Mobilités patronales dans l’après-guerre et impact de l’épuration
p. 83-100
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1Selon les représentations communes, l’épuration patronale n’aurait pratiquement pas eu lieu ; les patrons compromis dans la collaboration n’auraient guère été punis et presque tous auraient pu poursuivre leur carrière sans encombre. Tout dépend en fait de la manière dont on la mesure. Si l’on ne prend en compte que les sanctions effectivement prononcées, non révisées en appel, non amnistiées et qui ont formellement écarté de manière durable des dirigeants, le bilan est effectivement quasi nul. Mais si l’on recense toutes les procédures lancées contre des patrons, aussi bien dans le cadre de l’épuration professionnelle que judiciaire dans leurs différentes composantes1, le bilan est tout sauf négligeable : comme plusieurs contributions de ce volume le montrent à l’échelle d’une région ou d’un secteur, ce sont des milliers de responsables économiques qui ont été touchés d’une manière ou d’une autre. Les cas sont trop nombreux et les procédures trop diverses pour en faire un inventaire général. On peut bien sûr rester dans le registre de la déploration et dire que tout cela n’a servi à rien, toutes les personnes inquiétées étant finalement en mesure de reprendre à un moment ou à un autre leur poste. Mais c’est d’oublier que, pour les intéressés, ces mois ou ces années de poursuites n’ont pas été sans conséquence. Ils ont souvent été mis en cause publiquement, parfois éloignés un temps de leurs responsabilités, éventuellement internés, au moins obligés de s’expliquer devant des juges ou devant leurs pairs de leur comportement sous l’Occupation. S’ils n’ont pas souvent été condamnés, ils n’ont pas plus été nécessairement blanchis ou innocentés aux yeux de l’opinion publique. Tous n’ont pas été en mesure de reprendre leur fonction antérieure, ou du moins pas au même rang. Non-condamnation définitive ne signifie donc pas nécessairement continuité du personnel patronal. On en arrive donc à une autre manière de mesurer l’importance de l’épuration économique : recenser tous les changements durables de personnel dirigeant intervenus à la Libération qu’ils soient ou non contraints juridiquement, que les intéressés aient été ou non poursuivis. La seule exigence est alors qu’il existe au moins un indice selon lequel le changement serait lié à une mise en cause du comportement sous l’Occupation, et pas seulement à des causes naturelles (décès, maladie) ou professionnelles (divergences privées au sein de l’entreprise, autre opportunité de carrière). La difficulté est que les causes souvent invoquées officiellement, « les raisons de santé » en particulier, ne correspondent pas nécessairement à la réalité et peuvent cacher une épuration « officieuse » ou tacite.
2L’affaire se complique à la Libération avec la mise en œuvre d’un vaste programme de nationalisations. Celles-ci, comme on l’a revu ensuite en 1982, sont toujours l’occasion d’un important changement du personnel dirigeant, soit que l’État nouvel actionnaire ne maintienne pas sa confiance aux responsables en place, soit que ceux-ci préfèrent continuer à s’occuper d’affaires privées. Qui plus est, en 1945-1946, les nationalisations ne s’opèrent pas, dans un certain nombre de branches, à structure constante. Si Renault, les banques ou les assurances sont maintenues en l’état, les sociétés houillères, gazières et électriques font l’objet d’un regroupement dans un établissement public unique, avec des déclinaisons régionales (par bassins) pour les premières. Les cartes sont alors nécessairement brassées : les dirigeants en place dans les nombreuses sociétés privées intégrées ne peuvent nécessairement pas tous rester en poste, sauf à accepter de se contenter de simples fonctions d’encadrement local salarié sans le prestige et la rémunération associée du mandataire social – président directeur général (PDG), directeur général (DG) – qu’ils étaient. Tous les changements recensés dans les entreprises nationalisées ne relèvent donc pas de l’épuration, mais certains peuvent s’y apparenter.
3Cette contribution s’efforce donc de faire, dans un premier temps, un inventaire des changements durables de personnels dirigeants susceptibles d’être plus ou moins associés à l’épuration dans les différents secteurs et branches de l’économie, au moins pour les plus grandes entreprises cotées. Ce sont celles qui sont les plus susceptibles d’avoir connu des changements, qu’elles soient touchées par les nationalisations, ou à défaut que leur propriété moins personnelle ou familiale permette plus facilement de dissocier identité des dirigeants et des actionnaires. Dans un second temps, nous verrons ce que deviennent les dirigeants repérés comme évincés de gré ou de force. Dans quelle mesure sont-ils mis au ban du monde des affaires, ou réussissent-ils au contraire à rebondir ailleurs dans d’autres fonctions plus ou moins importantes ? Dans un troisième temps, nous examinerons qui sont les nouveaux venus qui les remplacent. Existe-t-il une continuité en interne ? Ou fait-on plutôt appel à des personnes extérieures ? L’engagement dans la Résistance représente-t-il une ressource déterminante2 ?
L’ampleur variable des changements dans les grandes entreprises
Une forte continuité dans les entreprises restées privées3
4D’importantes branches industrielles sont très peu touchées par l’épuration. C’est le cas de la sidérurgie, dont les dirigeants ont largement réussi à la Libération à arguer qu’ils avaient été trop écartés de la gestion de leurs usines pour s’être compromis sous l’Occupation4. Un seul dirigeant est écarté définitivement, le PDG des Hauts-fourneaux et fonderies de Pont-à-Mousson, Marcel Paul-Cavallier (1879-1946), très engagé personnellement dans la collaboration. D’après le procès-verbal du conseil d’administration, il aurait « en raison de son état de santé et de son éloignement de l’Est » présenté dès le 7 septembre 1944 sa démission à la fois de la présidence et du conseil d’administration5. Replié en Vendée, une information judiciaire est ouverte contre lui, mais il décède en janvier 1946 à 66 ans sans qu’un procès ait eu lieu.
