Chapitre I. « Flucht und Vertreibung »
p. 27-38
Texte intégral
1Les termes « Flucht und Vertreibung », « fuite et expulsion », sont aujourd’hui deux expressions utilisées de pair, pour expliciter le caractère hétérogène du déplacement des populations allemandes à la fin de la Seconde Guerre mondiale, aussi bien au niveau chronologique que géographique. Ils désignent le déplacement forcé de 12 à 14 millions d’Allemands entre l’automne 1944 et le début des années 19501. La fuite et l’expulsion des minorités allemandes d’Europe centrale et orientale et des Allemands vivant en dehors des nouvelles frontières de 1945 s’inscrit dans le contexte de l’immédiat après-guerre et de la prise de conscience de la violence et des crimes nazis. Cette expulsion, qui provoque selon l’historien Heinz Nawratil « le plus grand déplacement forcé de population de l’histoire2 », doit aussi être replacée dans le contexte idéologique et politique du premier XXe siècle.
La question des minorités en Europe (1918-1940)
L’expulsion : un principe politique
2L’émergence du concept d’État-nation au milieu du XIXe siècle et la remise en question du caractère multi-ethnique des pays d’Europe centrale et orientale évoluent au début du XXe siècle vers une montée des tensions autour de la question des minorités et de leurs droits. L’idée d’une cohabitation pacifique de différentes communautés linguistiques et culturelles au sein d’une même nation s’efface au profit d’une instrumentalisation des populations dans les conflits frontaliers.
3La Première Guerre mondiale s’achève par le morcellement de l’Autriche-Hongrie et l’apparente victoire du principe wilsonien du « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ». Les traités de paix successifs, mis en place entre 1919 et 1920 prennent en compte la diversité et la complexité linguistique et ethnique de l’Europe centrale et orientale et la difficulté de créer des États-nations aboutis. Face à l’impossibilité de tracer des frontières englobant des États ethniquement homogènes, l’accent est mis sur le renforcement des droits des minorités présentes dans ces nouvelles entités politiques et administratives. La Société des Nations (SDN), créée par le traité de Versailles en 1919, se place en garante de ces droits, qu’ils soient linguistiques, administratifs ou politiques. Cependant, on admet en dernier recours le transfert de population comme moyen de pacification, lorsque les droits des peuples ne sont pas respectés ou lorsqu’un conflit armé semble se profiler. Cette idée de transfert et d’échange de minorités en vue de stabiliser des frontières ou d’éviter des conflits n’est pas nouvelle3. Cependant, un pas vers la normalisation d’une telle pratique est franchi le 30 janvier 1923 dans le cadre de l’article 142 du traité de Lausanne, qui décide d’un échange de population entre le Grèce et la Turquie. Près de deux millions de personnes sont ainsi transférées sous l’égide de la Société des Nations, co-signataire du traité. Les termes de « transfert » ou d’« échange » alors utilisés dans cette « convention sur l’échange des populations grecques et turques », dont une copie est déposée dans les archives françaises, cachent cependant le drame humain et la brutalité d’un mouvement de population vécu comme une expulsion. Dans l’immédiat après-guerre et au long des années 1920, cette pratique est l’exception et non la norme.
4En marge de ce mouvement forcé de population « approuvé » par la communauté internationale, l’expulsion et la déportation deviennent des instruments de pouvoir et de répression à l’encontre de certaines communautés. Ainsi, la déportation des Arméniens par les Turcs et les politiques soviétiques de déplacement de populations dans les années 1920 et 1930 explicitent cette instrumentalisation des populations et des minorités à des fins de stabilité sociale, ethnique et politique.
L’instrumentalisation de la question des minorités allemandes
La frontière germano-polonaise et les Sudètes : genèse d’un casus belli
5L’éveil d’un nationalisme allemand au cours du second XIXe siècle s’accompagne d’une politique de plus en plus agressive vis-à-vis des populations non germanophones, ou de confession et de culture différentes. Cette politique, portée tout d’abord par la Prusse puis par le Reich allemand, induit des mesures spécifiques à l’encontre des régions frontalières orientales, pour enrayer l’exode des populations vers les hauts-lieux industriels allemands, tels la Ruhr, Berlin ou la Haute-Silésie4. Après la fin de la Première Guerre mondiale et la réapparition d’un État polonais souverain, la frontière commune entre les deux pays et surtout la région silésienne deviennent l’abcès de fixation des tensions entre l’Allemagne, la Pologne et la Tchécoslovaquie. La Haute-Silésie, en raison de son industrie et de son rôle économique, devient le point de discorde entre Polonais et Allemands. Le plébiscite organisé sous la pression de la Grande-Bretagne et sous le contrôle de la SDN le 19 mars 1921 semble refléter la volonté de la population de rester liée à l’Allemagne5, mais conduit à la séparation de la région en deux entités, l’une polonaise et l’autre allemande. Tout au long de l’entre-deux-guerres, cette décision est à l’origine d’incessants conflits. En effet, la démarcation choisie pour scinder la Haute-Silésie repose moins sur la répartition linguistique et culturelle des populations que sur la volonté de garder l’industrie intacte sous autorité polonaise, afin d’affaiblir économiquement l’Allemagne.
