Chapitre 13. Le maquis, 1965-1966
p. 579-630
Texte intégral
1Jusqu’à présent, la lutte entre le Sawaba et le RDA, l’invasion de l’automne incluse, n’avait été tout au plus que ce qu’on appellerait aujourd’hui un « conflit de basse intensité ». Cependant, si un tel concept est utile pour analyser un état de violence chronique, il ne décrit pas de manière adéquate l’ampleur des tragédies humaines en question. Suivant l’euphémisme d’un agent de l’État, l’offensive ratée avait eu des conséquences1, la plus immédiate étant que les commandos se trouvèrent livrés à la brutalité de la milice. Des diplomates britanniques de passage rapportent que les maquisards capturés étaient remis aux autorités « souvent dans un triste état ». Du fait de leurs opinions racistes sur la culture nigérienne, ils trouvèrent cela inévitable2. Mais, envoyés après des années de préparation avec la lourde tâche d’apporter la délivrance au petit peuple et plus généralement aux talakawa, les commandos vécurent le contraste entre la marche qu’ils s’attendaient à faire sur la capitale et la froideur de l’accueil reçu avec surprise et un désespoir grandissant – même si les maquisards n’avaient pas tous été également confiants au sujet de l’invasion à laquelle ils avaient pris part. Du fait de ses propres appréhensions sécuritaires, le régime avait toujours traité la moindre provocation de façon agressive, et à présent qu’il avait « clairement eu peur3 », il laissa libre cours à toute sa fureur. L’organe gouvernemental, Le Niger, nota que Bakary avait ajouté de nouveaux ruisseaux de sang à celui déjà répandu les « 28 et 29 avril 1958 » – en référence aux émeutes de Niamey – et déclara que puisque Bakary ne comprenait que « le langage de la mitraillette », on saurait lui répondre. Il assura que « la vengeance du sang… arrive[rait] irrésistiblement », ajoutant avec dureté que le « lynchage du misérable Dan Douna n’[était] que le prologue d’une leçon qui sera[it] terrible4 ».
2Un tel châtiment était garanti par le fait que les représailles relevaient des milices du parti et des forces politisées de la gendarmerie et de la garde républicaine. Les milices étaient à la pointe des patrouilles lancées nuit et jour, passant les campagnes au peigne fin afin d’y dénicher les maquisards restants. Elles avaient reçu munitions et fusils de chasse, tandis que les comités de circonscription RDA, qui les supervisaient, rameutaient les gens contre les commandos et les sawabistes en général, acclamaient les exécutions de maquisards et appelaient le siège du parti à en exécuter d’autres5. De nombreux commandos avaient d’abord été détenus par les milices du parti qui, pour reprendre les mots d’un sawabiste, possédaient un droit de vie et de mort et malmenaient durement les maquisards capturés – comme ce fut le cas de Boubakar Djingaré dans la région de Konni. Ils mettaient aussi de façon régulière les commandos détenus dans des camions pour des tours en brousse, afin de les forcer à indiquer les caches d’armes. Bien entendu, lorsque ces derniers n’en connaissaient aucune, ou que celles qu’ils avaient montrées avaient été vidées par leurs camarades (comme ce fut le cas de Djingaré), ils pouvaient s’attendre à une punition. Après avoir été pris, Djingaré fut battu si sauvagement que tout son corps enfla6. La correspondance des diplomates britanniques de passage indique que cette maltraitance était générale. Les maquisards étaient généralement soumis à deux phases d’interrogatoire, dont la première était conduite par la gendarmerie et la garde républicaine qui, tout comme la milice, se rendirent coupables de maltraitance. Les gendarmes surtout brutalisèrent de manière systématique les commandos en détention et les sympathisants du Sawaba.
3Les exécutions cessèrent en décembre 1964 (bien qu’on rapporte qu’une femme non identifiée avait été fusillée à Say à une date inconnue). Houphouët-Boigny fit savoir à Diori qu’il pensait que de nouvelles condamnations à mort étaient imprudentes et les Français lui donnèrent sans doute des avis similaires, puisque certaines exécutions avaient causé des troubles et, à la fin de l’année, le régime avait assez réaffirmé son emprise pour ne plus avoir à en ordonner de nouvelles7. Mais les abus n’en cessèrent pas pour autant, surtout ceux qui ne pouvaient être observés. Entre la capture sur le champ de bataille et l’incarcération à Niamey, la voie était ouverte aux mauvais traitements8. Une liste des pertes du Sawaba, publiée plusieurs décennies plus tard, relève plus de 50 noms de commandos ou de militants morts durant la lutte contre le RDA. Ces personnes furent parfois victimes d’exécution ; dans beaucoup de cas, elles périrent dans les prisons, comme nous le verrons au chapitre suivant. Les circonstances dans lesquelles plusieurs autres de ces personnes trouvèrent la mort restent peu claires. Rabo Saley, le militant qui avait fait la Chine, et qui était rentré au Niger au moment des infiltrations en qualité de « chef de groupe », aurait été tué par un garde de cercle de Dan Issa, au sud de Madarounfa. On ne sait trop bien si cela s’était produit au cours des hostilités ou à la suite de son arrestation9. Siddi Abdou, qui brava ses poursuivants jusqu’à la fin, survécut miraculeusement à sa tentative de suicide et fut amené à la capitale – en souffrant terriblement comme on peut l’imaginer. Le commando de Tahoua aurait finalement péri sur une table d’opération de l’hôpital de Niamey (2 décembre 1964)10.
4Les survivants subirent des interrogatoires et furent contraints de faire des confessions. Comme nous l’avons noté dans la IIe partie, il n’était pas facile de garder le silence, étant donné les pratiques de l’interrogatoire. Les Nigériens utilisèrent les résultats à des fins politiques et laissèrent les commandos capturés dire certaines choses, qu’ils durent répéter devant les journalistes, et qui furent publiées in extenso dans les pages de l’organe gouvernemental. Dans certains cas, cette procédure fut reprise au bénéfice de correspondants de la presse occidentale. Les maquisards furent amenés à dire qu’ils avaient été trompés par leur propre leadership – qui les aurait attirés hors du pays avec des promesses de bourse – et qu’ils n’avaient découvert la nature véritable de leur instruction qu’après avoir intégré les camps d’entraînement au Ghana, en Algérie et en Extrême-Orient ; à ce stade-là, il était trop tard pour protester, puisqu’ils dépendaient du Sawaba pour leur retour en Afrique de l’Ouest11.
5Cette version des faits brouillait délibérément les pistes au sujet de l’Opération Formation des Cadres, qui avait pour but de développer une administration alternative de gens instruits, avec un rituel permettant de mettre en place une force de guérilla12. Si l’ambition personnelle a joué un rôle important dans les motivations des recrues, elles avaient été plus ou moins libres de choisir leur formation, suivant leur background, la disponibilité des places et les besoins du mouvement. Par ailleurs, dans le contexte des persécutions du RDA et des dangereuses fuites hors du pays, il avait toujours été clair que le Sawaba avait pour but général de revenir au pouvoir. Il était grotesque de prétendre que les hommes de la base n’étaient pas au courant du but de leurs voyages et de leur formation, en un déni flagrant de la haine que nombre d’entre eux nourrissaient à l’encontre du régime et de la résolution qu’ils avaient de se venger. Lors des témoignages publics, certains allèrent jusqu’à dire qu’ils n’avaient eu aucune idée de l’objectif de leur voyage de retour avant leur arrivée dans les zones d’infiltration, où on leur remit leurs armes, ou encore qu’ils n’étaient pas d’accord avec les ordres de leur chef d’unité13. Nombre d’entre eux risquaient, cependant, de longues peines de prise ou une condamnation à mort, et ils ont dû tâcher de sauver leur peau ou celle de leurs camarades et de leur famille – comme l’admettent les « confessions » de Dodo Hamballi. Ainsi, les sawabistes affirment rétrospectivement que les commandos capturés avaient parlé sous la contrainte, ou que les interrogateurs avaient simplement transcrit le contraire de ce qu’ils avaient dit lors des sessions d’interrogatoire14.
6Ces témoignages permirent au régime de présenter l’image d’aventuriers solitaires qui, non seulement avaient été trompés par leurs leaders, mais manquaient aussi de soutien et ne représentaient donc pas de larges courants de mécontentement. Le rôle joué par les milices dans leur capture permit au RDA d’indiquer qu’ils avaient été arrêtés à l’initiative du « peuple », sans intervention des autorités15. C’est ce tableau qui apparut dans les articles des journalistes occidentaux16. Les commandos en détention répétèrent humblement l’allégation de la tromperie dont ils auraient été victimes. Certains, comme Djibo Seyni, appelèrent publiquement les camarades encore en fuite à se rendre, tandis que Yacouba Issa essaya vainement d’échapper à l’exécution en qualifiant Bakary de traître17.
7L’humiliation des détenus ne se limita pas à cette auto-récusation, car le régime décida de les tourner en ridicule – chose facile à présent que l’invasion de l’automne, marquée par la capture de plusieurs membres du commandement de l’organisation, avait échouée : les hommes qui portaient les espoirs du Sawaba furent exhibés emmenottés devant les journalistes et l’organe gouvernemental les traita bien entendu de « terroristes », mais aussi d’une « poignée d’imbéciles » dont le professionnalisme était sujet à caution. Si ces « faux-boursiers » et ces « jeunes hallucinés » s’étaient laissés berner au point de devenir des « guerriers hésitants », les « tonnes de gris-gris » qu’ils avaient porté sur eux (en signe de leurs superstitions primitives) n’avaient pas empêché leur capture par des femmes, ni n’avaient protégé ces « idiots » au poteau d’exécution18.
La contre-offensive de la ligue franco-RDA
8En dehors de la tragédie de ces destinées individuelles, le régime entreprit diverses opérations offensives. L’élément d’importance à cet égard était l’arrestation de cadres domestiques, qui prit à présent d’énormes proportions. Nous avons vu, au chapitre précédent, qu’au cours de l’invasion déjà, plusieurs centaines de personnes avaient été raflées et jetées dans des camps d’internement de fortune. Illa Salifou passa quelque temps dans un site de la zone industrielle de la capitale, où il dormit par terre, en plein air. La nourriture devait être apportée de l’extérieur. Limane Kaoumi (photo 13.1), le fabricant de meuble qui avait atterri dans la prison de Zinder après la capture de Hamballi, se trouvait en compagnie d’environ 800 hommes, estimation confirmée par le militant zindérois Oumarou Janba, arrêté vers la même époque19. En février 1965, Joseph Akouété, chargé du transfert des maquisards au Dahomey, s’inquiétait de ce que l’organisation ne se disloque complètement, puisque de nombreux sawabistes de l’intérieur avaient, à ce stade, abandonné leur « poste20 ».
Photo 13.1 – Limane Kaoumi, Diffa, 2006.
9Le réveil fut rude pour les militants de l’intérieur, d’autant plus que nombre d’entre eux n’étaient pas au courant de l’arrivée imminente des commandos. Maman Tchila, appréhendé lors de l’invasion, fut stupéfait d’apprendre que des maquisards armés avaient franchi les frontières. L’ancien conseiller municipal de Zinder, dont c’était là la troisième arrestation, fut amené à Niamey, puis à Say, puis de nouveau dans la capitale, pieds et poings liés durant tout ce temps. L’arrestation était motivée par l’accusation de sawabisme, et ne donnait pas droit à un avocat. D’autres militants, comme Tahir Moustapha et Ousseini Dandagoye de Zinder, subirent un sort similaire21. En décembre 1964, l’ancien ministre Sawaba Adamou Assane Mayaki fut placé en détention, bien qu’il se soit trouvé en formation en France au moment de l’invasion. Le fils de Baoua Souley, à Dosso, échappa à l’arrestation en couchant dans des maisons différentes et sûres. Abdou Ali Tazard, l’enseignant sawabiste de Tessaoua qui avait fait la paix avec le régime, évita de se retrouver encore en prison, mais au prix d’affectations continuelles à de nouveaux postes d’enseignement (neuf sur une période de trois mois seulement). De même, Monique Hadiza, la femme de Hima Dembélé, fut affectée d’un ministère à un poste à Tahoua22.
10La surveillance des groupes sawabistes devenait extrême – les Français mentionnent des « mesures sévères23 ». Déjà, au cours de l’automne 1964, des officiels de Magaria faisaient le tour des villages qui se trouvaient à la frontière du Nigeria, vérifiant la vigilance du chef de canton et du comité de parti. On arrêta des paysans de la région de Doguéraoua, près de Konni, éliminant ainsi une cellule qui avait aidé à l’infiltration des unités commando. À Tessaoua, Malam Amadou Sanoussi, un marabout nyassite et trois de ses fidèles, furent jetés en prison, tout comme Zakari Bila, un maçon du cru. Plus tard, en février 1965, les autorités prirent un suspect (peut-être un commando) à la frontière voltaïque et réagirent par la mise en place d’un « rideau » sécuritaire le long de la frontière. À quelques mois de là, un homme de Matamey fut détenu uniquement parce qu’il portait un document Sawaba, et la police reçut l’ordre de faire attention à toute personne portant un boubou ou un bonnet bleu, couleur de l’ennemi24. La paranoïa s’installa. Il y avait eu, plus tôt, une alerte dans les régions de Madaoua et de Dakoro concernant d’éventuels dangers qui s’avérèrent n’avoir rien à voir avec les infiltrations du Sawaba25. On suggéra de purger l’administration au niveau de Konni. Les travailleurs migrants circulant entre le Niger et le littoral étaient à présent retenus et questionnés en longueur, on arrêta et tortura des chefs de familles connues pour avoir des membres sawabistes26 et, à Maradi, un cambrioleur fut pris à la suite d’une alerte publique sur un « sawabiste » en fuite – le criminel malchanceux reconnaissant son délit afin d’échapper au pire27. Des oreilles indiscrètes captèrent des remarques au sujet de ressentiments à Maïné-Soroa de la part d’un délégué, lors d’une réception au palais présidentiel, et à Dosso, un postulant à un poste de la fonction publique essaya d’avoir le dessus sur un rival en insinuant qu’il avait des liens avec le Sawaba – pratique qui devint fort répandue28.