5Peu de chose à signaler a priori dans la construction mécanique, en dehors des branches particulières de l’automobile et de l’aéronautique. Les dirigeants des grands groupes de la construction électrique comme Thomson-Houston, la Compagnie générale d’électricité ou Alsthom ne sont pas non plus touchés. Dans l’industrie des métaux ferreux et non ferreux, rien ne change chez Alais Froges et Camargue (AFC-Pechiney) pourtant très impliqué dans les contrats de livraison de bauxite et d’aluminium à l’Allemagne : le vice-PDG d’AFC Raoul de Vitry se serait ainsi dans les derniers mois de l’Occupation suffisamment engagé en faveur de la Résistance pour ne pas être véritablement inquiété6. Aux Tréfileries et laminoirs du Havre, le président Jean Maroger n’est pas non plus affecté par le fait qu’il ait en juillet 1940 voté en tant que sénateur les pleins pouvoirs au maréchal Pétain. Il n’y a qu’à Ugine où le PDG Georges-Jean Painvin (1886-1980) est contraint de se retirer, et encore assez tardivement. Il semble être victime tout autant des divers accords et marchés conclus avec l’occupant par son groupe que du cumul de nombreuses fonctions exposées sous Vichy : présidence du comité d’organisation des industries chimiques, présidence du Crédit commercial de France en 1941 après que les Allemands aient chassé son prédécesseur, dernièrement en mars 1944 présidence de la chambre de commerce de Paris. Il reste cependant en poste à la Libération et ce n’est que le 12 décembre 1945, après qu’une double instruction ait été ouverte à la fois devant la cour de justice de la Seine et la Commission nationale interprofessionnelle d’épuration (CNIE), qu’il se décide à démissionner à la fois de la présidence du conseil d’administration et de son mandat d’administrateur : « Il déclare que ce n’est pas sans avoir mûrement réfléchi qu’il a été amené à cette décision prise pour des raisons de convenances personnelles, et en particulier pour raisons de santé7. » Mais, dès février 1945, un rapport effectué par l’ingénieur civil des mines Jean Parenteau, à la demande du ministre de la Production industrielle, « sur l’activité du groupe Ugine et de ses dirigeants au regard de la collaboration avec l’ennemi », avait déjà, tout en insistant sur les qualités exceptionnelles de Painvin, montré que sa position était devenue intenable sous peine de susciter des troubles dans les usines :
« Très grande classe. Apparaît comme un excellent négociateur. A été amené, en raison d’une crise intérieure de la Société, à se désintéresser de la technique et de l’activité industrielle pour se consacrer au redressement de la société vis-à-vis de ses concurrents. Pour cela, M. Painvin a été amené à rechercher certaines places honorifiques. Cette ascension rapide a commencé vers 1932. En 1939, M. Painvin était déjà un des « grands hommes » de la chimie. Au lieu de s’isoler comme beaucoup pendant l’Occupation, il a accepté des places que d’autres auraient pu occuper avec autant de motifs que lui. Ce faisant, il a attiré les regards sur lui et il a certainement dû jouer le jeu d’une certaine collaboration. Il ne paraît pas que cette collaboration ait été confirmée par des actes. Mais il est incontestable que, dans l’esprit de beaucoup de personnes, M. Painvin passait pour favorable au régime. Cela, d’ailleurs, sans aucune preuve. […] [En conclusion] il faut constater que, dans son ensemble, le personnel est convaincu de la « collaboration » du Président Painvin. Ce sentiment a probablement sa source dans une série de circonstances :
- Painvin n’est pas connu du personnel exécutant ;
- Il personnifie un régime abhorré ;
- Il a été attaqué avec une telle violence par la presse lue par les ouvriers que ceux-ci croient à l’exactitude des faits reprochés, même quand ceux-ci sont nettement faux (comme le versement à un groupement politique signalé par un journal de Marseille) ;
Cette conviction est tellement profonde que l’on peut être certain que si, après la fin de l’enquête, M. Painvin continue à être Président de la société, il y aura des troubles dans les usines. Peut-être ceux-ci ne seront-ils pas immédiats, mais ils éclateront vite et le rendement du travail sera très faible. […] Le départ de Painvin ne sera pas sans apporter du trouble dans la société, mais son maintien paraît être devenu non souhaitable8. »
6Le fait à la fois que la CNIE mette Painvin, ainsi que deux des adjoints restés eux en poste, hors de cause en juin 1947 et qu’en mai 1948 le ministère public auprès de la cour de justice de la Seine demande un non-lieu9 ne change rien à l’affaire. L’ancien PDG aurait « décliné pour des raisons de convenance personnelle » l’offre qui lui aurait été faite dès janvier 1948 de reprendre sa place au sein du conseil d’administration10. Il n’est pas sûr que celui-ci ait été fâché de cette décision : le procès-verbal indique prudemment que son successeur à la présidence, Eugène Mathieu, a eu sur ce sujet des « entretiens individuels » avec, outre Painvin, « la plupart des membres du conseil », ce qui semble suggérer qu’il y ait eu des divergences en son sein. Une solution est finalement trouvée de lui proposer « le titre de président honoraire, en même temps que la qualité de conseil pour les questions sur lesquelles la direction générale aurait le désir de le consulter », ce qu’il a accepté. Cette prétendue mission n’a probablement pas d’autres fonctions que de justifier une rémunération complémentaire, l’intéressé n’étant plus jamais évoqué ensuite.
7Dans la chimie, outre les cas d’AFC et d’Ugine déjà évoqués, les dirigeants de Rhône-Poulenc font l’objet d’une procédure devant la CNIE notamment pour l’accord conclu avec le groupe allemand IG Farben dans la vente des produits pharmaceutiques (affaire Théraplix), mais ils restent en poste avant d’être mis hors de cause. Chez Saint-Gobain, le jeune DG des produits chimiques tout juste nommé en janvier 1944, Philippe Coste (1904-1974), quitte bien ses fonctions, de manière présentée au départ comme provisoire, en juillet 1945, mais c’est en raison de son détachement auprès du gouvernement militaire de zone française d’occupation (ZFO) en Allemagne, où il est chargé de la direction de la production industrielle. Même si l’on sait que l’affectation en Allemagne a pu être paradoxalement un moyen discret d’éloigner des personnalités compromises sous l’Occupation11, rien ne permet de penser que de telles considérations politiques auraient joué un rôle dans ce cas. Son remplaçant est d’abord nommé DG par intérim avant, un an plus tard, le détachement de Coste se prolongeant, d’être désigné définitivement, le précédent titulaire restant lié à la Compagnie par un contrat d’ingénieur-conseil12. À l’Air liquide, le département de la présidence du cofondateur Paul Delorme (1868-1956) en 1945 doit à l’évidence s’interpréter, à 77 ans, comme une succession naturelle, d’autant plus qu’il passe le flambeau à son fils Jean, administrateur-directeur auparavant. Il n’y a que dans le groupe Kuhlmann, particulièrement mis en cause par l’accord conclu avec l’IG Farben pour la production de colorants dans la société commune Francolor, que des changements importants ont lieu. Le PDG René-Paul Duchemin (1875-1963) quitte son poste après la Libération, à une date non précisée par le rapport annuel, qui ne fait aucun commentaire sur ce départ. Le fait qu’il renonce à la fois à la présidence et (provisoirement) à son siège d’administrateur montre bien qu’il ne s’agit pas d’un départ naturel. À la différence de Painvin, le fait que l’instruction en cour de justice se termine par un non-lieu et la procédure devant la CNIE par une mise hors de cause lui permet d’obtenir en 1948-1949 une réintégration au conseil d’administration de Kuhlmann comme administrateur président d’honneur, en « reconnaissance à ce grand industriel des services imminents qu’il a rendus et continue de rendre13 ». L’ancien responsable de la branche organique devenu PDG de Francolor, Joseph Frossard (1879-1955), est lui écarté dès la Libération de son poste, l’entreprise étant mise sous séquestre et confiée à un administrateur provisoire. En juillet 1947, il est le seul parmi les personnes poursuivies dans cette affaire à être sanctionné par la CNIE, d’une interdiction de conserver un poste de commandement dans les entreprises de produits chimiques14. Il prend alors la fuite en Suisse avant même la clôture de l’instruction judiciaire qui le vise. Renvoyé devant la cour de justice de la Seine « pour intelligences avec une puissance étrangère en vue de favoriser les entreprises de cette puissance contre la France » par le ministère public, il est jugé par contumace et condamné à 10 ans de réclusion. Son dossier est alors transmis au tribunal militaire de Paris, qui prononce finalement son acquittement en 1951. Il reste toutefois en Suisse où il meurt quatre ans plus tard.
