Bâtardes alliances
Mariages et fratries chez les Bourbons à la fin du xve siècle
Bastard Alliances
p. 245-256
Résumés
L’analyse proposée repose sur les mariages envisagés et/ou effectifs des enfants naturels et légitimes des ducs Charles Ier et Jean II de Bourbon, dans le contexte particulier d’une famille apanagiste du royaume de France au XVe siècle. Un corpus de sources lié aux alliances matrimoniales, composé principalement de contrats de mariage, permet de montrer comment les alliances sont pensées et motivées en fonction de la légitimité ou non de la personne ; de mettre en évidence les différences de niveau social et les répartitions des rôles entre les membres mariés de la fratrie en fonction de leur naissance et de leur sexe. Ces éléments mettent en lumière les aspirations sociales ou politiques du groupe familial à travers les alliances conclues.
The following article will examine the considered and/or effective weddings of the natural and legitimate children of dukes Charles I and Jean II de Bourbon, in the particular context of an appanagist family of the French kingdom during the 15th century. By analyzing a large body of documents, including mostly marriage contracts, we will demonstrate that weddings are thought up and motivated depending on the person’s status, whether it be legitimate or natural. The corpus reveals that married siblings have different social levels and allocation of roles, according to their birthright and gender. These elements highlight the social or politic aspirations of the family group through its alliance policy.
Texte intégral
1Des généalogies de l’époque moderne aux études les plus récentes, les enfants naturels ont généralement été analysés selon un modèle de symétrie/exclusion. Dans les reconstitutions généalogiques réalisées par les érudits et les historiens depuis le XVIIe siècle les enfants naturels sont détaillés après les enfants légitimes, voire visuellement dissociés par l’utilisation de l’italique1. Le bâtard se distingue de ses frères et sœurs légitimes par une naissance hors des normes matrimoniales2. L’irrégularité juridique de la naissance des enfants naturels et ses implications morales semblent avoir influencé une manière de penser le bâtard comme un être naturellement distinct de la (ou des) fratrie(s) à laquelle (ou auxquelles) il appartient par le biais d’un ascendant commun. Or, l’étude plus attentive d’un groupe de parenté – en l’occurrence la famille ducale de Bourbon – montre que l’opposition entre enfants légitimes et illégitimes est loin d’être aussi patente. Princes du sang issus de Louis IX, les ducs de Bourbonnais (1327-1527) sont à la tête d’une importante principauté apanagée implantée d’abord autour de la terre d’origine des sires de Bourbon, avant de s’étendre progressivement aux terres d’Auvergne, de Forez, de Beaujolais jusque dans les Dombes3. C’est donc un ensemble territorial vaste soutenant la puissance de la famille ducale liée à la politique du royaume de France à la fin du Moyen Âge.
2Au sein de ce lignage, nous avons fait le choix de concentrer l’étude sur deux fratries successives. La première concerne les enfants de Charles Ier de Bourbon (1401-1456) et la seconde, ceux de son fils et héritier Jean II (1426-1488). Or, si Charles Ier de Bourbon est à la fois géniteur d’enfants légitimes et de bâtards, ce n’est pas le cas de Jean II qui meurt sans héritier. L’étude de ces deux fratries permet de mettre en évidence les ajustements politiques liés à leur composition respective. Pour ce faire, les contrats de mariage forment le corpus principal de l’étude4. Ils sont complétés par d’autres sources fournissant des informations sur les alliances matrimoniales comme les projets de contrat, les négociations prénuptiales, les quittances dotales, etc.
3À travers ces sources, nous essaierons de comprendre les différences de niveau social et les répartitions des rôles entre les membres mariés de la fratrie : légitime, illégitime, aîné, cadet, fille ou garçon5. Nous tenterons également d’appréhender les aspirations sociales ou politiques du groupe familial à travers les unions conclues ou encore de montrer comment les alliances sont pensées et motivées en fonction de la légitimité ou non de l’individu. Il importe donc de réfléchir, non pas en termes de distinction juridique, mais en termes de « parenté pratique », de bâtardise vécue6. Celle-ci ne peut pas se concevoir seule, mais en lien avec d’autres facteurs tels que le genre, la position dans la fratrie, la composition de cette dernière ou les relations adelphiques. C’est la prise en compte simultanée d’un ensemble de paramètres qui permettent de définir les rôles de chacun ou les rôles attribués à chacun7.
4Il s’agit alors de mettre en évidence l’influence de la légitimité ou de l’illégitimité sur la forme même des contrats de mariage puis de souligner l’importance du mariage comme révélateur des différences sociales entre les enfants naturels et les enfants légitimes pour enfin montrer la réelle complémentarité des alliances contractées par tous les membres mariés d’une fratrie.
Contrats de mariage et illégitimité
Une majorité d’enfants mariés
5Le duc Charles Ier de Bourbon est le père de onze enfants légitimes connus, nés de son mariage avec Agnès de Bourgogne, et de huit enfants naturels issus d’au moins deux mères différentes. Son fils aîné et successeur, Jean II de Bourbon, meurt en 1488 sans héritier légitime mais laisse six enfants naturels. Si l’on considère les fratries séparément, celle du duc Charles se compose donc de dix-neuf personnes dont onze légitimes et celle de Jean II comprend six enfants naturels8.
