Chapitre V. Des réfugiés « laissés-pour-compte » de l’intégration ?
p. 135-179
Texte intégral
1La composition sociale des populations expulsées arrivant en Saxe se distingue fortement d’une immigration économique. Face au nombre élevé de femmes et d’enfants, mais aussi de personnes âgées, la stratégie d’intégration doit être repensée. En effet, lorsque l’intégration par le travail, défendue par le régime est-allemand, ne peut concerner qu’une minorité des arrivants, il devient difficile de faire face à la misère sociale grandissante dans une Allemagne marquée par les pénuries et les destructions.
2En 1945, dans une lettre anonyme, un jeune communiste met en garde contre une politique sociale qui, selon lui, mettrait en péril les priorités économiques de la reconstruction, considérant que « la reconstruction et la promotion de ses acteurs clés doivent avoir la priorité absolue sur toute politique sociale bien intentionnée pour les faibles1 ». La stigmatisation des « faibles » et la critique d’une politique « bien intentionnée », qui compromettrait la réalisation du grand projet de reconstruction socialiste, est un discours minoritaire dans la sphère publique. En effet, la nécessité d’une véritable politique d’aide aux plus démunis est admise, mais devant l’ampleur de la tâche et le manque de moyens, le découragement atteint les plus hautes sphères politiques.
3Dans le cadre d’un échange informel avec l’auteur Victor Klemperer, un ancien professeur de l’université de Dresde devenu député au parlement régional saxon confie :
« Le gel s’est chargé de la “sélection naturelle”, les vieux et les faibles sont morts. […] Un ami lui avait dit qu’il ne fallait pas trop anticiper, la nature corrige d’elle-même. La plupart des tristes ruines allaient s’écrouler d’elles-mêmes d’ici quelques années, et le surplus de personnes qui s’entassent actuellement en Allemagne allait se réduire de lui-même – sélection naturelle ! »
4Comment comprendre cette remarque ? Reflète-elle simplement une banalisation de la mort après la Seconde Guerre mondiale, signe d’une « brutalisation2 » de la société est-allemande ? Est-elle le signe d’une survie de la pensée eugéniste du Reich, ou de sa simple transformation au contact d’une pensée « utilitariste », qui catégorise les individus selon leur « utilité économique » ? Ou le député en question fait-il ici simplement preuve de réalisme politique au regard des défis humains et économiques de l’après-guerre ?
5Si le travail devient le pilier politique, économique et idéologique du nouveau régime, quelles en sont les répercussions pour les personnes inaptes au travail au sein d’un nouvel espace politique et administratif qui cherche ses marques entre « Leistungsprinzip » et « Versorgungsprinzip3 » ?
Les personnes âgées, les oubliées de l’intégration ?
6S’il nous reste dans le cadre de cette recherche à juger de la pertinence du qualificatif « oubliés de l’intégration » à propos des réfugiés et expulsés les plus âgés, il est d’ores et déjà possible de parler des « oubliés de la recherche ». L’intervention proposée par Michael Schwartz le 29 novembre 2005 à Greifswald, « Umsiedler und Altersarmut : Zur sozialen Notlage vertriebener alter Menschen in der SBZ und frühen DDR4 », fait office d’exception. Il y dresse le portrait d’une autre « génération sacrifiée », qui n’a certes pas combattu lors de la guerre, hormis la participation au Volkssturm5, mais qui n’a pas non plus profité du double « miracle allemand » de la reconstruction et de l’intégration. Michael Schwartz constate une égalité « dans la misère » des personnes âgées, qu’elles soient réfugiées ou non, de part l’arrêt du versement des retraites en 1945. Mais sa reprise en août 1945 en Saxe ne concerne que la population locale et met en lumière les difficultés particulières des réfugiés6 : « Dès la reprise du versement des retraites, les expulsés âgés réalisaient subitement qu’ils étaient tout sauf des citoyens à part entière. » La nouvelle législation sociale, peu à peu mise en place entre 1945 et 1948 en Saxe va mettre en lumière dans un premier temps la pauvreté des personnes âgées, « improductives », et attirer l’attention sur le fossé séparant les conditions de vie des populations locales de celles des expulsés.
Une politique sociale en demi-teinte
Le droit à la retraite : entre volontarisme égalitaire et pragmatisme
7Les personnes âgées ne sont pas soumises à l’obligation de travailler établie par l’ordre no 3 de la Commission de contrôle interalliée du 17 janvier 1946. Celle-ci fait obligation à tout homme de 14 à 65 ans ainsi qu’à toute femme de 15 à 50 ans de se présenter aux bureaux de l’emploi, et donc d’accepter tout travail qui leur serait proposé. Cela ne signifie pas pour autant que cette génération est exclue de toute possibilité d’améliorer ses conditions de vie mais les personnes âgées jugées inaptes au travail restent cantonnées aux cartes de la catégorie VI, sans viande ni graisse7.
8En 1949, un expulsé tente d’attirer l’attention du président de la RDA sur cette vie en marge de la société : « Ceux qui sont inaptes au travail en raison d’une maladie ou de leur âge reçoivent une pension qui ne suffit ni à vivre ni à mourir8. » Le montant de cette retraite est au centre de nombreuses plaintes déposées par les retraités, expulsés ou non, auprès des administrations locales et régionales. Paradoxalement, le montant de la retraite devait être un symbole de la politique égalitariste du régime, avec l’instauration d’un minimum considéré comme vital (30 Reichsmark) mais aussi d’un montant maximal (90 Reichsmark) afin d’éviter les écarts excessifs de richesse9. Cette législation, en vigueur entre 1945 et 1947, doit permettre la continuité des versements malgré la nécessaire reconstruction des administrations chargées des questions sociales.
9En février 1947, une nouvelle législation sociale entre en vigueur sous la pression de l’ordre no 28 de la SMAD du 28 janvier 1947 « Einführung eines einheitlichen Systems von Maßnahmen zur Verbesserung der Sozialversicherung in der SBZ10 ». Si un minimum de 30 Reichsmark est maintenu, les retraités peuvent l’augmenter à hauteur d’un Reichsmark par année entière de cotisation. Cette réforme, qui entre en vigueur le 1er février, souligne les lacunes de la précédente, qui ne permettait pas aux personnes âgées l’accès aux produits les plus utiles mais aussi les plus rares, comme les poêles, les lits ou encore les chaussures.
10En 1948, la SMAD décide d’augmenter les plus basses retraites de 30 à 50 Reichsmark et à 40 pour les aides sociales versées aux veuves et orphelins de guerre11. Cette décision peut être interprétée comme la conséquence du mécontentement général contre ce que les retraités appellent communément « Hungerrente12 », mais aussi comme un signe de la fin de la restructuration administrative, achevée en 1947-1948, et qui permet une meilleure gestion des dépenses sociales13. Pour mieux comprendre la valeur réelle d’une telle retraite, un exemple détaillé nous est présenté par le réfugié Robert Köbe, dans une lettre adressée à la DWK14. Il y dresse la liste des dépenses mensuelles d’une famille de trois personnes, lui-même, sa femme, et son fils né en 1940 à Breslau15. Ainsi, le foyer dépense 13 à 14 Mark16 par mois en gaz et électricité, 25 à 30 Mark en automne pour le charbon et le bois. Les dépenses liées à l’acquisition de mobilier sont elles aussi élevées, selon l’auteur un poêle coûte en moyenne entre 60 et 70 Mark, le même prix qu’un matelas. Par conséquent, les retraités sont dans l’impossibilité d’acquérir le mobilier dont ils ont besoin.
11De plus, l’instauration d’une retraite minimum n’est pas liée à un droit universel au versement d’une pension. Cette dernière est conditionnée par une cotisation minimale de 15 années et ne concerne pas les professions indépendantes ou les anciens propriétaires terriens, qui n’y étaient pas soumis17. Les caractéristiques professionnelles de la population réfugiée mènent à une impasse. Le directeur des services sociaux de Leipzig décrit la situation difficile que doivent gérer ses services :
« Il faut cependant prendre en considération qu’il s’agit chez les nouveaux citoyens majoritairement de paysans travaillant à leur compte avec leurs proches qui les aident, d’artisans à leur compte etc. et qu’une retraite ne peut pas être accordée vu qu’ils n’étaient pas assurés. Les assurés quant à eux sont souvent des ouvriers agricoles. Ces derniers, de part le salaire très bas qu’ils percevaient, ne touchent pas plus que la retraite minimum. C’est pour ces raisons que le nombre de personnes qui nécessitent des aides sociales en plus de leur retraite est si élevé18. »
12Les services sociaux doivent intervenir pour éviter une paupérisation des retraités. Ce n’est pas spécifique aux réfugiés, mais le problème est démultiplié par l’augmentation des personnes âgées sur le territoire de la SBZ. La dérégulation et la multiplication de cas particuliers amènent les autorités à adapter sans cesse la législation en vigueur. Ainsi, il y a des dérogations au système des 15 années de cotisation dans le cas où les premiers versements à la caisse de retraites ont été effectués après l’âge de 50 ans, les personnes bénéficient d’une retraite à l’âge de 65 ans si elles ont travaillé pendant 5 ans19. Cependant, pour les réfugiés qui avaient déjà dépassé l’âge de la retraite lors de leur arrivée, la situation semble sans issue. Le réfugié Wilhelm Wiesenberg, né en 1877 à Memel20 témoigne :
« En raison de mon âge et de mon incapacité physique, je perçois une aide de 30 RM par mois de la part des services sociaux locaux […]. Je ne peux pas déposer de demande de pension concernant une pension de retraite car j’étais auparavant maître artisan indépendant dans ma région d’origine et donc je n’appartenais à aucune caisse d’assurance-maladie et à mon époque il n’existait pas encore d’affiliation obligatoire21. »
13Selon Notker Schrammek, si la situation particulière des réfugiés n’est pas directement prise en compte dans la législation, au niveau local les administrations locales se sont efforcées de trouver des solutions « pragmatiques22 » : « Il arrivait donc que les enfants remboursent les années de cotisation à la place de leurs parents lorsque ceux-ci n’avaient pas assez travaillé pour avoir droit à une retraite. Bien entendu ce n’était possible que si les enfants avaient un revenu suffisant. » Il cite un cas particulier dans un domaine garantissant de hauts revenus : « Ainsi en 1952 un travailleur de la Wismut a pu payer les cotisations pour une année entière à la place de sa mère, afin qu’elle puisse somme toute avoir le droit à sa propre retraite. »
14À bien des niveaux, et malgré les efforts déployés par la SMAD pour trouver des solutions à la question des retraites, les personnes âgées expulsées restent défavorisées. Au-delà du problème de la non-affiliation, les années passées entre le retour des populations de Silésie ou de Prusse orientale chez elles à la fin de la guerre et leur expulsion définitive des années 1947-1948 n’étaient pas soumises à une cotisation. C’est le cas également pour le temps passé dans les camps de quarantaine et la période de chômage des premières semaines et mois consécutifs à l’arrivée en SBZ23. Il faut attendre le 10 octobre 1950 pour que les réfugiés affiliés à une caisse de retraite dans leur région d’origine puissent faire valoir leurs droits, même sans avoir tous les documents nécessaires, souvent laissés sur place. Le principe est pragmatique : deux témoins, non apparentés au demandeur, doivent sous serment attester de ses droits à une retraite24. Deux années plus tard, cette solution est abandonnée à la fois en raison de sa contradiction avec la politique d’assimilation prônée par le régime, car la recherche de témoin implique le maintien d’un contact entre les membres d’une même région d’origine25, mais aussi l’amélioration des relations diplomatiques entre la RDA et ses voisins : « Après la possibilité donnée aux anciens Umsiedler de Tchécoslovaquie de récupérer leurs justificatifs de cotisation de leurs lieux de travail ou de domiciliation en Tchécoslovaquie, un accord similaire entre les administrations allemandes et polonaises a étendu ce droit aux anciens Umsiedler de Pologne26. »
15Ce décret met encore en évidence la prédominance du politique dans la stratégie d’assimilation, mais aussi la peur d’un regroupement des réfugiés, voire d’une coalition, dans cette recherche de témoins qui sont d’anciennes connaissances. Cependant, l’impact psychologique de cette mesure n’est pas à négliger. Comme le rappelle Michael Schwartz, même si l’octroi de retraites pour les expulsés ne signifie qu’une minime amélioration, et même si ces dernières restent souvent en dessous des valeurs de référence des aides sociales, les retraites représentent une amélioration importante du point de vue psychologique, les personnes concernées ne se voient plus comme un fardeau pour l’assistance sociale (comme cela était souvent exprimé de façon péjorative), mais reçoivent les allocations qui leur sont dues. Il s’agit tout simplement de la reconnaissance d’une vie de travail27.
16Cependant, le nombre de personnes concernées par cette mesure est problématique. Au vu de l’expulsion, de la difficile vie dans les camps et de leur soumission pendant des années au bon vouloir des communes et des aides sociales, combien reste-t-il de réfugiés concernés au début des années 1950 ?
L’impasse : personnes âgées et aides sociales
• Aides sociales et survie quotidienne
17Il est important de noter la présence des solutions locales « pragmatiques » précédemment citées dans le soutien au jour le jour des réfugiés inaptes au travail, dont les personnes âgées représentent le plus grand contingent. Les aides sociales sont accordées et financées par les communes, dont les caisses ont largement été vidées28. En Saxe, une partie des versements reprend à l’été 1945. Dès lors, chaque commune est libre de fixer le montant de ces aides, mais le contrôle étroit de l’occupant nécessite une très grande prudence vis-à-vis des dépenses publiques afin de garantir le paiement des réparations29. Ainsi, en 1947, la ville de Leipzig utilise les valeurs de référence mensuelles suivantes30 :
- Pour un(e) célibataire : 31,5 RM
- Pour un(e) chef de famille : 30 RM
- Pour un membre adulte de la famille : 21,5 RM
- Pour un enfant de moins de 15 ans : 17,5 RM
18Ces valeurs de références doivent permettre la survie matérielle des populations les plus défavorisées, qu’elles soient réfugiées ou non. La ville de Leipzig justifie ainsi ces montants : « Elles (les sommes versées) doivent assurer la subsistance et concernent l’achat de nourriture, le bois/charbon pour faire la cuisine, l’éclairage et autres besoins vitaux. Le renouvellement des habits ou chaussures, les coûts liés à la réparation de chaussures ou l’achat de combustible pour l’hiver ne sont pas inclus dans ce montant31. » Les aides sociales sont calculées à minima, et ne tiennent pas compte du dénuement matériel particulier des réfugiés. Cependant, elles peuvent être accompagnées d’une aide ponctuelle, « Überbrückungsgeld », comme à Leipzig où la somme peut varier de 2 à 20 RM. Dès 1948, la ville, en grandes difficultés financières, doit annuler cette mesure dans le cadre de son « Nothaushalt32 ».
19L’administration régionale saxonne en charge des réfugiés est consciente des limites de cette politique égalitariste : « L’Umsiedler reçoit les mêmes aides que celle mises à disposition de la population locale. Cependant, comme son dénuement n’est pas comparable à celui des plus pauvres parmi la population locale, ces mesures d’aides ne sont pas aussi efficaces pour lui et restent insuffisantes33. » Cependant, loin d’accepter sa responsabilité dans cette politique sociale inadaptée, elle explique dans une lettre à la SMAS que la dépendance à long terme des expulsés vis-à-vis des aides sociales tient aux spécificités de cette même population :
« Lors de nos contrôles, nous devons souvent constater que beaucoup de personnes “vives” qui menaient une vie réglée dans leur patrie et une existence confortable, n’ont plus la force de se reconstruire une existence avec les possibilités qui leur sont données en raison des conditions de vie plus difficiles. Ce groupe de personnes va encore longtemps constituer un problème malgré tous nos efforts, alors que des personnes plus douées et plus débrouillardes ont pu reconstruire une existence supportable et suffisante avec les mêmes opportunités et dans les mêmes conditions34. »
20Et de conclure : « Toute baraque laissée à l’abandon et négligée ne peut être interprétée comme un signe de l’échec de l’État et des communes35. »
21Les communes, responsables du versement des aides sociales, sont dans les années 1947-1948 dans une situation intenable. Leur budget est étroitement contrôlé par la SMAS et constamment réévalué en fonction des demandes de réparation, ce qui met à mal tout effort de planification à moyen terme des dépenses. Elles subissent les conséquences d’une législation balbutiante en ce qui concerne les retraites : chargées de venir en aide aux plus démunis, elles sont critiquées pour la surreprésentation des réfugiés parmi les bénéficiaires. Cette fébrilité des communes est liée à la situation particulière de la Saxe. Région de transit, la Saxe a dû faire face aux refus des régions voisines d’accueillir les expulsés âgés ou invalides. De plus, le chômage structurel élevé des années 1946-1947, qui touche surtout les travailleurs non qualifiés ou ceux dont les qualifications ne sont pas adaptées au tissu industriel, fait de la Saxe une région particulièrement critiquée par l’occupant. Entre 1946 et 1947, le taux des réfugiés parmi les bénéficiaires d’aides sociales est compris entre 31 et 39 %, et atteint même 45 % fin 194836. La Saxe accueille alors près d’un million d’expulsés.
