La propagande et la politisation de l’espace public en France pendant la guerre de Sept Ans et la guerre d’Indépendance américaine
p. 245-257
Texte intégral
1Dans quelle mesure les conflits de l’époque moderne contribuent-ils à façonner l’espace public ? Plus précisément, est-il légitime, pour les guerres de la deuxième moitié du XVIIIe siècle, de conclure à une politisation de l’espace public français par le conflit, voire pour le conflit ? Si l’on se fie aux dires d’un agent du secrétariat des Affaires étrangères, Jean-Louis Favier, la réponse ne fait pas l’ombre d’un doute1. Après la signature de l’alliance franco-américaine de février 1778 marquant l’engagement de la France dans la guerre d’Indépendance des États-Unis d’Amérique, le secrétaire d’État des Affaires étrangères de Louis XVI, le comte de Vergennes, s’emploie à intensifier la campagne de propagande visant à promouvoir la cause de la France et celle des Nord-Américains. C’est à cette occasion que Vergennes demande à Favier, qui possède une plume alerte, de rédiger des pamphlets défendant la politique de Versailles. Le 18 mars 1778, Favier répond à la proposition du ministre en ne cachant pas son embarras :
« Lorsque j’eus l’honneur de vous faire ma cour jeudi dernier, vous avez daigné me demander un travail sur le droit que le Roi a eu ou auroit de faire un traité de commerce, ou de contracter une alliance avec les États-Unis de l’Amérique, enfin de reconnoître authentiquement l’indépendance et la Souveraineté de cette nouvelle République. Depuis ce jour-là j’aurois fait un volume sur tout autre sujet du ressort de mes connoissances. Je me suis renfermé, j’ai beaucoup médité, recherché, travaillé, et je n’ai rien fait. Je ne prévois pas même que, ni par moi, ni par un autre, il y ait, là-dessus, rien à faire2. »
2Et Favier d’exposer les raisons de cette curieuse inertie. S’il avait obéi à Vergennes, il aurait été conduit à prouver le bon droit des Insurgents en mettant en exergue ce qu’il appelle « des principes anglo-américains3 ». Or ces principes, souligne-t-il,
« ne sont pas généralement reconnus et adoptés dans tout le reste de la société politique des États de l’Europe. Ils sont également proscrits des plus sages Républiques, ainsi que dans les vraies Monarchies4 ».
3Derrière l’appellation « principes anglo-américains », se dessinent les théories contractuelles puisées chez Locke et chez Sidney et avancées dès la crise du Stamp Act par les colons nord-américains pour justifier leur résistance aux mesures de la métropole5. Ce sont ces mêmes principes qui, en 1776, constituent l’ossature idéologique de la Déclaration d’Indépendance. Derrière l’expression utilisée par Favier se dessine également le principe de la souveraineté du peuple, principe qui a été énoncé avec une clarté éblouissante dans l’article 2 de la Déclaration des Droits de Virginie. Il va de soi que devant un tel corpus, une extrême vigilance s’impose, tant pour le publiciste que pour le ministre qui lui a demandé de composer des écrits. Favier met solennellement en garde Vergennes : insérer de tels « principes anglo-américains » dans une publication ministérielle reviendrait à donner non seulement un remarquable écho mais aussi une caution officielle à des idées susceptibles de miner les fondements de la monarchie française :
« Seroit-il décent de mettre dans la bouche d’un Roi de France, ou de ses Ministres, les assertions paradoxales sur la liberté naturelle, les droits inaliénables et inamissibles du peuple et sa souveraineté inhérente, qu’on n’a cessé de répéter, de commenter, de piller et de compiler pendant deux siècles, depuis les Vindiciæ contra tyrannos de François Hottoman6, jusqu’au Contrat social de J.-J. Rousseau ? Cela serait-il même prudent ? [...] Si le Roi, le Gouvernement paroissoient avouer de telles maximes serions-nous bien exactement à l’abri de l’application et de la rétorsion7 ? »
4Favier joue les Candide. Lorsqu’il écrit ces lignes, il n’est pas sans savoir que les « maximes » qu’il dénonce ont d’ores et déjà commencé à circuler en France. Non point sous la forme d’ouvrages clandestins vendus sous le manteau. Mais sous la forme d’écrits publiés avec la bénédiction du ministère.
5Les pages qui suivent ont pour premier objet de comprendre la mutation profonde qu’a connue la propagande gouvernementale pendant les deux dernières guerres de l’Ancien Régime et qui aboutit vers 1778 à la configuration que nous décrit Favier. Dès les débuts la guerre de Sept Ans, le système d’information contrôlé par le Secrétariat d’État des Affaires étrangères emprunte des sentiers inédits. S’efforçant de tenir compte des aléas du conflit tout en scrutant l’évolution de l’espace public, les publicistes aux ordres du ministère offrent à leurs lecteurs des écrits dont le contenu politique est loin d’être banal, la propagande des années de la guerre de Sept Ans participant activement au processus de transfert de la culture politique britannique dans l’Hexagone. Avec la révolte des Treize Colonies, leur indépendance et l’entrée de la France dans le conflit, ce processus aboutit, comme le souligne à sa manière Favier, à une situation paradoxale : la présence, dans un univers littéraire soumis aux contraintes du système de la Librairie, d’une littérature politique importée de Grande-Bretagne et des États-Unis qui, sur bien des points, se présente comme éminemment subversive. En d’autres termes, tout se passe comme si Versailles était devenu un agent actif de radicalisation de l’espace public. Il importera de s’interroger sur la dimension de cette politisation produite par le dispositif de persuasion publique.
