Rupture du lien de filiation et statut des desafiliados en Aragon (xiiie-xvie siècle)
Enfants abandonnés, orphelins ou bâtards ?
The break of the filiation link and desafiliados’ Status in Aragon (13th-16th century)
p. 405-416
Résumés
Le desafillamiento est intimement lié en droit aragonais à l’absence de patria potestad et à la responsabilité des parents au pénal pour les crimes commis par leurs enfants, dans certaines conditions. Sorte de rupture volontaire du lien de filiation, elle s’associe sans se confondre avec l’exhérédation. Cette pratique frappe essentiellement les fils qui cessent d’être les enfants légitimes et naturels de leurs parents ; cela fait l’objet d’un acte rédigé devant notaire avant proclamation publique des effets coram populo. Les causes sont multiples mais la question demeure la même : quel est le statut de ces enfants une fois desafiliados aux yeux de la communauté ?
In the Aragonese law, the desafillamiento is interlocked to the absence of patria potestad and to the parents’ criminal responsibility for the crimes committed by their children, in certain circumstances. Kind of willful break of the filiations link, it associates, without merging, with disinheritance. In fact, this practice especially affects the sons: they are no longer considered as legitimate and natural children: that is the subject of a document drafted by a notary before the public declaration of the coram populo effects. The causes are multiple but the question remains the same: what is the status of these children once desafilados.
Texte intégral
1En 1407, Menga Pérez de Sant Johan, dont le mari est en déplacement hors des frontières du royaume d’Aragon, fait reconnaître devant notaire qu’elle « rompt » en droit le lien de filiation avec son fils Garcia de Longares. Dans la foulée, l’acte stipule qu’elle l’exclut de la succession universelle de ses biens à elle, à l’exception du minimum obligatoire imposé par la loi du royaume1. Pour énoncer cette action si particulière, elle a recours au verbe desafillar que d’autres remplacent occasionnellement par desahijar. Il s’agit de la pratique du desafillamiento ou « désaffiliation » par laquelle des enfants, a priori légitimes et naturels, voient le lien de filiation juridique rompu avec leurs parents, par la seule volonté de ces derniers. Seule, en l’absence de son mari mais sans doute avec son accord, Menga a procédé à une démarche qui ne laisse pas d’étonner quant au sens de l’acte pratiqué, sa nature et ses effets.
2Les questions sont nombreuses parce que cette opportunité ouverte en droit aragonais est illustrée par des actes de la pratique plutôt rares2. Cela laisse encore toute interprétation largement hésitante. En tous les cas, la rupture du lien de filiation, pour ne pas dire son annulation ou son effacement, reste une expérience encore isolée dans le champ des relations parents-enfants, dans la société médiévale. Il semble qu’on ne puisse la confondre avec une simple émancipation, au vu du caractère négatif des causes invoquées et elle n’est pas juste l’expression d’un mode d’exhérédation puisque les motifs pour déshériter un enfant sont admis en droit aragonais sans passer par la voie du desafillamiento.
3Mais il est évident qu’il s’agit d’une forme d’expulsion de l’enfant hors du clan familial, par la volonté de ses parents. Traduire desafillamiento par « désaffiliation » en français demeure délicat parce que ce dernier terme est utilisé en sociologie avec un sens certes proche en termes d’exclusion et de rupture du lien social mais éloigné du point de vue du contexte, puisque le processus incriminé se situe hors de la cellule familiale. Robert Castel a mis au point cette notion en 1994, en relation avec celles de disqualification et d’exclusion de la société pour les individus mis à l’écart3. Pour des raisons de confort rhétorique, « désaffiliation » et le verbe « désaffilier » seront utilisés ici malgré tout en français, en dépit des nuances de sens à prendre en compte entre leur version espagnole médiévale et leur signification actuelle.
4Les exemples proposés ici ne sont pas inédits parce que onze des treize textes étudiés sont publiés par Manuel Gómez de Valenzuela qui en propose une courte analyse, et les deux autres le sont par María del Carmen García Herrero et María Luz Rodrigo Estevan4. Par ailleurs, un article de synthèse récent existe à ce jour sur la pratique dite du desafillamiento en Aragon au Moyen Âge, publié par Jésus Delgado Echeverría en 20025. L’auteur a réfléchi à cette pratique du desafillamiento à partir des textes juridiques aragonais du XIIe au XVIe siècle, en relation étroite avec celle de l’exhérédation des enfants. Il n’est pas aisé de les distinguer l’une de l’autre dans le domaine des causes admises en droit, ni de cerner clairement comment les deux s’articulent entre elles lorsqu’elles sont exécutées ensemble. Jésus Delgado Echeverría pense que les deux actions ne se confondent pas, ne sont pas synonymes ou équivalentes et je suis plutôt d’accord avec lui à la lecture des quelques textes disponibles à ce jour, répartis entre 1407 et 1540.
5Au risque de nous emmener sur une fausse piste, Juan Vicente García Marsilla effleure également la possibilité de défaire la filiation dans les textes juridiques du XIIIe siècle en Castille (les Partidas) et à Valence (les Furs) ainsi qu’à travers les Coutumes de Tortosa. Toutefois, sa vision des choses donne le sentiment que l’acte de desafiliar ou desahijar ne concernerait que les enfants rendus légitimes par une sorte d’adoption préalable, et restitués à leur état premier sous l’effet de cette révocation. L’adoption ne semble pas être primordiale en Aragon pour ce qui est du statut des enfants concernés dans les textes sélectionnés. Mais l’hypothèse mérite d’être retenue si l’on considère, à l’inverse, que le verbe afiliar s’adresse aux enfants « étrangers » accueillis au sein d’une famille, auprès d’un couple ou d’un parent seul, et qui s’engage à les élever volontairement et par la grâce de Dieu comme s’ils étaient leurs, c’est-à-dire des enfants légitimes et charnels. Pour cette raison, il convient d’être attentif à bien repérer en quels termes sont désignés ceux qui vont subir cette forme radicale de reniement. Un premier constat s’impose à la lecture des quelques documents émanant de la pratique rassemblés ici : les actes de desafillamiento ne touchent que des garçons alors que les textes de droit incluent aussi bien les garçons que les filles.
