Chapitre IV. L’existence d’une « communauté de combat » occidentale
p. 103-128
Texte intégral
1Au cours des années 1960, à la suite de l’émancipation progressive des peuples colonisés, les périodiques d’extrême droite redéfinissent leur horizon de lutte, désormais pensé à l’échelle de l’Occident. Les auteurs français et italiens d’extrême droite proches de la tendance nationaliste-révolutionnaire dénoncent, dans une perspective décadentiste et raciste nourrie d’un anticommunisme viscéral, la réactivation d’une opposition séculaire fantasmée entre peuples occidentaux et peuples orientaux. Les périodiques en appellent ainsi à un réveil de l’Europe pour défendre l’homme blanc qui serait menacé par un « nouveau Poitiers1 ». Italiens et Français s’attachent dès lors à mener des combats politiques communs, fortement influencés par les théories de la « guerre révolutionnaire » et de la contre-subversion.
Défendre la révolution nationaliste contre le communisme, la démocratie et la technocratie
2L’émancipation progressive des peuples colonisés incite les groupes d’extrême droite à redéfinir leur horizon de lutte, désormais pensé à l’échelle d’un Occident aux frontières redessinées en fonction de critères ethniques et racistes. Le combat est étendu à l’échelle d’un Occident défini par Europe-Action comme une communauté de peuples blancs, entendue comme une communauté de culture. En juin 1964, Gilles Fournier2 définit ses frontières : « Nos marches frontières ce sont l’Andalousie et le Transvaal, le Texas et la province maritime de Vladivostock. Notre patrie, c’est le monde blanc3… »
3L’article est en partie repris et traduit par Ordine Nuovo, quasiment simultanément à sa parution française, témoignant de la relative identité de vue entre revues françaises et italiennes4. Défense de l’Occident partage cette vision du combat nationaliste et affirme que :
« Stalingrad, Berlin, Budapest, Dien-Bien Phû, Alger, La Havane, Stanleyville sont les mêmes épisodes d’une seule et même bataille, mettant aux prises les mêmes adversaires : d’une part, les Communistes aidés par le Capital apatride et de l’autre, l’homme blanc soutenant les Nationalistes décidés à s’opposer par tous les moyens à la mise en esclavage de leur patrie5. »
4L’identification et l’exaltation de l’Occident comme horizon de la lutte a une dimension défensive qui structure le discours des périodiques et trouve en Jean Mabire l’un de ses porte-paroles. Celui-ci affirme en effet que « demain un nationalisme occidental, de San Francisco à Vladivostock, répondra au racisme de l’Asie, innombrable et conquérante6 ». Cette opposition réactive l’affrontement antique entre Orient et Occident et structure fondamentalement leur vision décadentiste du monde. Elle construit une interprétation racialisée et raciste de l’histoire et participe de l’édification d’un ennemi intemporel. Les prises de position d’Ordine Nuovo sont, sur ce point, similaires à celles de leurs homologues français, et ses rédacteurs s’inquiètent de « l’alliance possible de toutes les races » contre la race blanche. Seul l’Occident serait « capable d’offrir une perspective d’ordre et de mesure à une humanité qui croît à un rythme vertigineux ». Pour Rauti, il est donc nécessaire que la race blanche – occidentale – reprenne une fonction de commandement « conforme à notre race7 ».
5La réactivation de cette opposition pluriséculaire supposée entre Orientaux et Occidentaux, assimilés aux Grecs et Romains, met en lumière la prégnance de la référence antique dans l’imaginaire de ces groupes, des deux côtés des Alpes. Europe-Action dépeint ainsi le tableau d’un monde profondément divisé en deux catégories humaines. À l’homme occidental, mu par la raison et la connaissance, répondrait un homme de l’imagination, de l’ignorance et de la superstition. L’opposition, telle qu’elle est présentée par le périodique français, a également une dimension physique : à la beauté, à la reproduction plastique des formes, répondrait l’informel. L’homme occidental, figure du combattant et de l’honneur, serait opposé à une figure orientale de l’impuissance. Dans ce cadre, le spectre de la dégénérescence gréco-romaine hante les propos des Français8.
6 Ordine Nuovo mobilise un discours raciste proche de celui d’Europe-Action, mais où l’on repère l’omniprésence de l’influence de la pensée nazie. La fusion entre race germanique et race romaine, opérée au Moyen Âge, aurait pris la forme du Saint Empire romain germanique9. Selon les Italiens, ces civilisations seraient porteuses d’une conception spirituelle et héroïque de la vie et du monde en opposition avec la civilisation contemporaine.
7Ces perceptions racistes du monde, où la référence antique occupe une place fondamentale, se doublent d’un anticommunisme exacerbé qui justifie en partie l’internationalisation des thématiques de lutte portées par l’extrême droite. Un amalgame est ainsi opéré entre capitalisme démocratique et communisme, considérés comme « les deux pinces d’une même tenaille, les deux faces de la même médaille10 ». Ces régimes politiques seraient des exemples de technocraties, « fondées sur un même concept matérialiste de la technologie » et sur le même « dogme égalitariste11 ».
« Europe réveille-toi » : la « défense de l’homme blanc » contre un « nouveau Poitiers12 »
Un combat démographique, des enjeux économiques
8Dans ce contexte, la résistance à la « subversion » s’impose comme un enjeu majeur pour l’extrême droite. Elle dénonce l’incapacité de la démocratie à défendre la vieille Europe, de « l’assaut des peuples slaves et afroasiatiques13 ». Europe-Action insiste ainsi sur le caractère inéluctable de cette lutte entre civilisations qui aboutirait en une apocalypse destructrice14.
9Au début des années 1960, l’enjeu démographique de la lutte fantasmée entre « races » s’impose progressivement. Dans Ordine Nuovo se tient un débat sur cette question démographique, qui reprend l’un des thèmes de la propagande raciste du fascisme15 et réinterprète l’histoire de l’Europe à la lumière de cette opposition raciale séculaire entre Orient et Occident. L’influence de l’idéologie nazie y apparaît clairement. Ordine Nuovo célèbre la politique démographique active du mouvement hitlérien et encense son processus de sélection raciale. Pour les Italiens, l’Allemagne nazie aurait recouvré « sa fonction de “brise-lame” de l’Europe vers les plaines de l’Orient » et se serait attachée à conquérir un « espace vital » pour les Européens. L’auteur n’oublie pas la bataille démographique menée par Mussolini, illustrée par une exaltation de la jeunesse et une lutte contre le féminisme qualifié de l’« un des phénomènes typiques du modernisme et des mauvaises mœurs contemporaines16 ». L’obsession d’un virilisme exacerbé, qui affleure dans tout le discours de l’extrême droite, apparaît ici, sous la forme de la dénonciation du féminisme, symptôme d’une corruption supposée des sociétés matérialistes contemporaines. Ce thème sexiste, variante spécifique de l’idéologie raciste, se situe dans une longue tradition de dénonciation d’une nature corruptrice de la femme, responsable supposée – avec les Juifs – des transformations subversives de la société moderne17. La politique de valorisation de l’Empire menée par Mussolini bénéficie en outre d’un parallèle glorieux, celui de l’Empire romain. Les leçons tirées du passé permettent ainsi à l’auteur de promouvoir une politique d’expansion et de peuplement des Européens18.
Résister à la subversion : la menace communiste
10En 1964, cette lutte entre des « races » supposément opposées n’a rien perdu de son actualité et les débats ne faiblissent pas. Pour Pino Rauti, le
« deuxième cinquantenaire du XXe siècle est dominé par le facteur racial, par la lutte entre les races, par la manifestation de profondes tensions entre les races. Instinctivement, toutes les races semblent prêtes à se coaliser contre la nôtre, contre la race blanche ».
11L’enjeu démographique se double désormais d’un combat contre le communisme, qui menacerait, au début de l’année 1964, d’encercler l’Europe. Rauti s’inquiète également de la pénétration soviétique dans le monde Arabe et de la « subtile instrumentalisation » exercée par la Russie dans un Tiers-Monde aux frontières redéfinies de l’Égypte à l’Indonésie19. L’alliance supposée entre le panarabisme et le communisme constitue une grille de lecture qui permet à l’extrême droite de s’affranchir des questions de l’inégalité, de l’injustice, et de la violence du système colonial.
12Français et Italiens se refusent en effet à prendre acte de l’émancipation progressive des peuples colonisés sur le continent africain. Ils persistent à considérer l’Afrique comme le « bas ventre », le « point mou » de l’Europe20. Pino Rauti et Antonio Lombardo qui consacrent, en 1965, un opuscule à L’Europe et l’Afrique, considèrent que les nouveaux États créés ne seraient pas aptes à se gouverner de façon autonome21. À la fin de l’année 1965, Défense de l’Occident développe un discours relativement similaire, révélant la perméabilité de ces prises de position idéologiques. Maurice Bardèche s’inquiète de la vulnérabilité stratégique et politique des nouveaux États africains, des risques de putschs, de troubles et de complots qui les menacent. Il relève en outre les difficultés économiques rencontrées par ces États et s’insurge contre l’hypocrisie supposée des puissances russe et chinoise qui invoqueraient le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes pour se substituer aux puissances française et anglaise en Afrique22.