8Aucun changement n’a pu être repéré dans l’industrie du verre, à la direction générale de la branche glaceries de Saint-Gobain en particulier15, dans l’industrie des pneumatiques, et notamment chez Michelin considérée à tort ou à raison comme une « entreprise résistante ». De même, les filiales françaises des compagnies pétrolières anglo-saxonnes, pourtant coupées de leur maison mère pendant la guerre, n’ont pas non plus été touchées.
9Dans l’industrie de consommation, aucun changement susceptible d’être associé à l’épuration n’a été repéré ; il est vrai que, dans l’agroalimentaire ou le textile par exemple, la dispersion entre de multiples spécialités, la faible concentration et la prédominance des entreprises familiales non cotées rendent plus difficile un tel repérage. Mais la CNIE n’est pratiquement saisie d’aucune affaire. Tout juste peut-on signaler l’existence d’une instruction judiciaire à la fois devant la cour de justice de la Seine et de Lyon dans l’affaire de l’entreprise franco-allemande France-Rayonne (textiles artificiels). Son PDG Ennemond Bizot, gendre Gillet, est inculpé et mis en détention provisoire par le magistrat instructeur de la cour de justice de Lyon en avril 1945, contre l’avis de son collègue parisien, mais il est remis en liberté dès le mois de septembre suivant16. L’affaire se termine par un non-lieu et il conserve la direction de cette branche du groupe Gillet. En l’absence de remise en cause de la propriété privée, des changements durables de dirigeants sont de toute façon improbables dans ces groupes familiaux.
10On pourrait s’attendre à une épuration plus sévère dans les branches ayant beaucoup travaillé pour les Allemands. Dans le bâtiment-travaux publics (BTP), qui représente une part très importante des dossiers examinés par les comités régionaux interprofessionnels d’épuration et la CNIE, les changements à la tête des entreprises sont en fait très limités. Les plus grandes (Grands Travaux de Marseille, Société générale d’entreprise, etc.) ne sont pas touchées et dans les autres, la part du contrôle familial est telle qu’il ne peut guère en être autrement sans remise en cause de la propriété. Parmi les entreprises nationales ayant leur siège à Paris, les seuls cas recensés par l’historien spécialiste du secteur, Dominique Barjot17, n’ont pas eu d’impact durable :
- la Société de constructions des Batignolles : le PDG Ernest Gouïn (1881-1967), petit-fils du fondateur, est arrêté le 30 septembre 1944 en raison de l’activité déployée par la société pendant l’Occupation, mais il est libéré 18 mois plus tard « grâce à la pression exercée par les banques Rothschild, Lazard et Seligman ». Il reprend ses fonctions au sein de la société dès le mois de mars 1946, avant de reprendre officiellement la présidence du conseil en novembre18 ;
- Sainrapt & Brice : la CNIE prononce une sanction sévère contre le PDG Louis-Pierre Brice (fils du fondateur né en 1900), il est interdit de faire partie d’un conseil d’administration de toute société commerciale, mais à la suite du classement sans suite de l’affaire par la cour de justice de la Seine en octobre 1948, la sanction est rapportée et l’intéressé reprend son poste. De manière caractéristique, sa notice biographique dans les éditions ultérieures du Who’s who indique simplement « PDG depuis 1929 des Éts Sainrapt & Brice19 ».
11Dans la branche connexe des cimenteries, la plus grande entreprise française, Lafarge, est bien frappée par la mise sous séquestre de son usine historique de Viviers en Ardèche par Y. Farge, mais le projet de nationalisation défendu par les communistes reste sans suite et la direction générale depuis longtemps installée à Paris n’est pas touchée. Si elle est largement renouvelée, c’est pour d’autres raisons, avec le décès accidentel du DG adjoint (DGA) en 1946 et la maladie puis le décès du PDG, héritier par alliance des fondateurs, l’année suivante. Chez un autre grand de la branche, Poliet & Chausson, le cas du PDG Henri Chausson (fils du fondateur né en 1895) mériterait lui d’être éclairci : cet ancien membre du comité d’organisation des chaux et ciments « démission[ne] pour raison d’ordre personnel » du conseil d’administration et de la présidence le 31 janvier 194620 et ne réapparaît plus ensuite, malgré son relatif jeune âge, sans que l’on sache s’il y avait un lien avec l’épuration. La CNIE n’a en tout cas pas été saisie de l’affaire.
12Le cas de la construction automobile est laissé dans ce volume à une autre communication21 qui montre que l’épuration ne s’y limite pas aux affaires bien connues de Renault et de Berliet, avec notamment l’ouverture d’un certain nombre d’instructions en cour de justice de la Seine, même si là encore les changements durables sont limités.
13Dans la construction aéronautique, qui a exclusivement travaillé pour les Allemands sous l’Occupation, la part de l’industrie privée était limitée après la formation des sociétés nationales en 1937. Certains avionneurs comme Louis Bréguet ou Henry Potez auraient fait le choix de ne pas produire et de consacrer la guerre à faire des études22. Un certain nombre d’entreprises, notamment des équipementiers, sont toutefois mises sous séquestre à la Libération : Amiot, Caudron (filiale de Renault), Morane-Saunier, Latécoère, etc.23. Mais, là encore, il ne semble pas y avoir d’impact durable. Seul Émile Dewoitine qui a fabriqué des prototypes pour les Allemands part lui pour un long exil en Amérique du Sud.
14Les changements durables et effectivement liés à l’épuration sont donc très limités dans les grandes entreprises restées privées.
Des changements largement imposés par la nouvelle donne dans le secteur nationalisé
15À l’exception des nationalisations Renault et de Gnome & Rhône (moteurs d’avions) qui constituent des mesures isolées, les autres nationalisations de la Libération – l’ensemble des entreprises de production et de distribution de gaz et d’électricité, les compagnies houillères, les grandes banques de dépôts, les principales sociétés d’assurances – ont été effectuées de manière générale dans des branches particulières à des fins de politique économique sans distinguer selon les comportements des entreprises concernées et de leurs dirigeants sous l’Occupation24. La plupart des nombreux changements de personnels intervenus, au moins à la présidence du conseil d’administration25, ne semblent pas devoir être associés à l’épuration. On a d’abord des personnalités du monde financier – des banquiers présidents de sociétés d’assurances, comme Jacques de Neuflize, président de l’Union ou Ernest Mallet, président de la Compagnie d’assurances générales – ou des notables des affaires – Henri de Peyerimhoff (1871-1953), ancien président du Comité central des Houillères de France et PDG des Mines de Dourges et des Forces motrices de la Truyère, par exemple – qui n’ont pas vocation à diriger des entreprises publiques. Pour d’autres dirigeants d’un âge avancé, le changement de statut coïncide avec un départ à la retraite : de nombreux DG de compagnies houillères ont ainsi plus de 60 ans. D’autres choisissent de continuer à gérer les activités de leur groupe restées privées : c’est le cas d’Ernest Mercier (1878-1955) toujours PDG de son groupe réduit à la Lyonnaise des eaux, de responsables des branches électriques des groupes CGE et AFC, des dirigeants du groupe familial Durand avec les autres filiales l’Entreprise industrielle (BTP), l’Hydroénergie et les Eaux et électricité de Madagascar, etc. D’autres encore préfèrent conserver, dans un premier temps, des mandats d’administrateurs de sociétés, difficilement compatibles avec un poste de cadre dirigeant aux Houillères ou à EDFGDF, qui leur offrent d’ailleurs plus tard un nouveau tremplin : Émile Marterer (1883-1970), DG des mines de Blanzy, reste administrateur notamment de la CGE, dont il devient en 1955 le président ; de même, Roger Boutteville (1892-1975), DG de l’Union d’électricité, à l’Alsacienne de constructions mécaniques, dont il devient vice-président en 1949 et président en 1955. Enfin, certains managers plus jeunes ont l’opportunité de se reconvertir immédiatement avec succès dans d’autres secteurs : c’est le cas d’Étienne Périlhou (1887-1978), DG des Mines de Béthune, comme PDG de Kuhlmann, d’Ernest Cordier (1899-1971), PDG de l’Énergie électrique du littoral méditerranéen, comme président de la Société centrale de dynamite (groupe Nobel), de Paul Huvelin (1902-1995), dirigeant de filiales du groupe électrique Loire et Centre contrôlé par sa belle-famille Giros qui devient vice-PDG de Kléber-Colombes, etc.