6Mais les interrogations sont nombreuses et portent autant sur les faits en soi que sur la nature des actes qui enregistrent la rupture de filiation, afin d’en évaluer les marqueurs de légitimité et la portée. Elles concernent évidemment les motifs pour lesquels des parents ne voudraient plus être les parents de leurs enfants et les conséquences que cela engendre. Enfin, la grande question concerne le statut de ces enfants une fois établis dans une absence de filiation en droit. Que fabrique-t-on alors : des bâtards, des illégitimes, des orphelins ? Souffrent-ils d’ignominie sociale et morale ?
Un acte public
7La décision de procéder au desafillamiento d’un ou plusieurs enfants n’est pas réservée aux hommes, ni en droit ni en pratique. La compilation de Huesca (1247) le laisse accroire mais le fuero de Jaca fait, dans les rédactions aragonaises du XIIIe siècle, la place aux pères et aux mères6. Dans la pratique, la démarche émane des pères ou des mères seules, lorsque celles-ci sont veuves ou lorsque l’époux est absent, sinon le couple agit d’un commun accord. Toutes les classes sociales sont représentées d’après Manuel Gómez de Valenzuela à l’exception, ajouterais-je, de la très haute noblesse. Il s’agit d’actes établis inter-vivos et si l’exhérédation est associée au desafillamiento, elle précède le testament. Toute la question d’ailleurs porte sur la nécessité ou non de rédiger un testament dans la foulée pour la rendre effective. On sait que pour une des causes de desafillamiento admises en droit, celle où l’enfant aurait fait perdre tout ou partie des biens à son père ou à sa mère, il hérite ab intestat si le père ou la mère meurt sans testament dans ce cas précis de désaffiliation. Mais la mesure est étendue assez vite, semble-t-il, à tous les motifs envisagés. En conséquence de quoi, l’acte de desafillamiento ne suffit pas à rendre effective la volonté de l’un ou des deux parents de déshériter un ou plusieurs enfants si aucune rédaction de testament ne s’ensuit.
8Mais qui sont les individus désaffiliés ? Il convient de s’attarder sur la manière de désigner et qualifier celui ou ceux vis-à-vis desquels on prétend défaire un lien de filiation. Les documents ne permettent pas de trancher aisément quant à la nature véritable du lien entre les parties, surtout si l’on garde à l’esprit l’idée que certains couples n’en sont peut-être pas à leur premier mariage et que les enfants concernés peuvent être nés de différents lits. Sur la base du maigre échantillon utilisé ici, les textes du XVe siècle ne sont pas très explicites. Hommes et femmes évoquent leurs fils par des formules laconiques : « mon fils », « notre fils » ; ou ce sont les notaires qui rapportent qu’il est « son fils », « leur fils ». Seuls quatre textes, tous situés au XVIe siècle émanant de deux couples et de deux pères, lesquels agissent en leur nom et comme procureurs de leurs épouses, signalent le caractère légitime des rejetons désormais rejetés. Beltran de Tapiola et sa femme Gratiana de Casanova se montrent les plus pointilleux à l’heure d’exposer le caractère légitime des trois garçons qu’ils défont de leur statut de fils. En effet, ils prennent de soin de faire préciser que les trois, établis par ailleurs dans la vie comme tailleurs, sont nés du couple et, comme tels, ils sont initialement leurs enfants légitimes et charnels7. Joan Vicente est moins méticuleux mais le souci de bien marquer la désaffiliation qu’il entend instaurer lui fait rajouter au moment de spécifier la nature de l’acte que son fils, bien que légitime, n’est plus son fils8. Il rappelle ce fait, sans doute soucieux de bien formuler la portée juridique de sa décision. Par ailleurs, en 1531, Pedro del Barat raconte qu’il a élevé son fils comme un fils légitime. Cette formulation pourrait suggérer que cet enfant serait un ancien illégitime, soit le fils d’une concubine soit un enfant adopté. Mais il ne s’agit en aucun cas d’un enfant adultérin qui en ce cas ne peut hériter et ne peut obtenir de biens que par donation entre vifs. Il n’entre pas dans les règles de succession et ce genre d’acte serait inutile à son sujet. Mais le caractère légitime reconnu place l’enfant sous la protection du droit aragonais. Il ne peut donc pas être librement déshérité si tant est que ce soit la seule motivation de Pedro del Barat. Enfin, Guallart Abadia Ferrero et Maria Perandreu prétendent le 13 juillet 1540 se défaire de leur fils légitime (fijo legitimo dellos). Lorsque plusieurs enfants sont concernés, ils peuvent l’être simultanément comme les trois fils de Beltran de Tapiola, ou à différents moments ; c’est le cas des fils de Johan del Val, désaffiliés en 1512 pour l’un et en 1518 pour l’autre.
9Ces actes publics sont passés devant notaires avec deux témoins, précédés ou non d’une comparution devant une cour. Le fait de faire enregistrer l’acte chez un notaire anticipe aussi sur les futurs problèmes de succession. Mais préalablement établie en présence d’un officier de justice, la portée de l’acte se double d’une recherche de publicité. En 1520, María Lopez, veuve, procède au desafillamiento de son fils Ximeno Gil, devant le bayle de Martes siégeant à la cour et auditionnant les plaids9. C’est une véritable comparution. Lorsqu’un officier est requis en la matière, les parents attendent de lui deux choses en réalité : qu’il consente à leur décision et la valide, puis qu’il la rende officielle. María Lopez requiert ainsi du bayle son assentiment, qu’il lui concède, et qu’il le fasse savoir à tous10. Il se charge de rendre public le desafillamiento par pregón ou cri public (cridar). Le bayle ordonne que sa décision soit criée publiquement en les lieux accoutumés du lieudit de Martes. Toute la communauté doit savoir que Ximeno Lopez n’est plus le fils de María11. Le caractère public est extrêmement important. Il valide aux yeux de la communauté l’extraction radicale d’un individu du corps de sa famille. Le corredor chargé d’informer la population rapporte au notaire qui enregistre l’acte final qu’il a bien accompli sa mission. En 1523, Juan Vicente Navarro procède au desafillamiento de son fils en présence du seigneur de Gratal et juge du Val de Tena dont il sollicite l’accord et le décret. Ce dernier, une fois entendu la requête dudit père, la trouvant juste et conforme au droit, y a consenti et l’a rendue officielle. Enfin, en 1531, Pedro del Barat requiert du lieutenant du juge du Val de Tena les mêmes dispositions : consentir à la requête et la rendre publique pour que, dans un deuxième temps, il puisse faire rédiger l’acte notarié qui est la source dont nous disposons en fait à ce jour12.