11Cette surveillance prit une forme bien plus brute dans les campagnes. La gendarmerie effectua des raids au cours desquels des villages entiers auraient été anéantis – vidés de leurs habitants, accusés de sympathies sawabistes, tués ou fuyant la persécution (souvent en passant au Nigeria). Il est difficile de trouver des preuves à ce sujet, puisque ces choses arrivaient dans le cadre d’opérations secrètes29, mais la terreur exercée dans les régions Ouest au cours de l’invasion indique la nature violente de ces actions. Les habitants de Soudouré, et en particulier la famille de Djibo Bakary, étaient terrifiés. Ils furent délaissés par des gens qui craignaient d’être perçus comme étant proches d’eux, et ils subirent des fouilles destinées à trouver des armes. Les femmes – tous les hommes avaient fui – furent battues par la police, leurs cases furent saccagées et leurs biens détruits30. À Gothèye et Bandio également, les gendarmes apparurent, forçant, par exemple, Djibo Harouna (dont le père était sawabiste) et Djibo Foulan, le marabout paysan qui avait été au Nord Vietnam, à révéler des caches d’arme (photos 13.2 et 13.3). Harouna ne put leur donner satisfaction et la concession familiale fut mise sous surveillance31.
Photo 13.2 – Djibo Harouna, Gothèye, 2005.
Photo 13.3 – Djibo Foulan, Bandio, 2005.
Photo 13.4 – Zongo Hima, sœur cadette de Djibo Bakary, Soudouré, 2008.
12Les autorités portèrent aussi leur offensive au-delà des frontières du pays. Au plus fort des infiltrations, Diamballa Maïga envoya le capitaine Badié en mission au Dahomey et au Ghana, sans en informer Diori. L’implacable chef de la gendarmerie voyagea avec des faux papiers sur Porto Novo, où il devait localiser le siège du Sawaba. Il continua de là sur Cotonou où la police mit un terme à ses efforts, le forçant à abandonner sa voiture, son chauffeur et la documentation recueillie (y compris sur l’armée dahoméenne). Badié poursuivit sa route jusqu’au Ghana où il localisa le camp de Half-Assini, peut-être avec l’aide de Nigériens, dont un membre de l’armée ghanéenne. Avertis de sa présence par le président du Dahomey, Bakary et les autorités ghanéennes soutinrent que Badié était venu assassiner des leaders du Sawaba, accusation qui ne peut être complètement rejetée étant donné le contexte de l’invasion, et au vu de la manière dont Daouda Ardaly avait perdu la vie. Badié fut recherché mais réussit à se réfugier à l’ambassade de Haute-Volta à Accra, d’où sa fuite sur Ouagadougou put être organisée32.
13Dans sa contre-offensive, le régime reçut beaucoup d’aide de la part des Français, des Ivoiriens et de quelques autres pays – au plan diplomatique, militaire, ainsi que pour la collecte d’informations. Au printemps 1965, en réponse à l’évolution de la situation, Abidjan envoya des spécialistes du renseignement pour aider à interroger les maquisards33. Des policiers voltaïques prirent également part à la chose, et des commissaires de police furent envoyés dans ce but34. Le soutien de ces deux pays fut applaudi35. En décembre 1964, le leadership du Sawaba affirma aussi que des Israéliens participaient à l’interrogatoire des commandos, mentionnant des goumiers supervisés par des officiers venus de Tel-Aviv. Si Djibo Sékou, le syndicaliste du Sawaba, répéta plus tard, dans ses souvenirs, les mêmes allégations, la participation israélienne ne peut être confirmée en dehors de la formation aux techniques de l’interrogatoire donnée aux miliciens – non aux forces de police36.
14Nous avons vu, au chapitre 11, que peu de temps avant l’invasion, le régime avait obtenu une quantité appréciable de matériel de la part de la France, de la Belgique et d’Israël. Au fur et à mesure que les infiltrations prenaient de l’ampleur, les Français augmentaient leurs livraisons d’armes. Dans une lettre au ministre français de la Coopération, Tréca, l’ambassadeur en poste à Niamey, appuya les demandes adressées par Diori en vue de renforcer la gendarmerie, ajoutant que « les récentes manifestations de la subversion Sawaba plaid[aient] également en faveur d’un accroissement des Forces armées nigériennes et des forces de police ». La mission militaire de l’ambassade et le quartier général de l’armée française à Abidjan approuvèrent une demande nigérienne visant à obtenir 250 nouvelles armes et 12 « power wagons37 ». À la fin de 1964, un appareil du gouvernement nigérien atterrit à Liège, en Belgique, et retourna au Niger avec six tonnes de fret, pour la plupart des munitions calibre 7,56 mm de l’OTAN, des fusils de chasse et des pistolets automatiques Herstal38. En plus des plans d’expansion de la garde républicaine et de la gendarmerie, la décision fut prise d’étoffer les effectifs de l’armée. Les Français notèrent que l’invasion avait eu un impact négatif sur les FAN. Ces dernières avaient été forcées de succéder aux unités françaises – qui venaient de se retirer des avant-postes sahariens – au moment même où elles avaient dû affronter les infiltrations du Sawaba au sud et à l’ouest. Bien que ceci ait mené à la dislocation d’unités de l’armée, le général français Revol, commandant de la Zone d’outre-mer no 4, estima que, dans l’ensemble, elle s’était bien acquittée de sa tâche39.
15Néanmoins, les Français montrèrent clairement qu’ils n’entendaient pas laisser les Nigériens faire face, seuls, aux risques sécuritaires. Le soutien moral était crucial pour un régime comme celui du RDA, qui était si peu sûr de lui-même au plan psychologique. Dès la mi-novembre 1964, un envoyé était venu de Paris pour « un entretien très amical » avec Diori. En décembre, après que les forces françaises aient parachevé leur retrait d’Agadez, Tréca assura le gouvernement que les accords d’assistance militaire restaient en place et que « la France, quelle que soit la nouvelle implantation de son dispositif militaire, demeur[ait] aux côtés [du Niger] pour prêter aide et assistance à la défense de la République… ». À cet effet, elle établirait un bureau d’assistance militaire à l’intérieur de l’ambassade, à Niamey40. En fait, le soutien de la métropole provenait du sommet, comme on peut le juger par la présence de Jacques Foccart aux festivités du 18 décembre, au cours desquelles le général Revol fut décoré de Grand-Croix de l’Ordre national nigérien, tout comme un homme et une femme qui reçurent les honneurs de la capture de Sallé Dan Koulou41.
16Fait révélateur, cinq civils français travaillant dans l’administration nigérienne démissionnèrent pour protester contre les mesures prises à l’encontre des sawabistes42, ce qui n’empêcha pas, cependant, le gouvernement français d’aider à persécuter les militants du mouvement. Comme nous l’avons vu dans la IIe partie, après l’africanisation de la Sûreté, plusieurs de ses agents français étaient passés au BCL. Colombani, Clément, Cousin et Fromant y travaillaient toujours, avec l’assistance de Péraldi à la Sûreté. Début décembre, quatre agents de la police française « supplémentaire » arrivèrent en qualité de conseillers techniques du directeur de la Sûreté, Boubakar Moussa, le demi-frère de Diori. Ils furent immédiatement détachés au BCL où ils participèrent à l’interrogatoire des sawabistes et aidèrent à la rédaction des rapports d’interrogatoire43. Le BCL rendait compte à la présidence et se trouvait en fait à l’intérieur du complexe présidentiel, constitué de plusieurs bâtiments situés de part et d’autre d’une rue. Le bureau de Diori se trouvait d’un côté de cette voie ; de l’autre côté, il y avait une entrée donnant accès à un ensemble de bâtiments : le palais présidentiel à gauche et, à droite, séparés par un parking, la résidence de la famille Diori ainsi qu’un bâtiment dévolu au BCL, plus proche de la rue. Ce bâtiment avait plusieurs pièces (pas vraiment des cellules) et, de l’autre côté d’un couloir, des bureaux. Les commandos étaient incarcérés dans ces salles ou pièces, où ils vivaient et dormaient tant qu’ils étaient interrogés. Les interrogatoires avaient lieu dans des pièces – sept ou huit – sur la gauche, du côté donnant sur la demeure de Diori44.
17Les séances de la Sûreté-BCL constituaient la seconde phase des interrogatoires, après l’étape de la gendarmerie ou de la garde républicaine. Elles visaient à perfectionner le tableau des renseignements. Les questions cherchaient à établir les faits dans leurs détails les plus infimes (noms des coéquipiers, infiltrations, existence de cellules, réseaux, caches d’armes, leur emplacement, etc.45). Des goumiers, relevant d’unités paramilitaires, étaient présents pour administrer des bastonnades, ou étaient appelés à cet effet par Jean Colombani ou ses collègues. Les agents français ne participaient pas directement aux bastonnades mais donnaient ordre de les administrer lorsqu’ils jugeaient qu’un détenu n’était pas suffisamment coopératif. Il arrivait que les prisonniers soient fouettés avant l’interrogatoire, afin de les « assouplir ». L’officier français en charge de la séance quittait parfois la pièce lors des bastonnades infligées par un ou plusieurs goumiers. D’autres fois, Colombani et ses hommes restaient sur place, installés autour d’une table ronde, tandis que les « récalcitrants » se faisaient étriller. Dans les cellules, les détenus pouvaient entendre les hurlements de leurs camarades46.
18Si ces bastonnades semblent avoir été courantes, la simple menace de mauvais traitements ou de refus d’administrer des soins médicaux encouragea nombre des prisonniers à satisfaire leurs interrogateurs. Par exemple, on refusa des soins à Boubakar Djingaré, qui souffrait de ses tuméfactions (bien qu’il ait peut-être reçu par la suite quelque traitement). Il donna à ses interrogateurs des informations sur son histoire personnelle. Ces derniers – Georges Clément ainsi que Colombani lui-même – affirmèrent qu’il savait quelque chose et le pressèrent de parler. Le maçon de Niamey, dont le témoignage ultérieur indique qu’il a peut-être tout de même été battu, n’aurait donné aucun détail sur les infiltrations de l’unité de Konni. Si cela est exact, il est possible qu’il ait adopté l’attitude d’ignorance prétendue et de réponses évasives qui marque de nombreux rapports d’interrogatoire publiés dans l’organe gouvernemental47. De même, Ali Mahamane Madaouki, le commando du secteur de Magaria, craignant d’être fourré dans un sac et jeté au fleuve, cacha à Colombani le fait qu’il avait reçu mission de collecter du renseignement (y compris en prenant des notes), assurant n’avoir pas été à l’école et n’être qu’un pauvre cordonnier48.
19Avec leur expérience dans ce domaine, les Français se rendaient bien entendu compte de ces tactiques d’évitement et insistaient jusqu’à obtenir satisfaction. Il semble que les agents du BCL détenaient suffisamment d’informations pour compliquer la tâche de tout détenu tenté d’avancer quelque chose de complètement absurde. Il était donc inévitable que les détenus parlent et mentionnent des militants qu’ils connaissaient49. Des menaces explicites ou implicites pouvaient toujours être utilisées pour obtenir plus de détails de la part des interrogés. Par exemple, le commando de Dargol, « Yayé », ne reçut pas de coups, mais tout mauvais traitement était rendu superflu par le fait que sa famille entière avait été arrêtée et son oncle avait été battu à mort ; les officiers français prirent bonne note de ses réponses50. Soumana Idrissa, membre de l’unité « El Mali », fut assoupli de manière plus explicite. Aux premiers jours de sa détention, il y eut une réunion de haut niveau entre officiels du RDA au sein du complexe présidentiel. On y débattit de la question de savoir s’il fallait procéder à de nouvelles exécutions. On suspendit les interrogatoires afin d’éviter que les hurlements des sawabistes ne dérangent le leadership51. La question de nouvelles condamnations à mort suscita un désaccord, mais Diori, qui s’apprêtait à se rendre en visite à Abidjan, conclut la réunion en interdisant les exécutions. Après la rencontre, Clément, dans un accès de cynisme, dit à Soumana Idrissa, qu’il avait de la chance dans son malheur. Il lui montra des feuilles de papier et lui dit que chacune d’entre elles représentait cinq ans d’emprisonnement pour toute mauvaise réponse. Comme Daouda Hamadou, Idrissa ne subit pas de violences physiques, peut-être parce qu’il n’avait pas, lui non plus, été pris en territoire nigérien, mais avait fini par être extradé par les autorités maliennes (voir plus loin). Il n’empêche, son interrogatoire aurait duré quatre jours et quatre nuits, ce qui n’a pas dû être une partie de plaisir52.
20Si Idrissa lui-même n’a pas été battu, certains de ses camarades le furent – sur ordre de Clément. Certains auraient été battus à mort, bien qu’il est douteux qu’une telle chose se soit produite à ce stade (voir plus loin). Cela est, en tout cas, difficile à vérifier53 et aurait signifié une défaillance dans le processus de collecte d’informations, en particulier dans le cadre marqué de professionnalisme du BCL. Il existe un témoignage sur la torture de Dan Boula Sanda Makamari, et bien qu’on ne sache pas à quel moment la chose se produisit, le BCL y était probablement impliqué, puisque Makamari a dû être interrogé sur son entraînement en Chine. De ces séances, il aurait reçu des cicatrices indélébiles54. Par contraste, Jean Colombani lui-même se comportait parfois avec magnanimité afin d’amener les détenus à le satisfaire de leur plein gré55. Néanmoins, même les officiels du régime ne se sont pas montrés désireux, rétrospectivement parlant, de contester le fait que les interrogatoires étaient assortis de mauvais traitements56.
