Stratégies associatives face aux risques de banalisation dans les « services à la personne »
p. 45-60
Texte intégral
1Le plan de développement des services à la personne de 2005, encore appelé plan Borloo, a été largement étudié (Devetter et al., 2009 ; Debonneuil, 2008). Nous l’envisageons ici sous un angle précis, celui des isomorphismes institutionnels (DiMaggio et Powell, 1983) qu’il a pu provoquer. Qu’ils soient coercitifs, normatifs ou mimétiques, ces isomorphismes conduisent tous peu ou prou à des formes de banalisation. La « banalisation » désigne ici les logiques politique, économique et institutionnelle par lesquelles ce qui faisait la spécificité d’une partie des activités de ce champ (notamment portée par les acteurs associatifs) s’effrite progressivement, sous la pression de transformations à la fois structurelles et politiques. Dans le champ des services à la personne, nous identifions trois « tentatives » de banalisation. La première concerne la marchandisation de l’action sociale, dont le corollaire pourrait être le déni des spécificités des acteurs associatifs (acteurs historiques de ces activités sociales), qui deviennent, dans cette dynamique, un ensemble d’acteurs parmi d’autres. Ce processus de marchandisation de l’action sociale, très bien analysé par Michel Chauvière (2007) se concrétise par l’ouverture, large et incitée, à la concurrence d’activités autrefois réalisées par les associations. Elle fera l’objet de la première partie de ce chapitre. La deuxième dynamique de banalisation relève d’un processus sociopolitique d’homogénéisation des services à la personne, considérés indistinctement comme un « produit » (deuxième partie). Dans ce système, la tentative de massification de la consommation qui est au cœur de la stratégie du développement de ces services peut s’interpréter comme une banalisation de l’acte de consommation de ces services (troisième partie). Ces différentes dynamiques sont le résultat d’un isomorphisme coercitif, c’est-à-dire une stratégie pensée « par le haut » par les pouvoirs publics visant à l’adoption de normes communes de consommation, de production et d’échange. De ce point de vue, le plan Borloo ne fait que prolonger une dynamique antérieure déjà bien installée. Mais il constitue aussi un moment de rupture historique dans ce triple processus de banalisation, ce que nous montrerons.
2Ces stratégies ont aussi été rendues possibles par les acteurs économiques et sociaux du champ, notamment les associations. En réagissant aux évolutions des régulations, prises comme des « chocs externes », ou en étant parties prenantes des processus, elles ont déployé – ou non – des stratégies de résistance.
Extension marchande de la sphère sociale et risque de banalisation des acteurs associatifs
3L’extension marchande de la sphère sociale et la mise en concurrence des acteurs sur des activités traditionnellement exclues du « jeu concurrentiel » sont les premières étapes de la dynamique que nous décrivons. Cette mise en concurrence passe par la montée des emplois directs (encore appelés emplois de gré à gré1) et par la promotion de l’arrivée des entreprises privées à but lucratif dans le champ des services à la personne, y compris dans le champ de l’aide à domicile auprès des personnes fragiles. Elle est légitimée par l’urgence des politiques d’emploi, mais aussi par l’urgence de l’amélioration de la conciliation vie professionnelle/vie familiale. Enfin, elle donne lieu à différentes réactions de la part du monde associatif.
Ouverture aux entreprises et mise en concurrence : banalisation et marchandisation de l’action sociale ?
4L’ouverture à la concurrence du champ des services à la personne en 2005 vise la création d’un vaste secteur où le politique entend faire jouer aux entreprises privées à but lucratif un rôle majeur. Cette stratégie prolonge une tendance passée, puisque l’ouverture aux entreprises privées de l’agrément et des réductions fiscales est amorcée dès 1996 par la loi du 29 janvier en faveur du développement des emplois de services aux particuliers. 2005 et le plan Borloo marquent cependant une nette accélération de ce processus à différents niveaux. D’abord, le plan Borloo fait de l’arrivée des entreprises privées dans ces activités un véritable objectif quantifié des réformes.
5Il va ainsi au-delà de la simple autorisation formulée en 1996 pour les entreprises de prétendre au même traitement que les associations, et favorise leur implantation par la simplification des procédures d’accès au « marché » des services à la personne, par la réforme des agréments simples et qualité (voir le chapitre précédent). Ici, le plan vise explicitement l’arrivée sur le marché de ces nouveaux offreurs dans tous les domaines des services à la personne, qu’ils relèvent de la logique domestique (emplois de ménage) ou de la logique d’action sociale (accompagnement dans le maintien de l’autonomie des personnes dépendantes). Dans la perspective de faciliter l’accès au « marché » des services à la personne, c’est également en 2005 qu’est instauré un droit d’option entre l’autorisation et l’agrément qualité pour les services d’aide à domicile. Ce droit d’option marque, lui aussi, une rupture nette avec les trajectoires passées. Trois ans auparavant, la loi 2002-2 instaurait, en effet, l’obligation pour les services prestataires d’aide à domicile d’être « autorisés » pour exercer leur activité, les intégrant ainsi au champ social et médico-social, et renforçant leur contrôle et leur suivi (voir le chapitre précédent). L’ordonnance du 1er décembre 2005, au contraire, ouvre la possibilité de choisir entre l’agrément qualité et l’autorisation. Il y a bien, avec ce droit d’option, un dessein particulier réservé aux acteurs du champ : celui de promouvoir l’innovation pour favoriser les gisements de productivité, et in fine l’activité économique.