6Ces premières observations permettent la mise en évidence de quelques éléments. Environ la moitié des membres considérés contracte un ou plusieurs mariages, à savoir quatorze personnes, sur vingt-cinq prises en compte. Il n’existe pas de surreprésentation des clercs et religieuses parmi les enfants naturels. Cette configuration s’inscrit dans une politique plus générale de la famille ducale de Bourbon qui destine principalement les filles, naturelles ou légitimes, au marché matrimonial9. Toutefois, le fait que les filles légitimes de Charles Ier aient toutes contracté une union a pu influencer l’orientation de deux de leurs demi-sœurs dans la voie ecclésiastique. Il est aussi envisageable que l’absence d’enfant légitime de Jean II ait favorisé le mariage de ses deux bâtardes. Les dates de naissance des enfants naturels étant inconnues, il est difficile d’établir un parallèle entre leur place dans la fratrie et leur état social à l’âge adulte. De plus, donner un cadre aux fratries en établissant des chiffres est nécessaire à l’étude mais cela ne doit pas occulter les lacunes liées aux sources elles-mêmes. En effet, celles-ci ne permettent pas de prendre en compte les enfants naturels mort-nés, morts jeunes ou non reconnus par leur géniteur qui ont pu exister mais qui n’ont laissé aucune trace ; pas plus que les possibles bâtards des duchesses qui auraient pu naître de relations ante ou extraconjugales. Nous sommes donc uniquement en présence des enfants naturels et légitimes survivants ayant laissé une trace documentaire.
7En prenant en considération les mariages effectivement consommés, les projets matrimoniaux qui n’ont pas abouti mais qui ont fait l’objet d’un contrat et les cas de remariages, le corpus documentaire retenu livre dix actes de mariage (originaux, copies contemporaines ou postérieures, vidimi) dont trois concernent des bâtards. Dans le cas des enfants illégitimes, des documents complémentaires s’avèrent souvent nécessaires pour prendre connaissance d’éventuelles alliances10.
Les alliances des bâtards moins justifiées
8Les contrats de mariage sont des actes publics de chancellerie répondant à des critères de formulations précis, dans le cadre d’une relative normalisation du processus d’écriture. Les expressions offrent aux actes un caractère stéréotypé même si elles laissent une marge relativement importante aux nuances spécifiques que les auteurs souhaitent introduire dans le document11. Leur étude attentive montre que la bâtardise entraîne de légères différences de formulation par rapport aux contrats passés par un enfant légitime. Les contrats matrimoniaux des enfants légitimes présentent ainsi un exposé plus long en raison d’une nette insistance sur les motivations du mariage.
9La première raison invoquée est le rappel et/ou l’entretien du lien d’affinité déjà existant entre les deux familles12. Pour appuyer l’argumentaire, trois justifications reviennent régulièrement : la référence à un temps reculé justifiant les présentes relations entre les deux maisons et a fortiori le mariage envisagé ; la consanguinité rappelant les anciennes alliances matrimoniales passées qui ont lié les deux familles, et enfin, l’affinité, sentiment positif ayant pour but d’éviter les conflits, qui est fréquemment renforcée par des formules d’affection. Le mariage apparaît donc comme un gage de stabilité dans les relations d’alliances entre les familles. Le but est de perpétuer et de consolider une situation préexistante.
10Le deuxième thème mobilisé est le rappel des services rendus par l’une des deux parties contractantes à l’autre. On retrouve alors, soit des formulations générales de type : « les grans, haulx, notables et louables services et obeissance que ses dits predecesseurs et luy ont de tous temps faiz », soit des références très précises à des événements13. Dans les deux cas, l’alliance apparaît comme une récompense pour services rendus. De fait, l’exposition de l’ancienneté des liens renforce le bien-fondé de l’union.
11Enfin, la troisième motivation est l’honneur, surtout mise en avant dans les alliances avec la maison de France. Cette notion est utilisée dans le sens de l’honneur fait à la maison ducale d’un mariage aussi prestigieux que celui qui aurait été contracté avec une fille de roi, mais souligne aussi la réputation des deux lignages concernés14. Le mariage est accordé à un membre d’une famille de bonne renommée – rappelée par les deux arguments précédents – et contribue à en renforcer l’honorabilité.
12À l’inverse, les motivations mises en avant dans les contrats de mariage d’enfants naturels sont moins nombreuses, ce qui se traduit par un exposé beaucoup plus court. Le rappel et l’entretien du lien entre les deux lignages disparaissent de l’argumentaire. Le conjoint est effectivement choisi hors du réseau d’alliances matrimoniales conclues traditionnellement par la famille ducale, ce qui rend inutile l’emploi d’un tel argument. Le fait d’exclure d’autres justifications peut sembler moins évident. Les maris des bâtardes ducales sont généralement choisis parmi les officiers ducaux et sont de facto au service du duc. Or, l’idée d’une union en récompense des services rendus n’apparaît pas. De même, les formules d’affection envers l’enfant ou son conjoint sont loin d’être systématiques dans les contrats de mariage des enfants naturels alors qu’elles sont beaucoup plus fréquentes dans les actes de donations ducales15.
13Les alliances matrimoniales des enfants naturels mettent surtout l’accent sur la seule volonté des deux parties. L’écart de formulation est d’autant plus visible dans le contrat passé en 1465 entre Louis, bâtard de Charles Ier de Bourbon et Jeanne, fille naturelle de Louis XI. Il s’agit d’une alliance entre deux enfants naturels, originaires des deux maisons qui entretiennent déjà un réseau d’alliance. Or, leur contrat ne met pas l’accent sur les services rendus par Louis de Bourbon ou par la famille ducale à la maison de France, mais il ne fait pas non plus mention des liens matrimoniaux déjà existants entre Jean de Bourbon et Jeanne de France ou de l’honneur conféré au bâtard ducal. L’accord des parties est seulement justifié par « leur bon gré, bonnes volontez, propres mouvements et certaines sciences, sans force fraude, erreur ou induction aucune mais comme bien deliberées, pourveues et advisées16 ».