Pour quels motifs des parents ne veulent-ils plus de leurs enfants ?
En droit
10Il n’est pas inutile de rappeler qu’en droit, des textes juridiques aragonais envisagent et autorisent sous condition la pratique du desafillamiento. Pour cela, la synthèse opérée par Jésus Delgado Echeverría est bien utile, rappelant que les mentions les plus anciennes de cette pratique en droit aragonais remontent au XIIe siècle, d’abord dans le premier tiers du siècle, lorsqu’elle est énoncée au profit de parents que leur enfant aurait blessé d’un coup de pied ou de main13. Le Fuero de Daroca (milieu du XIIe siècle) évoque lui aussi cette possibilité pour les parents dont les enfants sont voleurs, joueurs ou commettent des excès de boisson14. Il semble que la pratique soit établie d’abord comme mesure de rétorsion, sans lien avec le fait de déshériter les enfants incriminés par un comportement inacceptable.
11Le fuero de Jaca, dans les versions aragonaises du XIIIe siècle, distingue plusieurs raisons pour lesquelles un père peut à la fois désaffilier un fils et le déshériter par la suite : lorsque celui-ci le blesse, l’oblige à prêter serment, lui tire les cheveux, le contredit en public en sous-entendant qu’il puisse mentir, ou lui fait perdre ses biens de par les forfaits qu’il commettrait15. On trouve énumérés dans une autre version des motifs supplémentaires : si le fils ne libère pas son père de captivité, s’il ne l’aide pas en cas de difficulté alors qu’il le peut, s’il couche avec la femme de son père16. Enfin, dans une version cette fois navarraise du même fuero, on trouve mentionné un motif important, celui qui indique que le père est autorisé à désaffilier son fils si ce dernier refuse de s’amender et de corriger son comportement, en particulier lorsqu’il s’avère être aux prises avec la justice. Ainsi, le père n’est plus tenu pour responsable des actes délictueux dont sa progéniture pourrait être l’auteur. La rubrique concernée s’intitule « Del padre que no es tenido por el fijo17 ». L’exhérédation y est alors mentionnée tout de suite après, comme une sorte de sanction inéluctable. Les raisons avancées en droit aragonais pour rompre le lien de filiation avec un enfant sont assez précises et récurrentes dans les textes, articulées autour de la possibilité d’exclure un fils ou une fille définitivement ou non de la succession parentale. Mais qu’en est-il dans les faits ? Les motifs invoqués sont-ils les mêmes et comment sont-ils formulés ?
Dans les faits
12Seuls Martín Sanchez et sa femme María de Blascho ainsi que Sancha Lalagun de Oz n’avancent aucun motif au moment où ils désaffilient respectivement leurs enfants en 1453 et 1455. En revanche, lorsque Mengua Pérez de Sant Johan, alors que son mari est au loin, désaffilie et déshérite Garcia de Longares, en 1407, elle justifie sa décision par le caractère désobéissant et le comportement peu honorable de son fils. En plus de la déshonorer et de l’injurier, il a manqué de la blesser physiquement et fait en sorte de la contredire en présence de nombreuses personnes18. On retrouve là les motifs les plus anciennement allégués en droit aragonais pour autoriser et réguler le desafillamiento. En 1517, au moment de passer l’acte devant notaire, les époux Beltran de Tapiola et Graciana de Casanoba expliquent leur geste en invoquant la désobéissance de leurs trois fils et le fait qu’ils refusent de servir leurs parents comme de bons fils devraient le faire. Ils allèguent d’autres motifs qu’ils ne détaillent pas et rappellent que leur démarche s’inscrit dans le respect du droit du royaume (debite et iuxta forum)19. Le 10 janvier 1520, María Lopez argue pour sa part du fait que son fils ne la sert pas et ne l’honore pas comme attendu en vertu des commandements bibliques mais aussi des lois du royaume. Il est rebelle, n’obéit à aucun ordre, n’écoute aucun conseil. Elle le dépeint assez brutalement comme un homme mauvais et scandaleux, affligé d’épithètes souvent réservées aux criminels sinon aux prévenus en justice20. Johan Vicente va plus loin encore, exprimant la peur qu’il ressent envers son fils, craignant pour sa personne et ses biens21.
13La désobéissance est systématiquement reprochée aux fils désaffiliés tout comme le refus de suivre les ordres mais aussi les conseils des parents, conseils (preceptos) pourtant honnêtes et licites comme le fait préciser María Lopez mais dont la teneur reste inconnue. Le fait de ne pas vouloir vivre auprès des parents est un autre motif de discorde avancé par certains pères tels que Juan de Val en 1518, se plaignant notamment de ce que Jeronimo no quesiesse estarse con el22. Il est clairement établi que l’acte de désaffilier ne découle pas d’une entente harmonieuse entre les parties et le fait de décrire leurs fils comme des hommes violents en gestes et en paroles entraîne à penser que ceux-ci sont peut-être des criminels en passe d’être jugés. Auquel cas, leurs parents auraient de bonnes raisons de ne plus vouloir avoir de relation avec des enfants sources de déshonneur et de honte, mais pas seulement par souci de renommée. En effet, à la suite de Jésus Delgado Echeverría, on constate que dans les actes de la pratique, certains parents ne veulent plus être en position d’assumer les actes criminels de leur progéniture. Pour cela, le desafillamiento génère une perte de la condition filiale qui leur permet de se retirer de cette partie du circuit relationnel d’ordre familial. Cela pose d’abord la question de bien saisir ce que signifie le desafillamiento quant au nouveau statut de l’individu qui le subit, avant d’en comprendre les effets pour les deux parties impliquées.