6Au cours du second semestre 1755, tandis que l’attentat de Boscawen (10 juin 1755)8 laisse présager la réouverture des hostilités entre la France et son « ennemie naturelle », le système de propagande de guerre semble appelé à reprendre forme sur les bases établies à la fin du règne de Louis XIV9. Un bel exemple de cette apparente continuité avec l’époque de la guerre de Succession d’Espagne nous est présenté par l’ouvrage périodique lancé en 1755 par Jacob Nicolas Moreau, L’Observateur hollandais, dont le titre et la facture épistolaire rappellent les Lettres d’un Suisse à un Français de Jean de La Chapelle publiées entre 1702 et 170910. Les conditions propres au conflit qui se dessine, de même que le climat politique qui prévaut tant en France qu’en Grande-Bretagne, commencent cependant à influer sur la conception des ouvrages qui se préparent dans les bureaux du ministère. Malgré la présence dans les premières publications de la guerre de Sept Ans de l’héritage louis-quatorzien, le dispositif de propagande a déjà entamé une mutation qui, à terme, est appelée à conduire ses protagonistes vers des horizons radicalement nouveaux.
7Au cours des deux premières années du conflit, la propagande de guerre répond à quatre objectifs essentiels. En tout premier lieu, il importe de dissiper au plus vite l’ignorance de bien des Français sur les enjeux de ce conflit lointain aux teintes exotiques. Les publicistes se doivent d’être pédagogues en décrivant et en expliquant par le menu le rapport de forces sur le continent nord-américain. Après la déclaration de guerre, les auteurs au service du ministère s’emploient également à entretenir la flamme anglophobe allumée par l’attentat de Boscawen. Et pour cause : plus l’ennemi sera odieux aux yeux des sujets de Louis XV et plus la guerre leur paraîtra légitime. Étant donné le climat d’incertitude qui prévaut sur l’issue du conflit, il importe aussi de soutenir le moral des Français. Nos publicistes s’y emploient sans relâche en livrant d’amples détails sur les victoires françaises et en insistant sur les divisions politiques qui secouent au même moment la Grande-Bretagne. Le contexte politique tendu dans l’île voisine, enfin, est du pain bénit pour les publicistes français. Ils ont tout loisir d’insister sur les qualités insignes de la monarchie française en exhibant la face hideuse de la constitution d’outre-Manche, source de divisions intestines, voire de révolutions. Au final, par la mise en exergue d’un contre-modèle politique diamétralement opposé au tableau harmonieux brossé dans le célèbre chapitre « anglais » de L’Esprit des Lois, la propagande s’efforce de contrer l’influence grandissante des écrivains anglophiles.
8Parmi les publicistes au service du ministère, deux noms se détachent nettement par l’abondance et l’importance de leur production : Jacob-Nicolas Moreau et Edme-Jacques Genet. Rédacteur de L’Observateur hollandais, le futur historiographe de France s’efforce de répondre aux trois premiers objectifs de la propagande énoncés plus haut : information, dénonciation des menées de l’ennemi et entretien du moral des Français11. Tout en s’attardant sur les affrontements militaires qui, jusqu’en 1757, sont loin d’être défavorables à la France, les premières livraisons de l’Observateur hollandais sont largement consacrées à la description géographique et économique de l’Amérique du Nord et à la présentation des enjeux de l’affrontement franco-britannique dans cette partie du globe.
9Mais c’est surtout un jeune interprète employé par le Secrétariat d’État des Affaires Étrangères, Edme Jacques Genet, qui joue un rôle crucial dans la mutation de la propagande à partir de 1756. Plus qu’un publiciste, Genet est avant tout un traducteur12. Son excellente connaissance de la littérature polémique britannique qu’il traduit quotidiennement pour le Secrétariat d’État des Affaires étrangères l’a conduit à explorer une voie foncièrement originale13. Genet décide de donner la parole à l’ennemi en offrant à ses lecteurs une série de pamphlets traduits de l’anglais. Le traducteur-publiciste a pris soin, au préalable, d’opérer un tri dans cette littérature polémique. À l’instar du Peuple Instruit, sa version française de la Fourth Letter to the People of England du pamphlétaire tory John Shebbeare, très virulente envers la politique du ministère Newcastle14, ses traductions proviennent de plumes au service de l’opposition au ministère britannique, qui exploitent alors le climat de désarroi consécutif à la perte de l’île de Minorque15.