« Sous-développés, sous-capables23 »
13En 1964, Dominique Venner, François d’Orcival, Henri Prieur et Pierre d’Arribère publient un cahier supplément à Europe-Action intitulé Sous développés, sous capables. Parallèlement, les auteurs italiens dénient à ces nations nouvellement créées la possibilité de mener une politique propre et indépendante des influences externes et expriment leur mépris en ces termes : « Les États nègres, qui ont agité contre nous les idées nationalistes, sont partis de la broussaille et de la jungle, des razzias réciproques et de l’esclavage24. » Nations sans origines et sans héritages, les nations africaines abriteraient, selon Ordine Nuovo, une population non civilisée. C’est au modèle du sauvage africain, être dépourvu d’histoire et de culture, populaire à la fin du XIXe siècle et dans la première moitié du XXe siècle, que renvoient les Italiens. Pour l’historien Éric Savarèse, « dans la pensée coloniale, savante ou profane », l’Homme noir serait en effet « dépourvu de toute capacité à élaborer une organisation sociale rationnelle, d’identifier une communauté politique à un territoire, ou de se donner les moyens […] d’un certain confort matériel25 ». Les rédacteurs d’Ordine Nuovo déplorent ainsi que les Africains aient été incapables, depuis l’indépendance, de se gouverner correctement. Les auteurs insistent enfin sur la misère absolue dans laquelle vivent ces populations, ce dont témoignerait la situation économique difficile de l’Algérie. Au printemps 1964, Ordine Nuovo regrette que le pays survive grâce aux aides américaine et française tandis que ses habitants dilapideraient ce que laissèrent un million de Français26. Rauti réfute en effet à certaines « races » la capacité de créer des civilisations, « n’en déplaise aux soutiens à outrance de l’égalitarisme27 ». Ces propos font ainsi écho aux propos de Guy Persac qui, dans les colonnes d’Europe-Action, dénonce le phénomène de « “décivilisation” qui [ferait] actuellement tâche d’huile en Afrique28 ».
14Rauti refuse ainsi de donner crédit au « cours de l’histoire, mot d’ordre fabriqué dans les laboratoires du progressisme et de la subversion ». Il regrette en outre que l’Afrique soit « devenue “indépendante” au nom de la négation absolue et radicale de ce qui y fut accompli par l’homme blanc29 ». La fonction civilisatrice des populations européennes est ainsi portée aux nues, héritage probable de l’éducation fasciste que reçut le dirigeant d’Ordine Nuovo. L’image de l’Afrique et de l’Africain construite par la revue ne peut en effet être dissociée d’une représentation raciste de l’autre, édifiée pendant le régime fasciste par l’intermédiaire de l’école ou de revues telles que La difesa della razza et inculquée aux jeunes générations. Loin du mythe de l’italiano brava gente, leur relation au fait colonial est étroitement liée à la construction institutionnalisée, par le régime fasciste, d’un projet raciste, réactionnaire et totalitaire30. Dans ce cadre, la pertinence économique et politique de l’aide aux pays sous-développés est systématiquement réfutée par les périodiques italiens et français.
15Les Français retiennent que « la carte du sous-développement correspond sensiblement à celle des peuples sombres » et justifient le prétendu retard civilisationnel de l’Afrique en invoquant des arguments raciaux31. L’infériorité essentialisée des colonisés, leur supposée tendance naturelle à l’anarchie expliquerait l’échec de l’aide aux peuples africains32. Pour les auteurs, « la grande masse des sous-développés : les pays de race brune et noire, et ceux de la zone de métissage afro-asiatique […] sont purement et simplement sous-capables33 ».
16Comme l’écrit l’historien Philippe Buton, « désigner le caractère non civilisé de l’altérité renforce le sentiment d’appartenance à un groupe cohérent et la communion dans l’orgueil national34 ».
Le spectre de la revanche des peuples colonisés
17La hantise d’un affrontement probable entre races fantasmées se double ainsi d’un discours raciste alarmiste qui vise à mettre en garde les populations européennes contre la possible invasion de leur continent et la destruction de leur race. Rauti et Lombardo s’inquiètent en effet de l’expansion démographique de l’Afrique qui serait caractéristique de la période historique35.
18Pour Europe-Action, les ennemis du « peuple blanc » sont clairement identifiés : il s’agit des « peuples de couleurs », identiques à ces hordes barbares de l’Antiquité qui provoqueraient la décadence de l’Occident36. La revanche des peuples colonisés constitue ainsi une hantise omniprésente qui prend notamment la forme d’un péril jaune, réactualisé37. Dès 1960, Maurice Bardèche mentionne dans Défense de l’Occident, le « débordement des jaunes sur l’Afrique » qui annoncerait « l’effroyable pesée de l’Asie et de l’Afrique réunies sur notre minuscule presqu’île européenne38 ». La résurgence du péril jaune s’accompagne de la reprise fidèle des arguments déjà avancés à la fin du XIXe siècle. C’est avant tout le nombre qui effraie, et les couvertures d’Europe-Action « La menace chinoise » et « Les Chinois chez nous », grâce à une mise en scène visuelle suggestive, contribuent à nourrir le fantasme d’une agression asiatique à venir39.
19Les Asiatiques ne sont pas les seuls à faire peser une lourde menace sur la supposée race blanche. Les Africains et les Arabes, dans le discours de l’extrême droite, ne seraient pas en reste, ce dont témoignerait le processus de décolonisation. L’afro-asiatisme40 né lors de la conférence de Bandung en 1955 qui accompagne l’émergence du Tiers-Monde comme acteur transnational alimente les peurs de cette extrême droite occidentale. Français et Italiens d’extrême droite se refusent ainsi à prendre acte de la décolonisation présentée par la presse démocratique comme allant dans le sens de l’histoire. Défense de l’Occident, Europe-Action, et Ordine Nuovo dénoncent systématiquement cette interprétation des événements historiques propre à l’idéologie et à la rhétorique marxistes.
« Bientôt ils seront un million »
20Le continent européen serait ainsi lourdement menacé par cette vague d’immigration africaine qui accompagne le mouvement de décolonisation. Europe-Action titre, en octobre 1964, avec un slogan choc, promis à une postérité certaine : « Bientôt, ils seront un million41. » Une partie des couvertures d’Europe-Action est ainsi consacrée aux périls jaunes, noirs ou arabes, figures de la revanche des peuples historiquement soumis. Le spectre de la formation d’une « France africaine » est agité par Gilles Fournier, qui dénonce la possible formation d’une « grande France bigarrée de “cent millions d’habitants” (dont dix millions de chômeurs !) ». La dimension sociale de l’immigration est ici abordée, et l’auteur s’inquiète du fait que les travailleurs français soient mis en concurrence avec des travailleurs africains « moins exigeants42 ». Aux immigrés italiens ou polonais du début du siècle, se substituent désormais les noirs et arabes, figures nouvelles d’une rhétorique anti-immigrationniste. On voit apparaître ici l’un des arguments phares de cette préférence nationale que le Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne (GRECE), dont une partie des cadres fut formée au sein d’Europe-Action, théorise au milieu des années 1980, au bénéfice de la propagande du Front national.
21La thématique de l’invasion occupe une place importante au sein des colonnes des périodiques français et italiens. En 1960, Ordine Nuovo s’inquiète de l’irruption de cette « dangereuse marée composée de millions d’êtres sauvages, ou presque ». Dans le discours de cette extrême droite, Marseille devient le symbole de la ville subvertie par la présence soi-disant délinquante des populations immigrées43. En 1964, Pino Rauti confère une dimension religieuse à cette menace et s’inquiète de devoir « stopper les Arabes à un nouveau Poitiers ». Rauti se réapproprie le spectre du Sarrasin, de l’Infidèle du Moyen Âge qu’il érige en figure-repoussoir. Il définit les masses immigrées des bidonvilles français comme une « armée des bas-fonds », subversive, alliée aux communistes. Ces immigrés seraient, selon lui, responsables de « 21 % de tous les délits » commis en France44. Au début des années 1960, l’Immigré incarne l’une des figures contemporaines de l’ennemi intérieur, éternel infiltré désigné par la « cinquième colonne45 ». Ordine Nuovo substitue ainsi à la figure traditionnelle de l’ennemi intérieur, le Juif corrupteur, un bouc émissaire plus fonctionnel – l’Africain – et un nouveau mythe plus mobilisateur pour la jeune génération – la défense de la « race blanche » en Afrique.
22Les extrêmes droites font ainsi, dans un contexte de guerre froide marqué par la hantise obsessionnelle du complot subversif, fusionner le corps de cet ennemi intérieur infériorisé, racialisé, et celui de l’ennemi communiste. La tentation de l’amalgame entre Africain et communiste, figure emblématique et cathartique de l’altérité, constitue un topos de la propagande anticommuniste du XXe siècle46. C’est l’image d’un Immigré délinquant, à l’origine de la « recrudescence des agressions et de la criminalité dans la région parisienne », potentiellement révolutionnaire, qui est ici dessinée et qui connaîtra, elle aussi, une grande postérité47.
23En outre, l’Immigré serait, pour Europe-Action, un violeur potentiel, responsable de l’augmentation supposée des maladies vénériennes en région parisienne48. En 1964, Dominique Venner fait le récit d’une agression à caractère sexuel à laquelle il aurait assisté, mettant en scène deux hommes noirs et deux jeunes femmes et dénonce : « ces messieurs qui arrivent à cadence accélérée apportent, en guise de cadeau, leurs maladies, leur vermine et leurs vices ». Il s’offusque de l’insécurité qui caractériserait désormais les villes françaises, dont certains quartiers seraient « investis par un grouillement hostile49 ». L’Immigré animalisé et assimilé par un effet suggestif de vocabulaire, au rat, incarne un modèle « repoussoir de la masculinité idéale50 ». L’état maladif, symptôme d’une déviance et de bestialité, serait l’attribut premier de cette figure hypersexualisée de paria. La mise en exergue de la maladie sexuelle, symptôme d’une supposée perversion, fait écho au péril vénérien du début du XXe siècle, les immigrés se substituant, dans le discours d’extrême droite et plus largement dans la société, aux prostituées comme vecteurs de déséquilibre de l’ordre sanitaire et social en France. En décembre 1965, Dominique Venner écrit : « Chaque nuit, à Paris, une femme ou une jeune fille française est violée par des Noirs ou des Nord Africains51. » Le rédacteur d’Europe-Action reprend à son compte cet archétype de la criminalité nord-africaine – l’agression nocturne – qui remplace dans l’imaginaire collectif, les délits liés au marché noir, à partir de la fin des années 194052. Le discours d’extrême droite contribue à nourrir la peur d’une prédation de masse que les populations nord-africaines feraient peser sur la population féminine française. Comme le souligne Todd Shepard, « l’association des Algériens [mais pas uniquement] soit au viol, soit à la drague agressive ou homosexuelle, a joué un rôle crucial par rapport à l’enjeu majeur pour l’extrême droite post-algérienne : se positionner comme l’incarnation d’une virilité saine, et donc comme seule capable de défendre des ennemis pervers les Français et de rétablir leur équilibre53 ». La virilité des immigrés ne serait donc pas conforme à la masculinité conjugale. Le croisement des chronologies de l’histoire de l’immigration, du genre et de l’histoire des représentations permet de resituer ce discours d’extrême droite au sein d’une société profondément marquée par les stéréotypes racistes véhiculés par la propagande coloniale tout au long du XIXe siècle.
