Introduction
p. 15-23
Texte intégral
« Le passé n’est pas mort1 » : expulsés, histoire et politique
1L’expulsion des minorités allemandes d’Europe centrale et orientale après la Seconde Guerre mondiale provoque des débats en Allemagne depuis la chute du IIIe Reich. Les gouvernements, qu’ils soient est-allemands, ouest-allemands ou issus de l’Allemagne réunifiée n’y sont par ailleurs pas étrangers ; les historiens non plus. L’écriture de l’histoire a dû s’adapter aux nécessités politiques et idéologiques des deux Allemagnes d’après-guerre et a suivi des rythmes différents à l’Est et à l’Ouest. Largement investie puis délaissée au tournant des années 1970 par le pouvoir politique en République fédérale allemande (RFA), la recherche historique est interdite en République démocratique (RDA) jusqu’au début des années 1980.
2La recherche ouest-allemande a en effet bénéficié dès le début des années 1950 d’un soutien gouvernemental par le biais de projets de recherche financés par le ministère des Expulsés, des Réfugiés et des Blessés de guerre2 et du concours financier des organisations de réfugiés, les Landsmannschaften3. Les relations étroites qui s’établissent alors entre la recherche et les milieux politiques font l’objet de nombreuses critiques, les historiens sont accusés de servir avant tout des intérêts politiques particuliers et de refléter un discours politique partisan, conservateur et résolument anticommuniste. En pleine guerre froide, la dénonciation de l’expulsion s’intègre dans une politique antisoviétique et mène notamment à la critique du comportement des gouvernements tchécoslovaques et polonais envers les populations allemandes après la guerre.
3À la fin des années 1960, la politique du chancelier fédéral Willy Brandt provoque une rupture politique et historiographique. La dissolution du ministère des Expulsés en 1969 est suivie un an plus tard par la signature du traité de Varsovie. La RFA reconnaît officiellement la frontière germano-polonaise le long de l’Oder et de la Neisse. Malgré les grandes manifestations d’opposition au traité organisées par les Landsmannschaften, ce revirement politique et stratégique de l’Ostpolitik ouest-allemande réduit significativement leur poids politique. Depuis leur création, la renégociation de la frontière était leur objectif principal. Les Landsmannschaften investissent alors l’espace historique et mémoriel, désormais négligé par le milieu politique. La création en 1974 de la Fondation pour la culture des expulsés allemands (Kulturstiftung der deutschen Vertriebenen) conduit à la multiplication de travaux sur l’expulsion et surtout les crimes perpétrés contre les Allemands4. Une minorité d’expulsés se retrouve confinée à la droite voire à l’extrême droite de l’échiquier politique et est soutenue par certains historiens tels Heinz Nawratil, dont les ouvrages portent des titres sans équivoque : « Livre noir des expulsions » ou encore « Crimes contre les Allemands expulsés5 ».
4En 1977, l’américain Alfred de Zayas relance et internationalise le débat avec fracas. Non seulement son ouvrage « Nemesis at Potsdam6 » remet en question la thèse des seules responsabilités soviétique, polonaise et tchécoslovaque dans l’expulsion7, mais l’auteur attaque aussi frontalement la retenue dont font désormais preuve les historiens allemands vis-à-vis de cet épisode de leur histoire :
« S’il y a quelque chose qui m’inquiète et me dérange à propos de l’Allemagne actuelle, c’est justement cette tendance exagérée à l’autocritique qui pour moi signifie que beaucoup d’Allemands ont perdu le sens des réalités, de l’histoire et de sa relativité/de ses proportions. Ou pire encore, que certains Allemands sont apparemment atteints de mégalomanie – ils veulent être les plus grands criminels de l’histoire et en même temps les plus grands pénitents. Je trouve cela pathologique8. »
