1 Michelet Jules, Histoire de France, t. VII : La Renaissance, Paris, Éditions des Équateurs, 2008 (1855), p. 246.
2 Sur la genèse du « portrait d’État » et sur la notion fondatrice d’une dignitas qui se communique, depuis le domaine théologico-politique, à la sphère humaniste, Arasse Daniel, « Les portraits de Jean Fouquet », in Augusto Gentili, Philippe Morel et Claudia Cieri-Via (dir.), Il ritratto e la memoria. Materiali, 2, Rome, Bulzoni Editore, 1993, p. 61-73 ; Mansfield Lisa, Representations of Renaissance monarchy. Francis I and the image-makers, Manchester, Manchester University Press, 2016.
3 Le travail d’Anne-Marie Lecoq est essentiel quant à cette invention imaginaire du roi qu’elle caractérise, à l’aide de fortes et significatives expressions, comme le moment d’un « grand remue-ménage iconographique » et d’une « fringale d’images nouvelles » quand bien même son étude ne couvre pas la totalité du règne – sa chronologie s’arrête en 1525 – et qu’elle ne prend pas véritablement en charge les thèmes du roi-chevalier et de la figure impériale parmi les douze qu’elle a repérés et analysés (François Ier imaginaire, op. cit.). On en prolongera la lecture avec la biographie de Robert J. Knecht, Un prince de la Renaissance. François Ier et son royaume (Paris, Fayard, 1998 [1994]) et les actes de la table ronde organisée en janvier 2014 (Réforme, humanisme, renaissance, « Cahier François Ier », no 79, décembre 2014) en attendant la publication de ceux du colloque sur « François Ier imaginé », organisé en avril 2015 (en lien avec l’exposition « François Ier. Pouvoir et image » qui s’est tenue au printemps 2015 à la BNF), et celle, prévue pour 2017, du livre de Laurent Hablot et de Thibaud Fourrier sur L’emblématique de François Ier revisitée.
4 Comme le souligne Valérie Sauvion, ce règne marque une rupture qualitative et quantitative quant à la représentation du souverain français (« Les portraits allégoriques de François Ier au XVIe siècle », in Pierre-Gilles Girault [éd.], François Ier, images d’un roi, de l’histoire à la légende, Blois-Paris, Château de Blois-Somogy Éditions d’art, 2006, p. 22-29).
5 Sur les racines anglaises de cette composition monumentale et dualiste, Kantorowicz E., Les deux corps du roi, op. cit., p. 310-313.
6 Le monument de Charles VIII est le premier tombeau royal français à intégrer les vertus cardinales au dispositif décoratif à l’imitation du modèle napolitain dont s’inspirent également celles figurant sur le tombeau du duc de Bretagne François II exécuté par Michel Colombe, de 1499 à 1507, à Nantes, selon un dessin de Jean Perréal. À la différence de ces dernières, elles n’étaient toutefois représentées que dans des niches circulaires. Réalisé par l’émilien Guido Mazzoni, dit Paganino, le tombeau était de bronze doré et émaillé de riches couleurs sur un soubassement de marbre noir. Installé dans le chœur de l’abbatiale en 1500, il fut détruit en août 1793, l’effigie du roi agenouillé devant un prie-Dieu sur lequel étaient posés une couronne et un livre, et les quatre anges qui tenaient ses armes écartelées de France et de Jérusalem avaient été, dès 1792, fondus pour servir la nation en armes.
7 Boudon-Machuel Marion, « Une nouvelle conception du tombeau royal. Les tombeaux de Louis XII et François Ier », Les dossiers de l’archéologie, no 311, mars 2006, p. 100-105 ; Zerner Henri, L’art de la Renaissance en France. L’invention du classicisme, Paris, Flammarion, 1996, p. 345-349.