16La continuité est donc assez faible au sommet. Dans les compagnies minières, non seulement les présidents mais aucun des DG, à l’exception de celui des Mines de Montrambert et de la Béraudière, François-Marius Margand (né en 1895), qui est nommé à la tête des houillères du Bassin de la Loire, ne poursuit sa carrière dans le groupe Charbonnages de France (CDF). Dans le gaz et l’électricité, ceux qui intègrent EDF ou GDF ne comptaient pas parmi les principaux dirigeants de la branche ; il s’agit plutôt de DG assez jeunes de filiales comme Robert Félix (1893-1977, Ouest-Lumière) et Pierre Massé (1898-1987, Énergie électrique du Rouergue) pour le groupe Mercier, Pierre Grézel (1901-1991, Force et Lumière) pour le groupe Durand, etc. qui trouvent dans la nationalisation l’opportunité d’accéder à des responsabilités de premier plan26. Certains ne restent pas longtemps en poste dans l’entreprise publique, juste le temps d’assurer la transition pour leurs équipes et de trouver pour eux-mêmes un débouché plus intéressant dans le privé : Richard Baumgartner (1903-1988), ancien DG de Nord-Lumière (groupe Mercier), devient dès 1948 vice-PDG de Lille-Bonnières & Colombes (pétrole).
17En revanche, dans les assurances, une bonne partie des PDG des nouvelles sociétés nationales sont d’anciens DG ou directeurs des compagnies privées. À la différence du charbon, du gaz et de l’électricité, eux bénéficient d’une augmentation du nombre de postes à pourvoir, avec un cumul moins fréquent du poste entre les différentes sociétés spécialisées (accidents, vie, etc.) d’un même groupe.
18Dans les banques, tous les PDG ou présidents des quatre banques de dépôts nationalisées quittent leur poste, mais si tous ont vu leur cas examiné par la CNIE, ils ont bénéficié d’un classement sans suite, il est vrai tardivement, après la nationalisation – 1947 pour Alexandre Célier au Comptoir national d’escompte de Paris (CNEP) et même 1949 pour Georges Brincard au Crédit lyonnais et Henri Ardant à la Société générale. Ces présidents plutôt âgés – Jules Guiraud à la Banque nationale du commerce et de l’industrie (BNCI) a 70 ans à la nationalisation, Brincard 74 ans – n’étaient pas nécessairement impliqués à plein temps dans la gestion de leur entreprise : le second détient ainsi également la présidence du groupe sidérurgique Châtillon-Commentry qu’il conserve.
19En revanche, tous les DG conservent leur poste, à l’exception d’un des co-DG du Crédit Lyonnais, Robert Masson (1876-1956) qui ne reste que quelques mois dans l’entreprise nationalisée et à 70 ans, en 1946, décide de se retirer des affaires pour achever sa vie comme… dominicain27. Il en va de même à l’échelon inférieur des DGA ou directeurs, et en particulier des inspecteurs des Finances recrutés dans les années 1920-1930, qui sont inscrits, selon leur âge, dans un ordre de préséance officieux pour accéder au poste de numéro un qui n’est pas remis en cause : Olivier Moreau-Néret (Crédit lyonnais) ou Maurice Lorain (Société générale) deviennent ainsi respectivement PDG en 1955 et 1958. Ce n’est donc qu’après leur départ, à la fin des années 1960, que l’État actionnaire peut prétendre véritablement peser sur le choix des dirigeants, avec en particulier le parachutage imposé de François Bloch-Lainé en 1967 à la tête du Crédit Lyonnais.
20La seule véritable « victime » de l’épuration est Henri Ardant (1892-1959), PDG de la Société générale, plus jeune que ses hommes : il quitte son poste de PDG de la Société générale dès novembre 1944 pour ne pas y revenir ; il est même incarcéré pendant plus d’un an28. L’affaire débouche cependant sur, à la fois, un non-lieu en matière judiciaire et une mise hors de cause (tardive) en février 1949 par la CNIE, où il a d’ailleurs été convoqué au seul titre de sa présidence du Comité permanent des banques sous Vichy.
21L’absence de lien direct entre épuration et nationalisation se traduit aussi par le fait qu’il y a aussi des dirigeants écartés dans les banques restées privées. À la Banque de l’Indochine, le PDG Paul Baudoin (1894-1964) est mis en cause, mais pour ses anciennes fonctions ministérielles (juin-octobre 1940, Affaires étrangères) sous Vichy. Il doit quitter son poste de PDG dès septembre 1944 ; en mars 1947, il est condamné à 5 ans de travaux forcés par la Haute Cour de justice, la peine étant commuée en 1949 à 5 ans d’indignité nationale. Au CCF, G.-J. Painvin cède dès 1944/1945, alors qu’il est encore aux commandes d’Ugine, son poste de PDG à Jean Davillier qu’il a remplacé en novembre 1941 lorsque celui-ci a été chassé par les Allemands. Même si les choses se passent plus discrètement que chez Ugine, il ne reprend pas pour autant son poste antérieur de vice-président et quitte le conseil d’administration, lequel est dans son ensemble mis hors de cause par la CNIE en décembre 1948.
22C’est surtout chez Paribas que la pression politique est la plus forte. André Laurent-Atthalin (1875-1956) a démissionné de la présidence dès le 1er septembre 1944 à la suite de la pression du gouvernement qui aurait menacé de cesser toute relation avec la banque29. Il est sanctionné par la CNIE les 17-19 mars 1947 d’une interdiction de conserver un poste de commandement et de faire partie d’un conseil d’administration à Paribas seulement. Henry Jahan (1886-1981) est resté à la direction générale officiellement jusqu’au 4 mars 1948, mais il a lui aussi été sanctionné en mars 1947 par la CNIE d’une interdiction de conserver un poste de commandement à Paribas. En juillet 1950, il bénéficie d’un non-lieu tardif de la cour de justice de la Seine, ce qui lui permet de faire un recours auprès de la CNIE qui le met immédiatement « hors de cause ». La direction de l’entreprise est largement décapitée : parmi les quatre directeurs en poste à la Libération, Charles Couture est le plus sévèrement sanctionné par la CNIE (interdiction de conserver un poste de commandement à Paribas et de faire partie de CA dans l’ensemble des sociétés commerciales) et Paul de Thomasson, absent en 1946-1947 pour soigner une tuberculose en Suisse, est relaxé par la CNIE en 1948, mais il rejoint la Banque de l’Indochine comme DGA en 1950. Seuls deux autres directeurs restent en poste, dont l’un sanctionné d’un seul blâme avec affichage par la CNIE.