6La nouvelle frontière orientale, jamais reconnue par l’Allemagne de Weimar, tient une place prépondérante dans la propagande nationaliste allemande en tant que « blutende Grenze im Osten6 ». La nouvelle minorité allemande devient un enjeu primordial pour les revendications territoriales allemandes, et reste discrètement soutenue matériellement et financièrement par l’État. En effet, le maintien de cette minorité sur le territoire polonais est la condition de toute future rétrocession de cette région à l’Allemagne : il s’agit donc d’éviter son départ vers l’Allemagne.
7Cette politique ne fait que renforcer la suspicion de l’État polonais à l’égard de cette population, qui est à ses yeux une « cinquième colonne » à la solde de l’Allemagne et qui doit être « polonisée » le plus rapidement possible. Si l’Allemagne devient membre de la SDN à partir de 1926, aux yeux de nombreux Allemands, cette dernière a déjà failli à sa mission de protection des minorités et précisément à l’encontre des Allemands de Silésie dont les droits auraient été bafoués. Lors de son arrivée au pouvoir le 30 janvier 1933, Adolf Hitler place la question des minorités allemandes au centre de sa stratégie politique. La présence de populations germanophones en dehors des frontières allemandes, avant tout en Tchécoslovaquie, en Pologne et en Autriche, justifie selon lui une révision des frontières allemandes. Le sort des Allemands de Haute-Silésie, qui n’ont selon lui pas été protégés par la SDN, est ainsi utilisé pour justifier le retrait allemand de l’organisation. De même, il reprend le concept du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes pour réclamer le rattachement des Sudètes et de l’Autriche au Reich. C’est l’Europe issue de la Première Guerre mondiale et du traité de Versailles qui est remise en question.
« Heim ins Reich » : de la Grande Allemagne aux premières expulsions
8À partir de 1935 et du plébiscite organisé dans la Sarre, l’expression « Heim ins Reich » devient une parole de ralliement autour de cette idée d’une « Grande Allemagne » englobant toutes les populations germanophones. Le traité de Saint-Germain-en-Laye, en complément du traité de Versailles, devait rendre impossible un tel projet, en soumettant un rattachement de l’Autriche à l’Allemagne à un accord préalable de la SDN, et en plaçant la région germanophone des Sudètes sous l’autorité de la nouvelle République tchécoslovaque. Cependant, l’« Anschluss » de l’Autriche en mars 1938 ne rencontre que peu de résistance de la part de la communauté internationale, qui choisit la voie de la négociation et de l’apaisement avec l’Allemagne. L’invasion et le rattachement des Sudètes, entérinés par les accords de Munich en septembre 1938 et décidés en l’absence des représentants tchécoslovaques, permettent à Hitler de se rapprocher un peu plus de son projet d’une « Grande Allemagne » et d’envahir le reste de la Tchécoslovaquie en mars 1939, là encore sans rencontrer de résistance notable de la part de la France et de la Grande-Bretagne.
9L’invasion de la Pologne le 1er septembre 1939 marque un nouveau pas vers la création de cette « Grande Allemagne ». En effet, si cette attaque répond à des objectifs militaires et économiques, il s’agit avant tout de gagner à long terme des territoires à l’Est du Reich en vue de les germaniser. La signature du pacte germano-soviétique permet à Hitler de rapatrier les minorités allemandes présentes sur les territoires envahis par l’Union soviétique, notamment dans les Pays baltes, afin de les sédentariser dans la Pologne occidentale occupée. Ce transfert de populations devait à l’origine s’effectuer sur la base du volontariat, mais le contexte de guerre le fait évoluer vers une expulsion forcée de minorités, dont les Allemands de Bessarabie et de Galicie à partir de 1940. Les Allemands ainsi déplacés doivent prendre la place de la population polonaise jugée inapte à la « germanisation » et qui est rejetée hors de la Pologne occidentale.
10Sous le Leitmotiv du « Heim ins Reich », des dizaines de milliers de civils furent ainsi déplacés – en majeure partie des Allemands vivant dans les Pays baltes – ou déportées vers les camps ou utilisées en tant que travailleurs forcés, à l’instar des Polonais vivant au sein des nouvelles frontières du Reich. La politique allemande de déportation des populations vaincues marque par son ampleur un tournant dans l’utilisation des populations civiles en tant qu’instruments de pouvoir territorial et politique. En outre, les tentatives d’ingérence allemande tout au long des années 1930 au nom du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ont laissé un goût amer aux populations des pays attaqués par Hitler sur la question des minorités.