21Comme nous l’avons noté, les commandos n’étaient pas seuls à atterrir à la présidence. Il y eut aussi des militants de l’intérieur comme Maman Tchila et Gonimi Boukar – ce dernier avait fait la paix avec le RDA mais fut interrogé malgré tout. De même, des étudiants Sawaba du Bloc de l’Est firent connaissance avec le BCL. Tahirou Maïga, l’étudiant en géologie d’Union soviétique, passa deux semaines dans une pièce du complexe présidentiel à son retour57. Après le séjour dans les locaux du BCL-Sûreté, les maquisards étaient détenus de façon plus permanente dans les prisons de la capitale, y compris la Prison Civile du quartier Terminus. Mais comme celles-ci ne pouvaient faire face à l’afflux de détenus, le régime eut aussi recours à des écoles et à des camps militaires, comme le Camp Bano, à la périphérie est de la capitale. De nombreux militants de l’intérieur, qui n’avaient pas été impliqués dans les opérations commando, y furent amenés, bien que certains commandos, comme Mounkaila Albagna, se rappelèrent plus tard y être passés également. Souvent, les commandos étaient cependant aussitôt enfermés au nouveau siège de la police (où les agents de la police judiciaire officiaient), près de l’Assemblée nationale. Une période de détention indéfinie commençait58.
Pays ennemi59
22Comme l’a montré la mission de Badié, l’invasion ratée eut un impact sur l’hinterland. Par exemple, au Nord Nigeria, la liberté d’action du Sawaba avait toujours considérablement dépendu des complexités du système politique nigérian, dont les autorités concurrentes aux niveaux fédéral et régional – qui ne se souciaient guère des affaires intérieures du Niger – avaient offert une marge de manœuvre. Cependant, nous avons vu, au chapitre précédent, que les évènements de 1964 avaient poussé les Nigérians à passer à l’action contre les sawabistes sur leur territoire. Cela ne présentait pas de difficultés au plan politique, étant donné que les hommes de Bakary étaient alliés à l’opposition locale, la NEPU, dont l’existence au Nord Nigéria était à peine tolérée60. Du coup, avant même le début de l’invasion des commandos, plusieurs sawabistes du Nord Nigéria avaient été arrêtés puisque la capture de Dodo Hamballi et Malam Karégamba avait mené à la découverte de bases et de cellules.
23Au début, Diori s’était montré irrité de ce qui lui apparaissait comme la responsabilité du Nigeria au sujet de l’existence, sur son territoire, de cellules et de dépôts d’armes, et à l’égard de la facilité avec laquelle les commandos pouvaient franchir la frontière. Il menaça les autorités fédérales d’une action à l’OUA (« c’était plutôt dur », selon les diplomates britanniques). Même le premier-ministre du Nord Nigeria, le Sardauna de Sokoto, n’échappa apparemment pas à la critique61. Le Niger put ainsi faire pression et Diori, qui évita ensuite adroitement toute nouvelle critique à l’égard du Sardauna (avec qui il garda en fait des liens chaleureux), dépêcha un cadre supérieur et le consul du Niger à Kano auprès de Ahmadu Bello pour des échanges62. Diamballa Maïga était bien conscient du fait que l’implication du Nigeria dérivait essentiellement de la nature de son système politique – chose que les officiels moins gradés du RDA avaient du mal à saisir – et il considéra qu’une mission nigérienne au Nord Nigeria serait un moyen efficace de traiter le problème63. Par conséquent, Diori se rendit lui-même dans la région, visitant Maiduguri, dans le Nord-Est, pour l’inauguration du prolongement de la voie ferrée du Bornou, et continuant sur Kaduna pour discuter avec le Sardauna. Ce dernier fit de son mieux pour satisfaire les Nigériens et le Nigeria n’épargna pas ses efforts pour démontrer son intention de coopérer. L’ambassade de Grande-Bretagne à Abidjan apporta son aide en contactant Londres au sujet des versements d’argent au Sawaba, après la découverte du compte bancaire de Sallé Dan Koulou à Kano, et la CIA intervint, paraît-il, dans le même sens64.
24De façon plus directe, les Nigérians s’en prirent aux cellules du Sawaba dans la région nord, arrêtant les militants pour déportation au Niger – même ceux qui avaient la nationalité nigériane – et plus généralement, chassant les Nigériens ayant un background sawabiste. C’est ainsi que Dan Kané, un sawabiste de « Tibir » (vers Dogondoutchi ou le Tibiri de Maradi) ne vit d’autre choix que de rentrer et de se rendre. Il avait fui le Niger lors de l’arrestation de Malam Karégamba. Karégamba lui-même a peut-être quitté le Nigeria avant sa capture, comme le suggère un communiqué du Sawaba qui affirme que, bien qu’agent dans l’administration de Maradi, il était Nigérian de naissance. Pour les Nigérians, il s’agissait là clairement de se venger aussi de la NEPU. Étant donné le fait que la propagande du parti avait des tendances à l’hyperbole, on ne saurait dire combien de ses militants furent touchés, mais ils subissaient des harcèlements toujours plus sérieux les années d’élections. La NEPU parle de « milliers » de gens pris dans la mêlée à Sokoto, Katsina, Kano, Zaria et Gusau, des fiefs typiques de la NEPU/Sawaba65. En novembre 1964, les services français rapportent que les autorités de Kano et Sokoto avaient arrêté de nombreuses personnes soupçonnées d’aider le Sawaba (y compris un gendarme en fuite). Elles furent livrées au régime nigérien dont les propres services de renseignement renforcèrent leurs activités à l’intérieur du Nigeria, signalant, par exemple, la présence possible, à Kano, de Boukari Karemi dit Kokino, l’homme du Sawaba à Tamanrasset, ainsi que celle de plusieurs autres66.
25À la fin de 1964 le Sardauna ordonna personnellement une opération mettant fin au trafic d’armes dans la région du Bornou (comme nous l’avons vu, les militants de la NEPU étaient profondément impliqués dans cette affaire pour le compte du Sawaba), et plusieurs actions furent montées par les militaires pour essayer de capturer les suspects cachés par les villageois du Nigeria et s’étant échappés au travers de la frontière. Des renforts furent envoyés à la police des frontières et les forces de sécurité nigérianes intensifièrent les patrouilles. En novembre, les Français rapportent que les « opérations de nettoyage » se poursuivaient dans l’est du Niger67 ; cet euphémisme renvoyait aussi aux opérations conjointes que commençaient à présent à mener les forces nigériennes et nigérianes. Nous avons vu, au chapitre précédent, comment les attaques de l’unité de Aba Kaka amenèrent les militaires nigériens à franchir la frontière. En général les autorités nigérianes étaient au courant de ce genre d’actions, mais elles pouvaient être particulièrement brutales, causant des tensions au sein de la population nigériane68. Lors de ces chasses à l’homme, il arrivait que les militaires mettent le feu à la savane, et ils descendirent une fois sur un hameau nigérian où ils pensaient trouver Kaka lui-même69. Ils menacèrent le chef de brûler le village s’il ne les aidait pas. Les villageois avertirent les autorités de Maiduguri et des soldats nigérians se hâtèrent d’arriver. On ordonna aux habitants de se rassembler hors des cases, puis Nigériens et Nigérians fouillèrent les lieux70. Les Nigérians renforcèrent aussi leurs capacités en termes de renseignement, plaçant des espions dans des endroits comme Maiduguri et Gashua pour rester à l’affût des mouvements de commandos, et offrant des primes à ceux qui pouvaient les livrer aux autorités. Plusieurs membres d’une unité commando furent arrêtés de cette façon en février 1965, après une nouvelle attaque dans le secteur de Bosso (voir plus loin71).
26L’arrestation d’un suspect du Sawaba, ce même mois, sur la frontière voltaïque, montre que cet hinterland-là était lui aussi devenu peu sûr. Après les menaces d’action militaire de Bakary, le gouvernement de la Haute-Volta avait coopéré avec le RDA à tous les niveaux. Le Sawaba allégua que les forces voltaïques opéraient en territoire nigérien et qu’au moins deux dizaines de Nigériens avaient été extradées sur Niamey, y compris Oumarou Kif Amadou, son contact malien de Botou, jugé par la Cour de sûreté en novembre 196472. Ainsi, vers la fin de l’année déjà, les diplomates britanniques rapportent que la frontière voltaïque avait été fermée de façon à éviter toute nouvelle infiltration73. La coopération voltaïque s’étendit aussi à la sphère diplomatique, où le réseau de l’Entente fournissait un forum. Yaméogo vit Diori et Houphouët lors d’une rencontre à Abidjan, à la mi-novembre. Ils y discutèrent de l’invasion commando, de la complicité des gouvernements dahoméen et ghanéen et du rôle des Chinois dans le financement des opérations du Sawaba. Ils s’inquiétèrent de la décision dahoméenne de nouer des rapports diplomatiques avec la République populaire et considérèrent l’idée d’une plainte contre le Dahomey et le Ghana à l’OUA. Les alliés s’entendirent pour coordonner leurs actions à l’endroit du Ghana et Abidjan initia le projet de rapprocher les Dahoméens de l’Entente74.
27Les alliés se retrouvèrent de nouveau à Ouagadougou, en décembre, puis encore à Abidjan, à la mi-janvier. À cette occasion, Diori rendit hommage à ses alliés. Pour la première fois, le vice-président du Dahomey, Justin Ahomadegbé, était également présent. Les Togolais, dans le même temps, exprimèrent de l’intérêt pour l’Entente. Le gouvernement du Togo n’avait jamais soutenu le Sawaba, comme nous l’avons vu – bien que le président Grunitzky ait sans succès essayé d’organiser un rapprochement entre les ennemis jurés nigériens, et que Joseph Akouété ait maintenu des liens avec la présidence : il fut en fait reçu par Grunitzky peu avant l’invasion (en septembre 1964) et rencontra son directeur du cabinet en novembre. Si donc l’attitude des Togolais fut hésitante – afin peut-être d’isoler le régime dahoméen, les Français essayèrent de les dissuader d’offrir leur médiation dans les mauvais rapports entre le chef de l’État dahoméen et son vice-président – ils finirent par se décider en faveur du RDA. Le fait que des figures de l’opposition togolaise avaient, au moins par le passé, flirté avec les militants de Bakary a pu jouer un rôle. Au cours du deuxième mois des infiltrations, la police togolaise saisit des munitions et des documents auprès de sympathisants du Sawaba, et, vers la même époque, Grunitzky fit une courte escale à Niamey lors d’un voyage en Allemagne fédérale. Pour le séparer de ses ennemis, Bakary avait auparavant informé Grunitzky que le capitaine Badié avait été envoyé au Togo pour tuer des militants du Sawaba, appuyant ses allégations avec des photos du chef de la gendarmerie en uniforme et en civil. Le dirigeant togolais fit savoir, en réponse, qu’il soutenait le gouvernement du Niger mais ne permettrait aucune action en territoire togolais. En décembre 1964, Bakary contacta le ministre togolais de l’Intérieur pour lui demander de ne pas poser d’obstacle au passage de nouveaux commandos. Mais il n’avait toujours pas obtenu d’autorisation au mois de janvier, et, en février 1965, se montrait inquiet au sujet des mesures concertées de surveillance adoptées par les ambassades de l’Entente75.
28Pire, le mouvement était sur le point de perdre ses zones de base au Mali. Comme nous l’avons noté dans les chapitres précédents, la realpolitik avait amené le gouvernement malien à soutenir Bakary avec plus de circonspection, manœuvrant entre le fait d’aider un mouvement auquel il était apparenté par militantisme et la poursuite de l’amélioration des rapports avec les États voisins. Tout en se tenant à l’écart de leur posture pro-française, il se devait d’avoir de meilleures relations avec eux, pour des raisons économiques et sécuritaires. L’intransigeance de Niamey à l’égard de Bakary rendait impossible toute trahison des camarades militants du Niger. Ces intérêts contradictoires avaient créé une situation amenant les Maliens à n’offrir qu’une assistance discrète, tolérant la présence des commandos dans la région de Gao s’ils faisaient profil bas – ce qui signifiait que les armes devaient rester dans leurs cachettes durant leur passage en territoire malien. L’échec de l’invasion facilita cependant l’abandon du Sawaba, chose devenue d’autant plus urgente qu’une situation de famine forçait Bamako à demander des importations de nourriture au Niger76.
29Si la contrepartie stipulée par Niamey n’avait rien de surprenant, le réveil fut rude pour les hommes du Sawaba. Les commandos qui s’étaient retirés en territoire malien découvrirent que cet hinterland n’était plus sûr. Dès la fin octobre 1964, deux militants de la zone de Ménaka étaient pris par les autorités et transférés sur la gendarmerie de Gao77. Soumana Idrissa et ses compagnons Souley Gonni et Mohamadou Ayouba ayant regagné le territoire malien après l’accrochage des environs de Ayorou, furent attrapés par des nomades peuls et amenés à la police de Labézanga-Ouatagouna. Dans l’intervalle, la police nigérienne, qui était à leurs trousses, avait franchi la frontière mais fut requise par les Maliens de rebrousser chemin, tandis que les commandos du Sawaba étaient transférés à Ansongo et finalement à la gendarmerie de Gao. Après avoir passé environ trois ou quatre mois en détention (cela devait être au début de 1965), ils furent amenés au poste frontière de Labézanga. Le Niger avait fourni aux Maliens une liste de commandos et de militants qui devaient leur être livrés en échange de l’aide alimentaire, et Idrissa et ses amis furent remis à la police nigérienne78.