22Loin de voir dans cette paupérisation une faillite de la politique d’intégration, les communes saxonnes pointent le nombre de personnes qui n’ont « plus la force » (« nicht mehr die Kraft aufbringen ») d’accéder à une indépendance matérielle, en premier lieu les personnes âgées. Les expulsés qui ne peuvent faire valoir aucun droit à la retraite restent donc dépendants du versement d’aides sociales sur le long terme, au même titre que ceux dont la retraite, trop faible, doit être accompagnée de versements sociaux : en premier lieu les anciens travailleurs agricoles. Ainsi, en novembre 1947, 76 000 retraités saxons perçoivent des aides sociales pour compenser leurs retraites trop faibles37.
23Le problème concerne aussi les personnes entre 50 et 60 ans, et parmi elles les femmes. Les services sociaux, ou les caisses de retraites le cas échéant, prennent en charge les femmes à partir de 60 ans et le LAA saxon ne place les chômeuses que jusqu’à l’âge de 50 ans38 ! Elles sont alors entièrement dépendantes du bon vouloir des services sociaux et d’une coopération parfois difficile entre les différentes entités administratives. Cette catégorie sociale risque alors à tout moment de basculer hors du cadre des aides sociales, et les personnes concernées ne peuvent survivre si elles n’ont pas de famille pour les prendre en charge. En 1948, 11,5 % des réfugiés en SBZ ont entre 50 et 60 ans39.
24Pour beaucoup de personnes âgées, une amélioration des conditions de vie tient au concept popularisé dès 1945 : le « Lastenausgleich40 », c’est-à-dire une redistribution des richesses en faveur des réfugiés et en fonction des biens perdus lors de l’expulsion, et non à l’obtention d’aides sociales qui couvrent à peine le minimum vital.
• « Das sollte meine Vorsorge für mein Alter sein. Aber es kam alles anders41 »
25Le 17 juin 1945, la SMAD ordonne le blocage de tous les comptes et livrets d’épargne dans sa zone d’occupation42. Cette mesure est peu à peu assouplie pour la population locale, mais l’ordre no 5 de la Commission de contrôle interalliée du 30 octobre 1945 met fin à l’espoir des réfugiés d’accéder rapidement à leurs comptes désormais placés à l’étranger : tous les biens situés en dehors des frontières des zones d’occupation et appartenant à des personnes de nationalité allemande doivent tomber entre les mains d’une commission créée spécialement par les vainqueurs, ce qui reviendra à une spoliation pure et simple43. L’ordre no 5 précise néanmoins : « La question de l’indemnisation d’une personne dont les droits patrimoniaux ont été cédés à la commission dans le cadre de cette loi pourra être décidée ultérieurement par la commission de contrôle interalliée, chargée de fixer les modalités et la date44. » Dès 1947, l’espoir d’un possible retour s’amenuise pour des réfugiés au vu de l’arrivée constante des convois liés au « transfert organisé » des minorités allemandes. L’espoir d’un retour ne disparaît pas pour autant, mais les revendications se cristallisent de plus en plus sur la question des biens qu’ils ont dû laisser sur place, motivées par le caractère vague de l’ordre no 5. Pour les réfugiés tel Wilhelm Wiesenberg, il existe bel et bien un fossé entre deux populations tant qu’une indemnisation n’est pas décidée :
« 1. Ceux qui ont tout perdu, qui sont devenu pauvres et qui se retrouvent dans une situation économique critique sans en être responsables.
2. Ceux qui n’ont rien perdu, qui vivent aujourd’hui encore comme avant la guerre et qui ne connaissent pas la misère, mais qui au contraire peuvent encore aller au théâtre, au cinéma45… »
26Cette opinion est caricaturale, mais elle reflète un état d’esprit fréquent parmi les réfugiés. La perte de l’épargne couplée à celle de leurs biens mobiliers a de lourdes conséquences sur leur état moral et leur relation avec la population locale. Dans la presse et dans leurs lettres de doléances, ils dénoncent à la fois l’inégalité de leur situation et le jugement porté sur eux en tant que personnes dépendantes des aides sociales : « Nous sommes les seuls à avoir payé notre part de la responsabilité allemande dans la guerre avec tous nos biens, nous ne voulons pas rester seulement des bénéficiaires d’aides sociales, de dons ou d’aumônes46. » Un ancien agriculteur issu de Prusse orientale va plus loin et interpelle directement la population saxonne :
« Nous, issus de l’Est de la ligne Oder-Neisse (et les bombardés) sommes ceux qui ont payé à 100 % cette satanée guerre, et qui ont en plus perdu notre patrie, ce que personne ne peut remplacer. Si nous n’avions pas payé cette guerre avec tous nos biens, la population d’ici aurait dû au moins payer 50 %, parce que nous l’avons tous perdue, que ce soit l’Ouest, l’Est ou l’Allemagne centrale. Et nous l’avons tous plus ou moins voulue. […] C’est pour cela que nous ne comprenons ni ne comprendrons, que nous payions seuls le prix de la guerre et que cela va mener une grande partie d’entre nous à notre perte47. »
27Ce point de vue est partagé par Emanuel Plewa de retour de captivité soviétique, qui demande à l’État de prendre en compte la perte de tous ses biens, surtout des fruits de son travail d’avant-guerre : « J’ai travaillé toute ma vie et maintenant que je suis rentré, […] je ne veux pas vivoter comme un mendiant48. »
28À ce moment, seuls les réfugiés arrivés en Saxe avant la capitulation allemande sont encore en possession de leurs livrets d’épargne, à la différence des autres expulsés qui arrivent souvent sans leurs papiers49. Lorsqu’en 1948 certains comptes à l’étranger sont de nouveau accessibles, la situation des réfugiés ne s’améliore pas pour autant : les sommes, limitées, ne peuvent être retirées qu’après la réforme monétaire, et donc être échangées partiellement au taux de 1 pour 1050. Cette décision est un coup dur porté aux réfugiés les plus âgés, dont le seul espoir d’améliorer leurs conditions de vie est désormais le dédommagement. Les autorités ecclésiastiques de Görlitz mettent en garde les autorités vis-à-vis des conséquences de la paupérisation des expulsés, qui pourrait selon elles mener à leur exclusion à long terme de la société est-allemande :
« La perte de tous ses biens provoque toujours des dangers psychiques/moraux. Les possessions nous donnent de l’appui, de la conscience de soi, de la responsabilité, laissent vivant notre intérêt pour le calme et la sécurité, confèrent du prestige, permettent la culture de la famille et du foyer, l’ordre et la beauté. […] Le réfugié ne possède rien de cela. Arraché d’un cadre de vie organisé, il souffre d’autant plus de sa condition de mendiant, il a d’abord honte, mais sa cruelle misère peut faire vaciller son point de vue. Celui qui a perdu tout signe extérieur de dignité, qui se matérialise par sa position, sa maison, ses habits, peut facilement perdre aussi sa dignité intérieure51. »
29Malgré les rumeurs qui circulent parmi les réfugiés concernant un possible « Lastenausgleich » dans la SBZ, l’idée est rejetée en juillet 1948 par la SMAD et les administrations centrales allemandes52. Le rejet d’un « Lastenausgleich » est politique : compte tenu de l’ordre no 5, la redistribution des biens devrait se faire au niveau du territoire allemand dans son ensemble mais aucune entente ne semble possible entre les occupants. Parmi les bénéficiaires envisagés par les autorités des zones occidentales se trouvent non seulement les expulsés et les victimes des bombardements mais aussi les propriétaires fonciers et les industriels qui ont été expropriés par la SMAD et dont les biens se trouvent en SBZ. En effet, les personnes qui quittent la SBZ puis la RDA sont elles-mêmes considérées en RFA comme des réfugiés, « Flüchtlinge », quelles que soient les raisons de leur départ. Le caractère hautement politique de la question, lié entre autre à la concurrence idéologique entre les zones et leurs occupants, est explicité par les arguments avancés par l’administration centrale allemande de l’Intérieur, futur ministère est-allemand de l’Intérieur53 :
- Dans la zone orientale, une redistribution des richesses (« Volksvermögen ») a déjà partiellement été réalisée à travers la réforme agraire et la confiscation des biens des anciens nazis et criminels de guerre.
- Il n’est désormais plus possible de chiffrer exactement les biens et avoirs perdus.
- Une partie des sinistrés a déjà bénéficié d’une aide de la part des autorités (« demokratischen Verwaltungen ») et ne peut plus prétendre à aucun dédommagement (« z.B. Neubauern »).
- Parmi les personnes qui pourraient réclamer des sommes dans le cadre d’un « Lastenausgleich » se trouvent également des propriétaires terriens (« Großgrundbesitzer ») et d’anciens nazis (« Nazi-Aktivisten oder Nutznießer ») dont le patrimoine aurait été confisqué s’ils étaient issus de la SBZ : « Diesen Personen kann natürlich kein Entschädigungsanspruch zugesprochen werden54. »
30Au-delà des arguments officiels, un « Lastenausgleich » n’est pas mis en place pour des raisons financières. Au vu du coût des réparations payées à L’URSS pour la guerre et des frais d’occupation, une redistribution des richesses serait nécessaire, mettant à contribution la population locale. C’est un risque politique que ni le SED ni les autorités soviétiques ne sont prêts à prendre. Durant la période étudiée, et malgré la paupérisation sur le long terme des réfugiés écartés du marché du travail et donc exclus de toute possibilité d’améliorer de leurs conditions de vie, la politique égalitariste prônée par le pouvoir central n’est ajustée que par deux fois en raison de la situation particulière des expulsés.
31En 1946, la SMAD ordonne le paiement d’une aide exceptionnelle, l’« Umsiedlerbeihilfe ». Entre 1950 et 1953, une loi vient clore les efforts politiques d’intégration : « Gesetz zur weiteren Verbesserung der Lage der ehemaligen Umsiedler », elle doit faciliter l’accès des réfugiés aux crédits, afin de réduire les inégalités entre les populations. La première mesure est officialisée quelques jours avant les élections régionales organisées en octobre 1946 dans la zone soviétique, la seconde intervient quelques mois après la reconnaissance de la frontière Oder-Neisse par la RDA, proclamée « Friedensgrenze » par Wilhelm Pieck.
• « Umsiedlerbeihilfe » : entorse au principe d’assimilation ?
32Le 15 octobre 1946, l’ordre no 304 de la SMAD accorde une aide unique de 300 RM par personne aux réfugiés qui sont inaptes au travail et qui n’ont pas d’autres revenus, ainsi que le versement de 100 RM supplémentaires si ce même foyer comprend un enfant de moins de 14 ans55. Le président de l’Administration centrale allemande des finances chargée de faire appliquer la mesure, Henry Meyer, en précise les bénéficiaires dans la circulaire no 11756 :
« 1. Les hommes et les femmes qui sont inaptes au travail à plus de 66 % d’après les principes de l’assistance sociale.
2. Les hommes de plus de 65 ans révolus au 1er octobre 1946.
3. Les femmes de plus de 60 ans révolus au 1er octobre 1946.
4. Les femmes ayant au moins un enfant de moins de 6 ans révolus au 1er octobre 1946, si aucun autre membre de la famille n’est apte au travail et de plus de 18 ans au jour de la demande.
Les sommes versées sont à considérer comme des versements de l’assistance sociale non remboursables.
Leur paiement ne doit pas mener à des réductions ou déductions des allocations versées par les administrations sociales. »
33Cette aide est la toute première mesure spécifique de soutien financier aux expulsés établie dans l’Allemagne de l’après-guerre, toutes zones d’occupation confondues57. Au cours de l’année 1947, l’exécution de l’ordre no 304 fait l’objet de débats, en raison de la liberté d’action accordée aux services sociaux. De même, la circulaire no 117 est régulièrement modifiée pour s’adapter aux spécificités de la population réfugiée. Ainsi, en février 1947, l’accès à cette aide unique est élargi aux mères de familles nombreuses, quel que soit l’âge des enfants, aux retraités dont l’allocation ne dépasse que de peu les barèmes de l’aide sociale et aux personnes inaptes au travail à 40-50 % au vu de leur manque de perspectives sur le marché du travail58. L’administration allemande des finances ainsi que la ZVU recommandent en mars 1947 aux services sociaux une interprétation large des termes de la circulaire : « D’une façon générale, tous doivent être traités de manière indulgente/bienveillante dans le cadre de la situation critique des Umsiedler59. »
34Cette aide est également la seule qui s’adresse explicitement aux personnes âgées et aux mères célibataires mais sa mise en pratique dépend des volontés locales et des moyens dont disposent les administrations sociales au niveau local. En Saxe, la Volkssolidarität déplore « que seule la Saxe utilise des règles aussi strictes, alors que d’autres régions ou provinces, par exemple la Thuringe, sont beaucoup plus généreuses dans leurs versements60 ». Paradoxalement, selon les recherches effectuées par Irina Schwab, la ville de Leipzig semble au contraire avoir été très prodigue61 : lorsque 137 demandes d’« Umsiedlerbeihilfe » sont étudiées en avril 1948, 113 semblent avoir été accordées alors que les bénéficiaires ne remplissent pas les critères d’attribution. Selon elle, cette largesse pourrait être due non pas à une décision politique de la ville mais aux décisions prises au cas par cas par les employés des services sociaux et pour lesquels, « face à cette grande misère, il n’était certainement pas toujours aisé pour les personnes en charge des dossiers de maintenir les critères sévères d’attribution62 ». Les disparités régionales sont fortes, mais les plus grandes inégalités sont liées à l’évolution des critères d’application entre 1946 et la fin de l’année 1947. La ZVU rappelle qu’en septembre 1947, des milliers de réfugiés avaient déposé une demande d’attribution, dès la publication de l’ordre no 304, mais n’avaient pas pu percevoir l’aide63. Ces derniers sont peu au fait de l’évolution des critères d’attribution. De même, la générosité affichée par certaines régions est liée à une interprétation de l’« Umsiedlerbeihilfe », qui peut être vue comme une compensation pour le blocage des comptes des réfugiés64. En automne 1947, la situation est devenue chaotique. L’administration centrale des Finances menace personnellement les personnes en charge des dossiers : « Les dossiers doivent être vérifiés selon des critères sévères […]. En cas de négligence avérée, les responsables seront chargés d’assumer leurs responsabilités65. »
35Ces inégalités dénoncées par les réfugiés sont bien souvent, comme nous l’indique l’exemple de Leipzig, liées à des attentes de compensation pour leurs pertes. Cependant, il s’agit de la seule mesure d’aide spécifique aux expulsés les plus démunis, dont les personnes âgées confrontées à la perte de toutes leurs années de travail. Ainsi l’ordre no 304 n’est pas interprété de la même manière par ses instigateurs et par ses bénéficiaires. Dans l’esprit de ces derniers, la somme, quoique peu élevée, doit permettre l’acquisition de meubles, impossible au vu du montant des retraites ou des aides sociales. Aux yeux de l’occupant, l’« Umsiedlerbeihilfe » devait rester une aide ponctuelle, limitée aux personnes âgées et aux enfants. Lorsqu’en octobre 1948 l’administration centrale allemande des finances revoit largement à la hausse les dépenses liées à cette politique, la mesure a déjà coûté 400 millions au lieu des 250 millions de RM prévus66, la fin de l’« Umsiedlerbeihilfe » est décidée pour la fin de l’année67.
36Plusieurs évolutions parallèles marquent cette année 1948, avec de grandes incidences sur les réfugiés. Après la fermeture progressive des instances administratives dédiées aux réfugiés, le SED évoque aussi la fin des efforts politiques d’intégration en tant qu’« Abwicklung », que l’on peut traduire littéralement par « liquidation » ou « dénouement ». L’« Umsiedlerbeihilfe » prend officiellement fin en décembre, mais l’aide n’est plus versée depuis fin juin ou tout du moins les demandes ne sont plus validées, avec le même résultat. Elle est remplacée le 28 décembre 1948 par la circulaire no 314 de la Deutsche Wirtschaftskommission68 qui instaure une aide de 50 Mark par réfugié arrivé sur le territoire de la SBZ depuis le 28 juin 194869. Les critères d’âge disparaissent et le montant est revu à la baisse. Ces changements tiennent à la fois aux lourdeurs administratives de la vérification préalable de toutes les demandes d’« Umsiedlerbeihilfe », mais aussi à la rupture induite par la réforme monétaire. Cette dernière touche doublement les réfugiés : poussés par les autorités à utiliser les 300 RM uniquement lorsque la production permettra l’acquisition de biens durables, cette somme perd soudainement de sa valeur avec la réforme. En 1947, le conseil municipal de Weimar en Thuringe en appelait à la retenue et aux économies :
« Ostumsiedler ! L’aide unique […] doit vous permettre l’acquisition de biens importants. Son but est manqué si vous utilisez l’argent pour acheter des aliments déjà rares à des prix exorbitants. Si vous n’avez pas actuellement la possibilité d’investir utilement l’argent, déposez-le à la caisse d’épargne pour plus de sécurité […] Ne le gaspillez pas maintenant70 ! »
37Alors que les administrations sociales encourageaient les réfugiés à déposer leur argent pour attendre « jusqu’à ce que les ustensiles/biens quotidiens indispensables soient accessibles et moins chers71 », la réforme monétaire réduit considérablement leurs avoirs. Ils ne sont pas exclus des « Kopfbeträge », c’est-à-dire de la limite de 70 RM par personne pour une conversion 1 pour 1 des monnaies mais le reste de leurs avoirs disparaît presque, il est échangé à 10 pour 1.