La fuite et l’expulsion des Allemands à partir de 1944
La fuite et les « expulsions sauvages »
11En automne 1944, à l’Est de l’Europe, se profile le plus grand déplacement de population de l’histoire européenne. Les minorités allemandes de l’Est de l’Europe et les habitants des territoires les plus à l’Est du Reich fuient devant l’avancée de l’Armée rouge, poussés par la peur des combats et influencés par des années de propagande anti-soviétique. Le bilan humain, très lourd, est une conséquence de la politique jusqu’au-boutiste du IIIe Reich. L’évacuation des populations civiles, jugée défaitiste, avait été interdite par le régime, malgré les premières incursions meurtrières de l’Armée rouge dans les territoires du Reich à l’automne 1944. Évacuées tardivement et de façon chaotique, les populations civiles sont les premières victimes de cette politique.
12Les mouvements de population s’amplifient au cours de l’hiver 1945, lors des grandes offensives soviétiques, d’autant que s’y ajoutent les expulsions réalisées par les nouvelles autorités polonaises et tchécoslovaques après le passage de l’Armée rouge. Ces expulsions, motivées officiellement par le rôle assigné aux minorités allemandes dans le déclenchement de la guerre, sont connues sous le terme de « wilde Vertreibungen7 ». Elles avaient été décidées de longue date par les autorités, notamment par le gouvernement tchécoslovaque en exil à Londres. Son président Edvard Benes avait depuis 1942 œuvré diplomatiquement à Londres pour défendre cette idée d’une expulsion des Allemands, seul moyen selon lui pour garantir une paix durable pour son pays ainsi que pour toute l’Europe centrale et orientale. De retour en Tchécoslovaquie, il décide par décret en juin 1945, et avant même la constitution d’une Assemblée nationale provisoire, de l’expropriation des terres agricoles appartenant aux Allemands, avant de les déchoir de leur nationalité tchécoslovaque en août 19458.
13Les Allemands des Sudètes sont ainsi exclus de la communauté nationale tchécoslovaque et accusés d’avoir trahi la nation tchécoslovaque en accueillant avec enthousiasme le rattachement des Sudètes au IIIe Reich à la suite de la conférence de Munich en septembre 1938 : « Nous devons nous débarrasser de tous les Allemands qui ont enfoncé un poignard dans le dos de la nation tchécoslovaque en 19389. » Les Allemands représentent aux yeux du gouvernement en exil un risque social et politique, capable par la suite de générer de nouveaux conflits avec l’Allemagne, et de lui permettre une ingérence future au nom de cette minorité. La situation est comparable en Pologne. La séparation de la Silésie entre la Pologne et l’Allemagne après la Première Guerre mondiale avait pesé durablement sur les relations entre les deux pays.
14De plus, il s’agit pour les États précédemment occupés par la Wehrmacht de rétablir leur autorité sur leur territoire. L’expulsion des Allemands représente dans certains cas aussi une tentative de légitimer un nouveau régime en répondant au sentiment anti-allemand de la population. En Pologne, la redistribution des terres allemandes constitue un élément phare du programme du comité de Lublin. Ainsi, avant même la fin de la guerre, les Allemands sont chassés des régions frontalières pour inscrire dans les faits un nouveau rapport de force et convaincre définitivement les Alliés occidentaux de la nécessité d’un tel transfert de population.
Les expulsions « humaines et organisées »
15Après la capitulation allemande du 8 mai 1945 et devant l’ampleur du phénomène déjà en marche, les Alliés décident lors de la conférence de Potsdam en juillet 1945 de « l’expulsion humaine et organisée10 » des Allemands vivant à l’Est et au Sud-Est des frontières des zones d’occupation11 afin de pacifier l’Europe centrale et orientale. Cette décision s’inscrit à la fois dans une réflexion de plus longue durée sur le rôle des minorités en tant que facteurs de déstabilisation, mais résulte aussi de la découverte des conséquences de la politique raciale du Reich dans ces mêmes territoires. Il s’agit donc aussi bien de façonner une nouvelle Europe pacifiée, mais plus immédiatement de punir les Allemands pour les crimes du régime nazi. Les efforts déployés par le gouvernement tchécoslovaque en exil pour convaincre les Alliés d’un transfert des populations germanophones avaient mené à un accord de principe du gouvernement britannique dès 1942, puis américain et soviétique à partir de juin 194312 en faveur d’une Europe centrale et orientale « libérée » de ses minorités allemandes.