Quels sont les effets du desafillamiento ?
Perte de la condition filiale
14C’est le résultat inverse des actions en possession d’état qui consistent, entre autres, à prouver un lien de filiation entre un enfant et ses géniteurs23. L’acte de desafiliar ou desahijar équivaut à produire une rupture du lien de filiation d’un point de vue juridique et une annulation de l’existence de ce lien d’un point de vue social et moral. D’ailleurs María Lopez désigne son fils non plus comme son fils mais comme le desafillado, immédiatement après que le desafillamiento ait été énoncé dans l’acte notarié. Mais celui qui exprime de la manière la plus complète le sens de cette démarche en apparence cruelle n’est autre que Pedro del Barat en 1531. On sent la volonté chez cet homme de bien éclairer le sens et le résultat du desafillamiento opéré à l’encontre d’un garçon dont il ne veut plus être le père, encore que cette formulation des faits soit insatisfaisante. Il ne s’agit pas de nier qu’il en est le père, biologique ou non d’ailleurs, mais de faire en sorte qu’on ne le reconnaisse plus comme tel et, de fait, que son fils ne soit plus son fils ni considéré comme tel non plus par le reste de la communauté. Il insiste bien sur la portée de l’acte requis, désireux qu’on comprenne bien le sens de la désaffiliation : il lui dénie la qualité de fils, ne veut plus que ce dernier l’appelle « père », et s’interdit de l’appeler « fils » ; il insiste sur le fait que son fils ne doit plus s’appeler « son fils » et que personne d’autre ne doit l’appeler « son fils ». « Père » et « fils » ne doivent plus être les dénominateurs d’aucune relation entre eux deux en droit et en fuero, ni pour eux ni pour les autres24. Ce besoin exacerbé de décrire les effets de sa décision est peut-être une indication sur le fait que le fils en question pourrait être issu d’un premier mariage, ou adopté mais reconnu par tous comme son fils légitime. Cela justifierait la façon de formuler les faits par laquelle il précise qu’il a élevé (criado) son fils que les autres disaient (dezian) être son fils légitime. Auquel cas, le fait d’avoir intégré au clan familial un élément extérieur pourrait expliquer la force employée pour bien spécifier en quoi consiste ici le desafillamiento, et renverrait le garçon à son état premier d’enfant illégitime ou d’orphelin. Il est aussi délicat de valider cette interprétation des faits que de l’écarter entièrement.
15Néanmoins, cet exposé détaillé de l’effet immédiat du desafillamiento a le mérite de nous renvoyer au principe de la nominatio, en liaison avec la trilogie du nomen, tractatus, fama. On la trouve au fondement de la reconnaissance d’un état (mariage et filiation) et du statut d’un individu25. Comme le rappelle Anne Lefebvre-Teillard, c’est au Moyen Âge que les canonistes élaborent la théorie de la possession d’état dont l’un des buts est d’empêcher les parents de déshériter trop facilement leurs enfants. En matière de filiation, elle repose sur le nomen, c’est-à-dire le fait de nommer un individu « fils » ou « fille ». À cela s’ajoute le tractatus qui renvoie à l’idée de traiter quelqu’un comme un fils ou une fille et la fama qui asseoit la reconnaissance par les autres de cette condition filiale. Ce sont bien ces trois éléments que Pedro del Barat s’attache à faire disparaître en pratiquant le desafillamiento à l’encontre de Juan son (ex) fils.
16D’une certaine façon, connaître les implications de la théorie de la possession d’état en matière de filiation aide à comprendre pourquoi certains parents sont encore plus radicaux dans leur vision des faits et qualifient l’exclu d’étranger voire de mort. Dans la demande qu’elle adresse au bayle de consentir au desafillamiento de son fils, María Lopez fait bien préciser en 1520 par le notaire qu’à l’issue de cette rupture du lien de filiation, elle ne le reconnaît plus comme son fils mais bien plutôt comme un homme étranger26. L’expulsion de la communauté familiale est forte et complète. Comme l’étranger, le désaffilié perd beaucoup, en particulier la protection de sa famille. Joan Vicente et sa femme tiennent eux aussi leur fils (bien que légitime) pour une personne étrangère27. Enfin, un dernier exemple concerne un dénommé Petret Ezquerra dont le frère a commis un vol de bétail. On est en 1436 dans la région de Sallent. La victime tente d’obtenir réparation auprès de Petret à défaut de pouvoir faire juger son frère, le véritable auteur du crime. Mais Petret refuse sous prétexte que ses parents avaient déjà désaffilié son frère et de façon assez redoutable d’ailleurs. En effet, il dit qu’ils le « jetèrent hors de leur pouvoir », comme une forme d’émancipation violente, mais qu’ils l’ont également maudit28. Il refuse alors d’assumer la responsabilité des crimes de ce frère que29, pour sa part, il considère comme mort : « Que el hombre muerto no puede ni deve dar lies. » Il est important de noter que cet exemple prouve combien le désaffilié se retrouve juridiquement et socialement sans famille, exclu et comme mort pour le reste de la famille, pas seulement pour les parents. Le frère n’entend pas prendre le relais de la responsabilité pénale qui incombe aux parents lorsque leurs enfants commettent les crimes d’homicide, de vol et de rapine. Le desafillamiento autorise à rompre un lien de filiation mais entraîne apparemment aussi la rupture du lien fraternel et plus encore sans doute, probablement parce que l’exhérédation est un des effets immédiats et principaux de cette action.