30À une semaine du nouvel an, dix sawabistes furent de même arrêtés par les services de sécurité du Mali, et il fut annoncé qu’ils seraient livrés au Niger. Deux semaines plus tard, en janvier 1965, les Maliens s’apprêtaient à extrader sept sawabistes (contre 70 tonnes de mil), parmi lesquels se trouvait un commando non-identifié qui était qualifié de commandant de la Zone Nord79. Puisque le réseau d’infiltration Nord du Sawaba n’a pas joué de rôle dans l’invasion, le rapport français sur cet épisode porte peut-être sur Idrissa Arfou, l’un des commandants de la Zone Ouest qui s’était retiré au Mali après l’attaque ratée de la région de Téra. Ainsi, dans une autre missive, les services français rapportent que les « Nigériens illégaux » emprisonnés à la veille du nouvel an représentaient probablement le reste de l’unité qui avait opéré dans le secteur de Téra80. Daouda Hamadou, un membre de l’unité de Arfou et de Albagna, a dû faire partie du groupe. Le tailleur maquisard entraîné en Algérie avait pu retourner à Tessit mais fut averti du fait que le RDA avait mis le Mali dans sa poche, sur quoi il s’enfuit sur Ansongo – il y connaissait un fonctionnaire qui lui demanda, ainsi qu’à ses camarades, de rester sur place. Au bout d’un moment, ils furent arrêtés. Leur détention à Ansongo dura une semaine, après quoi ils furent amenés à Labézanga et remis aux Nigériens, peut-être le 24 janvier. Ali Issaka, le coéquipier de Hamadou lors des heurts de Téra, et formé également à Marnia, fut plus chanceux. Après un bref séjour en prison, il fut libéré par les Maliens et gagna le Ghana (photo 13.5)81.
Photo 13.5 – Ali Issaka, Niamey, 2008.
31Pour les autres, le transfert au Niger signalait le début d’un long calvaire. Soumana Idrissa se rappellera plus tard qu’il fut menotté et jeté dans un camion en compagnie de huit autres personnes puis amené en convoi jusqu’à la capitale ; en route, le prisonnier de Gothèye demanda la permission de se soulager, mais les policiers lui dirent qu’il n’avait qu’à mouiller son pantalon. À l’arrivée au palais présidentiel, Idrissa rencontra Idrissa Arfou, le commandant de la Zone Ouest, déjà en détention82. On peut douter que les Maliens se souciaient vraiment du sort de leurs amis politiques puisque leur nouvelle approche les amenait même à envisager de s’opposer aux Chinois à propos de l’aide qu’ils avaient apportée au Sawaba. L’ambassadeur du Mali à Abidjan rapporta ainsi à Bamako les liens entre le mouvement et la République populaire. Il est peu probable que le Mali n’ait pas été au courant de ces liens, mais il avait peut-être plus conscience, à présent, des risques représentés par le fait d’avoir des guérilleros sur son territoire : Modibo Keita convoqua l’ambassadeur chinois et l’avertit que toutes relations entre les deux pays seraient rompues au cas où le Mali subirait des attaques similaires à celles qui avaient visé le Niger. En janvier 1965, il dépêcha des émissaires en Haute-Volta, et si le sujet des échanges qu’ils y eurent demeure inconnu, le fait inquiéta clairement Djibo Bakary, qui décida de rester au Ghana pour le moment, au lieu de se rendre à Bamako comme il en avait eu l’intention83. En mars, le Mali alla un peu plus loin et envoya à Niamey une délégation qui assura le RDA qu’il n’accepterait plus la mise en œuvre d’actes de subversion depuis son territoire84.
32Il ne restait plus d’intact que l’hinterland du Dahomey. Bien que les Dahoméens commençaient, eux aussi, à émettre des signaux critiques, la nature chaotique de leur administration (marquée aussi bien par des querelles de leadership que par des tensions entre nord et sud) signifiait que le Sawaba pouvait y préserver ses zones de base. Les documents trouvés sur un maquisard de l’invasion de l’automne avaient, cependant, révélé à Niamey l’existence du centre de commandement de Porto Novo, ce qui conduisit à une conversation téléphonique entre Diori et Ahomadegbé qui ne servit qu’à aigrir le ton des échanges. Tréca conseilla à Diori de ne pas rompre les relations, mais à la mi-octobre, le Niger envoya une note de protestation à Cotonou et des troupes furent envoyées aux frontières – reproduisant les tensions de l’année précédente. Les médias commencèrent un nouveau cycle de récriminations. Vers cette époque, Ahomadegbé offrit de fermer la frontière en manière de conciliation, mais cela n’aboutit pas à grand-chose, puisque de nouveaux événements menèrent à de nouvelles tensions. Chabi Mama, un politicien du Dahomey qui avait été emprisonné à la suite de troubles ethniques à Parakou au printemps, se serait échappé et aurait rejoint les hommes du Sawaba. En novembre, les services français parlent de l’arrivée au Dahomey de Sallé Karma, sawabiste de Gothèye envoyé par Bakary avec de nouvelles instructions probablement destinées à Ousmane Dan Galadima85.
33Durant cette période, l’envoyé de Paris qui était venu à Niamey se rendit à Cotonou pour des discussions. Selon la rumeur, la Sûreté dahoméenne était sur le point d’arrêter le frère de Diamballa Maïga, qui faisait du commerce de bétail dans le pays, tandis que les autorités nigériennes rapportaient l’infiltration d’une unité de maquisards dans le secteur de Gaya. Elles affirmèrent que les maquisards étaient venus du Dahomey, tout comme cela aurait été le cas des unités des régions de Say, Dogondoutchi et (bizarrement) Konni. Le président Apithy nia toute complicité. Diori, cependant, exigea des assurances formelles à cet effet. Lors de la réunion de l’Entente à Abidjan, il dit à ses alliés qu’il n’avait pas été impressionné par une déclaration du vice-président Ahomadegbé à propos de troubles récents et mit ouvertement en question la sincérité de ses démentis86.
34Pourtant, vers la fin 1964, le ministre nigérien des Finances se rendit à Cotonou pour des discussions et les ouvertures de Houphouët au Dahomey aboutirent à une rencontre avec le chef de l’armée du pays, qui se mit à plaider un retour dans l’Entente. Les services français rapportent que les Dahoméens étaient prêts à neutraliser les maquisards sur leur territoire. Tout en admettant que certains fonctionnaires s’étaient prêtés à leurs opérations, ils nièrent en avoir eu quelque connaissance préalable que ce fut. Néanmoins, si Bakary s’inquiétait, en février 1965, du rapprochement entre le Dahomey et l’Entente, on rapporta aussi que le gouvernement était prêt à permettre le passage de nouvelles unités de commandos, pourvu que cela se fasse discrètement (ils devaient se déguiser en commerçants). Comme nous l’avons noté au chapitre 10, le mouvement bénéficiait de la présence de nombreux Nigériens vivant dans le secteur de Malanville87.
Le scorpion
35Comme sa lettre à Dan Koulou donnant l’ordre d’attaquer le montre, Bakary avait toujours été conscient du fait que l’hinterland n’était pas sûr88. Mais l’invasion s’était transformée en mission suicide, ce qui eut des répercussions sur les relations à l’intérieur du leadership ainsi que sur les liens entre ce dernier et les militants de rang intermédiaire – sinon les militants de base, qui avaient été les principales victimes des événements. Leur défaite mena inévitablement à une dissidence interne. De nombreux militants étaient bouleversés par ce qui s’était passé. En partie, cette colère a dû être un phénomène tardif, affecté par une vision rétrospective des choses89, mais il existe des indications sur le fait que certains se querellèrent avec le leadership aussitôt après l’invasion. Ainsi, Daouda Ali dit Chang Kai-shek voulait que Djibo Bakary rende compte. « Chang Kai-shek » était l’un des commandos de l’unité de Dandouna Aboubakar qui avait échappé au lynchage à Dibissou et avait pu regagner le Ghana. Personnage au rude caractère, il mit au défi le leader du Sawaba de retourner avec lui au Niger, lors d’une rencontre. Bakary rejeta bien entendu cette idée, envoyant promener le maquisard déçu90.
36L’échange montre que les gens de la base avaient leur mot à dire, bien que cela ait été limité par la discipline militaire imposée depuis le début des affrontements avec le RDA. Il y avait, cependant, de nombreux sujets sur lesquels les membres étaient en désaccord, ou qui furent considérés (rétrospectivement ou pas) comme étant à l’origine du fiasco. Il apparaît que de nombreux militants de l’intérieur étaient mécontents d’avoir été pris de court, puisque les opérations les mettaient en danger. Mais le leadership avait ordonné de ne pas impliquer les cadres domestiques les plus en vue, et on voit mal comment les militants de l’intérieur auraient pu être avertis sans que cela ne mette l’attaque en péril. Il y aurait également eu des pressions sur les commandos en mission de reconnaissance les poussant à envoyer des rapports positifs sur les chances de succès. Après avoir été capturé et exhibé devant un journaliste occidental, Djibo Seyni affirma avoir déconseillé l’invasion après sa mission de renseignement en 1963, indiquant que les gens au Niger ne montraient aucune ferveur révolutionnaire et qu’une attaque armée échouerait. On l’aurait traité de défaitiste tout en lui rappelant son serment91.
37Si ceci ressemble un peu trop à une justification rétrospective – le châtiment que risquait l’élève de Son Tay était terrible – d’autres témoins ont également souligné l’existence d’informations partielles ainsi que le mécontentement que cela suscitait chez les militants. Il est cependant possible que ces notions aient été influencées de façon rétrospective par les observations de Chaffard, basées sur les données subjectives du régime92. Il n’en reste pas moins qu’un étudiant du Sawaba se souviendra plus tard, lui aussi, du problème des informations déficientes, tout en assurant qu’elles n’avaient pas été fournies délibérément93. Il est évident que l’ardent désir de libération a dû jouer un rôle dans les rapports de mission, mais la pression disciplinaire de l’appareil politico-militaire a peut-être aussi affecté leur objectivité. Cependant, il ne s’agit pas ici de savoir s’il y a vraiment eu renseignements partiels, ni dans quelle mesure ils auraient contribué à la défaite (nous revenons plus amplement sur ce sujet vers la fin du chapitre), mais bien si la question était devenue une pomme de discorde après l’invasion. Ainsi, Ali Amadou, chef de camp de l’un des lieux d’entraînement du Ghana, affirmera plus tard que les projets d’invasion n’avaient jamais été débattus94. S’il pensait à cet égard aux militants de rang intermédiaire, il a peut-être raison, et rien ne serait plus normal dans une organisation militaire. Pourtant, lui-même et d’autres personnes se rappelleront aussi qu’à la veille de l’invasion, les leaders des commandos s’étaient rendus à Accra pour concertation, qu’il y eut des éléments de désaccord (impliquant notamment les chefs d’unité de l’ouest du Niger), mais qu’à la fin, chacun accepta la décision de passer à l’action. Affronter une figure de la stature de Djibo Bakary ne devait pas être facile95 et la logique militaire guidant le mouvement rendait on ne peut plus logique l’obéissance à ses décrets96, mais la décision fatidique – déclenchée par les arrestations catastrophiques d’août-septembre – ne peut en toute probabilité pas être attribuée au seul Bakary.
38Néanmoins, cette question, ainsi que nombre de celles qui ont été mentionnées ci-dessus, ont dû se trouver au menu des discussions, et il est inévitable que Bakary, en tant que leader politique, ait été particulièrement critiqué. La mauvaise qualité de l’armement était bien entendu un élément important, mais en ce qui concerne l’assignation des responsabilités, les militants de rang intermédiaire faisaient la distinction entre Ousmane Dan Galadima d’un côté et Bakary et Abdoulaye Mamani de l’autre. Ils étaient contrariés du fait que le chef du Sawaba et Mamani, l’idéologue du mouvement, n’aient jamais rendu visite aux troupes dans les zones de base. Bakary, dit-on, ne connaissait pas le terrain et fut accusé (bien des années plus tard ?) d’avoir donné trop de prix aux rapports de commandos mal formés. Par contraste le chef d’État-major, Dan Galadima, s’était rendu dans des « endroits sales » où il avait vu les maquisards, distribué de l’argent et montré qu’il était au fait des questions militaires. Dan Galadima, qui était surnommé « le scorpion » par admiration pour son courage, était considéré comme possédant un « esprit révolutionnaire », tandis que Mamani et Bakary apparaissaient comme des « bourgeois » (photo 13.6)97.
Photo 13.6 – Ousmane Dan Galadima en compagnie de l’auteur, Madaoua, 2006 (Ingrid Jäger).
39Ceci relevait sans doute en partie d’une tension normale entre des dirigeants politiques et l’esprit de corps militaire. Les critiques mentionnées ci-dessus n’étaient pas toutes équitables. Il est bel et bien arrivé à Djibo Bakary de se rendre au Dahomey et dans le nord du Nigeria, et, en tant que leader, il devait représenter le mouvement au plan politique et éviter les risques inutiles. Dan Galadima et Mamani, sur la base de leurs obligations passées, étaient également responsables de l’armement des maquisards. Dans ses souvenirs, le premier affirme que des erreurs ont été commises dans l’exécution de la lutte, sans toutefois donner plus de détails98. Avant l’invasion, Dan Galadima avait eu des difficultés avec le ravitaillement en armes (telles que les mitraillettes) qui avaient été fournies par la République populaire et expédiées en Guinée. Sékou Touré avait refusé de les remettre (en tout ou en partie99), si bien que de nombreuses armes durent être fournies par les Ghanéens. À cet égard, il est fort possible que les alliés du Bloc de l’Est n’aient pas tenu toutes leurs promesses100. Cela expliquerait la nature éclectique de l’armement qui, parfois, se détériora davantage du fait des conditions de stockage101.