16La bienveillance des gouvernements occidentaux vis-à-vis du projet tchécoslovaque ainsi que son application aux autres pays concernés doit être expliquée. Elle découle de différents facteurs. Avant tout, et cela est explicité par les termes de « transfert humain » et « organisé » utilisés lors de la conférence de Potsdam, les Alliés sont persuadés d’avoir les moyens techniques et la connaissance nécessaire pour organiser un transfert de population en évitant au maximum les exactions et les victimes civiles. Ainsi, dans un discours prononcé devant le parlement le 15 décembre 1944, Winston Churchill déclare : « De notre point de vue, l’expulsion est à long terme la solution la plus satisfaisante. Elle mettra fin au mélange des populations, qui conduit à des problèmes sans fin. […] Ces grands transferts ne m’inquiètent pas, nos moyens modernes permettent de les effectuer mieux que jamais13. » De même, à la suite de la fuite massive des populations civiles dès la fin de l’année 1944, les gouvernements britannique et américain sous-estiment le nombre d’Allemands encore présents dans les territoires concernés. Enfin, et dans un premier temps, les Alliés y voient un moyen de punir les Allemands pour le soutien apporté au régime nazi.
17En définitive, le transfert de population engendre l’expulsion de 12 à 14 millions d’Allemands, en majorité des femmes, des enfants et des personnes âgées. Échelonnée entre l’automne 1944 et le début des années 1950, cette arrivée massive de populations démunies et épuisées place les Alliés et la population allemande devant l’un des défis majeurs de l’après-guerre. Malgré un effort de planification de la part des forces d’occupation, qui ne tablaient que sur l’accueil d’environ 7 millions de réfugiés, les années 1945 et 1946 sont marquées par le chaos et la désorganisation. La zone soviétique, première touchée de part sa situation géographique, accueille presque 4,5 millions de réfugiés contre 8 millions dans les zones d’occupation occidentales14. Dans le territoire placé sous occupation soviétique, 24,1 % de la population ne vivait pas au sein des nouvelles frontières allemandes en 1939. Dans les zones américaine, française et britannique, plus peuplées, 15,4 % de la population est, au début des années 1950, issue des expulsions.
18D’un point de vue historique, la distinction entre la fuite et l’expulsion est justifiée par la chronologie des événements. En effet, entre 1944 et le début des années 1950, différentes phases se succèdent : la fuite, les expulsions sauvages et les expulsions dites « organisées », pour reprendre les termes de la conférence de Potsdam. Cependant, cette chronologie n’est pas applicable telle quelle à toute la population déplacée, dont les expériences se distinguent selon le territoire d’origine et la forme d’expulsion mise en place, certains gouvernements d’après-guerre se révélant plus ou moins réticents à cette expulsion15 et lents dans sa concrétisation. Dans ce travail, j’utiliserai avant tout les termes de « réfugié » et surtout d’« expulsé ». En effet, même si la population qui a fui devant l’Armée rouge dès la fin de l’année 1944 n’est pas à première vue « expulsée », l’impossibilité d’un retour dans leur territoire d’origine devenue concrète après août 1945 les inclut de fait dans cette dernière catégorie.
« Umsiedlerpolitik », la politique d’intégration à l’Est
La sémantique soviétique de l’expulsion : une trame idéologique
19L’accueil des réfugiés et expulsés en zone d’occupation soviétique (SBZ) se déroule dans un contexte politique bien particulier. Les Soviétiques, qui avaient appuyé l’expulsion des Allemands, notamment de ceux vivant à l’Est de la ligne Oder-Neisse, afin de garantir les nouvelles frontières polonaises et leur autorité sur les territoires polonais annexés dans le cadre du pacte germano-soviétique, cherchent à procéder à une intégration rapide des expulsés, afin de faire taire leurs revendications de retour. Leur stratégie s’avère dans cette optique bien délicate compte tenu de la virulente propagande anti-soviétique du régime nazi.
20Les administrations soviétiques, mises en place le 9 juillet 1945, vont tenter d’instaurer dans leur zone d’occupation une relation d’autorité mêlée d’une volonté de réconciliation entre les deux pays. Cette construction de nouveaux liens a pour contrepartie la reconnaissance des crimes nazis par la population allemande. L’attitude de la Wehrmacht vis-à-vis de la population civile russe est présentée de façon répétitive dans la presse16 et utilisée pour justifier l’expulsion.