8 Sur cette représentation, Bryant Lawrence M., « From Communal Ritual to Royal Spectacle : Some Observations on the Staging of Royal Entries (1450-1600) », in Nicolas C. Russell et Hélène Visentin (éd.), French Ceremonial Entries in the Sixteenth Century : Event, Image, Text, Toronto, Centre for Reformation and Renaissance Studies, 2007, p. 207-245, p. 231 ; Hochstetler Meyer Barbara, « Marguerite de Navarre and the Androgynous Portrait of François Ier », Renaissance Quarterly, vol. 48, no 2, 1995, p. 287-325 ; Béguin Sylvie, « François Ier, Jupiter et quelques belles bellifontaines », in Kathleen Wilson-Chevalier et Eliane Viennot (dir.), Royaume de Féminye. Pouvoirs, contraintes, espaces de liberté des femmes, de la Renaissance à la Fronde, Paris, Honoré Champion, 1999, p. 163-202, p. 180 ; Lepape Séverine, « Allégorie de François Ier en divinités antiques », in Petey-Girard B. et Vène M. (dir.), François Ier, op. cit., p. 63-65.
9 Contemporaines de cette image singulière, on rappellera la traduction par Antoine Héroet de l’Androygne de Platon en 1536 et les disputes poétiques autour de l’Amour (Merrill Robert V., « Eros and Anteros », Speculum, vol. 19, no 3, 1944, p. 265-284 et Hampton Cathy, « Francis I as the Chaste Lover. Almanque Papillon’s Nouvel Amour [1543] », The Modern Language Review, vol. 93, no 3, 1998, p. 642-658). Sur cette puissance de perfection dont l’androgynie serait le signe emblématique et l’Amour la vertu, Hochstetler Meyer B. (« Marguerite de Navarre and the Androgynous Portrait », art. cit., p. 306-307) s’inscrit en faux contre l’interprétation de cette figure proposée par Raymond B. Waddington qui veut y voir un portrait posthume à charge contre le feu roi, le dépeignant comme un homme physiquement courageux, mais moralement dépravé, dominé par de fortes femmes et objet de moqueries faciles (« The Bisexual Portrait of Francis I : Fontainebleau, Castiglione, and the Tone of Courtly Mythology », in Jean R. Brink et alii [éd.], Playing with Gender : A Renaissance Pursuit, Urbana et Chicago, University of Illinois Press, 1990, p. 99-132). Sur ces questions poétiques et philosophiques traversant les définitions critiques de la sexualité et de l’érotisme, Reeser Todd W., « Fracturing the Male Androgyne in the Heptaméron », Romance Quarterly, vol. 51, no 1, 2004, p. 15-28 et Schachter Marc, « Louis Le Roy’s Sympose de Platon and Three Other Renaissance Adaptions of Platonic Eros », Renaissance Quarterly, vol. 59, no 2, 2006, p. 406-439.
10 Graham David, « Alciat gaulois ou Hercules triplex », in Anne Rolet et Stéphane Rolet (dir.), André Alciat (1492-1550). Un humaniste au confluent des savoirs dans l’Europe de la Renaissance, Turnhout, Brepols, 2013, p. 411-423, p. 422.
11 Dahan Gilbert, « Les quatre sens de l’Ecriture dans l’exégèse médiévale », in Matthieu Arnold (dir.), Annoncer l’Evangile (XVe-XVIIe siècle). Permanences et mutations de la prédication, Paris, Cerf, 2006, p. 17-40.
12 Girault Pierre-Gilles, « François Ier et la diffusion du portrait royal à la Renaissance », in Pierre-Gilles Girault (éd.), François Ier, images d’un roi, op. cit., p. 13-21, p. 14.
13 « Pour esclaircir ce qui concerne le présent sujet, je suis bien contant de monstrer quel fruict nous pouvons recueillir de ces images, quel en fut et est l’usage. Image n’est autre chose, sinon une ressemblance, exemple et effigie, laquelle représente en soy celuy duquel elle est le portrait, fait (ce semble) revivre celuy, qui dès long tems décédé ou absent se représente à nos yeux. À ceste raison donques premièrement on a introduict les images, pourtraits et effigies peintes, gravées ou élevées, afin que l’esprit eut quelque cognoissance, démonstration et idée des choses cachées, esloignées, passées ou advenir » (cité par Isabelle Haquet, L’énigme Henri III. Ce que nous révèlent les images, Paris, Presses universitaires de Paris Ouest, 2011, p. 61 ; je souligne).