L’exhérédation
17Les effets portent sur l’exclusion de l’ensemble de l’héritage. En théorie, le desafillamiento ne contient pas l’exhérédation mais il ouvre la porte vers l’exclusion successorale dans les limites imposées par le droit, c’est-à-dire en garantissant le minimum évoqué à travers le terme de legitima. En droit aragonais, il suffit de laisser un minimum s’élevant à 5 sous et 10 sous de la valeur des biens meubles et immeubles. C’est ce que font tous les parents impliqués dans les actes retenus, ajoutant souvent une pièce de terre supplémentaire. Mais est-il nécessaire de procéder au desafillamiento pour déshériter un enfant ? La lecture du manuscrit de Miravete de la Sierra qui donne une version de la compilation des Fueros d’Aragon (1247) laisse à penser que oui de manière absolue ou suggère une confusion entre les deux. Il y est écrit que celui qui veut déshériter son fils, doit le désaffilier en cour plénière devant le juge et les bons hommes30. Les motifs invoqués pour cela sont les mêmes que ceux déjà connus par ailleurs pour la désaffiliation.
18Mais il existe aussi des lois qui autorisent à déshériter un enfant en avançant ces mêmes motifs, mais dont l’application est envisagée sans procéder au desafillamiento. C’est ce que démontre Jésus Delgado Echeverría à partir de la confrontation des textes juridiques aragonais entre le XIIIe et le XVIe siècle. Il en conclut même que certains, sous couvert de réglementer l’exhérédation afin d’en limiter les pratiques abusives, traitent fondamentalement de la désaffiliation. On peut faire le même constat pour les versions navarraises du fuero de Jaca qui réitèrent les causes de désaffiliation dans une rubrique pourtant intitulée « De desheredat filitz o fila » et se cantonnant à la question de la succession31. Cela signifierait bien que les deux démarches existent de manière autonome et ne se confondent pas dans l’absolu, à savoir que le desafillamiento n’est pas une exhérédation en soi ou n’y suffit pas pleinement ; sans compter que si les parents ne rédigent pas un testament ensuite pour mettre par écrit cette exhérédation, celle-ci est annulée.
19Pour autant, les actes de désaffiliation consultés sont tous suivis d’une exclusion des enfants de tout partage équitable des biens transmissibles ; à croire que cela puisse aussi être un motif en sorte que les héritiers pénalisés par la mise à l’écart du circuit ordinaire de la succession paternelle et maternelle ressortent affaiblis plus encore que sous le coup d’une simple exhérédation. La rupture du lien de filiation rendrait plus compliquée toute tentative d’opposition par la suite à l’exécution testamentaire. Mais l’association systématique des deux dans les actes étudiés ici cache-t-elle une réalité plus difficile à saisir ? De quelle légitimité parle-t-on à propos des fils concernés ici : charnels, adoptés ? La démarche est-elle si incontestable qu’elle le paraît ? Après tout, en 1455, Sancha Lalaguna de Oz prévoit dans la foulée la nomination de deux procureurs pour défendre sa décision en matière de succession pour le cas où il y aurait une contestation ultérieure. Elle a fait nommer son autre fils, sans doute le destinataire de l’ensemble des biens, et son frère à elle. La rupture du lien de filiation ne lui semble pas suffisante pour garantir la pérennité de sa décision à l’encontre du fils désaffilié.
20Un enfant exclu de la succession, s’il n’est pas déjà pourvu d’un métier, aura sans doute des difficultés à s’établir en matière de mariage. Il est fort probable aussi que certaines familles aient fait le choix de privilégier un de leurs enfants en vue d’une union intéressante ou aient puni des rejetons par trop réticents à épouser les candidates qu’on leur proposait. C’est un aspect que défend notamment María del Carmen García Herrero puisque ce type de sanction afflige, via la privation de la dot, les jeunes filles qui refusent un mari présenté par les parents ou épousent trop librement un homme non choisi par leur famille32. La désaffiliation a pu, à l’inverse, représenter un moyen de pression contre les jeunes hommes récalcitrants eux aussi aux mariages souhaités par leurs parents de façon injonctive.
Les parents ne sont plus responsables des crimes de leurs enfants
21Jésus Delgado Echeverría fait le tour des fueros et observancias qui régulent cet aspect des relations familiales, à travers les occurrences du Ne pater vel mater pro filio teneatur. Il cite les glossateurs tels que Pérez de Patos qui explique que les parents peuvent échapper à cette obligation en diverses circonstances et, notamment, en expulsant les enfants de leur potestad ce qui pourrait désigner le desafillamiento33. Cette possibilité est régulièrement invoquée et revendiquée dans les textes, évacuant cette obligation prévue sur le plan pénal principalement pour les crimes d’homicide et de vol. Les femmes sont tout autant concernées. Une veuve est pénalement responsable de son fils même marié tant que celui-ci n’a pas procédé à la solennisation du mariage34. On peut soupçonner des cas où ceux-ci résistent à cette ultime étape qui est assimilée en Aragon, au XVe siècle, au principe même de l’indissolubilité matrimoniale35. La solution pour la mère est alors d’annuler toute parentalité. Certains parents sont très clairs : ce qu’ils attendent en dernier lieu du desafillamiento est bien de ne pas devoir assumer les crimes commis par leurs enfants comme les y contraint le droit du royaume36. C’est le cas de María Lopez qui réclame que désormais aucun sinistre lié à son ex-fil ne lui soit imputé37. Il en va de même pour Joan Vicente et sa femme en 1522 : que désormais les délits commis par le fils répudié soient imputables à ce dernier et non à ses parents ou sur leurs biens38. Quant à Pedro del Barat, toujours très précis et prévoyant, il anticipe encore une fois pour faire valoir à terme les effets de sa démarche ; aucune cause ne pourra lui être assignée à l’avenir en lieu et place de ce fils qui n’est plus son fils.