14Même si la structure des contrats de mariage des enfants légitimes et des enfants naturels reste assez comparable, le changement ou l’absence de certaines formules retient l’attention. Il semble que le mariage des bâtards n’ait pas nécessairement besoin d’une argumentation aussi construite que celui des enfants légitimes. En raison des enjeux de pouvoirs qui y sont liés, les alliances matrimoniales de ces derniers doivent être perçues comme conformes aux usages et aux attentes sociales, d’où l’utilisation d’un argumentaire légitimant : l’ancienneté, la perpétuation, la stabilité17. La restriction de l’argumentaire pour les mariages des bâtards insiste sur le caractère pragmatique d’une alliance répondant à une nécessité inscrite dans le temps présent18. Ce constat n’enlève rien aux stratégies développées autour des alliances des bâtards ni sur le pragmatisme influençant les mariages des enfants légitimes, mais autorise à penser que les unions des premiers ne répondent pas aux mêmes modalités que celles des seconds19. L’étude du contenu des contrats peut donner quelques éléments de réflexion sur ce point.
Le mariage, révélateur d’un écart social
L’infériorité dotale des filles naturelles
15De très nombreux travaux ont montré que la dot est l’un des moyens qui permet d’appréhender les différences sociales20. Toutefois, les distinctions entre les enfants naturels et les enfants légitimes ne sont pas prises en compte. Dans le corpus de sources considéré, il existe d’abord une grande différence entre les dots attribuées au sein d’une sororie légitime. La dot de l’aînée de Charles Ier de Bourbon est deux fois et demie plus élevée que celle de la cadette21. L’écart est encore plus important entre la dot la moins élevée des filles légitimes et celle de Sidoine, leur sœur bâtarde22. À titre de comparaison, l’apport dotal fait aux bâtardes de Jean II est sensiblement plus élevé que celui fait à leur tante naturelle23. Il est possible que l’absence de filles légitimes à marier ait favorisé l’attribution d’une dot légèrement plus importante aux bâtardes. Malgré cela, la somme attribuée aux filles illégitimes reste très inférieure à celle attribuée aux filles légitimes.
16Il existe également une différence à peu près équivalente dans l’attribution des biens paraphernaux, encore qu’ils ne soient pas systématiquement signalés dans les contrats. Quand ces biens concernent des filles légitimes, il s’agit généralement d’un partage. Le duc, donc le père ou le frère, est chargé des vêtements, nuptiaux ou autres, tandis que l’époux ou sa famille lui octroient bijoux et joyaux24. Dans tous les cas, il est clairement précisé que la donation doit être « convenable » et conforme au rang des maisons respectives, dans le but de maintenir visuellement le capital symbolique des familles liées par le mariage. En revanche, si l’on considère l’attribution de biens paraphernaux dans les contrats de mariage des filles naturelles, on observe quelques différences. Les actes ne mentionnent aucune obligation morale ou coutumière destinée à entretenir un rang social familial25. Le droit aux aliments, dévolu aux enfants naturels, impose théoriquement d’élever l’enfant illégitime en fonction du rang social du géniteur. Or, comme annoncé précédemment, les motivations du mariage, la notion d’honneur, la transmission d’un capital symbolique ou d’un certain niveau social semblent complètement éludés des contrats de mariage des enfants naturels. Mais il peut s’agir d’un effet de sources. La non-formulation de certaines motivations ne préjuge pas de leur absence dans les intentions réelles de l’alliance.
17L’écart important entre les dots des filles légitimes et des filles illégitimes a toutefois besoin d’être complété et nuancé. Les bâtards, filles ou garçons, étant juridiquement exclus de l’héritage paternel, la dot des filles naturelles n’est pas perçue de la même façon que celle des filles légitimes26. Malgré cela, elle doit permettre à la fille, naturelle ou légitime, de se marier dans un certain milieu. C’est donc moins le niveau social et financier de la famille de l’époux qui est pris en considération dans les deux cas. La différence essentielle se situe dans le bassin social de recrutement matrimonial. À ceci s’ajoute le fait que la dot des filles bâtardes comme celle des filles légitimes a une vocation de protection du patrimoine foncier de la famille.
Protéger le patrimoine familial
18À une exception près, la totalité des dots est versée en numéraire. Le cas particulier est celui du mariage passé en 1454 entre Isabelle de Bourbon et Charles de Bourgogne27. Les négociations pour établir la dot d’Isabelle montrent bien à quel point une dot foncière est problématique. Le duc de Bourgogne demande initialement pour la dot de sa future bru la seigneurie de Château-Chinon et une somme de 100 000 écus d’or28. Les négociateurs, réunis à Nevers, n’arrivent pas à trouver un accord. Le duc de Bourbonnais propose alors au duc de Bourgogne une somme équivalente à celle donnée à l’aînée des filles, Marie, mariée au duc de Calabre. Philippe le Bon « ne fut point content desdiz offres » et contraignit Charles Ier de Bourbon à céder la terre de Château-Chinon accompagnée d’autres terres, constituant ainsi un bloc de seigneuries situées entre le Bourbonnais et la Bourgogne29.
19Ce cas précis montre que la concession de biens fonciers en dot est une situation de pis-aller pour la famille de la fille. La préservation du patrimoine familial est mise en péril dans une société où la richesse et le prestige social proviennent essentiellement des possessions territoriales. Ainsi, les contrats mentionnant une concession foncière impliquent toujours une clause de retour en cas d’absence de descendance30. Les mariages des filles légitimes comme ceux des bâtardes doivent donc répondre à une stratégie de protection du patrimoine foncier de la famille paternelle.