24L’Immigré essentialisé s’impose également, pour Venner, comme une figure de la décadence et d’un retour au passé, d’un autre siècle. En 1964, Ordine Nuovo insiste en outre sur la mentalité corruptrice du « Noir », figure du renversement des valeurs et des lois dont la cause serait à chercher dans les principes égalitaires de 178954.
La hantise du métissage
25Pour Europe-Action, comme pour Ordine Nuovo, la principale arme – et la plus perverse et dangereuse – des peuples colonisés serait le métissage, dont la hantise est omniprésente des deux côtés des Alpes. C’est la figure d’un Immigré dénaturant, construite dans l’entre-deux-guerres, qui est ici dénoncée. Dans les années 1930, Georges Mauco, spécialiste de l’immigration, produit une thèse sous la direction d’Albert Demangeon dans laquelle il martèle l’idée que l’immigration constitue l’un des principaux « problèmes » politiques de la France contemporaine. Il y dénonce les risques supposés des unions dites mixtes et qualifie certains groupes ethniques d’inassimilables55, thématiques dont s’inspirent sans doute les discours des périodiques d’extrême droite des années 1960. En 1960, Ordine Nuovo s’insurge contre les « avant-gardes de nègres et de métisses » présentes en France et, en 1963, il rappelle à titre d’exemple que Mussolini a cherché, dans les territoires coloniaux, à « prévenir des mélanges bâtards et métissés56 ». En 1964, Rauti lui-même reprend l’expression. Sur ce point, la référence au Duce a une fonction légitimatrice et les Italiens d’Ordine Nuovo assument l’héritage de la politique raciale fasciste théorisée, entre autres, par Lidio Cipriano, anthropologue de référence pour le régime sur les questions de démographie africaine57.
26De son côté, Europe-Action insiste sur la nécessaire protection des « frontières génétiques » occidentales. L’auteur considère le métissage comme une aliénation car il consisterait à devenir « autre, étranger à soi-même ». Il constituerait, pour un peuple, un « suicide génétique » et ses organisateurs seraient responsables d’un « génocide lent58 ». L’auteur dévoie ici le terme de génocide, défini par la convention de La Haye de 1948.
Dénoncer l’apparition d’un « racisme nègre »
27Ainsi, les périodiques d’extrême droite ne se contentent pas de condamner le risque que le métissage ferait peser sur la race occidentale ou européenne, ils dénoncent en outre l’émergence, dans le monde, d’un racisme nègre. Laroche s’insurge en effet contre les manifestations antiségrégationnistes aux États-Unis qui seraient « des tentatives contre l’homme d’Occident, pour la suprématie noire59 ». La lutte des populations noires pour les droits civiques constituerait l’incarnation locale d’un combat mené à l’échelle de la planète. La question raciale aux États-Unis préoccupe d’ailleurs fortement Italiens et Français d’extrême droite qui apportent, de ce fait, leur soutien à la candidature de Barry Goldwater60 aux élections présidentielles de 1964.
28Cette inquiétude et ce constat de l’émergence supposée d’un racisme noir sont partagés par les Italiens d’Ordine Nuovo, qui, dès le début des années 1960, s’insurgent contre l’émergence d’un racisme à l’envers, d’un « racisme nègre absurde61 ».
29Au milieu des années 1960, la thématique de la « chasse aux blancs » accompagne ce « racisme nègre ». Pour Venner :
« La décolonisation a inversé les rapports blanc-homme de couleur ; désormais, partout dans le monde, l’homme blanc est la victime. La chasse aux blancs est ouverte. L’aide aux sous-devéloppés en fait des exploités. Leur position dans le monde rend leur existence précaire62. »
30L’effet de retournement mis en scène par le Français est saisissant et induit une réaction de confusion de la part du lecteur. Le jeune militant structure sa vision binaire du monde en renversant un à un les éléments qui contribuent, au début des années 1960, à redéfinir les relations Nord-Sud dans un contexte de bouleversements politiques, économiques et sociaux induits par le processus de décolonisation. Dans le discours de l’extrême droite, l’homme occidental est érigé en victime raciale et économique, à la merci de l’homme « arriéré », sous-développé. Venner, dont l’imaginaire est profondément marqué par les défaites coloniales françaises, identifie l’acte de naissance d’une telle politique à Dien Bien Phû et au discours de Carthage63, rappelant au lecteur l’humiliation de la défaite indochinoise : depuis, « la haine ne connaît[rait] pas de frein64 ». Il développe ainsi longuement les exemples de la Tunisie, du Maroc, de l’Angola, de l’Algérie et du Congo où, les Blancs auraient été victimes d’exactions, dans le contexte souvent violent de la lutte pour l’émancipation.
31En 1964, Antonio Lombardo nourrit cette thématique par la publication de son opuscule Genocidio contro l’Europa65, issu de la traduction d’une brochure portugaise éditée en français, Génocide contre le Portugal66, qui vise à dénoncer le racisme nègre et les exactions dont les populations européennes et indigènes ont été victimes en Angola, le 15 mars 1961, lors du déclenchement de la guerre de libération nationale. Document de propagande du régime salazariste, l’édition portugaise illustrée par des photos de corps décapités, éviscérés ou émasculés, traite spécifiquement de la situation angolaise et accuse les forces communistes d’être à l’origine des massacres dans la colonie portugaise67.
32À l’image du déplacement sémantique déjà identifié pour le combat « Algérie française », Antonio Lombardo, dans sa préface à la version italienne, se réapproprie cette lutte coloniale portugaise et fait sien le combat pour la défense de la présence portugaise en Afrique : « La cause du Portugal en Angola est la cause de l’Europe. » Le supposé génocide, circonscrit dans la version portugaise de la brochure aux colonies portugaises en Afrique, prend une toute autre dimension dans sa version italienne, et s’étendrait désormais à l’ensemble du continent africain68.
33L’édition et la traduction de cette brochure illustrent le processus de transfert idéologique entre les différents groupes de l’extrême droite européenne et le soutien ponctuel apporté par le régime salazariste aux groupes européens impliqués dans la défense de la politique portugaise Outre-Mer. Les autorités portugaises sont sans doute à l’origine d’un tel projet : elles ont probablement pris contact avec Ordine Nuovo pour assurer la propagande coloniale salazariste en Italie. La version hebdomadaire d’Europe-Action se fait le relais d’une telle initiative et déplore que la douane italienne ait bloqué l’entrée des 1 500 exemplaires de la version italienne de la brochure69. L’histoire coloniale africaine, l’histoire du Portugal, celle des extrêmes droites françaises et italiennes se croisent ici et contribuent à composer une histoire connectée. L’épisode est d’ailleurs repris et publicisé, en décembre 1966, dans les colonnes de Défense de l’Occident par Robert Anders qui en fait un exemple de sauvagerie communiste70. La main invisible du Communiste qui, depuis Moscou ou Pékin, tirerait les ficelles de la décolonisation, est ainsi invoquée.
Réfuter la culpabilité de l’homme blanc
34Dans ce contexte, les périodiques italiens et français font du racisme « une nécessité de légitime défense71 » : il s’agit désormais de dénoncer la supposée culpabilité de l’homme blanc, qui aurait permis son élimination progressive du continent africain. Dominique Venner fustige tour à tour, dans Europe-Action, le sacrifice des Européens, la « castration de l’Occident » et cette « immense campagne qui a fait de l’homme blanc un coupable72 ».
35 Défense de l’Occident, sous la plume de Maurice Bardèche, s’en prend à l’antiracisme, « loi sacrée de la conscience humaine » qui aurait abouti à l’indépendance des pays africains et asiatiques tandis qu’Ordine Nuovo regrette que « l’Europe [soit] victime d’un complexe d’infériorité effrayant qui la paralyse73 ».
36Au-delà de l’analyse discursive, c’est la figure sociale de l’immigré postcolonial, envisagé comme problème et charge, qui naît dans le discours d’extrême droite. La construction de cette figure-repoussoir de l’Immigré « chômeur », « délinquant », « pervers » accompagne le processus de décolonisation, dès les premières années 1960, et participe de la construction d’une menace migratoire multiforme. C’est au spectre honni d’une France ou d’une Europe africaine que renvoie cette menace sociale, religieuse, raciale. Parallèlement, les auteurs d’extrême droite dénoncent l’émergence d’un « racisme nègre ». Ces thématiques, promises à une grande postérité connaîtront, dans les décennies suivantes, de multiples déplacements sur l’échiquier politique et diverses tentatives de réappropriation. Face aux dangers qui pèseraient sur l’Occident, les périodiques font de la défense de la race blanche l’un de leurs principaux combats.
Défendre la race blanche : un combat partagé
Soutenir – et être soutenu par ? – les régimes d’apartheid
37Pour les auteurs d’Europe-Action, de Défense de l’Occident ou d’Ordine Nuovo, une nécessité s’impose : protéger la race blanche contre les menaces de métissage, contre la décolonisation, l’invasion des « peuples de couleur » favorisée par le communisme. En Afrique, cette revendication passe par un soutien assumé à la politique d’apartheid instaurée par Verwoerd en Afrique du Sud à partir de 1950, et en Rhodésie, à partir de 1965 suite à l’arrivée au pouvoir de Ian Smith.
