Chapitre VIII. La gouvernance de la troisième génération
p. 237-289
Texte intégral
1Les mesures prises pour sortir de l’isolement des années 1940-1944 ayant porté leurs fruits, les nouveaux dirigeants de la CdC s’attachaient à doter l’entreprise de moyens et de structures destinés à lui permettre de recouvrer, voire de renforcer sa notoriété d’antan. Grâce à un recrutement d’ingénieurs, aptes à introduire de nouvelles méthodes de travail dans les ateliers modernisés des usines pourvues de moyens accrus de production, l’entreprise devait être en mesure de rivaliser ses concurrents.
Le recrutement confraternel d’armes et de corps
2Comme Ernest Chamon, qui avait requis, aux lendemains du premier conflit, les compétences de son compagnon d’armes, Jean Le Duc, devenu son homme lige en matière de télévision, Pierre Heeley s’entoura, après la Libération, de marins-ingénieurs avec lesquels il avait noué des liens confraternels durant la Résistance.
3Lieutenant de Vaisseau, démobilisé après la bataille de Toulon, Pierre Heeley, s’était replié sur le bureau de Lyon de la CdC. Il avait servi dans la Résistance en qualité d’Agent PI, du 1er avril 1942 au 15 septembre 1944, au sein du réseau Jade Amicol des FFC, activité attestée par un certificat délivré par le secrétariat d’État aux Forces Armées en date du 23 juin 1955. Il fut fait chevalier de la Légion d’honneur (JO du 7 juillet 1950)1.
Le recrutement de marins-ingénieurs
4Le premier marin-ingénieur, Jean Broc (École Navale 1935, Docteur en Sciences Physiques Paris 1939)2, était entré à la CdC en octobre 1948 comme attaché à la direction Radar. Entre 1950 et 1953, il était directeur du centre expérimental de Toulon de la Compagnie, qui occupait 50 personnes dont huit ingénieurs. L’activité était orientée vers l’étude et la réalisation de prototypes et de pré-séries d’appareils électroniques militaires de lutte sous-marine et leurs applications en océanographie et en météorologie.
5La participation de Jean Broc à des opérations de guerre devant Casablanca en 1942 lui avait coûté l’amputation de la jambe droite. Lieutenant de vaisseau en décembre 1943, il était détaché en mission en Angleterre pour étudier les radars de janvier à mai 1944 puis affecté, par la Marine le 1er janvier 1945, au Centre national d’études des télécommunications. Réformé, il quitta la Royale en 1948, année de son entrée à la CdC.
6Autre frère d’armes, plus proche de Pierre Heeley, le contre-amiral Jean Hourcade, entré à la CdC en 1951 à 53 ans, à l’issue de 35 années passées au service de la Marine. Sa carrière maritime, rappelée à l’occasion de son élévation à la dignité de grand officier de la Légion d’honneur à titre militaire en 1966, exige d’en exposer la chronologie.
7Jean Hourcade, enseigne de vaisseau à bord des canonnières du Si-Kiang durant la campagne de Chine, lieutenant de vaisseau, chef de poste sur le Jeanne d’Arc, commandant de la goélette Zélée à Tahiti, officier de manœuvre de l’Émile Bertin. Officier supérieur, il exerça quatre commandements pendant la guerre : à bord du torpilleur, La Railleuse, détruit devant Casablanca, du contre-torpilleur, Le Malin, (qui coula cinq bâtiments ennemis en Adriatique lors du combat de Premuda), du croiseur Jeanne d’Arc, qui participa au soutien du débarquement en Provence, puis du croiseur de la Flank Force.
8Le contre-amiral Jean Hourcade, présent à Alger lors du débarquement allié en Algérie, fut blessé à la jambe alors qu’il tentait de protéger l’amiral Darlan, victime de l’attentat perpétré par Fernand Bonnier de la Chapelle. Après la guerre, Jean Hourcade fut successivement président du centre d’expérimentation tactique, chargé de ramener en France les navires italiens cédés par le traité de paix puis commandant de la 2e Division légère et enfin commandant de la Marine à Marseille3.
9Jean Hourcade exerça au sein de la CdC une activité essentiellement commerciale, en particulier à la succursale de Marseille.
10Méridional de naissance, Jean Hourcade se plaisait à rappeler l’histoire de l’agence installée dans la Maison des Champs, qui avait appartenu à Joseph Autran, membre de l’Académie française, auteur des Poèmes de la Mer. Incluse dans le patrimoine de la société Siry-Lizars, qui fusionna en 1881 avec la CdC, cette agence d’abord louée, fut rachetée en 1922, pour 119 124 F au beau-fils de Joseph Autran, Douglas Fitch.
11Modernisée en 1952 par Jean Hourcade, la succursale de Marseille avait pour mission de vendre et de réparer les appareils fabriqués par la CdC et de prospecter dix départements, des Alpes aux Pyrénées sans oublier la Corse4. En 1954, la succursale s’honorait d’avoir transformé 7 000 compteurs d’électricité, réparé 5 000 compteurs de gaz et 1 300 compteurs d’eau. Cette activité avait engendré, cette année 1954, un chiffre d’affaires de 500 millions qui devait, selon ses prévisions, dépasser 600 millions en 1955. Le contre-amiral Jean Hourcade quitta Marseille pour prendre la direction commerciale à Montrouge le 1er septembre 1955.
12Autre marin-ingénieur, le capitaine de vaisseau Lucien Boulay (École navale et ESE Radio 1926) qui entra le 3 mars 1951à la CdC5 à 56 ans, après 36 années passées au service de la Marine, plus spécialement consacrées aux domaines des transmissions et des télécommunications. Il fut nommé directeur de la succursale Électronique en 1953 puis à la tête du centre de recherches créé à Montrouge en 1956. Devenu ultérieurement directeur du département électronique, il étudia, avec les autres groupes de la CdC, les voies vers lesquelles l’entreprise devait s’orienter. Nommé directeur à la direction générale, le 1er octobre 1964, il occupa cette fonction jusqu’à son départ en retraite en 19666. Il fut remplacé par le polytechnicien Denis Dayonnet (X 44) et École nationale supérieure des télécommunications (1949), entré à la CdC en août 1962 à 37 ans.
La confraternité de Corps d’État
13La confraternité de Corps apparaît dans la présence de nombreux ingénieurs diplômés de l’École supérieure d’électricité (Supélec), comme Marcel Boyer et Pierre Heeley, qui avaient grossi le nombre de leurs aînés à la CdC. Au fil des années, le recrutement se diversifia avec d’anciens élèves de l’École polytechnique (X), de l’École centrale des arts et manufactures de Paris (ECP), de l’École nationale des arts & métiers (AM) ou de l’École supérieure de physique et chimie industrielle de la ville de Paris (ECPI).
14Préfigurant bien les intentions d’utiliser leurs potentialités associées à celles du personnel, le recrutement d’ingénieurs perdura, illustrant l’axiome de François Caron qui faisait « de l’ingénieur et de l’ouvrier, deux acteurs qui jouent un rôle essentiel dans l’évolution de l’entreprise7 ».
L’association de l’ingénieur et de l’ouvrier
15La volonté d’associer l’ensemble du personnel au développement de l’entreprise se traduisit par une réactivation, quelques années après la Libération, du centre d’apprentissage victime d’une éclipse, dans les années trente et quarante, au profit des écoles techniques publiques, qui préparaient à différents CAP. Sous la direction d’un ingénieur de l’entreprise, le centre de la CdC formait des apprentis aux métiers de l’entreprise et les préparaient à des diplômes reconnus par l’Éducation nationale, gages d’un emploi ultérieur dans l’entreprise8.
16Parallèlement, des cours de formation et de perfectionnement existaient au sein de l’entreprise. Ils permettaient à des ouvriers et à des personnels d’encadrement, d’accéder successivement au statut d’ouvrier qualifié, maîtres-ouvriers puis technicien d’atelier. Un aménagement du temps était possible pour les candidats à une formation assurée par le Conservatoire nationale des arts et métiers (CNAM)9.
Fig. 21 – Un OS « à l’œuvre » à Montrouge – 1950
Fig. 22 – Centre d’apprentissage – Montrouge années 1950
17La publication trimestrielle, à dater de l’été 1951, d’un Bulletin CdC, organe interne de liaison et d’information, confirmait cette disposition d’esprit de l’équipe dirigeante, soucieuse de développer une culture d’entreprise rénovée. Diffusée à l’ensemble du personnel, ce bulletin se voulait didactique, pédagogique voire culturel. Des éditoriaux de Pierre Heeley, de Marcel Boyer et des articles d’ingénieurs y étaient inclus visant à présenter, expliquer et à vulgariser, à la fois les stratégies de développement de l’entreprise et ses différents matériels et systèmes. On y trouve aussi des articles de membres du comité d’entreprise présentant l’action des différentes commissions10, ainsi que l’activité de la Prévoyance mutuelle des compteurs (descendante du groupe amical des trentenaires créé le 13 mars 1926 où René Le Bras, syndicaliste mutualiste, joua un rôle important11).
18Marcel Boyer, aux côtés de son cousin Pierre Heeley, fut l’un des artisans de l’édition d’un Bulletin d’informations mutuelles des cadres et de la maîtrise, dénommé Cadres, diffusé à l’époque IIe Plan (1954-1957), qui prescrivait « le développement général et équilibré de l’économie en mettant l’accent sur les moyens permettant l’abaissement des prix de revient par l’accroissement de la productivité, le développement de la recherche scientifique et technique, de la spécialisation et de l’adaptation des entreprises industrielles, de la formation et de la reconversion de la main-d’œuvre, de l’amélioration des marchés de l’État ».
19À l’heure où cette volonté d’information du personnel était encore en gestation, les nouveaux dirigeants de la CdC s’ingéniaient à concevoir une restructuration de l’usine de Montrouge.
La restructuration des activités industrielles
20L’extension des locaux industriels dans la localité de Montrouge s’avérait impossible en raison du plan d’urbanisme de la ville, alors que la CdC aspirait à réaménager le site montrougien pour adapter ses capacités industrielles aux perspectives de développement de ses différents secteurs d’activité.
Le réaménagement du site de Montrouge
21La solution retenue constitua une première pour la CdC, qui avait choisi en 1923 de rassembler son potentiel industriel à Montrouge. En 1949, elle optait pour une délocalisation d’ateliers, qualifiés d’éclatés, qui développaient des technologies nouvelles, aptes à prospérer hors du site de Montrouge.
22La première délocalisation concerna le transfert d’un l’atelier, où étaient réalisées des pièces mécaniques de précision en matières plastiques, qui s’étaient révélées fort précieuses durant l’occupation. Cette opération donna lieu à la constitution, en 1948, avec les éléments corporels de l’atelier montrougien, estimés à 48 millions de francs, de la Société technique pour la fabrication des pièces mécaniques en matières plastique, La Mécanoplastique, localisée 125, avenue de Paris à Massy (Seine-et-Oise), heureusement pourvue d’un second établissement situé à Orbey, dans le Haut-Rhin, qui employait un personnel qualifié expert en la conduite d’une large gamme de presses12.
23La seconde délocalisation concerna le secteur dénommé Contrôles Divers, qui avait vu le jour en 1930 et réalisait essentiellement une chaîne complète de mesure et de contrôle pneumatique de type conventionnel (c’est-à-dire partant d’organes de mesure à déplacement) très utilisée dans les industries chimiques. La CdC décida, en 1949, de transformer ce secteur en une filiale dénommée Contrôle et Régulation (CR) installée 48, rue Pernéty à Paris 14e après une prise de participation dans la Société Immobilière Pernety qui disposait de bâtiments adéquats pour installer des bureaux et des ateliers.
Fig. 23 – La Mécanoplastique à Massy
24Contrôle et Régulation (CR) avait pour objet « l’étude, la fabrication, la vente, l’installation de tous appareils et instruments et leurs accessoires pour la mesure, le contrôle, la signalisation, la transmission et la régulation de toutes grandeurs ».
25Le but de la régulation est de maintenir des grandeurs physiques, débit, pression, température, niveau, densité d’un processus industriel, à une valeur déterminée. L’ensemble des matériels destinés à accomplir cette fonction constituait une chaîne de régulation auxiliaire de coordination à des organes centraux de calcul et d’automatismes13.
26Contrôle et Régulation construisait des appareils qui répondaient bien aux exigences de nombre d’industries dont les raffineries de pétrole, les raffineries sucrières, les cimenteries utilisatrices. Pour répondre à celles des industries sidérurgiques et les cokeries de robustesse des instruments, une société sœur lui fut adjointe dans des locaux disponibles de la rue Pernety. Dénommée Société pour la fabrication et la vente d’appareils hydrauliques de régulation (SOREG), elle réalisait des instruments sous licence de la société allemande Askania Regulator, devenue américaine.
