement de la campagne électorale montre la force de la candidature officielle, mais aussi l’importance des résistances et des oppositions qu’elle rencontre249. Louis Lubonis ne fait pas campagne et ne publie pas de profession de foi. En tant que candidat officiel, il bénéficie de l’appui de la préfecture. Fonctionnaires et élus locaux lui apportent leur soutien mais l’administration s’efforce de faire preuve de modération, voire de pédagogie, vis-à-vis de l’opposition. Le commissaire de Sospel, après avoir mis en prison pour tapage un cabaretier partisan d’Avigdor qui distribuait des bulletins, le relâche dès le lendemain250. Il estime que cette « leçon » a « produit un très bon effet et a démontré aux yeux de la population que tout en étant sévère, [il est] juste et bon251 ». Il souhaite en outre prouver au « parti contraire » qu’il n’a pas agi « dans un but de vengeance et d’animosité ».
120Les représentants de l’administration estiment que leur popularité est nécessaire à l’efficacité de leur influence. Le même commissaire de Sospel assure ainsi au préfet que, « étant aimé et ayant l’entière confiance de la population de cette ville », il pense pouvoir « assurer le suffrage252 ». Les maires jouent leur rôle de relais du pouvoir impérial en essayant d’influencer les habitants de leur commune. Celui de Sospel, Joseph Borriglione, fait afficher un appel aux électeurs les incitant à voter pour le candidat officiel253.
121La presse intervient massivement durant la campagne. Le Messager de Nice souligne que le député doit être « dévoué à la France et à l’Empereur » car les populations doivent montrer « qu’elles ont su apprécier les bienfaits dont les a comblés le Chef de l’État254 ». L’élection est ainsi vue comme un système de « don/contre-don » où le suffrage permet aux électeurs de remercier l’empereur pour les mesures qu’il a prises en faveur de Nice et de l’ancien comté. Le quotidien s’efforce par ailleurs de donner un caractère plus « national » à l’élection en soulignant que les fonctions remplies par Lubonis durant l’annexion « donnent à sa candidature un caractère de nationalité et de haute convenance politique ». Le journal assure que sa victoire « sera saluée dans toute la France comme un acte de justice, comme un gage nouveau de nos sentiments nationaux255 ». Selon le quotidien, le nom de Lubonis signifie « France et Nice », tandis que celui d’Avigdor ne représente que lui-même. Le Messager s’efforce ainsi de conférer à l’élection un caractère national et l’assimile à une sorte de second plébiscite d’annexion. Il essaie de renforcer l’enjeu de l’élection, afin d’en assurer le résultat et de montrer que tout vote autre que celui pour Lubonis constituerait une preuve d’opposition, voire de « non-francité » de la population annexée.
122Henry Avigdor et ses partisans mènent une campagne active et profitent de la lenteur prise par l’administration pour choisir le candidat officiel. Le commissaire de Sospel indique que, dans cette ville, « le mal est grand, le gouvernement ayant tardé à proposer M. Lubonis256 ». Le candidat fait distribuer des tracts et des bulletins aux gens de la campagne par ses amis et ses connaissances257. Il fait publier ses principales interventions au parlement de Turin afin de rappeler l’ancienneté de ses liens avec la France et avec Napoléon III ainsi que ses actions politiques passées, notamment sa défense des franchises du port258.
123Le candidat indépendant reçoit le soutien d’un certain nombre de petits notables. Le 7 décembre, le commissaire de Sospel signale que l’adjoint au maire de cette commune, Maulandi, qui habite Nice, doit se rendre à Sospel pour y faire de la « propagande » en faveur d’Avigdor259. Le commissaire surveille aussi le notaire et secrétaire de la mairie, Alberti, qui est également le beau-frère de Maulandi. Des considérations de politiques municipales jouent ici un certain rôle. Selon le commissaire, Maulandi et Alberti cherchent à faire destituer Borriglione, « dévoué au gouvernement français », en faisant élire Avigdor, sur lequel Maulandi compte pour se faire nommer maire de Sospel260.
124Les soutiens d’Avigdor appartiennent souvent au monde politique municipal et seraient, selon les sources, d’anciens partisans de l’Italie. À Sospel, le commissaire désigne comme membres du « parti italien » les deux adjoints du maire, dont Maulandi, le notaire et secrétaire de la commune, Alberti, mais aussi le sous-secrétaire, un fils de l’adjoint, un ancien syndic, un ancien secrétaire des communes de Castellar, Castillon et Peille, et un huissier. Selon le commissaire, ces derniers ont distribué plus de 6 000 bulletins Avigdor. Sur le plan politique, les partisans d’Avigdor sont, toujours selon le commissaire, pro-italiens. Léon Pastoris, fils d’un adjoint de Sospel est ainsi qualifié d’« italianissime » et Vachieri, ancien syndic de Sospel, de « très italianissime et garibaldien enragé261 ». Le commissaire de police de Saint-Martin-Lantosque rapporte qu’il a entendu dire que, dans le village de Belvédère, « tout le monde voterait pour M. Avigdor parce qu’il avait promis qu’avant deux ans ils seraient italiens262 ». Louis Lubonis semble, de fait, cristalliser contre lui les oppositions à l’annexion. Le Messager de Nice affirme que c’est en raison de son rôle pendant le rattachement que Lubonis voit « se déchaîner contre lui les haines d’un parti également ennemi de la France et de l’Italie263 », c’est-à-dire le parti anti-annexionniste. Le quotidien indique également qu’une « feuille locale », vraisemblablement la Gazette de Nice, appelle les électeurs « à faire acte d’indépendance » en votant pour Avigdor264.
125Certains élus locaux n’hésitent pas à faire pression en faveur du candidat opposant. À Berre, lors d’une réunion du conseil municipal, le maire menace les conseillers en leur disant que « celui qui votait pour M. Lubonis serait immédiatement mis hors du conseil ». Il assure que le candidat officiel est « un mauvais sujet qui ne ferait jamais rien pour le pays et qu’il ferait comme il a fait au moment de l’annexion, qu’il vendrait son pays comme il a déjà vendu Nice à la France265 ». Le maire aurait promis aux conseillers « qu’il y aurait quatre cents francs à manger si l’affaire allait bien ». Il aurait enfin déclaré « qu’à présent on avait promis pour ce dernier et qu’il ne fallait pas manquer de parole, que Monsieur le Préfet ne commandait pas ».
126La veille de l’élection, le maire n’affiche la proclamation du préfet en faveur de Lubonis que durant deux ou trois heures et ne distribue pas les bulletins du candidat officiel. Il distribue en revanche ceux d’Avigdor à l’aide de son adjoint, qui est également son gendre. Un ancien carabinier et le curé du village font également campagne contre le candidat officiel. L’auteur du rapport spécifie que le curé « mène la barque ».
127À Fontan, le commissaire signale quatre personnes qui font « une propagande active et suivie » en faveur d’Avigdor. Il s’agit d’Honoré Bottone, cultivateur et propriétaire à Fontan, de son frère, prêtre desservant la chapelle Saint-Jacques de Fontan, de Théophile Bottone, élève notaire domicilié à Nice mais votant à Fontan, et enfin d’un autre curé, Liprandi, chez lequel le commissaire remarque « une grande quantité de paysans qui montent et qui descendent de chez lui » et qui se trouve être « intimement lié avec la famille Bottone266 ». Deux ecclésiastiques font donc partie de l’opposition au candidat officiel.
128De nombreuses rumeurs circulent, tendant à discréditer le candidat officiel267. À Sospel, selon le commissaire, Maulandi fait courir le bruit que Lubonis est sourd et qu’il va se retirer. Lorsque le commissaire le convoque pour le réprimander, Maulandi lui rapporte un autre « bruit » : le préfet se serait rendu chez l’évêque pour lui donner des bulletins en faveur de Lubonis et aurait reçu un camouflet du prélat268. Avigdor, pour sa part, fait courir la rumeur qu’il est lui aussi candidat officiel, ce qui oblige le préfet à faire publier un avis rappelant que Lubonis est le seul candidat du gouvernement269.
129Les distributions d’argent et les rastels semblent avoir été assez fréquents. À Sospel, des « bruits d’argent et de repas » circulent avant même l’annonce de la candidature de Lubonis270. À Coaraze, un cultivateur assure à l’adjoint de sa commune qu’« après le vote M. Avigdor paierait à boire et à manger aux électeurs, mais que M. Lubonis ne payait rien271 ». L’aubergiste du village déclare lui aussi qu’on « ne paye rien pour M. Lubonis ; tandis qu’on payera pour M. Avigdor, il faut donc voter pour lui. » Il affirme qu’Avigdor a fait commander un repas chez l’aubergiste de Berre et il espère que le candidat opposant en fera autant chez lui272.
130L’élection déclenche enfin menaces et disputes. À Sospel, un habitant reçoit une lettre anonyme « remplie de menaces, s’il ne votait pas pour Avigdor273 ». Dans un café, on lui reproche de se laisser « influencer par le gouvernement » alors qu’il avait promis qu’il voterait pour le candidat indépendant274. Dans le cas de Sospel, le seul à être bien documenté, le système d’interconnaissance propre aux villages et aux petites villes a manifestement joué en défaveur du candidat officiel.