21Dès l’été 1945, l’Histoire qui se déroule sous les yeux des contemporains est prise en main par les autorités soviétiques. Le terme Umsiedler, issu du verbe allemand Umsiedeln, qui signifie littéralement « s’établir ou s’installer ailleurs », est imposé par les autorités soviétiques dès leur création pour nommer les réfugiés et expulsés arrivés dans leur zone. Son utilisation est obligatoire dans toutes les administrations, dans les documents officiels et les journaux. De même, le fait de ne pas utiliser le nom polonisé des villes anciennement allemandes, comme parler de Breslau au lieu de Wroclaw, devient un délit puni par la loi. Si la population utilise encore longtemps les termes de « réfugiés » ou d’« expulsés » dans le cadre privé, le terme de Umsiedler devient la dénomination officielle pour les nouveaux arrivants. Le maire de Leipzig doit ainsi déclarer officiellement dès le mois d’octobre 1945 : « Wir haben kein Flüchtlingsproblem, wir haben ein Umsiedlerproblem17. » En septembre 1945, au cours de la première réunion de la ZVU (Zentralverwaltung für Umsiedler18), son président déclare : « Je voudrais ajouter que l’administration centrale, sur souhait particulier de l’administration militaire soviétique, ne s’appelle pas administration sociale pour réfugiés et Heimkehrer (anciens prisonniers de guerre), mais administration centrale pour Umsiedler (personnes déplacées)19. » Selon lui, le terme de Umsiedler20 englobe à la fois les personnes ayant fui les combats avant la fin de la guerre, appelées jusque-là Flüchtlinge (réfugiés), les personnes issues des « expulsions sauvages » aussi appelées Vertriebene ou Ausgewiesene (expulsés), et surtout les personnes expulsées de façon « humaine et organisée » sur décision des Alliés. Il ne faut pas oublier que le terme Umsiedlung n’est pas nouveau, il apparaît déjà lors des déportations qui suivent le pacte germano-soviétique, et Hitler annonce en octobre 1939 qu’il projette une « Umsiedlung der Nationalitäten21 », qui deviendra réalité par la suite.
22D’autre part, l’attitude des autorités soviétiques se caractérise par une très grande suspicion à l’égard des réfugiés. Cela tient avant tout au contexte général d’après-guerre. La population sans attaches et difficilement contrôlable qui arrive en SBZ représente un risque social et politique. Il s’agit pour les autorités d’éviter à tout prix que les réfugiés ne se déplacent seuls et selon leur envie sur le territoire. Des mesures sont prises pour leur interdire de quitter un convoi ou un camp de transit. De même, les villes sont sommées de ne pas distribuer de cartes de rationnement aux réfugiés qui arrivent sans autorisation officielle22. Dans les faits, ces mesures sont très difficiles à appliquer voire impossibles. Cette suspicion est aussi liée aux régions dont sont originaires les réfugiés. En effet, d’anciennes minorités allemandes se voient reprocher leur proximité avec le régime nazi. Cette accusation est surtout portée contre les Allemands des Sudètes, qui avaient acclamé leur rattachement au IIIe Reich en 1938, mais aussi contre les Silésiens de la partie restée allemande après la Première Guerre mondiale23 qui s’étaient distingués avant même 1933 par des résultats électoraux supérieurs à la moyenne pour le NSDAP. Enfin, la Prusse orientale reste aux yeux de l’occupant soviétique le foyer du militarisme allemand.
23Cette attitude suspicieuse des autorités soviétiques vis-à-vis des réfugiés se retrouve également chez les forces d’occupation occidentales, et aussi envers la société allemande dans son ensemble, et s’exprime par exemple par les ordres catégoriques de non-fraternisation avec la population. À partir de 1947, l’affrontement croissant entre les forces d’occupation va mener à deux stratégies très différentes et mettre fin à une politique commune d’assimilation des réfugiés. L’anti-communisme de ces derniers, lié à leur expulsion, conduit à leur irruption sur la scène politique dans les zones occidentales puis en RFA. La dénonciation de l’URSS en tant que responsable des changements territoriaux et de l’expulsion leur permet dès la fin des années 1940 de se regrouper au sein de Landsmannschaften, et de créer leurs propres partis politiques, proches de la droite allemande. En SBZ, au contraire, l’expression Umsiedler est remplacée dès 1947 par le mot Neubürger ou encore l’expression ehemaliger Umsiedler24 et un consensus officiel semble se créer autour de ces expressions, tout du moins dans la sphère administrative.
24Selon les autorités, il s’agit ainsi de lutter contre la nostalgie de certains Neubürger, surtout si elle est exprimée publiquement. Ceux qui sont ainsi désignés voient bien souvent dans cette appellation la négation pure et simple de leur expulsion, elle remet en cause la violence et l’usage de force dans leur déplacement. Du point de vue de l’administration soviétique, le terme Umsiedler représente un premier pas vers l’intégration, en ce sens qu’il ne rappelle pas constamment aux concernés ce qu’ils ont vécu. De même, la généralisation, dès le début des années 1950, du terme Neubürger prétend signifier leur intégration réussie dans la RDA en tant que citoyens et cherche à clore le temps de l’aide publique apportée aux réfugiés.