27Le capital social de SOREG (trois millions de francs), fut financé par la société de nationalité américaine Askania Regulator, qui apportait en nature 600 000 F, la CdC et Contrôle et Régulation participant en espèces, la première pour 1 600 000 F et la seconde pour 800 000 F. La société Askania Regulator devait être rémunérée par une redevance de 3 % du chiffre d’affaires réalisé. L’activité de la Société SOREG se situait dans le secteur de la sidérurgie, plus précisément dans le guidage de bandes de tôles14.
28Dans ce même secteur d’activité, une petite unité fut installée à Lyon, la SOLYREG, spécialisée dans la fabrication de certains matériels de régulation, notamment des densimètres délicats à mettre au point et de faibles ventes.
29Une autre délocalisation concerna le Service des appareils spéciaux de mesures électriques (ASME), appelé aussi Transmissions. Installé d’abord sur le site de Montrouge, il fut transféré dans une filiale de la CdC, la société de Constructions radiophoniques du centre (CRC) localisée à Saint-Étienne, 19 rue Daguerre. Créée en 1931 par Jean Bealem dans une usine de 4 000 m2, toujours président en 1968, la CRC était alors pourvue d’un capital de 380 000 NF. Une prise de participation majoritaire dans son capital l’avait fait entrer, le 29 juin 1949, au sein du Groupe CdC.
30Devenue la Société nouvelle des constructions radiophoniques du centre, tout en conservant son sigle CRC, elle emménagea, en juin 1964, dans une nouvelle usine de 10 000 m2. Employeur de 850 personnes, dont 90 ingénieurs et cadres, elle se consacrait, en 1968, à la fabrication d’oscillographes cathodiques et accessoires, générateurs de signaux, appareils de mesure électriques divers et de matériel de physique nucléaire15.
31Cette stratégie de délocalisation prit une nouvelle dimension avec la décentralisation d’un élément fondateur de l’activité de la CdC, la fonderie, à l’heure où l’on ne parlait pas encore d’activité polluante, mais qui était classée par la ville de Montrouge, dans la catégorie des établissements exerçant une activité sale, comme l’avait été qualifiée celle du gaz, au temps où les usines à gaz enfumaient Paris.
La décentralisation d’un élément fondateur
32Pierre Heeley exposait, en 1954, qu’il pensait depuis plusieurs années à la délocalisation de la fonderie, non seulement à cause des nuisances signalées par la ville de Montrouge, mais surtout suite à la découverte du gaz naturel et des besoins du principal client de la CdC, Gaz de France (GDF). Avec ses nouvelles cokeries, ce nouvel établissement nationalisé, se disposait à utiliser les gaz riches, produits en quantités importantes par les raffineries françaises de pétrole installées dans les embouchures des fleuves. GDF devenait ainsi un gros consommateur de différents matériels de comptage de grande capacité que la CdC réalisait.
33Le choix du site, pour réimplanter la fonderie montrougienne, se porta sur la ville de Reims, adepte d’une politique dynamique partagée avec la chambre de commerce. L’existence d’une main-d’œuvre qualifiée et d’une usine de textiles désaffectée, disposant d’une surface d’un peu plus de 25 000 m2, décida de son acquisition. Ses bâtiments se prêtaient bien à l’installation de convoyeurs de montage pour des fabrications de compteurs de gaz de très grandes séries, et pour des compteurs d’eau. La fabrication des compteurs de moyens et gros calibres, dont le mode de montage relevait des méthodes de petite série, demeurait à Montrouge16.
Fig. 24 – Usine de Reims (1957)
34L’usine rémoise, aménagée en 1954, les premières machines du service compteurs de gaz de Montrouge arrivèrent fin décembre 1955. Le 8 mars 1956, le premier compteur Gallus 2 sortait de l’usine et, à la fin du même mois, le premier convoyeur, capable de sortir 5 000 compteurs par mois, était mis en route. Le 25 mars 1957, l’usine de Reims sortait le cent millièmes compteur de gaz17.
35En décembre 1956, le montage des compteurs de vitesse du service eau de Montrouge avait été également décentralisé à Reims. La première machine-transfert installée en juillet 1957 permit de sortir, le 15 novembre, le premier compteur d’eau entièrement exécuté à Reims. Selon les prévisions, la capacité mensuelle de production devait atteindre 50 000 compteurs. En mars 1959, elle sortait le cinq cent millièmes compteurs d’eau. Elle employait 430 personnes, 272 hommes et 158 femmes, l’âge moyen des hommes étant de 31 ans et celui des femmes de 27 ans18. Exception faite des cadres et d’une partie de la maîtrise, le personnel avait été recruté sur place.
Fig. 25 – Reims – L’atelier d’étalonnage
36Dans son même secteur des compteurs d’eau, la CdC avait signé un accord en 1955 avec la société spécialisée Vincent Frères à Hagueneau. Exempt de clauses financières, il avait pour but de rationaliser la fabrication des compteurs entre les deux entreprises et d’améliorer leurs prix de revient. Chaque entreprise devait fabriquer, pour elle et son partenaire, les compteurs pour lesquels elle était la mieux outillée et la mieux placée quant aux prix. Chaque firme conservait son indépendance commerciale en France, mais une entente devait être prévue pour les affaires à l’étranger19.
Les autres sites industriels en France
37Les Usines métallurgiques de Marquise à Rinxent (Pas-de-Calais) comptaient trois départements principaux : la fonderie de fonte, la fonderie d’acier, les ateliers de mécanique, comportant 300 machines-outils pour l’usinage des pièces fabriquées par les deux fonderies. Les Usines métallurgiques de Marquise, organisée de façon autonome, employaient 1 100 personnes20.
38Sa fonte d’acier, réputée et connue pour ses spécificités, dont « l’acier pétrole », était utilisée pour des pièces destinées aux raffineries. Les vannes, les gros compteurs, les extracteurs, les surpresseurs, installés chez les clients, étaient fabriqués à Rinxent.
39L’usine horlogère de Besançon, créée en 1924, agrandie en 1931 et en 1942 dans une superficie restée néanmoins stable, avait vu son nombre de machines-outils augmenté et son effectif doublé. Durant les années 1950, employeur de 700 personnes, elle sortait de ses ateliers, « grâce à des changements d’implantation internes, des aménagements rénovés, à l’introduction de nouvelles méthodes d’études, de fabrication et de statistiques, à une modernisation des installations et des moyens de production, notamment des machines équipées de commandes hydrauliques, pneumatiques ou électriques », des produits dont la qualité constituait une référence pour sa clientèle interne et externe21.
40L’émaillerie de Dieppe, endommagée au cours du conflit, avait été reconstruite en bâtiments clairs et spacieux sur les hauteurs de Dieppe. Équipée d’un outillage moderne, essentiellement de machines à imprimer pour l’aluminium et de machines spéciales pour l’impression des cadrans en émail, elle était dotée de deux fours électriques et deux fours à gaz pour la cuisson des émaux. En dépit d’une concurrence sérieuse en matière de cadrans en aluminium, elle réussissait à conserver l’exclusivité de la fabrication des cadrans en émail, avec un effectif de cinq hommes et dix-sept femmes, qui produisaient journellement 3 000 à 4 000 cadrans de réveil et autant de cadrans de compteurs, à destination de clients français et étrangers22.
41En dehors de ces usines, l’entreprise comptait, dans son patrimoine industriel, de nombreuses filiales françaises et étrangères.
Les succursales françaises et les filiales étrangères
42La filiale Compagnie générale de construction de fours (CGCF), spécialisée dans la construction d’installations pour la carbonisation de la houille (fours à coke et fours d’usines à gaz) prit, après sa fusion avec la société Disticoke, la dénomination sociale Carbonisation entreprise et céramique (CEC), tout en restant une filiale de la CdC. Six ans plus tard, après des prises successives de participations dans la Société céramique de l’Aube, dans les Produits réfractaires de Valenciennes et de Cambrai, dans la Société nouvelle des Éts Muller, dans la Société Pajot-Godchaux, dans la société allemande Keramag, la CEC se plaçait au premier rang des fabricants français de produits réfractaires23.
43La CGCF bénéficia de l’expérience d’une succursale de CdC, Études et entreprises gaz, issue d’un bureau d’études, qui avait été créé au lendemain de la Libération pour répondre à des demandes d’entreprises gazières.
44Spécialisée dans l’étude et le montage d’appareils de traitement du gaz provenant de la distillation de la houille, elle réalisait le matériel installé dans des salles d’émission, de surpression, de compression des postes de détente et de comptage de gaz, tous matériels fabriqués à l’atelier de mécanique générale de Montrouge et à la fonderie de Marquise.
45La Société de construction d’appareils pour gaz à l’eau et gaz industriels (GEGI), filiale créée au lendemain de la première guerre mondiale, à la suite d’accords conclu entre la CdC et la firme Humphreys & Glasgow de Londres, avait vocation à développer les appareils de gaz à l’eau en France et dans quelques pays voisins. Au cours des dernières années, GEGI, en dehors de ses activités, s’était lancée progressivement dans les appareils de cracking catalytique de gaz, puis du fuel-oil, en collaboration avec l’Office national industriel de l’azote (ONIA)24.
46Le 9 janvier 1954, l’installation de cracking catalytique de gaz naturel et d’huile lourde, réalisée suivant le procédé ONIA-GEGI, construit par la maison correspondante Stabilimenti Siry Chamon de Milan, était réceptionnée et inaugurée par la ville de Vérone, acquéreur de l’installation25.
47Une autre implantation présente un caractère et un statut particulier à signaler : la succursale d’Alger. Au temps où l’Algérie et ses trois départements étaient sous un statut quasi analogue à celui de la métropole, la CdC avait d’abord installé un agent dans une pièce unique rue d’Isly puis, plus grandement dans des bureaux et un dépôt de compteurs d’eau et d’électricité au 7, rue Lulli. En 1937, l’antenne avait été transformée en succursale et installée au 20 de la rue Sadi Carnot où elle disposait d’un atelier de réparation de compteurs d’eau. Ces locaux devenus trop exigüs, la succursale s’installa, en 1951, dans un immeuble neuf 19, boulevard Marcel Duclos. Elle y occupait le sous-sol, le rez-de-chaussée et six bureaux au premier étage et employait 41 personnes, dont un directeur, deux ingénieurs, des techniciens, des agents de maintenance et du personnel comptable26.
48À l’heure de la nationalisation des moyens énergétiques en Algérie, la constitution d’Électricité gaz d’Algérie EGA, la CdC s’honorait d’avoir réalisé, en métropole, les équipements de la salle de commande et de contrôle de la centrale thermique d’Oran, du poste de Saint-Lucien à Alger, la centrale de Darguinah, en baies de télémesures, de commandes et de sécurité et de la centrale de Bône27.
49À l’instigation de Jean Le Duc, la succursale d’Alger participa, à raison de 19 980 parts d’intérêt de 100 F, à l’augmentation de capital de la Société groupe Francis Garnier immobilier, société civile au capital de 150 000 F, installée dans la ville, dont la direction fut confiée à un métropolitain, Marcel Vignaud28.
50Les huit filiales étrangères, appelées Maisons correspondantes étrangères (MCE), étaient installées à Barcelone, Bruxelles29, Dordrecht, Milan, Genève, Buenos-Aires, Sao-Paulo et Vienne. Elles vendaient le matériel CdC tout en fabriquant, suivant la technique de la maison mère, les appareils ou matériels conformément aux contingences économiques ou douanières en vigueur dans leurs pays respectifs. La CdC comptait, outre ces huit MCE, situées en Europe et en Amérique du Sud, 64 représentants dont neuf en Europe, quinze en d’Asie, douze en Afrique, quatorze en Amérique et une en Océanie30.
51Ces différents aménagements et restructurations industrielles et mobilières réalisés avaient conduit à élaborer un organigramme établi selon les nouveaux concepts de management chers Pierre Heeley.
La réorganisation fonctionnelle et opérationnelle
52L’expansion de l’entreprise, toujours à l’ordre du jour, Pierre Heeley s’attacha à mettre en place : « une nouvelle organisation basée sur un principe de décentralisation interne des activités de même nature destinée à servir une certaine catégorie de clientèle demandeuse de produits spécifiques ». La nouvelle organisation devait être « fondée sur une répartition en groupes, placés sous l’autorité de directions hiérarchiques opérationnelles, regroupant les ingénieurs, les agents de maîtrise et les ouvriers, doublées par des directions fonctionnelles administratives et commerciales31 ».