Le vote et les résultats
131Comme l’ensemble de la campagne, les deux jours de vote se déroulent dans une atmosphère tendue, du moins dans certaines communes. À Sospel, un garde forestier déclare avoir vu Maulandi arracher des mains de deux paysans qui se trouvaient dans l’escalier de la mairie, au moment où ils allaient voter, les bulletins qu’ils portaient pour Lubonis et leur en remettre au nom d’Avigdor275. Il aperçoit également un cabaretier qui procède de la même manière et le signale au maréchal des logis de gendarmerie. Lorsque ce dernier ordonne au cabaretier de sortir, celui-ci répond : « Je fais comme votre gendarme ». Le commissaire reconnaît qu’un gendarme distribuait des bulletins Lubonis, mais il était placé à l’entrée de la salle de vote et ne confisquait pas les bulletins Avigdor dont les paysans étaient porteurs. Une géographie subtile des lieux de pression interdits s’esquisse ici. Le commissaire de police fait intercepter les bulletins opposants distribués aux électeurs et, à la fin de la première journée du vote, le 9 décembre, il indique en avoir pris plus d’un millier, qu’il a mis au feu276.
132Dans plusieurs communes, des conseillers municipaux font pression en faveur du candidat indépendant277. À Coaraze, les membres du bureau, dont le maire, laissent l’un d’entre eux se lever de son siège, engager les électeurs à voter pour Avigdor et remplacer leur bulletins Lubonis par des bulletins au nom du candidat indépendant278. À Tourette-Revest, un conseiller municipal distribue des bulletins Avigdor malgré l’interdiction du maire279.
133Le manque d’habitude de certains élus provoque parfois des tensions. À Fontan, le secrétaire du bureau de vote comprend mal une dépêche télégraphique rappelant que Lubonis est le seul candidat officiel et déclare que tous les bulletins de vote Avigdor seront considérés comme nuls. Les frères Bottone, partisans d’Avigdor, réclament aussitôt qu’un procès-verbal soit dressé pour « constater cet acte d’illégalité, attendu que les votes doivent être entièrement libres ». À 4 heures, 171 électeurs seulement sur 315 ont voté et le commissaire pense que « beaucoup s’abstiendront de voter par l’influence que les sieurs Bottone exercent sur la population de Fontan280 ».
134Les résultats sont finalement assez décevants pour l’administration. Si Lubonis l’emporte largement sur Avigdor (70,9 % contre 28,9 % par rapports aux votants), le taux d’abstention est de 50,1 % et atteint 77,3 % à Nice. Il est impossible de dire avec certitude s’il s’agit d’une abstention d’indifférence ou de résistance. Si l’on additionne les abstentions aux votes Avigdor, on constate que peu de cantons adhèrent à la candidature Lubonis. Les électeurs inscrits se sont prononcés pour le candidat officiel à plus de 50 % dans sept cantons seulement sur seize. Si l’on tient compte du fait que les cantons de Breil (48,5 %) et de Saint-Martin-Lantosque (48,2 %) donnent presque la moitié de leur voix à l’abstention ou à Avigdor, ce sont essentiellement les cantons de l’ouest de l’ancien comté, à l’exception notables du canton de Saint-Sauveur, qui ont le plus soutenu le candidat officiel. Comme pour le plébiscite, le côté limitrophe de l’ancien département du Var a mieux suivi les consignes officielles que la partie proche de l’Italie. En définitive, le candidat officiel n’est élu que par 35,4 % des électeurs inscrits.
135Après la proclamation des résultats, les partisans d’Avigdor réagissent vivement à la défaite de leur candidat. À Sospel, les membres du « parti italien » affichent un placard hostile à un prêtre et à un conseiller municipal qui ont soutenu le candidat du gouvernement281. Ils rédigent une protestation accusant le commissaire de police et les gendarmes d’avoir influencé le vote et cherchent des signatures. Dans la soirée du 10 décembre, des membres du parti italien, en bandes de sept à huit personnes, essayent de chanter des « chansons italiennes et contre la France ». À la suite de ces événements, le commissaire engage « fortement » Maulandi à quitter Sospel en l’accusant de vouloir « soulever le parti italien ». L’intéressé s’exécute, le 12 décembre282. L’administration parvient, ici, à reprendre la situation en main.
136Globalement, le commissaire de police de Sospel dresse un bilan très mitigé du scrutin dans son canton : de nombreux notables, parfois élus municipaux, et presque tous les ecclésiastiques ont soutenu Avigdor. À l’échelle de la circonscription, dix protestations sont finalement déposées contre l’élection de Lubonis, dénonçant surtout l’intervention abusive des autorités en faveur du candidat officiel. L’élection est néanmoins validée par la Chambre des députés, le 5 mars 1861283.
137L’effondrement du nombre de voix favorables à l’Empire est très net, entre le plébiscite d’avril et les élections législatives de décembre. Les causes de cette évolution sont difficiles à déterminer avec certitude mais on peut néanmoins émettre plusieurs hypothèses. La pression officielle, mise en œuvre par une administration nouvelle et connaissant mal la situation locale, a certainement joué un rôle non négligeable. Les agents de l’administration française, commissaires de police, fonctionnaires locaux ou sous-préfets, n’ont vraisemblablement pas encore eu le temps de s’implanter au sein de leurs nouvelles circonscriptions et leur zèle s’est peut-être retourné contre eux. Le préfet Paulze d’Ivoy semble avoir manqué de tact envers certains de ses administrés284. Impliqué dans une histoire assez confuse de détournement de fonds et peut-être victime d’une « cabale » du parti français285, il est nommé dans le Cher dès le 5 janvier 1861 et remplacé par Denis Gavini de Campile, auparavant préfet de l’Hérault.
138Le gouvernement, par ailleurs, n’a manifestement pas choisi un très bon candidat en désignant Louis Lubonis plutôt que François Malausséna. Le premier, contrairement au second, n’a aucune expérience politique. Son action, en tant que gouverneur provisoire, n’a pas suffi à combler cette lacune et a peut-être joué en sa défaveur. Un certain nombre de notables et d’électeurs ont enfin visiblement peu apprécié le système de la candidature officielle. C’est du moins l’analyse de la Revue de Nice : « Habitué à une grande liberté d’action et de discussion, le peuple niçois auquel on avait promis de laisser le champ libre comme on l’a fait en Savoie, a été vivement blessé de voir surgir au dernier moment une candidature fort honorable sans doute, mais dont rien, au point de vue politique, ne semblait justifier le caractère officiel. Il a été affligé de voir se présenter au scrutin pour y former à eux seuls la majorité, des fonctionnaires, des agents de l’administration, des douaniers (étrangers au département au moins pour la majeure partie) et dont le vote connu d’avance ne pouvait avoir qu’une signification bien amoindrie286 ». L’apparition de premières déceptions relatives à l’annexion a, par ailleurs, certainement compté.
139La nature des votes favorables à Avigdor pose néanmoins problème. Les agents de l’administration désignent ses partisans comme étant tous des membres du « parti italien », des « garibaldiens », des « Italiens », voire des « italianissimes ». Pourtant, Avigdor proclame nettement, dans sa profession de foi, ses opinions françaises comme son adhésion à l’annexion. Il est donc probable que cette accusation, sans être complètement infondée, ait été en partie au moins abusive et proférée dans le but de discréditer Avigdor. Le candidat indépendant semble avoir catalysé sur sa personne plusieurs types d’oppositions : à l’annexion, vraisemblablement, mais aussi à la candidature officielle et, plus globalement, aux pratiques politiques et administratives autoritaires du Second Empire.
Les élections locales
140Les premières élections cantonales françaises du comté de Nice se déroulent le 29 décembre 1860 pour le premier tour et le 5 janvier 1861 pour le second. Le nombre d’élus a sensiblement diminué avec l’annexion puisque dix-sept sièges de conseillers généraux seulement sont à pourvoir contre vingt et un sièges de conseillers provinciaux auparavant. Le scrutin est assez disputé, signe que le changement de souveraineté provoque, là aussi, une sorte d’appel d’air. Vingt-cinq candidats se présentent au scrutin, soit une moyenne de 1,5 candidat par siège287. Les électeurs doivent désigner en même temps leurs conseillers généraux et leurs conseillers d’arrondissement, ce qui explique que plusieurs voix se soient égarées. Certains électeurs ont voté pour des candidats qui ne se présentaient pas ou qui se présentaient dans un autre canton. Ces tâtonnements témoignent de l’apprentissage des nouvelles pratiques électorales.
141Les élections cantonales montrent essentiellement la continuité du personnel politique local malgré le changement de souveraineté. Toutes les personnalités qui essaient alors d’entamer une carrière politique sont battues. Augustin Carlone, principal meneur du parti français, arrive en dernière position dans le canton de Nice-Est. L’ancien secrétaire du sénateur Pietri, Nicolas Rapetti, est largement battu dans celui de Nice-Ouest. Henry Avigdor, enfin, est devancé par le marquis Félix de Constantin dans le canton de Contes, qui a pourtant majoritairement voté pour lui lors des élections législatives288. En revanche, tous les anciens conseillers provinciaux qui se sont présentés sont réélus et représentent, en définitive, neuf conseillers généraux sur dix-sept, soit environ 53 % des élus. Si l’annexion a entraîné un certain renouvellement des élites politiques locales, elle n’a pas provoqué une rupture complète par rapport à l’avant 1860.