38La réforme provoque des conflits locaux entre les administrations et les réfugiés, mais aussi une défiance grandissante envers les responsables politiques. La situation se tend surtout avec les expulsés qui arrivent à ce moment-là sur le territoire de la SBZ. Ceux-ci peuvent en effet emmener des objets de valeur ou de l’argent avec eux, 500 RM pour les expulsés issus de Pologne par exemple72, mais cet argent n’a plus la même valeur sur le territoire de la zone d’occupation après le 29 juin 1948. Tout échange devient impossible. La directive no 314 doit pallier certaines difficultés induites par la réforme monétaire. Cependant, elle n’entre en vigueur que fin décembre 1948, et ne concerne pas les réfugiés ayant déjà bénéficié de l’« Umsiedlerbeihilfe ».
39Les départs de réfugiés vers les zones occidentales sont de plus en plus nombreux à compter de cette même année 1948. L’effet de la loi d’aide d’urgence entrée en vigueur le 8 août 1949 en RFA en est une des causes. L’exode est dans un premier temps ignoré par les autorités, qui tentent cependant dès 1950 de justifier et d’enrayer les départs : « Une émigration des Umsiedler vers l’Ouest s’est fait sentir. Cela est moins à mettre en lien avec une meilleure situation matérielle des Umsiedler à l’Ouest, mais a son origine dans le rapprochement des familles73. » En Saxe, le nombre de réfugiés passe de 1 006 094 en octobre 1948 à 952 601 en décembre 194974. Au-delà du nombre de départs, difficile à chiffrer exactement, la comparaison du nombre de personnes inaptes parmi les réfugiés à l’Est et l’Ouest et son évolution permettent de conclure que ce sont des hommes jeunes qui ont choisi de quitter la SBZ et la RDA : alors que le nombre d’actifs baisse à l’Est, il augmente sensiblement entre 1948 et 1949 à l’Ouest75.
40Les personnes âgées, lorsqu’elles n’ont pas de familles à l’Ouest, choisissent de rester, certainement en raison du niveau semblable des retraites et des aides sociales des deux côtés de la frontière interallemande76. L’entrée en vigueur le 1er septembre 1952 du « Lastenausgleichsgesetz » en RFA provoque une nouvelle vague de départ, à laquelle participent cette fois les personnes âgées, déçues par la loi de 1950, « Gesetz zur weiteren Verbesserung der Lage der ehemaligen Umsiedler77 ». Si le regroupement familial joue un rôle fondamental dans la décision d’émigrer à l’Ouest dans les premières années d’après-guerre, la surreprésentation de la population réfugiée au sein des « Republikflüchtlinge » jusqu’en 1959 est certainement la conséquence d’un rejet de la politique d’assimilation est-allemande. En 1946, les expulsés représentent 73,8 % des personnes qui quittent la SBZ, ils sont 41,3 % en 1950 et encore 28,4 % en 195978.
41Dans un article publié dans la revue « Neue Heimat » d’avril 194879, le président de la ZVU fait preuve de pragmatisme et cherche à minimiser les conséquences de ce mouvement : « nous encourageons ici le regroupement des parents au premier degré par tous les moyens, sans qu’il soit nécessaire d’organiser des conférences à ce sujet. Par contre, les personnes qui quittent la SBZ et traversent illégalement la frontière entre les zones pour des raisons criminelles, politiques ou privées ne peuvent pas vraiment en être empêchées ». Le but de cet article est de criminaliser ou de semer le doute sur leurs motivations politiques : « Est-ce que ces éléments contribueront au développement de la pensée démocratique à l’Ouest de l’Allemagne ? Je me permets d’en douter. »
« Le corps ici, la tête là-bas80 »
Un laisser-faire politique ?
42En conclusion de son intervention citée précédemment, Michael Schwartz qualifie les personnes âgées réfugiées de « Ehemalige Selbständige als dauerhaft Deklassierte81 ». Il cite un retraité installé à Kauern, un village de Thuringe, « résigné et délibérément provoquant : « Les retraités ne servent plus à rien, autant les emporter et les exécuter à la mitraillette. » À travers d’autres exemples semblables, l’auteur met en évidence deux conclusions de sa recherche. Le sentiment « d’inutilité » que ressentent les expulsés les plus âgés et qui est la conséquence des discours officiels sur le travail, « pilier de la société », et une liberté de parole propre à cette population. Ce second aspect est souligné par le témoignage d’un autre Allemand des Sudètes installé en Thuringe : « Je ne m’intéresse pas au marxisme et je ne veux rien avoir à faire avec ça. J’ai 79 ans et j’ai le droit d’organiser mes dernières années comme je l’entends. De toute façon, je vais bientôt rejoindre ma fille à l’Ouest. Mes opinions personnelles ne regardent personne. Je vous le dis clairement, je ne vais pas m’impliquer dans les événements politiques de la zone d’occupation et je ne les cautionne pas82. » Quelles sont en effet les conséquences de l’idéologie du SED et notamment de son concept d’intégration par le travail et de l’effort personnel sur les personnes âgées ? Pour celles-ci une amélioration de leur quotidien par la formation ou l’activité professionnelle est de fait exclue. Lorsque la « Leipziger Volkszeitung » appelle les réfugiés à minimiser les critiques concernant leur prise en charge par ces mots : « Les Umsiedler ne doivent pas être mis à l’écart ou attendre une aide extérieure. Ils doivent prendre les choses en main83 » ; ou encore lorsque le maire de Riesa justifie la paupérisation de la population réfugiée auprès du gouvernement régional de cette façon : « La conscience professionnelle des Neubürger arrivés ici laisse beaucoup à désirer. Leur recrutement s’avère très difficile, car ils sont pour la plupart trop vieux84 », ces paroles ont-elles une incidence sur ce parcours spécifique d’intégration ?
43Un premier constat résulte de la consultation des archives. Contrairement aux documents relatifs aux femmes réfugiées et à leurs enfants, les personnes âgées réfugiées sont très peu mentionnées malgré leur poids démographique : ils sont 317 060 sur le territoire saxon en octobre 194585. Dans la plupart des villes, il n’existe pas de section administrative (Referat) qui leur soit dédiée. Au sein des ministères et administrations à vocation sociale, Ministerium für Arbeit und Sozialfürsorge régional par exemple, elles apparaissent sous la dénomination « Alte und gebrechliche Umsiedler86 », ou plus largement « Arbeitsunfähige Umsiedler », sans distinction entre une inaptitude au travail liée à l’âge ou à une condition physique. Le « silence » des archives découle apparemment du désintérêt idéologique et politique des autorités est-allemandes, et de la priorité donnée à d’autres catégories sociales en temps de pénurie. L’impossibilité de pallier les lacunes de la documentation par les témoignages explique le peu de recherches qui ont été effectuées sur l’intégration des personnes âgées alors que les jeunes générations ont pu témoigner après 1989. Cependant certains aspects de ce processus d’intégration peuvent néanmoins être avancés grâce aux archives consultées.
44Les personnes âgées sont, avec les enfants, les personnes qui ont été le plus fragilisées par l’expulsion et qui souffrent le plus des conditions de vie dans les camps de transit et de quarantaine. Selon leurs régions d’origine, la durée et la date de leur transfert, les réfugiés arrivent plus ou moins bien nourris ou malades. Ainsi, sans donner de chiffres exacts, la SMAD note une multiplication des décès pendant les transports depuis Kaliningrad. La région, enclavée, procède tardivement aux expulsions ce qui explique en partie cet état de fait. Les Allemands ayant été expropriés dès 1945 vivaient en grande partie dans la rue. Sans plus de précisions, le rapport note les causes les plus fréquentes de décès : la pneumonie, les défaillances cardiovasculaires, la tuberculose et les cas sévères de diabète87. Les causes indirectes des décès, comme la sous-nutrition, le froid, les conditions de transport, ne sont pas précisées, dans la plupart des documents, et l’indication du décès reste vague : souvent « Erschöpfung88 ». Les expulsés de Hongrie arrivent par exemple dans un état d’extrême faiblesse89. Dans le même rapport concernant cette fois tous les expulsés, Ruth Fabisch, responsable de la Umsiedlerabteilung de la LRS note simplement : « État de santé général : bon pour les adultes/aptes au travail, moyen pour les enfants/vieux90. » Les plus faibles meurent pendant le transport : en 1947, sept personnes sont décédées pendant leur transport depuis la Pologne et un expulsé hongrois s’est suicidé lorsque le transport traversait la Tchécoslovaquie91.
45Le passage dans les camps saxons présente un danger pour la santé des réfugiés les plus affaiblis. Le camp le plus critiqué est la « 106e Kaserne » à Leipzig-Gohlis. Après une visite de contrôle de SMAS, la Kommandantur soviétique menace ouvertement le gouvernement saxon de représailles si les conditions de vie des expulsés ne s’améliorent pas : la plupart des occupants dorment à même le sol, sans matelas, les fenêtres n’ont pas de vitres, les chambres ne sont pas chauffées92. En 1947, la ville de Leipzig, souvent critiquée par les autorités militaires soviétiques locales pour son attitude envers les expulsés, dresse le bilan humain des premières années d’après-guerre. 1 439 réfugiés sont morts à Leipzig depuis le début de l’« Umsiedler-Aktion93 » : 703 hommes, 622 femmes et 114 enfants. Une autre statistique fait état de 124 morts pour le seul mois de juillet 194794.
46Le président de la ZVU Engel estime que pour éviter que les personnes âgées ne soient abandonnées à leur sort dans des baraquements insalubres, la priorité doit être donnée à la construction de maisons de retraite, pour leur offrir « un petit rayon de soleil sur leurs vieux jours95 ». Cependant, cette réflexion ressemble d’avantage à un vœu qu’à une réalité suivie d’effets, tout simplement par manque de moyens mais également en raison de la priorité donnée à d’autres aspects socio-économique de la politique d’intégration. La question de la transformation des « Kurorte » saxons, des stations thermales et lieux de cure, en lieux d’accueil pour les réfugiés les plus fragilisés tourne court au parlement saxon96 pour éviter de réduire les possibilités de repos et de cures des « Schwerstarbeiter », des travailleurs effectuant les travaux les plus pénibles et physiques.
47Les chiffres communiqués par Leipzig au gouvernement régional montrent l’ampleur du problème : sur les 9 557 « alte und gebrechliche Neubürger », 310 se trouvent en maison de retraite97, ce qui est annoté dans le document par la remarque « normal », c’est-à-dire similaire aux chiffres de la population locale. Il est à noter qu’aucun foyer d’accueil supplémentaire n’a été créé malgré le nombre élevé d’expulsés qui peuplent la ville98. Un an plus tard, selon Ruth Fabisch, la situation n’a pas évolué en Saxe : « Il est nécessaire de créer des maisons de retraites pour le grand nombre de personnes âgées et infirmes venues de l’Est. Les maisons de retraites communales sont largement insuffisantes pour accueillir les personnes nécessitant des soins99. » 42 maisons de retraites en Saxe accueillent uniquement des réfugiés, il s’agit d’institutions privées ou religieuses que les réfugiés et leurs familles doivent financer par leurs propres moyens100.
48Dans ce contexte, une majorité des personnes âgées est hébergée hors de ces établissements, mais l’absence de places n’est pas la seule explication. Tout d’abord le repli sur la cellule familiale est une réalité au sein de la population réfugiée, même si elle s’accompagne d’un accès plus difficile aux soins. Les efforts politiques visant à les placer dans des maisons de retraites pour permettre à leurs parents proches de travailler, notamment les femmes de la famille dans le cadre de la politique de féminisation du travail101, n’aboutissent pas.
49Il existe en outre une méfiance, parfois justifiée, vis-à-vis des établissements gérés par les communes et les arrondissements qui, « selon un rapport de l’Umsiedlerverwaltung du milieu de l’année 1948, ressemblaient plus à des “hospices pour malades et mourants”, presque “des îles coupées du monde extérieur” […], dans lesquelles il fallait se rendre à l’évidence et attendre la mort, abruti, mais où il fallait tous les jours se montrer reconnaissant de cette “bienveillante sollicitude”102 ». Un contrôle effectué dans une maison de retraite de l’arrondissement Auerbach permet de comprendre la sévérité de ce jugement. Les maisons de retraites sont situées loin des villes et des terres agricoles, pour ne pas entraver l’obtention de logements pour la population active et isolent les personnes âgées en les rendant totalement dépendantes du bon vouloir de l’établissement :
« L’arrondissement d’Auerbach a été déclaré en état d’urgence en raison de sa position géographique. Le foyer se trouve à la lisière d’une forêt, ne comprend pas de jardin ou autres moyens pour avoir accès à des compléments issus d’une activité agricole. Parmi les personnes âgées se trouvent beaucoup d’hommes encore robustes, les faire manger à leur faim est un problème insoluble depuis longtemps (le déjeuner a été cité en exemple : ¾ l de soupe de légumes)103. »
50Si les années 1946-1948 sont des années d’incertitude et de déception pour cette catégorie des « alte und gebrechliche Umsiedler », l’amélioration générale des conditions de vie de la population par la suite rejaillit sur certains d’entre eux. Les premiers progrès sont à mettre au compte d’initiatives privées, souvent par des personnes concernées par les limites de l’action sociale régionale et locale. La commission parlementaire saxonne chargée des personnes âgées et des grands invalides prend exemple sur une telle initiative : « Un institut pour aveugles est en construction à Chemnitz. Elle est dirigée par un aveugle, Herr Hausdorf. Il a également été possible de construire une maison de retraite pour aveugles, qui compte environ 40 réfugiés aveugles et âgés. Par ailleurs, une bibliothèque pour aveugles a été créée à Leipzig. C’est l’œuvre d’aveugles, et a été rendu possible en lien avec Herr Hausdorf104. » La commission reste pragmatique quant à ses propres capacités d’action, comme le montrent les objectifs modestes de son plan biennal lancé en novembre 1948 pour la région entière105 :
- La construction de 4 résidences médicalisées avec 200 places au minimum.
- Un foyer pour personnes âgées aveugles d’ici 1949.
- Un foyer pour personnes âgées malentendantes d’ici 1950.
De la stigmatisation à l’(auto-)exclusion
51Le contrôle effectué à la maison de retraite d’Auerbach, en raison d’une plainte déposée par un occupant, a mis en lumière les difficultés d’approvisionnement et la faim qui règne dans de tels foyers, mais se termine néanmoins par une mise en garde à l’encontre des pensionnaires :
« À la suite des vérifications, nous avons repris contact avec les occupants pour leur faire remarquer qu’ils devraient montrer plus de compréhension pour le fait que certaines personnes travaillent toute la journée, certains avec une forte pénibilité, et qu’elles doivent reprendre des forces avec la nourriture que leur confère la carte de rationnement pour travailleurs. […] Il a été vigoureusement rappelé aux habitants du foyer qu’ils peuvent à tout moment quitter le foyer s’ils ont des proches106. »
52Le caractère menaçant de cette mise en garde, ainsi que son message politique, est clair. Le principe du rendement l’emporte sur le principe d’assistance, il est la conséquence des difficultés économiques d’après-guerre mais aussi du message idéologique. Celui-ci s’étale à la première page de chaque numéro de la revue « Neue Heimat » destinée aux expulsés : « Heim und Arbeit für alle », un foyer et un travail pour tous. Il faut noter le lien de causalité instauré par le régime est-allemand entre ces deux éléments. Si le travail reste aux yeux des autorités la condition sine qua non de l’intégration, la population locale semble reprendre le discours officiel en stigmatisant les chômeurs (il s’agit souvent de personnes inaptes au travail) et des retraités. Les réfugiés sont accusés par la population de ne pas vouloir travailler et d’être des poids supplémentaires pour la société. Christoph Hein, dans son roman Landnahme, nous donne un aperçu de la façon dont certains jugeaient ces nouveaux arrivants. Il y met en scène un professeur d’école qui questionne un enfant de réfugiés :
« – Et ton père a du travail ?
– Non. Pas encore.
– Vous vivez alors aux frais de la ville. Quel est le métier de ton père ?
– Il est menuisier.
– Bien. Menuisier, c’est bien. S’il peut donner un coup de main et qu’il n’a pas deux mains gauches, il trouvera vite quelque chose. » Il fit une courte pause et reprit avec un mauvais sourire :
« – Ou alors est-ce qu’il n’aime pas travailler ton père ? Ça existe aussi107. »
53Il s’agit d’un exemple littéraire, mais l’auteur, né en Silésie en 1944, est un enfant de réfugiés et témoigne vraisemblablement de son expérience.
54Face à l’omniprésence dans la presse du concept d’intégration par le travail, « Eingliederung in den Arbeitsprozess », ou la participation « à la reconstruction d’une Allemagne démocratique par le travail108 », le réfugié Paul Krause exprime dans une lettre à la ZVU une opinion selon lui majoritaire parmi les siens : « Nous n’avons pas besoin de propagande, nous avons urgemment besoin d’aide et d’une vie décente109 ! ».