38 Défense de l’Occident donne ainsi un large écho à la thématique ségrégationniste et s’efforce d’en vanter les bienfaits :
« La politique d’apartheid vise à doter le Noir de ses propres institutions, lui offrant ainsi des possibilités multiples de travailler pour le bien de ses semblables. […]. Jusqu’à ce que les Noirs soient suffisamment développés pour endosser les responsabilités et exercer les droits qui accompagnent l’autonomie, ils devront encore être guidés et aidés par les Blancs. La politique d’apartheid repose sur la politique traditionnelle de l’Afrique du Sud, à savoir : un développement séparé et parallèle des races. »
39 Europe-Action défend fermement cette politique de développement séparé et se félicite que l’Union sud-africaine pratique une politique radicale de préservation de sa civilisation. Cette expérience se déroulerait sans heurts graves tandis que les réelles menaces qui pèseraient sur l’Afrique du Sud seraient le fait d’une conspiration juive et de l’hostilité grandissante de l’ONU et ses nouveaux États noirs74. L’auteur emploie ainsi, pour nourrir son argumentation, une rhétorique conspirationniste classique où Juifs et organisations internationales figurent en bonne place.
40Dans les périodiques étudiés, l’isolement de l’Afrique du Sud sur la scène internationale est salué, et fait sans doute écho à la marginalité des groupes d’extrême droite français dans le jeu politique national.
41Dès 1960, Ordine Nuovo apporte en effet son soutien à l’« “apartheid” », employé avec des guillemets et qualifié de « bête noire de l’humanitarisme ignorant de ce printemps 6075 ». Il offre un écho important à la situation sud-africaine dans les colonnes de ses périodiques. En 1964, Rauti réplique à une campagne anti-apartheid menée par le PCI romain et affirme que le régime sud-africain est exempt de cruauté : il s’agirait seulement d’une politique de développement séparé des races. Il en veut pour preuve l’immigration noire qui toucherait le pays76. Ordine Nuovo fait suivre aux paroles les actes et organise, en décembre 1965, une manifestation de propagande en faveur du gouvernement sud-africain77. En échange, le groupe italien aurait bénéficié d’une « subvention annuelle d’un million de lires78 d’une organisation para-gouvernementale non précisée de l’Afrique du Sud, en compensation d’articles en défense du gouvernement de Pretoria et des droits des blancs en Afrique du Sud79 ».
42Comme l’Afrique du Sud, pays « assiégé au sein du continent noir », la Rhodésie, ancienne colonie britannique, fait également figure de « bastion blanc » et bénéficie, de ce fait, de l’appui verbal et d’une propagande suivie des extrêmes droites françaises et italiennes80.
43 Défense de l’Occident apporte son soutien à Ian Smith, leader de la minorité blanche au pouvoir, qui proclame unilatéralement l’indépendance de son pays, la Rhodésie, face à la Couronne britannique, en novembre 196581. Seule l’Afrique du Sud reconnaît officiellement la colonie sécessionniste qui bénéficie également du soutien indirect du Portugal salazariste. La mise au ban de la communauté internationale accentue la sympathie dont bénéficie la Rhodésie de Smith auprès des groupes d’extrême droite européens qui se mobilisent et créent des comités de soutien.
44 Europe-Action accorde également toute son attention au problème rhodésien. En mai 1964, la revue se félicite de la solidarité existant entre la Rodhésie et l’Afrique du Sud, expression de l’alliance raciale promue par Europe-Action82. Lors de la déclaration d’indépendance, les rédacteurs du périodique affirment que la Rhodésie doit pouvoir compter sur le soutien de l’Occident. Ils réitèrent leur soutien total à leurs frères de Rhodésie contre la condamnation, par le monde entier des « 230 000 Blancs de Rhodésie qui entendent préserver leur intégrité et celle de leur descendance83 ». Dans ce contexte, Saint-Loup crée un Comité France-Rhodésie qui organise des conférences dans toute la France, des voyages à Salisbury, et collecte des fonds pour soutenir le régime de Ian Smith affecté par les sanctions économiques de l’ONU.
45Les Italiens ne sont pas en reste. Au comité France-Rhodésie répond le Comité Italia-Rhodesia, fondé en 1966, par Pino Rauti84 qui soutient Salisbury, « les “colons blancs” » et « la présence de la civilisation, contre le chaos85 ». Le comité aurait en réalité servi à Rauti pour obtenir des subventions du Gouvernement rhodésien86. Outre la Rhodésie et l’Afrique du Sud, les groupes d’extrême droite prennent également, de part et d’autre des Alpes, fait et cause pour défendre la présence portugaise dans le monde.
Défendre la présence portugaise dans le monde
46Le MSI apporte en effet son soutien politique à la politique coloniale menée par le régime salazariste. Le 1er avril 1962, le député Giulio Caradonna, responsable du secteur jeunesse du MSI, rencontre le dictateur Salazar. À l’occasion de cette entrevue, le Portugal se serait engagé à verser des subventions aux groupes d’extrême droite italiens en échange de leur action de propagande contre la menace communiste dans les colonies africaines portugaises. Le voyage de Caradonna est immédiatement suivi d’effets : les organisations de jeunesse du MSI annoncent en effet la tenue de manifestations philo-salazaristes dans toute l’Italie87.
47Parallèlement, Ordine Nuovo, Europe-Action et Défense de l’Occident se font le relais, dans leurs pays respectifs, de la politique portugaise en Afrique. Le périodique de Maurice Bardèche s’alarme, dès juillet-août 1961, des révoltes angolaises contre la présence portugaise et considère ce territoire africain comme l’une des clefs de la défense de l’occident. L’auteur parle du drame de l’Angola qui ferait écho au drame algérien, tous deux victimes, dans la prose de Défense de l’Occident de la « subversion » susceptible de les conduire « au bord de l’abîme88 ». Les auteurs d’Europe-Action insistent à leur tour sur l’identité du combat mené en Angola par les Portugais, « présents en Afrique depuis cinq siècles », et celui qui fut mené en Algérie par les Français89. En France comme en Italie, l’Angola est systématiquement présenté comme un bastion occidental.
48Réfutant l’idée selon laquelle le « colonialisme coïnciderait à cent pour cent avec l’exploitation et la misère », Ordine Nuovo fait l’éloge de la colonisation portugaise qui aurait fait de l’Angola un immense chantier où la mise en valeur du territoire aurait été assurée grâce à « l’orgueilleuse capacité créatrice propre à la race lusitanienne ». Les Italiens dressent ainsi le tableau d’un Angola florissant, économiquement en pleine croissance.
49 Ordine Nuovo se félicite en outre d’avoir rompu grâce à ses articles de propagande pro-lusitanienne, cette véritable « conjuration du silence » montée par la presse90. L’isolement diplomatique et l’hostilité de l’Organisation des Nations Unies (ONU) et de son secrétaire général, le Birman U Thant91, à l’égard des colonies portugaises, « seul[es] contre l’ensemble du monde “officiel”92 » sont salués et érigés en vertus.
Une extrême droite italienne bénéficiaire des subsides portugais ?
50Une telle insistance ne peut s’expliquer uniquement par les concordances idéologiques avec l’action du régime salazariste en Afrique. Le gouvernement lisboète a sans doute fait bénéficier Ordine Nuovo de subsides en échange de son soutien à la politique portugaise. Au début de l’année 1964, Pino Rauti entretient en effet des correspondances avec la présidence du Conseil portugais et le Secrétaire National pour l’information. L’Italien projette alors de se rendre au Portugal et en Espagne pour fixer les modalités d’une vente d’armes à destination du Portugal, alors que ce pays est l’objet d’un embargo international93. La société italienne Beretta aurait été contactée par l’intermédiaire d’un ami de Rauti et les modalités de transport de la marchandise fixées. Un mois plus tard, les dirigeants d’Ordine Nuovo doivent rencontrer, au Portugal, des hauts fonctionnaires de la PIDE « pour mettre au point un plan visant à faciliter l’achat d’armes en Italie pour le compte de ce pays. À cette fin, Graziani recevrait la mission de faire office d’intermédiaire avec une importante industrie du Nord (Beretta ?) pour conclure un accord oral94 ». Nous ignorons si ces négociations furent portées à leur terme.
51Tandis que le soutien aux régimes d’apartheid sud-africain et rhodésien est réitéré dans les colonnes des périodiques français et italiens, la deuxième moitié des années 1960 se caractérise par un déplacement progressif, une polarisation nouvelle des centres d’action et de décision de l’extrême droite européenne vers les dictatures portugaise et espagnole. Sans doute motivée par des considérations idéologiques, la défense de la présence blanche en Afrique s’accompagne de la mise en place de réseaux de financements et de trafics d’armes qui mettent au jour les activités subversives menées par certains groupes d’extrême droite en Italie.
52Parallèlement, ces groupes multiplient les rencontres pour créer une « internationale ».
Former une « internationale » d’extrême droite ?
53Les échanges idéologiques dont témoignent les phénomènes de transfert culturel se traduisent également par des rencontres entre leaders de l’extrême droite européenne. Les années 1960 sont en effet marquée par la volonté partagée, au sein de l’extrême droite du continent, de constituer des plates-formes communes d’action.
54Dès 1962, la Fédération des Étudiants Nationalistes entretient des relations suivies avec la Jovem Portugal de Zarco Moniz Ferreira95, mais c’est surtout avec l’Ordine Nuovo de Pino Rauti que le groupe nationaliste-révolutionnaire français a des contacts. Les relations personnelles d’Antonio Lombardo, Pino Rauti et Fabrice Laroche constituent le socle de ces échanges, insérés au sein de réseaux européens de collaboration96.