5Cette étape a permis l’émergence d’une nouvelle génération d’historiens et d’approches novatrices en s’éloignant de la recherche effectuée « par les concernés et pour les concernés9 », entre les mains d’historiens eux-mêmes expulsés, tels Heinz Nawratil. Les historiens Lutz Niethammer et Alexander Von Plato annoncent ces « temps nouveaux » dans leur ouvrage « Wir kriegen jetzt andere Zeiten10 ». Publié en 1985, l’ouvrage augure en effet un double bouleversement : il introduit l’histoire orale et sociale dans un champ historiographique en plein essoufflement et concrétise le passage d’une recherche centrée sur l’expulsion vers la question de l’arrivée et de l’intégration des expulsés en Allemagne. Ce renouveau coïncide avec l’ouverture des archives est-allemandes dès 1989. Elle permet les premières approches comparatives11 entre les deux Allemagnes et avec d’autres épisodes d’expulsions et de déplacements forcés de populations pendant les guerres. Cependant, les historiens allemands sont toujours réticents à aborder le sujet, de crainte d’être accusés de proximité idéologique avec les Landsmannschaften. En 2005, alors que le débat fait rage entre l’Allemagne et ses voisins autour de la construction d’un « Centre contre les expulsions », Zentrum gegen Vertreibung12, l’historien Michael Schwartz publie un article intitulé « Les expulsés ont-ils le droit d’être des victimes13 ? ». Il plaide en faveur d’une reconnaissance des souffrances des réfugiés et de l’insertion de ces derniers dans une histoire européenne de la Seconde Guerre mondiale. Ce débat engendre la multiplication des études européennes comparées dans les années 200014 au détriment de l’écriture d’une histoire allemande unifiée. Les raisons de ce vide historiographique sont doubles.
6La première difficulté d’une histoire comparée allemande tient aux spécificités de l’écriture de l’histoire en RDA et à son caractère récent. En effet, contrairement au soutien dont a bénéficié la recherche ouest-allemande entre les années 1950 et 1970, la République démocratique a mis en œuvre une stratégie diamétralement opposée. Face au risque de déstabilisation politique et sociale que représentait l’arrivée des expulsés sur son territoire, le régime interdit toute recherche historique portant sur l’expulsion ou l’intégration des expulsés dans la zone soviétique (SBZ) puis en RDA. Renommés Umsiedler (personnes déplacées) puis Neubürger (nouveaux citoyens)15, les réfugiés sont déclarés « intégrés » dès la fin des années 1940 puis disparaissent entièrement de la vie publique et des archives quelques années plus tard. L’interdiction de coalition et de réunion dont ils sont victimes ne permet pas aux expulsés de financer leurs propres recherches ou tout simplement de constituer des archives privées conséquentes. La stratégie du régime est-allemand est le résultat d’un calcul politique à la fois national et international. D’une part, la nécessaire réconciliation avec les voisins socialistes polonais et tchécoslovaques et le rôle joué par l’Armée rouge dans l’expulsion des minorités allemandes sont autant de raisons d’occulter le sujet. D’autre part, les réfugiés représentent près d’un quart de la population au tournant des années 1950. Considérés comme un facteur potentiel de déstabilisation, les réfugiés tombent sous le coup d’une « tabouisation16 » de leur passé et de leur avenir sur le territoire de la zone d’occupation soviétique.
7La seconde difficulté tient aux conflits politiques entre les deux Allemagnes durant la guerre froide. Leur concurrence sur la manière de gérer l’arrivée des expulsés a non seulement conduit à une coupure sémantique qui distingue l’expulsé à l’Ouest et à l’Est (« Vertriebene » et « Umsiedler ») mais aussi à une distinction historiographique tenace entre les concepts d’intégration et d’assimilation. Le terme « assimilation » a été choisi à l’origine par le SED pour signifier une intégration plus aboutie, en opposition à une intégration jugée plus superficielle de la RFA. Il est repris par les historiens pour mettre en avant la notion de contrainte. L’assimilation renvoie alors à la négation des différences culturelles, à la séparation autoritaire des communautés et à la réécriture de l’histoire de ces minorités par le régime. Il est encore utilisé aujourd’hui dans une historiographie allemande qui oppose souvent les deux concepts au lieu de les nuancer.