142L’administration s’est, comme pour les élections législatives, considérablement investie dans la campagne. Le juge de paix de Saint-Étienne rapporte que le maire et le curé « se sont rendus à [son] invitation en patronnant la candidature de l’honorable M. Sauvan », candidat officiel. On lui a assuré, en revanche, que le secrétaire de la mairie de Saint-Étienne « loin de concourir au succès de M. Sauvan avait fait tout son possible pour lui enlever des voix289 ». Plusieurs protestations sont déposées contre cette élection290. Tous les élus sont favorables à l’Empire. L’un d’entre eux, Eugène Escoffier, est néanmoins qualifié de « candidat indépendant » par une « feuille locale », vraisemblablement la Gazette de Nice291.
143L’étude des professions des élus montre que les hommes de loi maintiennent leur position dominante. Huit des conseillers sont des juristes, tandis que les négociants sont seulement au nombre de trois. Sont élus également deux propriétaires, dont un aristocrate, deux militaires en retraite, un ingénieur et un ancien professeur. Sept conseillers occupent d’autres fonctions politiques. Le maire de Nice, ses deux adjoints et un conseiller municipal sont ainsi élus, de même que deux anciens députés au parlement de Turin, Barthélémy Léotardi et Adrien Barralis, et le nouveau député Louis Lubonis. Ce sont donc essentiellement des notables ralliés à l’annexion, conservateurs modérés ou libéraux conservateurs convertis au bonapartisme, qui occupent en 1861 la majorité des sièges « niçois » du conseil général des Alpes-Maritimes.
144Les élections municipales de janvier et février 1861 constituent la dernière étape du processus électoral entamé avec les élections législatives. Conformément à la loi, le maire et les adjoints sont nommés avant les élections municipales, système qui permet au pouvoir de récompenser les fidèles et de rallier les notables conservateurs hésitants292. François Malausséna est nommé maire de Nice par décret impérial dès le 25 juin 1860 et le reste du conseil municipal est maintenu dans ses fonctions à la fin du mois de juillet293. Les maires des petites communes sont nommés par arrêté préfectoral le 11 janvier 1861 et ceux des communes plus importantes par décret impérial, le 12 janvier 1861294. Les élections municipales ont lieu le 26 et le 27 janvier pour les communes de plus de 2 500 habitants et le 27 janvier seulement pour les autres.
145À Nice, où trente-deux conseillers doivent être élus, Le Messager s’efforce de dépolitiser le scrutin afin d’éviter un nouvel affrontement entre partisans et adversaires de l’annexion295. La liste qu’il soutient compte seize membres de l’ancien conseil municipal élu avant l’annexion, essentiellement des propriétaires et des négociants296. Il s’agit des membres annexionnistes, anciens ou ralliés, du précédent conseil, dont le maire François Malausséna. À l’inverse, la Gazette soutient une liste composée d’anciens adversaires du changement de souveraineté, dont plusieurs anciens conseillers municipaux démissionnaires297. Le Messager reproche d’ailleurs à la Gazette de patronner une liste « d’exclusion » et non de « conciliation ». Les élections municipales voient donc s’affronter, à nouveau, partisans et adversaires de l’annexion.
146Les résultats sont, encore une fois, assez décevants pour l’administration. Le taux d’abstention est trop élevé pour rendre le scrutin valide et un second tour doit avoir lieu, les 2 et 3 février 1861298. À l’issue de celui-ci, tous les candidats soutenus par Le Messager sont élus, à l’exception d’un seul299. Le nouveau conseil municipal compte finalement dix-neuf conseillers sortants, soit 59 % de ses membres. Là encore, la continuité l’emporte assez nettement par rapport à l’avant 1860. L’administration, à tous les niveaux, s’appuie sur des notables ralliés par raison et/ou par devoir à l’annexion, en écartant les anciens membres du parti français à cause de leurs tendances politiques, de leur inexpérience ou de leur trop faible envergure sociale.
147Les élections municipales de janvier-février 1861 marquent également l’apparition d’une nouvelle et durable source de tensions. Quelques semaines après le scrutin, le quotidien Il Diritto, de Gênes, affirme en effet que « l’élément niçois » se trouve à présent en minorité dans le nouveau conseil municipal. Signe de l’importance de ce sujet, Le Messager réfute aussitôt cette accusation en assurant que, sur les treize nouveaux membres du conseil, huit sont des « Niçois » tandis que cinq seulement sont des « Français établis à Nice depuis fort longtemps300 ». Cette question de la proportion entre « Niçois » et « Français » au sein du conseil municipal marque l’apparition d’un nouveau et important problème, appelé à une longue existence : celui de la cohabitation entre nouvelles et anciennes élites et de la façon dont elles parviennent, ou non, à se répartir le pouvoir municipal. En distinguant les « Niçois » des « Français », elle montre également que la question de la « véritable » nationalité de Nice n’est, pour certains, toujours pas tranchée.
Conclusion
148Le déroulement de l’annexion montre l’habileté des représentants du Second Empire, mais aussi les limites de leur stratégie. Au début de l’année 1860, les notables francophiles, comme les négociants et propriétaires français établis à Nice, jouent un rôle moteur mais ambigu. Grâce au quotidien L’Avenir de Nice, ils ont structuré et organisé, depuis 1847, un parti annexionniste et ont diffusé leurs idées, mais la violence de leurs polémiques et leur passé républicain les marginalise, une fois le principe de l’annexion acquis. C’est dès lors l’administration impériale, par le biais de l’envoyé extraordinaire Pierre-Marie Pietri et du consul de France Léon Pillet, qui joue un rôle décisif en écartant les membres de L’Avenir de Nice et en parvenant à obtenir le ralliement de la majeure partie des élites. Ces dernières comprennent que le changement de souveraineté aura bien lieu et qu’il est inutile, voire nuisible à leur position sociale, de s’y opposer, d’autant plus qu’elles ne bénéficient plus du soutien de Turin. Elles soutiennent dès lors l’annexion et agissent en sa faveur lors du plébiscite. Après une période de bonne entente, au cours de laquelle Pierre-Marie Pietri rassure les notables, y compris en prenant des engagements qui ne sont ensuite pas tenus, plusieurs acteurs politiques se saisissent du scrutin législatif de décembre 1860 pour faire connaître leur mécontentement. Les difficultés, les déceptions et les frustrations apparaissent en effet assez vite, notamment en raison de la suppression de la Cour d’appel, qui lèse gravement les intérêts d’une partie importante de la bourgeoisie. Le remplacement de Roland Paulze d’Ivoy par Denis Gavini, au bout de six mois et demi seulement à la tête de la préfecture, montre que le gouvernement impérial est conscient de ce problème et cherche à y remédier. La culture politique libérale, prédominante au sein les élites niçoises, où elle est associée à une certaine « tradition » d’autonomie municipale, en partie mythifiée, se heurte aux pratiques politiques et administratives autoritaires du Second Empire. Ce hiatus entre deux sensibilités politiques différentes explique l’apparition de mécontentements et d’oppositions.
149L’évolution de l’opinion est difficile à déterminer avec précision, en raison de l’extrême partialité des sources, mais il semble certain que, dans un premier temps, la population se montre globalement plutôt hostile à l’annexion, du moins jusqu’à la proclamation de Victor-Emmanuel II. Si certains groupes sociaux, comme les négociants, y sont globalement favorables, d’autres, notamment les hommes de loi, y sont en majorité opposés car elle risque de remettre en cause leur position sociale et leurs intérêts. Or ce sont les élites qui fabriquent en partie l’opinion et cette dernière évolue quand elles changent de position. Ainsi s’expliquent les résultats du plébiscite, alors que la population n’était pas majoritairement favorable à la France quelques mois auparavant : les notabilités locales, une fois qu’elles ont compris qu’elles étaient abandonnées par Turin, se sont tournées vers la France pour conserver leur autorité et ont entraîné le reste de la population à leur suite.
150L’évolution des partis répond à des logiques similaires. Au début du processus d’annexion, le parti français est minoritaire, comme le montrent les résultats des élections locales de janvier 1860. L’autoritarisme du Second Empire exerce peu d’attraits dans une ville majoritairement libérale. Les anti-annexionnistes se recrutent dès lors à gauche (garibaldiens), au centre-gauche (libéraux) et à droite, en raison du légitimisme de la noblesse niçoise envers la dynastie de Savoie. L’annonce officielle de la future annexion entraîne un repositionnement des différents partis. Le centre-droit et le clergé se rallient au changement de souveraineté, à l’image du syndic de Nice, François Malausséna, ou du gouverneur Louis Lubonis dont les évolutions reflètent celle des libéraux conservateurs. La gauche et le centre-gauche, en revanche, y demeurent hostiles, tant par patriotisme italien que par rejet de l’autoritarisme du Second Empire. La majeure partie des élites politiques locales, notamment les syndics, acceptent le changement de souveraineté. Restés au pouvoir après 1860, ils permettent d’assurer une continuité politique au niveau local, indispensable pour le régime.