40Il n’empêche, à la suite de l’invasion, les désaccords entre Bakary et les autres leaders n’étaient que trop réels. Ils ne peuvent être réduits aux différences de perception du leadership au sein des militants de rang intermédiaire. À ce stade, Dan Galadima (et peut-être Mamani) ne s’entendait plus très bien avec Bakary, ce qui constituait un sérieux handicap102. Dans ses souvenirs, le chef d’État-major du Sawaba rationalise ceci comme faisant partie des inévitables différences entre « l’homme de terrain » et le leader politique103, mais les critiques que Mamani et lui-même adressèrent à Bakary étaient plus sérieuses. En dehors de la puissance inattendue avec laquelle le RDA avait été capable d’écraser l’invasion, ils lui auraient reproché de ne pas avoir formé assez d’hommes. L’équipement et le moral des troupes n’auraient pas reçu une attention efficace. Comme le mouvement disposait de fonds considérables, la chose devint une discussion préjudiciable sur la manière dont l’argent avait été dépensé. Chaffard, avec ses sources proches du régime, parlera plus tard d’un détournement de fonds par Bakary en personne, à l’instar d’un témoin issu du pouvoir (qui, cependant, ne fournit aucun détail104).
41Le RDA avait l’habitude de diffamer le leader du Sawaba, mais Oumarou Janba, sawabiste de Zinder, se souviendra plus tard avoir discuté de la question avec Dan Galadima105, ce qui confirme en partie les accusations. Selon Chaffard, Bakary consacra beaucoup de temps et d’argent à des liaisons amoureuses. Comme beaucoup de sawabistes, Bakary paya ses ambitions politiques par une vie privée instable. Il épousa en fait sa seconde femme, Aïssata N’Diaye, au Ghana, en 1963 (sa première femme et ses enfants se trouvant, pendant ce temps, à Gao106). Mais Chaffard rapporte la rumeur selon laquelle il aurait donné aussi des chèques mensuels de 50 000 F CFA à une femme de Ouagadougou et aurait offert des voitures à deux autres107. Oumarou Janba lui aussi affirme qu’il y avait des problèmes de femmes, mais que Bakary avait acheté une voiture pour son épouse même, si bien que Dan Galadima se trouva à court de fonds. Dan Galadima aurait plus tard dit au militant de Zinder qu’il n’y avait aucun problème de femmes, mais qu’effectivement, il y eut une histoire d’achat de voiture108.
42Si plusieurs témoins affirment que Bakary avait l’habitude de donner de l’argent aux militants et à des personnes dans le besoin109, son existence passée montre qu’il s’intéressait plus à la politique qu’à une vie de luxe et de confort. Selon Chaffard, les collègues de Bakary ne mettaient pas en doute sa dévotion pour la cause mais désapprouvaient ses méthodes administratives. Quoi qu’il en soit, il résulta des discussions entre Bakary, Abdoulaye Mamani et Ousmane Dan Galadima que la gestion financière aurait désormais été confiée à Issaka Koké, l’ancien ministre Sawaba des Travaux publics et de l’Agriculture, qui vivait à Bamako. Bakary devait lui envoyer un budget estimatif mensuel, sur quoi il émettrait un chèque encaissable dans une banque d’Accra110. Si cela est vrai, il est possible que le « scorpion » se soit servi de l’échec de l’automne pour acquérir plus de contrôle sur les opérations du Sawaba.
Il faut frapper
43Il ne faut cependant pas exagérer ces changements au sein du leadership. Tout en étant le leader politique, Djibo Bakary continua à avoir un rôle dans les décisions à portée militaire. Par ailleurs, Dan Galadima avait toujours été responsable de l’exécution de la stratégie.
44Si le plan d’attaque n’avait pas abouti à la délivrance recherchée par les petites gens, l’alternative à la poursuite de la lutte ne présentait pas d’intérêt palpitant. Accepter la défaite signifierait que la traversée du désert continuerait, très certainement pour les membres de la branche externe qui étaient si profondément impliqués dans les projets de subversion. Il en était même ainsi, dans une certaine mesure, des militants de l’intérieur, puisqu’ils devaient faire les frais d’une plus grande répression, en dépit du fait que nombre de ceux qui étaient de tendance plus modérée souhaitaient sans doute abandonner la lutte. De leur côté, les militants radicaux ayant un passé qui s’opposait au retour à une vie normale, ne voyaient rien d’autre à faire que de continuer le combat111, sans compter la haine que beaucoup d’entre eux ressentaient à l’égard d’un régime responsable de la mort et de la persécution de leurs camarades. Il a dû en être ainsi aussi de ceux qui avaient pris part aux attaques de l’automne. Le chef d’État-major du Sawaba cherchait du coup à réviser ses plans. En fait, dès le premier mois suivant les infiltrations, Dan Galadima considérait l’adoption d’une nouvelle approche. Le 31 octobre 1964, « le scorpion » écrivait une lettre à A.K. Barden, le chef du Bureau of African Affairs du Ghana, afin d’obtenir de nouveau de l’aide. Il était clairement bouleversé par les récents événements :
« C’est avec une grande indignation que nous soumettons notre nouveau plan et mémorandum à votre approbation et action rapide en vue d’une révolte militaire dans la République du Niger. Comme vous le savez, pendant les quelques mois qui ont passé, quelques révolutionnaires de notre groupe ont pénétré dans le Niger mais le Gouvernement réactionnaire de Hamani Diori, avec l’aide des impérialistes français, a détourné notre plan et capturé nos hommes avec quelques-unes de leurs armes. Mais une chose est certaine, que le fait de gagner la force politique par la révolution au Niger accomplira et mènera à une réforme sociale et économique qui donnera la victoire complète révolutionnaire à notre parti112. »
45Après cet euphémisme quant aux pertes militaires, Dan Galadima annonce que le Sawaba allait à présent « complètement » changer son approche. Il informa Barden que de nouvelles recrues étaient rentrées de formation en Chine et à Cuba, sous la conduite d’un certain Salifou Aboubakar113 et qu’ils poursuivraient bientôt leur chemin sur Cotonou. Il fut demandé à Barden d’organiser leur voyage par voie aérienne jusqu’au Dahomey, par Ghana Airways, « avec toutes leurs armes et munitions ». Il devait également assister financièrement les commandos114. Le fait que Dan Galadima ait demandé l’approbation de son nouveau plan montre que les Ghanéens essayaient d’exercer plus de contrôle. Cela était logique au vu des efforts et des fonds qu’ils avaient investis dans le projet nigérien, sans compter les retombées diplomatiques créées par l’invasion ratée. Les ambassades du Ghana à Cotonou et Lagos avaient aidé à organiser les voyages vers les zones d’infiltration par le passé, mais on demandait à présent aux Ghanéens de jouer un rôle direct dans le transport des hommes et des armes. Tout en les impliquant davantage, cette approche leur donnait aussi une influence plus grande115.
46Le changement de plan ne se limitait pas au rôle plus important conféré aux Ghanéens. Gardant à l’esprit le manque d’agressivité que certains des commandos – qui s’attendaient à être reçus à bras ouverts – avaient montré, les décideurs du Sawaba116 résolurent de durcir leur démarche. Il s’agissait à présent de s’en prendre directement au régime. Se rappelant plus tard des erreurs de l’invasion d’automne, le « scorpion » avancera que pour renverser le régime, « il [fallait] frapper117 ». Il s’agit peut-être là d’un écho des sentiments des sawabistes à l’égard de l’invasion ratée qui, pour beaucoup, soulignait le besoin d’une action d’envergure118. L’implication était, entre autres choses, que les commandos devaient converger sur la capitale (et peut-être sur d’autres agglomérations) au lieu d’essayer de prendre le contrôle des campagnes, puisque la puissance du régime était concentrée dans les villes119. Il se peut qu’à ce stade, Abdoulaye Mamani ait aussi atteint cette conclusion120 qui se réduisait à revenir à l’action urbaine, jadis illustrée par la destruction de la tour radio de Niamey et l’établissement de contacts avec les militaires. Puisque la population ne pouvait pas les aider, les maquisards devaient trouver un appui ailleurs. Dan Galadima informa Barden de son intention « d’acheter une partie de l’Armée dissidente » déployée à la frontière nigéro-dahoméenne depuis l’expulsion des ressortissants dahoméens une année auparavant. Il pensait là aux sections des FAN dont la mutinerie de Diallo avait révélé le mécontentement – bien que l’idée de mettre l’armée de son côté, qui était aussi partagée par d’autres militants121, remontait à 1961, lorsque Hima Dembélé avait pris contact avec des officiers à Tondibia122. Dan Galadima écrivit à Barden qu’il avait envoyé un émissaire négocier avec des officiers des FAN (peut-être Sallé Karma, que Bakary avait envoyé au Dahomey en novembre avec des nouvelles instructions). Le chef d’État-major assura le chef du BAA que quelques officiers avaient accepté de se joindre à l’attaque contre le régime dès que de nouvelles unités de commandos franchiraient la frontière à Gaya123.
47Il avança qu’il avait aussi pratiquement finalisé un arrangement avec le gouvernement dahoméen à travers son ambassade au Ghana. Cela portait sur une transaction audacieuse : dès que la révolution aurait réussi et que le Sawaba serait revenu aux affaires, le Niger remettrait au Dahomey le territoire que les deux pays se disputaient (i. e., Lété et quelques autres îles du fleuve Niger). Il réembaucherait également les fonctionnaires dahoméens124. Cette proposition pouvait évidemment servir à la propagande du RDA125, mais elle indique peut-être un certain désespoir de la part du chef d’État-major du Sawaba. Cependant, comme nous l’avons noté, Mounkaila Beidari, militant de l’une des cellules de Niamey, avait déjà essayé de persuader l’armée dahoméenne d’attaquer le régime lors de l’éviction des ressortissants dahoméens. Les échanges qu’il avait eus avec un de ses camarades montrent que les sawabistes se sentaient engagés dans une lutte sans merci qui l’emportait en priorité sur tout scrupule à l’égard de la souveraineté territoriale du Niger. Par ailleurs, même si la lettre de Dan Galadima à Barden cherchait à exploiter la veine militante du régime de Nkrumah126, elle montre clairement que le « scorpion » était un révolutionnaire marxiste tout autant qu’un militant nationaliste – dans son esprit, la reconquête du pouvoir politique devait mener aux réformes socio-économiques qui couronneraient la victoire du petit peuple.
48Mais sa correspondance avec Barden montre également à quel point l’hinterland dahoméen était devenu important, et il découle de la lettre que le gouvernement de Cotonou avait accepté de recevoir de nouvelles unités commando dès le lendemain de l’invasion d’automne. On ne sait rien de l’état dans lequel se trouvait le centre de commandement de Porto Novo, mais la demande adressée au BAA de transporter par voie aérienne des commandos sur Cotonou implique que la présence du Sawaba au Sud Dahomey restait à peu près la même. Si Dan Galadima faisait profil bas (sa lettre à Barden indique qu’il demeurait à présent au Ghana, au moins pour un temps), le contexte chaotique de la vie politique dahoméenne laissait toujours une marge de manœuvre au Sawaba. Cela était d’autant plus le cas dans les régions nord du pays où les migrants du Niger, des sentiments régionaux et les liens transfrontaliers au sein de la population Dendi-Songhay créaient une ambiance trouble, idéale pour opérer. Les politiciens locaux continuaient à apporter leur aide. Après son arrestation dans le secteur de Gaya, Djibo Seyni, le commando de Son Tay, avait allégué que les membres Dendi de l’armée dahoméenne déployée sporadiquement dans la zone frontière, avaient été prêts à se joindre aux infiltrations, tout comme des Dahoméens expulsés. Un lieutenant dahoméen aurait assuré les commandos du Sawaba que des soldats en civil les rejoindraient dès qu’ils seraient passés au Niger127.
49Même si ces Dahoméens étaient moins enthousiastes après le désastre de l’automne, la base du Sawaba au Ghana restait intacte, ce qui veut dire que sa capacité à monter des opérations était indemne128. Ceci explique peut-être aussi pourquoi le leadership n’avait utilisé que la moitié de sa force potentielle129, bien que la formation des maquisards restés au Ghana n’était peut-être pas achevée lorsque Bakary donna l’ordre précipité de passer à l’attaque. Si une centaine au moins d’hommes avaient survécu aux infiltrations de l’automne et avaient pu s’échapper, le mouvement avait peut-être encore à sa disposition un maximum de 350 à 400 hommes, en supposant que les rescapés de la première armée avaient pu regagner le Ghana et étaient capables – et désireux – de reprendre l’action. L’idée de Dan Galadima d’aéroporter des commandos sur le Dahomey a peut-être été stimulée par le désir de reconstituer rapidement une force de frappe. Cette dernière avait bien entendu souffert de la prise des armes130 et les Ghanéens avaient sans doute dû remplacer ce qui avait été perdu. Dans tous les cas, l’entraînement des guérilleros ne fut pas interrompu. Nous avons vu, au chapitre 9, que des instructeurs chinois (dont plusieurs avaient rang de colonel ou de lieutenant) commencèrent à arriver au moment où se déroulait l’invasion d’automne. Les exercices en ont peut-être été améliorés, après avoir souffert du peu d’aptitude des instructeurs ghanéens131.
50Comme nous l’avons noté, en janvier 1965, Che Guevara passa par le Ghana lors de sa tournée africaine. Cela permit au Sawaba de renouer ses contacts avec les Cubains, tout en menant à l’arrivée d’un flot de conseillers techniques qui travaillèrent avec les Ghanéens dans divers domaines, dont l’assistance aux mouvements de libération. Au terme de sa visite au Ghana, le Che se rendit au Dahomey pour rencontrer les nouveaux dirigeants du pays à Cotonou, mais on ne connaît pas les détails de cette visite132.
51Dans la même optique, l’entraînement se poursuivit en Chine (en mars et avril 1965, un nombre non connu de sawabistes quittèrent le Ghana pour la République populaire133). Il en fut de même pour l’Opération formation des cadres, qui avait ses propres dynamiques et calendrier. C’est par exemple au commencement de la nouvelle année que Mamoudou Idé, qui avait terminé sa formation en Allemagne de l’Est, reçut l’ordre de rentrer à Accra et de se présenter au siège du Sawaba. Idé rendit compte de ses expériences à Bakary et Alazi Soumaila (l’agent de recrutement jadis à Gao), avant de continuer sur l’Union soviétique pour de nouvelles études. Bachir Boukary, l’élève du secondaire originaire de Zinder, se trouvait alors au Maroc dans le cadre de sa formation en agriculture, et il est possible que l’instruction militaire de Zoumari Issa Seyni, le cousin de Adamou Sékou, ait eu lieu à cette époque134.