55Une telle stigmatisation et une absence de perspectives pour les plus anciens poussent certains à un renoncement à la vie, qui peut aller jusqu’au suicide. Dans son étude sur la vie quotidienne des réfugiés en Saxe, Notker Schrammek note : « Surtout les personnes âgées sont détruites d’un point de vue physique et psychologique. […] Les suicides se multiplient, comme une forme ultime de renoncement de soi. La pensée suicidaire joue un grand rôle dans la mémoire collective jusqu’à ce jour. La volonté de se suicider était aussi utilisée pour attirer l’attention sur son propre sort110. » Les taux de suicide ne sont pas connus, mais le phénomène est parfois évoqué par des administrations locales pour illustrer la paupérisation et l’exclusion des personnes âgées. Aucune mention n’en est faite dans la presse, mais la détresse est visible partout, comme le note Victor Klemperer à l’été 1947 dans son journal : « (Der) nackte Hunger (und die) überall übermäßige Sterblichkeit111. » Cette indifférence à l’encontre du suicide et de la mortalité est partagée par la population locale, en raison peut-être de ses propres difficultés. Dans son article « Das Gesicht des Umsiedlers », Hans Vondermur évoque ce sentiment de « Fremdheit » qu’il ressent à la vue de ces milliers de réfugiés qu’il croise112 : « Que dire de ce visage qui nous fixe, uniforme et inerte ? Ce stéréotype, cette rigidité, cette apparence insoluble se place entre l’Umsiedler qui arrive et celui qui le rencontre, pour des questions administratives ou des actions de charité, comme un élément inhibiteur voir repoussant. » Il note entre parenthèses que « les Umsiedler antifascistes ne sont bien entendu pas concernés ». Rappelons que la revue, publiée en particulier pour les expulsés et les personnels administratifs qui les prennent en charge, fut créée pour faciliter la circulation d’informations sur les différentes aides et bien entendu pour évoquer les succès de la politique d’intégration. L’article est illustré par une image recouvrant la moitié de la page et placée au centre du texte, qui met en scène une femme réfugiée, érigée en symbole de la population expulsée :
Illustration 1. – Neue Heimat, Jahrgang 2, Heft 6, p. 11.
56L’auteur critique, cette « impossibilité d’accepter », « Frucht der faschistischen Volkserziehung113 », ce qui serait pour lui la principale barrière à l’assimilation. De tels discours ont un impact sur l’opinion publique, mais aussi des répercussions au sein même des familles de réfugiés et tendent à créer un clivage entre générations. Ainsi, un fils de réfugiés issus de Hongrie témoigne en 1997 de son incompréhension vis-à-vis de la génération précédente :
« Je peux aussi le dire sincèrement, nous nous sommes directement orientés par rapport aux conditions d’ici, et nous n’avons rien dit… C’est vrai, nos femmes âgées ont parfois encore porté leurs anciennes affaires, leurs costumes traditionnels […]. Mais autrement, nous ne nous sommes pas dit que nous sommes hongrois, disons à part les anciens, et que donc nous voulons telles ou telles choses, comme elles étaient en Hongrie. Non, nous devions nous adapter ici, autrement ça n’aurait pas fonctionné. Aujourd’hui encore je ne trouve pas ça correct que beaucoup viennent ici et veulent faire passer en force leurs traditions et tout ça. Je dois m’adapter au lieu où je vis, c’est mon point de vue114. »
57Ce témoignage, recueilli près de 50 ans après l’expulsion de sa famille, est encore imprégné du concept d’assimilation diffusé par les autorités est-allemandes, mêlé sans doute aussi d’éléments inhérents aux débats parfois houleux sur l’immigration consécutive à la réunification allemande. Cependant, ce témoignage permet de comprendre que ce laisser-faire politique, c’est-à-dire la mise à l’écart des personnes âgées, se soit accompagné d’une certaine liberté de parole et d’une survie de certaines traditions au sein de cette génération. Dans une société où la remise en question des bien-fondés de l’expulsion est impossible, voire puni par la loi, le port de costumes traditionnels peut être appréhendé comme un message politique.
58Il reste beaucoup à faire dans l’étude du parcours d’intégration des personnes âgées expulsées et de leurs expériences particulières au niveau de la RDA, de ses régions et de ses communes. Néanmoins, nous pouvons d’ores et déjà soutenir qu’elles font partie des « laissés-pour-compte » de l’intégration.
Les réfugiés entre précarité et solidarité
59La précarité de la population réfugiée ne se limite pas aux personnes âgées, elle est une conséquence de l’expulsion et de la perte des biens financiers et matériels. Dans une société d’après-guerre en proie au rationnement, la reconstruction d’un patrimoine est un processus long, alors que la guerre a provoqué une désorganisation du système social et vidé les caisses des communes et des régions. Au sein de la population réfugiée, une distinction se fait alors entre les personnes qui peuvent se faire une nouvelle place dans la société allemande, et ceux qui restent à long terme dépendants des choix politiques du nouveau régime en matière sociale.
Aides sociales, travail et précarité
Les chiffres accablants des services sociaux saxons
60Le 11 novembre 1946, les chiffres communiqués par le gouvernement régional ne laissent pas de doute sur le fossé social qui sépare les réfugiés de la population locale115 :
Personnes percevant des aides sociales parmi : |
la population locale |
la population réfugiée |
Stadt Aue |
7,6 % |
18,8 % |
Stadt Chemnitz |
12,1 % |
26,9 % |
Stadt Döbeln |
11,1 % |
38,1 % ( !) |
Stadt Riesa |
6,5 % |
34,9 % ( !) |
Stadt Werdau |
6,6 % |
26,1 % ( !) |
Landkreis Annaberg |
7,0 % |
24,1 % |
Landkreis Dippoldiswalde |
8,6 % |
28,5 % |
Landkreis Glauchau |
6,2 % |
31,0 % ( !) |
Landkreis Großenhain |
3,8 % |
29,8 % ( !) |
Landkreis Meißen |
3,9 % |
16,7 % |
Landkreis Oelsnitz |
4,8 % |
25 % ( !) |
Landkreis Rochlitz |
3,4 % |
18,3 % ( !) |
Landkreis Stollberg |
6,3 % |
31,5 % ( !) |
61Les villes et arrondissements cités ne sont pas forcément représentatifs de la Saxe, mais ils illustrent les difficultés matérielles des réfugiés dans les localités rurales et les villes moyennes marquées par l’industrie légère en pleine reconstruction, telles Riesa et Chemnitz. En moyenne, 16,5 % des expulsés perçoivent des aides dans les régions rurales contre 11,8 % dans les villes saxonnes à la fin de l’année 1947116, ce qui tend à démontrer une paupérisation des réfugiés installés loin des centres urbains et industriels. Cependant, les arrondissements des Monts Métallifères, à l’exemple de Dippoldiswalde (28,5 %) et Aue (18,8 %) ne sont pas épargnés. Dans les années 1946 et 1947, 40 % des personnes jugées « Hilfsbedürftig117 » par les services sociaux sont des réfugiés, alors qu’ils ne représentent qu’un peu plus de 17 % de la population118.
62Les premiers touchés par la précarité sont les enfants, la majorité vit dans des familles monoparentales, où la mère ne peut subvenir à leurs besoins, même lorsqu’elle occupe un emploi. En juillet 1949, la ville de Leipzig est critiquée en raison du déséquilibre flagrant du nombre de bénéficiaires d’aides sociales entre sa population d’origine et les expulsés, quatre années après la fin de la guerre119.
63Cependant, les chiffres de 1949 montrent déjà une baisse du nombre de bénéficiaires. L’explosion des coûts liés à l’« Umsiedlerbeihilfe » a conduit à limiter les critères d’attribution de ces aides le 22 avril 1947 par l’ordre no 92 de la SMAS : seules les personnes incapables de subvenir à leurs besoins ou ceux de personnes dépendantes d’elles peuvent être prises en charge120. Cela exclut peu à peu les femmes avec des enfants à charge, à mesure que la pression des autorités pour pousser ces dernières vers le marché du travail se fait plus forte. Le plan biennal décidé par le gouvernement saxon en novembre 1948 explique le durcissement de la politique sociale à la fin des années 1940. Ainsi, il prévoit la réduction de 50 % des 256 000 bénéficiaires d’aides sociales, les femmes en âge de travailler sont en ligne de mire : elles représentent 18 % des personnes soutenues121.
Perçoivent des aides |
Population locale (630 117 personnes) |
Réfugiés (77 519 personnes) |
Hommes |
1,77 % |
4,71 % |
Femmes |
4,80 % |
11,57 % |
Enfants |
5,87 % |
13,45 % |
Moyenne |
3,99 % |
10,06 % |
64En 1949, le nombre de réfugiés percevant des aides sociales en Saxe baisse drastiquement. Dans un rapport envoyé à la commission de contrôle soviétique, le ministère saxon de l’Intérieur dénombre 114 475 réfugiés en janvier 1949, ils ne sont plus que 78 889 un an plus tard, puis 62 812 en août 1950 inscrits auprès des services sociaux122. Cette diminution rapide, présentée comme un succès de l’intégration professionnelle des expulsés, peut également être expliquée par des raisons budgétaires : entre 1948 et 1949 le budget saxon est réduit par la SMAS, la somme allouée aux affaires sociales est amputée de 100 millions de Mark123. Les réfugiés, qui représentent 30 % des dépenses, doivent faire face entre 1948 et 1949 à la fin de l’« Umsiedlerbeihilfe » ainsi qu’à la réduction des aides sociales. Ils sont alors poussés vers un marché du travail désorganisé par le retour des prisonniers de guerre, et n’ont d’autre choix que d’accepter toute forme de travail rémunéré, même sous-payé. Pour beaucoup, la fin des années 1940 représente alors un véritable retour en arrière, qui rappelle la précarité des années 1945-1946. Une exception notable existe en Saxe dans les Monts Métallifères. Sous la pression soviétique, et par l’expulsion des populations qui ne sont pas employées dans les mines, le recul du nombre de personnes percevant des aides sociales est spectaculaire124 :
Annaberg |
Mars 1946 |
9,6 % bénéficiaires d’aides sociales |
Juin 1949 |
1,5 % |
|
Aue |
Mars 1946 |
7,8 % |
Juin 1949 |
0,7 % |
|
Freiberg |
Mars 1946 |
17 % |
Juin 1949 |
4,7 % |
|
Marienberg |
Mars 1946 |
15 % |
Juin 1949 |
3,6 % |
65Dans les villes, la baisse est plus progressive, mais ne change pas la surreprésentation des réfugiés :
Population |
Réfugiés |
|
31 août 1947 |
5,87 % |
15,65 % |
31 octobre 1947 |
5.57 % |
14,01 % |
31 janvier 1948 |
4,9 % |
12,84 % |
30 avril 1948 |
4,31 % |
11,56 % |
31 août 1948 |
3,47 % |
9,23 % |
30 novembre 1948 |
3,54 % |
11,67 % |
Tableau 11. – Bénéficiaires d’aides sociales selon les chiffres des services sociaux de Leipzig125.
66Ces chiffres semblent déranger. Sur ordre de la LRS, la ville de Leipzig ne doit en aucun cas divulguer ses statistiques et les chiffres des différentes sections doivent rester confidentiels126 : le malaise est évident.
Une population fragilisée en but à l’hostilité des populations locales
67Dans la rubrique « Und wie ist deine Meinung127 ? » de la revue Neue Heimat, le réfugié W. Pommer s’insurge :
« Les enfants de Umsiedler doivent-ils devenir les servantes et valets des paysans comme ici dans les communes excentrées […] parce que ces services sont le seul moyen pour les enfants de manger à leur faim ? Les personnes âgées, qui possédaient auparavant leur propre exploitation, doivent-elles rester des valets et des servantes jusqu’à tomber raides morts car leur carte de ravitaillement ne suffit pas à les nourrir ? »
68La pauvreté des expulsés les rend alors vulnérables, ce dont peuvent parfois profiter les populations locales mieux loties : « La population locale profite de cette situation, elle obtient des travailleurs à bas coût ou qui sont uniquement dédommagés par un peu de nourriture. » En effet, dans les régions rurales, beaucoup de réfugiés sont hébergés par des paysans, et travaillent sur l’exploitation en tant que journaliers en échange de nourriture et d’une pièce pour vivre. En janvier 1948, le président de la ZVU parle d’une pratique largement répandue dans la zone, ce qui met en danger la participation des réfugiés à la réforme agraire128. Comment les expulsés peuvent-ils travailler la terre qui leur est distribuée, et ceci sans matériel agricole, et construire leur maison s’ils doivent travailler sur les terres d’autres paysans pour se nourrir et se loger ?
69Dès l’été 1945, cette « mise au service de la population » des réfugiés est une pratique courante comme le montre une liste dressée par le maire d’une commune rurale du Brandebourg pour demander une prolongation des autorisations de séjour pour les réfugiés « travaillant dans le secteur agricole129 » :
« 1. Sch. Alfred, valet de ferme chez le paysan Sch.
2. Sch. Heinrich, valet de ferme chez Albert L.
3. W. Wilhelmine, journalière chez le paysan Sch.
4. Sch. Ursula, servante chez Gustav M.
5. Sch. Ingeborg, bonne d’enfants chez Karl G.
6. B. Anni, servante chez Adolf N.
7. Gr. Ursula, bonne chez H. P. K. »
70Dans un premier temps, les autorités locales se félicitent de cette évolution, qui permet de contourner les difficultés liées au logement et à l’approvisionnement. Ainsi, le LAA saxon note dans son rapport du 4 février 1946 : « Souvent les filles peuvent être utilisées comme aides ménagères à domicile, une solution pratique au problème du logement et de subsistance130. » Quand elles ne sont pas employées en tant qu’aides ménagères ou bonnes pour les enfants des familles locales, les femmes sont dans un premier temps très utiles pour remplacer les hommes en période de récolte. Dans l’arrondissement rural de Döbeln, sur 220 réfugiés, seules 4 femmes avec un ou plusieurs enfants ont déposé une demande pour obtenir des aides financières, elles sont les seules à ne pas avoir été envoyées dans les champs pour aider à la moisson131. Le maire de la commune explique l’absurdité de la situation : ces demandes ne sont pas accordées en raison des biens qu’ont pu ramener les expulsées concernées, en l’occurrence des chevaux, mais comme elles n’ont même pas les moyens de les nourrir, elles sont forcées de les remettre aux paysans locaux contre du fourrage, sans aucune autre indemnité.
71Dans son roman « Die Unvollendeten132 », Reinhard Jirgl décrit le parcours de trois femmes originaires des Sudètes, une femme âgée et ses deux filles, ballotées d’une ville à l’autre pendant des mois (« personne ne voulait des trois femmes. […] le problème c’était la septuagénaire, comme on le leur faisait souvent comprendre en hochant la tête et en refermant la porte133 ») avec toujours le même Leitmotiv : « Keine Wohnung-keine Arbeit, keine Arbeit-keine Wohnung134. » Après des mois de transports et de vie dans les camps, elles sont les dernières d’un convoi qui s’arrête en pleine campagne : « À l’arrivée du train, quelques paysans de Birkheim étaient debout sur le quai de la gare, ils examinaient les réfugiés qui sortaient en trébuchant des wagons de marchandise comme des bestiaux de trait de moindre qualité, qu’il s’agissait d’acquérir au meilleur prix135. » Pour les trois femmes, c’est la fin d’une épopée de six mois à travers toute la zone d’occupation : « Le paysan […] s’en prit immédiatement à Johanna, les deux autres devaient travailler aussi à la place de la vieille, autrement logis et nourriture que pour deux136. »
72Dans les communes moyennes et les villes, les réfugiés ne sont pas tant exposés au bon vouloir de la population locale, qu’à celui des administrations locales. Dans son journal intime, une réfugiée originaire de Silésie note :
« C’est tellement déprimant. Aller chaque jour se manifester auprès des communistes du service de l’emploi, après on peut éventuellement déguerpir ou on est assigné au cirage de chaussures […]. Ce n’est pas le travail en soi qui est déprimant, mais le contexte inerte et la perspective de devoir vivre comme ça pendant longtemps… Se voir assigner des tâches journalières, juste pour recevoir la carte de ravitaillement réservée aux travailleurs137. »
73Une autre rubrique de la revue Neue Heimat est intitulée « An den Pranger », littéralement « au pilori », elle répertorie justement les mauvais traitements infligés aux expulsés par la population locale. Cette dénonciation publique a une vocation dissuasive, mais veut aussi rassurer les réfugiés, qui doivent se sentir défendus par la justice est-allemande. Dans la première édition de mai 1947, la rubrique cite les conditions dictées par les propriétaires d’une telle maison aux nouveaux arrivants : « La salle de bain appartient au logement et ne doit pas être utilisée par les Umsiedler. La cuisine ne peut être utilisée que pour y chercher de l’eau, non pas pour y cuisiner ou y séjourner138. » L’ingérence va même plus loin : « Chaque couple de Umsiedler doit demeurer dans sa chambre. Pas question de voir ces quatre personnes séjourner une fois dans l’une ou l’autre pièce ensemble. »
74Dans l’arrondissement de Dippodiswalde, les plaintes sont quotidiennes : « Dans certains cas la population locale tire profit de la situation tragique des Umsiedler. Elle réclame des loyers élevés et toutes sortes d’arrangements complaisants139. » Les conflits entre la population et les arrivants seront développés au cours de ce travail, mais il s’agit surtout de noter que la menace qui pèse sur les réfugiés (« keine Wohnung-keine Arbeit, keine Arbeit-keine Wohnung ») ne favorise pas les dénonciations de leurs conditions de vie ou de travail. Il faut remarquer que les communes n’ont aucun moyen de contrôle sur le nombre et la composition sociale des réfugiés qui leur sont envoyés, et que ceci explique sans doute une partie des frictions et des déséquilibres sociaux. Cependant, les inégalités sont bien connues des autorités, notamment en terme de logement. L’inégalité touche la surface habitable : « la population d’origine a à sa disposition 12 à 15 m2, l’Umsiedler 4 à 5 m2 par personne (malgré la moyenne de 9 m2 par personne)140 », mais aussi la qualité du logement occupé :
« Hébergement des expulsés le 31 décembre 1947 en Saxe :
1. Dans un logement particulie
a) Familles 115 439
b) Personnes 405 259
2. Sous-location
a) 211 457
b) 610 275
3. Logement d’urgence
a) 3 415
b) 12 233
4. Abri de masse (camps)
a) 1752
b) 6 640141. »
75Le bilan interne de l’administration régionale pour l’année 1949 insiste sur la nécessité d’une amélioration, même minime, des conditions de vie des expulsés au quotidien, loin des grandes politiques centrales : « L’assimilation pourrait être largement accélérée, si les souhaits les plus modiques des Umsiedler pouvaient être exaucés. Il s’agit en premier lieu d’avoir son propre foyer, c’est-à-dire un logement aussi petit soit-il, qu’ils puissent fermer à clé142. » De même, alors que les administrations chargées de la politique d’intégration ont été fermées en 1948, le gouvernement régional déplore les conséquences de la politique égalitariste sur le travail de ses propres administrations locales voire des entreprises « nationalisées » : « Les services pour l’emploi devraient essayer de transmettre en emploi en priorité aux plus pauvres des pauvres, et lors des réductions de postes, licencier en dernier les Umsiedler et non pas, comme c’est l’usage, permettre que les Umsiedler soient les premiers à perdre leur emploi, par exemple à la poste ou les chemins de fer143. » La remarque est intéressante, car elle pointe du doigt les difficultés pour concilier la politique égalitariste avec les réflexes communautaristes au niveau local ou au sein des entreprises.