53L’organigramme, dit des « Fonctions supérieures » concrétisait en 1955, cette nouvelle conception de l’organisation de la CdC. Il illustre la conception d’une hiérarchie mixte, verticale et horizontale. Il révèle aussi une organisation « d’entreprise intégrée » allant de l’achat des matières premières à la conception et à la fabrication des produits, de leur emballage et de leur expédition, ou de leur livraison à la clientèle, assurée par une flotte de véhicules entretenus par des mécaniciens dans un garage ressortant des services centraux localisés au sein de l’usine de Montrouge.
54Un témoignage oral évoque néanmoins la persistance de coutumes et de l’esprit de compagnonnage avec, au sein des différents ateliers, une liberté relative d’exercer leurs capacités créatives : « chacun d’eux travaillaient comme s’il était à son compte32 ». Cette situation est illustrée par le nombre d’ouvriers, contremaîtres et ingénieurs de la CdC, récipiendaires de prix et de médailles décernées par la Société d’encouragement pour l’industrie nationale (SEIN) entre 1950 et 195633.
Tableau XXXIII – Structure des fonctions supérieures (1er février 1955)
55La CdC s’était attachée, dans tous les cas, à augmenter sa productivité « par la mise en place des outils pour développer l’efficacité du travail, non pas à la manière du taylorisme et du stakhanovisme, qui sacrifiait délibérément l’homme à la performance industrielle, mais dans le sens l’amélioration de la condition humaine, aussi bien dans le domaine intellectuel et sentimental que sur le plan matériel » Elle se proposait de « porter un effort persévérant sur le plan technique, le plan commercial, de la gestion, de la recherche et de la psychologique pour arriver à une productivité sans dommage pour le personnel34 ».
56C’est dans cet état d’esprit que la CdC avait réorganisé et modernisé ses différents ateliers.
Fig. 26 – Montrouge – atelier « compteurs gaz petit calibre » 1950-1960
Fig. 27 – Montrouge – atelier « compteurs gaz moyen calibre » 1950-1960
Fig. 28 – Montrouge – atelier « Mécanique générale » années 1950-1960
Fig. 29 – Montrouge – atelier « Transformateurs » années 1950-1960
57La réorganisation des services commerciaux avait été aussi à l’ordre du jour dès 1945. L’agence de Paris, créée le 1er octobre, était installée dans les bâtiments administratifs de Montrouge ; elle couvrait les départements de la région parisienne, de Normandie et ceux du Nord-Est, soit au total 13 départements. Les succursales de Lille, Lyon, Marseille, Nice, Strasbourg, Alger et les agences à Bordeaux, Limoges, Nancy, Paris, Rennes et Toulouse de la CdC avaient été restructurées pour assurer une liaison permanente avec la clientèle et une meilleure livraison de ses commandes.
58Il y lieu de noter que l’implantation des succursales et des agences était adaptée à celle d’Électricité et de Gaz de France qui comptaient 100 centres sur le territoire métropolitain35.
59Ces mesures de restructuration des activités industrielles et commerciales, appellent à en voir les modalités de financement adoptées.
Le financement de la restructuration organisationnelle
60En 1948, la perspective d’obtenir un important marché de compteurs à gaz, conduisit la CdC à solliciter du ministère des Finances, l’autorisation de lancer un emprunt obligataire de 500 millions de francs par l’intermédiaire de la Caisse des Marchés36.
61En 1949, pour financer son programme d’investissements, le Comptoir national d’escompte consentait à la CdC un crédit à moyen terme de 240 millions et l’Union pour le crédit à l’industrie nationale de 60 millions, le total devant être ramené à 240 millions dès la fin de la deuxième année et à 12 millions à la fin de la troisième année37. Un emprunt complémentaire à long terme de 150 millions était lancé, la même année, par l’émission de 15 000 obligations à 6,5 % de 10 000 F nominal, amortissables en 30 ans à compter du 1er décembre 194938.
62Fin décembre 1951, Pierre Heeley, administrateur directeur général, et Charles Allarousse, directeur général adjoint, étaient pourvus des pouvoirs de contracter un emprunt de 150 millions de francs au Crédit national, réalisable en une ou plusieurs fois moyennant le nantissement de titres de sociétés, dont la CdC était actionnaires.
- 24 236 actions de 3 000 F, de la Compagnie continentale pour la fabrication des compteurs & autres appareils 17, rue d’Astorg à Paris 8e (72 708 000 F) ;
- 8 498 actions de 3 750 F de la Compagnie générale de construction de fours (CGCF) 8, place des États-Unis à Montrouge (31 867 500 F) ;
- 1 580 actions de 2 500 F de la Société de construction et de location d’appareils de levage et de matériel de travaux publics 78, rue Vitruve à Paris (3 950 000 F) ;
- 15 346 actions de 430 F de la Société des établissements Fernand Longatte & Ateliers de Montreuil 202, rue Championnet à Paris (6 598 780 F) ;
- 3 000 actions de 10 000 F de la Société technique pour la fabrication de pièces mécaniques en matières plastiques (Mécanoplastique) à Massy Palaiseau (30 000 000 F) ;
- 20 000 actions de 500 F de la Compagnie de construction électrique (CCE) 32, rue du Docteur Lombard à Issy-les Moulineaux (10 000 000 F), soit un total de 155 124 280 F de titres nantis39.
63En février 1952, un emprunt à long terme était lancé, en deux tranches de 150 millions, auprès du Crédit national pour faire face à des investissements insuffisamment financés. Afin de les poursuivre, un crédit à moyen terme était à nouveau sollicité auprès du Crédit national en 1955 pour un montant de 600 millions destiné à financer de nouveaux investissements de 852 millions. Ce crédit devait notamment couvrir une partie de dépenses du secteur des appareils de mesure (218 millions) et l’achat de machines (613 millions, dont 244 pour l’usine de Reims40).
64En décembre 1956, afin de réaliser des aménagements indispensables à l’usine de Reims, une demande d’autorisation était introduite en décembre 1956, auprès du ministère des Finances, afin d’émettre 100 000 obligations de 10 000 F nominal avec le concours du CNEP. Elles devaient produire, un intérêt de 5,75 %, soit 575 F par titre et une prime de remboursement variable en fonction du chiffre d’affaires de l’année 1955, arrondi au montant pris pour référence de 11 350 000 F41. À propos de cette opération concernant Reims, le Crédit lyonnais, lui aussi partie prenante, estimait que « la société est une affaire prospère qui s’est, jusqu’ici, développée avec prudence en ne recourant que très modérément aux crédits à terme. L’opération envisagée se présente dans des conditions satisfaisantes42 ».
65Quasi simultanément à ces stratégies de financement de ses programmes successifs d’investissements internes, la CdC s’intéressa à des emprunts lancés par divers organismes, dont elle faisait partie, destinés à financer le secteur industriel.
66La CdC participa ainsi à l’emprunt lancé par l’Électricité de France pour dix millions de francs43 et, en juillet 1957, à l’émission par le Groupement industriel de la construction électrique (GICEL)44, d’un emprunt obligataire de 9 milliards de francs, dont 250 millions devaient être répartis entre les différentes sociétés de construction électrique, afin de financer leur programme d’investissement.
67Pour garantir l’emprunt, un certain nombre d’entreprises devinrent actionnaires par l’achat de parts de neuf cent millièmes : la Compagnie française Thomson Houston (CFTH) (220/900e), la Compagnie électromécanique (CEM) (150/900e), la Société générale de constructions électriques et mécaniques (Alsthom) (100/900e), la Société alsacienne de constructions mécaniques (SACM) (25/900°) pour elle-même et (7,5/900e) pour Télé Grammont, Société industrielle de combustible nucléaire (22,5/900e), dont (18/900e) pour SACM et (4,5/900e) pour les Tréfileries et laminoirs du Havre (TLH), Rateau (50/900e), la Société Westinghouse (45/900e), les Forges et ateliers Jeumont (45/900e), Merlin Gérin (30/900e), la Compagnie Radio-France (30/900e), la Compagnie radio-maritime (CRM) (30/900e). La CdC s’était engagée pour (25/900e) soit 250 millions de francs45.
68La CdC utilisa également pour financer ses investissements, les indemnités perçues au titre de l’indemnisation des dommages de guerre, dont la somme de 2 179 000 F, en titres de la Caisse autonome de la reconstruction dont les échéances s’échelonnaient entre 1961 et 1965.
« Ces titres étaient inaliénables, mais pouvaient être remis en nantissement avec délégation permettant au créancier nanti, d’encaisser les intérêts et le principal. En application de cette disposition, le CNEP proposa à la CdC de lui prêter 97 % du montant nominal de ces titres en vertu de la délégation qui lui avait été consentie. Le conseil de la CdC décida de solliciter un prêt sur 10 titres pour une valeur de 1 868 000 F déposés en nantissement en garantie du prêt correspondant46. »
69En matière de dommages de guerre, la CdC estima devoir, par solidarité avec les entreprises sinistrées, souscrire aux emprunts 6 % des Groupements de sinistrés par la remise, à concurrence de 35 %, de certificats de l’Emprunt 3 % libératoire du prélèvement exceptionnel, en portefeuille pour une valeur de 24 850 000 F47.
70Au titre de l’indemnité de nationalisation de l’usine de Prague, la CdC reçut, en 1956 et 1957, deux acomptes de chacun 6 700 000 F, ce qui portait le montant des acomptes payés à 26 729 433 F. Cette somme fut distribuée aux actionnaires, selon la répartition prévue par la loi, afin de les remercier de leur confiance48.
71Quant à Meterfabriek à Dordrecht, succursale hollandaise, après avoir d’abord autofinancé et obtenu les crédits bancaires obtenus pour procéder aux réparations d’urgence, elle demanda à la CdC de solliciter un emprunt hypothécaire de 240 000 florins, au taux de 3,75 % l’an, auprès de la banque néerlandaise NV Verzckerings Bank Victoria, moyennant une hypothèque sur l’ensemble des biens immobiliers constitué d’ateliers de maisons avec dépendances, terrains vagues et eau localisés à Lybaan près de Dordrecht49.
72Dans le même temps, la CdC recourait à la pratique, courante dans la plupart des entreprises, de recapitaliser son capital, afin d’alimenter sa trésorerie et de poursuivre ses projets de modernisation de ses installations.
73La CdC mit à profit la loi no 49-874 du 6 juillet 1949, qui « autorisait les entreprises industrielles à incorporer à leur capital la provision pour renouvellement des stocks constituée en conformité du décret du 30 janvier 1941… » CdC mit ainsi son capital en concordance avec ses investissements50 par l’incorporation à celui-ci de la partie autorisée du fonds de renouvellement des stocks (154 748 392,59 F) et un prélèvement de 530 717 607,41 F sur la réserve spéciale de réévaluation. Le capital était porté à 1 379 352 000 F, divisé en 1 379 352 actions de 1 000 F51.
74En 1950, une autre augmentation de capital était réalisée par l’incorporation directe de réserves, de bénéfices ou de provisions (344 838 000 F) et l’élévation de l’action de 1 000 à 1 250 F. Le capital passait à 1 724 190 000 F. Selon les dispositions légales relatives au groupement des actions, deux actions de 1 250 F, avaient été échangées contre une action de 2 500 F. Le capital était ainsi composé de 689 676 actions52. Le 20 mai 1952, une nouvelle augmentation de 862 095 000 F, réalisable par l’émission de 344 838 actions de 2 500 F nominal (au prix d’émission de 2 750 F), portait le capital à 2 586 285 000 F.
75Cet apport d’argent frais devait permettre de réaliser le plan de modernisation des établissements de Montrouge, Marquise et Besançon, (employeurs alors de près de 7 000 personnes), des usines de Dordrecht et de Milan, qui occupaient, à elles deux, 3 200 personnes. Il permit aussi de créer une nouvelle société au Brésil à Sao-Paulo, destinée à compléter l’implantation récente réalisée à Santiago du Chili53.
76Le 31 décembre 1953, le capital social était porté à 3 103 542 000 F, divisé en 1 034 514 actions au nominal de 3 000 F par incorporation de 517 257 000 F, somme prélevée sur la Réserve spéciale de réévaluation. La valeur nominale des actions passait ainsi de 2 500 F à 3 000 F54.