20Les contrats des filles naturelles contiennent toutefois une clause originale, bien que non systématique, par rapport à leurs sœurs légitimes, celle de la concession d’offices en complément de la dot31. Cette stratégie présente plusieurs intérêts. D’abord, elle permet de diminuer le versement en numéraire de la dot concédée aux bâtardes, dans un contexte où leurs époux sont souvent choisis parmi les membres des familles d’officiers ducaux. L’office – ou la rente équivalente à l’office – apparaît comme un complément dotal et stipulé comme tel. Il contribue donc à revaloriser la dot des bâtardes et à atténuer l’écart entre les dots des filles naturelles et des filles légitimes même si celui-ci reste très important. Ensuite, la part que représente le versement d’une dot dans l’endettement de la famille ducale est moindre. Un office, surtout quand il est déjà concédé à un parent du conjoint choisi, ne représente pas de perte brute : le trésor ou le patrimoine ducal n’en sont pas affectés. Enfin, la concession de ces offices étant nominale, elle n’implique pas les héritiers du couple marié, sauf mention contraire. C’est donc un arrangement temporaire répondant aux nécessités ou aux possibilités du moment et qui reste relativement flexible car la nomination aux offices demeure à la discrétion des ducs.
21Si le montant de la dot des filles bâtardes est l’un des révélateurs de l’écart social entre enfants naturels et enfants légitimes, il serait hasardeux de fonder sur ce seul aspect l’étude des inégalités matrimoniales entre bâtardes et légitimes. Considérer que le contraste entre une dot de 1 000 et de 150 000 écus révèlerait le prix social de la bâtardise serait une erreur. Il faut d’abord prendre en compte les différences dans la manière de concevoir la dot des bâtardes et la manière dont ces dots s’organisent (numéraire, offices, etc.). Il faut aussi considérer que cette différence dotale est certainement révélatrice d’une approche politique différenciée des alliances de la part de la famille ducale.
La complémentarité des alliances : entre naissance et genre
Les mariages des enfants légitimes : une politique à l’est de la principauté ?
22À l’exception de la dot, la différence majeure entre les mariages des enfants naturels et des enfants légitimes dans la famille ducale de Bourbon réside essentiellement dans le bassin sociologique et géographique de recrutement des conjoints. Au sein des alliances contractées par les enfants légitimes de Charles Ier et d’Agnès de Bourgogne, on observe une différence sexuée. Les mariages des filles légitimes se font exclusivement dans des familles ducales ou princières. Elles sont aussi à replacer dans le contexte du rapprochement entre la maison de Bourbon et la maison de Bourgogne et des relations fluctuantes qu’entretiennent les Bourbons avec la royauté dans la seconde moitié du XVe siècle. Le duc Charles Ier a participé à la révolte nobiliaire de la Praguerie contre Charles VII en 1440, avant de mener une politique de conciliation avec la royauté. Sous son principat et sous celui de leur fils, la duchesse Agnès de Bourgogne, soutient une politique de rapprochement entre les maisons de Bourgogne et de Bourbon. Au moins six, voire sept, des onze enfants du couple ducal de Bourbon sont alors élevés à la cour de Bourgogne32. Cette politique est aussi favorisée par l’opposition existant entre le duc Jean II de Bourbon et Louis XI33. C’est d’ailleurs dans ce contexte que se nouent cinq alliances qui bénéficient du soutien ou de l’intercession du duc de Bourgogne.
23En 1437, Marie, l’aînée, épouse Jean d’Anjou, duc de Calabre, fils aîné de René Ier d’Anjou34. L’influence bourguignonne, visible dans le contrat, est toutefois beaucoup plus évidente pour ses sœurs, notamment à travers le mariage d’Isabelle de Bourbon avec Charles de Bourgogne en 1454. Cette alliance renforce l’union de la mère d’Isabelle : Agnès de Bourgogne, sœur de Philippe le Bon. Elle est complétée par celles des sœurs cadettes d’Isabelle avec des alliés ou des parents du duc de Bourgogne35. L’influence du duc de Bourgogne est significative dans les pourparlers préliminaires aux alliances voire dans les soutiens financiers pour le paiement des dots36. Toutefois, les Bourbons ont intérêt à favoriser de telles alliances. Elles participent à la politique de rapprochement avec la Bourgogne vis-à-vis d’un pouvoir royal qui s’affirme de plus en plus contre les grandes principautés, mais n’empêchent en rien une politique de conciliation avec le roi de France. Les unions permettent aussi de nouer des liens avec des seigneurs influents qui possèdent des terres hors du royaume tout en restant à proximité du Bourbonnais37. Elles révèlent enfin une politique matrimoniale bourbonnaise tournée vers l’est du royaume. Les alliances forment un arc d’influence de la mer du Nord (Gueldre, Bourgogne) au sud des Alpes (Savoie) en passant par le Charolais et la Franche-Comté. Cette zone complète le mariage de l’aînée avec la maison d’Anjou qui possède le duché de Lorraine et la Provence.
24En revanche, les mariages contractés par les fils légitimes de Charles Ier relèvent de deux dynamiques bien distinctes. La première consiste à maintenir des liens entre les membres de la noblesse de France. Le projet de mariage de Pierre de Bourbon avec Marie d’Orléans en 1461, et les alliances de Jean II de Bourbon avec Catherine d’Armagnac puis Jeanne de Bourbon-Vendôme s’inscrivent dans ce cadre. La seconde dynamique prend place dans une politique de fidélisation des princes apanagés par le roi. Ainsi, Jean de Bourbon, alors comte de Clermont, épouse en premières noces Jeanne de France, fille de Charles VII, en 1446 soit six ans après la Praguerie. Le mariage de Pierre de Bourbon avec Anne de France, fille de Louis XI, en 1473 s’inscrit dans un contexte similaire. La guerre du Bien public avait vu la révolte des princes contre le roi en 146538. Après cette date, Louis XI abandonne tout conflit ouvert dans sa politique de dissolution des grands apanages. Il renforce son influence au sein de la famille ducale, notamment par le biais des mariages39.