Collaboration politique bilatérale et réseaux européens
55Dès avril 1964, Ordine Nuovo et les groupes français qui se rassemblent autour de la revue Europe-Action mènent une collaboration active ponctuée de rencontres régulières : cette « unité renforcée entre les extrémistes de droite italiens et français aurait été suggérée par les centres gouvernementaux portugais et espagnol, qui entendent favoriser l’activité radicale en Europe en faveur de l’Espagne et du Portugal97 ». Les Italiens proposent alors de constituer un Bureau européen d’études rassemblant les représentants des groupes et des revues d’extrême droite « les plus qualifiées » en Europe. Les groupes liés aux périodiques Attaque, Nation Europa, l’Europe communautaire et le Circulo doctrinal José Antonio sont pressentis pour participer à l’initiative promue par Ordine Nuovo et Europe-Action. Zarco Moniz Ferreira est enthousiasmé par l’initiative et il écrit à Antonio Lombardo :
« Au cours de mon séjour à Paris, j’ai été convaincu qu’il faut, le plus tôt possible, et conformément à l’exigence d’une authentique homogénéité de notre Cause commune, établir dans plusieurs pays des contacts avec une seule organisation, laissant de côté les organisations fantômes98. »
56L’année 1965 est marquée par une série de réunions, européennes et bilatérales. En septembre 1965, la Fédération des Étudiants Nationalistes (FEN), et la revue Europe-Action organisent les Journées du nationalisme, une grande assemblée néofasciste internationale99. Après le camp-école de la Fédération des Étudiants Nationalistes en juin 1964, les militants italiens et français se rencontrent lors de ces Journées du nationalisme100. La vocation européenne de la manifestation est claire : celle-ci doit se conclure par la constitution d’un Bureau politique européen unissant des groupes allemands, belges, espagnols, portugais et italiens101.
57Parallèlement, au mois de juin 1965, l’informateur Aristo fait état d’un projet de réunion de quatre jours, à Paris ou Hambourg, prévue pour l’été 1965. Il s’agit de mettre sur pied un organisme international qui coordonnerait l’activité politique, culturelle et activiste des groupes européens d’extrême droite102. La réunion est finalement organisée à Hambourg le 25 août 1965 par le nouveau parti nazi NPD et l’on prévoit la présence de délégations française, espagnole, portugaise, belge, hollandaise, britannique, italienne et de pays de l’Amérique Latine. L’un des dirigeants d’Ordine Nuovo, Giulio Maceratini insiste sur le rôle important joué par les Allemands pour mettre en place une centrale d’information européenne et constituer une internationale fasciste après la réunion tenue à Hambourg103.
58À la fin du mois de novembre 1965, Giulio Maceratini se rend à Paris pour rencontrer les dirigeants français d’Europe-Action. Il doit régler des problèmes liés à la presse et à la propagande et, en particulier, fixer la participation financière des Français à la publication d’un hebdomadaire illustré franco-italien. Maceratini vient en France avec
« plusieurs propositions pour constituer une société à capitaux mixtes en charge de l’édition du périodique, ainsi que pour la transformation d’une maison d’édition romaine (dont font partie les dirigeants d’Ordine Nuovo) en un centre éditorial de publications de l’internationale de droite ».
59Le dirigeant d’Ordine Nuovo apporterait également « à Paris quelques informations de nature confidentielle sur l’infiltration d’individus subversifs dans les forces armées italiennes et sur l’appareil commercial créé par le PCI en Italie pour subventionner l’action du parti », confirmant l’activité de renseignement menée par le groupe104.
60Durant son séjour parisien, Maceratini rencontre notamment Fabrice Laroche et Jean-Louis Tixier-Vignancour. Il évoque avec eux les problèmes de l’organisation internationale. Les Français se seraient en effet plaints de la lenteur du travail effectué à Madrid et auraient proposé de structurer différemment l’Internationale en « assoupliss[ant] certains secteurs ». Tixier aurait présenté à ses interlocuteurs un projet visant à faire sortir cette internationale de la semi-clandestinité. À cette fin, il prévoit une action et une participation plus importantes des personnalités des droites européennes, jusque-là laissées de côté. Tixier-Vignancour défend ainsi un élargissement de l’Internationale, sans toutefois, dit-il, modifier ses orientations idéologiques et ses objectifs politiques. Le financement de l’hebdomadaire promu conjointement par Ordine Nuovo et Europe-Action est également abordé sans que les parties en présence ne parviennent à un accord, en raison des réticences françaises à s’engager au sein d’une collaboration bilatérale avant d’avoir pu juger des résultats des réunions européennes à venir105.
61L’initiative éditoriale annoncée finit par aboutir et un numéro d’Europe-Action hebdomadaire redazione italiana est publié106. Cette expérience s’avère finalement sans lendemain. Français et Italiens ne sont vraisemblablement pas parvenus à un accord qui satisfasse les deux parties. Les relations militantes demeurent toutefois étroites, ce dont témoigne la présence des dirigeants d’ON lors du congrès constitutif du Mouvement Nationaliste du Progrès (MNP).
Le congrès constitutif du Mouvement Nationaliste du Progrès
62La tenue, du 28 avril au 1er mai 1966, du congrès constitutif du Mouvement Nationaliste du Progrès (MNP), se situe dans la continuité des réunions européennes évoquées. Il voit la participation de nombreux représentants de l’extrême droite européenne et notamment de plusieurs dirigeants d’Ordine Nuovo.
63La FEN représente le vivier militant du mouvement officiellement lancé lors de ce congrès qui rassemble environ 400 personnes. Plusieurs générations d’activistes d’extrême droite sont rassemblées lors de la réunion inaugurale. La vieille garde militante est présente avec Pierre Bousquet, ancien Waffen-SS et membre fondateur de Jeune Nation, de Marc Augier dit Saint-Loup, de Maurice Sicard dit Saint-Paulien ancien adjoint de Doriot, tous deux anciens membres de la Légion des Volontaires Français (LVF), et de Maurice Bardèche, ainsi que de très nombreux membres de l’OAS107. Les dirigeants du groupe – Dominique Venner, Ferdinand Ferrand, François d’Orcival, Pierre Bousquet, Guy Persac ou encore Jean-Marcel Zagamé – sont qualifiés, dans le rapport italien, d’« individus de très grande qualité dans leurs domaines de compétences respectives108 ».
64Précisément renseigné, Jacques Delarue, le commissaire parisien en charge de la surveillance de l’extrême droite, précise la nature des différents thèmes abordés par les orateurs. Tout en mettant l’accent sur le caractère « social », « nationaliste » et « populaire » du mouvement, ceux-ci se seraient efforcés de gommer toutes les références trop voyantes au fascisme et au nazisme. Le parti revendique également l’héritage des valeurs spirituelles, nationalistes et révolutionnaires qui furent « à la base de l’action de l’OAS pendant et après les événements algériens ». En matière sociale enfin, le MNP en appelle à
« l’élimination du féodalisme financier, la lutte contre la partitocratie corrompue, une justice sociale qui soit fondée sur la collaboration entre capital et travail, […] le développement de la vie rurale, la défense des forces saines du travail ».
65Selon Delarue, « toute la propagande du MNP est axée sur l’Europe, vue comme une union pour la défense de l’homme blanc et de la culture occidentale ». La réalisation d’une Europe nationaliste est logiquement perçue comme un objectif majeur de la lutte.
66De nombreuses délégations étrangères se joignent ainsi aux discussions et réunions, témoignant de l’importance, pour le mouvement en constitution, de la collaboration internationale. Britanniques, Américains de l’aile droite du parti républicain, Belges de la Fédération des étudiants européens et de la « Révolution européenne », Espagnols de la Phalange ou des cercles José Antonio ainsi que des Portugais du Jovem Portugal voisinent avec la nombreuse délégation italienne. Les principaux dirigeants d’Ordine Nuovo ont fait le déplacement.
67En matière de collaboration internationale, les délégations présentes s’engagent à constituer des organisations politiques parfaitement alignées sur les conceptions idéologiques du MNP. Ils préparent ainsi une prise du pouvoir à brève échéance, à l’échelle nationale et occidentale. Les dirigeants français se seraient ainsi accordés, en s’adressant aux délégations étrangères, sur la nécessité de mettre en place une organisation européenne qui refléterait « par sa formation, son esprit et son agressivité » la Légion étrangère. Entrer au sein du MNP impliquerait donc, selon les dires de ses dirigeants rapportés par les services italiens, d’en accepter toutes les conséquences, même de nature physique. Personne ne nie alors l’intention du mouvement de « donner vie à un squadrisme de type nazi-fasciste, qui ait les capacités de s’emparer du pouvoir109 ».
68L’identité d’objectifs et de moyens adoptés par les groupes de part et d’autre des Alpes apparaît clairement. Leur lutte contre le communisme doit être menée « sur le plan politique mais éventuellement également avec la violence si cela s’avérait nécessaire110 ». En mai 1966, l’Ufficio Affari riservati s’inquiète des relations entretenues par Ordine Nuovo avec « presque toutes les organisations néofascistes européennes les plus extrémistes, y compris le nouveau parti français “Mouvement Nationaliste du Progrès” qui n’excluent pas, pour la réalisation de leurs objectifs politiques, le recours à la violence et au terrorisme111 ». Delarue spécifie en effet qu’au sein de la FEN et du MNP, « on s’efforce de former des cadres qui seront prêts le jour où une situation politique chaotique permettra de tenter une prise de pouvoir ». Il ajoute que « dans ce but, chaque été, la FEN organise un “camp-école” dans lequel une formation politique et sportive à caractère paramilitaire est donnée à environ 80 jeunes gens112 ».