14 Lecoq A.-M., François Ier imaginaire, op. cit., p. 186-194.
15 Ce navire peut être un rappel de la nef de l’État mise en scène par le fatiste Pierre Gringore dans le mystère de la porte Saint-Denis lors de l’entrée de Louis XII à Paris, le 6 novembre 1514 (Sherman Michael A., « Pomp and Circumstances : Pageantry, Politics and Propaganda in France during the Reign of Louis XII, 1498-1515 », Sixteenth Century Journal, vol. 9, 1978, p. 13-32).
16 Lecoq A.-M., François Ier imaginaire, op. cit., p. 246-248.
17 Les portraits par Jean Clouet de certains courtisans dont les regards fixent un horizon invisible à l’observateur semblent être tributaires de cette modélisation pour le souverain d’un regard détaché et constituer dès lors la convention esthétique en vogue signant la proximité princière du modèle (Zvereva Alexandra, Portraits dessinés de la cour des Valois. Les Clouet de Catherine de Médicis, Paris, Arthena, 2011).
18 Farge James K., Le parti conservateur au XVIe siècle. Université et Parlement de Paris à l’époque de la Renaissance et de la Réforme, Paris, Collège de France, 1992, p. 108-116.
19 Lecoq Anne-Marie, « Le François Ier en saint Jean-Baptiste du Louvre : quelques précisions iconographiques », Revue de l’art, no 152-2, 2006, p. 31-36, p. 31 ; Stumberg Edmunds et Martha Mel, Piety and Politics : Imaging divine Kingship in Louis XIV’s Chapel at Versailles, Newark-London, University of Delaware Press-Associated University Presses, 2002, p. 192-195 ; Bresc-Bautier G., Crépin-Leblond T. et Taburet-Delahaye E. (dir.), France 1500, op. cit., p. 380-381.
20 Sauvion V., « Les portraits allégoriques », art. cit., p. 23.
21 La mise en scène de la famille royale en « sainte famille » n’est pas nouvelle. Lors de la naissance de Charles-Orland, le fils de Charles VIII et d’Anne de Bretagne, le 10 octobre 1492, plusieurs témoignages soulignent cette volonté d’associer la Vierge et le Christ à la mère et à son fils (Le Fur D., Charles VIII, op. cit., p. 288-292).
22 Crouzet Denis, La genèse de la réforme française, 1520-1562, Paris, SEDES, 1996, chap. i et ii ; Tallon Alain, Conscience nationale et sentiment religieux en France au XVIe siècle. Essai sur la vision gallicane du monde, Paris, PUF, 2002, p. 80-100.
23 La bataille de Marignan fut lue comme une victoire placée sous le signe du Christ révélant le nouveau Constantin : une croix apparut au ciel avec le providentiel « In Hoc Signo Vinces » et la bataille fut livrée le jour de la fête de Sainte-Croix… Dans la chanson de Clément Janequin, « La guerre », publiée à Paris en 1528 et célébrant cette victoire, dans la confusion sonore mimant par l’onomatopée le chaos des armes, la chanson se trouve soudainement comme illuminée quand les voix louent le roi : « la fleur de lys, fleur de haut prix y est en personne », saluant le véritable élu divin quand Français et Suisses portent ensemble une croix blanche sur leurs armures.
24 Lecoq A.-M., « Le François Ier en saint Jean-Baptiste », art. cit., p. 36.
25 Le Gall Jean-Marie, Le mythe de Saint-Denis. Entre Renaissance et Révolution, Seyssel, Champ Vallon, 2007, p. 24-39. Le lien entre le roi et celui qui baptisa le Christ est rappelé par un tableau anonyme, peint entre 1520 et 1530, intitulé la Prédication de Saint Jean-Baptiste à François Ier montrant le jeune roi parmi ceux qui reçoivent la parole du saint tandis que sa ville natale serait figurée à l’arrière-plan du tableau (Girault P.-G. [éd.], François Ier, images d’un roi, op. cit., p. 56).