Le poids des compromissions politiques dans le secteur déjà public
23À la SNCF, le président, Pierre Fournier (1892-1972), pourtant ancien responsable sous Vichy du Service de contrôle des administrateurs provisoires (SCAP) des entreprises considérées comme juives, reste en fonction jusqu’en août 1946 ; le DG Robert Le Besnerais (1893-1948) a en revanche quitté son poste dès le 30 septembre 1944. D’après l’étude menée en 1996 par Christian Bachelier sur la SNCF sous l’Occupation, l’attachement de René Mayer, ministre des Communications, au réseau du Nord n’aurait pas réussi à sauver Le Besnerais, ancien dirigeant de la Compagnie du Nord, des attaques de la part des communistes. « Mayer [était] prêt à épurer le président Fournier, un non-cheminot, pour conserver Le Besnerais. Mais Fournier, bien que fortement contesté par les syndicalistes communistes, demeure en fonction, faute de remplaçant ; et c’est donc Le Besnerais qui sera alors épuré30. »
24Dans les compagnies maritimes nationalisées (Compagnie des messageries maritimes et Compagnie générale transatlantique), restées quasi sans activités pendant la guerre, on ne relève aucun changement à la direction générale. À Air France, qui a déjà fait l’objet d’une nationalisation partielle en 1932 sous la forme d’une société d’économie mixte avec participation minoritaire de l’État avant de l’être totalement à la Libération, la mise à l’écart du PDG Bertrand Pujo, en poste depuis 1936, doit plus, comme P. Baudoin, à sa participation même brève au gouvernement de Vichy : Léon Pujo (1878-1964), ancien chef d’état-major général de l’armée de l’air, a été de juin à septembre 1940 ministre de l’Air. Comme tous les anciens ministres, il est traduit devant la Haute Cour de justice, mais il bénéficie en novembre 1948 d’un « arrêt des poursuites31 ». À 70 ans, il ne retrouve bien sûr pas son poste à Air France.
25À la tête des différentes sociétés nationales de construction aéronautique constituées en 1937, le personnel dirigeant est entièrement renouvelé : celui qui est à la fois, semble-t-il, leur président commun et le DG de celle du Sud-Ouest, Paul Mazer (1894-1967), serait écarté, ainsi que les DG du Nord, du Centre et du Sud-Est32.
26Des changements sont aussi à signaler dans le secteur bancaire public. À la Banque de France, les numéros 1 et 2 sont écartés : le gouverneur, Yves Bréart de Boisanger (1896-1976), en poste depuis août 1940 après avoir été nommé sous-gouverneur en 1937, qui s’est particulièrement exposé comme responsable de la délégation économique à la commission d’armistice de Wiesbaden est suspendu de ses fonctions dès le 22 août 1944 avant d’être révoqué sans pension à la fois de son poste et de son corps d’origine de l’inspection des Finances en décembre33. René Villard (1894-1987), 1er sous-gouverneur depuis septembre 1940 après avoir occupé les mêmes fonctions au Crédit foncier, est également suspendu le 29 août 1944, avec un demi-traitement. Malgré l’avis plutôt favorable d’un jury d’honneur, il est invité en février 1945 à démissionner par le ministre des Finances René Pleven, qui lui reproche surtout son bref passage au cabinet de Pétain comme secrétaire général à la présidence du conseil du 17 juin au 31 août 1940. L’intéressé se soumet et demande la liquidation de sa pension ; un décret du 15 mars 1945 le récompense et y met les formes en le nommant sous-gouverneur honoraire.
27Au Crédit foncier, le gouvernement en place depuis 1936, Roger Guérin (1885-1945) est « admis [en janvier 1945] sur sa demande à faire valoir ses droits à la retraite et nommé gouverneur honoraire34 », alors qu’il n’a pas encore 60 ans ; là aussi, les formes sont mises, mais, même s’il décède quelques mois plus tard (avril), son départ a dû être précipité par les circonstances. Les deux sous-gouverneurs en poste qui, de manière exceptionnelle, n’étaient alors pas des inspecteurs des Finances sont eux remplacés par des membres du corps en 1945 et 1946. L’un d’entre eux, Georges Charra, est toutefois promu PDG des Assurances générales Vie nationalisées. Le départ de Guérin au Crédit foncier libère opportunément un poste moins exposé pour Henry Deroy, dont le maintien comme DG de la Caisse des dépôts et consignations, poste qu’il occupe depuis 1935, apparaîtrait difficile vis-à-vis du personnel, même s’il a été blanchi par un jury d’honneur. Lui aussi s’est exposé en cumulant sa fonction à la Caisse avant celle de secrétaire général au ministère des Finances du 16 juillet 1940 au 15 février 1943. En revanche, aucun changement au Crédit national où Wilfrid Baumgartner, PDG depuis 1937 protégé par son arrestation en août 1943, et son adjoint directeur restent en place.
28De manière générale, ce sont donc souvent moins, dans le secteur public comme dans le secteur privé, les fonctions exercées à la tête des entreprises que l’exercice antérieur ou parallèle de responsabilités dans l’appareil d’État vichyste qui expose à des exclusions durables. Il est ainsi frappant de constater que trois des grands exclus (M. Paul-Cavallier, G.-J. Painvin, H. Ardant) ont été les seuls dirigeants d’entreprises nommés en novembre 1942 par un arrêté de Laval membres d’un compromettant « Comité national des amis des travailleurs français en Allemagne35 ».
Des « exclus » déchus mais pas bannis
29Dans le secteur privé, les dirigeants écartés définitivement de leur poste ne sont pas, on l’a vu, très nombreux. Mais il se trouve tout de même quelques-unes des plus belles carrières patronales de l’entre-deux-guerres à s’arrêter net. Ils ne retrouvent jamais de fonctions équivalentes, sans être pour autant bannis complètement du monde des affaires. Ils doivent se contenter de fonctions dirigeantes de second rang, voire de simples sièges d’administrateurs. L’âge avancé de plusieurs d’entre eux peut bien sûr l’expliquer largement ; l’éviction à la Libération n’aurait fait que précipiter une retraite programmée. C’est le cas d’André Laurent-Atthalin qui a 69 ans quand il quitte la présidence de Paribas en 1944. Il n’apparaît plus ensuite comme président honoraire des compagnies de chemins de fer du PLM et du Maroc36. Ils sont toutefois quelques autres tout juste sexagénaires ou plus jeunes qui peuvent difficilement se satisfaire d’une semi-retraite. G.-J. Painvin fait lui le choix de s’éloigner de la métropole. Une nécrologie professionnelle parue en 1980 explique pudiquement : « En 1945, à 59 ans, il éprouve le besoin de prendre du recul et du repos ; il […] abandonne la plupart de ses fonctions. Mais ayant accepté des responsabilités importantes au Maroc, il décide en 1948 de s’installer à Casablanca où en 1950 lui est confiée la présidence de l’Omnium nord-africain. Il s’attache avec son énergie coutumière au développement industriel du pays et du port de Casablanca, en particulier ; il est nommé pour ce faire président délégué de la Société chérifienne d’exploitation d’ouvrages maritimes, de la Société chérifienne du plâtre, membre de la chambre de commerce et d’industrie de Casablanca, etc.37. » Il ne rentre en France qu’en 1962, à 76 ans, avec pour seuls titres les présidences d’honneur d’Ugine et du CCF qui lui ont été entre temps attribuées. Cela n’empêche pas de rattraper son retard dans l’échelle de la Légion d’honneur : officier depuis 1933, il est promu commandeur en 1963 au titre du ministère de la Guerre puis grand officier par le Premier ministre Pierre Messmer en 1973 ; c’est son activité de brillant décrypteur des messages allemands pendant la Première Guerre mondiale qui est alors mise en avant.