69Le président du MNP propose également de créer un secrétariat européen à Paris pour coordonner toutes les activités des mouvements de droite sur le plan international. Il refuse toutefois de soutenir un projet d’Internationale de type nazi, considérée comme peu efficace politiquement et défendue par les Allemands du NDP, d’ailleurs absents lors du congrès de constitution du MNP en raison de différends franco-allemands portant sur l’Alsace-Lorraine. Une réunion doit également être organisée afin que soient examinées les modalités de financement de l’organisation internationale. Dans ce contexte, Dominique Venner est chargé de rédiger un programme politique et d’action, soumis à l’approbation des groupes étrangers tandis que l’on évoque la possibilité de composer une charte européenne nationale-révolutionnaire qui engagerait les groupes nationaux à la plus étroite collaboration113. Le congrès constitutif du MNP a des conséquences immédiates sur l’organisation d’Ordine Nuovo. Les Italiens auraient décidé de procéder à un intense travail pour mettre leur propre organisation en adéquation avec le modèle du MNP. L’objectif est de transformer radicalement la structure d’Ordine Nuovo afin d’instaurer
« une discipline nouvelle entre les inscrits, modifiant les critères de propagande, créant une organisation commerciale (maison d’édition et une librairie) qui puisse servir à financer les activités, créant groupes ou cellules d’activistes sur le modèle de celles du MNP, dont la tâche sera d’instrumentaliser chaque événement d’une certaine importante qui adviendrait en Italie ou en Europe, menant jusqu’au bout la lutte contre le MSI ».
70Le congrès est d’ailleurs suivi, quelques mois plus tard, par la sortie, en octobre 1966, des premiers ouvrages publiés par les edizioni Europa de Pino Rauti. Ces rencontres ont sans doute permis le lancement de la maison d’édition du dirigeant d’Ordine Nuovo.
71Les services italiens rapportent en outre que les dirigeants d’ON auraient rencontré en privé les dirigeants du MNP après la conclusion de son congrès constitutif. Rauti y aurait obtenu des promesses d’aides financières et les organisations auraient prévu de se rencontrer à l’automne afin de négocier un plan de financement. Le 4 août 1966, une note des carabiniers de Rome confirme qu’Ordine Nuovo bénéficierait d’une aide financière « guère importante » des « mouvements-frères de France et d’Espagne114 ».
72Par la suite, les relations entre groupes français et italiens se poursuivent : des militants d’ON sont invités au camp-école de la FEN prévu à l’été 1967. La note précise que « les camps d’été de la FEN s’occupent de la préparation politique, de la propagande et de l’organisation d’activistes d’extrême droite auxquels sont données des leçons sur l’usage et l’utilisation d’armes et explosifs ». Un accident aurait d’ailleurs eu lieu l’année précédente lors du camp organisé en Corse et deux jeunes auraient été blessés en manipulant une arme à feu115.
73Ces relations précoces, résurgences des réseaux OAS, familiarisent Français et Italiens aux prises de contacts et échanges internationaux qui, au seuil des années 1970, font désormais partie des pratiques politiques de l’extrême droite.
74Les réseaux d’extrême droite s’implantent alors dans la péninsule ibérique. Ils sont en partie constitués d’anciens militaires français engagés dans les conflits coloniaux, qui s’inspirent d’un terreau idéologique influencé par les théories de la guerre révolutionnaire et de la contre-subversion.
« Guerre révolutionnaire » et « contre-subversion » : un terreau idéologique et politique
75Dès les années 1950, de jeunes officiers marqués par la guerre d’Indochine, conflit d’un type nouveau où guérilla armée et « action psychologique » se conjuguent pour déconstruire les stratégies et tactiques traditionnelles propres à l’affrontement armé, participent du renouvellement de la pensée militaire. Charles Lacheroy énonce, le premier, « une théorie sur laquelle viennent s’agréger les réflexions nouvelles pour constituer ce qu’il est convenu d’appeler une véritable “école stratégique française de la guerre révolutionnaire”, amorçant une émulation intellectuelle sans précédent au sein des forces armées116 ».
76Le déclenchement de la guerre d’indépendance algérienne permet à l’État-major français de mettre en pratique cette forme particulière de la guérilla. Dans ce cadre, l’armée française devient spécialiste des actions de contre-guérilla au sein des armées occidentales et fait notamment des émules au sein de l’État-major italien, dont une partie des instances dirigeantes est proche de groupes d’extrême droite comme Ordine Nuovo.
Ordine Nuovo et le SIFAR : diffuser les théories contre-subversives en Italie
77Certaines tendances de l’extrême droite italienne sont particulièrement perméables à ces théorisations dont la diffusion est en outre favorisée par la présence d’activistes OAS sur le territoire italien. Ordine Nuovo et Clemente Graziani jouent sur ce point un rôle fondamental. Ce dernier publie, en 1963, un opuscule intitulé La guerra rivoluzionaria avant de créer un an plus tard un Centro studi e documentazione sulla guerra psicologica destiné à informer sur les techniques d’influence et d’agression du communisme international117. Il évalue la possibilité d’une action révolutionnaire en Italie et promeut un rapprochement, sinon une alliance, des forces d’extrême droite avec les milieux militaires et policiers pour abattre le communisme. Il appelle ainsi à rompre « avec les actions stériles, les misérables objectifs électoraux et les misérables ambitions » pour s’engager sur la « voie du “réalisme héroïque”118 ».
L’Istituto Alberto Pollio : penser la contre-subversion
78Ces milieux – extrême droite et militaires –, aux préoccupations similaires, se retrouvent ainsi pour échanger sur le sujet à l’occasion du Congrès d’étude de l’Institut Alberto Pollio, organisé du 3 au 5 mai 1965 à Rome. Créé en août 1964 et dirigé par Enrico de Boccard, l’Institut Pollio est étroitement lié aux instances dirigeantes du SIFAR et notamment au général Viggiani119. L’Institut se définit comme un groupe d’influence, « véritable centre de propulsion et de liaison pour une action unitaire d’agitation et de formation de l’opinion publique120 ». En partie financé par de grands industriels italiens121, il se propose de remplir le « vide préoccupant qui est sur le point d’être déclenché par la crise du système des partis », par des méthodes issues de la guerre révolutionnaire. Il entretient également des contacts avec des groupes et organisations d’extrême droite telles que le FUAN et l’Avanguardia Nazionale Giovanile de Stefano Delle Chiaie122.
79L’Institut organise donc, en mai 1965, un congrès à Rome sur « la guerre révolutionnaire instrument de l’expansion du communisme dans le monde », en présence d’environ 300 personnes123. Cette réunion, qui rassemble journalistes, militants d’extrême droite dont probablement Stefano Delle Chiaie, dirigeants militaires italiens, industriels représentants de la Confindustria, vise à favoriser relations et rencontres entre civils et militaires dans une optique résolument anticommuniste, tandis que le premier gouvernement de centre-gauche entre en crise.
80Les actes du colloque, rapidement publiés alors que l’« infiltration » communiste galopante s’étendrait à presque tous les secteurs de la vie publique, sont conclus par ces mots :
« C’est une lutte à mort et notre objectif est celui d’éliminer le danger communiste, sous toutes ses formes. Celle qui exclut la violence nous serait plus agréable, mais il ne faut pas refuser de considérer également l’autre forme de lutte124. »
81Si l’ouvrage ou les comptes rendus des services ne nous permettent pas d’affirmer avec certitude que c’est lors de cette conférence que fut théorisée et préparée la « stratégie de la tension », la violence des propos exprimés ici irait en ce sens, confirmée par plusieurs autres éléments. Le témoignage de Philippe de Massey, présent au congrès, confirme nos intuitions125. En avril 2012, Massey déclare en effet avoir assisté à cette conférence, « à la création de ce truc qui était l’embryon de toute une affaire, de toute une stratégie ». À notre question sur la nature de cette stratégie, il répond, non sans une certaine malice, « que ça coule de source » puis ajoute : « l’adversaire était le PC, qui était structuré, qui avait 50 ans d’expérience […] on pouvait espérer que, si en Italie ça chauffait, les choses changeraient en France126 ».
82Plusieurs journalistes d’extrême droite, proches des services de renseignements militaires, officiellement engagés par le SIFAR en 1966127 et 1967, sont également présents au congrès de l’Institut Pollio. En outre, la création, par Ordine Nuovo, en 1967 des Comitati di riscossa nazionale, destinés à contrer, dans les usines et les universités italiennes, la domination communiste, constitue une application concrète des préconisations du congrès de l’Institut Pollio. Pino Rauti fait, tout au long des années 1960 et 1970, figure de passeur entre ces milieux militaires, le MSI et les organisations extra-parlementaires.
83Dans ce contexte, les relations troubles entretenues entre les dirigeants salazaristes et les groupes d’extrême droite favorisent la mise en place de réseaux européens d’extrême droite, qui trouvent leurs ramifications dans les territoires portugais d’Outre-Mer, en Rhodésie et en Afrique du Sud. Outre les subsides dont certains groupes d’extrême droite bénéficient, le gouvernement salazariste permet, à partir de 1966-1967, la création à Lisbonne, de l’Aginter presse, agence de presse masquant une officine anticommuniste créée par d’anciens militaires français, activistes de l’OAS, réfugiés dans la péninsule ibérique.
Notes de bas de page
1 Rauti Pino, « L’Europa e il terzo mondo », Ordine Nuovo, X, 5-6, juin-juillet 1964, p. 8.
2 Fournier Gilles, « Un problème mal posé. Existe-t-il des races “inférieures” ? », Europe-Action, 7, juillet 1963, p. 43. Gilles Fournier pourrait être, selon nos informations, le pseudonyme du Dr Claude Grandjean.
3 Fournier Gilles, « Nos frontières », Europe-Action, 18, juin 1964, p. 17.
4 Gilles Fournier su Europe-Action Parigi, « Le nostre frontiere », Ordine Nuovo, X, 5-6, juin-juillet 1964, p. 76-77.
5 La dimension antisémite du propos doit être relevée. Anders Robert, « Pour ou contre la Coopération ? », Drames et problèmes de l’Afrique, Défense de l’Occident, numéro spécial 53-54, novembre-décembre 1965, p. 48.
6 Mabire Jean, « Notre nationalisme européen », Europe-Action, 31-32, juillet-août 1965, p. 13.
7 Rauti Pino, « L’Europa e il terzo mondo », Ordine Nuovo, X, 5-6, juin-juillet 1964, p. 1-11 ; p. 9.
8 « Honneur », Europe-Action, 5, mai 1963, p. 29 ; Ferrière Alain, « La maternité volontaire », Europe-Action, 47, novembre 1966, p. 31-33.