« La mesure fondatrice du plan I a consisté à proposer aux structures un droit d’option pour obtenir l’“agrément”. Cette mesure devait permettre l’entrée massive d’entreprises privées porteuses d’innovations et donc à terme de gains de productivité. » (Debonneuil, 2008, p. 7.)
6Les statistiques témoignent de cette accélération, puisque les chiffres de création d’entreprises privées ont fortement augmenté depuis 2005. On comptabilise près de 4 000 créations nettes d’entreprises commerciales dans les services à la personne entre 2004 et 2007. Celles-ci représentent, fin 2007, 37 % des organismes agréés, la plupart étant des petites ou très petites structures puisqu’en moyenne, chacune héberge 12 emplois, et seulement 4 équivalents temps plein. L’emploi dans ce segment marchand de l’activité a lui aussi nettement progressé : il est passé de moins de 2 % des emplois des organismes agréés en 2004, à plus de 11 % en 20072.
7Comme les services à la personne regroupent des activités qui relèvent à la fois du champ du social, d’activités de services domestiques et de services purement commerciaux (voir infra), cette ouverture à la concurrence prend des airs, pour un pan de l’activité au moins, de marchandisation de l’activité sociale (Enjolras, 1996a ; Laville, 2005 ; Chauvière, 2007).
8La concurrence n’atteint pas seulement les entreprises privées. Les associations font face également à l’emploi direct, promu depuis 1991, et encouragé pour au moins deux raisons : la pression de la création d’emplois en période de chômage structurel et le faible coût de ces emplois.
Légitimer la banalisation par l’importance de la lutte contre le chômage et l’avènement du principe de libre choix
Extension de l’emploi direct
9Comme cela a été évoqué dans le chapitre précédent, les objectifs de lutte contre le travail au noir et contre le chômage légitiment les politiques publiques en faveur du développement des « emplois familiaux », dès le début des années 1990, sous un gouvernement de gauche. Cet objectif de développement quantitatif des emplois de services à domicile se traduit par des réductions de charges pour les employeurs et par la mise en place de réductions d’impôts sur le revenu3 pour le recours à un employé à domicile. L’objectif assez simple est de baisser drastiquement le coût de ces services et de stimuler leur croissance en partant de l’hypothèse d’une certaine élasticité-prix4 de la demande pour ces services. À ces leviers économiques se greffe un outil de simplification administrative des procédures liées à l’emploi d’un salarié à domicile : le chèque emploi service (CES) élargi en 2005 en devenant le chèque emploi service universel (CESU). Ces différentes mesures ont transformé une partie des emplois au noir en emplois déclarés (Marbot, 2008), et ont ainsi contribué à la forte croissance des emplois directs à domicile, en particulier dans le champ du ménage et de la garde d’enfants à domicile (voir graphique).
Graphique 1. – Évolution de l’emploi direct en France : 1990-2008

Source : données de l’Ircem. Emplois non corrigés de leur durée.
10La lutte contre le travail au noir et le chômage s’est ainsi traduite par l’instauration d’un marché atomisé – idéal-typique dans la création d’un marché concurrentiel, caractérisé par la banalisation de l’emploi direct.
Extension de la régulation quasi marchande
11Cette évolution vers un marché « concurrentiel » est renforcée par l’idée qui s’est progressivement imposée qu’il revient aux consommateurs finaux de choisir « librement » leur prestataire et les modalités de recours aux services à la personne (Morel, 2007). Dans cette logique de régulation quasi marchande, le financement des services à domicile pour les personnes fragiles est versé directement aux usagers plutôt qu’aux organisations, tout en leur laissant la plus grande liberté possible quant au choix de leur prestataire. C’est tout l’objectif du « CESU social », promu par les pouvoirs publics. Les conseils généraux sont fortement incités à fournir leurs prestations sociales sous forme de « CESU préfinancé » afin de garantir le libre choix de l’usager. Cette liberté de choix est contrainte par différents facteurs, parmi lesquels le prix sur le marché des services offerts : le coût de l’emploi direct d’un salarié à domicile demeure très nettement inférieur à celui d’un salarié intermédié et ce, pour différentes raisons. Notamment, l’emploi direct n’est pas soumis à l’intermédiation (et n’en supporte donc pas le coût), il est couvert par des conventions collectives minimalistes, son accès n’est pas contraint à un agrément.
12La complexité du besoin qui peut exister dans certaines activités des services à la personne, en particulier dans l’action sociale, là où traditionnellement se situent les associations, est ramenée à la formulation d’une « demande » qui choisit rationnellement une solution optimale, compte tenu notamment de l’état des technologies, de l’offre, du revenu, des prix. Les dimensions d’universalité, d’équité dans l’accès au service, mais aussi celles de la réciprocité, du symbolique, la spécificité des liens au sein de la sphère domestique, la délicate identification de leurs besoins par des personnes fragiles, bref, l’inscription des choix dans des contingences sociales, sont évacuées au profit d’une logique dite du « libre choix », qui tend à fonctionnaliser l’ensemble des arbitrages (Devetter et al., 2009 ; Jany-Catrice, 2010a). Ceci remet en question la légitimité des associations, qui s’étaient construites, inscrites et investies dans et par cette spécificité.