52Si les stratégistes du Sawaba avaient prévu une deuxième offensive en juin-juillet 1965135, les opérations de terrain avaient, en dehors des projets du leadership, leur propre dynamique. Les commandos qui avaient survécu aux affrontements de l’automne ont dû avoir du mal à rester en contact avec Accra ou Porto Novo. Il est possible qu’en janvier, une unité de sept maquisards ait pénétré dans la région de Konni à partir du Nigeria, pour ensuite rebrousser chemin136. Nous avons vu qu’une opération prit place vers Bosso au cours du même mois. Six commandos attaquèrent deux villages non identifiés et prirent la fuite avec 450 000 F CFA – somme considérable, sans doute récupérée dans un service de l’État. Ils furent pris à partie par des miliciens, mais plusieurs d’entre eux s’enfuirent à travers la frontière137. Il y avait probablement là des rescapés des unités de Aba Kaka, dont certains avaient échappé à la capture lors de l’accrochage de l’île de Chassa Koura avec les troupes nigériennes et nigérianes. Comme nous l’avons vu au chapitre 12, Kaka lui-même ainsi que plusieurs de ses compagnons faisaient partie de ces rescapés138. Si certains de ceux qui avaient pris part à l’opération de janvier furent arrêtés au cours du mois suivant, l’épisode montre comment l’éloignement de la région compliquait les efforts visant à mettre fin aux infiltrations. Par ailleurs, la vie politique de Bosso était toujours agitée. Le chef de la localité, Boulama Boukar, avait été révoqué du fait des doutes sur sa loyauté et il avait été remplacé par quelqu’un de plus accommodant. Comme Kaka par le passé, le chef déchu était passé au Nigeria avec l’intention de se venger. Le fait que les notables du cru avaient récemment résolu certains de leurs différends n’allait guère arranger les affaires du régime, puisque Boukar, dit-on, bénéficiait de beaucoup de sympathies dans la région. Les services français rapportent qu’il avait promis de soutenir le Sawaba, qui, certainement, n’allait pas « manquer de mettre à profit la rancœur de ce chef coutumier139 ».
53Selon les Français, les événements montrent que si les autorités du Nigeria avaient fait de leur mieux pour améliorer les rapports avec les Nigériens, la population de la Région Nord, en particulier en zone haoussa
« rest[ait] réfractaire à toute collaboration [avec le gouvernement]. En effet, la grande majorité des Haoussas du Nord et plus particulièrement ceux des régions frontalières apportent une aide sans restrictions aux éléments du Sawaba implantés sur leur territoire140 ».
54Comme les événements de la région de Bosso le montrent, le problème concernait aussi le secteur kanouri. Il résulta de ceci que, dans les régions haoussa du Centre, les militants de la NEPU purent continuer à aider le Sawaba. Nous avons vu au chapitre 10 Tanko Yakasai aider les commandos de Kano en leur fournissant de l’argent, des papiers, l’hébergement et des armes. Longtemps après, ce précoce visiteur de la Chine recevait encore des sollicitations des étudiants du Sawaba en quête d’emplois et de positions141. En mai 1965, Eskor Toyo, le secrétaire de la NEPU et membre d’un groupe marxiste de Lagos connu de Yakasai, informa le BAA que son second, Dr Kolagbodi (Kolabode – appartenant au même cercle marxiste que Yakasai), viendrait au Ghana rencontrer Bakary. Toyo demanda à Barden de prendre les mesures nécessaires au financement des opérations prochaines du Sawaba à travers la représentation du Ghana à Lagos. Les Ghanéens répondirent qu’un émissaire viendrait avec des conseils à propos des voies d’infiltration142.
55En dehors des voies disponibles à travers les hinterlands du Nigeria et du Dahomey, les commandos pouvaient suivre un itinéraire plein nord à partir de Lomé, atteignant la bourgade de Dapaong tout en restant en territoire togolais143. Les maquisards devaient bien entendu faire des incursions dans la périlleuse zone voltaïque, mais le mouvement avait peut-être encore, à sa disposition, une cellule au nord du Togo qui rendait valable une telle option. Quoi qu’il en soit, de nouvelles infiltrations allaient être plus difficiles, non seulement parce que l’hinterland était à présent encore moins sûr que par le passé, mais aussi parce que les infrastructures du mouvement au Niger avaient été pour une bonne part détruites. Une semaine seulement avant le nouvel an, il avait perdu un important dépôt d’armes dans la région de Maradi, à la suite d’une intervention de la gendarmerie, alertée par la population144.
56Durant le printemps, le nombre des incursions diminua donc considérablement et les infiltrations étaient plus ou moins isolées, contrastant fortement avec les attaques coordonnées de l’automne précédent. L’invasion ratée ayant eu pour résultat de mobiliser les gouvernements proches du RDA, il était devenu risqué d’envoyer des commandos en grands nombres. On devait aussi trouver de nouveaux moyens d’acheminer les armes. Si, par le passé, elles avaient été introduites dans le pays dans des paniers, des sacs de farine ou des pneus de secours, le paranoïaque Maïga avait, en mai 1965, donné l’ordre aux commandants de cercle de faire inspecter les boîtes de conserve, les valises et sacs de voyages, même les jouets (poupées) dans lesquels les maquisards pouvaient dissimuler leurs armes. Les difficultés rencontrées à présent par les commandos sont illustrées par les problèmes de Aba Kaka. À une date non connue, le maquisard de Bosso envoya l’un de ses hommes au travers de la Komadougou pour vérifier la sûreté du terrain. Alertés par des gens du cru, les soldats intervinrent et une fusillade éclata, au cours de laquelle un nombre inconnu de maquisards déjà présents dans le secteur furent blessés. L’éclaireur s’enfuit au Nigeria pour rendre compte à Kaka qui utilisait à présent différentes cachettes, y compris le village de Boula Kari, et plus loin de la frontière, Maiduguri145.
L’homme du 13 avril146
57En février, Amadou Diop, le commando du secteur de Konni, retourna dans la zone d’infiltration sur ordre, apparemment, de Bakary lui-même. À Accra, il avait pris un café avec le chef du Sawaba lors d’une session de compte-rendu de sa mission de reconnaissance dans la région de Maradi147, entreprise après sa fuite sur Sokoto à la suite du fatidique accrochage de Dibissou. Bakary lui ordonna de récupérer une cache d’armes qu’il avait mise en place lors de sa fuite. Il devait amener les armes à Lagos, où elles furent entreposées par Sarkin Nanou, le propagandiste œuvrant jadis à Rogogo. La mission démontra la résolution du camionneur, et une fois qu’elle fut accomplie, Diop rentra à Accra148.
58Plusieurs témoignages indiquent qu’il eut des entretiens avec Bakary et probablement d’autres militants au sujet de plans d’assassinat visant le président Diori. De son propre chef, Diop dira plus tard avoir parlé de la question avec le leader du Sawaba. Se posant au centre du dessein, il indique cependant que l’idée venait de lui, non de Bakary, qui lui aurait donné « le feu vert » et « carte blanche149 ». Le sawabiste de Zinder était un homme coriace – comme le montre son évasion de la prison de Konni l’automne précédent150 – et un militant radical furieux de ce qui était arrivé à Dandouna Aboubakar. Il avait soif de vengeance151. Son importance dans le plan ne saurait donc être contestée. Plusieurs sawabistes, dont Ousmane Dan Galadima, affirmèrent plus tard qu’il s’agissait là d’une initiative individuelle pour laquelle le parti n’avait donné aucun ordre152 : l’assassinat du chef de l’État n’était pas au programme – l’essence de la stratégie du mouvement ayant après tout consisté en une lutte de longue durée (au moins avant les arrestations d’août-septembre 1964)153. Mais les témoignages de Diop et du chef d’État-major impliquent qu’un tel plan était bel et bien au menu des discussions. Dan Galadima nia par la suite que le leadership se soit jamais réuni pour décider de la mort du président, s’appuyant sur l’argument marxiste typique qui dit que les révolutions ne visent pas les individus. Il admet cependant qu’il était alors en mission à Alger, indiquant qu’il n’avait rien à voir dans l’affaire, mais qu’il avait reçu une lettre de militants ou de commandos demandant des explosifs154. Un autre témoignage fait allusion à un plan d’attentat préparé par Diop en qualité de représentant de l’aile radicale155, ce qui serait en accord avec une rumeur plus ancienne portant sur une tentative d’élimination de Diori – sur ordre de Bakary – par un commando envoyé d’Accra (juin 1964)156.
59Au vu de l’assassinat de Daouda Ardaly (et de la tentative manquée contre le redresseur des torts lui-même), le plan n’était pas insolite et se trouvait en harmonie avec le durcissement stratégique visant le cœur de l’État. Plusieurs autres témoignages de sawabistes insinuent ou affirment ainsi que l’action projetée par Diop avait été ordonnée par le parti157. Mounkaila Beidari, qui était alors à pied d’œuvre dans la capitale, se rappellera plus tard que le camionneur lui avait dit qu’il « devait » essayer de tuer le président, ajoutant que Diop avait été encouragé dans ce projet par Djibo Bakary en personne – ce qui correspond au récit de Diop lui-même – et qu’il avait été envoyé par le leadership au Ghana. Rétrospectivement, cependant, le chef du Sawaba aurait été réticent à admettre son rôle au vu de ses liens de parenté avec Diori158. Par ailleurs, même dans un mouvement où la base jouait un rôle et où les unités de guérilla agissaient avec un certain degré d’autonomie, il est peu probable qu’un commando mène une telle action sans consultations ou ordres explicites, surtout dans le contexte de discipline militaire qui prévalait depuis le début des hostilités. Le fait que Diop ait envisagé la chose alors qu’il se trouvait à Accra indique également qu’il ne s’agissait pas là d’une initiative solitaire mais d’un plan provenant de, ou sanctionné par la direction du parti159 – et sa mission antérieure dans les zones d’infiltration montre qu’il obéissait aux ordres.
60En fait, l’exécution du plan impliqua de nombreuses personnes, ce qui indique qu’il émanait du sommet. Selon un témoignage, le but était de lancer plusieurs grenades dans un rassemblement où se trouverait Diori, créant ainsi une panique et une confusion permettant aux commandos de terminer le travail en tirant sur le président. L’emplacement visé était l’aéroport de Niamey160. Amadou Diop quitta la capitale ghanéenne le 19 mars, traversant le Togo et prenant un taxi pour Cotonou. De là, il continua sur le Nigeria, récupéra des armes, dont des grenades, peut-être stockées à Sarkin Nanou à Lagos, et passa à travers Ibadan et Kaduna avant d’arriver à Kano. Il traversa la frontière peut-être le 8 avril et continua sur Maradi, où il avait de la famille161.
61Si Diop voyagea seul, d’autres commandos avaient, entre-temps, quitté également le Ghana. Selon les services français, le groupe comprenait Issoufou Danbaro, qui avait pu sauver sa vie lors des infiltrations de Falmey ; Katchalma Oumar dit Paul, le compagnon de Aba Kaka à Bosso, qui connaissait bien la capitale pour y avoir travaillé en tant que pompier ; Ado Dodo, qui faisait partie des unités du secteur de Magaria ; et Garba Katkoré, membre de la brigade de Dan Koulou, à Madarounfa. Bien qu’ayant quitté Accra au même moment, ils avaient reçu l’ordre d’opérer individuellement162. Mais ils faisaient peut-être partie d’une unité comprenant au total plus d’une dizaine d’hommes, dont certains atteignirent les frontières du Niger en traversant le Mali. À leur arrivée, « ils se seraient éparpillés sur l’ensemble du territoire nigérien ». Deux commandos au moins, mais très probablement bien plus, entrèrent dans la zone de Niamey entre le 5 et le 11 avril163.
62Le 9 avril, Diop (photo 13.7) prit le bus de 18 h 30 de la Transafricaine à Maradi et arriva à Niamey le lendemain matin164. Il prit contact avec « son équipe » dont il se souviendra plus tard qu’elle était nombreuse – d’autres rapports parlent de deux groupes de commandos constitués chacun de quatre hommes qui, entre autres choses, portaient des grenades. Il s’agissait de « gens décidés, capables », selon le pragmatique Diop165, une remarque qui devait avoir du vrai puisque, si les services français ne se trompent pas, plusieurs commandos venaient d’unités ayant joué un rôle clef dans l’invasion. Cependant, le nombre total d’hommes dans le groupe de Niamey était plus important, 40 personnes au moins, qui, pour nombre d’entre eux, avaient apparemment été contactées par Diop. Pour moitié, il s’agissait probablement là de membres de cellules domestiques, les autres ayant, paraît-il, été entraînés en Chine et dans d’autres pays, et étant donc manifestement des commandos166. Selon une source, le groupe de Niamey comprenait aussi un policier, affirmation qu’on peut renvoyer à l’infiltration de l’administration par le passé, bien qu’elle ne puisse être confirmée dans ce cas167.
Photo 13.7 – Amadou Diop, Zinder, 2003.