22Mais ce qui frappe l’attention concerne le caractère incorrigible de certains cas. Dans ses Observancias, décisions prises alors qu’il était Justicia du royaume d’Aragon (1294-1330), et qui font jurisprudence, Ximeno Pérez de Salanova avait déjà précisé que face à un fils incorrigible, tout père peut devant un juge et en public eximir ce fils de la patria potestad et refuser d’habiter avec lui, de le recevoir, etc.39. Une fois le fils expulsé du consortio, le père n’est plus tenu de répondre de ses actes. Aucune référence n’est faite à la mère en ce texte du début du XIVe siècle mais le processus d’exclusion est bien là. La nature mauvaise et impossible à changer des fils est présente en filigrane dans les textes des XVe et XVIe siècles. Certains des parents qui procèdent à la désaffiliation de leurs enfants les décrivent par exemple comme de prava et perversa condición y de malos actos y palabras40. Leur caractère incorrigible est par ailleurs sous-entendu par le fait qu’ils refusent de se laisser guider par les conseils de leurs parents, réduisant ces derniers à faire le choix extrême de l’expulsion du clan familial.
Le desafillamiento est-il un acte infamant ?
23Jésus Delgado Echeverría rappelle que dans l’ordonnancement juridique aragonais cette pratique s’inscrit à la croisée des enjeux de la patria potestad, de la responsabilité pénale des parents pour les actes de leurs enfants et de l’exhérédation. Au XIIIe siècle, en droit, la révocabilité du desafillamiento est envisagée. Le pardon ou recouvrement de l’amour paternel et maternel restent possibles et engendrent un rétablissement du ou des enfants dans la condition d’héritiers universels. La compilation des Fueros d’Aragon à partir du manuscrit 458 de la bibliothèque nationale de Madrid en témoigne par exemple. En effet, le texte stipule que si le père ou la mère veulent pardonner à leur fils, ils peuvent le faire et il redevient éligible au droit de succession comme si de rien n’était41. La première compilation des fueros d’Aragon que rédige Vidal de Canellas entre 1247 et 1252, et connue sous le nom de Vidal Mayor, exprime les choses avec clarté. Si le fils désaffilié retourne à l’état filial, il doit être publiquement appelé « fils » et doit hériter des biens du père, sous-entendu sans restriction particulière désormais42. L’expression « clamado fillo » laisse en suspens la question du procédé et si la publicité de la restauration du lien de filiation donne lieu à une nouvelle affiliatio inspirée des procédés de l’adoption. Il est toujours stipulé par ailleurs que si le père meurt sans rédiger ses dernières volontés, le fils disgracié cesse de l’être et hérite normalement, ce qui renforce le sentiment que les deux procédures peuvent s’articuler de façon automatique mais que l’efficacité de l’exhérédation réside néanmoins dans la rédaction d’un testament. Mais que reste-t-il de l’état de disgrâce publiquement signifié même en cas de restauration dans la qualité d’héritier ? Cela demeure une des nombreuses questions sans réponse à ce jour.
24La question de l’infamie n’est pas illégitime pour saisir l’impact du reclassement social de ces enfants rejetés du clan par des actes publics non dépourvus d’aménité. Il est à ce jour presque impossible de répondre à cette interrogation et de mesurer la façon dont les désaffiliés pourraient encourir une forme de macule sociale, au même titre que les bâtards et autres enfants illégitimes ouvertement déclarés comme tels. Pourtant, Manuel Gómez de Valenzuela a pu apporter quelques éléments de réponse à propos de la famille de Juan de Val. Après avoir désaffilié ses deux fils en 1512 et en 1518, l’auteur a trouvé trace en 1542 et en 1550 des deux frères établis comme charpentiers eux aussi43. Ils n’ont pas quitté leur village d’origine et semblent acceptés comme tels. Maintenant les indices sont un peu faibles pour préjuger de l’absence complète de tout caractère infamant lié à leur desafillamiento respectif. C’est un champ de recherche complètement ouvert si tant est que les archives livrent de nouveaux documents similaires.
Notes de bas de page
1 Archivo Histórico de Protocolos de Zaragoza (AHPZ), Protocolo de Juan de Peramón, 1407, fo 35r-35v : « Como Yo, Menga Perez de San Johan, muller de Johan de Longares, […] mi marido seyendo absent del regno de Aragon, attendient et considerant que Garcia de Longares, fillo moi, sia a mi desobedient […] desafillolo e deseredeolo » (García Herrero M. del C., Las mujeres en Zaragoza en el siglo xv, Saragosse, Ayuntamiento de Zaragoza, 1990, vol. 2, p. 119-120).
2 Suzana Lozano Gracia confirme qu’elles ne sont pas abondantes et en référence moins d’une dizaine à l’occasion de ses propres investigations dans les registres notariaux pour étudier les élites sociales à Saragosse au milieu du XVe siècle ; Lozano Gracia S., Las elites en la ciudad de Zaragoza a mediados del siglo xv : la aplicación del métodoprosoprográfico en el estudio de la sociedad, A. Sesma Muñoz (dir.), soutenue à l’université de Saragosse, 2007, n. 528, p. 240.
3 Castel R., « La dynamique des processus de marginalisation : de la vulnérabilité à la désaffiliation », Cahiers de recherche sociologique, 22, 1994, p. 11-27. Plus récemment, le concept de désaffiliation est encore au cœur d’un ouvrage sur les jeunesses en voie de déliaison, en regard des politiques publiques : Noël O., Jeunesse en voie de désaffiliation : une sociologie politique de et dans l’action publique, Paris, L’Harmattan, 2004. Pour une approche en contrepoint, je renvoie au travail de réflexion de Serge Paugam à partir du concept de disqualification sociale qu’il préfère à celui de désaffiliation pour penser la question de la rupture du lien social, en relation avec la pauvreté ; Paugam S., La disqualification sociale. Essai sur la nouvelle pauvreté, Paris, PUF, coll. « Quadrige – Essais débats », 2009. Les deux auteurs abordent la mise à l’écart d’individus ou de groupes des circuits ordinaires des échanges sociaux en des termes qui aident à penser cette autre rupture que représente, à une autre échelle, la pratique aragonaise du desafillamiento au Moyen Âge.