25Les enfants légitimes de Charles Ier de Bourbon font l’objet de politiques matrimoniales complémentaires. D’une part, les mariages des filles ont pour but d’étendre l’influence ducale sur une zone de frontière dans un contexte de diminution de l’influence des apanages dans le royaume de France. D’autre part, les mariages des fils, successeurs potentiels à la principauté, conservent une politique traditionnelle d’alliances au sein du royaume. À cette complémentarité des choix matrimoniaux entre fils et filles légitimes de Charles Ier de Bourbon, s’ajoute celle des enfants naturels.
Une politique d’alliance des bâtards au sein de la principauté
26Comme pour les enfants légitimes, on observe une différence sexuée des choix concernant les mariages des enfants naturels. Les filles et fils illégitimes des ducs Charles Ier et Jean II de Bourbon semblent avoir été généralement mariés sous le principat de ce dernier. De ce fait, les enfants des deux fratries sont impliqués dans un cadre politique similaire.
27Les mariages des filles naturelles de Charles Ier et de Jean II de Bourbon sont contractés avec des membres de la moyenne noblesse qui possèdent pour la plupart des offices ducaux40. Originaires du Bourbonnais ou du Beaujolais, ce sont majoritairement des officiers déjà issus de familles au service de la maison ducale, parfois depuis longtemps41. Il s’agit majoritairement d’unions avec des officiers locaux, vassaux du duc de Bourbonnais, dont le but est de favoriser la promotion sociale des époux.
28La situation semble différer sensiblement pour les mariages des fils illégitimes. Des bâtards de Charles Ier de Bourbon, seul Louis contracte un mariage, en 1465, avec Jeanne, fille naturelle de Louis XI. Cette union s’inscrit alors dans la politique de réconciliation entre le roi de France et la maison ducale de Bourbon à la suite de la guerre du Bien public. En 1486, Charles, bâtard de Jean II, épouse Louise du Lion, unique héritière de Gaston du Lion et de Jeanne de Lavedan42. Gaston du Lion appartient à la moyenne noblesse languedocienne. Il semble aussi y avoir eu une autre union envisagée dans les années 1480, soit pour Mathieu, soit pour Charles, avec l’unique héritière d’un autre officier royal43. Ainsi, par le choix systématique d’officiers ducaux pour marier les filles naturelles, la famille ducale cherche à renforcer les liens existants entre l’autorité tutélaire du duché et les officiers qui sont des représentants du duc dans les divers territoires de la principauté44. Ces unions apparaissent tels des investissements ducaux : l’officier qui entre dans le réseau matrimonial ducal voit ses intérêts confondus avec ceux de la famille de Bourbon. Les mariages de ce type participent à un processus de fidélisation des élites locales. En revanche, les alliances des fils naturels semblent plus être dirigées vers les filles de grands officiers royaux, peut-être sous l’impulsion du roi.
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29Si l’on replace le bâtard au sein de l’ensemble des alliances matrimoniales de son groupe de parenté et si l’on considère différents critères de distinction comme le genre ou le rang dans la fratrie, l’enfant naturel des milieux princiers ne se distingue pas seulement de ses frères et sœurs légitimes par une naissance hors mariage. En effet, la légitimation des alliances des enfants naturels et légitimes ne repose pas sur le même procédé d’exposition. L’étude des fratries issues de Charles Ier et Jean II de Bourbon semble soutenir l’hypothèse de deux systèmes distincts mais parallèles. Les mariages contractés par les enfants légitimes s’inscrivent dans la perpétuation de la lignée, et ce, dans le but de maintenir ou d’accroître le rang social et politique déjà acquis. Au contraire, les unions relatives aux enfants naturels s’établissent dans le cadre d’une politique matrimoniale plus ponctuelle. Elles n’ont pas d’antécédent et le lien matrimonial formé entre les deux familles n’a pas vocation à être renouvelé ensuite.
30On trouve la traduction de ces politiques matrimoniales dans des éléments concrets et notamment dans le montant des dots attribuées aux filles. La différence dotale entre bâtardes et légitimes est essentielle mais ne résulte pas uniquement d’un calcul du préjudice social de la bâtardise, même si l’illégitimité a une incidence. Il existe d’ailleurs d’autres motivations pour expliquer cette différence. L’exclusion de la bâtarde d’un héritage paternel modifie la justification même de la dot. Malgré un avantage économique évident à doter les filles naturelles bien en dessous des filles légitimes, il faut considérer que les bâtardes héritent aussi d’un capital symbolique issu de la lignée.
31Enfin, cet écart social entre les enfants naturels et les enfants légitimes – subi ou voulu – sert la politique ducale. Il existe une réelle complémentarité de chacun des membres d’une fratrie. Les mariages des filles légitimes participent à l’extension de l’influence des deux ducs sur des territoires frontaliers, souvent hors du royaume. Les unions des fils légitimes permettent, quant à elles, de maintenir la position sociale et politique de la famille au sein du royaume dont elle est l’un des piliers. Les alliances des bâtardes participent, enfin, d’un processus de fidélisation des élites locales tandis que celles des bâtards contribuent à nouer des liens avec les familles d’officiers royaux.
32L’analyse micro-historique d’une famille telle que celle de Bourbon à la fin du Moyen Âge nous permet donc de souligner la recherche de complémentarité matrimoniale des membres d’une fratrie de la haute noblesse. La prise en compte conjointe de ses membres – filles ou garçons, naturels ou légitimes – contribue à réinterroger la bâtardise en termes de parenté pratique tout en éclairant une pratique de la parenté au sein des fratries.
Tableau généalogiques des enfants naturels et légitimes des ducs Charles Ier et Jean II de Bourbon.