10En 1757, après plusieurs premiers coups d’essai concluants16, Genet se lance dans une entreprise d’une tout autre envergure : la rédaction d’un périodique, l’État politique actuel de l’Angleterre, constitué exclusivement d’extraits de pamphlets et d’articles de journaux britanniques17. Pas n’importe quels journaux : comme c’était déjà le cas avec les premiers pamphlets qu’il a traduits et publiés, Genet privilégie les feuilles d’opposition telles que le Monitor ou le London Evening Post, qui ne ménagent pas leurs invectives contre le ministère. Jusqu’à la fin de 1757, le contexte politique de la Grande-Bretagne, qui demeure fort troublé en raison de la situation incertaine des redcoats sur le champ de bataille, sert à merveille les desseins de Genet. À ce titre, l’avertissement de l’État politique est très éclairant sur la stratégie adoptée par l’agent de la propagande. Il s’agit de brosser le tableau le plus sombre qui soit de la vie politique britannique. Non seulement l’Angleterre court à sa perte par les défaites qu’elle a essuyées à Minorque et dans les colonies, mais la violence des passions politiques que suscitent ces revers militaires semble la placer au bord du précipice :
« Comme les affaires de l’Angleterre n’ont jamais été dans une crise plus forte, jamais aussi la fermentation n’a été plus grande parmi les Anglois. Tandis que la Nation fait au dehors les derniers efforts pour pousser une guerre qui doit entraîner sa ruine, il se livre au dedans une guerre qui n’est pas moins animée entre ceux qui travaillent à accélerer la perte de l’État et ceux dont l’intérêt est de le prévenir. Jusqu’à présent cette guerre intérieure s’est faite par écrit de part et d’autre, et ce sont les Gazettes, les Journaux et nombre de Brochures politiques qui ont servi de champ de bataille18. »
11Mais, à partir de la fin de l’année 1757, avec les premières défaites françaises et le mécontentement qui en résulte dans l’Hexagone, la machine de persuasion publique commence à se gripper. L’État politique de Genet apparaît comme un excellent indicateur du trouble croissant qui gagne les agents de la propagande. À plusieurs reprises, Genet reconnaît qu’il est forcé de changer de ligne éditoriale car les matériaux à mettre sous les yeux du lecteur se font rares19. Et pour cause : l’Angleterre vole de victoire en victoire. La nation est désormais unie derrière le ministre du peuple, William Pitt l’Ancien. En d’autres termes, les deux principaux paramètres guidant la démarche de Genet lors du lancement de l’État politique se sont évanouis. Fait significatif : le public se met à bouder une production vidée de sa substance20. Constatant la vacuité d’une stratégie devenue inadaptée au nouveau contexte militaire et politique, Genet, avec l’aval du duc de Choiseul, arrête la publication de l’État politique à la fin de l’année 1759.
12Confrontée à la désaffection croissante du public, la propagande ministérielle entre dans sa seconde phase. C’est alors qu’on voit s’affirmer des traits qui, jusqu’ici, n’étaient perceptibles qu’en filigrane. Avant d’examiner les nouvelles méthodes mises sur pied pour convaincre les Français, il faut tout d’abord insister sur les effets de la guerre de Sept Ans, et, en particulier, des défaites, sur l’espace politique des deux puissances belligérantes. À bien des égards, la Grande-Bretagne et la France, dans ce domaine, et malgré les différences institutionnelles qui les séparent, suivent un chemin marqué du sceau de la convergence. En Grande-Bretagne, le fiasco de Minorque (juin 1756) qui se traduit par un tollé général, porte au pouvoir William Pitt, chef de file du groupe des patriotes. Il s’ensuit l’expérience fascinante du patriotisme de gouvernement, expérience indissociable de la propagande orchestrée par l’allié de Pitt, le tory William Beckford. On soulignera ici une particularité idéologique très importante : ce patriotisme qui, en allant vite, se présente comme la synthèse du républicanisme True Whig et du torysme d’opposition, porte en lui les ferments du radicalisme à venir21. Fait tout aussi remarquable à signaler, cette expérience de patriotisme de gouvernement fascine les hommes de Versailles, de Choiseul à Jacob-Nicolas Moreau.
13En France, compte tenu des conditions officielles qui régissent l’espace public, la mutation est plus subtile. Elle n’en est pas moins importante. La guerre de Sept Ans, et surtout les défaites, favorisent l’émergence d’un patriotisme de type inédit, émanation d’une France qui s’autoproclame « citoyenne » et qui brûle de participer, d’une manière ou d’une autre, aux affaires du pays22. Cet élan patriotique se manifeste alors que le royaume est de plus en plus divisé. L’espace public voit s’affirmer une sphère oppositionnelle qui doit beaucoup à la nouvelle stratégie de publicité des Parlements23. En d’autres termes, et Moreau, qui voit clair, le constate sans se voiler la face, l’espace public français commence à ressembler à celui de l’Angleterre24. En 1756, le parallèle entre les deux pays était encore en faveur du royaume de Louis XV. Mais maintenant que le sort de la guerre penche en faveur de l’ennemi, le tableau s’est inversé : la France est sur le point d’apparaître – honte suprême pour cet apologiste de la monarchie absolue – comme le pays des divisions et des luttes fratricides. Pour Moreau, qui lance en 1760 un nouveau périodique, le Moniteur français, il n’y plus qu’une seule issue : reconnaître la coupure en deux camps de l’espace public français, regrouper les « bons citoyens » derrière la bannière gouvernementale pour lutter contre les « mauvais Français » qui, par leurs écrits, portent au même moment atteinte à l’autorité suprême. Et dans cette stratégie de reconquête de l’espace public, l’Angleterre est devenue un modèle. Non seulement le périodique de Moreau reprend le titre de la gazette la plus emblématique du patriotisme insulaire, la feuille de William Beckford, le Monitor, mais il appelle ses lecteurs à méditer sur les vertus du système anglais lorsqu’il affirme que les divisions partisanes d’outre-Manche ne produisent pas que des effets négatifs :
« En Angleterre, où tout est esprit de parti, jusqu’à l’amour de la Patrie ; en Angleterre, où le citoyen, qui se croit en droit de gouverner, se croit, à plus forte raison, en droit d’instruire, il paraît toutes les semaines trente écrits pour et contre le gouvernement. Mais si on l’attaque avec vivacité, on le défend avec chaleur. Le ministère est déchiré avec emportement par les uns, et justifié avec enthousiasme par les autres. La passion fait chez ce peuple ce qui ne devrait être que l’effet du zèle.