8Depuis la réunification, de nombreuses certitudes concernant l’intégration des réfugiés en Allemagne ont été bouleversées. La liberté de parole accordée aux expulsés d’Allemagne de l’Est après la chute du régime fait apparaître une volonté de briser le silence imposé par le régime. Elle se manifeste notamment par la création de nouveaux groupes culturels et linguistiques sur le modèle des Landsmannschaften ouest-allemandes. Cela vient contredire la version officielle véhiculée par les autorités est-allemandes d’une intégration sans heurts et d’une fusion entre les deux populations au sein de la nouvelle « patrie des travailleurs » mise en place par le SED (Parti socialiste unifié allemand – Sozialistische Einheitspartei Deutschlands). L’intégration des expulsés en RDA n’est-elle qu’un mythe fondateur de plus de la RDA ?
L’intégration des expulsés : une histoire allemande
9En 2008, l’ouvrage « Kalte Heimat » de l’historien Andreas Kossert17 soulève un débat public sur les mythes est et ouest-allemands d’un « miracle de l’intégration ». L’aspect novateur de son travail est d’étudier l’attitude de la population allemande vis-à-vis des réfugiés en RFA et en RDA, et non plus seulement les politiques d’intégration. Il met en évidence qu’au traumatisme provoqué par les expulsions souvent violentes s’ajoute le choc de l’arrivée dans une ville ou un village où, de toute évidence, les expulsés ne sont pas les bienvenus. Stigmatisés en raison de leurs habitudes culturelles, religieuses et linguistiques différentes, les nouveaux venus démunis symbolisent aux yeux des Allemands la défaite de leur pays et une concurrence dans le partage des ressources disponibles dans l’immédiat après-guerre. La réflexion de l’auteur, centrée en grande majorité sur la RFA, s’inscrit aussi dans la continuité des recherches sur l’intégration entamées en RDA vingt ans plus tôt.
10En effet, dès le début des années 1980, un groupe de chercheurs réunis autour de Manfred Wille à Magdeburg est pour la première fois autorisé à s’intéresser à ce qui est encore appelé selon la terminologie officielle « Umsiedlerintegration ». Deux thèses sont rédigées : celles de Regine Just sur la Saxe18 et de SteffiKaltenborn sur la Thuringe19. Ces premières études locales sont encore contraintes institutionnellement de conclure sur un succès des efforts effectués par les autorités est-allemandes pour intégrer les réfugiés, mais elles peuvent néanmoins aborder les problèmes rencontrés. Les difficultés d’intégration sont alors expliquées par les pénuries d’après-guerre, les destructions et le manque de solidarité de la population locale. Politiquement, il s’agit surtout de montrer que les expulsés ont été intégrés plus rapidement en RDA qu’à l’Ouest. Les années 1980 marquent une ouverture du débat autour de la question de l’intégration des réfugiés en zone d’occupation soviétique puis en RDA, mais la remise en question de l’histoire officielle ne devient possible qu’après la chute du régime.
11Les années 1990-2000 sont marquées par la construction d’une histoire politique de l’intégration. Les recherches menées à l’université de Magdeburg permettent la publication des premiers recueils de sources administratives, toujours sous l’égide de Manfred Wille20. Il s’agit d’étudier l’organisation politique mise en place en vue de garantir le processus d’intégration, aussi bien par les administrations soviétiques que leurs héritières est-allemandes, notamment le rôle des administrations d’occupation (SMAD) et de l’administration chargée des réfugiés (ZVU)21. Le large travail de Michael Schwartz sur le sujet s’efforce justement de mettre en lumière les mécanismes décisionnels et les luttes d’influence des administrations allemandes et soviétiques, centrales et locales autour de la politique d’intégration.