Notes de bas de page
1 A. de Sainte-Marie, Histoire de la maison royale de France et des grands officiers de la Couronne, 2 vol., Paris, E. Loyson, 1674, rééd. 1726, 9 vol. Les études sur la bâtardise se développent dans les années 1970-1980 en démographie historique à la suite des travaux de Laslett P., Oosterveen K. et Smith R. M. (dir.), Bastardy and its Comparative History : Studies in the History of Illegitimacy and Marital Nonconformism in Britain, France, Germany, Sweden, North America, Jamaica and Japan, Londres, E. Arnold, 1980 ; et en histoire avec notamment les articles de Harsgor M., « L’essor des bâtards nobles au XVe siècle », Revue historique, no 514, 1975, p. 319-354 ou Autrand F., « Naissance illégitime et service de l’État : les enfants naturels dans le milieu de robe parisien, XIV-XVe siècle », Revue historique, no 542, 1982, p. 289-303. On observe un passage progressif d’une histoire des bâtards à une histoire de la bâtardise.
2 Lefebvre-Teillard A., Introduction historique au droit des personnes et de la famille, Paris, PUF, 1996, propose une bibliographie commentée sur les enfants naturels ; elle est aussi à l’origine de nombreux travaux sur le lien entre filiation et illégitimité dont « L’enfant naturel dans l’ancien droit français », Recueil de la société Jean Bodin, 36/2, 1976, p. 253-264.
3 Béatrix de Bourbon (1258-1310), unique héritière des sires de Bourbon, épouse Robert de Clermont (1256-1318), sixième fils de Louis IX. Leur fils, Louis, devient duc de Bourbonnais en 1327 quand le roi Charles IV le Bel érige la seigneurie de Bourbon en duché. La politique d’expansion territoriale est surtout le fait de Louis II de Bourbon (1356-1410) avec notamment le rattachement du Forez, du Beaujolais puis de l’Auvergne sous le principat de Jean Ier (1410-1434). Sur l’évolution politique de la principauté de Bourbonnais, voir les travaux de Leguai A., De la seigneurie à l’État. Le Bourbonnais pendant la guerre de Cent Ans, Moulins, Les Imprimeries Réunies, 1969, et la synthèse avec cartes réalisée par Mattéoni O., Servir le prince. Les officiers des ducs de Bourbon à la fin du Moyen Âge (1356-1523), Paris, Publications de la Sorbonne, 1998, chap. 1, p. 69-92.
4 Les contrats de mariage ont fait l’objet d’une importante bibliographie dont ADH, no 121, 2011/1.
5 En raison de lacunes documentaires concernant les dates et les circonstances de la naissance des enfants naturels à la fin du Moyen Âge, il est difficile de dresser une typologie (naturel simple, adultérin, incestueux etc.) pour la comparer avec les qualificatifs employés. Pour cette raison, les expressions « bâtard », « enfant naturel » et « enfant illégitime » seront utilisées indifféremment dans la communication.
6 Nous devons le concept de « parenté pratique » à Weber F., Le sang, le nom, le quotidien : une sociologie de la parenté pratique, La Courneuve, éd. Aux lieux d’être, 2005, qu’elle définit comme étant l’« ensemble d’obligations et de sentiments qui donnent leur efficacité aux liens officiels de parenté ou qui crée d’autres liens ». Pour l’utilisation de cette notion en sciences sociales, voir notamment Déchaux J.-H., « Note critique. Les études sur la parenté : néo-classicisme et nouvelle vague », Revue française de sociologie, vol. 47, 2006/3, p. 591-619 ; Fine A., Klapisch-Zuber C. et Lett D. (dir.), « Liens et affects familiaux », Clio. Histoire, femme et sociétés, no 34 : Liens familiaux, 2011, p. 7-16 ; Lett D., « Les règles du jeu matrimonial : regards pragmatiques sur les stratégies des aristocraties des XIe-XIIIe siècle », Stratégies matrimoniales (XIe-XIIIe siècle), M. Aurell (dir.), Turnhout, Brepols, 2013, p. 349-361.
7 Lett D., « Les régimes de genre dans les sociétés occidentales de l’Antiquité au XVIIIe siècle », Annales. HSS, 2012/3, 67e année, p. 563-572. Chabaud-Rychter D. et al. (dir.), Sous les sciences sociales, le genre. Relectures critiques de Max Weber à Bruno Latour, Paris, La Découverte, 2010.
8 Harsgor M., Recherches sur le personnel du conseil du roi sous Charles VIII et Louis XII, Lille, thèse dactylographiée, 1980, t. 4, p. 2353, émet toutefois l’hypothèse que Catherine, généralement admise comme étant la fille légitime de Charles Ier de Bourbon et d’Agnès de Bourgogne, ait pu être la sœur du duc.
9 En considérant tous les enfants naturels connus des ducs de Bourbonnais (du XIVe au début du XVIe siècle), huit filles contractent un mariage et deux deviennent religieuses. De même, cinq garçons sur seize sont voués à l’Église.
10 Sur les dix-sept alliances contractées dont seize effectives, cinq contrats n’ont pas encore été retrouvés et certaines clauses des alliances des filles de Jean II de Bourbon sont connues par d’autres sources comme des quittances ou des donations ducales. Dans deux cas, on ne dispose d’aucune information sur la teneur des mariages.
11 Barret S., « Ad captandam benevolentiam : stéréotype et inventivité dans les préambules des actes médiévaux », M. Zimmermann (dir.), Auctor et auctoritas. Invention et conformisme dans l’écriture médiévale. Actes du colloque de Saint-Quentin-en-Yvelines (14-16 juin 1999), Paris, École des Chartres, 2001, p. 321-336. Sur la chancellerie ducale de Bourbon : Mattéoni O., « Écriture et pouvoir princier. La chancellerie du duc Louis II de Bourbon (1356-1410) », G. Castelnuovo et O. Mattéoni (dir.), Chancellerie et chanceliers des princes à la fin du Moyen Âge, II : « De part et d’autre des Alpes », Chambéry, université de Savoie, 2011, p. 137-178.