151Le plébiscite d’annexion révèle le hiatus entre les cultures politiques évoqué précédemment. L’opposition l’appréhende en effet comme s’il s’agissait d’un véritable référendum, alors qu’il ne s’agit, pour l’Empire, que d’un vote formel destiné à conférer une légitimité populaire, mais non démocratique, au changement de souveraineté. Ce sont bien deux conceptions antagonistes du suffrage universel qui se heurtent ici. Ce malentendu originel sur le sens du scrutin pèse ensuite d’un poids important sur l’évolution politique de l’ancien comté. Les résultats du plébiscite indiquent néanmoins, incontestablement, que la majorité des notables et de la population accepte l’annexion et renonce à une résistance qui aurait été inutile301. Se forge alors une triple représentation de l’annexion, considérée comme un sacrifice nécessaire à l’unité de l’Italie, un retour à la mère-patrie, ou un vote truqué et par conséquent illégitime. Trois images qui persistent bien au-delà de 1860.
152Les festivités explicitent la double intégration du comté de Nice dans la nation française et au sein du Second Empire. Si la ville et son territoire retrouvent la mère patrie, ils se donnent également à la personne de Napoléon III, avec lequel ils établissent une sorte de contrat moral et politique. La phase post-plébiscitaire montre la fragilité des ralliements sur lesquels s’est construite l’annexion. En décembre 1860, le candidat officiel est difficilement élu tandis que le candidat indépendant cristallise des oppositions qualifiées d’« italiennes » par les agents de l’administration, mais dont la nature est vraisemblablement plus complexe. Des notables et certains élus municipaux n’ont pas hésité, à cette occasion, à faire preuve d’une réelle indépendance vis-à-vis des consignes préfectorales. In fine, le gouvernement dispose du soutien d’hommes bien implantés et légitimes, mais presque tous ralliés à une annexion qu’ils n’ont pas souhaité.
Notes de bas de page
1 Lapierre Charles-Ferdinand, Deux hivers en Italie, Paris, Dentu ; Rouen, Haulard, 1861, p. 10-11.
2 Guichonnet Paul, Histoire de l’annexion de la Savoie à la France, Montmélian, La Fontaine de Siloé, 2003, p. 120-121 ; Guichonnet Paul, « Le plébiscite d’annexion de la Savoie (1860). Une relecture critique », inFol Michel, Sorrel Christian, Viallet Hélène (dir.), Chemins d’histoire alpine. Mélanges dédiés à la mémoire de Roger Devos, Annecy, Association des amis de Roger Devos, 1997, p. 383.
3 Gonnet Paul, La réunion de Nice à la France, Breil-sur-Roya, Éditions du Cabri, 2003 ; Guichonnet Paul, « Comment Nice devint française », in Histoire de l’annexion de la Savoie à la France, op. cit., p. 315-329. Le 150e anniversaire de l’annexion a suscité la publication de nombreux travaux, parmi lesquels il convient de citer les articles de Nice historique, no 1-2-3, 2010 ; Schor Ralph, Courriere Henri (dir.), Le comté de Nice, la France et l’Italie. Regards sur le rattachement de 1860. Actes du colloque organisé à l’Université de Nice Sophia Antipolis, 23 avril 2010, Nice, Serre, 2011 ; Milbach Sylvain (dir.), 1860. La Savoie, la France, l’Europe. Actes du colloque de l’Université de Savoie, 22 au 26 novembre 2010, Bruxelles, Peter Lang, 2012 (particulièrement les articles de Marc Ortolani et Simonetta Tombaccini Villefranque) ; Sorrel Christian, Guichonnet Paul (dir.), La Savoie et l’Europe, 1860-2010. Dictionnaire historique de l’Annexion, Montmélian, La Fontaine de Siloé, 2009 ; Varaschin Denis (dir.), Aux sources de l’histoire de l’annexion de la Savoie, Bruxelles, Peter Lang, 2009 (notamment l’article de Simonetta Tombaccini-Villefranque, p. 91-100), Ortolani Marc, Vernier Olivier, Bottin Michel (dir.), Consentement des populations, plébiscites et changements de souveraineté : à l’occasion du 150e anniversaire de l’annexion de Nice et de la Savoie à la France, Nice, Serre, 2013. Cf. également Case Lynn M., Édouard Thouvenel et la diplomatie du Second Empire, Paris, A. Pedone, 1976, p. 143-178 et Bruley Yves, Le Quai d’Orsay impérial. Histoire du Ministère des Affaires étrangères sous Napoléon III, Paris, A. Pedone, 2012.
4 Guichonnet Paul, « Le plébiscite d’annexion de la Savoie (1860). Une relecture critique », op. cit., p. 390.
5 Guichonnet Paul, Histoire de l’annexion de la Savoie à la France, op. cit., p. XXIX-XXXI.
6 Corbin Alain, « Recherche historique et imaginaire politique. À propos des campagnes françaises au XIXe siècle », in La politisation des campagnes au XIXe siècle. France, Italie, Espagne et Portugal, Rome, École française de Rome, 2000, p. 47-55.
7 Turrel Denise, « Introduction », in Turrel Denise (dir.), Villes rattachées, villes reconfigurées, XVIe-XXe siècles, Tours, Presses Universitaires François Rabelais, 2003, p. 11.
8 Rosanvallon Pierre, La démocratie inachevée. Histoire de la souveraineté du peuple en France, Paris, Gallimard, 2000, p. 201.
9 Guichonnet Paul, Histoire de l’annexion de la Savoie à la France, op. cit., p. 143-253.
10 Chiffres donnés par Le Messager de Nice le 27 avril 1860 et à prendre, par conséquent, avec précaution.
11 Compan André, « La Révolution de 1848. Ses répercussions dans l’ancien comté de Nice », Nice historique, 1949, no 2, p. 43-47 ; Compan André, « Les réfugiés politiques provençaux dans le comté de Nice après le coup d’État du 2 décembre 1851 », Provence historique, 1957, t. VII, fasc. 27, p. 61-75.
12 Compan André, « La révolution de 1848. Ses répercussions dans l’ancien comté de Nice », art. cit.
13 Le Messager de Nice, 21 octobre 1860. Le Messager prend la suite de L’Avenir le 3 avril 1860.
14 Brun François, « Notice biographique sur M. A. Carlone », Annales de la Société des lettres, sciences et arts des Alpes-Maritimes, 1873, t. II, p. 69-72 ; Sappia Henri, « Carlone Augustin », Nice historique, 1905, no 3, p. 46-48.
15 Derlange Michel (dir.), Les Niçois dans l’histoire, Toulouse, Privat, 1988, p. 120.
16 Hildesheimer Ernest, « La réunion de Nice à la France vue à travers la correspondance du ministère français des affaires étrangères », Nice historique, 1960, no spécial du Centenaire, p. 132.
17 Gonnet Paul, « La presse et l’opinion à Nice en 1848 », Provence historique, 1960, t. X ; fasc. 39, p. 5-10 ; Compan André, « Les réfugiés politiques provençaux dans le comté de Nice après le coup d’État du 2 décembre 1851 », art. cit.
18 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 4M482, rapport du consul de France à Nice au ministre de France à Turin, 28 avril 1851 ; rapports du commissaire spécial du Pont du Var au préfet, 20 mai 1851 et 1er juin 1851.
19 Compan André, « Les réfugiés politiques provençaux dans le comté de Nice après le coup d’État du 2 décembre 1851 », art. cit.
20 Mazon Albin, « Notes inédites publiées par Paul Messié », Nice historique, 1960, no spécial du Centenaire, p. 190 ; L’Avenir de Nice, 1er janvier 1860.
21 Cf. Hildesheimer Ernest, « La réunion de Nice à la France vue à travers la correspondance du ministère français des affaires étrangères », art. cit., p. 91-140.
22 Juge Victor, Mémoire sur l’annexion du comté de Nice à la France, Nice, Imprimerie Canis Frères, 1860, 63 p. Cet ouvrage rassemble des articles de Juge publiés dans L’Avenir de Nice à la fin de l’année 1859 et au début de l’année 1860. Les mêmes arguments sont employés par la Revue de Nice, qui prend également position pour la France.
23 Ibid., p. 19.
24 Ibid., p. 8.
25 Juge Victor, Mémoire sur l’annexion du comté de Nice à la France, op. cit., p. 14.
26 Cabanel Patrick, La question nationale au XIXe siècle, Paris, La Découverte, 1997, p. 9-10.
27 Burguiere André, Revel Jacques (dir.), Histoire de la France. L’espace français, Paris, Seuil, 2000, p. 209 ; Nordman Daniel, « Des limites d’États aux frontières nationales », in Nora Pierre (dir.), Les lieux de mémoire 1, Paris, Gallimard, 1997, p. 1139.
28 Noiriel Gérard, « Socio-histoire d’un concept : les usages du mot ‘‘nationalité’’ au XIXe siècle », in État, nation et immigration. Vers une histoire du pouvoir, Paris, Gallimard, 2005, p. 237-238.
29 Thiesse Anne-Marie, La création des identités nationales. Europe, XVIIIe-XXe siècle, Paris, Seuil, 2001, p. 133.
30 Hildesheimer Ernest, « La réunion de Nice à la France vue à travers la correspondance du ministère français des affaires étrangères », art. cit., p. 102 ; Mazon Albin, « Notes inédites publiées par Paul Messié », art. cit., p. 190.
31 Gazette de Nice, 22 décembre 1859.
32 Tombaccini Simonetta, La vie de la noblesse niçoise, 1814-1860, Nice, Acadèmia Nissarda et Torino, Centro Studi Piemontesi, 2010, p. 382-426.