13La sédimentation de mesures et la rapidité avec laquelle se prennent les décisions publiques (voir chapitre précédent) sont un frein supplémentaire à la qualification des spécificités de l’action sociale prise en charge par l’associatif, et constituent peut-être le vecteur principal de cette atrophie de sens, que l’on retrouve dans le malaise de certains salariés du secteur, des salariés en interface comme du management intermédiaire. Bien que pionnières dans ce champ de l’action sociale, les associations sont envisagées comme une unité de production parmi les autres sur le marché des services à la personne, sous un angle non plus universaliste mais sectoriel.
14Le passage d’une régulation basée sur le financement des associations en tant qu’acteurs dont les spécificités, les valeurs et l’utilité sociale légitimaient le financement public, à une régulation quasi marchande, où le financement doit couvrir un « besoin » individuel via un service pouvant être assuré indifféremment par n’importe quel prestataire, met les associations dans un certain embarras. Comment réagissent-elles à ce bouleversement dans leur environnement ? En quoi co-construisent-elles, s’adaptent-elles ou au contraire résistent-elles à ces changements ? Quelles en sont les conséquences sur leur projet associatif, leur façon d’envisager le service à domicile, etc. ?
Les associations des services à la personne : un acteur comme un autre ?
15Face au risque de banalisation des services associatifs au sein d’un grand « marché » des services à la personne, et en réaction aux évolutions de leur environnement institutionnel – et dorénavant concurrentiel, les acteurs associatifs élaborent différentes stratégies.
16Un premier type de logique, que nous qualifions de conformiste, ou d’opportunité, vise une mise en conformité rapide aux évolutions du contexte et des réglementations. La mutation de ces activités en « marché » est intégrée par certaines associations comme une contrainte exogène et assumée. Elles s’identifient ainsi elles-mêmes comme des acteurs en concurrence : il faut « faire face à la concurrence », en se situant sur une concurrence par le coût ou par la qualité (« Les associations disent qu’il faut faire barrage aux entreprises. “Démontrons par les actes que nous bossons plus et mieux que les entreprises.” C’est un discours trop militant5 ») ou en diversifiant leur offre de services (cf. infra). On observe dans certains discours un glissement dans l’utilisation du terme de « maillage » territorial, où l’on passe d’une exigence de services accessibles à tous sur un territoire, complémentaires et coordonnés, entre les différentes structures à une vision concurrentielle du « marché » des services à la personne6.
17Une logique patrimoniale distinctive se démarque de la précédente par le fait qu’elle est mise en œuvre plutôt par des conseils généraux. Certains par exemple, en recherche d’intérêt général, autorisent toutes les associations relevant du social7. Le secteur public demeure ici le garant des valeurs d’utilité sociale (solidarité territoriale et cohésion sociale).
« Donc déjà en 2002 on avait dû sortir des dossiers. Mais c’était […] de mettre le paquet sur la professionnalisation, et notamment, notre objectif à ce moment-là, ça a été d’essayer de faire en sorte que les structures augmentent les temps de travail des salariés. Derrière la professionnalisation […], notre volonté c’était aussi, et surtout je dirais même, d’augmenter les temps de travail, ou en tout cas de faire en sorte qu’il n’y ait plus de temps de travail partiel subi, qu’il n’y ait plus que du choisi8. »
18Lorsqu’elle est en phase avec les activités associatives, cette posture signifie qu’il revient de facto aux autorités de régulations territoriales le soin d’établir l’intérêt général, autant que l’utilité sociale.
« Le conseil général a mené une politique tambour battant sur l’autorisation. Il veut garder la mainmise sur tout ce qui est personnes dépendantes. Parce qu’une fois que la structure est autorisée, elle est tarifée derrière9. »
19Entre les deux, un continuum de comportements témoigne d’une véritable recherche de ce qui fait « utilité sociale », mais dont les logiques oscillent entre la construction (et la revendication) d’une véritable singularité dans le type de prestation offert, et la mise en place d’outils permettant l’adaptation aux évolutions actuelles. Ces logiques, que nous nommerons logiques patrimoniales adaptatives, pour insister sur la recherche de l’adaptation au contexte, peuvent être adoptées par des réseaux qui déploient des formes intéressantes de résistance : responsables associatifs qui réfléchissent à leur « projet associatif », proposition de création de « labels RH », voire de « labels utilité sociale ». Ces labels peuvent être assimilés à des marques collectives. Ils sont en théorie le signe collectif « garantissant qu’un produit ou un service possède une ou plusieurs caractéristiques valorisées par un certain nombre de consommateurs » (Coestier et Marette, 2004). La concurrence peut ainsi s’établir sur la base de la comparaison de labels ou certifications différentes avec toutes les limites inhérentes à ces dispositifs (voir le chapitre de Francesca Petrella et Nadine Richez-Battesti). Cette logique se situe bien à la croisée des chemins entre la stricte adaptation aux contraintes externes et la résistance à ces contraintes. Tout en s’inscrivant dans une logique de concurrence, les acteurs associatifs cherchent à faire valoir leur différence par des stratégies innovatrices, et par la création d’outils leur permettant de faire jouer la concurrence sur des critères plus larges que le simple prix. La construction de grandes enseignes associatives s’inscrit en partie dans cette perspective (voir deuxième partie). Elles peuvent être envisagées à la fois comme un « distributeur » mettant en relation les usagers et les différents services (sur les champs du médico-social et des services à la personne), mais aussi comme un label, une « marque » porteuse de valeurs associatives. Elles permettent ainsi de se positionner davantage sur la qualité dans le « marché » des services10.