12 AN, K 169, no 8, no 9; AN, P 13642, no 1370.
13 AN, P 13642, no 1370, fo 1r; AN, K 169, no 9. Dans les lettres royales autorisant le mariage entre Anne de France et Pierre de Bourbon, il est fait mention de la captivité du grand-père paternel du futur époux en Angleterre. Jean Ier de Bourbon, à la tête de l’avant-garde de l’ost de Charles VI, avait été fait prisonnier par les Anglais à la suite de la bataille d’Azincourt en 1415. Il est mené en Angleterre où il meurt en 1434. Leguai A., « Le problème des rançons au XVe siècle : la captivité de Jean Ier, duc de Bourbon », Les ducs de Bourbon, le Bourbonnais et le royaume de France à la fin du Moyen Âge, Yzeure, Société bourbonnaise des études locales, 2005, p. 127-143.
14 La notion d’honneur a suscité l’intérêt de nombreux historiens médiévistes, notamment dans la continuité des travaux de Gauvard C., De grace especial. Crime, État et société en France à la fin du Moyen Âge, Paris, Publications de la Sorbonne, 1991, rééd. 2010, p. 734-752 ; et l’édition des actes de la table ronde tenue à Reims en 1991 dans Médiévales, 24, La renommée, 1993.
15 Sur ce point, Fieyre M.-L., « Bâtards, châteaux et stratégies dans la famille ducale de Bourbon (XIVe-XVIe siècle) », A.-M. Cocula et M. Combet (dir.), L’amour au château. Actes des rencontres d’archéologie et d’histoire en Périgord les 28, 29 et 30 septembre 2012, Bordeaux, Ausonius Scripta Mediaevalia 24, 2013, p. 39-48.
16 BnF, ms. lat. 9052, fo 70-75.
17 Sur la légitimation, voir les travaux des sociologues Boltanski L. et Thévenot L., De la justification : les économies de la grandeur, Paris, Gallimard, 1991. Une relecture critique des théories de Max Werber est proposée par Dogan M., « La légitimité politique : nouveauté des critères, anachronisme des théories classiques », Revue internationale des sciences sociales, no 196, 2010/2, p. 21-39. Enfin, en psychologie sociale, Oliveira P. de et al., « L’effet de la dominance sociale sur les idéologies de légitimation : le rôle modérateur de l’environnement normatif », Revue internationale de psychologie sociale, t. 21, 2008/4, p. 115-150.
18 Sur l’approche pragmatique en sciences sociales, Lavergne C. et Mondémé T., « Pragmatismes : vers une politique de l’action située », Tracés. Revue de sciences humaines, no 15, 2008/2, p. 5-22.
19 Bourdieu P., « Les stratégies matrimoniales dans le système de reproduction », Annales ESC, 27e année, no 4-5, juill.-oct. 1972, p. 1105-1127. Concept critiqué par Barry L., La parenté, Paris, Gallimard, 2008, p. 155-159.
20 Parmi une très importante bibliographie sur la dot : Klapisch-Zuber C., « Le complexe de Griselda. Dot et dons de mariage », 1982, repris dans La maison et le nom. Stratégies et rituels dans l’Italie de la Renaissance, Paris, Éd. de l’EHESS, 1990, p. 185-213 ; Bellavitis A., Famille, genre, transmission à Venise au XVIe siècle, Rome, École française de Rome, 2008. Chabot I., La dette des familles. Femmes, lignage et patrimoine à Florence aux XIVe et XVe siècles, Rome, École française de Rome, 2011.
21 AN, P 13702, no 1915 (1); AN, P 13702, no 1928. La dot de Marie de Bourbon, épouse de Jean de Calabre (1437), s’élève à 150 000 écus d’or alors que celle de Marguerite de Bourbon, épouse de Philippe de Savoie (1472) est de 60 000 écus d’or. La dot est notamment proportionnelle au rang et à la richesse du mari, mais les différences dotales au sein d’une sororie légitime peuvent varier en fonction des régions. Nassiet M., Parenté, noblesse et États dynastiques, Paris, éd. de l’EHESS, 2000, p. 143-147.
22 BnF, ms. fr., 20178, fo 121-123. La dot est de 1 000 écus d’or.
23 BnF, ms fr. 22299, p. 66-67 : Marie, fille naturelle de Jean II, épouse Jacques Sainte-Colombe le 27 juin 1470. Les clauses du contrat mentionnaient une dot de 2000 florins et 100 livres tournois de pension annuelle jusqu’à provision d’un office équivalent. AN, P 13642, no 1387 : Marguerite, bâtarde de Bourbon, épouse Jean de Ferrières en 1462, avec une dot de 3 000 écus.
24 AN, P 13702, no 1915 (1); AN, P 13702, no 1928. Les échanges matériels entre époux ont fait l’objet d’une importante bibliographie dont Klapisch-Zuber C., « Les corbeilles de la mariée », 1984, repris dans La maison et le nom, op. cit., p. 215-227. Chatenet M., « Habits de cérémonie : les mariages à la cour des Valois », I. Poutrin et M. K. Schaub (dir.), Femmes et pouvoir politique. Les princesses d’Europe (XVe-XVIIIe siècle), Paris, Bréal, 2007, p. 218-234.
25 BnF, ms. fr. 22299, p. 66-67 ; AN, P 13642, no 1387. Le contrat de mariage de Marguerite, bâtarde de Jean II de Bourbon, en 1462, mentionne que « vestira mon dit seigneur la dite Marguerite à son bon plaisir et vouloir ».
26 Pour les filles légitimes, la dot représente la contrepartie leur renonciation à l’héritage : Chabot I., La dette des familles, op. cit., p. 71. C’est en vertu de ce principe que Catherine de Bourbon signe des lettres de renonciation avant et après son mariage avec Adolf de Gueldre en 1464 : AN, P 13652, no 1446 (2).