63Une partie du plan consistait à accompagner l’assassinat de Diori d’actes qui en compléterait l’effet. Les commandos avaient l’intention de placer des explosifs dans les installations de Radio Niger, sur la route de Ouallam, répétant les actions de l’année précédente mais avec des moyens plus offensifs (on ignore si ceci est lié à la demande d’explosifs adressée au chef d’État-major168). De plus, des maquisards s’apprêtaient à infiltrer le pays vers Gouré169. Bien que l’action dans cette région n’ait pu être confirmée par un témoignage ultérieur170, il y a divers rapports concernant des activités militaires dans d’autres parties du pays171. Un rapport portant sur l’extrême-Est parle de la pénétration imminente d’une unité venant du Nigeria, et un autre mentionne un plan selon lequel des commandos, à la suite de l’attentat contre le président, lanceraient des grenades dans les rassemblements publics « dans tous les chefs-lieux administratifs », à l’occasion de la fête de la Tabaski172. Il est clair que l’effort visant à éliminer Diori faisait partie d’une entreprise plus large devant mener à un coup d’État. Rien n’indique qu’il y ait eu des contacts avec les militaires en dehors des allégations concernant les rapports, à la frontière dahoméenne, entre le « scorpion » et des officiers des FAN, mais l’ensemble du plan montre toutes les apparences de cette focalisation sur les villes qui est nécessaire pour un putsch. Si un rapport des services français indiquant un plan de secours consistant à empoisonner le président en cas d’échec de la première tentative peut être écarté comme une marque de la paranoïa du régime, les sources montrent que le coup porté au cœur de l’État devait être accompagné d’efforts de propagandes. Des ordres avaient été donnés pour l’impression, en Allemagne fédérale, de pas moins de 95 000 exemplaires de Sawaba, l’organe du mouvement, et les militants menaçaient ouvertement le régime en disant que « leur nombre [était] grand » et qu’il pouvait s’attendre à de nouvelles actions – ce qui allait être confirmé par des événements ultérieurs173.
64Si Amadou Diop avait effectivement été au centre du projet tout au long de son développement, il devait faire face aux hésitations de plusieurs militants, qui connaissaient la situation à Niamey et déconseillaient l’action envisagée, soulignant que le terrain n’était pas favorable174. Ces objections provenaient sans doute des militants de l’intérieur et non des commandos, et elles reflétaient la crainte que l’attentat n’échoue ou qu’il ne soit suivi d’aucune action tendant à prendre le contrôle de la capitale. Mounkaila Beidari, par exemple, s’inquiétait du danger que pouvaient encourir les cellules de Niamey, dont de nombreux membres étaient encore en liberté. Beidari lui-même, par exemple, travaillait encore pour le parti et avait des armes à sa disposition, bien qu’il ait été arrêté une fois au cours de l’automne précédent175.
65Néanmoins Diop et au moins plusieurs autres commandos décidèrent de poursuivre leur plan. Le militant zindérois, peu connu à Niamey et donc libre de circuler, alla voir Beidari176. On ne sait pas trop pourquoi Diop l’a contacté – le fait est confirmé par deux autres témoins177 – puisqu’ils ne se connaissaient pas. Il est possible qu’il lui ait rendu visite en dernier recours, ayant appris que le militant de Niamey haïssait le RDA et était résolu à continuer le combat. Par ailleurs, puisque Beidari travaillait à l’aéroport, le lieu prévu pour l’attentat, il pouvait être un atout crucial pour la réussite de l’opération. Ils parlèrent du plan et Beidari nota que le retour de Diori d’un voyage prévu sur Abidjan offrirait une bonne occasion d’agir. Le lieu idéal serait le salon présidentiel. Profitant de sa qualité d’agent de Air Afrique (circonstance qui pouvait aussi éventuellement aider Diop à avoir accès aux lieux), Beidari appela la tour de contrôle pour obtenir les détails du programme de retour de Diori. L’attentat fut programmé pour le lundi 12, deux jours après l’arrivée de Diop dans la capitale, et date du retour prévu de Diori, à 21 heures environ. Dans l’intervalle, Beidari organisa l’hébergement du commando178. Dans la soirée du 12 avril, Diop prit un taxi pour l’aéroport, en possession de plusieurs grenades179. On ignore s’il fut suivi par des complices, comme l’aurait voulu le plan initial, mais l’attentat n’aboutit pas, car Diori était arrivé plus tôt que prévu et avait pris le chemin du palais avant l’arrivée du commando du Sawaba. Une source affirme que Diop avait été repéré de façon prématurée par les services de sécurité et avait dû s’éclipser180.
66Avec plusieurs de ses camarades, il décida de retenter le coup le lendemain, lorsque le président et des dignitaires se retrouveraient à une prière publique pour la Tabaski. L’idée d’assassiner le président au cours d’une fête religieuse semble donc avoir été une improvisation de dernière minute181. Il s’agissait dans tous les cas d’un geste audacieux, susceptible d’avoir une répercussion négative dans l’opinion publique. Cependant, comme l’a pensé plus tard un sawabiste, si le plan n’était pas recommandable du point de vue religieux, il ne restait pas d’alternatives, étant donné les camarades morts ou en prison et l’échec des tentatives de réconciliation182. Il était d’autant plus extraordinaire que Diop nourrissait lui-même de profonds sentiments religieux. Mais il s’agit là surtout de sentiments soufis, qui l’aidèrent à trouver le courage nécessaire. Il avait cousu des grigris sous la peau de sa poitrine et de son épaule, et, avant d’entrer au Niger, il s’était procuré un bonnet magique auprès d’un « sorcier Haoussa » de Kano, convaincu que l’objet le rendrait invisible (ou le transformerait en chat) après le coup porté au président183. De plus, la prière de Diori devait prendre place à la Grande Mosquée. C’était le lieu même des exécutions de l’automne, ce qui n’a pu que stimuler le désir de Diop de venger ses camarades, en particulier la profanation de son chef d’unité, Dandouna Aboubakar – il se présentera plus tard comme l’adjoint de ce dernier184.
67Dans la nuit du 12 au 13 avril, Diop et ses coéquipiers inspectèrent les lieux, essayant de repérer les endroits où avaient stationné les informateurs du régime, la manière dont ils étaient habillés et dont ils se comportaient. Mounkaila Beidari y était aussi, examinant l’endroit. Tout comme Diop, il était armé. Des gardes présidentiels les accostèrent et leur posèrent des questions, mais sans les fouiller. Ils gardèrent leur sang-froid et purent s’éloigner. Beidari raccompagna Diop chez lui185. Par mesure de précaution, Diop se vêtit comme les informateurs qu’ils avaient identifiés, portant un grand boubou de fête idéal pour dissimuler ses armes. Il lui avait été offert par l’homme qui l’hébergeait, gardien dans une entreprise en bâtiment186, peut-être un Bella sawabiste. Parmi ses armes figuraient un pistolet et deux grenades, dont une d’origine américaine, de type « offensif », ayant donc une forte puissance explosive, et l’autre, une « MK-2 », grenade défensive à fragmentation caractérisée par l’aspect ananas bien connu187.
68Le lendemain matin, plusieurs militants ne se présentèrent pas, certainement trop effrayés pour prendre part à l’acte projeté, même s’ils avaient aidé à le préparer. Mais Diop n’y alla pas tout seul. Un témoignage ultérieur assure qu’il fuit conduit au lieu de la prière par un policier188, mais ceci ne peut être confirmé. Dans tous les cas, à son arrivée à la Grande Mosquée, vers 7 h 30, deux de ses complices étaient déjà en position. Quatre ou cinq maquisards au total étaient venus, y compris le logeur de Diop ; trois au moins étaient armés de pistolets et de grenades189. Ils se trouvaient dans une foule de 15 à 20 000 fidèles, dont de nombreuses personnalités, des députés et des ministres. Avec la présence de Boubou Hama et de Diamballa Maïga, le triumvirat du Niger était sur place au grand complet, si bien que la vulnérabilité momentanée du régime était extrême190. Les dignitaires, dont le président Diori, se trouvaient dans une enceinte clôturée les séparant de la population. Comme cependant la police de Niamey ne connaissait pas Diop et qu’il n’y avait que peu de gens du ministère de l’Intérieur qui pouvaient le reconnaître, il put se glisser à environ une trentaine de mètres à la droite de Diori (l’enceinte où se trouvait ce dernier était une barrière de sécurité ajourée191).
69La prière commença. Les fidèles se redressèrent et l’imam commença à réciter les versets appropriés. Comme les fidèles se mettaient à genoux, le commando du Sawaba sortit la grenade de son boubou et la lança dans l’enceinte, où elle tomba trois rangées derrière le président, peut-être parce que Diop était trop loin, ou n’avait pu suffisamment étendre son bras – ou parce qu’il était nerveux. Il y eut une explosion, tandis qu’il se jetait à terre192. La grenade manqua Diori, tuant à sa place un garçonnet de quatre ans et blessant plusieurs personnes, dont le député de Filingué Madi Mayaki, et trois membres d’une équipe de basketball malienne en tournée à Niamey193. Diop se releva et, d’après l’ambassadeur du Ghana au Niger, se mordit le doigt de déception lorsqu’il vit qu’il avait raté sa cible. Le Ghanéen affirme que Diop lança alors sa MK-2 « tout en identifiant un autre membre de la bande » – une référence peut-être à Diop essayant de signaler à ses camarades d’entrer en action ; cependant, la deuxième grenade resta « inopérante ». Un rapport britannique note, de son côté, que les gens se pressaient déjà autour du commando, l’empêchant d’utiliser son second explosif, ce qui s’accorde avec le témoignage ultérieur de Diop194. Mais un rapport nigérien affirme que le maquisard avait tout de même pu sortir son pistolet de son boubou et tirer, mais que des personnes dans la foule avaient rapidement orienté le canon de l’arme vers le sol195.
70Une dizaine de personnes, assistées par des gardes présidentiels, assaillirent Diop. Selon son propre récit, on lui tira dessus. Il aurait été lynché, n’eût été l’intervention de Diamballa Maïga, qui, sans aucun doute, était très intéressé par les informations que des interrogatoires pourraient extraire196. On évita tout nouveau coup de feu. Cela aurait pu créer la confusion permettant aux autres commandos d’en finir avec le président et ses amis, tout en facilitant la fuite de Diop197. Que l’absence de panique ait été ou non la raison de l’inaction des autres maquisards (il se peut qu’ils n’aient pas été tous assez près), le calme fut rapidement ramené dans la foule à l’aide d’un microphone, l’imam continuant la prière comme si de rien n’était. Tandis que Diori était précipitamment éloigné de la scène, l’endroit fut bouclé. Les commandos avaient dû perdre contenance et, pour le moment, l’élan était brisé. Comme « chaque individu fut fouillé » en quittant le lieu de prière, ils furent pris un à un, avec pistolets et grenades, sans doute quatre personnes en tout198.
71Cependant, des maquisards en charge de certaines des opérations d’accompagnement entrèrent en action malgré tout. Ce même jour, des douaniers alertés par la gendarmerie de Gouré repérèrent un groupe de maquisards qui avaient apparemment traversé la frontière nigériane et auraient été au nombre de 40 ! Si les informations sont défectueuses (elles parlent de commandos déguisés en « Yarouba » [sic], une « tribu implantée à la frontière Nigéria-Niger »), la taille du groupe fut encore répétée dans un rapport deux semaines plus tard199. On ne sait pas ce qui arriva au cours de l’infiltration du 13 avril, mais il semble que les maquisards rebroussèrent chemin. (Avaient-ils eu vent de l’échec de l’attentat de Diop ?). Les renforts assignés à la garnison de Nguigmi, après que des rapports aient indiqué qu’une unité du Sawaba s’apprêtait à infiltrer le pays au sud-ouest de la ville, montrent que les régions Est n’étaient pas tout à fait paisibles. Le groupe aurait été encore plus important – 50 hommes200 –, ce qui laisse penser que le rapport était incorrect201 et reflétait une ambiance de réactions excessives. Mais l’extrême-Est était aussi la zone des commandos de Bosso, et si la plupart de leurs unités avaient été neutralisées à ce stade, il est clair que la région restait toujours agitée. L’ambassadeur du Ghana rapporte qu’un bataillon de 500 soldats, gendarmes et miliciens avait été envoyé pour des opérations de ratissage aux « points d’entrée présumés » de la région Est202. L’envoi d’un grand nombre de maquisards était peut-être lié au plan consistant à mener des opérations éclair contre les zones urbaines. À Niamey, la nuit qui suivit l’attentat de Diop, deux commandos furent pris la main dans le sac alors qu’ils s’apprêtaient à faire sauter les installations de Radio Niger203.
Les dernières opérations militaires
72Le Sawaba avait presque réussi à anéantir le cœur du régime. Alors qu’en fin de journée du 13 avril, le RDA s’apprêtait à déclencher une vague de répression, les infiltrations vers le Niger continuaient. Cela est d’autant plus remarquable que la tentative d’assassinat n’avait pas avancé d’un iota la progression vers le putsch projeté. Au contraire, elle avait créé le branle-bas de combat au niveau du régime, rendant ainsi toute nouvelle infiltration plus difficile que jamais. Mais comme nous l’avons noté, la guérilla suivait ses propres dynamiques, alimentées par l’engagement des militants restants qui, ne disposant pas d’alternative attrayante, représentaient toujours un danger pour le régime. Le président Diori fit bonne contenance en parlant à la radio une heure après l’attentat, rassurant ses partisans et leur annonçant que tout allait pour le mieux. Il annula cependant sa présence à une fête de gala, dans la soirée, au centre culturel français. Si cette décision ne représentait guère une marque de courage personnel, les Français aussi étaient choqués par le coup qui avait visé leur client. Les services de renseignement militaire notèrent que Djibo Bakary était loin d’avoir été neutralisé et que de nouveaux attentats restaient possibles, puisque telle semblait être la nouvelle tactique204. Mais après l’assassinat manqué, toute nouvelle action en ville devenait fort compliquée.