76Cependant, malgré les inégalités persistantes et la précarité de la vie quotidienne des expulsés, les autorités centrales allemandes et soviétiques veillent à ne pas laisser la population locale s’organiser contre les expulsés144, tout en préservant les avantages matériels de cette dernière en refusant une redistribution des richesses. Notker Schrammek explique la voie médiane, parfois floue, choisie par les autorités politiques par la nature du régime ainsi :
« Il est typique pour une dictature de ne pas créer de cadre législatif sécurisant, mais de distribuer des faveurs. C’est aussi pour cela que le SED a refusé de faire inscrire un droit à l’assistance pour les réfugiés. En contrepartie, elle organisait de grandes campagnes de propagande pour appeler à la solidarité volontaire vis-à-vis des expulsés. Ces dons pouvaient alors être distribués selon la bienveillance politique de ces derniers145. »
77Les plaintes enregistrées par les autorités locales par le biais d’un questionnaire distribué aux expulsés en juillet 1947 sont constamment minimisées, ainsi que les conflits qui découlent de la précarité, du manque de mobilier et de la faim146. La formulation, à destination des autorités militaires soviétiques de Leipzig, vise à les rassurer sur une possible résistance des expulsés, ils sont par la même occasion critiqués pour leurs plaintes : « Beaucoup de ces plaintes sont dues aux difficultés des Neubürger à s’adapter aux conditions de vie de leur nouvelle patrie, et à réaliser la détresse et les difficultés extraordinaires auxquelles est confrontée la population tout entière147. » Et de rajouter « les relations entre la population locale et les Neubürger sont globalement normales148 ». La faute est rejetée sur les réfugiés, qui auraient trop de revendications. Ils ne comprendraient pas leur responsabilité dans ce qui leur est arrivé ( !). Loin de vouloir prendre position ouvertement et reconnaître le fossé, voire même la violence existant entre les deux populations, cette position pose la question d’une autre violence sociale, vécue dans le rapport entre les expulsés et les administrations locales.
78Ces différents argumentaires, à forte connotation politique, témoignent surtout du décalage entre les administrations régionales et celles des grandes villes comme Leipzig, où la pression politique voire le noyautage par le SED sont les plus sensibles. Les administrations locales sont confrontées à la précarité des expulsés au quotidien et bien souvent au manque de coopération de la population sur place. Ces dernières réclament alors une politique sociale plus engagée, ou même une véritable redistribution forcée des richesses, loin des enjeux politiques du SED et du « grand frère » soviétique. La ligne de fracture se dessine ainsi entre les différentes échelles administratives : la solidarité entre les populations suffit-elle à pallier les besoins matériels des réfugiés ou faut-il recourir à la confiscation ? En d’autres termes, les administrations peuvent-elles décider de ce qui est superflu et confisquer, ou le propriétaire doit-il être seul juge et donner volontairement ce dont il considère ne pas avoir besoin ? Dans une région comme la Saxe, où le poids politique des expulsés est faible comparativement à d’autres régions est-allemandes, la confiscation semble aux yeux du SED une voie politique peu propice à l’adhésion des électeurs.
Solidarité volontaire et solidarité forcée
Des réquisitions limitées mais mal perçues
79À travers la lecture des archives de la ZVU, les premières années de la politique d’intégration des expulsés semblent être comme un conflit au quotidien, autrement dit des « disputes à propos d’armoires et de coffres à linge149 ». Michael Schwartz note également les craintes particulières associées à la perspective d’une « Zwangsumverteilung150 ». Contrairement à l’expropriation des anciens responsables nazis ou des grands propriétaires terriens, une législation coercitive sur la redistribution du mobilier polarise par son ampleur et sa signification politique. Elle signifierait une évolution de la pratique, de l’expropriation des seules élites économiques et politiques vers un véritable Leitmotiv idéologique151. Si une telle mesure est appuyée dans un premier temps par certains partis politiques, dont le SED et la CDU152, au niveau local le questionnement est à la fois législatif, moral et humain : est-il possible d’entrer dans les foyers, autrement dit avoir un accès à la sphère privée des personnes, pour recenser et le cas échéant confisquer des biens ?
80Au niveau local, une réponse est cherchée dans le cadre des Ortsgesetze, les lois communales. Entre l’automne 1946 et le début 1947, des arrêtés municipaux sont pris localement, pour définir les principes de bases d’une redistribution, bien souvent fixée à minima153. La commune de Reichenbach, dans la région du Vogtland154 justifie son choix auprès de la ZVU en janvier 1947 : « En raison du nombre croissant de réfugiés dans la ville de Reichenbach, l’administration municipale a été forcée de s’écarter de son fonctionnement précédent, à savoir l’hébergement des Umsiedler sur la base du volontariat, pour mettre en place une réglementation contraignante155. » Dans ce cas, l’arrêté municipal a pour objectif de rendre temporairement légal le fait d’entrer dans des logements privés, pour en déterminer la superficie et donc la possibilité ou non d’accorder une ou plusieurs chambres aux expulsés. Dans la plupart des communes saxonnes, ces arrêtés ont une visée pédagogique dans leur formulation (« Zwangslage », « Linderung der Wohnungsnot ») pour rassurer la population locale (« das Eigentumsrecht bleibt dem Besitzer erhalten156 ») mais confèrent des droits spéciaux aux administrations municipales.
81La base juridique de ces arrêtés est fragile, elle s’appuie plus ou moins explicitement sur le Reichsleistungsgesetz du 1er septembre 1939, qui n’a pas été formellement abrogé157 même si son utilisation (« en l’absence d’autres possi158 ») dérange de part sa référence directe à l’effort de guerre allemand.
82L’évolution de ces solutions locales vers une loi régionale est réclamée au printemps 1947 par les partis politiques conservateurs et libéraux au parlement régional, afin de permettre un plus grand contrôle des pratiques locales. Le compromis semble impossible entre les différents partis politiques, il semble difficile en effet « de fixer une norme de ce qui est nécessaire au quotidien. La question, confiscation ou prêt, pose problème à deux points de vue. Si une règle générale doit être établie, le prêt devient de fait un prêt définitif. Une mise en pratique juste nécessite de grands moyens de contrôle (risque de corruption et de dénonciations), c’est pourquoi la proposition de loi n’a pas encore été votée159 ». Ces négociations débouchent au contraire sur une interdiction pure et simple des Ortsgesetze160, et sur une réorientation vers des solutions moins contraignantes, car « le gouvernement préfère en appeler aux sentiments et demande de ne pas préconiser de loi, mais de trouver de nouveaux moyens d’encourager la remise volontaire161 ».
83Les premiers travaux de recherche, qui cherchent à quantifier les effets des arrêtés municipaux, tendent à mettre en lumière leur inefficacité voire leur effet négatif sur les relations entre population et expulsés162. Également, les termes employés par les communes pour qualifier cette « solidarité forcée » des populations locales masquent mal le malaise des autorités. Ainsi, le conseil municipal de Reichenbach préfère parler de recensement (Erfassung) et de saisie (Sicherstellung) sans jamais parler de confiscation163, en précisant que les objets saisis sont placés sous l’autorité des Umsiedlerämter, chargés de les distribuer et de garantir que tout soit rendu aux propriétaires en bon état. Ces derniers peuvent même demander une contrepartie financière aux réfugiés, à hauteur de 5 % de la valeur de l’objet « prêté ». À Böhlitz-Ehrenberg, le terme de Beschlagnahmen, confisquer ou réquisitionner, est utilisé dans le texte de loi164, mais il ne s’applique qu’aux meubles trouvés dans des caves, des mansardes, des greniers et des tonnelles. Ici encore, le propriétaire conserve ses droits et peut, si cela est justifié, récupérer ses biens pour les vendre par exemple. Cette dernière possibilité va être largement privilégiée par la population locale, au vu des prix pratiqués sur le marché noir pour les pièces les plus importantes : matelas, poêles, fours, etc.
84L’interdiction des Ortsgesetze par le parlement saxon correspond à une volonté politique d’« institutionnaliser » la solidarité au profit du SED, dans un cadre moins coercitif afin de faire taire les rumeurs de « confiscation » qui circulent au sein de la population.
85 La Volkssolidarität, une instrumentalisation de l’action caritative ?
• Solidarité et propagande
86Tout au long de son existence, la ZVU est consciente de son manque d’efficacité et de la concurrence de plus en plus grande des administrations régionales et locales « ordinaires ». Elle s’affirme néanmoins comme la championne de la solidarité et de l’entraide et proclame : « Nous devons mettre en place une énorme action de solidarité, et même si nous sommes pauvres, nous devons aider les Umsiedler, qui possèdent encore moins que nous165. » Parmi de nombreux projets proposés, elle prévoit par exemple l’organisation de parrainages entre les deux populations, afin de parvenir à un partage des ressources présentes. L’idée est rapidement abandonnée. En même temps, la ZVU veut intégrer les réfugiés dans le projet politique d’une zone soviétique qui promulgue une société égalitaire, antifasciste et solidaire : « Notre initiative doit produire des miracles, provoquer l’enthousiasme et la participation à tous les niveaux de la population, comme nous n’en avons jamais vu en Allemagne166. » La part d’idéalisme est perceptible dans ces propos, mais la bonne volonté montrée par la ZVU se heurte aux réalités de l’intégration sur le terrain : dans les camps et les communes. Globalement, les autorités semblent surestimer la solidarité de la population vis-à-vis des expulsés.
87Les appels aux dons sont nombreux, certains jouent la carte de la culpabilité allemande : un comité antifasciste saxon, « Antifaschistisches Hilfskomitee des Landes Sachsen » lance en été 1945 un appel à la solidarité en ces termes :
« À l’époque, lorsque vous avez envoyé vos fils sur le champ de bataille, vous avez financé la guerre par des quêtes à domicile, des dons de textiles, de nourriture, l’Eintopfsonntag etc. Maintenant qu’il s’agit de reconstruire une Allemagne démocratique et antifasciste, personne ne voudra rester en retrait, mais justement, maintenant que votre don servira à la reconstruction pacifique, nous savons que nous ne faisons pas en vain appel à votre sens de la solidarité. Pensez aux enfants qui vous mettent en accusation, car c’est par votre faute qu’ils ont perdu leur patrie. Rivalisez d’efforts pour que votre sens du sacrifice nous permette d’aider à atténuer un sort dont ils ne sont pas responsables167. »
88L’utilisation de tels termes est courante en 1945, à entendre par exemple les propos du président de l’administration régionale du Mecklembourg (« pendant 12 années vous avez fait des sacrifices pour une chose inutile et criminelle, sacrifiez maintenant pour vos concitoyens qui souffrent168 »), cependant de telles initiatives locales sont rapidement contrôlées. Une rupture peut être observée avec la création du SED au printemps 1946, lorsque le parti cherche à forcer son implantation au sein de la population de la zone d’occupation. Elle est consciente du danger politique et de l’impopularité d’un rappel constant de la culpabilité collective allemande. Cette attitude n’est pas propre au SED, le parti libéral LDPD fait également preuve dans ses publications d’une grande compréhension pour l’attitude de la population locale : « À de nombreuses occasions, ils ne se sont peut-être pas montrés très humains ; mais nous pouvons montrer de la compréhension pour la réduction de leur espace de vie et de travail que cette augmentation a provoqué. C’est pourquoi il est difficile concernant les tensions de parler de raison ou de tort169. »
89Ce contrôle du SED passe essentiellement par le biais d’organisations sociétales proches du régime170. Cependant, dans les premières années d’après-guerre, les Églises restent le centre névralgique de l’action caritative en Saxe. Présentes dans les gares dans le cadre des « Bahnhofsmissionen171 » pour distribuer des repas chauds, les organisations religieuses organisent des collectes de porte à porte dès l’été 1945 pour obtenir « une tranche de pain ou deux pommes de terre172 », et sont les premières à recevoir des dons en provenance de l’étranger : « Le plus grand don était un don de viande du peuple irlandais pour les personnes de plus de 70 ans. 1 kg par personne. 150 Umsiedler ont été servis. 50 kg du don de harengs ont été distribués aux Umsiedler173. » Ces dons sont étroitement contrôlés, et donnent lieu à un rapport auprès de la SMAS. Dans un premier temps, les dons sont présentés comme la « lebendigen Vertrauensbeweis und einen positiven Akt des Friedens174 » de la part des « Siegermächte175 ». Dès 1947, les dons en provenance de l’étranger sont régulièrement interdits et confisqués, comme dans le cas, particulièrement délicat sur le plan politique, d’expulsés qui demandent à recevoir des aides d’une organisation américaine de soutien aux réfugiés issus de Prusse orientale176. Cette décision répond au double objectif d’éviter tout communautarisme mais aussi les liens directs entre les expulsés et les organisations culturelles autorisées hors de la SBZ, que ce soit en Allemagne de l’Ouest ou dans d’autres pays occidentaux.
• Une solidarité institutionnalisée
90Helmut Lehmann, membre du comité central du SED, est nommé à la tête de la Volkssolidarität en octobre 1946. Sous sa direction, La Volkssolidarität du Brandebourg publie un livre pour enfants « Das ist Volkssolidarität : Ein Bilderbuch aus dem Kinderparadies der Volkssolidarität177 », avec comme devise « Freude spenden, Leid abwenden178 ». L’introduction de l’ouvrage reflète l’ambiguïté politique de l’organisation. D’une part, elle prétend dépasser les clivages politiques et confessionnels et reposer sur des valeurs de rassemblement :
« – La Volkssolidarität est née du peuple.
– Sur la base de ce principe, la Volkssolidarität s’est au fil du temps, avec la participation de tous les partis et des Églises des deux confessions, développée pour devenir le plus grand mouvement populaire de la zone soviétique. – La Volkssolidarität dépasse les clivages politiques partisans et offre son aide sans s’enquérir des appartenances politiques ou religieuses. »
91D’autre part, elle ne cache pas le caractère politique de son travail :
« La Volkssolidarität se positionne clairement en faveur du progrès démocratique et pour cela elle est un mouvement politique. Toutes les questions vitales pour notre peuple sont intimement liées aux événements politiques, car la mise en place d’un ordre social plus juste est nécessaire pour surmonter l’urgence sociale. »
92La Volkssolidarität est créée le 17 octobre 1945 par les partis politiques du « front antifasciste », les deux Églises et les organisations syndicales autorisées, elle a pour objectif premier d’aider la population face à un hiver 1945-1946 qui s’annonce difficile. Par la suite seulement, en mai 1946, elle est placée sous l’autorité d’un comité central de la Volkssolidarität qui doit coordonner et centraliser ses actions. Compte tenu de la date, un mois après la création du SED, ce regroupement correspond également à un contrôle plus étroit de la part des autorités communistes, comme le montre la désignation d’un membre du comité central du SED à sa tête en octobre 1946. Cependant, durant la période étudiée, il est difficile de parler de la Volkssolidarität comme d’une organisation de masse, ce qu’elle tendra à devenir dans le courant des années 1950179. En effet, sa composition varie au niveau local, selon la présence et l’importance des différents partis ou organisations, comme le Frauenbund par exemple, qui est très impliqué en Saxe. Dans les arrondissements ruraux, la CDU est très présente au sein de l’organisation, au même titre que les organisations caritatives religieuses comme Caritas, ce que ne manque pas de dénoncer le SED local180. À la fin des années 1940 et au début des années 1950, le rôle de la Volkssolidarität en Saxe n’est pas apolitique, mais elle couvre des besoins sociaux qui ne sont pas pris en charge par les administrations locales et régionales. En cela, elle œuvre en parallèlement aux actions sociales du gouvernement régional, pour pallier ses nombreux manquements notamment en apportant une aide matérielle d’urgence financée par des dons.
Illustration 2. – Appel aux dons de la Volkssolidarität181.