27 AN, P 1364², no 1322 et 1326.
28 Château-Chinon, Nièvre, ch. l. arr.
29 AN, P 13642, no 1322 et 1326. Les officiers des terres concernées ont toutefois l’obligation d’en référer à la chambre des comptes de Moulins.
30 C’est le cas dans le contrat de mariage d’Isabelle de Bourbon, mais aussi dans celui de sa sœur naturelle Sidoine dont la dot comprend le château et la juridiction de Thizon en Bourbonnais, transmissible aux enfants du couple, mais le duc reste le dépositaire final de cette terre sur laquelle il exerce sa suzeraineté : BnF, ms. fr. 20178, fo 121-123.
31 BnF, ms. fr. 22299, p. 66-67. Lors du mariage de Marie, fille naturelle de Jean II de Bourbon, avec Jacques de Sainte-Colombe, le duc de Bourbonnais s’engage à payer 2 000 florins auxquels s’ajoutent 100 livres tournois de pension annuelle jusqu’à provision d’un office équivalent. Le même cas se présente dans le contrat passé entre Marguerite, bâtarde de Charles Ier et Jean de Ferrières (AN, P 13642, no 1387).
32 Sur l’implication de Charles Ier de Bourbon dans la Praguerie, Leguai A., Les ducs de Bourbon pendant la crise monarchique du XVe siècle, contribution à l’étude des apanages, Paris, Les Belles Lettres, p. 63-181. Après son veuvage, Agnès de Bourgogne fait un séjour dans les Pays-Bas bourguignons auprès de son frère Philippe, de 1462 à 1465. Après la guerre du Bien public (1465), Louis XI tente de rallier Jean II pour l’éloigner du duc de Bourgogne, mais le roi reste très méfiant vis-à-vis de l’influence d’Agnès dans le rapprochement entre les deux maisons (Leguai A., « Agnès de Bourgogne, duchesse de Bourbon (1405 ?-1476) », Les ducs de Bourbon, le Bourbonnais et le royaume de France, op. cit., p. 145-160 et Leguai A., « La famille de Bourbon : les mariages des ducs et leurs conséquences politiques », Les ducs de Bourbon, le Bourbonnais et le royaume de France, op. cit., p. 115-126).
33 Mattéoni O., Un prince face à Louis XI. Jean de Bourbon, une politique en procès, Paris, PUF, 2012. Leguai A., « Louis XI et le Bourbonnais », Les ducs de Bourbon, le Bourbonnais et le royaume de France, op. cit., p. 99-111.
34 AN, P 13702, no 1915 (1).
35 Les mariages de Catherine de Bourbon avec Adolf de Gueldre en 1463, de Jeanne de Bourbon avec Jean de Chalon, en 1467 et de Marguerite avec Philippe de Savoie en 1472. Schnerb B., L’État bourguignon (1363-1477), Paris, Perrin, 1999, p. 416-417. Sur le mariage de Jeanne : AD, Doubs, B 187 (inv.) cité par Harsgor M., Recherches sur le personnel, op. cit., t. 1, 1980, p. 780 et p. 826, note 63. Le mariage aurait été célébré en août 1467. Une copie non datée des clauses du contrat de mariage existe : AD, Nord, B 428, no 17863.
36 AN, P 13652, no 1441.
37 Ce type de mariages extraterritoriaux ayant dans un but d’extension de l’influence dynastique se retrouvent pour d’autres familles : Aurell M. (dir.), Stratégies matrimoniales, op. cit., notamment p. 123-129.
38 Murray Kendall P., Louis XI, Paris, Fayard, 1971, trad. fr. 1974, p. 145-160.
39 Mattéoni O., Un prince face à Louis XI, op. cit., p. 43-78.
40 Concernant les filles naturelles de Charles Ier de Bourbon : Jeanne épouse Jean du Fau (av. 1491), Sidoine épouse René du Bus en 1461, Charlotte épouse Odile de Sernay en 1487 ou 1488. Jean II a deux filles naturelles mariées : Marguerite avec Jean de Ferrières en 1462 et Marie avec Jacques de Sainte-Colombe en 1470.
41 Les Ferrières sont vassaux des ducs de Bourbonnais depuis, au moins, le milieu du XIVe siècle, comme les Sainte-Colombe. Guillaume de Sainte-Colombe, mort à Azincourt, qui était un proche conseiller du duc Louis II de Bourbon.
42 Felgères C., Histoire de la baronnie de Chaudes-Aigues depuis les origines (XIe siècle) jusqu’à 1789, Paris, Le livre d’histoire, 1904, rééd. fac. sim., Paris, Le livre d’histoire – Lorisse, coll. « Monographies des villes et villages de France », 2004, p. 167, note 2.
43 BnF, ms. fr. 15540, fo 67. Lettre signée « Du Fou » qui évoque un projet d’alliance avec « le bâtard de Bourbon ». Il est possible qu’il s’agisse de Renée du Fou, fille de Jean du Fou et de Jeanne de La Rochefoucauld, future épouse de Louis III de Rohan.
44 Mattéoni O., « Société contractuelle, pouvoir princier et domination territoriale. Les alliances du duc Jean Ier de Bourbon avec la noblesse d’Auvergne (1413-1415) », M. Gentile et P. Savy (dir.), Noblesse et États princiers en Italie et en France au XVe siècle, Rome, École française de Rome, 2009, p. 287-315. C’est aussi le cas dans d’autres familles princières. Par exemple, Blanche d’Anjou, bâtarde de René Ier d’Anjou épouse Bertrand de Beauvau dont le frère et le père ont été au service de Louis Ier et Louis II d’Anjou.
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