4 Gómez de Valenzuela M., « Desafillamentos. Valle de Tena (Aragón). 1436-1540 », Revista de derecho civil aragonés, 7-8, 2001/2002, p. 11-21. Un texte de 1407 est édité par García Herrero M. del C., Las mujeres en Zaragoza en el siglo XV, vol. 2, Saragosse, Ayuntamiento de Zaragoza, 1990, p. 119-120 ; celui de 1522 est paru dans Rodrigo Estevan M. L., La ciudad de Daroca a fines de la Edad Media. Selección documental (1328-1526), Daroca, Centro de Estudios Darocences, 1999, p. 217.
5 Delgado Echeverría J., « El desafillamiento en el derecho aragones », Revista de derecho civil aragones, 7-8, 2001/2002, p. 23-46.
6 Molho M., El fuero de Jaca. Edición crítica, Saragosse, Escuela de Estudios Medievales-Instituto de Estudios Pirenaicos, 1964, (Fuentes para la historia del Pirineo, 1).
7 1517, Beltran de Tapiola, « Haber tubido y procreado, tener y procrear de presente en fijos nuestros legitimos y naturales » (Gómez de Valenzuela M., « Desafillamientos 1517-1536 », Cuadernos Lacruz Berdejo, no 1, 2004, en ligne, http://www.derecho-aragones.net/cuadernos/document.php?id=207).
8 1522, Joan Vicente, « No lo tenia por hijo ahunque legitimo » (Rodrigo Estevan M. L., La ciudad de Daroca a fines de la Edad Media, op. cit., p. 217).
9 1520, María Lopez, « (al margen : Desafillamiento.) Eadem die en presencia del honrado Pedro Miranda vaylle del lugar de Martes estando asentado en cort etc. y asuntos judiciairios oyendo etc. […] comparecio et fue personalmente constituyda la honorable Maria Lopez […] la qual dixo tales o semblantes palavras etc. endreçandose enta el dicho vaylle » (Gómez de Valenzuela M, « Desafillamientos 1517-1536 », art. cit.).
10 Ibid., « et requirio al dito vayle dase su asenso y lo dio etc. et lo mando cridar ».
11 Ibid., « Et incontinent el vayle mando a Johan Ezquerra corredor lo cridasse voce preconie por los lugares acostumbrados del lugar de Martes como Maria Lopez havia desafillado a su fijo Ximeno Lopez et Johan Ezquerra corredor fizo fe e relacion al dicho vayle et a mi notario como ello havia cridado etc. ».
12 1531, Pedro del Barat, « y requirio al dicho senor lugarteniente que sobre aquello y las cosas sobredichas difiniesse, dicerniesse, declarasse y publicasse y en el dicho lugar pregonizar fiziesse aquel » (Gómez de Valenzuela M., « Desafillamentos, Valle de Tena (Aragón), 1436-1540 », art. cit., doc. 10, p. 20).
13 « De filio qui ferit patrem vel matrem cum manu vel cum pede, debet perdere manum vel pedem vel membrum cum quo ferit ; et postea debet eum desafillare » (cité dans Ramos Loscertales J. M., « Textos para el estudio del Derecho aragonés en la Edad Media. Compilación privada de derecho aragonés », Anuario de Historia del Derecho Español, 1, 1924, p. 491-523, ici p. 403).
14 « 91 – Si quis autem habuerit filium prodigum vel lusorem vel hebriosum aut latronem vel huiusmodi desaffillet illum, si voluerit, in concilio, et si non receperit illum postea, non respondeat pro illo » (Agudo Romeo M. del M., El fuero de Daroca. Introducción, edición crítica, traducción, estudio léxico y concordancia, Daroca, Centro de Estudios Darocense, 1992, p. 51).
15 Molho M., El fuero de Jaca, op. cit., p. 118 (rédaction A), « De desafillar los filtz. De payre por qual razon pot desafillar so fill. Per razon por desafillar lo payre lo filz, per no senes certas causas, ço es assaber : so lo fill fer al payre, o si. l fara jurar, o si. l tira per los cabels, o si. l desment devant bons omnes, o si. l fa tal forfeyt per que. l payre/perda son aver. »
16 Ibid., p. 184.
17 Ibid., rédaction D, p. 331-333.
18 1520, Mengua Perez de Sant Johan, « Attendient et considerant que Garcia de Longares, fillo moi, sia a mi desobedient e me aya muytas vegadas desonrrado, injuriado, e tratado de ferir e smentido en presencia de muytas personas, e por las sobreditas razones desafillolo e deseredeolo » (García Herrero M. del C., Las mujeres, op. cit., p. 119-120).
19 1517, Beltran de Tapiola, « Attendientes mas los dichos nuestros hijos y cada uno dellos desobedientes a nuestros preceptos y mandamientos y no servirnos segunt buenos fijos deben serbir a sus padres y por otros justos respectos nuestros animos […] desafillamos y queremos ser desafillados los dichos nuestros hijos largamente debite et iuxta forum » (Gómez de Valenzuela M., « Desafillamientos 1517-1536 », art. cit.).
20 1520, María Lopez, « Que como ella tenga un fixo llamado Ximeno Gil habitante en el lugar de Martes el qual no l’esguarda ni le serva aquella honor y reverencia que segunt nuestro senyor Ihesuchristo de fuero y observantia del regno de Aragon y como sea revel a sus mandamientos et juntamente tambien es desobediente, revel a sus mandamientos licitos y honestos y el hombre vicioso, injurioso, escandaloso, vistraedor de males en tal manera que de continuo no faze otro y por tanto dixo que lo desafillava et que de fecho lo desafillo » (ibid.).