93La Volkssolidarität, qui permet d’atténuer l’effet des lenteurs administratives et politiques concernant l’attribution d’aides sociales, de logements ou de cartes de ravitaillement, est renvoyée dès 1946 par les autorités centrales vers un rôle de soutien et non plus d’instigatrice des campagnes de dons, qui prennent un caractère de plus en plus politique.
• « Neue Heimat-Neues Leben », propagande et solidarité à Leipzig
94La solidarité et les appels au partage constituent une nécessité pour cette ville qui ne possède pas les moyens financiers nécessaires pour équiper ou nourrir les expulsés. Ainsi, dès le 12 décembre 1945, le maire décide de mettre en place une première action de solidarité, qui va avoir comme slogan : « 16 Millionen Menschen eine neue Heimat geben182 ! » Cet appel est relayé le 20 décembre par le journal Volksstimme183 : « 690 000 Umsiedler restent dans le Land de Saxe ! Mobilisation générale de la population : donnez des affaires et de l’argent184 ! » Cette action n’est pas le seul appel aux dons que lance l’administration municipale, mais la plupart de ces actions n’ont pas le succès escompté, d’où la nécessité de lois municipales pour permettre aux services de la ville de « mettre à contribution » les habitants de la ville, dont nous avons pu voir les limites. Malgré ces échecs, la ville se refuse à critiquer le comportement de sa population : « La véritable action d’aide bénévole de la population d’origine est bien plus grande, que ce que les chiffres montrent185. » Ces initiatives sont soutenues par les autorités soviétiques, même si le chef de la Zentralkommandantur déplore : « La ville de Leipzig est la plus mal placée en ce qui concerne l’état d’esprit de sa population186. » Selon lui, la population doit être sensibilisée par les médias et les partis politiques : « La misère des réfugiés devrait être rappelée à l’esprit de gens d’une façon très différente par la presse, la radio et le parti187. » Il rejette la demande de la ville qui souhaite le soutien financier de la Kommandantur pour l’acquisition de meubles, de bois et de matériel. Malgré l’argument de la ville que beaucoup de logements ont été détruits ou endommagés pendant les bombardements, le Major soviétique estime que les Allemands n’ont pas besoin d’aide et refuse une augmentation du budget municipal. La ville peut uniquement compter sur ses habitants.
95Après l’organisation de semaines vouées à la solidarité pour les réfugiés, appelées « Umsiedlerwochen », en novembre 1947 dans le Land du Brandebourg et en février 1948 en Saxe-Anhalt, la Saxe prévoit à l’origine d’organiser une semaine baptisée « Neue Heimat-Neues Leben » en été 1948. Une semaine vouée uniquement aux réfugiés doit concrétiser leur assimilation au sein de la société et combler les différences sociales qui existent encore entre les deux parties de la population188. La semaine « Neue Heimat-Neues Leben. Woche für Umsiedler, Heimkehrer und Ausgebombte » est finalement organisée à Leipzig entre le 16 et le 24 octobre 1948 et ne s’adresse pas seulement aux réfugiés mais aussi à ceux qui ont tout perdu dans les bombardements (Ausgebombte). Elle poursuit des buts caritatifs mais aussi politiques et sociaux définis par la LRS de Dresde :
Buts et enjeux de la semaine « Neue Heimat-Neues Leben189 »
1. Promotion de l’assimilation der Umsiedler dans tous les aspects de la vie civile.
2. Dans cette dynamique la disparition de l’expression Umsiedler.
3. Une amélioration dans l’accès aux biens de première nécessité par :
- L’augmentation de la production.
- Production supplémentaire de l’industrie et artisanat.
- Dons et quêtes.
4. Répartition juste aux nécessiteux (Umsiedler, Heimkehrer, Totalgeschädigte).
96Ainsi, du 16 au 24 octobre 1948, la ville organise des journées d’actions de solidarité. Le 17 par exemple est dédié à la collecte de vêtements et de chaussures, le 18 à l’enfance190. Ces événements diffusent un message d’intégration aboutie et bien vécue mais ne permettent pas véritablement de masquer la précarité des réfugiés. Pour les aides ponctuelles, la priorité est mise sur des actions de solidarité populaire, et là aussi les appels à la population se multiplient : « Citoyens de Leipzig ! Leur misère doit être la nôtre ! Aidez les frères dans le besoin191 ! » Les dons pouvaient être en espèces mais aussi matériels, en raison des besoins en vêtements, en charbon, en meubles et en paille pour les lits.
97La semaine choisie pour Leipzig correspond au troisième anniversaire de la création de la Volkssolidarität, qui participe à l’organisation de cet événement, et qui est au centre de toutes les actions de charité envers les réfugiés. Lors de la mise en place de cette semaine, un comité rassemblant des représentants de la Volkssolidarität, de la FDGB, de la FDJ, de la chambre de commerce et de l’approvisionnement (Amt für Handel und Versorgung), du Wohlfahrtsamt et de la Neubürgerstelle est créé. La Neubürgerstelle est censée être le pilier de l’événement, auquel participent également les églises catholiques et protestantes de la ville.
« Aktion Neue Heimat – Neues Leben192 »
10.10.48 : Cérémonie d’ouverture.
17.10.48 : Quête de mobilier et de vêtements/après-midi sportif et dédié aux enfants/spectacle en soirée.
18.10.48 : Journée de l’enfance/Bilans des Umsiedlerausschüsse.
19.10.48 : Journée des travailleurs/Thème : Umsiedler dans l’entreprise et dans l’économie.
20.10.48 : Journée des Heimkehrer.
21.10.48 : Journée des Églises et des organisations culturelles.
22.10.48 : Événements sportifs/Cinéma et théâtre.
23.10.48 : Soirée dansante. 24.10.48 : Distribution des biens collectés ou produits pour l’événement.
98L’action en faveur des réfugiés repose à la fois sur le partage des dons et sur un appel à l’augmentation de la production de meubles pour rendre leurs prix accessibles aux plus démunis. De même, des cartes comparables aux cartes de ravitaillement sont distribuées pour permettre l’accès à des vêtements, du linge, des tissus et des chaussures appelées « Bezugsscheine ». Malgré le travail d’organisation qui a eu lieu en amont, la semaine se révèle chaotique et de nombreuses erreurs sont commises. La responsabilité en est attribuée à la Neubürgerstelle. Le directeur de la Neubürgerstelle laisse ainsi par erreur entendre que les cartes distribuées n’ont une validité que d’une quinzaine de jours, ce qui provoque une panique. De plus, les cartes concernant l’obtention de linge pour nourrissons sont envoyées aux maisons de retraite de la ville193. Les 180 000 cartes mises à la disposition de réfugiés sont financées à hauteur de 150 000 Mark par les services sociaux de la ville, qui doivent cependant arrêter l’enregistrement des demandes déposées par les réfugiés, bien plus nombreuses que prévu194. Le bilan des dons en provenance de la chambre de commerce et d’industrie de la ville ainsi que des entreprises artisanales de Leipzig est maigre. Seuls une centaine de meubles et quelque 400 outils ménagers ont été rassemblés et les artisans de Leipzig ont donné 7 fours et poêles et 45 meubles195.
99Le courrier anonyme d’un réfugié, intercepté par la police de Leipzig, déplore le manque de résultats, surtout au vu des annonces spectaculaires de cette action de solidarité et de la propagande qui l’entoure196. Il reproche à l’administration de ne pas avoir assez ciblé les actions sur les réfugiés et dénonce le manque d’organisation. De même, il insiste sur le traumatisme que signifie la perte de sa patrie, aspect totalement laissé de côté en cette occasion : « Nous nous appelons expulsés et personnes chassées de chez elles de plein droit ! Une personne honnête et honorable n’abandonne jamais sa patrie197 ! » En effet, au-delà de sa dimension caritative, l’action « Neue Heimat-Neues Leben » est avant tout un lieu de propagande. Bien plus qu’une aide concrète apportée aux réfugiés, l’important est la mise en scène d’une semaine entière vouée à leur cause. Les réfugiés eux-mêmes n’ont pas été consultés en amont, ils ne sont pas non plus représentés dans le comité d’organisation. La semaine doit clore la première étape du processus d’intégration, elle doit amener à la disparition du terme Umsiedler et concrétiser l’assimilation des réfugiés par la disparition de tous les termes spécifiques les désignant. Ainsi, le SED insiste auprès du maire de Leipzig pour faire appliquer ce changement : « Neubürger gibt es nicht mehr, nur Bürger198 ! » Il apparaît paradoxal que l’action reprenne exactement la terminologie qu’elle veut voir disparaître dans son appellation : « Neue Heimat-Neues Leben. Woche für Umsiedler, Heimkehrer und Ausgebombte. » De même, les organisateurs régionaux et communaux insistent sur le fait que la semaine est dédiée non pas seulement aux réfugiés mais à tous ceux que la guerre a plongés dans la précarité. Cependant, alors même que la semaine se déroule dans un climat de propagande et d’exaltation du travail d’intégration accompli, des transports de réfugiés arrivent toujours à Leipzig.
100La lettre anonyme, citée précédemment, n’est pas dupe des intérêts politiques qui motivent cette soudaine vague de solidarité :
« Ainsi, l’action Neue Heimat-Neues Leben doit maintenant faire disparaître le terme Umsiedler, parce qu’il provoque des questions sur le comment, le pourquoi et le lieu de notre “transfert”, et sur le comment et le lieu de notre intégration ! ? Justement maintenant que le gouvernement actuel est totalement dépassé par ce problème et par sa résolution, nous nous appelons expulsés et personnes chassées de chez nous de plein droit ! […] Je refuse avec gratitude de gravir un échelon pour devenir au plus tôt un État rattaché à la République soviétique. J’exprime ouvertement et clairement ce que toute personne honnête se doit d’avouer. Car une Allemagne sans la Ruhr et d’autant plus sans ses territoires est-allemands ne peut pas et ne pourra pas être capable d’exister199. »
Selbstbild200 et Fremdbild201 : les mots de la précarité
101Entre 1945 et le début des années 1950, deux discours se partagent l’espace public autorisé : l’un, politique et idéologique, préconise un redressement rapide du niveau de vie et donc une assimilation rapide des expulsés, par le travail et l’augmentation de la production. Le premier président de la RDA, Wilhelm Pieck, résume en été 1949 le travail accompli depuis 1945 et dresse un tableau optimiste de la future RDA :
« Qu’il est tout à fait possible d’aider les Umsiedler dans leur détresse, cela nous l’avons prouvé en SBZ. Bien entendu de grandes difficultés ont du être surmontées, et la situation de la population locale n’est pas idéale et beaucoup doit encore être fait, pour les pourvoir en nourriture, vêtements et logement de manière satisfaisante. Mais à travers le nouvel ordre démocratique, notre plan économique biennal et l’augmentation de la productivité agricole et industrielle, à travers notre mouvement d’activistes : travailler plus pour mieux vivre, les conditions préalables ont été posées202. »
102Le second discours est porté par les échelons administratifs moins élevés et, du moins jusqu’à la fin des années 1940, moins politisés et plus prudents quant à la prédiction d’une rapide amélioration des conditions de vie. Ce discours frappe par la dureté des termes employés, et par le manque de perspectives offertes aux expulsés. En janvier 1948, Ernst Busse203 publie l’article « Eine neue Heimat - Wir schaffen sie204 ! » dans la revue Neue Heimat. Malgré le titre, il prévient les expulsés :
« Première prise de conscience nécessaire à tous les Allemands : nous allons habiter et devoir vivre ici ! Ce sera une vie modeste avec beaucoup de soucis et d’inquiétudes. Nous allons devoir payer, avec intérêts et intérêts des intérêts, pour la culpabilité que 12 ans de régime hitlérien font porter au peuple allemand. Geindre et se plaindre en pleurnichant ne tient pas face à la grande Histoire. »
103 Not, grosse Schwierigkeiten, Sorgen, des mots qui dans le quotidien des expulsés saxons sont relayés par d’autres, plus administratifs : Arbeitsunfähig, Hilfsbedürftig, Schwerbeschädigt voire Schwerstbeschädigt, Totalgeschädigte. Les expulsés eux-mêmes décrivent leur situation différemment, eux qui ont l’impression d’être des Bittsteller, Bettler, Menschen zweiter Klasse, Allesverlierer, Eindringlinge, als « Polacken » beschimpft, comme ils le font remarquer dans leurs correspondances.
104Au-delà du vocabulaire utilisé et de l’instrumentalisation politique de la question de l’intégration, les termes utilisés pour qualifier les comportements et l’aspect des expulsés frappent par leur dureté. Des soldats de retour de captivité, notamment les « heimatlose Heimkehrer », sont accusés de mettre en scène leur dénuement à des fins égoïstes : « Une minorité de Heimkehrer revient dans son pays avec des attentes totalement erronées, et pense pouvoir jouer ici le rôle du martyr ; d’autres ne s’entretiennent pas de manière volontaire et restent sales afin de provoquer la compassion de la population et recevoir des aides supplémentaires205. » À tous les niveaux administratifs, en cas de difficultés ou de manque de résultats, la responsabilité des lenteurs du processus d’intégration est repoussé vers les réfugiés : en raison de leurs origines, « nous ne pouvons pas fermer les yeux devant le fait que la plupart des Umsiedler présents dans les transports présentent un niveau culturel et professionnel faible206 », de leur manque de volonté, Arbeitsunwillig, unqualifiziert, zu alt, « aversion contre la formation professionnelle207 », ou tout simplement de leur vie passée : « Dans ce contexte, nous ne devons pas oublier que les Umsiedler, surtout ceux issus des régions rurales des anciennes Sudètes, de Silésie, Prusse orientale etc. n’ont peutêtre jamais ou rarement quitté leur petit hameau, sauf pour atteindre la commune la plus proche208. »
105Ces reproches reflètent aussi le découragement de certaines autorités ou des responsables face aux difficultés de la tâche qui leur a été assignée et leur manque chronique de moyens ou de solutions. Mais il ne faut pas sous-estimer la portée politique de certaines critiques. Dans son dictionnaire des termes propres au régime du SED, Ulrich Weißberger rappelle la forte symbolique des termes relatifs au travail et surtout à l’absence de travail, et que la stigmatisation des « Arbeitsscheu209 » ou des « Arbeitsbummelanten210 » n’est pas propre au régime est-allemand mais a servi de prétexte à la déportation de milliers de personnes dans des camps de travail ou de « rééducation », non seulement par le régime nazi mais aussi par l’URSS. L’article 12 de la constitution soviétique de 1936 précise : « Art. 12. – Le travail, en URSS, est pour chaque citoyen apte au travail un devoir et une question d’honneur selon le principe : “Qui ne travaille pas, ne mange pas.” » En URSS se réalise le principe du socialisme : « De chacun selon ses capacités, à chacun selon son travail. » Paradoxalement, du moins pour un régime ouvertement athée, cette expression de la valorisation du travail par les régimes communistes et fascistes trouve son origine dans les écrits religieux, qui plus est selon les mêmes termes : « Si quelqu’un ne veut pas travailler, qu’il ne mange pas non plus211 ! »
Notes de bas de page
1 M. Schwartz, « Umsiedler und Altersarmut : Zur sozialen Notlage vertriebener alter Menschen in der SBZ und frühen DDR », intervention du 29 novembre 2005 dans le cadre du cycle de cours « Wertvolles Alter – gefährliches Alter » organisé par le séminaire de post-doctorants « Alter-Geschlecht-Gesellschaft » et par le centre interdisciplinaire d’études sur le genre et les femmes de l’université Ernst-Moritz-Arndt à Greifswald.
2 D’après l’historien G. Mosse, De la Grande Guerre au totalitarisme : la brutalisation des sociétés européennes, Paris, Hachette Littératures, 1999.
3 « Principe de rendement » et « principe d’assistance », D. Hoffmann, « Leistungsprinzip und Versorgungsprinzip : Wiedersprüche der DDR-Arbeitergesellschaft », in D. Hoffmann et M. Schwartz (dir.), Sozialstaatlichkeit in der DDR, op. cit., p. 89-113.
4 « Réfugiés et pauvreté dans la vieillesse : de la situation sociale critique des personnes âgées expulsées en zone d’occupation soviétique et au début de la RDA. »
5 Milice populaire allemande créée le 18 octobre 1944 (en référence à la bataille des Nations du 16 au 19 octobre 1813 à Leipzig contre les armées napoléoniennes). Chargée de soutenir la Wehrmacht sur le sol allemand, la milice est composée de l’arrière-ban (ou « Landsturm » en 1813) c’est-à-dire d’anciens combattants de la Première Guerre mondiale, de membres de la jeunesse hitlérienne et des hommes jugés inaptes au service armé.
6 La Saxe est la première région à reprendre ces versements, il faut attendre 1946 dans les autres régions de la SBZ, in M. Schwartz, « Umsiedler und Altersarmut : Zur sozialen Notlage vertriebener alter Menschen in der SBZ und frühen DDR », Greifswald, 29 novembre 2005.
7 I. Schwab, « Neue Heimat – Neues Leben » ?, op. cit., p. 25.
8 Barch DQ2/3391, Im Namen der Heimatvertriebenen an den Herrn Präsidenten der DDR Wilhelm Pieck, Berlin, 21 décembre 1949.