20Différentes stratégies oscillent donc entre résistance et adaptation ou valorisation, face à l’ouverture à la concurrence et la construction d’un « marché » des services à la personne. Mais cette première tendance ne suffit pas à elle seule à identifier le processus de fond de banalisation. Une seconde voie, ouverte de façon plus spécifique pour ce champ, vise l’homogénéisation du produit à travers la création d’un « secteur » des services à la personne.
Création d’un secteur et homogénéisation du produit « services à la personne »
21La dynamique d’homogénéisation du produit couvre deux processus. Le premier, que nous qualifierons d’homogénéisation interservice, traduit l’insertion d’activités auparavant spécifiques au champ associatif et relevant de l’action sociale dans un champ large d’activités hétéroclites, constitué en secteur – des services à la personne – par un « coup de force politique » (Devetter et al., 2009 ; Jany-Catrice, 2010a). Ces activités ont ainsi été noyées au sein d’une multitude d’activités dont la réalisation par le marché est plus difficilement contestable (ménage, soutien scolaire, assistance informatique, petit jardinage, etc.). Le second processus, dit d’homogénéisation intraservice, traduit quant à lui la banalisation des activités de services à la personne, conçues comme « un produit » comme un autre, interchangeable et substituable, pouvant faire l’objet d’une standardisation et d’une industrialisation (voir le chapitre d’Emmanuelle Puissant), par le biais notamment des « grandes enseignes ». Face à ces deux risques d’homogénéisation de leur activité, les réactions associatives sont multiples.
Un déni de la spécificité des activités d’action sociale ?
22Le regroupement de différentes activités au sein d’un « champ » des services à la personne suit une logique très particulière. Il ne s’agit pas, à proprement parler, d’un « secteur » : il ne correspond à aucune nomenclature statistique en place, et regroupe des activités et des métiers qui ont des trajectoires historiques et des logiques distinctes. Il s’agit plutôt d’un champ hétéroclite d’activités regroupées, pour des raisons fiscales11 dans un même ensemble. Ainsi, les services d’aide aux personnes dépendantes, historiquement assurés, on l’a dit, par des structures associatives, se trouvent dorénavant immergés dans un ensemble large d’activités, incluant des services de confort (pour les ménages du décile de revenu supérieur).
23Certes, dès le début des années 1990, les mesures en faveur du développement des « emplois familiaux » créent des formes de confusion (Gardin et Laville, 2000). Mais en cherchant à élaborer la construction d’un véritable secteur, le plan Borloo de 2005 précise une liste d’activités donnant droit à des avantages fiscaux. Il propose l’élaboration d’un cadre statistique de comptage de ces emplois et incite les acteurs à négocier une nouvelle convention collective pour les salariés des entreprises à but lucratif des services à la personne. Portées pour l’essentiel par l’État, les conditions sociopolitiques de création d’un nouveau secteur sont en place.
24Qu’il s’agisse des salariés ou des partenaires sociaux (syndicaux ou patronaux), les acteurs sont peu à l’aise avec cette définition éclectique de leur activité et de leur métier, certains la rejettent. Les acteurs sociaux reconnaissent, voire dénoncent, les difficultés et les confusions engendrées par le fait de mettre sur un même plan ces différentes activités.
« Nous par rapport au plan Borloo, justement, […] on a toujours contesté, on ne voulait pas que tout ce qui relevait de l’intervention sociale soit dans la liste des 22 activités. Parce qu’on estimait et on estime toujours aujourd’hui, et on continue à se bagarrer sur un certain nombre de dossiers qu’on a faits sur le sujet, qu’on est vraiment dans des finalités d’intervention qui sont complètement différentes12. »
25De nombreux salariés ne se reconnaissent pas non plus dans l’appellation « services à la personne ». Car le corollaire de ce qu’on appelle ici cette homogénéisation interservice, est en quelque sorte une banalisation des métiers de l’aide à la personne, qui s’étaient construits historiquement autour de la reconnaissance de leur travail comme un travail social et autour de la construction, progressive, de conventions collectives spécifiques. Cette banalisation est vécue parfois difficilement par les salariés des associations d’aide à domicile, qui l’équivalent à un déni de leur métier et de ses spécificités13.
26Enfin, les discours autour de ce secteur (compétences, professionnalisation, concurrence, etc.) peuvent être maniés dans tous les sens, avec un peu d’habileté, selon que les représentations que l’on se fait du « secteur » relèvent plutôt des activités de ménage pour couples bi-actifs, de l’aide aux personnes dépendantes (âgées, handicapées, enfants), ou encore du soutien scolaire (Jany-Catrice, 2010a).