La Saxe, une terre d’accueil ?
25Le 19 juillet 1945, le maréchal Joukov, à la tête de la SMAD, émet l’ordre : « Zur zweckmäßigen Verteilung der Bevölkerung der russischen Besatzungszone25 » pour permettre d’envoyer les réfugiés vers les régions choisies pour leur intégration. Le plan de la SMAD de parvenir à une large répartition des réfugiés dans les régions rurales de la zone se heurte à la désorganisation qui touche les administrations des Länder et des villes. Ces dernières, touchées par la dénazification et la reconstruction de l’appareil administratif allemand, peinent à établir leur autorité. Les territoires choisis sont les plus à l’est de la zone, peu peuplés et largement détruits par les combats. Face à l’impossibilité d’appliquer ce plan, le maréchal ordonne au 1er octobre 1945 l’arrêt des déplacements et mouvements de population. Il réagit ainsi au comportement de nombreuses villes qui refusent d’ouvrir leurs gares aux trains transportant des réfugiés ou refusent leur inscription sur les listes d’habitants par la préfecture de police, ce qui leur donnerait droit à des cartes de ravitaillement. Il propose un nouveau projet qui est finalement appliqué dès le 4 octobre 1945. Selon ce dernier, les 4,3 millions de personnes que doit accueillir la SBZ seront partagées entre les régions de la zone comme suit : 2 millions de personnes doivent aller vivre dans le Mecklembourg-Poméranie occidentale, 0,7 million dans la province de la marche de Brandebourg et 0,4 million en Thuringe et dans la province de Saxe26. Le Land de Saxe n’apparaît pas dans ce programme27 et n’aurait pas dû selon ce projet accueillir des réfugiés. Il compte néanmoins déjà 416 000 réfugiés sur son territoire28. Les régions choisies par le projet sont avant tout des territoires ruraux. L’intégration doit se faire selon la SMAD loin des villes surpeuplées qui subissent au premier chef les problèmes de subsistance29. Malgré les plans soviétiques, il apparaît évident que la Saxe est déjà une région d’accueil. Elle reçoit au final près d’un million de réfugiés.
26La Saxe n’a bénéficié que d’un intérêt tardif de la recherche. Tout d’abord, elle est la région est-allemande qui a le plus faible taux de réfugiés, environ 17 %, et n’a de toute évidence pas subi les mêmes transformations que le Mecklembourg avec 43 % d’expulsés. Cependant, sa double fonction de région de transit et d’accueil des réfugiés, sa situation géographique avec des frontières avec la Pologne et la Tchécoslovaquie, son importance économique ainsi que les nombreux conflits opposant les autorités centrales et les administrations ont permis un début d’histoire locale. La Saxe constitue un bon exemple des balbutiements de la politique centrale d’intégration et de sa mise en place au niveau local avec toutes les contradictions et la désorganisation caractéristiques d’une époque de sortie de guerre.
27Entre 1999 et 2005, un projet de recherche financé par le ministère saxon de l’Intérieur sur l’intégration des réfugiés en Saxe entre 1945 et 1952 est mené à l’université de Leipzig, il conduit à la publication de quatre thèses. C’est dans ce cadre que Stefan Donth publie en 1999 sa recherche sur l’influence de la SMAD et du SED sur le processus d’intégration30, Irina Schwab s’intéresse à la mise en pratique administrative de la politique d’intégration31. Christian Kurzweg étudie pour sa part la politique de la Liberal-Demokratischen Partei Deutschlands (LDP)32 vis-à-vis des réfugiés33. Ce projet d’histoire politique et sociale est complété par le travail de Notker Schrammek sur l’histoire du quotidien (Alltagsgeschichte34) des expulsés en Saxe35. Ces travaux, s’ils constituent une première approche des particularités saxonnes, présentent une analyse souvent quantitative des politiques d’intégration. Stefan Donth et Christian Kurzweg détaillent le cadre législatif et partisan de la politique saxonne d’intégration, alors qu’Irina Schwab décrit avec minutie le rôle des administrations locales saxonnes, à la fois courroies de transmission du politique et contrepouvoir local.