9 « Contributo alla battaglia per l’Ordine Nuovo europeo », Ordine Nuovo, VIII, 1, mars 1962, p. 57-60.
10 « Il “cattolico” Kennedy al lavoro. Chiarezza d’un discorso per gli Europei narcotizzati », Ordine Nuovo, VII, février-mars 1961, p. 11-14.
11 « Antiracisme et Occident », Europe-Action, 10, octobre 1963, p. 5-6.
12 Rauti Pino, « L’Europa e il terzo mondo », art. cit., p. 8.
13 Rauti Pino, « Tesi per il congresso », Ordine Nuovo, II, 10-11, octobre-novembre 1956, p. 1-7.
14 Éditorial « De Gaulle et la Chine », Europe-Action, 14, février 1964, p. 1.
15 Voir Foro Philippe, « Racisme fasciste et Antiquité. L’exemple de la revue La Difesa della Razza (1938-1943) », Vingtième Siècle. Revue d’histoire 2/2003 (no 78), p. 121-131.
16 Giusti Umberto, « Battaglia demografica si o no. Concludiamo una nostra polemica », Ordine Nuovo, VI, 4-5, novembre 1960, p. 14-24 ; p. 19.
17 Rossi-Doria Anna, « Antisemitismo e antifemminismo nella cultura positivistica », inBurgio Alberto (a cura di), Nel nome della razza. Il razzismo nella storia d’Italia 1870-1945, Bologne, Il Mulino, 1999, p. 455-473.
18 Giusti Umberto, « Battaglia demografica si o no. Concludiamo una nostra polemica », art. cit., p. 23-24.
19 Rauti Pino, « L’Europa e il terzo mondo », Ordine Nuovo, X, 5-6, juin-juillet 1964, p. 9 ; Rauti Pino, « Un Impero per l’Europa », Ordine Nuovo, X, 1-2, janvier-février 1964, p. 1-7 ; p. 7.
20 Rauti Pino, « Un Impero per l’Europa », art. cit., p. 7.
21 Rauti Pino, Lombardo Antonio, L’Europa e l’Africa, Quaderni di Ordine Nuovo. Serie « L’Europa e il terzo mondo », Lisbonne, ed. Panorama, 1965. Lombardo est le responsable du secteur étranger d’Ordine Nuovo.
22 Bardèche Maurice, « Aider l’Afrique », Drames et problèmes de l’Afrique, Défense de l’Occident, numéro spécial 53-54, novembre-décembre 1965, p. 7.
23 D’Arribère Pierre, D’Orcival François, Prieur Henri, Venner Dominique, « Sous-développés, sous-capables », Cahiers d’Europe-Action, supplément à Europe-Action, 1, Paris, éditions Saint-Just, 1964.
24 Rauti Pino, Lombardo Antonio, L’Europa e l’Africa, op. cit.
25 Savarèse Éric, Histoire coloniale et immigration. Une invention de l’étranger, Paris, Séguier, 2000, p. 81.
26 Aryas, « I fatti e le idee di tutto il mondo », Ordine Nuovo, X, 3-4, mars-avril 1964, p. 57.
27 Rauti Pino, Lombardo Antonio, L’Europa e l’Africa, op. cit.
28 Persac Guy, « En Afrique Australe, les blancs font face », Europe-Action, 17, mai 1964, p. 12.
29 Rauti Pino, « Un Impero per l’Europa », art. cit., p. 6.
30 Labanca Nicola, Oltremare. Storia dell’espansione coloniale italiana, Bologne, Il Mulino, 2002. p. 420.
31 D’Arribère Pierre, D’Orcival François, Prieur Henri, Venner Dominique, « Sous développés, sous capables », op. cit., p. 4.
32 Blanchard Emmanuel, La police parisienne et les Algériens (1944-1962), Paris, Nouveau Monde éditions, 2011, p. 205.
33 D’Arribère Pierre, D’Orcival François, Prieur Henri, Venner Dominique, « Sous développés, sous capables », op. cit., p. 70.
34 Buton Philippe, Gervereau Laurent, Le couteau entre les dents, Paris, Chêne, 1988, p. 18.
35 Rauti Pino, Lombardo Antonio, L’Europa e l’Africa, op. cit.
36 « À l’échelle de l’Occident », Europe-Action, 5, mai 1963, p. 51.
37 Andriani Paolo, « Bandung l’Asia alle porte », Ordine Nuovo, I, 2, mai 1955, p. 3.
38 Bardèche Maurice, « Le racisme, cet inconnu », Défense de l’Occident, 7 (nouvelle série), septembre 1960.
39 Respectivement Europe-Action, no 14, février 1964 et no 24, décembre 1964.
40 Voir Laurens Henry, « Les Afro-Asiatiques : acteurs ou enjeux de la scène politique internationale ? », Politique étrangère, no 3-4, 2000, p. 887-900.
41 Europe-Action, 22, octobre 1964, p. 3.
42 Fournier Gilles, « Nos frontières », art. cit., p. 17.
43 Alpino Federico, « Il “razzismo negro” minaccia l’Europa », Ordine Nuovo, VI, 2, mai 1960, p. 70-71.
44 Rauti Pino, « L’Europa e il terzo mondo », Ordine Nuovo, X, 5-6, juin-juillet 1964, p. 8.
45 Villatoux Paul, « L’institutionnalisation de l’arme psychologique pendant la guerre d’Algérie au miroir de la guerre froide », Guerres mondiales et conflits contemporains 4/2002 (no 208), p. 35-44.
46 Buton Philippe, Gervereau Laurent, Le couteau entre les dents, op. cit., p. 18.
47 Venner Dominique, Éditorial « Bientôt ils seront un million », Europe-Action, 22, octobre 1964, p. 3.
48 Prieur Henri, « Les allogènes en France », Europe-Action, 11, novembre 1963, p. 49.
49 Venner Dominique, Éditorial « Bientôt ils seront un million », art. cit., p. 3.
50 Mosse George L., L’image de l’homme. L’invention de la virilité moderne, Paris, Pocket, 1996, p. 13.
51 Venner Dominique, « Par-delà une élection », Europe-Action, 36, décembre 1965, p. 4-5.
52 Blanchard Emmanuel, La police parisienne et les Algériens (1944-1962), op. cit., p. 213.
53 Shepard Todd, « L’extrême droite et “Mai 68”. Une obsession d’Algérie et de virilité », ClioHFS, 29, 2009, p. 44.
54 Alpino Federico, « Il “razzismo negro” minaccia l’Europa », art. cit., p. 70.
55 Noiriel Gérard, Immigration, antisémitisme et racisme en France (XIXe-XXesiècle). Discours publics, humiliations privées, Paris, Fayard, 2007, p. 432.
56 Rauti Pino, « L’Europa che fugge », Ordine Nuovo, VI, 3, juin 1960, p. 129-131 ; Fiumara M. A., « Il razzismo nel Ventennio », Ordine Nuovo, IX, 3, juin 1963, p. 29-35. Voir Gabrielli Gianluca, « Un aspetto della politica razzista nell’impero : il “problema dei meticci” », Passato e Presente, XV, 41, 1997, p. 77-105.
57 Gabrielli Gianluca, « Africani in Italia negli anni del razzismo di Stato », inBurgio Alberto (a cura di), Nel nome della razza…, op. cit., p. 203.
58 Fournier Gilles, « Nos frontières », art. cit., p. 17.
59 Alpino Federico, « Il “razzismo negro” minaccia l’Europa », art. cit., p. 68 ; Fabrice Laroche, « Le racisme noir », Europe-Action, 17, mai 1964, p. 6.
60 Barry Goldwater est né le 2 janvier 1909. Sénateur républicain de l’Arizona, raciste et d’extrême droite, il est candidat à la présidence des États-Unis en 1964.
61 Aryas, « Colonialismo e imperialismo nella polemica con il PCI », Ordine Nuovo, VII, février-mars 1961, p. 6-10 ; p. 7. ; Graziani Clemente, « Letteratura d’avanguardia e crisi della civiltà contemporanea », Ordine Nuovo, VIII, 1, mars 1962, p. 23-30.
62 Couverture « en Afrique c’est la chasse aux blancs », Europe-Action, 25, janvier 1965 ; Venner Dominique, Éditorial, Europe-Action, 26, février 1965, p. 4.
63 Le 31 juillet 1954, Pierre Mendès-France, président du Conseil français promet d’accorder l’autonomie interne à la Tunisie.
64 Venner Dominique, « La chasse aux blancs », Europe-Action, 25, janvier 1965, p. 13-16.
65 En français : Génocide contre l’Europe.
66 Génocide contre le Portugal, ed. Panorama, sans indication de lieu, sans date.
67 Fondazione Ugo Spirito, Fonds Accame, Pochette Portugal, Génocide contre le Portugal.
68 Lombardo Antonio, Genocidio contro l’Europa, Lisbonne, ed. Panorama, 1964.
69 Europe-Action hebdomadaire, 41, 26 octobre 1964, p. 3.
70 Anders Robert, « Les communistes frappent en Portugal d’Outre Mer », Défense de l’Occident, 57, décembre 1966, p. 69.
71 Noi Europa, III, 1, janvier 1968.
72 Venner Dominique, « Nous sommes coupables », Europe-Action, 24, décembre 1964, p. 3 ; « Antiracisme et Occident », Europe-Action, 10, octobre 1963, p. 5.
73 Bardèche Maurice, « Vingtième anniversaire », Défense de l’Occident, 45, janvier 1965 ; Aryas, « Colonialismo e imperialismo nella polemica con il PCI », art. cit., p. 7.
74 Anders Robert, « Les problèmes humains en Afrique du Sud », Défense de l’Occident, 32, mai 1963.
75 « Il dramma del sud-africa assediato nel continente nero », Ordine Nuovo, VI, 2, mai 1960, p. 81-93.