Chez nous, l’amour du bien public est plus constant, plus éclairé, plus uniforme ; mais il est aussi plus paresseux et plus lent. Il n’a point les inconvénients des partis ; mais il n’en a point aussi la chaleur. Le gouvernement anglais a toujours pour lui une multitude de partisans : le gouvernement français n’a pour lui que les citoyens. Je veux qu’ils soient en plus grand nombre. Ils sont du moins plus froids, ils n’ont point cette imagination impétueuse, faite pour exprimer et pour communiquer les grands mouvements. Le sujet le plus soumis aux lois ne se passionne point pour elles ; il ne se croit point chargé de les défendre, il se contente de les suivre. L’esprit de parti a produit mille volumes depuis dix ans ; le respect pour le gouvernement n’a pas enfanté quatre brochures. L’État en vaudrait peut-être mieux, si la Patrie avait eu aussi ses enthousiastes25. »
14Tout aussi fascinés que Moreau par les méthodes de contrôle de l’espace public britannique, Choiseul et Genet prennent simultanément une série d’initiatives visant à redonner toute sa crédibilité à la propagande gouvernementale. Pour atteindre cet objectif, le secrétaire d’État des Affaires étrangères et le publiciste jouent à fond la carte de la transparence et du parler-vrai. Dès l’arrêt de la publication de l’État politique, Genet lance l’expérience des Papiers anglais, expérience unique en son genre qui prend la forme d’une gazette bilingue qui présente sur la même page, se faisant face sur deux colonnes, le texte anglais original et sa traduction en français. En offrant au public les deux versions d’un même document, le traducteur-publiciste et son ministre espèrent faire taire tous ceux qui accusent la presse officielle de dissimulation et de désinformation. Un an plus tard, l’heure est plus que jamais au parler-vrai. Au début de l’automne 1761, après l’échec des pourparlers de paix franco-britanniques, Choiseul décide de donner la teneur des négociations dans un ouvrage, le Mémoire historique sur la négociation de la France et de l’Angleterre depuis le 26 mars 1761 jusqu’au 20 septembre de la même année avec les pièces justificatives26. En quelques années, les aléas de la guerre de Sept Ans alliés à la détérioration du climat politique intérieur ont produit une mutation fondamentale de l’attitude du pouvoir royal vis-à-vis du « public ». En 1761, pour convaincre les Français de son bon droit et pour les inciter à soutenir une guerre qui, malheureusement, est appelée à perdurer, Choiseul n’hésite pas dévoiler ce qui, jusqu’ici, était de l’ordre du secret le plus absolu : les arcanes de la diplomatie. Simultanément, dans sa quête du parler-vrai, la propagande gouvernementale en est progressivement venue à publier des écrits en provenance d’outre-Manche qui participent au processus de transfert de la culture politique britannique en terre française.
15La troisième époque de cette histoire de la propagande, correspondant à la guerre d’Indépendance, se présente comme l’héritière directe des expériences menées entre 1755 et 1763. Au printemps 1776, tandis que les Treize Colonies ont pris les armes et que le Congrès continental est sur le point de rompre les amarres avec la mère patrie, Genet reprend du service et lance les Affaires de l’Angleterre et de l’Amérique27. Bâti sur le canevas de l’État politique actuel du précédent conflit, le nouveau périodique se présente comme un recueil de pamphlets et d’écrits politiques britanniques. À cette tradition datant du début de la guerre de Sept Ans vient s’adjoindre une nouveauté éclatante : étant donné la situation outre-Atlantique, il va de soi que les Affaires ouvrent largement leurs pages aux écrits en provenance d’Amérique du Nord.
16Dans un document adressé à Vergennes, Genet énonce les objectifs de ce nouvel ouvrage :
« ce seroit chez nous, la matière d’une Étude propre à augmenter et à fortifier l’amour d’un gouvernement qui assure aux citoyens une tranquillité et un bonheur que la constitution angloise ne peut donner »,
note-t-il avant de préciser les objectifs de sa nouvelle feuille, qui a pour but de
« multiplier parmi nous des vues et des calculs, et même, qu’il soit permis de le dire, une antipathie que notre gouvernement ne sauroit peut-être trop soutenir et encourager vis-à-vis d’une nation dont le principe favori est de nous regarder comme ses plus vrais et plus anciens ennemis28 ».
17Valorisation de la constitution monarchique française, alimentation des braises anglophobes : l’impression de continuité avec le précédent conflit semble s’imposer.