« Les 1 034 514 actions étaient détenues par près de 50 000 actionnaires, dont 10 000 actionnaires nominatifs tous connus, la propriété de leurs titres étant établie par une inscription sur les registres de la société et leur conversion au porteur, ou leur cession, ne pouvant s’effectuer qu’après l’opération sur lesdits registres et 40 000 actionnaires au porteur, généralement inconnus, la cession de l’action s’opèrant par la “tradition” du titre sans aucune intervention de la société55. »
77En 1959, à l’occasion de l’entrée en vigueur du Nouveau Franc (NF), la CdC émettait, le 31 décembre, 517 257 actions de 30 NF, à souscrire en espèces, soit 15 517 710 NF. Cette valeur, ajoutée à celle du capital de 31 035 420 NF de 1953, portait celui-ci à 46 553 130 NF. Le passage de la valeur des actions anciennes et nouvelles, de 30 NF à 33,33 NF et l’incorporation d’une somme de 5 172 570 NF, prélevée sur la Réserve spéciale de réévaluation, permettaient de porter le capital à 51 725 700 NF56.
78Dans ce contexte de restructuration financière et industrielle de ses secteurs traditionnels d’activité, la CdC demeurait préoccupée du maintien, envers et contre tout, de son service Télévision quelque peu malmené par des décisions politiques.
Le maintien de la télévision dans l’adversité
79La volonté de maintenir l’activité de la télévision, sous la direction de Jean Le Duc avec le concours de René Barthelémy, confirmée par le président Georges Vautier, appelé à succéder à Ernest Chamon en 1947, pouvait augurer d’une réactivation de l’activité fondée sur l’amélioration des performances et l’innovation.
80La reprise, en 1947, des négociations avec la Radio Corporation of America (RCA), concrétisée par le renouvellement du contrat de licence des brevets de la société américaine à la CdC allait dans ce sens et de pair avec la conjoncture. La CdC se prévalait alors d’un carnet de commandes prometteur et copieux en février 1947, avec des ordres en cours pour 61 millions, dont 41 devaient être réalisés dans l’année.
81Inopportunément, après une série d’essais et une reconnaissance de la technique comparée à la concurrence étrangère, Jean Le Duc et René Barthelémy, à leur grand dam, apprenaient l’annulation des crédits prévus par la Radiodiffusion française et par le Comité national d’études des télécommunications (CENT). Jean Le Duc ne renonça pas pour autant57.
L’attachement de Jean Le Duc à la télévision
82Jean Le Duc, demeurant en quête de débouchés, s’attacha à promouvoir les réalisations de la CdC notamment à l’exportation, en particulier en Amérique du Sud. Il réussit ainsi à convaincre l’École technique de l’armée brésilienne de se porter acquéreur d’un matériel de reportage léger58.
83Au Maroc, Jean Le Duc multiplia les démarches, persuadé d’obtenir un contrat de concession en vue de constituer une société marocaine d’études de la télévision à Casablanca. Soumise à la promulgation d’un décret royal, le dahir, la société vit le jour le 8 juin 1951. Le bulletin officiel du protectorat du 26 juin officialisa la concession à la CdC et permit la constitution de la Compagnie marocaine de radio télévision (TELMA), dont Jean Le Duc fut l’un des administrateurs59.
84Cependant le climat, demeuré morose depuis 1947, amena la CdC à revoir le développement de la télévision au sein de la société, notamment en raison des dépenses importantes à engager. Elle se résolut donc à accueillir favorablement une proposition d’achat. Dûment mandaté, Jean Le Duc était investi des pouvoirs « d’engager des pourparlers avec toutes personnes, tous organismes officiels ou officieux, ou sociétés créées ou à créer en vue de la vente pure et simple ou de l’apport du Département Télévision et, à cet effet, engager toutes discussions, rédiger tous projets d’accord60 ».
L’engrenage dans la renonciation
85La décision de renoncer avait été renforcée en 1948 lorsque :
« le gouvernement français manifesta sa préoccupation, quant à l’avance des États-Unis en matière de télévision, et envisagea la mise en place en France d’un programme d’ensemble basé sur la création d’une société d’économie mixte, à laquelle s’intéressaient notamment la Compagnie des Compteurs, la CSF, Le Matériel Téléphonique, Sadir, Thomson Philips et la BPPB désireuse de devancer les autres banques61 ».
86La constitution de la société envisagée se faisant attendre, Jean Le Duc vit ses pouvoirs, successivement reconduits en octobre 1949, en avril 1950 sans pour autant renoncer à suivre les développements de la télévision.
87Jean Le Duc vit son enthousiasme réfréné lors d’une conférence tenue à Londres en 1950, au cours de laquelle le standard de lignes à adopter pour tous les pays devait être défini. Le même désappointement le gagna lors d’un voyage aux États-Unis, en avril 1951, visant à s’informer de la situation de la télévision. En dépit d’une reprise de contact positive avec RCA, qui avait fixé les conditions de reconduction de la licence existant entre les deux sociétés, il rentra convaincu que la situation était susceptible d’entraîner une modification de la politique de la CdC62.
88Jean Le Duc accepta de voir ses pouvoirs de négocier la vente du secteur de la télévision soient renouvelés en octobre 1951 puis reconduits de six mois en six mois, en juin 1952, en mars et novembre 1953.
La fin de l’aventure de la télévision « grand public »
89Le retrait de la CdC du secteur de la télévision « grand public était officialisé par un accord signé avec la Compagnie générale de télégraphie sans fil (CSF). Celle-ci faisait apport de sa filiale, la Société française radioélectrique (SFR), et la CdC sa branche Télévision63 ».
90La CdC apportait à la Société française radio-électrique (SFR) – société anonyme au capital de 930 millions de francs, dont le siège social était à Paris 79, boulevard Haussmann – sa branche d’activité, limitativement définie, qui comprenait comme éléments : la licence des brevets, les résultats des études et recherches et la clientèle sous certaines conditons, afin de continuer à exécuter les marchés déjà passés et d’en prendre éventuellement d’autres, s’il s’agissait de matériels sur prototypes antérieurs à l’apport.
91La CdC devait cesser de s’intéresser aux activités de la branche cédée pendant une durée de 25 ans et interrompre ses recherches dans le laboratoire de Corbeville équipé à la fin des hostilités.
92En revanche, la Société française radio-électrique (SFR) s’engageait, sur demande, à acquérir au fur et à mesure de l’achèvement des marchés en cours, le matériel, l’outillage et, éventuellement, les stocks utilisables pour les besoins de la branche apportée.
93En rémunération de l’apport, la CdC reçut 25 200 actions de la Société française radioélectrique, portant jouissance du 1er janvier 1954, tandis que la Compagnie générale de télégraphie sans fil (CSF) devait reprendre le matériel, les installations et les stocks du laboratoire de Corbeville et régler le montant des actifs de la Société française radio-électrique.
94La CdC s’engageait également à liquider définitivement l’exploitation de son laboratoire de recherches de Corbeville et à obtenir, de la Société civile immobilière de Corbeville, l’engagement de désaffecter les immeubles sans délai.
95L’apport comportait également une condition expresse de la plus grande importance quant à la poursuite d’une activité de la CdC ressortant du domaine de la télévision radar : pendant la durée de vingt-cinq ans, la Compagnie générale de télégraphie sans fil, concédait à la CdC la licence de ses brevets français et étrangers et la faisait bénéficier de son assistance technique pour toutes les applications de l’électronique de son domaine d’activité, y compris celles de la télévision industrielle incluses dans celui-ci.
96Les branches réception de la télévision amateur et du système dénommé Rana étaient exclues de l’apport, dont le droit d’usage d’un certain nombre de brevets dans les pays membres de l’Union française et dans la principauté de Monaco. Les terrains, bâtiments, matériel, outillage, mobilier, installations servant à l’une quelconque des activités Télévision, ainsi que tous les stocks de matières premières, produits finis etc. étaient également exclus.
97En définitive, la CdC, par cet apport, estimait avoir acquis une participation intéressante dans une entreprise de classe internationale qui occupait une place de premier plan dans l’industrie des télécommunications et de l’électronique64.
98À compter du 1er janvier 1954 la CdC, après avoir été l’un des pionniers de la télévision radiodiffusée, décidait de se consacrer exclusivement aux applications industrielles de la télévision en circuit fermé, activité qu’elle estimait promise à un grand développement.
99La CdC trouva, en 1960, une ultime possibilité de rebond en matière de télévision publique, en participant à la création d’une société pour la télévision payante, dont la réception nécessiterait l’installation de compteurs spéciaux. Selon Jean Le Duc, il était de l’intérêt de la CdC de se joindre aux fondateurs de la SARL, la Société nouvelle des Éts Gaumont, les Éditions Hachette, Intertechnique, et le général Corniglion-Molinier65.
Le repli sur la télévision industrielle en circuit fermé
100L’investissement de la CdC dans le secteur est attesté par l’équipement télévisuel dans des lieux publics, comme les quais du métropolitain de Paris et de la ligne de Sceaux.
Fig. 30 – Télévision industrielle : RATP Sceaux
101On retrouve aussi ce système de télévision embarqué à bord de trains, inclus dans le système de surveillance à distance de navires, comme le pétrolier Issélia de la Société maritime Shell, construit aux Chantiers de l’Atlantique à Saint-Nazaire.
102L’abandon de la télévision grand public introduite par Ernest Chamon en 1928 et la reprise aléatoire en 1947 furent douloureusement ressenties par les nostalgiques de cette période hors normes de la CdC. Pour les représentants de la troisième génération, maintenant à la tête de l’entreprise, la télévision en circuit fermé avait toujours sa place au sein de l’entreprise mais l’heure était à l’intégration des nouvelles technologies dans toutes les activités de l’entreprise.
Fig. 31 – RER – Bures s/Yvette
L’intégration des nouvelles technologies
103Devenu capitaine d’industrie, Pierre Heeley avait perçu, dès les contacts qu’il avait établis aux États-Unis aux lendemains de la Libération, les avantages à tirer pour l’entreprise de l’intégration de l’électronique et de l’informatique dans ses filières traditionnelles et d’une introduction dans la filière émergente de l’énergie atomique.
L’électronique chez les CdCistes
104Alors que l’Institut américain des ingénieurs électriciens estimait que l’électronique présentait le caractère d’une « branche de la science et de la technologie, qui définit la conductibilité de l’électricité à travers les gaz et le vide », l’ingénieur Lucien Boulay, proche de Pierre Heeley, écrivait à destination du personnel que, sur le thème de la Fée électricité, la Fée électronique brodait de brillantes variations sur le sujet. Il estimait qu’il était difficile de voir ou s’arrêtait l’électricité et ou commençait l’électronique à l’heure « où le cœur de celle-ci battait sous l’anode des lampes. Mais le cœur de l’Électronique est volage et le voilà attiré par de nouveaux venus : les amplificateurs magnétiques, diélectriques et semi-conducteurs, dits transistors66 ».
« Les semi-conducteurs utilisant des matériaux tels que le silicium, puis le germanium présentaient la caractéristique d’avoir leurs électrons faiblement liés mais aisément influencés, d’où le terme d’électronique. Les semi-conducteurs forment le support sur lequel on fabrique les composants électroniques, dont le transistor mis au point en 1947 par des ingénieurs des laboratoires américains Bell : William Shockley, Walter Brattain et John Bardeen (Prix Nobel de Physique 1956)67. »
105Pour la CdC, le transistor, par sa petite taille, sa faible consommation d’énergie, sa longévité, sa capacité à détecter et à amplifier les courants électriques, à produire des ondes électromagnétiques à haute fréquence, pouvait être utilisé dans les appareils assurant les fonctions et maîtrisant les différents paramètres de la mesure, voire de la micro-mesure, soit « compter, mesurer, contrôler, régler en vue d’indiquer, enregistrer, totaliser, transmettre, transformer toutes grandeurs ou composés concernant l’électricité, le gaz, l’eau et tous autres fluides ou gazeux ainsi que commander directement ou indirectement, sur place ou à distance, toutes manœuvres à déterminer en fonction ou à destination de ces opérations ». Avantage complémentaire du transistor pour l’entreprise : sa « réduction considérable de l’inertie par sa capacité à résoudre le double problème d’amplification et de traduction visuelle ou graphique, de phénomènes ultra-rapides68 ».
106Ces considérations avaient conduit la CdC à insérer, dès 1949, un service de recherches purement scientifiques dans ses différents départements.
Le service étude et recherche
107Les différents services de recherche étaient réunis en 1953 dans la succursale électronique, dirigée par Lucien Boulay. Devenue Centre de recherches en 1956, elle était regroupée en 1958 avec le service des télémesures pour former le service Études et Recherches qui devint, par la suite, le Département techniques nouvelles (DTN).