Le service à la personne, un produit comme un autre ?
27Très structurante dans le secteur, la communication institutionnelle tend à faire apparaître les « services à la personne » comme un « produit comme les autres ». Véhiculée très précisément par l’Agence nationale des services à la personne (ANSP), cette communication constitue un vecteur de dépersonnalisation et de standardisation de l’activité. Dans une campagne publicitaire de cette agence, on lit « découvrez le seul produit qui entretient votre maison, change les couches de vos enfants, et vous fait faire des économies », le tout dans une ambiance visuelle de l’American way of life des années 1950, permettant d’amener dans l’imaginaire collectif trois idées.
28La première consolide l’idée d’homogénéisation interservices : il s’agit de l’éclectisme possible de l’activité de « service à la personne », sans qu’aucune n’ait a priori plus aucune spécificité (on promène le chien des riches comme on accompagne la personne âgée dans les gestes de la vie quotidienne).
29La deuxième est une sorte de déni de l’existence même de salariés en interface dans l’activité. Ceux-ci sont remplacés par un « produit », alors même qu’au moins pour une partie des métiers des services à la personne, ils s’effectuent dans la simultanéité d’un rapport social singulier. C’est le cas des aides à domicile dans la relation de service qu’elles co-entretiennent avec la personne âgée. Lorsque cette simultanéité est évitée, c’est généralement la relation de confiance qui prend la relève. Ainsi, les salariés engagent plus (care, sur les corps des personnes âgées), ou moins (petit bricolage des hommes toutes mains) l’intimité des lieux. Cette transparence complète des salariés dans la communication est assez symptomatique des dynamiques d’« invisibilisation » de leur travail, et des difficultés qu’il engendre notamment dans la prévention des risques professionnels (voir le chapitre d’Annie Dussuet).
30Le potentiel d’industrialisation et de massification de l’activité, via la référence aux années 1950 est la troisième idée que fournit la publicité. Cette industrialisation est un axe majeur de la stratégie du plan Borloo et constitue une réelle « innovation » par rapport aux réformes précédentes. Elle est introduite notamment via la création et la promotion des enseignes nationales. Ces enseignes endossent le rôle de correcteur dans la production d’asymétries d’informations liée à la présence d’incertitudes fortes sur la qualité dans ces services (Messaoudi, 2009). En assurant la transparence de ce marché potentiel des services à la personne, les enseignes doivent permettre tout à la fois l’exercice du libre choix des usagers ou des clients (Morel, 2007), et l’adoption de comportements avisés et rationnels.
31De fait, des réseaux associatifs (tels que ADESSA ou UNA), et des structures publiques (centres locaux d’information et de coordination [CLIC] notamment) étaient censés jouer ce rôle, étendu cette fois aux enseignes commerciales. Pressenties comme étant mieux adaptées à un développement industriel du champ de ces services sur le modèle des hypermarchés de la grande distribution, ces enseignes n’ont trouvé ni leurs repères ni la légitimité aux yeux des acteurs d’une économie de services de proximité, surtout dans le domaine de l’intervention auprès des publics fragiles. Conscientes de leur éloignement par rapport aux territoires, ces enseignes ont tablé sur le développement de leur capacité à mailler les acteurs locaux. Leurs effets de structuration du secteur ont cependant constitué un échec, les plus grandes enseignes (Serena, France Domicile14) ayant, au cours de l’année 2009, procédé à de nombreux licenciements.
Les acteurs associatifs face au risque d’homogénéisation de leurs activités
32Comment et par quels biais les associations sont-elles affectées par ces deux types d’homogénéisation ? Les associations et leurs fédérations ont, depuis longtemps, contribué à la construction du secteur – et des métiers – de l’aide à domicile. Les logiques identifiées ne reflètent pas seulement des réactions face à des bouleversements exogènes. Le travail de longue haleine fourni par ces acteurs constitue dans ce supposé marché des services à la personne, une spécificité des acteurs associatifs que ces derniers peuvent avoir du mal à revendiquer et à maintenir, tant elle soulève la question du financement.
33Les associations d’aide à domicile sont régulées par des conventions collectives (récemment fondues en une convention collective unique) qui les distinguent des autres acteurs puisque les entreprises de services à la personne n’ont pas encore de convention collective, tandis que la convention collective des salariés de particuliers employeurs demeure moins protectrice pour les salariés. De nombreuses associations se trouvent aujourd’hui en grande difficulté financière15. Leur fragilité est d’ailleurs aggravée par la sédimentation de lois, souvent contradictoires, qui ont modifié des règles du jeu à peine mises en place, comme développé au chapitre i. En souhaitant favoriser la professionnalisation des salariés du champ, la loi de modernisation de l’action sociale de 2002 invitait les employeurs à entrer dans des programmes de qualification diplômante de leurs salariés, en particulier en favorisant, souvent par la validation des acquis et de l’expérience, l’accès au diplôme d’État d’auxiliaire de vie sociale (DEAVS). Trois ans plus tard, le plan Borloo a mis à bas cet édifice en centrant davantage son dispositif sur la professionnalisation des structures (qu’incarnent, dans cette vision technocratique et politique, la fin du bénévolat et la privatisation des organismes) voire sur la professionnalisation du marché (incarnée ici par les enseignes) et nettement moins sur celle des personnels de service au contact direct des usagers.