33 Guichonnet Paul, « La droite savoyarde et piémontaise devant les événements de 1859 », Revue d’histoire moderne et contemporaine, no 2, 1960, p. 81-109.
34 Heyries Hubert, « Les militaires niçois entre deux patries, 1848-1871 », in Giaume Jean-Marc, Magail Jérôme (dir.), Le comté de Nice. De la Savoie à l’Europe. Identité, mémoire et devenir, Nice, Serre, 2006, p. 33-43.
35 Hildesheimer Ernest, « La réunion de Nice à la France vue à travers la correspondance du ministère français des affaires étrangères », art. cit. p. 96 ; Mazon Albin, art. cit., p. 190 ; L’Avenir de Nice, 18 mars 1860.
36 L’Avenir de Nice, 27 mars 1860 ; Mazon Albin, art. cit., p. 197-198 et 214.
37 Guichonnet Paul, Histoire de l’annexion de la Savoie à la France, op. cit., p. 70-71.
38 Gazette de Nice, 5 novembre 1859, 1er janvier 1860.
39 Troester Jérôme, « Des “baïonnettes intelligentes” ? La garde nationale sarde de Nice, instrument de socialisation national et libéral (1848-1860) », Recherches régionales, Alpes-Maritimes et contrées limitrophes, 2008, no 192, p. 74.
40 Gazette de Nice, 1er décembre 1859.
41 Gazette de Nice, 1er janvier 1860.
42 Emanuel Eugène, Montferrier H. G., Nice et l’Italie, Nice, Imprimerie Nationale, 1860, 45 p.
43 Ibid., p. 11.
44 Ibid., p. 24 ; Vegezzi-Ruscalla Giovenale, « La nazionalita di Nizza », Rivista contemporanea, 1860, p. 47.
45 Ibid., p. 25.
46 Derlange Michel (dir.), Les Niçois dans l’histoire, op. cit., p. 189.
47 Gazette de Nice, 20 octobre 1859.
48 Gazette de Nice, 21 octobre 1859.
49 Arch. Nat., F/1cI/129, rapport du préfet du Var au ministre de l’Intérieur, 24 mars 1860.
50 Bibliothèque de Cessole, Fonds Lubonis, lettre de Louis Lubonis au sénateur Pierre-Marie Pietri, 10 avril 1860.
51 Guichonnet Paul, Histoire de l’annexion de la Savoie à la France, op. cit., p. 143-253.
52 L’Avenir de Nice, 20, 22 et 23 janvier 1860.
53 L’Avenir de Nice, 11 février 1860.
54 L’Avenir de Nice, 26 mars 1860.
55 Guichonnet Paul, Histoire de l’annexion de la Savoie à la France, op. cit., p. 323 ; Rainero Romain H., « “De biens tristes nécessités” : Cavour et la discussion au Parlement de Turin sur l’annexion de Nice à la France », in Schor Ralph, Courriere Henri (dir.), Le comté de Nice, la France et l’Italie. Regards sur le rattachement de 1860, Nice, Serre, 2011, p. 41-60.
56 Le quotidien considère que « vus les nombreux éléments étrangers à Nice à qui la loi piémontaise a ouvert les abords du scrutin municipal », les élections ne peuvent être représentatives de la volonté de la population locale. Tous les sujets du royaume de Piémont qui habitent à Nice depuis six mois et qui remplissent les conditions de cens sont en effet autorisés à prendre part au vote. Le scrutin n’est donc pas réservé aux seuls Niçois « d’origine ». Le quotidien estime en outre qu’il est « peu convenable de faire appel aux passions politiques dans un moment où tout se prépare pour l’accord et la satisfaction des deux partis ». L’Avenir de Nice, 12 janvier 1860.
57 L’Avenir de Nice, 12 janvier 1860 et 13 janvier 1860.
58 L’Avenir de Nice, 19 janvier 1860 ; Gazette de Nice, 20 janvier 1860.
59 L’Avenir de Nice, 20 janvier 1860.
60 L’Avenir de Nice, 18 février 1860.
61 Corbin Alain, « L’agitation dans les théâtres de province sous la Restauration », in Le temps, le désir et l’horreur. Essais sur le dix-neuvième siècle, Paris, Flammarion, 1991, p. 53-79.
62 Gazette de Nice, 6 février 1860 ; L’Avenir de Nice, 7 février 1860.
63 L’Avenir de Nice, 7 février 1860 et 8 février 1860 ; Gazette de Nice, 7 février 1860 ; Arch. Nat., F/1cI/129, rapport du préfet du Var au ministre de l’Intérieur, 8 février 1860.
64 Gazette de Nice, 8 février 1860 ; Hildesheimer Ernest, « La réunion de Nice à la France vue à travers la correspondance du ministère français des affaires étrangères », art. cit., p. 100 ; L’Avenir de Nice, 9 février 1860 ; Gazette de Nice, 9 février 1860 ; L’Avenir de Nice, 10 février 1860.
65 L’Avenir de Nice, 12 mars 1860.
66 Schor Ralph (dir.), Dictionnaire historique et biographique du comté de Nice, Nice, Serre, 2002, p. 265-266.
67 L’Avenir de Nice, 13 mars 1860 ; Arch. Nat., F/1cI/129, rapport du préfet du Var au ministre de l’Intérieur, 12 mars 1860.
68 L’Avenir de Nice, 7 mars 1860 ; 9 mars 1860 ; 12 mars 1860.
69 L’Avenir de Nice, 14 mars 1860.
70 L’Avenir de Nice, 26 mars 1860.
71 L’Avenir de Nice, 27 mars 1860.
72 L’Avenir de Nice, 1er avril 1860.
73 L’Avenir de Nice, 17 mars 1860.
74 L’Avenir de Nice, 19 mars 1860, 21 mars 1860 et 26 mars 1860.
75 Guichonnet Paul, Histoire de l’annexion de la Savoie, op. cit., p. 326.
76 L’Avenir de Nice, 27 mars 1860.
77 Le Messager de Nice, 11 avril 1860.
78 Ibid.
79 Bibliothèque de Cessole, fonds Lubonis, lettre de Louis Lubonis au sénateur Pietri, 10 avril 1860.
80 Mazon Albin, « Notes inédites, publiées par Paul Messié », art. cit., p. 202-203.
81 Bottin Michel, « Le “parti français” après l’annexion ». Chronique de la vie politique niçoise d’après la correspondance d’Auguste Carlone (juin-décembre 1860) », Nice historique, 2010, no 1-2-3, p. 197.
82 Guichonnet Paul, Histoire de l’annexion de la Savoie à la France, op. cit., p. 216-221.
83 Girard Louis, Napoléon III, Paris, Fayard, 1986, p. 275. Cf. également Arch. Nat., F 1 b 1 – 170-15, dossier des frères Pietri ; Bargeton René, Les préfets du 11 ventôse an VIII au 4 septembre 1870, Paris, Archives Nationales, 1981 ; Robert A., Cougny G., Dictionnaire des parlementaires français, 1789-1889, 1889 ; Bellagamba Ugo, « Pierre-Marie Pietri, l’homme dans le clair-obscur de l’annexion », Nice historique, no 1-2-3, 2010, p. 93-109.
84 Le Messager de Nice, 3 avril 1860.
85 En mars 1860 pour l’Émilie et la Toscane, en novembre pour les Marches et l’Ombrie. Cf. Pecout Gilles, Naissance de l’Italie contemporaine, Paris, Armand Colin, 2004, p. 141.
86 Le Messager de Nice, 4 avril 1860. Né à Nice le 9 août 1815, fils d’un commissaire de police de Nice, Louis Lubonis a étudié au collège des Jésuites de Nice, puis à l’Université de Turin où il a obtenu un doctorat en droit. Imbert Léo, « Louis, Lubonis, gouverneur provisoire de la province de Nice », Nice historique, 1960, no spécial du Centenaire, p. 143.
87 Le Messager de Nice, 3 avril 1860.
88 Ibid.
89 Le Messager de Nice, 6 avril 1860 : « À la voix auguste du Roi, toute incertitude sur notre avenir a disparu. De la même manière, à ces augustes paroles doivent disparaître désormais les dissensions et les rivalités. Tous les citoyens doivent être animés par le même esprit de conciliation. Toutes les oppositions doivent se briser impuissantes contre les intérêts de la patrie et le sentiment du devoir. Au surplus, elles trouveraient un obstacle insurmontable dans les désirs mêmes de Victor-Emmanuel. Les démonstrations publiques dans ce moment n’ont plus raison d’être. Leur seul but serait de compromettre l’ordre public, qui sera désormais protégé énergiquement. La confiance, la tranquillité et le recueillement doivent présider à l’acte solennel auquel vous serez appelés ».
90 Le Messager de Nice, 14 avril 1860.
91 Le Messager de Nice, 8 avril 1860 : « En présence du traité du 24 mars ; en présence de la proclamation de S. M. notre Roi bien-aimé, du 1er avril ; tous ceux qui aiment véritablement leur pays, tous ceux qui sont sincèrement dévoué au Roi, et à la cause italienne ne peuvent avoir qu’une seule pensée, qu’un seul but : c’est que la haute volonté des deux Souverains, acceptée par le libre consentement du peuple, ne rencontre ni difficulté, ni obstacle ; c’est que sa franche et loyale exécution resserre d’une manière indissoluble les liens de l’alliance des deux grandes Nations, sur lesquelles reposent l’avenir et les espérances de l’Italie ».