26 Ménager Daniel, Diplomatie et théologie à la Renaissance, Paris, PUF, 2001 ; Screech Michaël Andrew, Le rire au pied de la croix. De la Bible à Rabelais, Paris, Bayard, 2002 (1997).
27 Michon Cédric, François Ier. Les femmes, le pouvoir et la guerre, Paris, Belin, 2015.
28 Crouzet D., La genèse de la réforme, op. cit., p. 113.
29 Il est intéressant de signaler la révision critique proposée par Jean-Max Colard des poèmes composés par le roi, généralement tenus pour ordinaires sinon médiocres par ses éditeurs modernes, dans lesquels François Ier ne cesserait jamais d’être pleinement le Roi dans la double figure du Très-Chrétien et de l’Imperator, même dans l’évocation de ses drames privés, de ses joies intimes ou de ses espoirs particuliers (« Le courage : la veine royale de François Ier poète », in Isabelle Cogitore et Francis Goyet (dir.), Devenir roi. Essai sur la littérature adressée au prince, Grenoble, ELLUG, 2001, p. 119-145). Cette interprétation n’est pas celle d’Eshan Ahmed pour qui l’entreprise « reveals a human side that demystifies the public view of the immortal and unchanging dignity of the sovereign monarch, fashioned on the identity of Christ » (« Francis I and the Body Natural », Bibliothèque d’Humanisme et Renaissance, t. LXV, no 3, 2003, p. 589-599).
30 Sur le sujet, je renvoie à la thèse inédite de Dominique Vinay-Gilbert, soutenue en 2003 à l’université de Tours sous la direction de Marie-Luce Demonet, « La couronne et la lyre. Présence du Roi David dans la littérature française de la Renaissance » (en ligne) ; également, Ahmed E., « Francis I and the Body Natural », art. cit., p. 590 et Lecoq A.-M., François Ier imaginaire, op. cit., p. 278-281.
31 Marot Clément, Cinquante pseaumes de David mis en françoys selon la vérité hébraïque, Gérard Defaux (éd.), Paris, Honoré Champion, 1995, p. 95-96 ; Ahmed Eshan, Clément Marot. The Mirror of the Prince, Charlottesville (Virginia), Rookwood Press, 2005 et « Guillaume Briçonnet, Marguerite de Navarre and the Evangical Critique of Reason », Bibliothèque d’Humanisme et Renaissance, t. LXIX, no 3, 2007, p. 615-625.
32 Wescher Paul, « New Light on Jean Clouet as a Portrait Painter », Apollo. The international Magazine of Arts, janvier 1976, p. 16-21. Cette attribution demeure cependant controversée comme en témoignent les travaux postérieurs à cette étude sur Jean et François Clouet qui ne mentionnent pas cette œuvre dans les catalogues de ces deux peintres. Valérie Sauvion met en doute également cette identification du fait d’une physionomie qui ne satisferait pas pleinement aux exigences de la ressemblance (« Les portraits allégoriques de François Ier », op. cit., p. 22-29, p. 24) mais elle est maintenue sous un mode hypothétique par Nicolas Herman (« Ut certius et melius ipsum depingeret. Observations sur la production tardive de Jean Bourdichon », in Frédéric Elsig [dir.], Peindre en France à la Renaissance. Courants stylistiques au temps de Louis XII et de François Ier, Milan, Silvana Editoriale, 2011, p. 215-231, p. 227).
33 Gounelle Rémi et Izydorczyk Zbigniew (éd.), L’Evangile de Nicodème ou Les Actes faits sous Ponce Pilate (recension latine A). Suivi de La lettre de Pilate à l’empereur Claude, Turnhout, Brepols, 1997.