18Même si Genet n’évoque pas ce sujet dans le document qu’on vient de lire29, tout indique que les Affaires, qui sont placées sous le contrôle direct de Vergennes, ont pour but premier de préparer l’opinion française à l’éventualité d’une intervention aux côté de Insurgents. Dès le premier numéro, le parti-pris en faveur des colons est ostensible. À cet effet, Genet publie de larges extraits d’un des ouvrages les plus explosifs, si ce n’est le plus explosif, de la littérature pamphlétaire nord-américaine : le Common Sense de Thomas Paine30. Certes, certaines formules sont adoucies et Genet a pris garde de retrancher la partie la plus subversive du livre, le chapitre sur la monarchie héréditaire. Mais même édulcoré, le pamphlet de Paine que nous donne à lire Genet est loin de répondre aux critères de la censure préalable31. Il en va de même de la version de l’acte fondateur des États-Unis publiée dès le mois d’août dans les colonnes des Affaires de l’Angleterre et de l’Amérique : la Déclaration d’Indépendance du 4 juillet 1776. Le texte est publié in extenso ; son préambule lockien justifiant la rupture avec la métropole par l’énumération des crimes commis par George III n’est en aucune manière occulté. Tandis que la campagne de propagande menée pendant la guerre de Sept Ans a permis d’introduire en France des pans jusqu’ici méconnus de la culture politique insulaire, la guerre d’Indépendance voit la poursuite et l’intensification de ce processus. Avec une nuance de taille : ce n’est plus la doctrine patriote des années 1750, doctrine au demeurant déjà peu orthodoxe dans un cadre absolutiste, qui entre dans l’Hexagone ; à présent ce sont les idées radicales d’outre-Manche et les doctrines révolutionnaires en provenance de Philadelphie qui passent la frontière. Les livraisons ultérieures des Affaires poursuivent cette espèce de cours accéléré d’initiation à la culture politique anglo-saxonne. Outre les traductions de discours parlementaires souvent très chargés idéologiquement, les Affaires donnent l’intégralité de l’ouvrage radical de Richard Price, les Observations sur la nature de la liberté civile, et livrent un éclairage très précieux sur l’œuvre des révolutionnaires américains en publiant les nouvelles Constitutions des États. À la lecture des documents publiés dans les Affaires de l’Angleterre et de l’Amérique, tout se passe comme si le système de contrôle des écrits en vigueur sous l’Ancien Régime avait été aboli, le ministère ouvrant toutes grandes les portes au wind of change venant du Nouveau Monde.
19Arrivé à ce stade de notre réflexion, se pose la question épineuse de l’interprétation de cette stratégie. Revenons à la mise en garde de Favier : à le suivre, la monarchie française, en accueillant dans les colonnes de ses périodiques les écrits peu ou prou républicains d’outre-Manche ou des États-Unis, joue un jeu très dangereux. Plutôt que de tenter de mesurer l’impact sur le public des œuvres radicales diffusées par le ministère, entreprise qui, comme chacun sait s’avère hasardeuse du fait de la tendance naturelle à la téléologie qu’elle porte en elle, il convient plutôt de s’interroger sur les motifs qui guident leur publication et de replacer l’action des traducteurs et des publicistes gouvernementaux dans le contexte politique et international qui préside à leur tâche.
20À première vue, il semble aberrant, voire suicidaire, que le ministère donne son accord à la publication de « principes anglo-américains » contraires aux bases idéologiques du régime. La question est encore plus troublante quand on connaît les idées conservatrices du commanditaire de cette campagne de propagande aux couleurs radicales, le comte de Vergennes32. Son hostilité foncière aux nouveautés, si ténues soient-elles – on pense à son aversion envers les idées de Necker – font que ce personnage aurait dû rejeter avec horreur le plan que lui proposait Genet en 1776. La question se trouble encore davantage quand on examine l’attitude du même Vergennes face à la révolution genevoise de 1782. Tandis qu’il s’est employé à promouvoir la cause des Insurgents en diffusant certains de leurs principes, à propos des idées des Genevois, Vergennes se montre intraitable. « Il est à craindre que leurs écrits, après avoir alimenté chez eux la discorde, ne portent au dehors le fanatisme dont ils sont remplis, et que leurs voisins ne passent de la curiosité à l’imitation », écrit-il, manifestement en proie à l’inquiétude33. Après la révolution du 8 avril 1782, Vergennes, encore plus préoccupé par les conséquences idéologiques de l’arrivée au pouvoir des patriotes genevois, déclare ouvertement son hostilité à la doctrine de la souveraineté du peuple et montre sa détermination à mettre fin à cette « maladie épidémique »34.
21Deux poids, deux mesures ? L’attitude de Vergennes, en réalité, n’est pas contradictoire. Le contexte politique doit tout de suite être examiné car il est déterminant dans les choix de la stratégie de propagande. En 1776, lors de la parution du premier numéro des Affaires, la France vit les débuts d’un règne qui paraît avoir tourné la page douloureuse des dernières années de celui de Louis XV. L’opposition parlementaire reste très modérée ; les divisions dans le royaume semblent appartenir au passé. S’il est alors une puissance qui paraît être au bord du précipice, c’est plutôt l’île voisine, empêtrée dans une guerre coloniale et en proie à des divisions intérieures marquées par la poussée du radicalisme. En d’autres termes, le lancement des Affaires s’inscrit dans un contexte politique qui paraît reproduire la configuration de 1756, quand Albion était confrontée à de graves périls politiques et à des revers militaires. En 1776 comme deux décennies plus tôt, le ministère estime que la situation lui est très favorable et en profite pour lancer une ambitieuse campagne de persuasion publique.
22Il faut en second lieu insister sur la cohérence de la stratégie déployée depuis la guerre de Sept Ans. La campagne de propagande lancée en 1776 s’inscrit dans la continuité de la politique de publicité fondée sur le parler-vrai et la transparence mise sur pied par Choiseul en 1760. À ce titre, Genet apparaît comme le trait d’union entre ces deux époques : au service de Choiseul, il reprend la plume et bâtit sa nouvelle gazette sur le canevas et sur les matériaux de ses précédentes expériences journalistiques. La seule différence, mais elle est de taille, vient de la radicalisation de la pensée et de l’action politiques entre 1760 et 1776.