108La nouvelle structure intégra, et recruta69 des ingénieurs spécialisés et expérimentés dans le domaine de l’électronique en général, des commandes centralisées, des asservissements, de l’enregistrement magnétique, ainsi que certains ingénieurs issus de l’ancien service télévision, qui travaillaient dans le secteur de la télévision industrielle. Elle enrichit les gammes d’instruments électroniques et la CdC se réjouissait bientôt d’être le fournisseur d’entreprises relevant des secteurs des industries chimiques, pétrolières, sidérurgiques, aéronautiques agricoles, des chantiers navals et de la toute nouvelle industrie dite nucléaire, utilisatrice de l’énergie atomique70.
109Contrôle et Régulation, réinstallée en 1963 à Montrouge dans des locaux libérés par des délocalisations en province, devenue la Compagnie Européenne de Régulation (CEREG) se proposait d’intégrer les nouveaux processus industriels relevant de la régulation numérique directe ou « Direct Digital Control » (DDC) développée aux États-Unis. CEREG après avoir créé une chaine pneumatique complète miniature, la chaîne Isodyne, crée une chaîne électronique, vraie balances à courant continu, appelée chaîne Magdyne71.
110Parmi les concepteurs de ces matériels, figurait l’ingénieur Dimitri Strelkoff (qui avait pris une grande part aux travaux de René Barthélemy au sein du service Télévision) ainsi que des techniciens et des dessinateurs qui, devenus disponibles par la cession à la CSF de la télévision grand public, avaient été affectés au centre de recherches de Montrouge72.
Fig. 32 – Salle de contrôle équipée (instruments conventionnels)
Fig. 33 – Salle de contrôle de Pierrelatte (instruments « Magdyne »)
La CdC et l’énergie atomique
111Consacrant son activité aux problèmes industriels de mesure et de régulation, la CdC estimait devoir inscrire, au nombre de ses réalisations, la conception et la fabrication d’appareils répondant aux exigences du programme français d’utilisation de l’énergie atomique.
112En raison du caractère très nouveau de la technique, la direction générale chargea Gilbert Cahen (X 22, École nationale supérieure du génie maritime, entré à la CdC en novembre 1955), de faire une communication appropriée au personnel d’encadrement, destinée à lui permettre une bonne compréhension du principe des appareils de mesure et de contrôle susceptibles d’équiper des centrales et autres installations nucléaires.
113Les industries productrices d’énergie électrique, hydraulique, tout comme les centrales nucléaires, devant équiper leurs installations de ces mêmes systèmes répondant aux normes édictées par les entreprises utilisatrices de cette nouvelle énergie, la CdC trouva là un nouveau débouché. Elle s’adapta notamment aux exigences de l’industrie nucléaire, ce qui lui permit de participer à des réalisations dans ce secteur d’activité où elle se félicitait d’avoir trouvé une place73 :
114Commande, contrôle et réglage des réacteurs nucléaires des installations de contrôle et de réglage réalisées pour la pile Mélusine en 1959 au centre nucléaire de Grenoble.
115Commande et réglage du réacteur nucléaire de la centrale EDF de Chinon, en l’occurrence la fourniture de 54 treuils de barres avec dispositifs de régulation.
116Adaptation des appareils de contrôle classiques dont les doseurs d’humidité dans les gaz à un niveau extrêmement faible, les dispositifs de télévision d’installations hautement radioactives, les enregistreurs d’aérosols radioactifs destinés à la Protection civile.
117La CdC s’honorait de la fourniture de nombreux relais, réalisés par le Service appareils de mesure (SAM) et d’instruments de sa filiale Contrôle et Régulation destinés à équiper le poste central de contrôle de la pile atomique G2 de la centrale atomique de Marcoule et du barrage de Tignes.
118Dans ce contexte d’expansion technologique, toujours fidèle à sa stratégie de recherche d’accords, la CdC s’était empressée de se rapprocher de firmes et d’organismes œuvrant dans son domaine d’activité, mais aussi et surtout dans les filières de l’automatisme, de l’informatique et de l’industrie nucléaire74.
Fig. 34 a et b – Centrale de Brévières à Tignes
Des accords opportuns et des participations ciblées
119Pierre Heeley avait engagé des pourparlers en 1953 avec la firme anglaise, Termionic, en vue d’obtenir la licence exclusive, pour la France, d’un appareil destiné aux aérodromes, soit l’enregistrement des conversations entre les avions et la tour de contrôle. Il s’intéressa aussi à la Compagnie pour la promotion des techniques nouvelles (PROTECHNO), créée en 1955, dont l’objet était « la recherche et la promotion de toutes inventions et procédés, systèmes ou techniques appartenant à toutes personnes physiques ou morales ».
120Devenue l’un des administrateurs de PROTECHNO, la CdC délégua ses pouvoirs à l’un des ingénieurs recruté après la Libération, Roger Dubusc, ingénieur en chef du Laboratoire des recherches physiques75.
121Roger Dubusc, qui avait mis au point un oscillographe électromagnétique en fit la promotion auprès de différents organismes américains à l’occasion d’un périple qui l’avait mené de New-York à Montréal, Chicago, Cleveland, Boston, Washington, avec la visite des usines et laboratoires de Général Electric à Lynn, de Brush Electronics Co à Cleveland et de Technical Research Corporation à Acton (Massachusetts). C’est avec cette société que fut signé à Paris, à la veille de Noël 1954, un contrat de licence qui devait permettre d’ouvrir, outre Atlantique, les marchés des convertisseurs de mesure, gaussmètres enregistreurs, amplificateurs de mesure, altimètre de nuages, radio navigation76.
122Dans le domaine de l’industrie nucléaire, Jean Le Duc avait noué des relations au sein de la Société d’applications de la physique moderne (SAPHIMO). Introduite dans le secteur, constituée avec la participation de la CdC et la firme américaine Tracerlab, elle réalisait de nouveaux dispositifs ressortant du domaine des isotopes. Les négociations aboutirent à la constitution, en février 1949, d’une SARL au capital de 21 millions de francs, financés en apports et en versements de 5 et 2 millions pour Tracerlab, 1 et 6 millions pour le Groupe financier et 2 et 5 millions pour la CdC. Celle-ci se voyait, par ce biais, dotée d’une licence lui permettant de fabriquer et de vendre les appareils en Europe sauf en Suisse et en Suède77.
123La CdC adhéra aussi à des groupements qui se formèrent alors : Auxi-Atome, France-Atome, Indatome. Un siège devenu vacant à Auxi-Atome permit à Pierre Heeley de devenir membre du conseil d’administration78.
124La participation de la CdC à la création du Groupement français pour le développement de l’automatisation (GFDA) et à la conclusion d’un accord avec la Société alsacienne de constructions mécaniques (SACM), révéla ses intentions d’intégrer le secteur du calcul électronique de pointe et de s’y trouver une place79.
Les investissements dans le calcul électronique
125Pierre Heeley, grâce à ses nombreux contacts, notamment outre Atlantique, se fit l’initiateur de l’introduction à la CdC de la technologie des calculateurs, née aux États-Unis dans les années 1945, avec l’objectif affirmé de participer à la création en France d’une telle industrie.
126L’accord conclu en 1956 avec la Société d’électronique appliquée à l’automatisme (SEA), fondée en mars 1948 par François-Henri Raymond, dont le siège était 31, rue de La Baume à Paris et l’usine à Courbevoie, marque l’engagement de la CdC dans l’informatique.
127La SEA s’était lancée, en 1948, dans l’étude et la construction de calculateurs en prenant tous les risques. Concepteur des premiers ordinateurs analogiques et numériques français, elle avait fortement contribué à introduire les technologies de l’information dans le tissu industriel et éducatif national. Elle développa un simulateur équipé d’un calculateur analogique OME 12 en 1950, puis le calculateur universel binaire de l’armement (CUBA) en 1951 et l’ordinateur cryptanalyse CAB1011 en 195580.
128Un accord était signé avec la CdC le 18 avril 1956, lors d’une réception au Pavillon Dauphine à Paris où étaient conviées les personnalités de l’administration et de l’industrie intéressées par l’automatisation. Il avait le double but :
« coordonner les moyens et la technicité des deux sociétés et d’éveiller l’intérêt des administrations et de l’industrie à l’égard de l’automatisation, qui implique l’ensemble des procédés destinés à remplacer la main-d’œuvre humaine par des servomécanismes. L’automatisation avait pour motif profond la plus grande rapidité, la meilleure précision d’une commande électronique par rapport à une commande manuelle81 ».
129L’accord était aussi basé sur un échange d’informations et de licences sans contrepartie financière, la CdC, selon F. H. Raymond, ayant « de grandes capacités de produire en série à des prix de revient fort bien maîtrisés »82. Elle avait, en outre, l’avantage d’avoir commencé, dès 1955, à construire sous licence américaine des magnétophones multivoies pour l’enregistrement des communications d’aéroport.
130Grâce à sa coopération avec la SEA, la CdC faisait l’apprentissage de l’enregistrement magnétique professionnel de haute qualité et, en contrepartie, apportait ses compétences en métrologie et sa capacité de production de série, notamment dans le domaine des bandes magnétiques, dont la SEA avait besoin. La CdC bénéficia, en outre, des compétences techniques de l’ingénieur Oscar Cytrin, détaché à Montrouge par la SEA83.
131La CdC était alors en capacité de développer ses dérouleurs de bandes magnétiques pour le traitement de l’information et de produire, à Montrouge, les platines d’enregistrement numérique (PEN) destinées initialement à la SEA. La CdC diversifiait bientôt les débouchés commerciaux de ces périphériques à d’autres fabricants d’ordinateurs. La SEA y trouvait son avantage, puisque cela permettait d’abaisser les prix de revient84.
132Néanmoins, la véritable entrée dans cette nouvelle technologie de la CdC se situe au début des années 1960 « lorsque les grands groupes français de construction électrique et électronique CSF, CGE, SACM-Alcatel, Thomson, Compagnie des Compteurs85 » s’y engagent, à l’heure où l’État commençait à réclamer des ordinateurs, en particulier pour le programme nucléaire.
133La réputation de la CdC dans le domaine de l’enregistrement magnétique, la mesure, le contrôle et l’automatisme, la mena à engager des pourparlers avec les dirigeants de la firme américaine Packard-Bell Electronics Corporation. Ils portèrent sur la fourniture du calculateur Packard Bell 250, fabriqué ultérieurement sous licence86, au sein d’une société française à constituer dans laquelle la CdC devait être majoritaire.
134La Société européenne pour le traitement de l’information (SETI) qui en résulta fut constituée le 27 juillet 1961 avec, pour siège social provisoire, le 12, place des États-Unis à Montrouge, un capital social d’un million de francs divisé en 10 000 actions de 100 NF, dont 5 000 attribuées à la CdC en représentation de ses apports en nature. Les 5 000 autres actions furent souscrites par Uniperi (2 000), Packard Bell (2 495), la CdC (497), les huit dernières revenant à chacun des administrateurs qui souscrivirent à une action de série B. La SETI avait pour objet « toutes études, recherches, développements, fabrication, installations et vente, dans les domaines de l’automatisme du traitement de l’information et des calculateurs électroniques, ces domaines s’appliquant à toutes les branches d’activité87 ». Jean Gaudfernau, transfuge de la SEA, devenait directeur général.
135Faute de place à Montrouge, la CdC obtint l’autorisation d’édifier un établissement sur un terrain d’environ 10 000 m2 à Massy dans la zone industrielle. Les travaux débutèrent en 1962. Deux ailes de bâtiments en béton armé, à trois étages et un sous-sol, étaient affectées aux laboratoires et aux ateliers. Un deuxième bâtiment, en forme de U à deux étages était réservé aux services administratifs88.
136Le nouvel ensemble, bientôt dénommé Centre électronique de Massy, puis Centre d’automatisme (CDA), devait accueillir la Société européenne de transformation de l’information (SETI), les secteurs de Radio navigation, (RANA) et Équipements électroniques spéciaux (EES) qui travaillaient, entre autres, sous la licence Cubic Corporation à San Diego aux États-Unis89. Le centre devait accueillir le personnel correspondant, dont une centaine de jeunes ingénieurs recrutés dans les années 1950-1960, parmi lesquels Denis Dayonnet (X44, ENST 49), entré à la CdC en août 1962 (ami personnel et voisin de F. H. Raymond de SEA)90. L’installation du centre fut réalisée le 29 octobre 196291. En 1964, deux nefs supplémentaires étaient édifiées à l’occasion de l’opération Massy 2.