34 L’affirmation contemporaine de la physiognomonie (en 1506, Bartholomé Cochlés publie une Chiromantie ac physionimie anastasis…) participe à la diffusion du topos classique d’une perfection politique et morale chez François Ier dont la beauté du corps serait le signe manifeste : une beauté aimable « judicative et démonstrative » des vertus de l’âme pour reprendre les termes contemporains (Edouard Sylvène, Le corps d’une reine. Histoire singulière d’Elisabeth de Valois [1546-1568], Rennes, PUR, 2009, p. 92-98).
35 Guigue Georges (éd.), L’entrée de François Premier Roy de France en la Cité de Lyon le 12 juillet 1515, à Lyon, chez le Trésorier-Archiviste de la Société des Bibliophiles Lyonnais, 1899, p. 7.
36 Lecoq Anne-Marie, « Une fête italienne à la Bastille », in Il se rendit en Italie. Études offertes à André Chastel, Rome-Paris, Edizioni dell’Elefante-Flammarion, 1987, p. 149-168, p. 156.
37 Kantorowicz E., Les deux corps du roi, op. cit., p. 51-74 et L’empereur Frédéric II, Paris, Gallimard, 1987 (1927), p. 454-475 et p. 548-551.
38 Kantorowicz E., L’empereur Frédéric II, op. cit., p. 550.
39 Backus Irena, « Introduction », in Pierre Geoltrain et Jean-Michel Roessli (dir.), Ecrits apocryphes chrétiens, Paris, Gallimard, 2005, t. II, p. 1123-1132.
40 Backus Irena, Historical Method and Confessional Identity in the Era of the Reformation (1378-1615), Leiden-Boston, Brill, 2003, p. 259 et « Les apocryphes néo-testamentaires et la pédagogie luthérienne des XVIe-XVIIe siècles. Les recueils de Michael Neander (1564, 1567) et de Nicolas Glaser (1614) », in Simon Claude Mimouni (éd.), Apocryphité. Histoire d’un concept transversal aux religions du livre. En hommage à Pierre Geoltrain, Turnhout, Brepols, 2002, p. 263-276.
41 Backus Irena, « Christoph Scheurl and his anthology of New Testament Apocrypha (1506, 1513, 1515) », Apocrypha, vol. 9, 1998, p. 133-156.
42 Helas Philine, « Lo “meraldo” smarrito, ossia il “vero profilo” di Cristo », in Giovanni Morello et Gerhard Wolf (dir.), Il volto di Cristo, Milano, Electa, 2000, p. 215-226 ; Finaldi Gabriele, The Image of Christ, London-New Haven, National Gallery-Yale University Press, 2000, p. 94-97 ; Spieser Jean-Michel, « Invention du portrait du Christ » et Wirth Jean, « Le portrait médiéval du Christ en Occident », in Agostino Paravicini Bagliani, Jean-Michel Spieser et Jean Wirth (éd.), Le portrait. La représentation de l’individu, Firenze, Sismel-Edizioni del Galluzzo, 2007, p. 57-76 et p. 77-94, et Kessler Herbert L. (éd.), The Holy Face and the Paradox of Representation, Bologna, Nuova Alfa ed., 1998. Cette généalogie formelle, sommairement résumée ici, permet de souligner comment le type « François Ier-Christ » de Clouet diffère d’une reproduction fidèle de ces motifs italiens, germaniques ou flamands – le peintre n’a pas retenu, en particulier, les cheveux ondulants jusqu’à la naissance du cou, voire couvrant une partie des épaules, ni la gravité ascétique du Messie, ni la posture de face ou le strict profil généralement celui de gauche ni surtout l’auréole ou les éléments symboliques exclusifs du Christ – ce qui contribue à souligner un effort de ressemblance avec le jeune monarque et la perméabilité des identités. Dans cet écart vis-à-vis des deux formules génériques dont il pouvait avoir connaissance, ce n’est pas seulement le refus d’une stricte subordination esthétique qu’il faut reconnaître mais l’adaptation singulière d’une formule à son sujet même s’il faut rappeler le caractère somme toute très relatif dans le temps de cette « formule » comme le rappellent Jean Wirth et Jean-Michel Spieser.