23Il en découle la question que l’on devine : Vergennes et Genet pouvaient-ils percevoir la dimension révolutionnaire émanant de certains écrits qu’ils rendent publics, tel ce passage de la Déclaration d’Indépendance cité dans la version qui a été publiée dans les Affaires :
« Voici des vérités évidentes par elles-mêmes. C’est que tous les hommes ont été créés égaux ; c’est qu’il est certains droits inaliénables dont le Créateur les a doués, tels que la vie, la liberté et le désir du bien-être, pour le maintien desquels furent institués parmi eux les gouvernements, qui tiennent leurs justes pouvoirs du consentement des gouvernés ; et que dès qu’une forme de gouvernement tend à les détruire, le peuple a le droit de la modifier et de l’abolir, et d’en instituer une nouvelle, en posant sa base sur les principes, et donnant à ses pouvoirs l’organisation, qu’il juge la plus propre à effectuer sa sûreté et son bonheur35. »
24La traduction est fidèle et ne cherche pas à dissimuler la radicalité de l’original, qui rompt non sans éclat avec le paradigme restaurateur qui perdurait dans la culture politique anglo-saxonne depuis la Glorieuse Révolution de 1688. C’est à un acte politique qui peut aller jusqu’à la table rase du passé qui est justifié dans cet extrait. Toutefois, rien n’indique que Genet ou Vergennes aient perçu clairement les potentialités vertigineuses de la phraséologie révolutionnaire nord-américaine. C’est du moins ce que suggère notre Cassandre, Jean-Louis Favier. On se souvient qu’il met en garde Vergennes contre les conséquences néfastes de la mise en circulation des idées anglo-américaines sous les auspices du ministère. Mais quels sont ces périls qui guettent la monarchie française ? Écoutons-le :
« La France n’a-t-elle aucune province qui puisse réclamer le Contrat originel, ou du moins un pacte postérieur, exprès, écrit et conservé par lequel elle se soit donnée librement à la Couronne ? Le Languedoc, la Bretagne, la Provence ne sont-ils pas dans ce cas-là ? Et même quelques-unes des provinces conquises, ne s’étant soumises et n’ayant été cédées, qu’à condition de maintenir tous les droits, coutumes, lois et privilèges, ne pourroient-elles pas aussi opposer le titre même de la possession aux abus manifestes de la domination36 ? »
25Ce n’est pas tant une configuration peu ou prou annonciatrice de 1789 que nous décrit ici Favier qu’une redite de la révolte des Pays-Bas de 1566. Le parallèle n’est en rien incongru : la révolte de 1566 et sa conclusion, la naissance d’une république ayant pour nom Provinces-Unies apparaissant comme le précédent naturel de la révolution américaine. Même s’il est difficile de se prononcer de manière catégorique, le ministère semble, lui aussi, avoir lu les écrits d’outre-Atlantique en usant d’une grille de lecture fondée sur l’Histoire, les faits du passé éclairant les énigmes des temps présents.
26En 1782, la position de Versailles est devenue beaucoup plus circonspecte. Lorsque Vergennes évoque les risques de contamination idéologique venant de Genève, il est clair qu’il a réalisé quelles pouvaient être les potentialités de principes comme celui de la souveraineté du peuple si ceux-ci venaient à sortir de la sphère purement spéculative pour être mis en application dans un État européen. Outre le fait que les intérêts français se trouvent affectés par la révolution genevoise, il convient aussi de souligner une particularité géographique : Genève est un peu plus proche de Paris que ne l’est Philadelphie. Pour reprendre les mots de Favier, les principes nouveaux ont cessé d’être exclusivement « anglo-américains » : ils s’expriment désormais dans la langue de Molière.
Notes de bas de page
1 Sur Jean-Louis Favier, voir Jules Flammermont, « J.-L. Favier, sa vie et ses écrits », La Révolution française, XXXVI, 1899, p. 161-164, 258-276, 314-335 ; Jacques Spica et Françoise Weil, « Favier, Jean-Louis (1711 ?-1784) », dans Jean Sgard (dir.), Dictionnaire des journalistes. 1600-1789, Oxford, Voltaire Foundation, 1999, I, p. 386-388; Gary Savage, « Favier’s Heirs: the French Revolution and the Secret du Roi », Historical Journal, 41, 1, 1998, p. 225-258.
2 Archives du ministère des Affaires étrangères, Mémoires et documents, États-Unis, 5, fol. 6 r° : J.-L. Favier à Vergennes, Paris, 18 mars 1778. Les passages en italiques sont soulignés dans l’original.
3 Ibid., fol. 6 v°.
4 Ibid.
5 Voir l’ouvrage classique de Bernard Bailyn, The Ideological Origins of the American Revolution, Cambridge, Harvard University Press, 1980. Sur la place de la pensée contractuelle dans la phraséologie du début de la Révolution américaine, voir Bernard Bailyn (éd.), Pamphlets of the American Revolution, 1750-1776, I, 1750-1765, Cambridge, Harvard University Press, 1965.
6 Favier confond François Hotman, auteur du Franco-Gallia (1573) avec Hubert Languet, et Philippe Duplessis-Mornay, auteurs présumés des Vindiciae contra Tyrannos (1579).