28Notker Schrammek présente quant à lui un travail issu de témoignages recueillis dans toute la Saxe au tournant des années 1990-2000, qui mettent en lumière le ressentiment toujours présent dans les récits de réfugiés vis-à-vis de leur terre d’accueil, sans pour autant présenter les difficultés méthodologiques et mémorielles d’une telle approche. Toujours à Leipzig, Markus Wustmann prépare actuellement une thèse sur le rôle de l’Église luthérienne saxonne dans l’intégration des réfugiés entre 1945 et 1969, cette recherche permettra à terme de définir plus précisément le rôle primordial des Églises dans le processus d’accueil et de soutien aux réfugiés. Il ne sera malheureusement que brièvement question de ce sujet passionnant dans ce travail en espérant une publication prochaine des recherches de Markus Wustmann. Il est intéressant de noter que le projet disposait d’un financement du gouvernement régional, qui n’est pas sans rappeler les aides du gouvernement ouest-allemand d’après-guerre pour faire avancer les recherches sur l’expulsion et la fuite des minorités allemandes.
29Dans l’intégralité des recherches présentées ci-dessus, les historiens s’attachent à définir la politique et le parcours d’intégration « des réfugiés », une population qui s’avère cependant bien hétérogène au vu des parcours personnels d’intégration. Dans un cadre plus général, et à part deux exceptions notables que sont un article et une conférence de Michael Schwartz36, la composition sociale des réfugiés et une étude différenciée de « leurs intégrations » n’ont pas l’objet de recherches spécifiques.
Notes de bas de page
1 Le chiffre exact d’expulsés reste sujet à controverse encore aujourd’hui. Si l’on estime à plus de 14 millions le nombre d’Allemands vivant en dehors des nouvelles frontières allemandes avant la fin de la Seconde Guerre mondiale, le nombre d’expulsés effectivement recensés en RFA et en RDA en 1950 se situe entre 11 et 12 millions. Certains historiens allemands comme Heinz Nawratil ont utilisé ces chiffres pour avancer le nombre de 2 millions de victimes. Ces chiffres ont cependant été revus à la baisse, il est impossible encore maintenant de chiffrer exactement le nombre d’Allemands expulsés, ainsi que ceux qui furent victimes des derniers combats, ceux qui furent déportés vers l’Union soviétique ou ceux morts au cours de l’expulsion à proprement parlé.
2 H. Nawratil, Die deutschen Nachkriegsverluste unter Vertriebenen, Herbig, Berlin, 1988, p. 35.
3 Alfred M. De Zayas explique dans son ouvrage que le transfert de population, en tant que moyen politique et géostratégique, communément utilisé pendant l’antiquité, disparaît pendant le Moyen Âge (à l’exception notable de l’édit de Nantes), in A. M. De Zayas, op. cit., p. 25.
4 C. Lotz, Die Deutung des Verlusts : Erinnerungspolitische Kontroversen im geteilten Deutschland um Flucht, Vertreibung und die Ostgebiete (1948-1972), Cologne, Böhlau, 2007, p. 46.
5 Les résultats du plébiscite en Haute-Silésie (60 % pour un rattachement à l’Allemagne, 40 % pour un rattachement à la Pologne) sont critiqués en raison du découpage électoral peu favorable aux régions rurales, majoritairement peuplées de populations de langue polonaise.
6 « La frontière de sang/sanglante à l’Est », in C. Lotzh, op. cit., p. 40.
7 « Les expulsions sauvages », c’est-à-dire sans base juridique ni réelle organisation.
8 « Les décrets présidentiels, qui ont acquis force de loi a posteriori, sont au nombre de 143 et s’étendent à tous les pans de l’arsenal législatif. Seule une dizaine d’entre eux concerne la question allemande (Sudètes), les trois principaux étant : le décret du 21 juin 1945 (no 12) sur l’expropriation des terres agricoles appartenant aux Allemands et aux Hongrois ; le décret constitutionnel du 2 août 1945 (no 33) relatif à la citoyenneté, qui a conduit au retrait de la citoyenneté tchécoslovaque aux personnes de nationalité allemande […], et enfin le décret du 25 octobre 1945 (no 108), le plus souvent dénoncé, qui a entraîné la confiscation de tous les biens des Allemands et des Hongrois de Tchécoslovaquie », in A. Bazin, « Les décrets Benes », Critique internationale 4/2003, no 21, p. 44.
9 Discours de Benes à Londres en 1944, in A. M. DeZayas, op. cit., p. 48.
10 Article 13 de conférence de Potsdam.
11 Réunion des Alliés, 20 novembre 1945, « Plan zur Umsiedlung der aus Österreich, der Tschechoslowakei, Ungarn und Polen ausgewiesenen Bevölkerung nach den vier Besatzungszonen Deutschlands ».
12 A. M. DeZayas, op. cit., p. 37.
13 Ibid., p. 30.
14 A. Von Platow, W. Meinicke, Alte Heimat – Neue Zeit, Flüchtlinge, Umgesiedelte, Vertriebene in der Sowjetischen Besatzungszone und in der DDR, Verlag Anst. Union, Berlin, 1991, p. 19.