9 Ces chiffres ne concernent que la Saxe, les montants varient selon les régions, N. Schrammek, op. cit., p. 170.
10 « Instauration d’un système unique de mesures pour l’amélioration de l’assurance sociale en SBZ. »
11 Ibid., p. 171.
12 Littéralement « retraite de la faim », plainte récurrente surtout de la part des personnes qui bénéficiaient d’une retraite élevée désormais limitée à 90 Reichsmark, doléances rapportées par le maire de Riesa. Ce montant maximum reste dans un premier temps une exception saxonne, et touche même les anciens employés de la Reichsbahn qui bénéficiaient jusque-là d’une retraite bien supérieure, in N. Schrammek, op. cit., p. 171.
13 M. Schwartz, « Umsiedler und Altersarmut: Zur sozialen Notlage vertriebener alter Menschen in der SBZ und frühen DDR », Greifswald, 29 novembre 2005.
14 Barch DQ2 3391, Robert Köbe an die DWK, Halberstadt, 27 novembre 1949.
15 Le nom allemand de la ville est utilisé par l’auteur de la lettre, et non le nom polonais Wroclaw. À cette date, et malgré l’interdiction pour les réfugiés d’utiliser la dénomination allemande des territoires désormais polonais, se pose alors la question de l’efficacité réelle d’un tel interdit dans la sphère privée et même au-delà, s’agissant d’une lettre adressée à une administration centrale allemande et à son directeur Heinrich Rau, membre du SED.
16 La lettre est postérieure à la réforme monétaire du 23 juin 1948 dans la SBZ, cependant jusqu’à 70 Reichsmark par personne, l’échange se faisait dans un rapport 1 pour 1.
17 N. Schrammek, op. cit., p. 171.
18 StAL StVuR (1) no 7642, Schreiben des Direktors des Leipziger Sozialamtes an die LRS, 20 septembre 1949.
19 N. Schrammek, op. cit., p. 172.
20 Ancienne ville de Prusse orientale, elle est aujourd’hui située en Lituanie et porte le nom de « Klaipéda ».
21 Barch DQ2 3391, Wilhelm Wiesenberg an den Herrn Ministerpräsidenten Grotewohl, Hemstedt, 27 octobre 1949.
22 N. Schrammek, op. cit., p. 172.
23 N. Schrammek, op. cit., p. 172.
24 SächsHStA 11377 LRS, MdI no 2307, Betreff Festsetzung von Renten für Personen die keine Ausreichenden Versicherungsnachweise besitzen, Regierung der DDR, MdI Abteilung Bevölkerungspolitik an das MdI der LRS, Berlin, 7 mai 1952.
25 « Qu’une grande partie des anciens Umsiedler ne soit entravée dans son assimilation par la recherche de tels témoins. »
26 Idem.
27 M. Schwartz, « Umsiedler und Altersarmut: Zur sozialen Notlage vertriebener alter Menschen in der SBZ und frühen DDR », Greifswald, 29 novembre 2005.
28 « La politique financière du régime nazi avait vidé les caisses du Reich, mais aussi des Länder, des cantons et des villes. […] Le versement de pensions et d’aides sociales devait donc être stoppé dans un premier temps en raison de faillite allemande », M. Wille (dir.), Die Vertriebenen in der SBZ/DDR – Dokumente, Band 3, op. cit., p. 149.
29 Idem.
30 I. Schwab, op. cit., p. 114.
31 Idem.
32 Littéralement « budget d’urgence ».
33 SächsHStA 11375 Sächsischer Landtag no 49, LRS Hauptabteilung Umsiedler an die SMAS, Ausschuss für Arbeit und Sozialfürsorge, Allgemeiner Schriftwechsel 1947-1950, 1947.
34 Idem.
35 Idem.
36 L’auteur rappelle que l’augmentation soudaine de l’année 1948 est liée au durcissement de la politique sociale notamment vis-à-vis des femmes désormais exclues de certaines aides afin de les pousser sur le marché du travail, in M. Boldorf, « Fürsorgeunterstützung in Deutschland unter dem Einfluss der Zwangsmigrationen der Nachkriegszeit (1945-1952) », in Geglückte Integration ?, op. cit., p. 233.
37 M. Schwartz, « Umsiedler und Altersarmut: Zur sozialen Notlage vertriebener alter Menschen in der SBZ und frühen DDR », Greifswald, 29 novembre 2005.
38 Barch DQ2/2072, Niederschrift über die Sitzung der Frauensacharbeiterinnentagung am 4 Juni 1948 im Arbeitsamt Flöha, Flöha, 7 juin 1948.
39 Barch DO2/107, Beschluss des Zentralsekretariats, BetreffWeiterführung des Assimilationsprozesses der Umsiedler, Berlin, 11 novembre 1948.
40 Terme parfois traduit par « péréquation », mais qui désigne exclusivement la loi du même nom entrée en vigueur le 1er septembre 1952 en RFA et qui concerne les expulsés mais aussi les victimes des bombardements. Jusqu’à la construction du Mur de Berlin, cette loi est à l’origine de la part importante d’expulsés parmi les « Republikflüchtlinge ».
41 « Ce devait être ma propre prévoyance retraite. Mais rien ne s’est passé comme prévu. » Le réfugié Wilhelm Wiesenberg déplore la perte de ses deux maisons (« zwei schuldenfreie Stadtgrundstücke ») et autres avoirs qui devaient assurer une rente à l’artisan lorsqu’il ne pourrait plus travailler, in Barch DQ2 3391, Wilhelm Wiesenberg an den Herrn Ministerpräsidenten Grotewohl, Hemstedt, 27 octobre 1949.
42 N. Schrammek, op. cit., p. 170.
43 L’article 10b précise les biens en question : « Les édifices et les terres, les marchandises, le mobilier, les pièces de monnaie, les lingots et moyens de paiement, les avoirs bancaires ou autres, les créances, les actions et parts… », in idem.
44 N. Schrammek, op. cit., p. 171.
45 Barch DQ2 3391, Wilhelm Wiesenberg an den Herrn Ministerpräsidenten Grotewohl, Hemstedt, 27 octobre 1949.
46 Neue Zeit, 14 novembre 1948, in M. Wille (dir.), Die Vertriebenen in der SBZ/DDR - Dokumente, Band 3, op. cit., p. 319-320.
47 SächsHStA KT/KR, Glauchau 1870, Beschwerdeschreiben eines ostpreußischen Bauern an die ZVU, 26 octobre 1945, in A. Thüsing et W. Tischner, op. cit., p. 404-409.
48 SächsHStA LRS MdI 2644, Brief des heimatlosen Heimkehrers Emanuel Plewa an die LRS Dresden, 9 octobre 1947, in ibid., p. 412-415.
49 N. Schrammek, op. cit., p. 170.
50 Ibid., p. 171.
51 Archiv der Diözese Görlitz, Gedanken zur Flüchtlingsseelsorge, 1947, in A. Thüsing et W. Tischner, op. cit., p. 325-326.
52 Lastenausgleich und Steuergesetzgebung (Auszug au seiner Ausarbeitung der Hauptabteilung Umsiedler der DVdI), 22 juillet 1948, in M. Wille (dir.), Die Vertriebenen in der SBZ/DDR – Dokumente, Band 3, op. cit., p. 286-288.
53 Idem.
54 « Il est bien entendu exclu d’accéder aux demandes d’indemnisation de ces personnes », in M. Wille (dir.), Die Vertriebenen in der SBZ/DDR – Dokumente, Band 3, op. cit., p. 286-288.
55 Barch DO2/82, Befehl no 304 des Obersten Chefs der SMAD Marschall Sokolowski betreffs Unterstützungen an Umsiedler, Berlin, 15 octobre 1946.
56 Barch DO2/82, Runderlass no 117 des Präsidenten der Deutschen Zentralfinanzverwaltung Henry Meyer betreffs Unterstützungen an Umsiedler, Berlin, 31 octobre 1946.
57 À l’Ouest, une loi comparable entre en vigueur le 18 août 1949, la loi sur l’aide d’urgence, « Soforthilfegesetz ». Basée sur une taxation de certains revenus pour venir en aide aux plus démunis (réfugiés de SBZ, expulsés, victimes du nazisme ou des bombardements), elle n’a pas été contestée par la population et augure la mise en place du « Lastenausgleich » au début des années 1950.
58 Aktennotiz der ZVU betreffs Ausführungsbestimmungen, Berlin, 22 février 1947, in M. Wille (dir.), Die Vertriebenen in der SBZ/DDR – Dokumente, Band 3, op. cit., p. 196.
59 Aktennotiz über eine Besprechung von Vertretern der ZVU und der Deutschen Zentralfinanzverwaltung in Bezug auf die Umsetzung des Befehls no 304, Berlin, 14 mars 1947, in ibid., p. 197-198.
60 Schreiben des Stadtauschusses der Volkssolidarität Leipzig an die ZVU, Leipzig, 12 octobre 1947, in ibid., p. 200.
61 I. Schwab, op. cit., p. 155.
62 I. Schwab, op. cit., p. 155.
63 Hausinternes Schreiben der ZVU, Berlin, 18 septembre 1947, in M. Wille (dir.), Die Vertriebenen in der SBZ/DDR – Dokumente, Band 3, op. cit., p. 200.
64 Schreiben des Stadtausschusses der Volkssolidarität Leipzig an die ZVU, Leipzig, 12 octobre 1947, in idem.
65 Schreiben der Deutschen Zentralfinanzverwaltung an die Landesregierrungen betreffs verschärfter Festlegungen zur Unterstützung der Vertriebenen, Berlin, 22 octobre 1947, in idem.
66 Schreiben des Leiters der Hauptabteilung Umsiedler in der Deutschen Verwaltung des Innern an den Chef der Abteilung für Umsiedler und Zivilangelegenheiten der Kommandantur-Dienstverwaltung der SMAD, Berlin, 7 octobre 1948, in ibid., p. 212.
67 Les versements de l’aide sont étalés sur trois mois. Le 31 décembre 1948, les administrations ne peuvent plus recevoir de demandes, les derniers versements ont alors lieu en mars 1949.
68 Commission économique allemande, administration centrale allemande en SBZ créée le 7 juin 1947 (ordre 138 de la SMAD) et existant jusqu’au 7 octobre 1949, date de la fondation de la RDA.
69 Barch DQ2/3756, Runderlass no 314 der Deutschen Wirtschaftskommission betreffs Gewährung von Unterstützungen an Umsiedler, Berlin, 28 décembre 1948.
70 Aufruf des Landrates des Landkreises Weimar, in M. Wille (dir.), Die Vertriebenen in der SBZ/DDR – Dokumente, Band 3, op. cit., p. 199.
71 Schreiben der Umsiedlerabteilung des Landratsamtes Dessau-Köthen betreffs Benachteiligung der Vertriebenen durch die Währungsreform, Köthen, 5 juillet 1948, in ibid., p. 209.
72 Les expulsés issus de Pologne reçoivent en effet 500 RM de la part du gouvernement polonais, alors que la monnaie ne possède plus aucune valeur, SächHStA 11377 LRS, MdI no 2234, Schreiben der Deutschen Verwaltung des Innern an die Deutsche Wirtschaftskommission, Berlin, 13 juillet 1948.
73 SächsHStA 11377 LRS, MdI no 2746, Bericht über die Lage der Umsiedler in Sachsen, Ministerium des Innern des Landes Sachsen an die Sowjetische Kontrollkommission, Dresden, 30 septembre 1950.
74 S. Donth, op. cit., p. 422.
75 M. Boldorf, « Fürsorgeunterstützung », in Geglückte Integration?, op. cit., p. 239.
76 Ibid., p. 246.
77 La loi de 1950, étudiée précédemment, constitue l’un des aspects les plus étudiés par l’historiographie et ne sera pas explicitée plus largement ici. Voir à ce propos entre autres : M. Schwartz, Vertriebene und « Umsiedlerpolitik », op. cit., p. 893-1117 (pour la RDA) et S. Donth, op. cit., p. 377-391 (pour la Saxe).
78 N. Schrammek, op. cit., p. 294.
79 Barch DO2/96, Neue Heimat, Vorwort: « ist die Flüchtlingsfrage wirklich unlösbar? », Präsident Engel, avril 1948.
80 Expression utilisée dans l’article du journal Le Monde : « Les vieux migrants vivent dans la tourmente », 25 août 2011.
81 « Anciennement à leur compte/indépendants, durablement déclassés. »
82 Ce discours est tenu devant des activistes de la « Nationale Front », qui regroupe les partis et les organisations de masse de la RDA, qui ont vite fait de déclarer que cette opinion est le fait d’un cas particulier, in M. Schwartz, « Umsiedler und Altersarmut : Zur sozialen Notlage vertriebener alter Menschen in der SBZ und frühen DDR ».
83 StAL LVZ no 138, « Unsere Hilfe für die Umsiedler », Rudolf Belke, 1er août 1946 (le communiste Rudolf Belke a été nommé responsable de la section « Sozialfürsorge » du comité central du SED (ZK) par Walter Ulbricht début 1946).
84 Barch DO2/50, Der Rat der Stadt Riesa an die LRS, Unterbringung und Versorgung der Neubürger, Dresden, 30 novembre 1946.
85 StAL StVuR (1) no 2040, Wohlfahrtsamt an die LRS Sachsen, 17 décembre 1945.
86 « Gebrechlich » peut signifier infirme, frêle ou sénile selon la traduction choisie.
87 Barch DO2/54, An den Chef der Zivilangelengenheiten der SMAD, BetreffVerteilung der Transporte aus dem Kaliningrader Gebiet, Erläuterungen für den Monat Oktober, Berlin-Wilhelmsruh, 16 novembre 1948.
88 « Épuisement. »
89 « Ce qui était frappant, c’est que les Umsiedler de Hongrie développaient des pneumonies à la suite de grippes ou angines, bénignes pour la population locale », SächsHStA LRS MdI 2372, Tätigkeitsbericht für die Zeit vom 1.1.48 bis 31.5.48, Schriftwechsel innerhalb des Ministeriums für Arbeit und Sozialfürsorge, An die LRS, Dresde, 9 juin 1948.
90 Idem.
91 D’après le rapport, les personnes sont décédées d’infarctus, de sous-nutrition, d’épuisement ou d’une rupture d’anévrisme, SächsHStA 11377 LRS, MdI no 894, Rechenschaftsbericht der Direktion der Abteilung für deutsche Umsiedler für das Jahr 1947, Anlage zum Jahresbericht 1947, Sanitätsabteilung, 8 janvier 1948.
92 StAL StVuR (1) no 7638, Volkskommissariat der UdSSR, Abt. Kommandantendienst der SMAS an den Präsidenten des Landes Sachsen, 26 novembre 1945.
93 StAL StVuR (1), no 7639, Sozialamt an Zentralkommandantur Leipzig, Leipzig, 11 juillet 1947.
94 StAL StVuR (1), no 7639, Sozialamt an LRS, Leipzig, 7 août 1947.
95 Barch DO 2/30, ZVU, Protokoll der Arbeitskonferenz am 1. Februar 1946, in M. Schwartz, « Umsiedler und Altersarmut: Zur sozialen Notlage vertriebener alter Menschen in der SBZ und frühen DDR ».
96 SächsHStA 11375 Sächsischer Landtag no 47, Protokoll der Sitzung der Ausschüsse « Arbeit und soziale Fürsorge » und « Gesundheitswesen », Dresde, 6 février 1947.
97 StAL StVuR (1), no 7639, Sozialamt an LRS, Leipzig, 19 août 1947.
98 StAL StVuR (1) no 7639, Sozialamt an die LRS, Betreff: statistische Angaben über alte und zerbrechliche Neubürger, Leipzig, 19 août 1947.
99 SächsHStA LRS MdI 2372, Tätigkeitsbericht für die Zeit vom 1.1.48 bis 31.5.48, Schriftwechsel innerhalb des Ministeriums für Arbeit und Sozialfürsorge, An die LRS, Dresde, 9 juin 1948.
100 SächsHStA 11377 LRS, MdI no 894, Rechenschaftsbericht der Direktion der Abteilung für deutsche Umsiedler für das Jahr 1947, Unterbringung der Alten und Gebrechlichen.
101 La fille de Wilhelm Wiesenberg par exemple perçoit 20M d’aides sociales pour prendre soin de son père et cela l’empêche de travailler, in Barch DQ2 3391, Wilhelm Wiesenberg an den Herrn Ministerpräsidenten Grotewohl, Hemstedt, 27 octobre 1949.
102 Barch DO 2/1, Chwalczyk an Vogt, 13 mai 1948, in M. Schwartz, « Umsiedler und Altersarmut: Zur sozialen Notlage vertriebener alter Menschen in der SBZ und frühen DDR ».
103 SächsHStA 11375 Sächsischer Landtag no 49, Ausschuss für Arbeit und Sozialfürsorge an das Büro des Herrn Ministerpräsidenten, BetreffBeschwerde des Siegfried Götz über das Altersheim Rodewisch/Obergöltzsch, Dresde, 9 avril 1947.
104 SächsHStA 11375 Sächsischer Landtag no 47, Protokoll über die Sitzung des Ausschusses für Arbeit und Sozialfürsorge, Referat Schwerbeschädigte, Dresde, 27 novembre 1947.
105 SächsHStA 11375 Sächsischer Landtag no 49, LRS, Hauptabteilung Sozialversicherung und Sozialfürsorge an die Räte der Städte Dresden, Leipzig, Chemnitz, Zwickau, Plauen und Görlitz […] Betreff Zweijahresplan und Sozialfürsorge, Dresde, 2 novembre 1948.