43 Le 25 janvier 1515 est l’anniversaire également d’un incident précis dans la vie du jeune prince qui, en 1501, fut emporté par une jument et jeté à bas de sa monture (Lecoq A.-M., François Ier imaginaire, op. cit., p. 140).
44 Lecoq Anne-Marie, « Portrait de François Ier en saint Thomas », Revue de l’art, no 91-1, 1991, p. 81-82 ; Baratte Sophie, « Les plaques des Feuillantines du musée du Louvre », in Hervé Oursel et Julia Fritsch (dir.), Henri II et les arts, Paris, École du Louvre, 2003, p. 181-187, p. 182-183.
45 Chatenet Monique, La cour de France au XVIe siècle. Vie sociale et architecture, Paris, Picard, 2002.
46 Chastel André (éd.), La vie de Benvenuto Cellini écrite par lui-même (1500-1571), Paris, Éditions Scala, 1986, p. 247.
47 Scailliérez Cécile (éd.), François Ier et ses artistes dans les collections du Louvre, Paris, RMN, 1992, p. 48 ; Drévillon Hervé, « Le roi-cavalier. Les savoirs du corps dans l’éducation de Louis XIII », in Ran Halévi (dir.), Les savoirs du prince. Du Moyen Âge aux Lumières, Paris, Fayard, 2002, p. 147-173 ; Salvadori Philippe, « Chasse, équitation et représentation du roi aux XVIIe-XVIIIe siècles » et Richefort Isabelle, « Le cheval dans l’iconographie de Louis XIV », in Daniel Roche (dir.), Les écuries royales. Du XVIe au XVIIIe siècle, Paris, Association pour l’académie d’art équestre de Versailles, 1998, p. 111-117 et p. 265-275 ; Boyer Jean-Claude, « Portrait équestre, archéologie et Querelle des Anciens et des Modernes. Le Louis XIV de Mignard jugé par Solleysel », in Roche D. (dir.), Le cheval et la guerre, op. cit., p. 333-345. Je remercie François Dubost d’avoir attiré mon attention sur une autre version de cette image, conservé au Musée des Offices, où à l’abstraction du fond bleu est substitué un paysage conventionnel et au monument fragilisé une architecture plus affirmée avec deux colonnes de porphyre. Le visage plus vieilli de cette version et le fait que la jupe ait été ôtée du cavalier me donnent à penser qu’elle constitue une variation du modèle du Louvre réinterprété à la lumière d’une mise en série avec d’autres portraits équestres d’Henri II, d’Henri III et d’Henri IV.
48 Parmi les nombreux portraits équestres d’Henri IV, celui attribué à Guillaume Heaulmé, vers 1611, serait fidèle à cette idéalisation fondatrice tout en la réinterprétant par un travail magnifique de l’arrière-plan (Mironneau Paul, « Henri IV à cheval : portrait des plaisirs équestres », La revue des musées de France. Revue du Louvre, no 2, avril 2005, p. 70-80). S’il fonde une tradition iconographique, force est de constater toutefois que la qualité spirituelle et la tension mystique qui le caractérisent seront infléchies par les successeurs de François Ier dans le sens d’une sécularisation grandissante du cavalier et du monde dans lequel celui-ci prend place, témoignage alors de la bonne administration de son royaume ou théâtre de ses conquêtes et de ses exploits guerriers. Se rapprochant du modèle de François Ier, le portrait équestre d’Henri III conservé au Musée Condé de Chantilly manifeste cependant un écart mondain que soulignent le somptueux habit vert du cavalier – une tenue jugée difficilement plus étrange et criarde par Alexandra Zvereva – et la direction prise par sa monture (« La genèse du portrait d’Henri III », in Isabelle De Conihout, Jean-François Maillard et Guy Poirier (dir.), Henri III mécène des arts, des sciences et des lettres, Paris, PUPS, 2006, p. 56-65, p. 62). La présence d’autres figures, emblèmes, allégories ou écuyers, en transforme également la signification. Sur cette dimension du portrait équestre royal au XVIIe siècle, Kléber Monod Paul, The Power of Kings. Monarchy and Religion in Europe, 1589-1715, New Haven, Yale University Press, 1999, p. 317-323 ; Liedtke Walter, The Royal Horse and Rider. Painting, Sculpture, and Horsemanship, 1500-1800, New York, Abaris Books-The Metropolitan Museum of Art, 1989.