34Les associations ont aujourd’hui des salariés formés, rémunérés en conséquence, dans une situation de disette de fonds publics. La loi de décentralisation de 2004 a en effet, elle aussi, heurté cette logique, fragilisant plus encore les comptes sociaux des territoires, l’État ne compensant pas financièrement l’ensemble des compétences d’action sociale transférées aux conseils généraux. Dans un souci de « maîtrise » des dépenses publiques, ces derniers ont souvent limité et continuent de limiter la croissance des dépenses d’APA, fragilisant d’autant plus ces organisations. Les caisses régionales d’assurance-maladie, qui interviennent sur le champ de la dépendance légère (groupes iso-ressources GIR 5 et 616) ne sont pas en reste, refusant souvent d’ajuster les tarifs conventionnés auprès des associations.
35La diversification de l’offre apparaît dans certains cas comme une réponse à ces difficultés17, rendue possible par le regroupement au sein des services à la personne d’un grand nombre d’activités. Cette stratégie de diversification participe, dans certains cas, à une logique que nous avons qualifiée de conformiste, ou d’opportunité, lorsqu’elle vise à « préempter » une clientèle aisée qui cherche d’abord des services de confort (ménage), avant l’arrivée de la dépendance où les chances sont plus grandes que cette clientèle devienne alors captive.
« On réfléchit actuellement au développement d’un service de femmes de ménage, parce qu’on reçoit des demandes auxquelles on ne peut pas répondre pour l’instant. On avait déjà fait une tentative il y a quelques années, mais on s’est heurté à un problème de motivation et de formation des candidats… Et aussi à un problème d’adaptation des personnels encadrants, qui sont pour la plupart des travailleurs sociaux, et qui doivent avoir un profil plus “commercial”. Jusqu’à maintenant, on se situe dans le secteur social et médico-social, mais aujourd’hui, avec la concurrence du lucratif, il faut s’attaquer à ce secteur. Sinon, c’est eux qui investissent le domicile (et donc eux qui seront dans le domicile au moment de l’entrée en dépendance). Notre association a une réputation et une image professionnelle : il faut l’utiliser18… »
36D’autres au contraire, dans une logique patrimoniale distinctive, cherchent à marquer leur spécificité en se centrant sur leur « cœur d’activité », l’aide auprès des personnes âgées :
« À peu près 1 300 clients dont 80 % ont plus de 80 ans et 10 à 20 % de 50-60 ans qui veulent se faire aider souvent parce qu’ils sont en très mauvaise santé, voire en fin de vie. A priori pas d’aide au ménage à des couples bi-actifs. On ne fait pas la garde d’enfants et, d’ailleurs, on n’est pas référencé. D’ailleurs, cela rejoint ma finalité de départ : aider des gens âgés en difficulté pour leur permettre de rester vivre chez eux. C’est ma ligne directrice depuis le début19. »
Une banalisation de l’acte de consommation
37Le développement des services à domicile est très vite justifié par la croissance des besoins. Mais 2005 marque une nouvelle étape. La communication fait de la consommation de ces services un acte banal, voire un acte citoyen, en ce qu’il permet de créer de l’emploi pour d’autres, suivant la logique soutenue par Cahuc et Debonneuil (2004) : « Il suffirait que chaque ménage français consomme, en moyenne, trois heures par semaine de services à la personne, pour créer deux millions d’emplois. » Mais cette banalisation de la consommation de services à la personne rencontre des résistances.
La consommation de services à la personne comme réponse « naturelle » aux évolutions sociodémographiques
38La banalisation de l’acte de consommation s’appuie sur les constats de croissance des besoins, liée à une série d’évolutions sociodémographiques (vieillissement de la population, montée de l’activité féminine, modification des structures familiales). Ces évolutions sociodémographiques se combinent également à des objectifs convergents de politiques publiques : l’aide aux personnes dépendantes, mais aussi l’augmentation des taux d’emploi et notamment des taux d’emplois féminins (en ce sens, le bénéfice est double, puisque les emplois créés de manière directe permettent aussi à d’autres femmes de travailler), et même promotion de l’égalité hommes-femmes (via la libération des tâches domestiques pour ces femmes – mais reprises par d’autres femmes – mais aussi indirectement par la plus grande disponibilité des femmes pour leur carrière professionnelle).
39L’évaluation des besoins demeure pourtant une question complexe (Devetter et Jany-Catrice, 2010). Les politiques publiques de développement de ces services tendent à s’appuyer sur des sondages, dans lesquels les Français affirment qu’ils se libéreraient volontiers des activités de ménage (c’est-à-dire une partie du champ couvert par les services à la personne, mais une partie seulement). Mais la libération du temps pour le soin des enfants ou des personnes âgées, qui soulève d’autres problématiques, est rarement envisagée dans ces enquêtes, alors que ces activités occupent, selon les départements, entre le tiers et la moitié des emplois. Le consentement à payer pour cette libération de temps n’est pas plus évoqué. Des mises en contextualisation plus larges permettraient de rappeler qu’une partie des besoins exprimés peut être, par exemple, due au faible partage des temps de travail entre hommes et femmes dans la sphère domestique, et à l’importance des horaires de travail hebdomadaires des cadres, qui sont aussi les salaires des déciles supérieurs (Méda, 2008 ; Devetter et Rousseau, 2007). Enfin, la possibilité de répondre à ces besoins par d’autres modes d’organisation, plus collectifs, est rarement évoquée, si ce n’est comme un postulat selon lequel la préférence pour la prestation individuelle au domicile est toujours plus grande que pour les structures collectives.