7 Archives du ministère des Affaires étrangères, Mémoires et documents, États-Unis, 5, fol. 7 r°.
8 Au printemps 1755, afin de mener en position de force les négociations sur les différends nordaméricains avec la France, le cabinet du duc de Newcastle donne ordre à l’amiral Boscawen de s’emparer de la flotte française convoyant des renforts au Canada. Boscawen échoue dans sa mission : seuls deux navires qui s’étaient égarés, l’Alcide et le Lys, sont capturés par la flotte britannique. Bien que manqué, cet acte perpétré en pleine paix provoque un vif émoi en France, entraînant une vague d’anglophobie d’une rare intensité (voir Edmond Dziembowski, Un nouveau patriotisme français, 1750-1770. La France face à la puissance anglaise à l’époque de la guerre de Sept Ans, Oxford, Voltaire Foundation, 1998, p. 72 sq).
9 Voir l’ouvrage fondamental de Joseph Klaits, Printed Propaganda under Louis XIV. Absolute Monarchy and Public Opinion, Princeton, Princeton University Press, 1976, qui explore le dispositif de propagande mis sur pied par Torcy pendant la guerre de Succession d’Espagne.
10 Moreau, du reste, reconnaît sa dette envers Jean de La Chapelle (Jacob-Nicolas Moreau, Mes Souvenirs, éd. C. Hermelin, Paris, Plon, 1898-1901, II, p. 559). Il est à noter qu’un autre point commun unit les deux périodiques : tous deux sont des succès de librairie. Le total des différents tirages des Lettres d’un Suisse est approximativement de 3 500 exemplaires par numéro (Joseph Klaits, Printed Propaganda..., op. cit., p. 153-154). Si l’on se fie à Moreau, les premiers numéros de l’Observateur hollandais se vendent à près de 8 000 exemplaires (Jacob-Nicolas Moreau, Mes Souvenirs..., op. cit., I, p. 80).
11 Sur Moreau, voir Dieter Gembicki, Histoire et politique à la fin de l’Ancien Régime : Jacob-Nicolas Moreau, Paris, Nizet, 1979 ; Keith Michael Baker, « Maîtriser l’histoire de France : l’arsenal idéologique de Jacob Nicolas Moreau », dans Keith Michael Baker, Au tribunal de l’opinion. Essais sur l’imaginaire politique au XVIIIe siècle, Paris, Payot, 1993, p. 85-122 ; Edmond Dziembowski, « Les débuts d’un publiciste au service de la monarchie : l’activité littéraire de Jacob-Nicolas Moreau pendant la guerre de Sept Ans », Revue d’histoire diplomatique, 1995, 4, p. 305-322.
12 Sur Genet, voir Madeleine Fabre, « Genet, Edme (1726-1781) », dans Jean Sgard (dir.), Dictionnaire des journalistes..., op. cit., I, p. 340-340 ; Edmond Dziembowski, « Le peuple français instruit : Edme-Jacques Genet et la traduction des écrits politiques britanniques pendant la guerre de Sept Ans », dans Ann Thomson, Simon Burrows, Edmond Dziembowski, éd., Cultural Transfers. France and Britain in the Long Eighteenth Century, Oxford, Voltaire Foundation, 2010, p. 175-188.
13 Sur la tâche d’interprète de Genet au service du Secrétariat d’État des Affaires étrangères, voir l’étude de Jean-Pierre Samoyault, Les bureaux du Secrétariat d’État des Affaires étrangères sous Louis XV, Paris, Pédone, 1971, p. 131-140.
14 Edme Jacques Genet, Le Peuple instruit, ou les Alliances dans lesquelles les Ministres de la Grande-Bretagne ont engagé la Nation, et l’emploi qu’ils ont fait de ses escadres et de ses Armées, depuis le commencement des troubles sur l’Ohio, jusqu’à la perte de Minorque, considérées dans une Quatrième Lettre au Peuple d’Angleterre, s. l., 1756.
15 Conquise pendant la guerre de Succession d’Espagne, Minorque est acquise par la Grande-Bretagne au traité d’Utrecht. En juin 1756, la prise de Minorque par les troupes du maréchal de Richelieu est très mal accueillie par les Britanniques, meurtris de voir ce point stratégique en Méditerranée occidentale et ce symbole de la puissance navale de l’Angleterre passer à l’ennemi. Ce revers ravive immédiatement les tensions politiques, l’opposition patriote exploitant l’affaire en accusant le ministère Newcastle d’impéritie. Sur la prise de Minorque, voir Jonathan R. Dull, La guerre de Sept Ans. Histoire navale, politique et diplomatique, Bécherel, Les Perséides, 2009, p. 85-91 ; sur les retombées politiques de ce revers en Grande-Bretagne, voir Edmond Dziembowski, Les Pitt. L’Angleterre face à la France 1708-1806, Paris, Perrin, 2006, p. 88-92.
16 Les premières traductions de pamphlets politiques britanniques par Genet ont été bien accueillies par la critique. En témoigne par exemple le compte rendu élogieux du Peuple instruit dans la Correspondance littéraire (Frédéric Melchior Grimm, Henri Meister et al., Correspondance littéraire, philosophique et critique (éd. Maurice Tourneux), Paris, Garnier frères, 1877-1883, III, p. 306-307 (15 novembre 1756).
17 Edme-Jacques Genet, État politique actuel de l’Angleterre, ou Lettres sur les écrits publics de la Nation Angloise relativement aux circonstances présentes, s. l., 1757-1759, 10 vols.