12Plus récemment, l’intégration des réfugiés a investi le champ de l’histoire économique et sociale22. Elle analyse l’influence de ce processus sur les structures administratives et sociétales du territoire est-allemand et son impact sur la politique sociale et économique de la zone puis de la jeune RDA23. La politique d’intégration des réfugiés devient alors un objet d’étude permettant de mettre en relief les structures du pouvoir et de l’autorité24 dans cette époque riche en changements, durant laquelle une dictature en remplaça une autre25. Cependant, le caractère autoritaire du régime est-allemand pose des problèmes considérables à l’histoire sociale. En effet, malgré la nouvelle liberté accordée aux chercheurs depuis la chute du régime, ils doivent composer avec une trame idéologique qui structure et influence toutes les administrations. L’omniprésence du politique dans les archives disponibles comporte alors le risque de n’étudier l’intégration qu’à travers une grille de lecture totalitariste. Il s’agit donc dans ce travail de replacer le réfugié au centre de la recherche en tant qu’acteur, pour lui donner un peu de « chair ». Il sera ainsi possible de distinguer, en marge d’une politique d’assimilation qui semble intervenir jusque dans le domaine privé, les espaces de liberté et de solidarité investis par les réfugiés.
13L’étude de ces pratiques est au cœur de mon travail de recherche qui cherche à opérer un glissement de perspective en passant d’une problématique ancienne, à savoir « Comment les réfugiés ont-ils été intégrés en zone d’occupation soviétique et en RDA ? » vers une problématique nouvelle, « Comment les réfugiés se sont-ils intégrés et ont-ils trouvé leur place au sein de la société est-allemande ? ».
Le réfugié, acteur de son intégration ?
14Cette recherche pose la question du réfugié en tant qu’acteur de son intégration à travers une différenciation des parcours individuels et collectifs. En effet, qui peut être acteur de son intégration, qui a les moyens de l’influencer ? La question du choix (d’un travail, d’un logement, d’une formation) ne se pose pas de la même manière selon les individus : les personnes âgées, les femmes, les invalides de guerre, les jeunes, disposent-ils des mêmes opportunités afin de façonner une intégration qui leur est propre ?
15Alors que l’historiographie allemande s’attache à étudier l’intégration « des réfugiés », en tant que communauté a priori homogène, cet ouvrage vise à différencier et à comparer les expériences vécues. La pluralité des expériences et des parcours, rarement considérée par la politique officielle mise en place par les autorités, doit être étudiée « depuis le bas », dans le cadre d’une histoire sociale et à l’aide des sources disponibles à l’échelle locale, afin d’affiner l’analyse des effets de la politique d’intégration sur les expulsés en fonction de leur catégorie socio-professionnelle, de leur sexe, de leur âge et de leur région d’origine. La Saxe, région frontalière et industrielle, sera le terrain de cette recherche locale et sociale26.
16L’étude du parcours d’intégration se heurte à différents obstacles, liés au contexte historique, à la nature des sources et au sujet lui-même. Les années 1945-1953 sont traversées par des ruptures historiques, politiques et sociales qui rendent complexe l’usage des sources pour l’historien, et notamment par la double transition politique de la fin de la Seconde Guerre mondiale à l’établissement progressif du régime est-allemand. De même, contrairement à l’étude de l’intégration des réfugiés à l’Ouest, l’historiographie est-allemande se voit imposer des bornes chronologiques et doit limiter ses études à l’immédiat après-guerre, au plus tard jusqu’au début des années 196027.
17Les sources administratives et politiques de l’année 1945 et du début de l’année 1946 révèlent la désorganisation de la société et les difficultés de transmission d’informations et ne peuvent être utilisées qu’avec une certaine prudence. Cependant, elles reflètent aussi une réalité, celle d’une administration en proie à une situation d’urgence qu’elle peine à gérer. Ces sources permettent d’établir les contradictions entre la tentative « par le haut » de coordonner l’arrivée et la prise en charge des réfugiés, et les autorités locales. Ces dernières élaborent des stratégies variées pour retarder ou refuser l’accueil des réfugiés, malgré les lourdes conséquences humaines liées à ces délais. Les mois passés dans les archives de Leipzig, de Dresde et de Berlin permettent de confronter les bilans de l’action des administrations centrales et des arrondissements, et de mettre en avant les temporalités différentes du politique et de l’expérience humaine.