106 SächsHStA 11375 Sächsischer Landtag no 49, Ausschuss für Arbeit und Sozialfürsorge an das Büro des Herrn Ministerpräsidenten, Betreff Beschwerde des Siegfried Götz über das Altersheim Rodewisch/Obergöltzsch, Dresde, 9 avril 1947.
107 C. Hein, Landnahme, Frankfurt am Main, Suhrkamp, 2004, p. 18-19.
108 R. Engel, « Ist die Flüchtlingsfrage wirklich unlösbar? », Neue Heimat, Jahrgang 2, Heft 6, p. 4.
109 Barch DO2/50, Paul Krause, « Was soll nun aus uns Flüchtlingen werden? », Bad Wilmack, non daté.
110 N. Schrammek, op. cit., p. 177.
111 « La famine et la mort omniprésente », V. Klemperer, So sitze ich denn zwischen allen Stühlen, Bd. 1, Aufbau Verlag, Berlin, p. 411.
112 H. Vondermur, « Das Gesicht des Umsiedlers », Neue Heimat, Jahrgang 2, Heft 6, p. 11.
113 « Fruit de l’éducation nazie. »
114 Extrait du témoignage de Monsieur K., né en 1924 en Hongrie et expulsé en 1948 vers la Saxe, in A. Thüsing et W. Tischner, op. cit., p. 436-454.
115 Les points d’exclamations proviennent du document original, In SächsHStA 11377 LRS, MdI no 2371, Schriftwechsel innerhalb des Ministeriums für Arbeit und Sozialfürsorge, LRS an den Rat der Stäte Dresden, Leipzig, Chemnitz, Zwickau, Plauen und Görlitz…, Dresde, 11 novembre 1946.
116 S. Donth, op. cit., p. 351.
117 « Nécessitant de l’aide/un soutien. »
118 S. Donth, op. cit., p. 350.
119 StAL StVuR (1) 7642, LRS an OBM von Leipzig, 23 août 1949, in I. Schwab, op. cit., p. 116.
120 S. Donth, op. cit., p. 352.
121 SächsHStA 11375 Sächsischer Landtag no 49, Landesregierung Sachsen, Ministerium für Arbeit und Sozialfürsorge, An die Räte der Städte Dresden, Leipzig, Chemnitz, Zwickau, Plauen und Görlitz […], Betreff: Zweijahresplan und Sozialfürsorge, Dresde, 2 novembre 1948.
122 SächsHStA 11377 LRS, MdI no 2746, Ministerium des Innern des Landes Sachsen, An die Sowjetische Kontrollkommission, Betreff Bericht über die Lage der Umsiedler im Land Sachsen, Dresde, 30 septembre 1950.
123 S. Donth, op. cit., p. 352.
124 SächsHStA 11375 Sächsischer Landtag no 47, Protokoll über die Sitzung des Ausschusses für Arbeit und Sozialfürsorge, Dresde, 27 novembre 1949.
125 StAL StVuR (1) no 2040, Dezernat Arbeit und Sozialfürsorge, du 4 septembre 1945 au 31 décembre 1950.
126 StAL StVuR (1) no 2037, Abschrift der LRS Sachsen, Ministerium für Arbeit und Sozialfürsorge an die Städte Leipzig, Görlitz, Dresden, 15 septembre 1947.
127 « Et quelle est ton opinion? », in Barch DO2/96, Neue Heimat, « Gibt’s kein Umsiedlerproblem? », W. Pommer.
128 Barch DQ1/8831, Schreiben des Präsidenten der ZVU an den Präsidenten der Deutschen Verwaltung für Land und Forstwirtschaft, Berlin, 27 janvier 1948, in M. Wille (dir.), Die Vertriebenen in der SBZ/DDR – Dokumente, Band 2, op. cit., p. 348.
129 Idem.
130 Barch DQ2/3395, Landesarbeitsamt Sachsen, Sonderbericht des LAA Sachsen über die im Landesarbeitsamtsbezirk Sachsen befindlichen Umsiedler, Dresde, 4 février 1946.
131 M. Wille (dir.), Die Vertriebenen in der SBZ/DDR – Dokumente, op. cit., p. 165.
132 Roman en partie autobiographique, comme son narrateur, l’auteur est né en 1953 à Berlin-Est en tant que fils et petit-fils de réfugiées des Sudètes : R. Jirgl, Die Unvollendeten, Carl Hanser Verlag, Munich, 2003.
133 Ibid., p. 8
134 « Pas de logement – pas de travail, pas de travail – pas de logement », in ibid., p. 10.
135 Ibid., p. 11.
136 Ibid., p. 12.
137 Journal intime de F., in N. Schrammek, op. cit., p. 168.
138 Neue Heimat, mai 1947.
139 SächsHStA 11377 LRS, MdI no 2212, Referat Landesumsiedlerausschusssitzung, Sonder-Informationsbericht Kreis Dippoldiswalde, Frau Röse, 1er novembre 1947.
140 SächsHStA 11377 LRS, MdI no 894, Rechenschaftsbericht der Direktion der Abt. f. deutsche Umsiedler für das Jahr 1947.
141 SächsHStA 11377 LRS, MdI no 894, LRS, Abteilung Bau und Wohnungswesen an die Hauptabteilung Umsiedler, Betr. Wohnraumerhebung (Stichtag 31.12.47), Dresde, 14 février 1948.
142 SächsHStA 11377 LRS, MdI no 2975, Abteilung Einbürgerung, Zum 1. Halbjahres-Bericht 1949, Dresde, 2 juillet 1949.
143 Idem.
144 N. Schrammek, op. cit., p. 250.
145 N. Schrammek, op. cit., p. 250.
146 « Il est aisé de comprendre que cette situation provoque souvent des frictions et même des conflits entre les populations d’origine et les nouvelles qui vivent ensemble », StAL StVuR (1) no 7639, Rat der Stadt Leipzig an die Zentralkommandantur Leipzig, Betreff : Beschwerde der Umsiedler, Leipzig, 11 juillet 1947.
147 StAL StVuR (1) no 7639, Rat der Stadt Leipzig an die Zentralkommandantur Leipzig, Betreff : Beschwerde der Umsiedler, Leipzig, 11 juillet 1947.
148 Idem.
149 M. Schwartz, Vertriebene und « Umsiedlerpolitik », op. cit., p. 918-973.
150 Ibid., p. 919.
151 Idem.
152 Ibid., p. 920-935. Pour la Saxe : N. Schrammek, op. cit., p. 201-202. La CDU saxonne craint surtout une utilisation politique de ce droit de confiscation, par exemple comme une menace du SED local contre des opposants politiques.
153 Voir à ce propos Barch DO2/1, Ortsgesetze Auerbach, Böhlitz-Ehrenberg, Chemnitz, Cunewalde, Ebersbach, Görlitz, Pirna, Leipzig, Lützschena, Reichenbach, 1946-1947.
154 Région minière frontalière entre la Saxe et la Bavière.
155 Barch DO2/1, Sozialamt Reichenbach an die ZVU, Betreff Wohnungsfürsorge für Umsiedler, Reichenbach, 3 janvier 1947.
156 « Le droit de propriété n’est pas remis en cause » Barch DO2/1, Sozialamt Reichenbach an die ZVU, Betreff Wohnungsfürsorge für Umsiedler, Reichenbach, 3 janvier 1947.
157 N. Schrammek, op. cit., p. 201-202.
158 Protocole d’une réunion interne de l’Umsiedleramt à Flöha en novembre 1947, in ibid., p. 202.
159 SächsHStA 11375 Sächsischer Landtag no 47, Ausschuss für Arbeit und Sozialfürsorge/Ausschusssitzungen 1947, Niederschrift der Sitzung am 23. April 1947, betreffBearbeitung des Antrages no 113 : Gesetz betreffend Soforthilfe für Umsiedler und Bombengeschädigte (CDU-Fraktion) und Antrag Drucksache no 140 : Der Landtag wolle beschließen die Regierung zu ersuchen, ein Gesetz über das Flüchtlingswesen im Lande Sachsen zu Beschlussfassung vorzulegen (LDP-Fraktion).
160 Schrammek N., op. cit., p. 204-205.
161 SächsHStA 11375 Sächsischer Landtag no 47, Ausschuss für Arbeit und Sozialfürsorge/Ausschusssitzungen 1947, Niederschrift der Sitzung am 23. April 1947, betreffBearbeitung des Antrages no 113: Gesetz betreffend Soforthilfe für Umsiedler und Bombengeschädigte (CDU-Fraktion) und Antrag Drucksache no 140: „ Der Landtag wolle beschließen die Regierung zu ersuchen, ein Gesetz über das Flüchtlingswesen im Lande Sachsen zu Beschlussfassung vorzulegen. (LDP-Fraktion).
162 À ce propos : Schwartz M., Vertriebene und « Umsiedlerpolitik », op. cit., et Schrammek N., op. cit.
163 Barch DO2/1, Ortsgesetze Auerbach, Böhlitz-Ehrenberg, Chemnitz, Cunewalde, Ebersbach, Görlitz, Pirna, Leipzig, Lützschena, Reichenbach, 1946-1947.
164 Idem.
165 Barch, DO 1/10, no 1, in M. Wille (dir.), Die Vertriebenen in der SBZ/DDR – Dokumente, Band 1, op. cit., p. 140.
166 Barch DO 1/10, no 1, in M. Wille (dir.), Die Vertriebenen in der SBZ/DDR – Dokumente, Band 1, op. cit., p. 140.
167 M. Wille (dir.), Die Vertriebenen in der SBZ/DDR – Dokumente, Band 3, op. cit., p. 166.
168 « Aufruf des Präsidenten der Landesverwaltung Mecklenburg-Vorpommern im September 1945 », in ibid., p. 165.
169 « Die Neubürger unter uns » (Auszüge aus einem Pressebeitrag der LDPD), février 1947, in ibid., p. 244.
170 StAL StVuR (1) no 7638, Landesverwaltung Sachsen, Abteilung Soziale Fürsorge an die Stadträte, Amt für deutsche Umsiedler […], BetreffMangelhafte Unterbringung und Versorgung der Neubürger, Dresde, 11 novembre 1946.
171 Aufruf des Landesvereins für Innere Mission des Evangelisch-Lutherisch Landeskirchenamtes Sachsens zur Durchführung einer allgemeinen Kirchenkollekte zu Gunsten der Flüchtlingshilfe am 9.9.1945, in M. Wille (dir.), Die Vertriebenen in der SBZ/DDR – Dokumente, Band 3, op. cit., p. 165.
172 Die Evangelisch-lutherische Landeskirche Sachsen hilft Vertriebenen, in ibid., p. 164.
173 SächsHStA 11377 LRS, MdI no 324, Pfarramt Kamenz, An den Kreisrat Kamenz, Abteilung Amt für Umsiedler Betreff Jahresbericht für die SMAS und LRS, Kamenz, 10 décembre 1948.
174 « Preuve vivante de la confiance et un acte positif en faveur de la paix », Schreiben Der Kommission zur Verteilung von ausländischen Spenden innerhalb der SMAD im Juli 1946, in M. Wille (dir.), Die Vertriebenen in der SBZ/DDR – Dokumente, Band 3, op. cit., p. 188.
175 « Puissances victorieuses. »
176 Die ZVU lehnt private Hilfe für ostpreußische Vertriebene durch ein amerikanisches Hilfswerk ab, décembre 1947, in M. Wille (dir.), Die Vertriebenen in der SBZ/DDR – Dokumente, Band 3, op. cit., p. 204
177 « C’est la solidarité populaire : un livre illustré du paradis pour les enfants de la Volkssolidarität », Barch DY30/IV2/2.027/37, Das ist die Volkssolidarität.
178 « Donner de la joie, parer à la souffrance. »
179 À ce propos : P. Springer, Da konnt ich mich dann so’n bisschen entfalten : die Volkssolidarität in der SBZ/DDR 1945-1969, Francfort, Lang, 1999.
180 Réunion du comité central du KPD, 22 décembre 1945, in M. Wille (dir.), Die Vertriebenen in der SBZ/DDR-Dokumente. Band 3, op. cit, p. 32.
181 StAL Zeitgeschichtliche Sammlung 351, in I. Schwab, « Neue Heimat – Neues Leben »?, op. cit., p. 101.
182 « Offrir une nouvelle patrie à 16 millions de personnes ! », in StAL StVuR (1) no 7638, Entschluss des Bürgermeisters, 10 décembre 1945.
183 Quotidien social-démocrate fondé en 1890 en Thuringe et interdit en 1933. À partir d’août 1947, le journal reparait sous le contrôle du SED de Magdebourg, dont il devient l’organe officiel en 1952.
184 StAL StVuR (1) no 7638, Volksstimme no 33, 20 décembre 1945.
185 StAL StVuR (1) no 2040, Tätigkeitsbericht des Dezernats Arbeit und Sozialfürsorge, du 1er décembre 1949 au 15 mai 1950.
186 StAL StVuR (1) no 7638, Besprechung an der Zentralkommandatur, 5 novembre 1946.
187 Idem.
188 I. Schwab, « Neue Heimat – Neues Leben » ?, op. cit., p. 96.
189 StAL StVuR (1) no 7644, LRS, Landesarbeitsausschuss « Neue Heimat-Neues Leben » an Räte der Kreise und Städte, 19 août 1948.
190 StAL StVuR (1) no 7639, Aktion Neue Heimat – Neues Leben, 10 octobre 1948.
191 StAL, StVuR (1) no 7639, Sozialamt – Neubürgerausschuss, 11 juillet 1947.
192 StAL StVuR (1) no 7639, Aktion Neue Heimat-Neues Leben, du 16 au 24 octobre 1948.
193 StAL StVuR (1) no 7639, Aktennotiz des Sozialamtes Leipzig, 28 octobre 1948.
194 StAL StVuR (1) no 7642, Sozialamt Leipzig, 4 décembre 1948.
195 StAL StVuR (1) no 1465, Dezernat für Arbeit und Sozialfürsorge Leipzig, 5 Jahre Aufbauarbeit des Sozialamtes, mai 1945-mai 1950.
196 StAL StVuR (1) no 7642, Arbeitsausschuss « Neue Heimat-Neues Leben », 16 décembre 1948.
197 StAL, StVuR (1) no 7639, Kommentar eines jungen Heimatlosen, décembre 1948.
198 « Les nouveaux citoyens n’existent plus, seulement des citoyens ! », in StAL, StVuR (1) no 7639, SED an den Rat und das Sozialamt der Stadt Leipzig, 18 octobre 1948.
199 StAL StVuR (1) no 7639, Manifest eines Vertriebenen, 22 octobre 1948.
200 Littéralement « image » ou « conception » de soi, d’après N. Schrammek, Alltag und Selbstbild von Flüchtlingen und Vertriebenen, op. cit.
201 Littéralement « image » ou conception » de l’autre, imposée par l’autre.
202 Barch NY/4036/440, Institut für Marxismus-Leninismus beim ZK der SED, Fond: Wilhelm Pieck, Reden und Aufsätze, Juli-August 1949: Schafft den Umsiedlern eine neue Heimat (Blatt 1, Programm).
203 Ernst Busse (1897-1952), membre du KPD de la première heure, emprisonné dès 1934 en raison de ses activités politiques ; à partir de 1942 Kapo au camp de concentration de Buchenwald. Vice-président de l’administration régionale de Thuringe en 1945, il est peu à peu écarté de la vie politique en raison de son activité de Kapo puis emprisonné par la SMAD en avril 1950. Il meurt en 1952 dans un camp soviétique (Sonderlager). Les accusations portées contre lui dès avril 1946 par certains membres du SED semblent traduire les conflits d’influence entre les communistes de retour d’exil en URSS et ceux restés en Allemagne. Il est réhabilité en 1990 par le PDS (Partei des demokratischen Sozialismus), créé par les membres du SED à la suite de la chute du mur de Berlin. À la date de la publication de cet article, il est vice-président de l’administration allemande de l’agriculture et de l’exploitation forestière. À ce propos : L. Niethammer (dir.), Der « gesäuberte »
204 « La nouvelle patrie – nous allons la créer ! », in Barch DO2/96, Neue Heimat, janvier 1948.
205 SächsHStA 11377 LRS, MdI no 2750, An die SMA zu Herrn Oberleutnant Wolodin, Betreff Quartals-Bericht vom 1. Januar 1948 bis 31. März 1948, Dresde, 2 avril 1948.
206 SächsHStA 11377 LRS, MdI no 894, Rechenschaftsbericht der Direktion der Abteilung für deutsche Umsiedler für das Jahr 1947.
207 SächsHStA 11377 LRS, MdI no 2188, MdI des Landes Sachsen, Abteilung Bevölkerungspolitik, An die Kanzlei des Herrn Ministerpräsidenten des Landes Sachsen, Betr. Überprüfung der Kreise Niesky, Grimma und Meißen über die Durchführung des Gesetzes […] vom 6.12.51, Dresde, 19 janvier 1952.
208 SächsHStA 11377 LRS, MdI no 2212, Referat Landesumsiedlerausschusssitzung am 28 Februar 1948.
209 Voir l’article « Arbeitsscheu », in U. Weissgerber, Giftige Worte der SED-Diktatur. Sprache als Instrument von Machtausübung und Ausgrenzung in der SBZ und der DDR, LIT Verlag, Berlin, p. 61-65.
210 Voir l’article « Arbeitsbummelei », in ibid., p. 57-61.
211 Deuxième épître aux Thessaloniciens (3.1), Nouveau Testament. Traduction œcuménique, Le Cerf, Paris, 1989, p. 628.
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