30R. Le Besnerais, s’il ne peut plus « par une injustice de l’époque [sic !], se consacrer à ce grand secteur de l’industrie nationale [SNCF], le Comité de l’union Internationale des chemins de Fer, où il jouit d’une haute réputation, et les Chemins de Fer de l’Indochine et du Yu-nam donnent un champ à son activité. Puis, [il] accepte de diriger la coordination technique des mines de fer, et de prendre la présidence de la Fédération des chambres syndicales des minerais et métaux bruts, pour coordonner et développer la production. C’est alors qu’en avril 1948, le Conseil national du patronat français fait appel à ses qualités d’organisateur et à sa puissance de travail, en lui confiant le poste de délégué général38 ».
31Les autres cas ont en commun de concerner des inspecteurs des Finances39. H. Ardant et H. Jahan avaient déjà depuis longtemps démissionné du corps à la suite de leur pantouflage rapide dans le secteur bancaire privé dans les années 1920. Le premier doit se contenter, avant son décès à 67 ans en 1959, de sièges d’administrateur de sociétés de second rang, notamment dans ce qui reste du groupe Durand (Hydroénergie, Électricité et eaux de Madagascar40). Il ne semble avoir conservé aucun lien avec la Société générale nationalisée. De manière significative de son effacement, celui qui a été le banquier français le plus en vue n’a même pas de notice dans le Who’s who dans les années 1950. Le second s’en sort mieux en restant lié au groupe Paribas. C’est en tant que représentant de la banque qu’il siégerait dans divers conseils de sociétés comme la Compagnie des phosphates et chemins de fer de Gafsa (Tunisie) et Compagnie des salins du Midi41. Il est également PDG de la Caisse de crédit à moyen terme en France et aux colonies, président de la filiale française de la Banca commerciale Italiana et de l’Union industrielle de crédit pour la reconstruction, et même administrateur de la grande Compagnie française des pétroles.
32P. Fournier est lui resté après son départ de la présidence de la SNCF dans le corps de l’inspection. Il préside la Société nationale d’investissement à partir de 1949 et fait ensuite, après sa retraite administrative, une belle carrière d’administrateur de quelques-unes des plus importantes entreprises privées françaises (Compagnie financière de Suez, Banque de l’Indochine, Banque de l’union parisienne, Rhône-Poulenc, Pechiney). René Villard, qui prend sa retraite de l’inspection en 1945 à son départ de la Banque de France, exerce aussi diverses fonctions dans le secteur financier et immobilier : administrateur (1946) puis président (1949) du Crédit maritime aérien et fluvial, vice-PDG (1954) de la Société des immeubles de France, PDG (1956) de la Compagnie foncière de France. La différence reste nette avec une sortie du secteur public qui aurait été programmée : il lui faut patienter plusieurs années pour obtenir des fonctions qui restent modestes pour quelqu’un de son rang.
33P. Baudoin et Y. Bréart de Boisanger sont eux radiés du corps de l’inspection, ils n’apparaissent même plus dans les annuaires jusqu’à leur réintégration tardive à la fin des années 1950. L’un et l’autre poursuivent également leur carrière à la tête de sociétés coloniales qui ne comptent pas parmi les plus prestigieuses : PDG de la Compagnie minière de l’Oubangui oriental, président de l’Union financière d’Extrême-Orient, vice-président des Distilleries de l’Indochine, etc. pour le premier ; président de la Compagnie africaine agricole et minière (1947) et de la Société des mines de N’Zako (1949) pour le second. Celui-ci, après annulation en 1956 du décret de révocation par le Conseil d’État, obtient deux ans plus tard le titre de gouverneur honoraire de la Banque de France et fait alors une nouvelle carrière métropolitaine symbolisée par son apparition ultérieure dans le Who’s who : il cumule de nombreux postes d’administrateurs de sociétés il est vrai de second rang (président de la Société générale foncière, administrateur de la Société de constructions des Batignolles, de la Compagnie d’assurances le Continent IARD, etc.).
34Pour ces hommes, il semble donc que le monde colonial ait représenté au départ un débouché plus favorable devant l’obligation qu’ils avaient de se faire discrets en métropole. C’est seulement à partir de la fin des années 1950 que ceux qui en avaient encore l’âge ont, dans cette période des « refoulements42 », pu relancer leur carrière. Ils ne l’ont cependant fait que dans des proportions modestes au regard ce qu’elle augurait jusqu’à la Libération : aucun n’est redevenu un véritable patron d’une grande entreprise.
Filières traditionnelles et gages politiques dans les renouvellements
35Dans le secteur privé, la plupart des renouvellements s’effectuent en interne au profit généralement de l’adjoint du PDG écarté : c’est le cas par exemple à Ugine avec Eugène Mathieu et à Pont-à-Mousson avec André Grandpierre, anciens DG. À Paribas, le vice-président et ancien directeur Louis Wibratte devient président et Jean Reyre, directeur adjoint depuis 1941, bénéficie d’une promotion rapide (directeur en 1945, DG en 1948). Les seuls recrutements externes se font :
- chez Kuhlmann doublement frappé par l’éviction du président Duchemin et la disparition en déportation de l’ancien DG Raymond Berr, avec l’arrivée d’Étienne Périlhou, auparavant DG de la Compagnie de Béthune nationalisée, comme PDG et celle de Jean-Jacques Desportes, qui a quitté l’administration des mines en 1943 pour devenir vice-président de l’Omnium français des pétroles, comme DG ;
- à la Banque de l’Indochine au profit d’Émile Minost, DG du Crédit foncier égyptien rallié à de Gaulle dès 1940, comme PDG, un inspecteur des Finances en remplaçant un autre.
36Dans le secteur public où les changements sont plus nombreux, la variable politique ne joue pas de manière flagrante pour l’attribution de la plupart des postes de président ou PDG. Les seuls véritables résistants promus sont :
- Pierre Lefaucheux à la tête de Renault : PDG auparavant de la Compagnie générale de constructions de four, il a été comme dirigeant de l’Organisation civile et militaire et chef des Forces françaises de l’Intérieur du département de la Seine en mars 1944 le représentant le plus actif du patronat dans la Résistance ; arrêté en juin 1944, il a été déporté à Buchenwald, mais est revenu dès septembre 1944 en France après que son épouse ait convaincu les Allemands de son innocence ; il est Compagnon de la Libération ;
- à un degré moindre, Étienne Audibert, président d’EDF de 1947 à 1949 et premier président de CDF en 1948 : directeur de la Société nationale de recherche sur le traitement des combustibles de Senlis, il a été nommé maire de Senlis en 1941 ; condamné une première fois à 6 mois de prison par un tribunal militaire allemand en février 1942, il a été à nouveau arrêté en juin 1944 et déporté à Neuengamme ; il est titulaire de la médaille de la Résistance française.