Fig. 35 – Centre électronique de Massy (maquette)
Fig. 36 – Équipement numérique
137Alors que de puissants constructeurs IBM, Siemens, Control Data, General Electric, Bull étaient déjà bien présents, la CdC se lançait dans l’aventure du calcul électronique, à travers la SETI alors en mesure de fabriquer, sous licence Packard-Bell, le mini-calculateur PB 250.
138La CdC s’honorait de la fourniture d’un calculateur PB 250 au CEA à Saclay, pour traiter les problèmes d’analyse par spectrométrie d’un mélange d’éléments radioactifs et, à Cadarache, d’un ensemble de contrôle de la pile atomique César. Aux Houillères du bassin de Lorraine à Carling, l’entreprise se félicitait de l’intégration d’un calculateur de programmation automatique de contrôle (PAC 700)92.
139Soucieuse de s’introduire efficacement dans ce nouveau secteur d’activité, la CdC racheta à Packard Bell les droits de sa licence en 1963, ce qui fit de la SETI l’une de ses filiales à 100 %, avec pour objectif la réalisation d’un matériel entièrement français.
140En deux ans, avec la collaboration du CNRS, une équipe de chercheurs universitaires et d’ingénieurs sortit du centre de Massy, dans le courant de 1965, « une machine originale conçue par Denis Dayonnet et Jean Gaudfernau, dénommée Pallas, à la fois calculateur de gestion, calculateur scientifique et calculateur en temps réel93 ».
141Pallas et ses prolongements constituaient la contribution de la CdC au développement de l’industrie française des calculateurs94.
142La CdC tentait alors d’entrer dans le club des bénéficiaires du grand projet industriel et technologique que constituait, dans le cadre du 5e Plan (1966-1970), Le Plan Calcul.
Fig. 37 – Calculatrice SEA
Fig. 38 – Le calculateur Pallas
143Le Plan Calcul, conçu en 1966, après le refus du gouvernement américain d’autoriser l’exportation du système Control Data au Commissariat à l’énergie atomique (CEA) et, dans le cadre de la politique d’indépendance nationale voulue par le Général de Gaulle, devait permettre à la France de mettre sur pied, dans les cinq ans à venir, une industrie nationale du traitement de l’information. Le Plan avait aussi vocation à subvenir aux besoins de la défense nationale, de la recherche scientifique et devait favoriser l’introduction de l’informatique dans les entreprises, afin de leur permettre de jouer un rôle déterminant dans la compétition économique internationale.
144La CdC exprima son intention d’apporter sa contribution au Plan Calcul dans une lettre, en date du 24 juin 1966, adressée à M. Ortoli, Commissaire au Plan et en informa le conseil d’administration le 30 juin95.
145Dans ce contexte, Maurice Ponte, président du conseil d’administration de la Compagnie de télégraphie sans fil (CSF), administrateur de la CdC avait, à l’appui de la démarche de l’entreprise, précisé qu’à sa connaissance les premiers entretiens entre la puissance publique et les groupes industriels, n’avaient porté que sur les unités centrales alors que l’activité de la CdC ressortait du domaine des périphériques et de l’automatisme industriel96.
146Ces joutes d’influence affectèrent le fonctionnement de la SETI et ses résultats financiers. Elles devaient conduire au quasi abandon de la CdC dans ce domaine.
147C’est dans ce climat économique, à connotation politique des années d’après-guerre, évoquées par Jean Bouvier comme étant les Vingt Glorieuses, précédant celles de la grande crise de la fin du XXe siècle (1974-1993), que la CdC présentait l’image d’une entreprise managériale sous la gouvernance de la troisième génération des Chamon.
24 juin 1966 : document adressé par la Compagnie des Compteurs à Monsieur François ORTOLI. Commissaire Général au Plan, 18 rue Martignac, Paris 7ème.
Monsieur le Commissaire Général,
Au cours de récents entretiens, nous vous avons précisé la position de notre Compagnie sur le « Plan Calcul » ; à la veille de décisions gouvernementales, nous croyons utile de vous la confirmer.
En raison de la place fondamentale que tient déjà et que ne manquera pas de prendre de plus en plus le calcul électronique dans l’industrie de la mesure et de la régulation, la COMPAGNIE DES COMPTEURS faillirait à sa vocation si elle ne prenait pas une part active à cette technique nouvelle.
Elle risquerait autrement de compromettre gravement son avenir et par là, pensons-nous, l’avenir de certaines positions françaises dans le domaine de la mesure.
C’est dans cet esprit que nous avons investi des sommes importantes, durant ces dernières années, dans nos fabrications d’enregistrement magnétique, où nous avons déjà acquis une notoriété et une clientèle européenne, prémices des développements futurs.
Parallèlement, la nécessité de créer des chaînes homogènes joignant l’instrumentation à l’interprétation, nous a conduits à nous attaquer au problème de fond de la technologie même des calculateurs et à réaliser, à côté de périphériques spécialisés, des unités centrales originales : le PB 250 et la PALLAS, avec la mise au point complète du software de base.
Aussi, dans la mesure où FÉtat interviendra de façon décisive pour la création d’une industrie française du calculateur, nous estimons-nous fondés, dans notre intérêt mais aussi dans l’intérêt de la technique française et de la réussite au sens large des objectifs gouvernementaux, à demander que la COMPAGNIE DES COMPTEURS y soit conviée.
Pour autant que la construction soit suffisamment large et individualisée pour éviter d’être inféodée aux groupes d’origine, nous serions d’accord pour lui apporter notre actif en matière de calculateurs et de périphériques, nous réservant les applications ultérieures aux chaînes de mesure.
A défaut d’une telle intégration, nous devrions assurer d’autre manière les engagements déjà pris par nous en matière de calculateurs et le développement de nos activités de périphériques. Il nous apparaît qu’une voie permettant encore de maintenir une coordination étroite des techniques françaises serait alors la création, aux côtés de la société de calculateurs, d’une société de périphériques élargie. Aussi avons-nous pris, avec une importante maison française qui avait exprimé des préoccupations similaires, des contacts permettant un regroupement et ainsi une réalisation solide.
Notre expérience nous donne à penser qu’une progression cohérente et simultanée des travaux des deux sociétés, assurée dans un cadre défini par l’État, serait efficace et peut-être même plus forte qu’une construction unique. De plus, en raison même de sa spécialisation, la société de périphériques pourrait, grâce à certains accords amorcés par nous, prendre des positions européennes.
Nous n’avons pour souci en vous suggérant cette solution que d’éviter des orientations centrifuges non conformes à l’intérêt général, que pourrait entraîner toutes constructions ne respectant pas les intérêts vitaux des groupes non encore appelés.
Nous vous prions de croire, Monsieur le Commissaire Général,à l’assurance de nos sentiments les plus distingués
P. HEELEY
L’image de la CdC dans les « Vingt Glorieuses »
148Outre une mise à jour purement juridique de son objet social, ce sont les restructurations successives et les adaptations à la politique de réaménagement du territoire, qui contribuèrent à former l’image de la CdC des années 1960.
L’extension et l’illustration de l’objet social
149La modification en 1959 de l’article premier des statuts, décidant de la contraction de la raison sociale en Compagnie des Compteurs avec pour sigle CdC, inscrit dans un trapèze, se veut symbolique d’un élargissement de son champ d’activité traditionnelle aux techniques innovantes introduites en Europe aux lendemains de la seconde guerre mondiale.
« La société a pour objet, directement ou indirectement : La fabrication, la vente et l’exploitation en tous pays, sous quelque forme que ce soit, des compteurs de gaz et de tous appareils destinés à la fabrication et à la distribution des gaz, des compteurs d’eau, appareils hydrauliques et autres, applicables à tout fluide, des compteurs d’électricité et de tous les appareils et matériels de mesure, télémesure, télécommande, de tous relais et, d’une façon générale de tous dispositifs de télévision industrielle, de tous appareils spéciaux de physique nucléaire et d’équipement de centrales atomiques, de tous dispositifs mécaniques, électriques ou électroniques destinés à la mesure, au contrôle et à la régulation, de toutes études et réalisations d’installations d’automatisation97. »
150Cette mise à jour administrative se traduisit sur le terrain par une réorganisation plus rationnelle et adaptée à l’intégration de toutes nouvelles techniques dont, selon François Caron, « l’émergence entraîne la construction d’un nouveau système de production, l’apparition d’une nouvelle organisation de l’entreprise, du travail et de nouvelles qualifications du personnel98 ».
151La CdC paraît avoir fait sienne cette conception grâce à la création de groupes de production homogènes ayant leur propre gestion. Ainsi aux secteurs de production figurant sur l’organigramme de 1955 succédèrent, outre les différents services administratifs et les usines, les groupes Liquides divers, Techniques gaz, Techniques nouvelles, assistés du centre de recherche. Celui-ci était « l’une des composantes d’une stratégie globale d’innovation dont la réussite à long terme est subordonnée aux réalités de la production dans les ateliers et aux perspectives de commercialisation des systèmes99 ».
152Entre 1963 et 1968, ces groupes firent place à cinq départements autonomes100 : Gaz, Liquides, Mécanique, Électricité et Électronique assistés d’un centre de recherche, servant d’appui au récent centre d’automatisme. Ils bénéficiaient de l’assistance de la direction commerciale de ses services Méthodes & moyens de vente, Après-vente, Études & Réalisations, des directions financière, administrative, du personnel, des services sociaux et des quatre branches d’activité industrielle.
Tableau XXXIV – Organigramme de la Cdc de 1963 à 1968
153L’image managériale fonctionnelle et opérationnelle de l’entreprise ainsi définie est complétée par une série de documents internes intitulés « Bulletins CdC » qui commentent l’évolution de la CdC entre 1950 et 1970. Des plaquettes « Présence CdC » valorisent les réalisations de l’entreprise dans la plupart des secteurs industriels. Ils paraissent voués à justifier la raison d’être de la CdC : « Mesure, Contrôle, Régulation, Automatisation » et sa participation aux Expositions Universelles de la fin du XIXe et du XXe siècle et à la Foire de Paris, considérées dans les années 1950 comme des vitrines affrontant une concurrence active à l’heure de l’avènement du Marché commun.
Présence CdC, où vont nos appareils ?
154La CdC participa à la Foire de Hanovre du 24 avril au 3 mai 1955, symbole de la reprise de relations économiques avec l’Allemagne de l’Est, puis y exposa ensuite régulièrement. Elle exposa également aux différents salons français : le Salon de la physique, de la Pièce détachée radio, de la chimie, de la machine agricole, de l’équipement laitier ainsi qu’à la Foire internationale de Lyon. À l’étranger, elle était présente à Interkama à Dusseldorf, aux expositions industrielles de Poznan, Moscou, Francfort, Osaka, Munich, Mexico, Casablanca et aux foires de Leipzig, de Zagreb et de Belgrade, ainsi qu’à l’Exposition internationale de Bruxelles (17 avril-19 octobre 1958). Elle participa aussi aux expositions organisées à Genève par l’ATEN, l’organisme pour le développement des techniques françaises d’énergie nucléaire au sein de l’Euratom.
155La CdC à travers sa filiale, Contrôle et Régulation, participa à la première exposition internationale consacrée à la mesure, à la régulation et à l’automatisme, Mesucora, tenue à Paris (9-17 mai 1961) au Palais des expositions du Rond-Point de la Défense à Paris, dans le centre national des industries et techniques (CNIT101). Elle s’y trouvait en concurrence avec des entreprises bien placées sur le marché, à l’instar d’Honeywell, Motorola, Hartmann & Braun, MECI, Contrôle Bailey, Otic Fischer102.
156Les encarts Présence CdC visaient également à valoriser les réalisations de l’entreprise dans les différents secteurs d’activité industriels103. Une sélection parmi celles-ci a fait distinguer :
- l’installation de systèmes de télécommandes centralisées et de télémesures dans les centres de dispatching d’EDF de la région parisienne ;
- le système de délestage automatique de l’énergie électrique en cas de coupures à Hispano-Suiza à Bois-Colombes ;
- l’équipement de la centrale Seguin de la Régie Renault ;
- les installations de traitement des goudrons à l’usine de Moyeuvre de Wendel & Cie et dans la sidérurgie ;
- l’équipement en systèmes de télémesures de son secteur Radar à la ville de Paris, « Paris vu au Radar » et du feeder de l’Est ;
- la participation à la réalisation d’ensembles complexes : la mesure et de contrôle de l’éclairage des tunnels routiers de la RN7 ;
- les installations de télévision aux Halles de Rungis et sur les quais du métro parisien ;
- l’extension et la modernisation des Aéroports d’Orly et du Bourget (protection des alternateurs de la centrale thermoélectrique et du réseau de distribution d’énergie au sein de l’aéroport, réalisation du tableau de commande de la centrale et contrôle des mesures électriques, dispositif de sécurité des balisages) ;
- les systèmes d’enregistrement des variations de courant et de tension embarqués à bord des locomotives SNCF et les systèmes de radio-navigation RANA, conçus et réalisés au sein du Département Électronique de Montrouge104.