49 De Cues Nicolas, Le Tableau ou la vision de Dieu, Agnès Monazzoli (éd.), Paris, Cerf, 1986, p. 23-24 et p. 37 ; De Certeau Michel, « Nicolas de Cues : le secret d’un regard », Traverses, vol. 30-31, 1984, p. 70-85.
50 Jollet Étienne, « L’œil du prince : le regard dans les portraits royaux par Jean et François Clouet », in Gaehtgens T.W. et Hochner N. (dir.), L’image du roi, op. cit., p. 343-358.
51 Hamon Philippe, « Le pouvoir du roi », in Jouanna A. et alii, La France de la Renaissance, op. cit., p. 177-269 et « Une monarchie de la Renaissance ? 1515-1559 », in Joël Cornette (dir.), La monarchie entre Renaissance et Révolution, 1515-1792, Paris, Éditions du Seuil, 2000, p. 13-62 ; Jouanna Arlette, Le pouvoir absolu. Naissance de l’imaginaire politique de la royauté, Paris, Gallimard, 2013, p. 114-118.
52 Revue de l’art, 1972, nos 16-17, 1972, p. 147 ; Chastel André (éd.), Actes du colloque international sur l’art de Fontainebleau, Paris, Éditions du CNRS, 1975 ; Jeanneret Michel, Perpetuum mobile. Métamorphoses des corps et des œuvres de Vinci à Montaigne, Paris, Macula, 1997 ; Vuilleumier-Laurens Florence, La raison des figures symboliques à la Renaissance et à l’âge classique. Études sur les fondements philosophiques, théologiques et rhétoriques de l’image, Genève, 2000, p. 229-237.
53 Zerner H., L’art de la Renaissance en France, op. cit., p. 72-86 ; Zorach Rebecca, « The Flower That Falls Before the Fruit : The Galerie François Ier at Fontainebleau and Atys Excastratus », Bibliothèque d’Humanisme et Renaissance, 2000, t. 62, no 1, 2000, p. 63-87 ; Reumann Olaf, « L’exemplum humaniste comme moyen de légitimation dans la galerie François Ier à Fontainebleau. Imitation, continuité ou questionnement de l’Antiquité », in Gaehtgens T.W. et Hochner N. (dir.), L’image du roi, op. cit., p. 131-147 ; Auclair Valérie, « Invention décorative de la galerie François Ier au château de Fontainebleau », Seizième Siècle, no 3, 2007, p. 9-35 ; Koering Jérémie « La visite programmée : le rôle de l’orateur dans la réception des grands décors », in Michel Hochmann et alii (éd.), Programme et invention dans l’art de la Renaissance, Paris, Somogy, 2008, p. 353-370 ; Bodart Diane et alii, « Le portrait du roi : entre art, histoire, anthropologie et sémiologie », Perspectives, no 1, 2012, p. 11-28, p. 16.
54 Tauber Christine, « Disséminer la vérité : la Grande Galerie à Fontainebleau et le roi des signes, François Ier », in Jean-Philippe Genet (éd.), La vérité. Vérité et crédibilité : construire la vérité dans le système de communication de l’Occident (XIIIe-XVIIe siècle), Rome-Paris, École française de Rome-Publications de la Sorbonne, 2015, p. 237-260.
55 Olaf Reumann s’oppose à cette simplification de l’image royale réduite au mécénat de François Ier, à rebours donc d’une tradition critique étudiant le maniérisme bellifontain comme une fin en soi, « dans l’intention évidente de faire rejaillir cet éclat [le luxe] sur le roi » et de remplir une « fonction compensatoire […] en cette période de revers politique » (« L’exemplum humaniste », art. cit., p. 131-147).