18Entre 1945 et 1947, les administrations régionales et locales reflètent une « pluralité politique relative ». Mais l’instrumentalisation de la question de l’intégration par le SED et son influence grandissante sur les administrations de la zone d’occupation posent un second problème : celui de la crédibilité des sources étudiées. En effet, elles tombent de plus en plus sous l’emprise du parti et de son langage officiel. Cependant, elles sont là aussi le reflet de cette instrumentalisation et révèlent les divergences entre les objectifs du parti d’une part et l’intégration sociale et locale des réfugiés d’autre part.
19L’évolution politique de la zone d’occupation soviétique et de la Saxe, l’évolution du cadre législatif de la politique d’intégration, l’évolution des priorités économiques et sociales et enfin l’influence du contexte international forment un cadre mouvant dans lequel évoluent les réfugiés. La progression locale de l’intégration des expulsés au sein de la société saxonne est elle aussi plurielle : les conditions de l’expulsion et de l’arrivée en Saxe, la diversité des régions d’origine des réfugiés et l’hétérogénéité de la Saxe d’un point de vue culturel, religieux, économique et social sont autant d’éléments qui influent sur leur parcours.
20L’utilisation de sources administratives et politiques, malgré leurs lacunes, prévaut dans ce travail sur l’usage de témoignages. Les nombreux témoignages que j’ai recueillis en préparant cette thèse imprègnent évidemment mon travail. Les rencontres que j’ai faites et les destins personnels qui m’ont été confiés d’Oschatz à Chemnitz, de Görlitz à Leipzig, sont d’une grande richesse personnelle et présentent un grand intérêt mémoriel. Néanmoins, l’intégralité des témoignages ne sera pas utilisée dans le cadre de ce travail. Leur utilisation dans cette étude comparée de différents groupes sociaux aurait nécessairement conduit à des déséquilibres : les personnes interrogées correspondent toutes peu ou prou au même groupe : des femmes, plus nombreuses dans la société d’après-guerre et dont l’espérance de vie dépasse celle des hommes, et surtout des femmes très jeunes entre 1945 et 1953. Cela exclut de fait d’autres groupes comme les personnes âgées, qui ne peuvent plus aujourd’hui témoigner. Les témoignages issus de la période étudiée, découverts sous forme de lettres et de journaux, leur seront préférés28.
Notes de bas de page
1 En 1976, la romancière est-allemande Christa Wolf brise deux tabous dans son roman « Kindheitsmuster » : le passé national-socialiste de l’Allemagne et l’expulsion des minorités allemandes d’Europe centrale et orientale après la guerre. Elle s’y engage contre l’oubli et pour la reconnaissance de la souffrance vécue avec une expression devenue célèbre : « Das Vergangene ist nicht tot, es ist nicht einmal vergangen. Wir trennen es von uns ab und stellen uns Fremd », « Le passé n’est pas mort, il n’est même pas passé. Nous le séparons de nous et nous plaçons en étranger », in Christa Wolf, Kindheitsmuster, Berlin, Weimar, Aufbau-Verlag, 1976.
2 Bundesministerium für Vertriebene, Flüchtlinge und Kriegsgeschädigte (dir.), Dokumentation der Vertreibung der Deutschen aus Ostmitteleuropa. Cette documentation se décline en plusieurs tomes : « L’expulsion des populations allemandes des territoires à l’est de l’Oder-Neisse » en 1954, « Le sort des Allemands en Hongrie » en 1956, « Le sort des Allemands en Roumanie » en 1957, « L’expulsion des Allemands de Yougoslavie » en 1957, « Le sort des Allemands en Yougoslavie » en 1961 à Bonn. Le ministère est créé en 1949, sa dissolution est décidée par Willy Brandt en 1969.
3 Organisations de réfugiés qui se rassemblent au sein du « Bund der Vertriebenen » (BdV) par la signature d’une charte commune en 1950. La charte définit les « droits et devoirs » des expulsés : le renoncement à la vengeance pour récupérer les territoires perdus et l’attachement à un « droit à la patrie ». Durant les premières décennies d’après-guerre, ces organisations incarnent un pouvoir politique puissant : elles revendiquent le rôle de porte-parole des 8 millions de réfugiés présents en République fédérale. Si elles perdent peu à peu un électorat qui se dirige progressivement vers les partis politiques « classiques », l’organisation annuelle d’un « jour de la patrie/Tag der Heimat » rassemble des milliers de personnes et des orateurs prestigieux (dont l’ancien et actuel ministre allemand Wolfgang Schäuble en 1990). En 2013, les organisateurs ont reçu la bénédiction du pape François et ont invité l’historien allemand Arnulf Bahring.