18 Edme Jacques Genet, État politique actuel de l’Angleterre..., op. cit., I, p. V-VI.
19 Voir, en particulier, Edme Jacques Genet, État politique actuel de l’Angleterre..., op. cit., VIII, lettre 52 (datée du 12 janvier 1759), p. 247 : Genet constate que l’arrivée de Pitt aux affaires s’est traduite par « une morte-saison pour la politique » (p. 247). La disparition des divisions politiques (c’est ce qu’il appelle la « morte saison ») a des conséquences directes sur le contenu de sa gazette, « la matière politique à laquelle je vois la nécessité de me restreindre, n’abondant plus comme auparavant » (p. 251).
20 À la fin de sa publication, la feuille ne se débite plus qu’à 1 000 exemplaires ; Aix-en-Provence, Bibliothèque Méjanes, Ms. 1564 (1429), fol. 86, brouillon de mémoire de Genet destiné au duc de Choiseul, fin 1759. On ne connaît malheureusement pas son tirage à ses commencements, quand elle rencontrait la faveur du public.
21 Sur ce point, Edmond Dziembowski, Les Pitt..., op. cit., p. 56-65 et 123-140.
22 Edmond Dziembowski, Un nouveau patriotisme, op. cit., p. 369 et suiv.
23 Voir l’ouvrage ancien, mais toujours aussi fondamental d’Élie Carcassonne, Montesquieu et le problème de la constitution française au XVIIIe siècle, Genève, Slatkine reprints, 1978, p. 261 sq. Voir aussi Jean Egret, Louis XV et l’opposition parlementaire 1715-1774, Paris, Armand Colin, 1970, p. 93 sq. ; Keith Michael Baker, Au tribunal de l’opinion..., op. cit., p. 45 sq. ; Alain J. Lemaître (dir.), Le monde parlementaire au XVIIIe siècle. L’invention d’un discours politique, Rennes, PUR, 2010.
24 Keith Michael Baker, Au tribunal de l’opinion..., op. cit., p. 88 et suiv.
25 Jacob-Nicolas Moreau, « Premier discours servant d’introduction. De l’avantage que l’on peut tirer des écrits », Moniteur Français, I, 1760. Reproduit dans Gabriel-François Coyer et Jacob-Nicolas Moreau, Écrits sur le patriotisme, l’esprit public et la propagande au milieu du XVIIIe siècle (éd. E. Dziembowski), La Rochelle, Rumeur des Ages, 1997, p. 59-60.
26 Edmond Dziembowski, « Les négociations franco-britanniques devant le tribunal de l’opinion : le duc de Choiseul et la publicité de la diplomatie française », dans Jean-Pierre Jessenne, Renaud Morieux et Pascal Dupuy (dir.), Le négoce de la paix. Les nations et les traités franco-britanniques (1713-1802), Paris, Société des études robespierristes, 2008, p. 47-67.
27 George Byron Watts, Les Affaires de l’Angleterre et de l’Amérique and John Adams, Charlotte, Heritage Printers, 1965 ; Anne-Marie Chouillet et Madeleine Fabre, « Diffusion et réception des nouvelles et ouvrages britanniques dans la presse spécialisée de langue française », dans Hans Bots (éd.), La diffusion et la lecture des journaux de langue française sous l’Ancien Régime, Amsterdam, Maarsen, p. 183 et suiv. ; Madeleine Fabre, « Affaires de l’Angleterre et de l’Amérique (1776-1779) », dans Jean Sgard, dir., Dictionnaire des journaux, 1600-1789, Paris, Universitas, 1991, I, p. 5-10 ; Edmond Dziembowski, « Traduction et propagande : convergences franco-britanniques de la culture politique à la fin du XVIIIe siècle », dans Katia de Queiros Mattoso (dir.), L’Angleterre et le monde, XVIIIe-XXe siècle. L’histoire entre l’économique et l’imaginaire. Hommage à François Crouzet, Paris, L’Harmattan, 1999, p. 81-111.
28 Archives du ministère des Affaires étrangères, Dossiers Personnel, 1re série, 34, fol. 319, « Genet, le Père et veuve » (sans date).
29 Le document n’est malheureusement pas daté. A-t-il été écrit peu de temps avant le lancement des Affaires, ou est-il plus ancien ? Voir mes hypothèses dans Edmond Dziembowski, « Traduction et propagande », art. cit., p. 104.
30 Voir l’excellente biographie de Bernard Vincent, Thomas Paine ou la religion de la liberté, Paris, Aubier, 1987.
31 Edmond Dziembowski, « Traduction et propagande... », art. cit., p. 87 et suiv.
32 Sur le conservatisme de Vergennes, voir Jean-François Labourdette, Vergennes. Ministre principal de Louis XVI, Paris, Desjonquères, 1990 et Munro Price, Preserving the Monarchy. The Comte de Vergennes, 1774-1787, Cambridge, Cambridge University Press, 1995.
33 Cité par Jean-François Labourdette, Vergennes..., op. cit., p. 71.
34 Ibid.
35 Affaires de l’Angleterre et de l’Amérique, II, no 7 (en date du 16 août 1776), p. 89.
36 Archives du ministère des Affaires étrangères, Mémoires et documents, États-Unis, 5, fol. 6 v° : J.-L. Favier à Vergennes, Paris, 18 mars 1778. Les passages en italiques sont soulignés dans l’original.
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