56 Panofsky Erwin et Dora, La boîte de Pandore, Paris, Hazan, 1990 [1962], p. 38-39 ; Crouzet D., La genèse de la Réforme française, op. cit., p. 121 ; Fumaroli Marc, « Préface », in Farge J. K., Le parti conservateur au XVIe siècle, op. cit., p. 9-23, p. 16-19.
57 La postérité de ce thème sera sensible chez Charles IX et Henri IV à travers les avatars iconographiques de cette représentation du roi à l’épée et au livre que l’on retrouve chez Antoine Caron figurant le jeune Charles IX à qui est offert un livre et à qui l’on présente en même temps un glaive et un bouclier, ou dans un dessin, attribué à Henri Lerambert (fig. 23), figurant Henri IV, tenant un livre et une épée, entouré des vertus de Force et de Prudence, et présenté au peuple par le Christ (Crouzet D., La nuit de la Saint-Barthélemy, op. cit., p. 221 ; Béguin Sylvie, « Contribution à l’iconographie d’Henri IV », in Les arts au temps d’Henri IV. Colloque de Fontainebleau [20 et 21 septembre 1990]. Avènement d’Henry IV, quatrième centenaire, Pau, Château de Pau-Association Henry IV 1989, 1992, p. 41-61, p. 51-52). Le succès par ailleurs de la figure de l’Hercule gaulois associée, à partir d’Henri II véritablement, au portrait du roi français participe de cette réunion du savoir et de la force dans un prince maître et guide de ses peuples reliés à lui par des chaînes d’or partant de leurs oreilles jusqu’à sa langue comme l’arc triomphal de la porte Saint-Denis de l’entrée parisienne de juillet 1549 en constitue l’archétype imaginaire, représentant le roi défunt dans une mise en scène inspirée des représentations de cette figure mythologique des ouvrages de Tory en 1529 (Champfleury), d’Alciat en 1531 (Emblèmes) et d’Apianus et Amantius en 1534 (Inscriptiones sacrosanctae vetustatis).
58 Lévêque Jean-Jacques, L’école de Fontainebleau, Neuchâtel, Éditions Ides et Calendes, 1984, p. 79. L’analyse psychologisante des portraits des derniers Valois menée ensuite et celle sur le primat du décor dans la représentation des Bourbons ne me semblent pas pertinentes. Un tableau qui « est d’abord », selon le commentaire de Jean-Pierre Cuzin, « tour de force, sans que la bouche ni le regard ne se devinent, l’image d’un sourire » (« Préface », in Scailliérez C., François Ier par Clouet, op. cit., p. 5). Un portrait dans lequel, tout autrement, Jules Michelet voit la rouerie ontologique du monarque (Histoire de France, t. VIII : Réforme, Paris, Éditions des Équateurs, 2008 [1855], p. 206).
59 Ménager Daniel, La Renaissance et le rire, Paris, PUF, 1995, p. 187 et p. 200-216 ; Courtine Jean-Claude et Haroche Claudine, Histoire du visage. Exprimer et taire ses émotions (XVIe-début XIXe siècle), Paris, Éditions Payot & Rivages, 1994 (1988).
60 Arasse Daniel, Histoires de peintures, Paris, Gallimard, 2006 (2004), p. 31-43 ; Chastel André, L’illustre incomprise, Paris, Gallimard, 1988, p. 105. L’exposition des cinq toiles monumentales des Funérailles de la Joconde de Yan Pei-Ming au musée du Louvre (aux mois d’avril et mai 2009) a mis en évidence, par le choix d’une inversion radicale des polarités à l’œuvre dans le tableau original, cette puissance d’ordre et de sérénité assurée par l’imperceptible équilibre entre le visage du premier plan et l’extraordinaire paysage sur lequel il se détache (Dagen Philippe, « Les stars et les héros de grisaille de Yan Pei-Ming », Le Monde, 13 mars 2009, p. 23).