4 Kulturstiftung Der Deutschen Vertriebenen (dir.), Vertreibung und Vertreibungsverbrechen 1945-1948. Bericht des Bundesarchivs von 28. Mai 1974, Archivalien und ausgewählte Erlebnisberichte, Bonn, 1989.
5 H. Nawratil, Schwarzbuch der Vertreibung 1945 bis 1948, Berlin, Universitas, 1999/Vertreibungs-Verbrechen an Deutschen. Tatbestand, Motive, Bewältigung, Munich, Universitas, 1982/Der Kult mit der Schuld : Geschichte im Unterbewußtsein, Munich, Universitas, 2005 ; ces trois ouvrages sont centrés sur les victimes allemandes. Le premier date des années 1980, lorsque l’idée d’une construction commune de l’histoire avec des historiens polonais et tchèques n’était pas encore d’actualité. L’historien a travaillé en étroite collaboration avec le BdV, il est lui-même originaire des Sudètes.
6 A. M. De Zayas, Die Anglo-Amerikaner und die Vertreibung der Deutschen, Berlin, Ullstein, 1996.
7 En référence au sous-titre de son ouvrage « Les Anglo-américains et l’expulsion des Allemands ».
8 Préface d’Alfred M. De Zayas, in H. Nawratil, Schwarzbuch der Vertreibung 1945 bis 1948, op. cit., p. 194.
9 « Von Betroffenen für Betroffene », in M. Krauss, Integrationen : Vertriebene in den deutschen Ländern nach 1945, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2008, p. 8.
10 « Nous allons vers des temps nouveaux », in L. Niethammer, A. Von Plato, Wir kriegen jetzt andere Zeiten. Auf der Suche nach der Erfahrung des Volkes in nachfaschistischen Ländern. Lebensgeschichte und Sozialkultur im Ruhrgebiet 1930 bis 1960, Berlin, Bonn, Dietz Verlag, 1985.
11 M. Schwartz, D. Hoffmann, Geglückte Integration ? Spezifika und Vergleichbarkeiten der Vertriebenen-Integration.
12 La création d’un « Centre contre les expulsions » est un projet controversé lancé en 1999 par le BdV. Il a provoqué de nombreux débats en Allemagne et des tensions diplomatiques avec la Pologne et la République tchèque. Il existe aujourd’hui une fondation du même nom qui organise des expositions sur les expulsions en Europe au XXe siècle. La fondation Stiftung Zentrum gegen Vertreibung s’efforce aujourd’hui d’obtenir le soutien de la communauté scientifique et rassemble dans son conseil des spécialistes tels Alfred M. De Zayas. Lire à ce propos : D. Heimerl, « Créer un Centre contre les expulsions ? », Le Courrier des pays de l’Est 3/2005, n ° 1049, p. 86-89.
13 M. Schwartz, « Dürfen Vertriebene Opfer sein ? Zeitgeschichtliche Überlegungen zu einem Problem deutscher und europäischer Identität », Deutschland Archiv, 38/2005, 3, p. 495.
14 T. Petersen, Flucht und Vertreibung aus deutscher, polnischer und tschechischer Sicht ; T. Urban, Der Verlust. Die Vertreibung der deutschen und Polen im 20. Jahrhundert ; P. Ther, Deutsche und polnische Vertriebene, Gesellschaft und Vertriebenenpolitik in der SBZ/DDR und in Polen 1945-1956 ; Stiftung Haus Der Geschichteder Bundesrepublik Deutschland (dir.), Flucht, Vertreibung, Integration, Bonn, Kerber Verlag, 2005. L’exposition « Flucht Vertreibung, Integration » montrée à Bonn et Leipzig entre 2005 et 2007 a cherché à offrir aux visiteurs une perspective européenne du XXe siècle, « siècle des réfugiés ». La place accordée aux réfugiés arrivés en RDA était cependant peu importante.