15 J. L. Muller, L’expulsion des Allemands de Hongrie : 1944-1948. Politique internationale et destin méconnu d’une minorité, L’Harmattan, 2001.
16 La SBZ est la première zone d’occupation à autoriser la publication de journaux « allemands », sur l’exemple de la LVZ (Leipziger Volkszeitung) autorisée dès 1946 en sa qualité de journal du SED saxon.
17 « Nous n’avons pas un problème de réfugiés, nous avons un problème de Umsiedler », dès octobre 1945 la politisation et l’idéologisation du sujet sont palpables, in StVuR no 7638, Besprechung der Burgermeister der Städte Leipzig, Wurzen, Borna (u. a.), 12 octobre 1945.
18 « Administration centrale chargée des personnes déplacées », administration allemande mise en place par ordre soviétique en automne 1945.
19 Stiftung Haus Der Geschichte Der Bundesrepublik Deutschland (dir.), op. cit., p. 92.
20 Le terme Umsiedler est expliqué dans le glossaire. Le terme Umsiedler est utilisé dans sa version allemande dans ce travail lorsqu’il est fait référence à la politique officielle d’intégration ou quand les sources traduites l’utilisent.
21 « Transfert des nationalités », in E. K. Franzen, Die Vertriebenen. Hitlers letzte Opfer, Ullstein, Munich, 2002, p. 268.
22 Ordre no 23.
23 P. Ther, Deutsche und polnische Vertriebene, Gesellschaft und Vertriebenenpolitik in der SBZ/DDR und in Polen 1945-1956, Göttingen, Vandenhoeck und Ruprecht, 1998.
24 Littéralement ancien Umsiedler, expression sous-entendant la fin du statut d’Umsiedler et donc la fin du statut de réfugié/d’expulsé.
25 « Pour une répartition effective de la population dans la zone d’occupation russe. »
26 La province de Saxe est renommée Saxe-Anhalt en 1946.
27 Pour la Saxe, des plans sont émis pour faire sortir les réfugiés déjà présents sur son territoire et les envoyer vers la Thuringe, la province de Saxe, le Brandebourg et la Poméranie, in StAL StVuR (1) no 7640, Plan zur Lenkung des Flüchtlingsstroms aus dem Landesgebiet Sachsen, Rundverfügung der LRS, 10 août 1945.
28 M. Jahn, « Zur sächsischen Spezifik der Aufnahme von vertriebenen Deutschen », in Geglückte Intergration ?, p. 216.
29 Les zones choisies sont les régions orientales de la zone, agricoles et peu peuplées. Cela soulève un triple problème : les destructions causées par la guerre dans ces zones frontalières, le manque de logements dans les villages qui oblige la population locale à partager leurs maisons, et les conflits entre les deux populations, la population rurale étant dans son ensemble peu encline à l’arrivée d’étrangers dans leur communauté.
30 S. Donth, Die Politik der SED und SMAD zur Lösung des Vertriebenenproblems in Sachsen 1945-1952, Cologne, Verlag Böhlau, 1999.
31 I. Schwab, Flüchtlinge und Vertriebene in Sachsen. Die Rolle der Kreis und Stadtverwaltungen bei Aufnahme und Integration, Francfort, Peter Lang – Europäische Hochschulschriften, vol. 927, 2001.
32 Parti libéral-démocrate allemand.
33 C. Kurzweg, Die Vertriebenenpolitik der Liberal-Demokratischen Partei Deutschlands. Das Beispiel Sachsen 1945-1950, Hambourg, Studien zur Zeitgeschichte, Band 41, 2005.
34 A. Lüdtke, Histoire du quotidien, La Maison des Sciences de l’Homme, 1994 (1989).
35 N. Schrammek, Alltag und Selbstbild der Vertriebenen (Sachsen, 1945-1952), Francfort, Berlin, Peter Lang, 2002.
36 M. Schwartz, « Emanzipation zur sozialen Nützlichkeit : Bedingungen und Grenzen von Frauenpolitik in der DDR », in Dierk Hoffmann et Michael Schwartz (dir.), Sozialstaatlichkeit in der DDR, op. cit., p. 48-87 ; M. Schwartz, « Umsiedler und Altersarmut : Zur sozialen Notlage vertriebener alter Menschen in der SBZ und frühen DDR », intervention du 29 novembre 2005 dans le cadre du cycle de cours « Wertvolles Alter – gefährliches Alter » organisé par le séminaire de post-doctorants « Alter-Geschlecht-Gesellschaft » et par le centre interdisciplinaire d’études sur le genre et les femmes de l’université Ernst-Moritz-Arndt à Greifswald.
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