157Rana était une sorte de plan commenté de navigation, expérimenté dans la région parisienne composé de deux émetteurs radioélectriques, (l’un sous une tente au Château de Corbeville, l’autre à la Mécanoplastique à Massy) et d’un récepteur de bord, installé dans une vieille Peugeot 401. L’équipement définitif, testé avec succès par Électricité de France dans la baie du Mont-Saint-Michel, puis sur les côtes du Maroc dans le courant de l’été 1954, fut installé au service hydrographique de la Marine, à l’Institut Océanographique de Monaco, au Sénégal pour le compte de la Compagnie française des pétroles qui effectuait des prospections sismiques et gravimétriques et des forages en mer.
158La CdC et sa filiale CEREG jouissaient d’une réputation solide auprès des Chantiers Navals qui est illustrée par les photographies des salles de contrôles des pétroliers Magdala et Dolabella.
Fig. 39 – CEREG – Salle de contrôle du navire « Dolabella »
Fig. 40 – CEREG – Salle de contrôle du navire « Magdala »
159Dans le domaine spatial, la CdC apporta sa contribution à des réalisations au centre de calcul de la simulation des conditions de vol supersonique à haute altitude (CEAT de Toulouse), aux installations du CNES à Aire-sur-l’Adour, Ménerville, Brétigny. Elle installa des bancs de contrôle au Laboratoire central des télécommunications et fut maître d’œuvre, dans le cadre de la réalisation du satellite européen ESRO1, d’un appareil de télécommande par ultra-sons (Teltac) et réalisa un magnétomètre de contrôle d’altitude du satellite Eole105.
160La CdC avait aussi réussi à intéresser les secteurs du médical, de l’agroalimentaire avec ses doseurs d’humidité de céréales, ses dispositifs de mesurage des liquides (lait, vin, bière, alcools), de dosage de l’humidité des céréales, d’irrigation des sols agricoles par des bornes d’irrigation et des aspergeurs permettant un arrosage anti-gel, etc…
161Les filiales et les succursales participèrent également à des installations prestigieuses comme l’installation de cracking catalytique de gaz naturel et d’huile lourde, réalisée suivant le procédé ONIA-GEGI, à l’usine à gaz de Vérone en Italie (équipement effectué selon les directives de la filiale Société de construction d’appareils pour gaz à l’eau et gaz industriels (GEGI) et de l’établissement milanais Stabilimenti Siry Chamon). Le même procédé de cracking de fuel fut installé dans une usine de Florence en Italie et à Paramaribo en Guyane hollandaise, devenue le Surinam. La fourniture et le montage de l’usine à gaz de Cuba, dans la banlieue de La Havane, avec le concours financier de la Banque française du commerce extérieur (BFCE) en 1958, qui sont mentionnés comme un succès notable à l’exportation.
162Les Bulletins CdC comportaient régulièrement des articles intitulés Peau neuve à Montrouge, destinés à informer le personnel et à l’associer à la modernisation des différents ateliers de nature à générer un retour positif sur l’image de l’entreprise dans le climat économique et social en pleine mutation des années 1950 et 1960.
Fig. 41 – Technicienne (soudure)
Fig. 42 – Technicienne contrôle microscope
Le retour sur image du personnel
163La CdC avait connu une occupation du site de Montrouge par son personnel ouvrier entre le 20 novembre et le 10 décembre 1948 et des conflits sporadiques en 1949 et 1950. Leur règlement ne figure pas dans les rapports des conseils d’administration, à part la grève de trois semaines, qui avait débuté dans les ateliers le 3 février 1953 sur une revendication salariale qui fut résolue par une augmentation de salaires de 5 %, préconisée par l’organisation patronale de la Métallurgie.
164Le quasi-climat de consensus qui s’en suivit peut paraître illustré par le graphique établi par Pierre Heeley, publié dans le bulletin interne de janvier-février-mars 1956.
Tableau XXXV – Salaires et productivité, Bulletin Cdc, no 17
165Comparant les variations des salaires, de la productivité et des prix des matières premières entre 1951 et 1955, le commentaire constitue une réponse à d’éventuelles revendications salariales ultérieures : « les améliorations de productivité doivent précéder les augmentations de salaires, qui doivent les suivre dès que possible sans jamais les devancer106 ».
166Dans cet esprit, une première convention d’entreprise, applicable à l’usine de Montrouge, dans le cadre de l’aménagement de la vie au sein de l’entreprise, avait été signée le 18 novembre 1955, pour la direction, par Pierre Heeley, et par les représentants des syndicats : CFTC ouvriers, CFTC maîtrise et employés, CGT-FO et Cadres de la Métallurgie107.
167La seconde convention, signée le 24 décembre 1957, décida de l’adhésion à un régime complémentaire à celui de la Sécurité sociale, en faveur des salariés qui en étaient dépourvus jusque-là108.
168Une troisième convention, signée en 1962, qui eut pour objectif d’améliorer et l’homogénéiser des dispositions générales et des avantages étendus à l’ensemble du personnel des usines de Montrouge, Besançon, Marquise et Reims, contribua à la perception favorable de l’entreprise par son personnel109.
169L’image positive de l’entreprise se trouva aussi renforcée par la modernisation du centre d’apprentissage qui attirait particulièrement les enfants du personnel mais, ouvert à tous, il affichait, dans les années 1950, jusqu’à 400 à 500 candidats inscrits pour 30 jeunes de 16 ans recrutés.
170Conforme au cursus de l’Éducation nationale incluant les stages en atelier à Montrouge, les candidats passaient l’examen national après trois années d’études. Alors qu’ils avaient la liberté de rechercher un emploi à l’extérieur, la plupart d’entre eux souhaitaient intégrer l’un des ateliers de la CdC et y faire carrière, eu égard aux possibilités de promotion interne110, liée à l’obtention du CAP, du brevet professionnel, suivie d’une préparation aux examens du CNAM, grâce à des aménagements d’horaires et le versement d’une prime en cas de succès.
171Dans ce contexte de structuration de la vie des salariés dans les années 1950, le personnel, de Montrouge notamment, connaissait des problèmes de logement consécutif à la pénurie et à l’accroissement de la population en région parisienne.
172En 1953, dans le cadre de l’aménagement de la région sous l’égide du préfet du district, Paul Delouvrier, la loi du 11 juillet 1953 et son décret no 53-701 du 9 août 1953 (article 1936-3), signait l’acte de naissance des grands ensembles (dont ceux de Massy-Antony) et obligeait les entreprises de plus de 50 salariés, à investir dans la construction de logements. Connaissant les problèmes de ses salariés dans ce domaine, la CdC avait déjà pris des dispositions.
La CdC promoteur immobilier dans la crise du logement
173Anticipant la loi, l’apport d’un terrain sis à Malakoffet la souscription en 1952 d’actions en numéraire pour une somme de 21 740 000 F, permirent la constitution de la société Compteurs Immobilière Musset, au capital de 25 millions dont les actions devaient obligatoirement être cessibles ultérieurement aux seize locataires de l’immeuble édifié en 1952-1953. En avril 1955, la construction d’un immeuble en mitoyenneté, commencée en 1954, était terminée.
174En 1953, un terrain situé à Bourg-la-Reine, propriété de la CdC, avait été également cédé à une organisation de construction d’immeubles collectifs, dénommée Société immobilière de la Fontaine Grelot, à condition que seize appartements soient réservés à des ingénieurs et cadres désireux de participer à cette société111.
175Toujours en 1953, la CdC vendait à un prix raisonnable, avec facilités de paiement, un terrain de 3,6 hectares, dénommé Pré de la Madeleine, situé à la limite de Fresnes112. Les constructions sur ce terrain devaient être réalisées selon le principe d’une coopérative d’auto construction de pavillons par les membres du personnel, qui devaient souscrire à la formule.
176À Antony, des salariés de la CdC « Les Castors de la Bièvre » réalisèrent un travail considérable. Le 5 novembre 1953, Pierre Heeley posait la première pierre du lotissement devant une nombreuse assistance et plusieurs personnalités de la direction de la CdC et d’organismes officiels. En 1955, 35 pavillons formant 70 logements avaient été réalisés à Antony. Une seconde opération Castors avait démarré en 1954 sur un terrain à Bourg-la-Reine.
177En 1958, un prêt fut consenti par l’entreprise à un deuxième groupe de 72 Castors pour terminer leurs pavillons, tous occupés, et des prêts individuels furent accordés à 45 salariés pour leur faciliter l’accession à la propriété. Des participations furent également prises dans deux foyers, créés par la Caisse des dépôts et consignations, l’un destiné à mettre 18 chambres à la disposition de jeunes travailleurs célibataires, l’autre devant être consacré à la réalisation du foyer des Nord-Africains de l’Haÿ-les-Roses113.
178Afin d’assurer le relogement du personnel déplacé de Montrouge vers Reims, la CdC avait subventionné des organismes locaux rémois et participé à une société locale immobilière. À Marquise, deux maisons pour ingénieurs furent rénovées et des locaux de la coopérative, devenus disponibles, transformés en neuf logements, cédés à des ouvriers dans le cadre du programme d’accession à la propriété.
Tableau XXXVI – La répartition des trois principales usines de la Cdc
179À Besançon, un pavillon de deux logements fut construit dans la cité existante, tandis que la CdC se portait caution solidaire de la société Le Logis Bisontin, pour la construction d’un ensemble immobilier en accession à la propriété. Des prêts individuels furent consentis au personnel des usines de Marquise et de Besançon114.
180Ces différentes dispositions ont suggéré de voir le rapport existant entre les bassins d’emploi et l’étirement résidentiel progressif du personnel du site de Montrouge, élément modificateur de la relation de proximité de la CdC souhaitée par son fondateur115. Ils sont illustrés par trois documents d’archives.
181Le document intitulé, Répartition du personnel de l’usine de Montrouge dans la région parisienne, montre que le personnel résidait à proximité, Malakoffet de Montrouge. Il fait ressortir que seulement 43 % de l’effectif de la CdC résidait dans les localités avoisinantes, 800 à Montrouge, 798 à Malakoff.
182La résidence s’étire vers la banlieue sud de ces localités, le long desquelles serpentent la ligne de Sceaux et les routes d’Orléans et de Chartres, où l’on trouve plus de 50 % de l’effectif de la Compagnie116.
183La situation était différente à Besançon où 90 % du personnel résidait dans la ville. Ce pourcentage tombe à 70 % à Marquise et Rinxent où le problème du logement se présente différemment117.
184Le document : Les travaux de nos principales usines font vivre près de vingt mille personnes annonce que les usines de Montrouge, Marquise et Besançon employaient 7 269 CdCistes mais, qu’avec leurs conjoints et leurs enfants, c’est une population de 19 450 que les usines faisaient vivre118.
185Montrouge employait 5 475 personnes : célibataires 26 %, mariés 67,5 %, veuf ou divorcés 6,5 %. 37 % d’entre eux avaient des enfants, en tout 5 375.
186Marquise comptait 981 personnes : célibataires 22 %, mariés 75 %, veufs ou divorcés 3 %. 58 % d’entre eux avaient des enfants (1 379).
187Besançon employait 813 personnes : célibataires 32 %, mariés 62 %, veufs ou divorcés 6 %. 38 % avaient des enfants (496).
Tableau XXXVII – Répartition du personnel de l’usine de Montrouge dans la région parisienne
188Le document, au fil des ans, fait ressortir un pourcentage de maind’œuvre féminine minoritaire dans les trois usines119.
Tableau XXXVIII – Les travaux des principales usines
Tableau XXXIX – Au fil des ans
189À Montrouge 26 %, âge moyen 41 ans, occupée principalement dans le secteur Électricité à des travaux de montage, étalonnage, bobinage, contrôle de tolérances, mécanographie, dactylographie, central téléphonique.
190À Besançon 42 %, âge moyen 35 ans, occupée aux opérations d’usinage minutieuses et de contrôle.
191À Marquise seulement 5 %, les travaux de fonderie étant trop durs pour les faire exécuter par des femmes.