37On trouve par ailleurs des hommes qui, sans être de véritables résistants, ont au moins des titres d’opposition à faire valoir sous l’Occupation :
- Maurice Montel nommé PDG des assurances l’Urbaine vie : cet ancien sous-directeur des Assurances Le Monde élu député « radical indépendant » du Cantal en 1936 est l’un des 80 à avoir refusé les pleins pouvoirs à Pétain en juillet 1940 ;
- Pierre Simon, premier et éphémère PDG d’EDF en 1946-1947 : écarté dès 1940 par Vichy de son poste de directeur des forces hydrauliques et des distributions d’énergie électrique que lui avait confié le Front populaire, il est parti ensuite dans le privé comme PDG de la filiale BTP du Groupe Durand (Entreprise industrielle) ;
- Roger Gaspard nommé DG d’EDF en 1946 : cet ancien du cabinet Ramadier, nommé directeur de l’électricité en mai 1942, a été arrêté un temps par les Allemands fin 1942 ; remplacé en août 1943 pour devenir directeur de l’inspection générale des laboratoires, il a été renommé directeur de l’électricité en septembre 1944 ;
- Marin Guillaume nommé DG de CDF en 1946 : il aurait été mis à la retraite anticipée du corps des mines et de son poste de directeur de l’école des mines de Paris en mars 1944 « à la demande pressante des autorités d’occupation43 » ;
- Louis Escallier nommé président du Crédit lyonnais en 1946, avant de devenir président d’EDF en 1949 : gouverneur de la Banque d’Algérie de 1934 à 1946, il a fait partie des hauts fonctionnaires financiers arrêtés en août 1943 internés en Allemagne44.
38Mais ce qui frappe surtout, c’est l’importance des réseaux traditionnels que constituent les grands corps administratifs :
- le corps des Mines dans les houillères, avec outre É. Audibert (X 1907) et M. Guillaume (X 1899), leurs cadets Michel Duhameaux (X 1918) nommé PDG des Houillères nationales du Nord et du Pas-de-Calais en décembre 1944 avant de devenir DG du Bassin de Lorraine en 1947, qui occupait pourtant depuis janvier 1942 le poste stratégique d’inspecteur général de la production industrielle à Lille, et Jean Armanet (X 1921), nommé DG du bassin du Nord-Pas-de-Calais en 1946 ;
- le corps des Ponts et Chaussées dans le gaz-électricité, avec outre P. Simon (X 1904), R. Gaspard (X 1920) et P. Massé (X 1916) déjà évoqués, Pierre Ailleret (X 1918, venu groupe Mercier), Raymond Giguet (X 1919 spéciale, venu de la CNR) et quelques autres venus de l’administration, qui constitue l’ossature de la direction de la nouvelle EDF, Georges Combet (X 1914), ancien PDG de la Société de gaz et électricité de Nice, devenu également DG de GDF ;
- le corps de l’aéronautique, avec Henri Desbruères (X 1927), nommé PDG en 1945 avant de rejoindre la SNECMA (ex-Gnome & Rhône) en 1949 ;
- l’inspection des Finances malgré le discrédit dont pourrait souffrir le corps à la Libération par l’implication sous Vichy d’un certain nombre de ses membres les plus en vue, il s’en trouve assez d’autres moins compromis pour conserver ses positions : avec des nouveaux venus comme Emmanuel Monick (1920) à la Banque de France ou Jean Watteau (1922) à la Caisse des dépôts, il accapare plus que jamais l’ensemble des postes dirigeants dans le secteur financier public ; si parmi les premiers présidents des banques nationalisées, seul L. Escallier (1909) au Crédit lyonnais est issu du corps, Guillaume de Tarde au CNEP venant du conseil d’État et Pierre de Mouy à la Société générale de la Cour des comptes, Ludovic Tron (promotion 1930), jusqu’alors directeur du Trésor et directeur de cabinet du ministre socialiste de l’Économie André Philip, remplace dès 1947 de G. de Tarde et, comme on l’a vu, les jeunes inspecteurs recrutés dans l’entre-deux-guerres restent en course pour une promotion ultérieure au poste de « numéro 1 ».
39Le seul secteur nationalisé non pris en main par un grand corps est celui des assurances, où l’inspection des Finances n’est guère plus présente qu’elle ne l’était dans les entreprises privées. C’est pourquoi on y trouve de manière exceptionnelle dans le système français de belles promotions internes à la branche : outre le cas de M. Montel déjà évoqué, on relève un fondé de pouvoir à L’Union, simple bachelier, qui devient PDG de l’Urbaine incendie et un chef de division à La Paternelle, PDG de Phénix incendie45.
40Ces hommes appartenaient cependant déjà à l’encadrement supérieur des compagnies. Les nationalisations de la Libération ne sont pas l’occasion de l’émergence de véritables nouvelles élites. La seule exception relevée est la désignation d’un syndicaliste, Léon Delfosse, un des principaux responsables de la Fédération CGT du Sous-sol dans la clandestinité et à la Libération, comme DGA des Houillères du Nord-Pas-de-Calais en février 1946. Par ailleurs, dans les sociétés nationales de construction aéronautique, très discréditées par leur production massive pour l’Allemagne, les nouveaux dirigeants nommés d’octobre 1944 à mars 1945 par le ministre communiste de l’Air Charles Tillon sont des ingénieurs et cadres proches du Front national et de la CGT46. Mais l’expérience s’avère un échec. Le sénateur Marcel Pellenc de la Gauche démocratique fait un rapport très critique sur leur gestion, les accusant d’être « des otages de la CGT » et, en octobre 1947, le président du conseil Paul Ramadier reprend ses arguments pour écarter des directions jugées « politiques et démagogiques ».
41Si les exclusions définitives sont très rares dans le secteur privé, elles frappent quelques grandes figures marquantes. Les nationalisations sont en revanche, surtout lorsqu’elles sont associées à des transformations de structures, l’occasion d’un important changement du personnel dirigeant. Même s’il ne s’inscrit pas dans l’épuration stricto sensu, il aboutit à un certain renouvellement. S’il s’effectue dans le respect des filières traditionnelles des corps en particulier, il profite à des hommes qui, sans avoir été nécessairement des résistants, ont su marquer des distances avec le régime de Vichy et la collaboration. En revanche, si les exclus n’ont pas été rejetés par leur milieu, qui ne les a pas laissés sans emploi ni subsistance, ils n’ont jamais retrouvé leur premier rang antérieur. Encore une confirmation que, aussi décevante puisse-t-elle apparaître dans ses résultats au regard des attentes, l’épuration des entreprises a bien existé.
Notes de bas de page
1 Sans compter l’épuration financière des profits illicites qui n’était elle pas supposée avoir d’impact direct sur les carrières individuelles, les sanctions susceptibles d’être prononcées étant seulement des peines d’amendes frappant les entreprises. En fait, dans le cas de petites affaires personnelles, des confiscations et/ou amendes élevées peuvent, en entraînant la faillite de l’entreprise, représenter une forme d’épuration patronale.