92 Le Messager de Nice, 12 avril 1860.
93 Le Messager de Nice, 11 avril 1860.
94 Le Messager de Nice, 14 avril 1860.
95 Le Messager de Nice, 13 avril et 14 avril 1860.
96 L’Avenir de Nice, 25 mars 1860.
97 Le Messager de Nice, 12 avril 1860.
98 Le Messager de Nice, 13 avril 1860.
99 Le Messager de Nice, 14 avril 1860 ; Mazon Albin, « Notes inédites, publiées par Paul Messié », art. cit., p. 203.
100 Le père Jacques explique ainsi à Jean : « Tu vois, mon ami, comme tout ça tournerait : des impôts bien réglés, des fabriques partout, et avec ça, le commerce ira bien ; nos huiles, nos oranges, nos parfumeries, nos bois et nos divers produits entreront librement en France, et se vendront mieux ». Les avantages de l’annexion du comté de Nice à la France. Conversation entre Jean et le père Jacques, Nice, Imprimerie Canis Frères, 1860, 16 p. ; ici, p. 14.
101 Brochure conservée aux Archives historiques du diocèse de Nice et citée par Bouis Gilles, « Monseigneur Jean-Pierre Sola et le clergé niçois face à l’annexion de 1860 », Nice historique, no 1-2-3, 2010, p. 80.
102 Le Messager de Nice, 13 avril 1860. Léopold Amat, né à Toulouse en 1814 et mort à Nice en 1872, était un auteur de chansons installé à Nice pour raisons de santé. Derlange Michel (dir.), Les Niçois dans l’histoire, op. cit., p. 16-17.
103 Le Messager de Nice, 21 avril 1860.
104 L’Air de la reine Hortense est un morceau intitulé En revenant de Syrie, composé par la reine Hortense, mère de Napoléon III. Il est le signe de ralliement des bonapartistes depuis 1815. Dalisson Rémi, Les Trois couleurs, Marianne et l’Empereur. Fêtes libérales et politiques symboliques en France, 1815-1870, Paris, La Boutique de l’Histoire, 2004, p. 253.
105 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 1M346, rapport du préfet au procureur général d’Aix-en-Provence, 4 août 1860.
106 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 1M346, lettre de J. Jalabert au préfet, 21 mars 1861 ; Le Messager de Nice, 17 avril 1860.
107 Arch. Nat., F/1cIII/Alpes-Maritimes nouveau département/2, lettre du maire de Sospel au préfet, 25 octobre1860 ; rapport du préfet au ministre de l’Intérieur, 29 octobre 1860.
108 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 1M346, rapport du préfet au ministre de l’Intérieur, 13 février 1873.
109 Le Messager de Nice, 3 avril 1860.
110 Imbert Léo, « Autour de l’annexion. Souvenirs du capitaine Segretain sur Nice (avril-mai 1860) », Nice historique, avril-juin 1949, p. 33-42.
111 Gazette de Nice, 30 mars 1860 ; Bibliothèque de Cessole, fonds Lubonis, lettre de Louis Lubonis au sénateur Pietri, 10 avril 1860 ; Hildesheimer Ernest, « La réunion de Nice à la France vue à travers la correspondance du ministère français des affaires étrangères », art. cit., p. 115-117.
112 L’Avenir de Nice, 17 mars 1860.
113 L’Avenir de Nice, 18 mars 1860.
114 L’Avenir de Nice, 20 mars 1860.
115 Gazette de Nice, 30 mars 1860.
116 Gazette de Nice, 31 mars 1860.
117 Gazette de Nice, 1er avril 1860.
118 L’Avenir de Nice, 25 mars 1860.
119 L’Avenir de Nice, 29 au 30 mars 1860 ; Gazette de Nice, 30 mars 1860.
120 L’Avenir de Nice, 21 mars 1860.
121 Il Nizzardo, 21 marzo 1860.
122 L’Avenir de Nice, 26 mars 1860.
123 Mazon Albin, « Notes inédites, publiées par Paul Messié », art. cit., p. 199.
124 Le Messager de Nice, 9 au 10 avril 1860.
125 Le Messager de Nice, 17 avril 1860.
126 Ibid.
127 Gazette de Nice, 31 mars 1860.
128 Le Messager de Nice, 12 avril 1860.
129 L’Avenir de Nice, 18 mars 1860.
130 L’Avenir de Nice, 14 mars 1860.
131 Gazette de Nice, 7 avril 1860.
132 Gazette de Nice, 10 avril 1860.
133 Ibid.
134 Hildesheimer Ernest, « La réunion de Nice à la France vue à travers la correspondance du ministère français des affaires étrangères », art. cit., p. 125 ; Guichonnet Paul, Histoire de l’annexion de la Savoie à la France, op. cit., p. 213-216.
135 Arrêtée du gouverneur de l’arrondissement de Nice, 7 avril 1860, publié dans Le Messager de Nice du 8 avril.
136 Ibid.
137 Le Messager de Nice, 15 avril 1860.
138 Ibid.
139 Huard Raymond, Le suffrage universel en France (1848-1946), Paris, Aubier, 1991, p. 76-86.
140 Le Messager de Nice, 13 avril 1860.
141 Le Messager de Nice, 16 avril 1860 ; Mazon Albin, « Notes inédites, publiées par Paul Messié », art. cit., p. 215.
142 Arch. Nat., F/1cIII/Alpes-Maritimes/2, Nota delle somme sborsati dal sottoscritto il giorno diciesette aprile p p all’epoca della votazione per l’annessione, d’ordine del sign sindaco di questa citta, Sospello, 10 8bre 1860. Aucune source sérieuse, digne et foi et contemporaine des événements ne permet en revanche d’affirmer que le voté a été entaché d’irrégularités ou « truqué ». Cela paraît en outre peu probable, la pression des autorités et des notables, ainsi que l’encadrement du vote, ayant été suffisamment efficaces.
143 Le Messager de Nice, 17 avril 1860.
144 Le Messager de Nice, 20 avril 1860.
145 Archives municipales de Nice, Bibliothèque de Cessole, Fonds Lubonis, 100/2. Appelés à voter le 22 avril 1860, les militaires niçois se prononcent à 88,77 % pour l’annexion, les « non » représentant 10,23 %. Cf. Heyries Hubert, « Les militaires niçois entre deux patries, 1848-1871 », in Giaume Jean-Marie, Magail Jérôme (dir.), Le comté de Nice. De la Savoie à l’Europe. Identité, mémoire et devenir, Nice, Serre, 2006, p. 36.
146 Bluche Frédéric, « L’adhésion plébiscitaire », in Bluche Frédéric (dir.), Le prince, le peuple et le droit. Autour des plébiscites de 1851 et 1852, Paris, PUF, 2000, p. 3-29 ; ici p. 9-10.
147 Guichonnet Paul, Histoire de l’annexion de la Savoie à la France, op. cit., p. 231.
148 Papon Sylvestre, Voyage dans le département des Alpes Maritimes, avec la description de la ville et du terroir de Nice, de Menton, de Monaco, etc., Paris, An XII-1804 ; Fodere François Emmanuel, Voyages aux Alpes Maritimes, ou Histoire naturelle, agraire, civile et médicale du comté de Nice et pays limitrophes, Paris, 1821.
149 Le Messager de Nice, 21 avril 1860.
150 Mazon Albin, « Notes inédites, publiées par Paul Messié », art. cit., p. 215.
151 Gazette de Nice, 13 avril 1860. C’est toujours la même chanson : « Notre roi, leur dit-on, a cédé Nice à l’empereur, c’est une affaire faite. Il faut que vous veniez dimanche reconnaître le nouveau gouvernement en déposant dans l’urne un bulletin portant : oui ! Ceux qui ne se rendront pas à l’appel, il leur arrivera malheur ; pour ceux qui se rendront les cailles tomberont rôties, toutes les bénédictions de la terre se répandront sur eux. À preuve voilà les manifestes du gouverneur, des syndics et de Mgr l’évêque. » Que peuvent répondre les pauvres habitants de nos campagnes et de nos villages à de tels arguments que personne n’a le courage de contredire par divers motifs ?
152 Gazette de Nice, 15 avril 1860.
153 Le Messager de Nice, 26 avril 1860.
154 Le Messager de Nice, 29 avril 1860.
155 Le Messager de Nice, 17 avril 1860.
156 Le Messager de Nice, 21 avril 1860.
157 Le Messager de Nice, 5 mai 1860.
158 Le Messager de Nice, 8 mai 1860.
159 Guichonnet Paul, Histoire de l’annexion de la Savoie à la France, op. cit., p. 327-328. Cf. également Rainero Romain H., « “De biens tristes nécessités” : Cavour et la discussion au Parlement de Turin sur l’annexion de Nice à la France », in Schor Ralph, Courriere Henri (dir.), Le comté de Nice, la France et l’Italie. Regards sur le rattachement de 1860, Nice, Serre, 2011, p. 41-60.
160 Le Messager de Nice, 10 juin 1860.
161 Arch. Nat., F/1cI/129, rapport de Pierre-Marie Pietri au ministre des Affaires étrangères, 27 avril 1860.
162 Robert Jean-Baptiste, Histoire de Monaco, Paris, PUF, 1997, p. 67.
163 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 1M365, lettre du ministre de l’Intérieur au préfet, 28 août 1860.