15 Ces termes seront expliqués longuement dans le cadre de ce travail et plus succintement dans le glossaire.
16 Terme dérivé de l’allemand « Tabuisierung », A. Volkwein, « Flucht und Vertreibung dans la mémoire collective officielle », La Clé des Langues, 30 septembre 2009.
17 A. Kossert, Kalte Heimat. Die Geschichte der deutschen Vertriebenen nach 1945, Munich, Siedler Verlag, 2008.
18 Die Lösung der Umsiedlerfrage auf dem Gebiet der DDR, dargestellt am Beispiel des Landes Sachsen (1945-1952).
19 Die Lösung des Umsiedlerproblems auf dem Territorium der DDR, dargestellt am Beispiel des Landes Thüringen (1945-1952).
20 M. Wille (dir.), Die Vertriebenen in der SBZ/DDR – Dokumente, Études du centre de recherches pour l’Europe centrale et Europe de l’Est de l’université de Dortmund, t. 19,1 ; 19,2 et 19,3, Wiesbaden, Harrassowitz Verlag, 1996, 1999, 2003.
21 M. Schwartz, Vertriebene und Umsiedlerpolitik ; A. Von Plato, W. Meinicke, Alte Heimat – Neue Zeit. Flüchtlinge, Umgesiedelte, Vertriebene in der Sowjetischen Besatzungszone und in der DDR.
22 M. Schwartz, D. Hoffmann, Sozialstaatlichkeit in der DDR, Sozialpolitische Entwicklungen im Spannungsfeld von Diktatur und Gesellschaft 1945/49-1989, Munich, Oldenbourg, 2005.
23 Arndt Bauernkämper pour la réforme agraire, Michael Schwartz et Dierk Hoffmann pour la politique sociale, in Sozialstaatlichkeit in der DDR/Damian Van Melis, Integration statt Entnazifizierung In Geglückte Intergration.
24 M. Naimark, Die Russen in Deutschland. Die sowjetische Besatzungszone 1945 bis 1949.
25 H.-U. Thamer, « Zwischen zwei Diktaturen, Kontinuität und Diskontinuität im Proze der Diktatur », in T. Grossbölting, H.-U. Thamer (dir.), Die Errichtung der Diktatur, Transformationsprozesse in der SBZ und in der frühen DDR, Münster, Aschendorff, 2003, p. 11.
26 L’historigraphie saxonne est précisée dans le premier chapitre.
27 Peu de recherches concernent la période postérieure au 17 juin 1953, lorsque le contrôle exercé par le SED devient omniprésent. Les archives ne font plus mention des réfugiés. À part pour quelques rares ouvrages comme celui de Michaël Schwartz, « Vertriebene und Umsiedlerpolitik, 1945-1961 », on passe alors dans le champ de l’histoire mémorielle : M. Schwartz, « Tabu und Erinnerung. Zur Vertriebenenproblematik in Politik und literarischer Öffentlichkeit in der DDR », in Zeitschrift für Geschichtswissenschaft, Heft 1, 51. Jahrgang, 2003. Malgré l’absence de sources administratives ou politiques, les réfugiés sont présents notamment dans la littérature. Dès 1953, Anna Seghers raconte l’intégration des réfugiés dans sa nouvelle « Die Umsiedlerin ». Si elle fait entrer l’expression Umsiedler dans la littérature est-allemande, la politique d’intégration du SED n’y est pas problématisée mais idéologisée. Sa nouvelle devient l’archétype de l’écrit socialiste et réaliste de l’époque. En 1961 Heiner Müller utilise des fragments de cette nouvelle dans sa pièce de théâtre « Die Umsiedlerin oder das Leben auf dem Lande », qui thématise l’idéologie d’intégration imposée par le SED. La pièce est interdite dès sa première présentation au public.
28 Le témoignage de Margarete N. est proposé au lecteur à titre d’exemple dans les annexes. Les traductions présentées dans ce travail ont été réalisées par l’auteur.
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