40La consommation de services à la personne, entre source de « bien-être » et acte « citoyen »
41L’amélioration du bien-être par la consommation de services à la personne est également très présente dans les discours sur le développement de ces services. La priorité est axée sur l’amélioration du bien-être individuel du consommateur. Mais on identifie parfois aussi des plaidoyers en vue de l’amélioration d’un bien-être collectif (amélioration de l’égalité hommes-femmes, prise en charge des personnes dépendantes, accès pour tous aux services, etc.). Ainsi, la capacité à produire du « bien-être » est constamment mise en avant, sans distinction entre bien-être individuel et bien-être collectif. Les services sont censés améliorer simultanément les deux, par l’imbrication des enjeux individuels et collectifs (libération pour certaines femmes des tâches domestiques et amélioration de l’égalité hommes-femmes ; respect du souhait des personnes âgées de rester chez soi et réponse financière à des enjeux de société, etc.).
42La création d’emplois envisagée par le plan Borloo constitue un vecteur supplémentaire de bien-être. Présent dès le début des politiques de développement de ces services, cet objectif de politique publique est particulièrement mis en avant dans les campagnes de publicité de l’ANSP. Adoptant le slogan « Les besoins des uns font les emplois des autres » (campagnes publicitaires de l’ANSP, 2009), l’acte de consommation devient un acte citoyen en ce qu’il engendre directement la création d’emplois pour d’autres. Dans ce cadre, la mise au travail des individus permet la construction de l’identité individuelle et le bien-être des salariés potentiels. Consommer « du service à la personne », c’est donc fournir directement un emploi à un travailleur, le sortir de l’« assistanat », ce qui est bénéfique pour tous. Cet acte citoyen devient même un acte charitable dans certains discours (« Qui emploierait ces personnes si ce n’est nous20 ? »).
43C’est dans cette confusion entre une forme d’utilité (individuelle, source de bien-être privé), et une autre (utilité collective et sociale), que se perd la spécificité de la dernière, et, ce faisant, celle du secteur qui en était l’un des garants officieux, l’associatif (Jany-Catrice, 2010a).
Stratégie de banalisation de l’acte de consommation et résistance des acteurs
44On n’observe pas la massification de la consommation espérée par les pouvoirs publics, et qui constituait un des piliers de la stratégie « industrialiste » du développement des services à la personne. On constate même que des résistances importantes demeurent. Cela tient en partie aux leviers utilisés par le plan Borloo pour transformer les besoins potentiels en demande effective. D’ordre économique, ils devaient banaliser l’acte de consommation par la baisse du coût d’accès aux services (par les dispositifs fiscaux, mais aussi par la structuration concurrentielle du secteur), par une meilleure circulation de l’information (par les enseignes notamment), et par un accès aisé.
45Or, l’usage exclusif de leviers économiques pour la transformation des besoins en demande résiste peu aux faits. Les ressorts institutionnels (Comment l’offre est-elle déjà présente ? Quels sont les dispositifs de régulation de la qualité du service ?), les ressorts psychosociaux de la transformation des besoins en demande (Quelle propension mentale ou culturelle au recours à du personnel de service dans son propre domicile ?), ou encore éthiques (Quelles conséquences de l’externalisation à autre que soi-même d’activités relevant du soin, du caring, de l’entretien de soi ?) ont été éludés. Cela explique peut-être en partie que la démocratisation de la solvabilisation, qui constitue également une justification de la confusion entre bien-être collectif et individuel, n’a pas abouti. Ainsi, pour les ménages de moins de 60 ans, les mesures de solvabilisation n’ont pas permis d’accroître la demande, le taux de recours se maintenant aux alentours de 5 % entre 1989 et 2006. Ils n’ont pas non plus favorisé la diffusion de cette consommation auprès de ménages moins aisés : seuls les 5 % les plus riches ont vu leur taux de recours croître de manière significative (Devetter et Jany-Catrice, 2010). De même, Clément Carbonnier montre qu’il y a eu une hausse isolée de la consommation des 10 % les plus riches en services à domicile (Carbonnier, 2009).
Graphique 2. – Répartition en décile des consommations liées aux emplois à domicile. Consommation moyenne de services à domicile et réduction moyenne d’impôts à ce titre, par foyer fiscal

Source : Carbonnier, 2009, p. 72.
46Marbot a montré également qu’alors que plus de 19 % des cadres recouraient aux services à la personne en 2005, c’était le cas de seulement 1,6 % des ouvriers (Marbot, 2008, p. 146).