164 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 1M365, lettre du ministre de l’Intérieur au préfet, 28 août 1860.
165 Robert Jean-Baptiste, Histoire de Monaco, op. cit., p. 71.
166 Le Messager de Nice, 8 mai 1860.
167 Arch. Nat., F/1cI/129, rapport de Pietri au ministre des Affaires étrangères, 27 avril 1860.
168 Bouisset Christine, « Le découpage de la frontière franco-italienne dans les Alpes-Maritimes en 1860 et ses conséquences : entre conflits locaux et enjeux internationaux », in Desplat Christian (dir.), Frontières, Paris, CTHS, 2002, p. 167-179.
169 Le Messager de Nice, 14 mai 1860.
170 Le Messager de Nice, 30 mai 1860.
171 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 1M364, pétition au préfet, 19 juin 1860.
172 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 1M364, lettre de Jacques Beghelli, président du comité de La Brigue, au préfet, 24 juin 1860.
173 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 1M364, lettre du préfet au ministre de l’Intérieur, 30 juin 1860.
174 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 1M364, lettre du commissaire royal Pirinoli au préfet, 2 juillet 1860.
175 Le Messager de Nice, 15 juillet 1860.
176 Bouisset Christine, « Le découpage de la frontière franco-italienne dans les Alpes-Maritimes en 1860 et ses conséquences : entre conflits locaux et enjeux internationaux », art. cit., p. 167.
177 Latouche Robert, « Deux communes sacrifiées en 1860 : Tende et La Briga. Un épisode lamentable de l’annexion du comté de Nice », Revue de géographie alpine, 1945, t. 33, fasc. 3, p. 554-555.
178 Arch. Nat., BB/30/370/3, rapport du procureur général d’Aix au garde des Sceaux, 6 octobre 1860.
179 Hildesheimer Ernest, « La question de la Cour d’appel et de l’organisation judiciaire à Nice en 1860 », Nice historique, 1986, no 3, p. 65-74. La Cour d’appel de Nice couvrait les provinces de Nice, San Remo et Oneille ; Arch. Nat., F/1cIII/Alpes-Maritimes nouveau département/2, rapports du préfet au ministre de l’Intérieur, 21 juin 1860 et 5 juillet 1860.
180 Imbert Léo, « Louis, Lubonis, gouverneur provisoire de la province de Nice », art. cit., p. 156-157 ; Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 1M559, dossier Adrien Faissole.
181 Arch. Nat., BB/30/370/3, rapport du procureur général d’Aix-en-Provence au garde des Sceaux, 6 octobre 1860. « L’élément qui dominait autrefois à Nice est aujourd’hui bien amoindri. Il se rencontrait à peu près exclusivement dans le monde judiciaire : magistrats de la Cour, du Tribunal, avocats, avoués. Il faut reconnaître que ce personnel beaucoup trop nombreux était loin de mériter par son intelligence et son honorabilité l’influence dont il s’était emparé. Aujourd’hui, cette fraction de la bourgeoisie niçoise, qui ne fût pas étrangère aux désordres qui ont précédé l’annexion, est déchue de son ancienne importance. Parmi ses membres, les uns ont déclaré vouloir conserver la nationalité sarde, les autres se sont résignés à remplir un rôle plus modeste et Nice est délivrée de ces influences locales qui pesèrent si longtemps sur l’administration de la justice piémontaise ».
182 Arch. Nat., F/1cI/129, rapport de Pietri au ministre des Affaires étrangères, 27 avril 1860 : « Les administrations de ce pays sont composées de Niçois et de Piémontais. Le départ de ceux-ci donnera lieu à des nominations qu’il importe de prévoir. Des employés niçois en trop grand nombre manqueraient d’initiative, d’activité, d’impartialité et seraient un obstacle pour l’assimilation. Des employés français n’auraient pas, sur les hommes, les choses, les habitudes de ce pays, les notions indispensables à un bon exercice des services publics et seraient exposés à des erreurs toujours compromettantes au début. Il faudra donc procéder avec un certain tempérament à toutes les nominations que l’on aura à faire ». Cf. également Arch. Nat., F/1cIII/Alpes-Maritimes nouveau département/2, rapport du préfet au ministre de l’Intérieur, 22 juin 1860.
183 Arch. Nat., F/1cIII/Alpes-Maritimes nouveau département/2, lettre d’Adrien Barralis à l’empereur, 7 mai 1860.
184 Arch. Nat., F/1cIII/Alpes-Maritimes nouveau département/2, rapport du sénateur Pietri au ministre de l’Intérieur, 17 mai 1860.
185 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 1M563, dossiers Auguste Carlone et Adrien Faissole.
186 Corbin Alain, Gerome Noëlle, Tartakowsky Danielle (dir.), Les usages politiques des fêtes aux XIXe-XXe siècles, Paris, Publications de la Sorbonne, 1994 ; Ihl Olivier, La fête républicaine, Paris, Gallimard, 1996 ; Dalisson Rémi, Les Trois couleurs, Marianne et l’Empereur. Fêtes libérales et politiques symboliques en France, 1815-1870, Paris, La Boutique de l’Histoire, 2004 ; Hazareesingh Sudhir, La Saint-Napoléon. Quand le 14 juillet se fêtait le 15 août, Paris, Tallandier, 2007 ; Mariot Nicolas, « Qu’est-ce qu’un « enthousiasme civique » ? Sur l’historiographie des fêtes politiques en France après 1789 », Annales HSS, 2008, no 1, p. 113-139.
187 Corbin Alain, « Préface », in Les usages politiques des fêtes aux XIXe-XXe siècles, op. cit., p. 11.
188 Dalisson Rémi, Les Trois couleurs, Marianne et l’Empereur, op. cit., p. 214 ; Menager Bernard, Les Napoléon du peuple, Paris, Aubier, 1988, p. 150-157.
189 Corbin Alain, « La fête de souveraineté », in Les usages politiques des fêtes aux XIXe-XXe siècles, op. cit., p. 27.
190 Dalisson Rémi, Les Trois couleurs, Marianne et l’Empereur, op. cit., p. 215.
191 Dalisson Rémi, Les Trois couleurs, Marianne et l’Empereur, op. cit., p. 220 ; Sanson Rosemonde, « Le 15 août : Fête nationale du Second Empire », in Les usages politiques des fêtes aux XIXe-XXe siècles, op. cit., p. 119.
192 Petiteau Natalie, Lendemains d’Empire. Les soldats de Napoléon dans la France du XIXe siècle, Paris, La Boutique de l’Histoire, 2003 ; Hazareesingh Sudhir, « La légende napoléonienne sous le Second Empire : les médaillés de Sainte-Hélène et la fête du 15 août », Revue historique, 2003, no 627, p. 543-566 ; Hazareesingh Sudhir, « Une déférence d’État. Les médaillés de Sainte-Hélène sous le Second Empire », Genèses, 2004, no 55, p. 27-40.
193 Le Messager de Nice, 19 mai 1860.
194 Cauvin François, « Les médaillés de Sainte-Hélène dans le comté de Nice », Nice historique, 1960, no spécial du Centenaire, p. 37.
195 Le Messager de Nice, 6 mai 1860, 9 mai 1860, 8 au 9 juin 1860.
196 Le Messager de Nice, 19 avril 1860.
197 Le Messager de Nice, 1er mai 1860.
198 Le Messager de Nice, 27 juillet 1860. Le texte n’est signé que par 23 membres du conseil sur 40. Le préfet se félicite néanmoins de cette adresse et y voit la confirmation de ses prévisions qui l’ont poussé à demander au gouvernement de ne pas traiter le département et la ville de Nice avec « moins de confiance » que la Savoie quant à l’organisation des municipalités. Cf. Arch. Nat., F/1cIII/Alpes-Maritimes nouveau département/2, rapport du préfet au ministre de l’Intérieur, 27 juillet 1860.
199 Le Messager de Nice, 12 août 1860.
200 Sanson Rosemonde, « Le 15 août : Fête nationale du Second Empire », art. cit., p. 117-136.
201 Banville Théodore de, Nice française, Nice, Imprimerie Suchet fils, 14 juin 1860, 21 p., ici p. 6.
202 Le Messager de Nice, 30 avril 1860.
203 Le Messager de Nice, 30 avril 1860.
204 Le Messager de Nice, 11 mai 1860.
205 Ibid.
206 Le Messager de Nice, 15 juin 1860.
207 Dalisson Rémi, Les Trois couleurs, Marianne et l’Empereur, op. cit., p. 226.
208 Sanson Rosemonde, « Le 15 août : Fête nationale du Second Empire », art. cit., p. 119 ; Hazareesingh Sudhir, La Saint-Napoléon. Quand le 14 juillet se fêtait le 15 août, Paris, Tallandier, 2007.
209 Dalisson Rémi, Les Trois couleurs, Marianne et l’Empereur, op. cit., p. 222 ; Sanson Rosemonde, « Le 15 août : Fête nationale du Second Empire », art. cit., p. 120.
210 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 1M364, circulaire du gouverneur aux syndics de l’arrondissement de Nice, 12 juin 1860.