2 La meilleure source pour un tel travail serait de disposer des procès-verbaux du conseil d’administration dont la précision permet généralement de dater exactement les changements, de connaître leurs circonstances effectives, voire leurs motivations, mais ils n’ont pu être consultés que pour quelques entreprises. De manière alternative, les rapports annuels destinés à l’information des actionnaires ont été utilisés. Ils permettent de repérer les changements, mais pas toujours d’en reconstituer les chronologies fines et encore moins de les expliquer autrement que par les versions officielles. Le travail a été fait ici, dans le cadre d’une étude plus générale menée par ailleurs sur le recrutement des directions générales au xxe siècle, pour une vingtaine de grandes entreprises industrielles. Pour les autres, les notices des annuaires de sociétés ont été comparées entre les éditions avant et après la Libération, dans la limite qu’aucune explication n’est donnée a priori sur les causes, entre facteurs naturels ou pas, des changements repérés.
3 Le cas particulier des entreprises de presse, massivement sanctionnées dans le cas de la presse d’information générale ayant continué à paraître sous l’Occupation, n’est pas examiné ici. On renvoie ici au colloque spécifique organisé par le GDR sur cette branche en mars 2008.
4 Philippe Mioche, « Étude de cas : les sidérurgistes », in Jean-Pierre Azéma, François Bédarida (dir.), Vichy et les Français, Paris, Fayard, 1992, p. 601-612.
5 Archives Saint-Gobain (Blois), 51519, procès-verbal (PV) du conseil d’administration (CA) de la Société des hauts-fourneaux et fonderies de Pont-à-Mousson, séance du 5 octobre 1944.
6 AN, F12 9579, CNIE, dossier Aluminium français (AFC).
7 Archives Pechiney, 072-10-24925, registre n° 12, PV du CA d’Ugine, 12 décembre 1945.
8 AN, F12 9594, CNIE, dossier Ugine.
9 AN, Z6 NL n° 3453, dossier d’instruction de la cour de justice de la Seine.
10 Archives Pechiney, 072-10-24925, registre n° 12, PV du CA d’Ugine, 18 février 1948.
11 Voir, par exemple, le cas bien connu de Maurice Sabatier, préfet régional de Bordeaux depuis 1942 et supérieur hiérarchique de Maurice Papon, envoyé en 1944 comme directeur général des affaires administratives du gouvernement militaire de la ZFO en Allemagne.
12 Archives Saint-Gobain, PV du CA, 2 B 32, séances du 28 juin 1945 et du 11 juillet 1946.
13 Rapport annuel exercice 1948, ACL, DEEF 52444.
14 AN, F12 9574, CNIE, dossier Kuhlmann-Francolor.
15 Sous réserve du retour en 1945 du titulaire du poste jusqu’en 1939, Eugène Gentil (1880-1861), qui a passé toute la guerre comme ingénieur-conseil aux États-Unis, son ancien adjoint qui a assuré l’intérim pendant l’intervalle, Tony Perrin (1877-1965), prenant alors à 68 ans sa retraite en entrant au conseil d’administration.
16 AN, Z6 NL n° 31, France-Rayonne et Groupe Gillet.
17 Dominique Barjot, La Grande Entreprise française de travaux publics (1883-1974), Paris, Économica, 2006, p. 522-524.
18 Anne Burnel, La Société de construction des Batignolles de 1914 à 1939. Histoire d’un déclin, Genève, Droz, 1995, p. 321-322.
19 Who’s who in France, Paris, Laffite, 9e éd., 1969-1970.
20 Rapport annuel exercice 1946, Archives historiques groupe Crédit agricole, fonds Crédit lyonnais (ACL), DEEF 52641/2.
21 Voir la contribution de Patrick Fridenson, Jean-François Grevet et Patrick Veyret dans ce volume.
22 Emmanuel Chadeau, L’Industrie aéronautique en France 1900-1950. De Blériot à Dassault, Paris, Fayard, 1987, p. 370.
23 Ibid., p. 376.
24 Pour une étude générale des nationalisations de la Libération, voir Claire Andrieu, Lucette Le Van, Antoine Prost (dir.), Les nationalisations de la Libération, Paris, PFNSP, 1987.
25 Même si la loi du 16 novembre 1940 réformant les sociétés anonymes a prévu en principe une concentration des fonctions de président du conseil d’administration et de directeur entre les mains du seul PDG, la pratique tarde souvent à suivre et de nombreux présidents restent des notables qui délèguent la gestion quotidienne à un directeur général.
26 Hervé Joly, « Les dirigeants des entreprises électriques face à la nationalisation : ressources personnelles et trajectoires ultérieures », in Association pour l’histoire de l’électricité en France (éd.), La nationalisation de l’électricité en France. Nécessité technique ou logique politique ?, Paris, PUF, 1996, p. 243-255, ici p. 254.
27 Jean Rivoire, Le Crédit lyonnais. Histoire d’une banque, Paris, Le Cherche midi, 1989, p. 137.
28 Annie Lacroix-Riz, « Les grandes banques françaises de la collaboration à l’épuration : la non-épuration bancaire 1944-1950 », Revue d’histoire de la seconde guerre mondiale et des conflits contemporains, 1986, n° 142, p. 82.
29 Ibid., p. 84.
30 Rapport consultable sur le site http://www.ahicf.com, Épilogue.
31 Peter Novick, L’Épuration française. 1944-1949, Paris, Points Seuil, 1991, tableau annexe, p. 336.
32 Chadeau, op. cit., ne donne pas d’indication très précise sur ce point.
33 Renseignements aimablement transmis par Michel Margairaz, à partir de son texte « Les élites financières publiques de Vichy au retour à la République : une épuration précoce et endogène » présenté à Rome en janvier 2003 à une table ronde De la dictature à la République. Les modalités de la transition organisée à la Maison française de Rome, resté inédit à ce jour.
34 Décret du 25 janvier 1945, Journal officiel de la République française, 26 janvier 1945, p. 367.
35 Arrêté du 27 novembre 1942, Journal officiel de l’État français, 29 novembre 1942, p. 3948. Le comité est toutefois recomposé par un nouvel arrêté du 2 mars 1943, seul M. Paul-Cavallier en reste alors membre.
36 Annuaire Chaix. Les principales sociétés par actions, éd. 1954. des sociétés par actions
37 Nécrologie, Revue des ingénieurs, novembre 1980.
38 Ibid., novembre 1949.
39 Les indications sur les inspecteurs des Finances doivent beaucoup à la richesse des informations aimablement transmises par Nathalie Carré de Malberg et à ses nombreux travaux sur ce corps.
40 Annuaire Chaix, éd. 1954. Il siège également au conseil des Éts Arbel et de la Société française de matériel agricole et industriel.
41 Entreprise, 1er mai 1954.
42 Henry Rousso, Le Syndrome de Vichy de 1944 à nos jours, Paris, Seuil, 1987, chap. 2.
43 Nécrologie Annales des mines, décembre 1970.
44 Michel Margairaz, L’État, les finances et l’économie. Histoire d’une conversion 1932-1952, Paris, CHEEF, 1991, t. 1, p. 679.
45 Robert Beineix, père du cinéaste…
46 Chadeau, op. cit., p. 378, p. 391-392 et 394.
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