76 Rauti Pino, « L’Europa e il terzo mondo », art. cit., p. 6.
77 Casa della Memoria de Brescia (CdM), Dossier de procédure pénale no 91/97, mod. 21, Rapport d’expertise no 5 de Aldo Giannuli commandité le 20 février 1998, annexe 181, note d’Aristo du 4 novembre 1965.
78 Cette somme correspond, en 2015, à 9941 euros (données Istituto Italiano di Statistica).
79 CdM, Dossier de procédure pénale no 91/97 mod. 21, document transmis par le ministero (MI) dell’Interno, Dipartimento della pubblica sicurezza (DPS), direzione centrale della polizia di prevenzione (DCPP), servizio centrale antiterrorismo, divisione 1, annexe C19, fasc. « Ordine Nuovo-Centro studi Ordine Nuovo », note du 23 mai 1967.
80 « Il dramma del Sud-Africa assediato nel continente nero », Ordine Nuovo, VI, 2, mai 1960, p. 81-93 ; p. 81 ; « Aspetti della lotta d’una nazione che non si arrende. La sfida del Portogallo », Noi Europa, III, 2, mai 1968, p. 5.
81 La colonie britannique s’appelle Rhodésie du Sud. Lorsque Ian Smith proclame l’indépendance de ce territoire, il le renomme Rhodésie.
82 Persac Guy, « En Afrique australe, les blancs font face », art. cit., p. 12.
83 « Nouvel État libre, la Rhodésie a le droit de vivre », Europe-Action, 36, décembre 1965, p. 20 ; Venner Dominique, « Par-delà une élection », Europe-Action, 36, décembre 1965, p. 4-5.
84 CdM, Tribunal de Catanzaro, Dossier de procédure pénale no 14/75A RGI contre Guido Giannettini et d’autres, Cartella 34, fasc. 92, documentazione SID, note biographique sur Giuseppe Rauti.
85 Encadré « Viva i ribelli », Noi Europa, II, 2, 10 mars 1967, p. 15.
86 Archivio Centrale dello Stato (ACS), ministero dell’Interno (MI), Gabinetto (Gab.), 1967-1970, Busta 25, fasc. Ordine Nuovo Roma, note centro Ordine Nuovo, 9 mai 1966. CdM, Dossier de procédure pénale no 91/97 mod. 21, document transmis par le MI, Dipartimento della pubblica sicurezza, direzione centrale della polizia di prevenzione, servizio centrale antiterrorismo, divisione 1, annexe C19, fasc. « Ordine Nuovo – Centro studi Ordine Nuovo », note du 23 mai 1967.
87 CdM, Tribunal pénal de Milan, Ufficio d’Istruzione, sezione 8, Dossier de procédure pénale contro Giannettini Guido ed altri, art. 422 C.P ed altro, Nota SID 01/1580/0 du 5 novembre 1974, Informazioni su Giannettini Guido, Rapport sur le neo-nazifascisme en Italie, situation générale, liens officiels et clandestins avec les centres étrangers, octobre 1963.
88 Ernout Liliane, « L’Angola, une des clefs de la défense de l’Occident », Défense de l’Occident, 15, juillet-août 1961.
89 Persac Guy, « En Afrique Australe, les blancs font face », art. cit., p. 12 ; D’Orcival François, « Qui triomphera en Angola ? », Europe-Action, 8, août 1963, p. 31-34.
90 Aryas, « I fatti e le idee da tutto il mondo », art. cit., p. 53.
91 Rappelons que la Birmanie a acquis son indépendance en 1948.
92 « I fatti e le idee – Portogallo in Africa », Ordine Nuovo, XI, 3-4, mai-juin 1965, p. 87.
93 CdM, Dossier de procédure pénale no 91/97 mod. 21, Rapport d’expertise d’Aldo Giannuli du 12 mars 1997, annexe 87, APP-Mi in fasc. « Rauti », note pour le SIFAR, 8 avril 1964.
94 CdM, Dossier de procédure pénale no 91/97 mod. 21, Rapport d’expertise d’Aldo Giannuli du 12 mars 1997, annexe 88, APP-Mi in fasc. « Rauti », note pour le SIFAR, 6 mars 1964 et annexe 89, APP-Mi in fasc. « Rauti », Rome, note confidentielle d’Aristo, 10 janvier 1964.
95 Centre d’Archives de Sciences Po, Fonds Étudiants nationalistes, EN1, pochette no 2, FEN Presse. Bulletin d’informations confidentielles, 10 février 1964.
96 BDIC, Fonds Delarue, Pochette documents dactylographiés, Rapport de Jacques Delarue sur la situation des mouvements d’extrême droite en France, 29 mars 1968.
97 CdM, Dossier de procédure pénale no 9/82-A, fasc. « Ordine Nuovo », note du 20 avril 1964.
98 CdM, Dossier de procédure pénale no 91/97 mod. 21, Rapport d’expertise no 5, d’Aldo Giannuli, annexe 98, MI, DCPP, fasc. « Ordine Nuovo – Varie », note non datée.
99 CdM, Dossier de procédure pénale no 9/82-A, fasc. « Ordine Nuovo », note du 29 mai 1964.
100 Centre d’Archives de Sciences Po, Fonds Étudiants nationalistes, EN2, Europe-Action hedbo, 26, 29 juin 1964, p. 2.
101 CdM, Dossier de procédure pénale no 9/82-A, fasc. « Ordine Nuovo », note du 20 avril 1964.
102 CdM, Dossier de procédure pénale no 91/97 mod. 21, Rapport d’expertise no 5, d’Aldo Giannuli, annexe 164, MI, DCPP, fasc. « Ordine Nuovo-Varie », note d’Aristo du 25 juin 1965. Les notes suivantes proviennent du même fond.
103 Note du 12 octobre 1965.
104 Note du 26 novembre 1965.
105 Note du 1er décembre 1965.
106 Numéro non daté d’Europe-Action hebdomadaire redazione italiana.
107 BDIC, Fonds Delarue, Rapport de Jacques Delarue. 1966, Activité des mouvements en France. Leurs liaisons internationales, annexe 3.
108 CdM, Fonds Paolo Emilio Taviani, documentation de la DGPS, documentazione relativa allo scioglimento di « Ordine Nuovo » e di « Anno Zero », document « costituzione del “mouvement nationaliste du progrès” e riunioni internazionali delle destre europee », non daté.
109 Ibid.
110 CdM, Dossier de procédure pénale no 91/97 mod. 21, MI, DPS, servizio centrale antiterrorismo, divisione 1, Annesso C19, SISMI, fasc. « Ordine Nuovo », lettre du CS de Gênes à l’Ufficio D, 1er août 1966.
111 CdM, Dossier de procédure pénale no 91/97 mod. 21, Rapport d’expertise no 5 d’Aldo Giannuli, annexe 213, lettre de la DGPS, divisione Affari riservati, sezione terza à MM. les préfets de police de la République, Rome, 17 mai 1966.
112 BDIC, Fonds Delarue, Rapport de Jacques Delarue. 1966, Activité des mouvements en France. Leurs liaisons internationales, annexe 3.
113 CdM, Fonds Paolo Emilio Taviani, documentation de la DGPS, documentazione relativa allo scioglimento di « Ordine Nuovo » e di « Anno Zero », document « costituzione del “mouvement nationaliste du progrès” e riunioni internazionali delle destre europee », non daté.
114 CdM, Dossier de procédure pénale no 91/97 mod. 21, SISMI, lettre du Raggruppamento Centri CS de Rome à l’Ufficio D, 30 août 1966. note annexe du 4 août 1966.
115 CdM, Dossier de procédure pénale no 91/97 mod. 21, Rapport d’expertise no 5 d’Aldo Giannuli, annexe 258, MI, Uff. AA. RR, note du 23 mai 1967.
116 Villatoux Marie-Catherine, « Hogard et Némo. Deux théoriciens de la “guerre révolutionnaire” », Revue historique des armées, 232/2003, p. 20.
117 CdM, Rapport d’expertise no 8 d’Aldo Giannuli du 26 mars 1998 annexe 13, ADCPP, fasc. « Centro Studi Guerra Psicologica », note du 31 mars 1964.
118 Graziani Clemente, La guerra rivoluzionaria, Quaderni di Ordine Nuovo no 1, Rome, 1963, p. 33.
119 CdM, Dossier de procédure pénale no 91/97 mod. 21, Rapport d’expertise no 3 d’Aldo Giannuli du 12 décembre 1997, annexe 23, Memento pour le général Viggiani, Rome, 23 mai 1964. Dans les notes suivantes seules diffèrent le numéro des annexes et la date.
120 Annexe 25, note de l’Istituto Alberto Pollio du 15 février 1965.
121 Annexe 20, note du 20 novembre 1964. C’est notamment le cas de la société Montecatini, l’une des plus importantes entreprises minières et chimiques italiennes dans les années 1960.
122 Annexe 21, note non datée annexe au memento du 5 décembre 1964.
123 Annexe 28, lettre du Raggruppamento CS de Rome à l’Ufficio D, Rome, 20 septembre 1973.
124 Beltrametti Edgardo, « Sguardo riassuntivo », La guerra rivoluzionaria. Atti del primo convegno organizzato dall’Istituto Pollio, Rome, Giovanni Volpe, 1965, p. 260.
125 Sa présence aux journées de travail est confirmée par une liste transmise par la DCPP à Aldo Giannuli en décembre 1997 dans le cadre de l’instruction sur la strage de Brescia.
126 Entretien avec Philippe de Massey, 4 avril 2012.
127 CdM, Dossier de procédure pénale contre Guido Giannettini et d’autres, Documents envoyés par le SID à la suite d’une demande du 21 6 1974, fasc. « Risposte SID », Déclaration du général Maletti du 18 juin 1964, secret. CdM, Dossier de procédure pénale no 6071/95, Documenti inviati dal SID in esecuzione dell’ordinanza della Corte di Assise di Catanzaro del 26 maggio 1977, lettre du SID « recommandée à remettre en personne » à M. le Général chef du bureau D, 28 août 1974.
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