192En une petite quinzaine d’années (1947-1961) de fonctionnement managérial avec une équipe renforcée d’ingénieurs, la CdC avait conforté son statut de grande entreprise. Ses activités traditionnelles et ses différents sites restructurés, les nouvelles technologies introduites dans tous ses secteurs, elle espérait pouvoir développer son service télévision mais les dissensions sur la technologie et les atermoiements gouvernementaux eurent raison de l’obstination des ingénieurs de l’entreprise, à l’origine de son introduction en France. La même déconvenue, pour des raisons quasi identiques, est intervenue dans le calcul électronique malgré des investissements matériels et financiers importants. La CdC pouvait néanmoins s’honorer du succès de nombreuses réalisations dans tous les secteurs industriels français et étranger.
Notes de bas de page
1 Archives CdC à Montrouge.
2 Thèse en Sciences Physiques soutenue en mai 1949 devant un jury présidé par le Professeur Yves Rocard.
3 Entretien avec Bernard Heeley à son domicile parisien, le 2 septembre 2008 et Bulletin CdC, no 55.
4 Bulletin, CdC, no 15.
5 Archives CdC, annuaire des ingénieurs 1964.
6 Ibid. Conseil d’administration 30 juin 1954 et bulletin CdC no 56.
7 Caron F., op. cit., p 40.
8 L’image figée du centre d’apprentissage est brocardée en langage potache par d’anciens apprentis se remémorant leur accès à cette voie professionnelle choisie par leur famille.
9 Entretien 21 mars 2002 avec Marc Benain (DPAS).
10 Bulletin CdC, no 6.
11 Archives universitaires de Paris 1, Centre Malher Paris 4e. Fonds Le Bras. Dictionnaire du mouvement ouvrier français Les Éditions Ouvrières, tome 31. Ferblantier, René Le Bras entra à la CdC en 1920 à 12 ans où il poursuivit sa carrière durant 43 ans. Syndiqué à 13 ans, il milita à l’Union des mécaniciens de la Seine (CGT). Au sein de la CdC il était membre de la Prévoyance de la CdC, créée par Gabriel Chamon en 1926. Aux côtés, par la suite, d’Ernest Chamon, il en devint administrateur en mars 1956, puis président en mars 1958.
12 Ibid. Conseil d’administration 13 décembre 1949.
13 Ibid., et notice de Jean Colonna de Giovellina (ECP) consacrée à la Régulation Automatique.
14 Ibid. Conseil d’administration 27 juin 1950 et Bulletin des Cadres et de la Maîtrise, no 4.
15 Archives Schlumberger 42 rue Saint-Dominique à Paris.
16 Bulletin CdC, no 22 et no 28.
17 Id. Plaquette l’Usine de Reims 1957.
18 Ibid. Assemblée générale ordinaire 9 juin 1959 et bulletin CdC no 28.
19 Ibid. Conseil d’administration 26 juin 1956.
20 Bulletins d’information des cadres et de la maîtrise, no 3 et no 4.
21 Bulletin CdC, 1961.
22 Id.
23 Ibid. Conseils d’administration 5 juillet 1960 et 10 novembre 1961 et assemblée générale ordinaire 28 mai 1968.
24 Bulletin d’information des cadres et de la maîtrise, no 4.
25 Bulletin CdC, no 10.
26 Id., no 11.
27 Id., no 10.
28 Ibid. Conseil d’administration 14 février 1950.
29 Bulletin CdC, no 24.
30 Bulletin d’informations des cadres et de la maîtrise, no 1.
31 Ibid. Conseil d’administration 10 novembre 1953 et assemblée générale 30 juin 1954.
32 Cf. p. 240 (DPAS).
33 La Société d’encouragement à l’industrie nationale (SEIN) fut fondée sous le patronage de Napoléon 1er en 1801 à l’initiative de Chaptal, Thénard et Cavaillé-Coll. Son siège parisien, toujours actif, comporte des archives concernant la CdC incluant des récompenses attribuées l’entreprise et à des membres de son personnel. René Barthélemy y prononça une conférence 17 octobre 1951 : « l’évolution de la télévision en France ; la position particulière ; les espoirs permis ».
34 Bulletin d’information des cadres, no 10.
35 Bulletin CdC, no 20.
36 Ibid. Conseil d’administration 10 mars 1948.
37 Ibid. Conseil d’administration 11 octobre 1949.
38 Centre des archives du monde du travail (CAMT) à Roubaix, cote 65 AQM 140.
39 Ibid. Conseil d’administration 11 décembre 1951.
40 Id. Assemblée générale ordinaire 26 juin 1956 et conseil d’administration 9 avril 1957.
41 Ibid. Conseils d’administration 9 octobre, 11 décembre 1956, 8 janvier et 12 février 1957, assemblée générale ordinaire 13 juin 1957 (Archives du ministère des finances de Savigny-le-Temple et Archives du Crédit Lyonnais, cote DEEF 59 815).
42 Archives Crédit Lyonnais, cote DEEF 59 815.
43 Ibid. Conseils d’administration 8 février et 11 octobre 1949.
44 Gueit L., op. cit., p. 172.
45 Ibid. Conseils d’administration 7 mai 1957 et assemblée générale ordinaire 10 juin 1958.
46 Ibid. Conseils d’administration 26 juin 1956.
47 Id. 14 février 1950.
48 Id. Assemblée générale ordinaire 13 juin 1957.
49 Id. 14 mars 1950.
50 Journal officiel de la République française (JO) du 6 juillet 1949, page 6640.
51 Ibid. Assemblée générale extraordinaire plénière 25 octobre 1949.
52 Id. Assemblée générale ordinaire 27 juin 1950.
53 Id. Conseil d’administration 10 novembre 1952.
54 Id. assemblée générale ordinaire du 23 juin 1953 et archives du Crédit Lyonnais, note Études du 11 décembre 1956, cote DEEF 59 815.
55 Bulletin d’informations des cadres et de la maîtrise, no 11.
56 Ibid. Assemblée générale ordinaire 21 juin 1960, Archives Paribas, cote T4N36C4, 1960.
57 Ibid. Conseils d’administration 12 février et 16 avril 1947.
58 Id. assemblée générale ordinaire 28 juin 1949.
59 Id. conseils d’administration 8 avril 1949, 14 février 1950 et 26 juin 1951.
60 Ibid. Conseil d’administration 12 février 1947.
61 Gueit L., op. cit., p. 130.
62 Ibid. Conseils d’administration 10 avril et 8 mai 1951.
63 Id. 8 octobre, 12 novembre 1947, 11 octobre 1949, 10 avril 1951, 21 octobre et 10 novembre 1953.
64 Ibid. Assemblée générale ordinaire 30 juin 1954.
65 Ibid. Conseils d’administration 14 avril 1961 et assemblée générale ordinaire 13 juin 1961.
66 Kemp H., « Les microprocesseurs », in La Recherche, 74 avenue du Maine à Paris 14e.
67 Id.
68 Bulletin CdC, no 4.
69 Annuaire des Ingénieurs CdC 1964 : André Baude, Paul Bizouard, François Cahen, Pierre Thomas.
70 Bulletin d’informations des cadres et de la maîtrise, no 2, 3.
71 Archives personnelles : Encart paru dans la revue « MESURES » de novembre 1966 rédigé par le directeur de la CEREG.
72 Id.
73 Bulletin d’information des cadres, no 2, 3 et 13, bulletin CdC no 27 et assemblées générales ordinaires 10 juin 1958, 9 juin 1959, 21 juin 1960.
74 Bulletin d’informations des cadres et de la maîtrise, no 12.
75 Ibid. Conseils d’administration 21 octobre 1953 et 28 juin 1955.
76 Ibid. Conseils d’administration 28 janvier 1955 et bulletin d’informations des cadres et de la maîtrise, no 6.
77 Id. 8 décembre 1948, 11 janvier, 8 février et 8 mars 1949.
78 Id. 14 avril 1958.
79 Id. 11 mars 1958 et assemblée générale ordinaire 10 juin 1958.
80 Mounier-Kuhn P., L’informatique en France de la deuxième guerre mondiale au Plan Calcul : science, industrie, politiques publiques, thèse CNAM 1999, volume 2. Mounier-Kuhn P., « Du radar naval à l’informatique : François-Henry Raymond (1914-2000) », dans Marie-Sophie Corcy, Christiane Douyère-Demeulenaere & Liliane Hilaire-Pérez (dir.), Archives de l’invention : écrits, objets de l’activité inventive, 2006, Presses Universitaires de Toulouse-Le Mirail, p. 269-290.
81 Bulletin d’informations des cadres et de la maîtrise CdC, no 12 (article de Lucien Boulay, marin-ingénieur, recruté par Pierre Heeley).
82 Mounier-Kuhn P., « Les périphériques, un objet central : PME, grands groupes et politiques gouvernementales (1962-1982) », 7e Colloque international Histoire de l’informatique et des télécommunications, J. André et P. Mounier-Kuhn (dir.), ESAT, Cesson-Rennes. 2004.
83 Archives personnelles : Annuaires des ingénieurs CdC 1964 et 1968.
84 Mounier-Kuhn P., op. cit.
85 Mounier-Kuhn P., op. cit.
86 Ibid. Assemblée générale ordinaire 19 juin 1962.
87 Id. Conseils d’administration 10 janvier, 14 avril, 9 mai, 13 juin, 11 juillet, 10 octobre 1961, assemblées générales ordinaires 13 juin 1961,19 juin 1962, assemblée SETI 27 juillet 1961.
88 Id. Assemblée générale ordinaire 19 juin 1962.
89 Id. Assemblées générales ordinaires 13 juin 1961, 19 juin 1962 (Le contrat de licence signé en 1961 avait permis d’obtenir du ministère de la Défense nationale un marché pour la fourniture de dispositifs radioélectriques de trajectographie à la base d’engins balistiques du Sahara).
90 Entretien téléphonique avec Denis Dayonnet le 15 juillet 2003.
91 Bulletin CdC, no 41. Plus d’une centaine d’ingénieurs furent recrutés lors de l’installation du CDA à Massy. Entretien à Paris avec Jacques Formery, ancien président-directeur général, le 6 juin 2003 et annuaire des ingénieurs de 1968.
92 Entretien le 13 juin 2003 avec Laurent Gourlet, au siège de son entreprise à Paris 14e, ingénieur qui travailla sur Pallas.
93 Id.
94 Bulletin CdC, no 48.
95 Ibid. Conseil d’administration du 28 juin 1966.
96 Id. 28 juin 1966 et « Le plan Calcul, Bull et l’industrie des composants : les contradictions d’une stratégie », Revue historique, 1995, vol. CCXC, no 1, p. 123-153.
97 Ibid. Assemblée générale extraordinaire 22 décembre 1959.
98 Caron F., op. cit. p. 21.
99 Id., p. 22.
100 Bulletins CdC, no 49, no 51, no 52, no 54 et no 56.
101 Bulletin CdC, no 36.
102 Information de Jacques Formery, ancien PDG de CdC, lors de l’entretien du 6 juin 2003.
103 Bulletins CdC, no 33, no 41, no 46, no 53 et no 58.
104 Id., no 39 et no 56 : (RANA acronyme de Radio et de Navigation).
105 Bulletin CdC, no 65.
106 Bulletin CdC, no 17.
107 Ibid. Conseil d’administration du 13 décembre 1955 et bulletin CdC no 16.
108 Bulletin CdC, no 24.
109 Id. no 38.
110 Témoignage de deux anciens apprentis du centre d’apprentissage de la CdC.
111 Ibid. Conseil d’administration 21 octobre 1953.
112 Id. Assemblées générales ordinaires 23 juin 1953 et 30 juin 1954 et opuscule intitulé « Des castors à Antony » réalisé par Robert Cadet, l’un des Castors de la CdC (conditions consenties par l’entreprise) : À partir de la 5e année et pendant 20 ans, 10 500 F (anciens) par mois pour un F3, 12 500 F pour un F4, 14 500 F pour un F5 pour assurer le remboursement des prêts. En cas de non-paiement le Crédit foncier devenait propriétaire.
113 Id. Assemblée générale ordinaire 9 juin 1959.
114 Ibid. Conseils d’administration 10 mars et 23 juin 1953, et assemblées générales 23 juin 1953, 28 juin 1955, 10 juin 1958, 9 juin 1959 et Bulletin CdC, no 33. (Entre 1950 et 1958, l’entreprise consacra 278 millions au logement du personnel).
115 Bulletin CdC, no 18.
116 Id.
117 Id. no 17.
118 Id. no 18.
119 Ibid. Bulletin CdC, no 13.
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