21 1522, Joan Vicente, « Dixo que se quexava de hun fixo suyo llamado Joan Vicente, el qual no quiere obedecer sus mandamientos ni star a su obediencia y a la de su madre etc., antes era hombre escandaloso etc. Y porque teme de algun periglo y damno de su persona y de sus bienes, dixo que en aquellas mejores forma y manera que de fuero pudia etc., que desahijava y desheredeva como realment y de hecho desahijo y deseredo al dicho Joan Vicente, hijo suyo, por sus demeritos » (Rodrigo Estevan M. L., La ciudad de Daroca, op. cit., p. 217).
22 Gómez de Valenzuela M., « Desafillamentos, Valle de Tena (Aragón), 1436-1540 », art. cit., doc. 9, p. 19.
23 Demoulin-Auzary F., Les actions d’état en droit romano-canonique : mariage et filiation (XIIe-XVe siècles), t. 387, LGDJ, coll. « Bibliothèque de droit privé », Paris, 2004.
24 1531, Pedro del Barat, « Pedro del Barat […] expresament delant el dicho señor lugarteniente de justicia dixo que lo desafillaba [Juan Barat] e que por fijo suyo le denegaba ni queria que de aquella ora adelant no queria quel lo llamase padre ni el lo queria por fijo ni que su fijo se llamasse ni por tal fijo suyo persona ninguna lo tubiesse, antes dixo bien al dicho señor lugarteniente de justicia que lo fiziera ber a los qui allistaban presentes y a todos los absentes que aquel Juan Barat no era su fijo ni londe queria ni se llamase su fijo ni lo llamase padre ni de ley ni de fuero, uso vel consuetut ni por qulaquiera hotra razon alguna » (Gómez de Valenzuela M., « Desafillamentos, Valle de Tena (Aragón), 1436-1540 », art. cit., doc. 10, p. 20).
25 Lefèbvre-Teillard A., « Nomen, tractatus, fama. Variation sur un même thème », M. Humbert et Y. Thomas (dir.), Mélanges de droit romain et d’histoire ancienne, à la mémoire d’André Magdelain, Paris, éd. Panthéon-Assas, 1998, p. 287-297.
26 María Lopez, 1520, « et que de fecho lo desafillo et que desta ora enta delante no lo queria aber por fixo antes bien dixo la dicha Maria Lopez vidua tenia al dicho Ximeno Gil por hombre estrangero etc. » (Gómez de Valenzuela M., « Desafillamientos 1517-1536 », art. cit.).
27 Pedro del Barat, 1531, « no lo tenia por hijo ahunque legitimo, sino por persona estrania y por el desherado y deshijado » (Gómez de Valenzuela M., « Desafillamentos, Valle de Tena (Aragón), 1436-1540 », art. cit., doc. 10, p. 20).
28 Petret de Ezquerra, 1436, « antes su padre y madre le desafillaron e lo hitaron de su poder le dieron la maldecion » (ibid., doc 1, p. 15-16).
29 Ibid., « et que por su hermano no yes tenido de fer desdit nenguno ni de responder, ni tiene res por el dito sur hermano ».
30 « E todavia, quando alguno quiere desheredar a su fillo por las razones avant ditas, sienpre lo deve desafillar en cort plenara delant la iusticia e de buenos omnes » (Gargallo Moya A., Les fueros de Aragón [ segun el ms del Archivo Municipal de Miravete de la Sierra Teruel], Saragosse, 1992, p. 133).
31 Molho M., El fuero de Jaca, op. cit., (rédaction C et D), p. 332 et p. 529.
32 García Herrero M. del C., Las mujeres, op. cit., vol. 1, p. 166.
33 Pérez Martin A. (dir.), Las glosas de Perez de Patos a los fueros de Aragon. Estudio introductorio y edición del manuscrito 13108 de la Biblioteca Nacional de Madrid, Saragosse, IFC-IDCE de l’université de Murcie, 1993, p. 152-154.
34 Ibid., op. cit., p. 157.
35 Charageat M., La délinquance matrimoniale. Couples en conflit et justice en Aragon, Paris, Publications de la Sorbonne, 2011, en particulier p. 44-53, sur le rôle inattendu de la messe nuptiale dans le rite matrimonial aragonais.
36 Delgado Echeverría J., « El desafillamiento en el derecho aragones », art. cit., p. 23-46.
37 María Lopez, 1520, « que si daqui adelant el fazia algun sinistro o caso etc, que daqui adelant no sea imputado a ella ni a sus bienes et ante bien al dicho desafillado etc. » (Gómez de Valenzuela M., « Desafillamientos 1517-1536 », art. cit.).
38 Joan Vicente, 1522, « Y protesto que si de aqui adelante contecia el dicho Joan Vicente hazer caso alguno etc., que aquel se imputasse a el y no a los dichos su padre y madre ni a sus bienes etc. » (Rodrigo Estevan M. L., La ciudad de Daroca, op. cit., p. 217).
39 Las observancias de Jimeno Pérez de Salanova, Justicia de Aragón, éd. Antonio Pérez Martín, Saragosse, El Justicia de Aragón, 2000, p. 127-129.
40 Pedro del Barat, 1531.
41 Tilander G., Los fueros de Aragón segun el manuscrito 458 de la biblioteca nacional de Madrid, Lund, 1937, p. 132, cité dans Delgado Echeverría J., op. cit., p. 33 ; « Enpero si el padre o la madre quisieren perdonar ad aquest fillo, bien lo pueden fer et heredarlo, assí como si non oviesse fallido contre ellos. »
42 Tilander G., Vidal Mayor. Traducción aragonesa de la obra In excelsis Dei Thesauris de Vidal de Canellas, II, Lund, 1956, p. 422, cité dans Delgado Echeverría J., op. cit., p. 34. « Quar, si enpués tal desytamiento del padr e fuere tornado al estado filial, deve ser clamado fillo et deve heredar en los bienes d’aqueill padre. »
43 Gómez de Valenzuela M., « Desafillamentos, Valle de Tena (Aragón), 1436-1540 », art. cit., p. 13.
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