211 Le Messager de Nice, 17 juin 1860.
212 Dalisson Rémi, Les Trois couleurs, Marianne et l’Empereur, op. cit., p. 230.
213 Ibid., p. 227.
214 Ibid., p. 236.
215 Corbin Alain, « La fête de souveraineté », art. cit., p. 25-27.
216 Le programme est publié dans Le Messager de Nice du 15 juin 1860.
217 Le Messager de Nice, 16 juin et 18-19 juin 1860.
218 Le Messager de Nice, 26 juin 1860.
219 Ibid.
220 Le Messager de Nice, 11 mai 1860.
221 Pecout Gilles, Naissance de l’Italie contemporaine, 1770-1922, Paris, Armand Colin, 2004, p. 112.
222 Deremeyez Jean-William, Ihl Olivier, Sabatier Gérard (dir.), Un cérémonial politique : les voyages officiels des chefs d’État, Paris, L’Harmattan, 1998 ; Mariot Nicolas, « “Nos fleurs et nos cœurs” La visite présidentielle en province comme événement institué », Terrain, no 38, 2002, p. 79-96 ; Mariot Nicolas, Bains de foule. Les voyages présidentiels en province, 1888-2002, Paris, Belin, 2006.
223 Menager Bernard, Les Napoléon du peuple, op. cit., p. 145-150. Cf. également Méjean Annie, « Utilisation politique d’une catastrophe : le voyage de Napoléon III en Provence durant la grande crue de 1856 », Revue historique, 1996, no 597, p. 133-151.
224 Corbin Alain, « La fête de souveraineté », art. cit., p. 29.
225 Rosanvallon Pierre, La démocratie inachevée, op. cit., p. 213.
226 Le Messager de Nice, 22 août 1860.
227 Le Messager de Nice, 13 septembre 1860.
228 Arch. Nat., F/1cIII/Alpes-Maritimes nouveau département/2, rapport du préfet au ministre de l’Intérieur, 22 août 1860 ; rapport du maire de Nice au préfet, 21 août 1860.
229 Le Messager de Nice, 13 septembre 1860.
230 Aprile Sylvie, La révolution inachevée, Paris, Belin, 2010, p. 417.
231 Corbin Alain, « La fête de souveraineté », art. cit., p. 28 ; Mariot Nicolas, « Qu’est-ce qu’un ‘‘enthousiasme civique’’ ? Sur l’historiographie des fêtes politiques en France après 1789 », art. cit., p. 116-120.
232 Sur la question de la politisation « dans et par le vote », cf. Offerle Michel, « Capacités politiques et politisations : faire voter et voter, XIXe-XXe siècles », Genèses, 2007, no 67, p. 131-149 ; no 68, p. 145-160. Pour les élections sous le Second Empire, cf. notamment Anceau Éric, « Les irrégularités et les incidents lors des élections législatives de 1852-1870 ou le difficile apprentissage du suffrage universel sous le Second Empire », in Bourdin Philippe, Caron Jean-Claude, Bernard Mathias (dir.), L’incident électoral de la Révolution à la Ve République, Clermont-Ferrand, Presses Universitaires Blaise-Pascal, 2002, p. 121-140
233 Le Messager de Nice, 30 novembre 1860 ; Basso Jacques, Les élections législatives dans le département des Alpes-Maritimes de 1860 à 1939. Éléments de sociologie électorale, Paris, LGDJ, 1968, p. 80-85.
234 Sur la difficile « quête de bons candidats », cf. Menager Bernard, Les Napoléon du peuple, op. cit., p. 199.
235 Arch. Nat., F/1cI/129, rapport de Pietri au ministre des Affaires étrangères, 27 avril 1860.
236 Le Messager de Nice, 30 novembre 1860.
237 Rapetti est resté proche des membres du parti français, notamment Tiranty, Carlone et Juge. Cf. Bottin Michel, « Nicolas Rapetti. Du Collège de France aux embûches politiques niçoises », Nice historique, 2010, no 1-2-3, p. 259.
238 Le Messager de Nice, 1er décembre 1860.
239 Ibid.
240 Ibid.
241 Le Messager de Nice, 3 décembre 1860.
242 Ibid.
243 Ibid.
244 Le Messager de Nice, 3 décembre 1860 et 4 décembre 1860.
245 Le Messager de Nice, 4 décembre 1860.
246 Le Messager de Nice, 4 décembre 1860 ; Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, tableau récapitulatif sur l’élection des 9 et 10 décembre 1860, s. d.
247 Imbert Léo, « Louis Lubonis, gouverneur provisoire de la province de Nice », art. cit., p. 174-175 ; Derlange Michel (dir.), Les Niçois dans l’histoire, op. cit., p. 22-23.
248 Le Messager de Nice, 4 décembre 1860.
249 Huard Raymond, Le suffrage universel en France (1848-1946), Paris, Aubier, 1991, p. 76-86 ; Voilliot Christophe, La candidature officielle. Une pratique d’État de la Restauration à la Troisième République, Rennes, PUR, 2005, p. 123-132.
250 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire de Sospel au préfet, 10 décembre 1860.
251 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire de Sospel au préfet, 10 décembre 1860.
252 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire de Sospel au préfet, 5 décembre 1860.
253 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire de Sospel au préfet, 7 décembre 1860.
254 Le Messager de Nice, 30 novembre 1860.
255 Le Messager de Nice, 9 décembre 1860.
256 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire de Sospel au préfet, 5 décembre 1860.
257 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire de Sospel au préfet, 5 décembre 1860.
258 Discours de M. le comte Henry Avigdor, député, sur les franchises du comté de Nice à la Chambre de Turin, Nice, Gilletta, 1860, 32 p. Le Piémont et la France en 1851. La France et le Piémont en 1860, Paris, Schiller, 1860, 37 p.
259 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire de Sospel au préfet, 7 décembre 1860.
260 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire de Sospel au préfet, 7 décembre 1860.
261 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire de Sospel au préfet, 15 décembre 1860.
262 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 1M343, rapport du commissaire de police de Saint-Martin-Lantosque, 16 au 31 janvier 1861.
263 Le Messager de Nice, 7 décembre 1860.
264 Ibid.
265 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport de gendarmerie, L’Escarène, 8 décembre 1860.
266 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire spécial de Fontan au préfet, 9 décembre 1860.
267 Sur le rôle des rumeurs, cf. Ploux François, De bouche à oreille. Naissance et propagation des rumeurs dans le France du XIXe siècle, Paris, Aubier, 2003.
268 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire de Sospel au préfet, 8 décembre 1860.
269 Le Messager de Nice, 9 décembre 1860.
270 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire de police de Sospel au préfet, 13 décembre 1860.
271 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire central de Nice au préfet, 15 décembre 1860.
272 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire central de Nice au préfet, 15 décembre 1860.
273 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire de police de Sospel au préfet, 13 décembre 1860.
274 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire de police de Sospel au préfet, 13 décembre 1860.
275 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire de police de Sospel au préfet, 13 décembre 1860.
276 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire de Sospel au préfet, 9 décembre 1860.
277 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire central de Nice au préfet, 15 décembre 1860 ; rapport du maire de Tourette-Revest au préfet, 12 décembre 1860.
278 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire central de Nice au préfet, 15 décembre 1860.
279 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du maire de Tourette-Revest au préfet, 12 décembre 1860.
280 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire spécial de Fontan au préfet, 9 décembre 1860.
281 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire de police de Sospel au préfet, 11 décembre 1860.
282 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M176, rapport du commissaire de police de Sospel au préfet, 13 décembre 1860.
283 Le Messager de Nice, 8 et 9 mars 1861.
284 Mazon Albin, « Notes inédites, publiées par Paul Messié », art. cit., p. 219.
285 Deharbe Karine, « Roland Paulze d’Ivoy, préfet de l’annexion », Nice historique, no 1-2-3, 2010, p. 138-142.
286 Lacroix Jean-Bernard (dir.), Napoléon III et les Alpes-Maritimes, Milan, Silvana Editorale, 2009, p. 71.
287 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M199, tableau récapitulatif des votes.
288 Le Messager de Nice, 5 janvier 1861.
289 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M199, rapport du juge de paix au préfet, 6 janvier 1861.
290 Arch. dép. des Alpes-Maritimes, 3M199, lettre d’Honoré Bottone au préfet, 1er janvier 1861.
291 Le Messager de Nice, 5 janvier 1861.
292 Hazareesing Sudhir, Wright Vincent, « Le Second Empire », in Fougere Louis, Machelon Jean-Pierre, Monnier François (dir.), Les communes et le pouvoir. Histoire politique des communes françaises de 1789 à nos jours, Paris, PUF, 2002, p. 282.
293 Le Messager de Nice, 30 juin 1860 ; Le Messager de Nice, 27 juillet 1860.
294 Le Messager de Nice, 14 au 15 janvier 1861.
295 Le Messager de Nice, 23 janvier 1861.
296 Le Messager de Nice, 25 janvier 1861.
297 Le Messager de Nice, 26 janvier 1861.
298 Le Messager de Nice, 28 au 29 janvier 1861.
299 Le Messager de Nice, 4 au 5 février 1861.
300 Le Messager de Nice, 1er au 2 avril 1861.
301 Sur la différence entre « choisir » et « consentir », cf. Rosanvallon Pierre, Le sacre du citoyen, op. cit., p. 26.
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