Conclusion
47Si la dynamique de marchandisation du social est à l’œuvre depuis plusieurs décennies déjà (Laville, 2005), le plan Borloo marque néanmoins un tournant. Opérateur de cohérence, il a unifié des mesures sédimentées au fil du temps, donnant ainsi une force sans précédent aux politiques publiques de développement des services à domicile, consolidée par la mise en place d’une communication autour de ces services. La rupture se situe également dans le regroupement au sein d’un même ensemble des différentes activités de service à domicile et dans la mise en place du droit d’option. Ces mesures ont nettement fragilisé les acteurs associatifs.
48Le processus central sur lequel repose ce développement a priori sectoriel, est la banalisation à la fois de l’activité, des actes de production et de consommation. La question de l’accès universel aux services n’est plus au cœur du projet de la politique sociale.
49Le caractère fragmenté des comportements associatifs, source de fragilité, peut être lié au manque de délibération collective. On sait, en effet, que les utilités sociales nécessitent d’être co-déterminées et co-valorisées par les acteurs qui les portent. En émiettant les réponses par manque d’« agir communicationnel21 », l’élaboration conjointe de l’utilité sociale « comme qualité construite par un processus cognitif assurant la coordination d’une offre et d’une demande sur le marché » (Requier-Desjardins, 2009) est manquée. Or, l’enjeu de la coopération est central et pourrait constituer le principe premier des valeurs promues par les associations. Cela nécessite la réactivation d’une intelligence collective et la coproduction d’une identité commune.
50Ce n’est pas tant la diversité des stratégies de réponse à l’œuvre que ce manque de concertation intégratrice qui conduit à la fragilisation des associations dans ce champ.
Notes de bas de page
1 Il s’agit d’emplois qui s’inscrivent dans une relation directe entre le salarié intervenant à domicile et le bénéficiaire du service. Ce dernier est également l’employeur.
2 Données administratives de la Dares.
3 Qui s’étendra en 2007 au crédit d’impôt.
4 L’élasticité-prix est le rapport entre la variation relative de la demande d’un bien ou service et la variation relative du prix de ce bien ou service.
5 Entretien employeur associatif A. Nous mobilisons ici à titre illustratif un certain nombre d’extraits d’entretiens réalisés au cours de nos différentes recherches, courant de 2004 à 2011, dans le domaine des services à la personne.
6 « Ceci suppose pour penser son développement de mettre en perspective les besoins individuels des personnes sur un territoire, d’avoir une approche “marché”, de mieux connaître la concurrence locale et d’alimenter ainsi de ces éléments le projet de la structure. » (Rapport d’activité 2007 de l’union nationale de l’aide, des soins et des services aux domiciles : UNA, 2008, p. 86.)
7 Contournant ainsi en partie le principe de libre choix à la base des politiques gouvernementales
8 Entretien avec un chef de mission de la DDTEFP.
9 Entretien avec un chef de mission de la DDTEFP.
10 Certaines enseignes ont pour objectif de se situer dans un positionnement « institutionnel » mais s’appuyant sur une « dynamique résolument commerciale », et sur un positionnement « résolument qualitatif » (UNA, 2006, p. 85 et 119).
11 Et par la force de lobbies plus ou moins structurés.
12 Entretien avec le négociateur de convention collective d’une organisation syndicale.
13 On retrouve ici un résultat plus général portant sur les réactions des travailleurs sociaux à l’égard du néolibéralisme, « entre résistance et résignation » (Curie, 2010).
14 Les Échos, 22 juin 2009. Voir aussi « Le filon des services à la personne se tarit », Le Monde, 26 juin 2009.
15 Une enquête réalisée auprès de tous les acteurs des services à la personne sur les deux départements de Haute-Normandie montre ainsi que 82 % des associations évoquent une fragilité financière, contre 49 % des entreprises à but lucratif du champ (Jany-Catrice, 2010b). Voir aussi l’étude menée par Jany-Catrice et Vatan, 2011.
16 Les GIR (groupes iso-ressources) 5 et 6 désignent les personnes relativement autonomes (5) qui ont besoin d’aides ponctuelles pour la toilette, la préparation des repas, l’entretien du logement, ou autonomes (6).
17 En offrant la possibilité pour les associations d’utiliser les marges de manœuvre dégagées des autres services (plus rémunérateurs) pour financer l’écart entre le coût de l’intervention (auprès des publics fragiles) et leur financement public.
18 Entretien employeur associatif B.
19 Entretien employeur associatif C.
20 Entretien avec le représentant d’une organisation patronale. Parfois, la citoyenneté est mobilisée à meilleur escient : « Et donc le maire qui était engagé dans la démarche avait fait un courrier aux personnes âgées, ça représentait 50 personnes, et leur avait dit […] : “Vous me demandez comment vous pourriez servir, et bien voilà l’occasion, en acceptant que 2 femmes viennent chez vous, vous permettez à celle qui vient habituellement d’avoir un diplôme et vous permettez à quelqu’un qui est au chômage d’avoir un diplôme, ce sera votre action citoyenne.” 49 réponses positives. » (Entretien auprès du directeur d’une entreprise d’insertion par l’économique.)
21 Ce que renforcent la précipitation et la multiplication des réglementations, qui omettent de consolider des lieux de gouvernance et de concertation ouverts socialement.
Auteurs
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