73Les commandos continuèrent donc leurs activités, mais dans les campagnes. Deux semaines après l’attentat de Diop, en début mai, 20 personnes, dont plusieurs maquisards, furent arrêtées dans un lieu inconnu. Diori protesta auprès du Dahomey à propos des infiltrations du Sawaba. Deux unités commando, un de sept hommes et l’autre de 12, entrèrent au Niger avec l’aide de guides, sans doute des Dahoméens. Le vice-président du Dahomey, Ahomadegbé, ordonna des opérations de sécurité dans les régions de Bassila et Gbérouboué, la première près de la frontière togolaise et toutes deux, très au sud de la zone de Malanville205. Au milieu du mois, les Français notent, au sujet du Niger, des inquiétudes sur les infiltrations et les caches d’arme à l’intérieur du pays206. Le 18, les forces gouvernementales affrontèrent une unité de cinq personnes dans la région de Say, à 30 km de Tamou. Les sawabistes, qui étaient passés par le territoire voltaïque, furent surpris au niveau d’un point d’eau et une fusillade éclata au cours de laquelle un commando fut tué tandis que les autres parvenaient à s’échapper207. Quelques jours seulement auparavant, Diori avait annulé une visite à Malanville – où il devait rencontrer Ahomadegbé –, parce que les services de sécurité nigériens considéraient que les mesures dahoméennes à l’encontre des éléments du Sawaba dans les villages de la région n’étaient pas suffisantes208. Le lendemain de l’accrochage des environs de Tamou, il y eut un autre heurt, à Malbaza entre Konni et Madaoua, dans la région Centre. Là, une patrouille militaire tua un maquisard (on ignore s’il y en avait plus d’un), complètement équipé, portant deux pistolets automatiques, 50 balles, quatre cartouches séparées et un radio transistor. Son corps fut transporté à Niamey209. On ne sait qui il était. En fait, il est difficile d’établir l’identité de nombres des morts mentionnés après l’invasion de l’automne.
74Le fait que les incursions de mai aient eu lieu à plus de 400 km les unes des autres indique un rayon d’action plus large, et il est tout à fait possible que certaines infiltrations n’aient pas été enregistrées. Ainsi, si les opérations de guérilla se sont d’une certaine façon concentrées à la frontière Niger-Dahomey pour mettre à profit un hinterland plus sûr, elles faisaient partie d’une tentative globale de continuer les attaques contre le régime. Cela résultait sans doute des ordres du leadership du Sawaba, bien que certaines infiltrations ont pu avoir été menées sur initiative des unités de maquisards elles-mêmes, habituées à une autonomie qui était leur seule garantie de survie. Quelles pouvaient être leurs pensées, à ce stade ? N’avaient-ils pas peur d’entreprendre ces incursions, sachant ce qui s’était passé l’automne précédent, et informés du fait que le régime avait mobilisé ses omniprésentes milices ? Même si ceux qui étaient restés dans les camps du Ghana n’avaient pas appris tous les détails des dramatiques événements de l’automne, l’information avait dû y filtrer. Croyaient-ils toujours possible de mettre la ligue franco-RDA à terre ? Il est impossible de donner une réponse définitive à cette question, mais l’image des sawabistes obtenue à travers les entretiens et les archives indique que nombre d’entre eux étaient motivés par l’amertume, sinon un regain de colère occasionné par le sort de leurs camarades et de leurs familles (voir chapitre suivant). Élevés dans une tradition politique aux yeux de laquelle la violence pouvait aider à vaincre l’ennemi et à aboutir à un apaisement ardemment désiré, les commandos poursuivirent leur action. Cependant, l’imposition d’une discipline militaire dans les camps peut aussi contribuer à expliquer leur persistance à continuer les infiltrations prévues.
75Leurs actions étaient peut-être provoquées par les mesures prises par les pays voisins pour mettre un terme à la présence du Sawaba sur leur territoire (voir plus loin). Ceci ne vaut cependant sans doute pas pour l’infiltration qui eut lieu dans l’extrême-Est, à la fin du mois de mai 1965. Tout en confirmant la manière générale dont se produisaient ces incursions, l’épisode s’inscrit dans la série de violences propre à cette région lointaine. Une trentaine de maquisards, qui essayaient peut-être de s’inspirer de la tactique consistant à aligner de gros effectifs, traversèrent la frontière du Nigeria et entrèrent dans le secteur sis entre Diffa et Bosso. Il y avait là, entre autres, Mamadou Ali, garçon boutiquier, qui avait aidé Aba Kaka lors de la première attaque de l’automne. Ils attaquèrent des véhicules de l’État (un camion de transport militaire avait été visé par un raid sur la route Diffa-Bosso le 30 mai), mais le résultat est mal connu. Le gouvernement lança une opération pour intercepter les commandos, peut-être avec des gendarmes et des miliciens, puisque la garnison de Diffa avait été agitée par une mutinerie dans la nuit du 28 au 29. Plusieurs maquisards avaient dû se replier au-delà de la frontière, comme le montre l’exemple de Mamadou Ali, qui avait pris la fuite pour Kano210.
76En début juin, les services français notent que « les infiltrations de Sawabistes au Niger se poursuiv[aient], en dépit de la surveillance des frontières ». Comme pour mieux saisir la signification de la dernière attaque, une rumeur portant sur la présence de Bakary à Kano le 10 juin circula. Il aurait été en route pour la province du Bornou, dans le Nord-Est, afin d’y organiser des infiltrations211. S’il est peu probable que le chef du Sawaba ait pris le risque d’un voyage au Nord Nigeria à ce stade, les données indiquent que les maquisards de la région de Bosso gardaient contact avec le leadership à Accra. Mamadou Ali s’était rendu à Kano avec une lettre du « secrétaire » de Aba Kaka (il s’agit peut-être de son adjoint, alors Idrissa Choua) sur la tactique à adopter dans l’attaque de la localité de Bosso212. Les hommes qui avaient mené le coup de main dans le secteur de Diffa-Bosso fin mai étaient probablement, au moins en partie, des maquisards nouveaux venus. Comme nous l’avons noté, l’entraînement se poursuivait au Ghana – en début du mois, un nouveau cours sur les « techniques de guérilla » avait commencé, destiné à « 50 élèves du Niger213 ». Ceux qui avaient pris part aux attaques de l’extrême-Est ont dû venir renforcer la présence des commandos dans la zone, après que ces derniers aient perdu une bonne partie de leurs coéquipiers depuis l’assaut de l’automne. Il y avait cependant, parmi eux, des vieux briscards comme Lawal Adia, qui était revenu d’Accra, et Maman Koyorambé. Ils avaient tous deux participé à la première attaque de Kaka sur Bosso et, le 6 juin, ils avaient pris part à une autre opération. On ne sait pas vraiment ce qui s’est passé, ni combien de maquisards furent impliqués, mais dans tous les cas, Koyorambé put retourner au Nigeria214.
77Les unités de Bosso bénéficiaient toujours de l’aide de Nigérians. Elles avaient une cache d’armes à Boula Kari, l’une des cachettes de Kaka, et au moins un membre de la NEPU, peut-être du même village, était en possession d’armes utilisables dans des opérations au Niger215. En fin juin, on rapporte que la NEPU aidait à organiser de nouvelles infiltrations. En dépit donc de l’affaiblissement de la position de la NEPU-Sawaba au Nigeria à la suite de l’invasion, les militants pouvaient encore se servir de son territoire comme hinterland et zone de transit. Le 25 mai par exemple, des sawabistes de Lagos se retrouvèrent à l’occasion de « Africa Day ». Ils se rencontrèrent chez Mohamed Baba, dont le rôle (il était changeur d’argent) indique qu’il se faisait peut-être encore des transactions financières en faveur du mouvement. Vers la fin juillet, un certain Hami Mohamed dit Bouzou, paysan de la région de Téra et commando, voyagea d’Accra à la frontière nigériane avec un chèque de plus de 1 200 livres ghanéennes. Il se rendait chez un camarade de Lagos nommé Alhadji Seidou216. Par ailleurs, au plan diplomatique, le leadership du Sawaba essaya de galvaniser la cause en envoyant un délégué à la 4e Conférence de Solidarité des Peuples Afro-Asiatiques tenue en mai à Accra. Ce personnage en appela non seulement à un soutien moral, mais mit aussi l’accent sur le fait que ses camarades avaient « surtout besoin d’armes et de matériel solide217 ».
78Si le Ghana et le Nigeria – ce dernier, du fait essentiellement de sa taille et de sa complexité – fournissaient toujours un espace de manœuvre au Sawaba, les infiltrations étaient néanmoins très risquées. 15 commandos furent pris avec leurs armes, dans la seconde quinzaine de mai, tout au travers du pays218. En juillet 1965, les Français étaient d’avis que Bakary avait du mal à trouver des volontaires pour les incursions. Le 30 juin, les services de renseignement militaires notent que si les infiltrations continuaient, nombre d’entre elles étaient « contrecarrées » par les gendarmes et la milice219. Par ailleurs, on arrêtait des sawabistes au Nigeria comme dans d’autres pays voisins (nous revenons sur ceci au chapitre 14), ce qui commença à gêner les opérations. En août, un certain Mamadou Maiga, militant de Tahoua mais vivant à Gao, reçut un envoyé de Bakary. On ignore ce qui se passa à cette occasion, mais Maiga devint aussitôt l’objet de l’attention des Maliens. Dans tous les cas, il n’y avait apparemment d’activités militaires au cours de ce mois que dans le nord du Dahomey, où un commando mené par Issoufou Danbaro campait dans le village de « Birni Lahiya » – probablement Birni Lafia, que Danbaro avait jadis visité, en face de Tenda au Niger. Sa présence fut confirmée par des paysans et les gendarmes – sans doute du côté nigérien du fleuve – furent avertis. Danbaro et ses camarades, rapporta-t-on, recevaient l’aide de l’armée dahoméenne220. À la fin du mois, une unité de maquisards aurait pris position à Kirogobou, un village du Dahomey près de la frontière et, probablement, du Parc National du W (ou à l’intérieur), où les autorités nigériennes ordonnèrent une opération. Néanmoins, à la mi-septembre, les Français rapportent que des « rebelles » se trouvaient toujours dans le parc, à peu près entre Say et Gaya, se maintenant dans l’hinterland dahoméen221.
79Cependant, les risques à présent encourus par les maquisards créaient aussi des tensions au sein de certaines unités. Aba Kaka eut une prise de bec avec son adjoint Idrissa Choua sur les tactiques à appliquer dans la région de Bosso, sujet sur lequel ils demandèrent l’avis du leadership à Accra222. L’un des compagnons de Kaka, Madou Kouta, fut tué dans un accrochage. Kaka lui-même fut blessé à la jambe lors de son repli à travers la Komadougou, après un heurt au cours duquel un autre maquisard, Mounkouta, reçut des blessures. Kaka essaya de le porter sur son dos, mais fut obligé de le laisser en arrière pour aller chercher des secours dans un hameau du nom de Koudo Kourou, à trois kilomètres du village frontalier de Malam Fatori. À son retour, Mounkouta était mort. Constamment en quête de nourriture, et soignant sa jambe à l’aide de remèdes traditionnels, Kaka regagna le côté nigérien du fleuve (les Nigérians ayant lancé une nouvelle opération de ratissage). Il demeura dans le secteur un mois environ, avant de se rendre à Maiduguri où se trouvaient des gens prêts à l’aider223.
80Nous ignorons combien il restait encore de militants dans les unités de Bosso à ce stade, mais de façon plus générale, de tels événements montrent que les rangs des maquisards s’éclaircissaient. En septembre, le Sawaba fit savoir qu’il avait donné l’ordre à ses maquisards d’observer un cessez-le-feu pour la durée du sommet de l’OUA à Accra. Il en était ainsi parce que les alliés francophones du Niger avaient l’intention d’organiser un boycott en réponse au soutien apporté par Nkrumah à leurs oppositions, particulièrement celle du Niger224. S’il était dans l’intérêt du Ghana que le Sawaba s’abstienne, pour le moment, de créer de nouvelles complications pour ses intérêts diplomatiques, la situation sur le terrain n’offrait bien entendu guère d’alternative sérieuse au mouvement225. Mais le régime nigérien marinait toujours dans la paranoïa, alimentée à présent par l’« élection » présidentielle prévue pour le 30 septembre. Il s’agissait du premier scrutin de ce genre au Niger, et le candidat unique, Diori, obtint le résultat totalitaire de 99,8 % des votes. Les législatives mono-partisanes qui suivirent en octobre se conclurent de manière similaire226.
81Si les sawabistes servaient de boucs émissaires pour tout ce qui tournait au vinaigre (le régime parla de bandes du « Sawaba » ravageant la région de Tillia, près de la frontière malienne – alors qu’il s’agissait clairement de pillards touaregs227), leurs commandos réussirent tout de même à marquer le coup. Le 20 octobre, la veille des élections législatives (et le jour d’ouverture du sommet de l’OUA), les maquisards attaquèrent un camion de l’État sur la route entre Diffa et Bosso. Selon les services français, le véhicule transportait du matériel électoral devant servir à Bosso et il était sur le chemin du retour lorsque trois commandos l’attaquèrent, avec un échange de coups de feu à la clef. Les maquisards – qui eurent deux blessés – s’enfuirent au Nigeria, laissant derrière eux plusieurs armes (pistolets, mitraillettes, grenades). Les entretiens confirmeront plus tard ce repli, ajoutant que Aba Kaka lui-même avait pris part à l’embuscade, qu’elle eut lieu alors que le véhicule s’en retournait, et que les commandos s’étaient emparés de l’urne, ainsi que d’une somme d’argent228.
82L’épisode montre que cessez-le-feu ou pas, les actions de guérilla suivaient leur propre dynamique, en particulier dans l’Est. Aba Kaka se rappellera plus tard avoir encore une fois pénétré au Niger, après le raid de la veille des élections, rencontrant des forces de l’armée qui avaient fait halte pour un casse-croûte. Il aurait ouvert le feu sur eux avant de se retirer au Nigeria et de se rendre à Maiduguri. Selon son propre compte-rendu, il était, à ce stade, le dernier homme de son unité229. Cependant, les services français parlaient de la possibilité de nouveaux actes de guérilla en fin 1965, alors que le nouveau contingent de recrues qui s’était rendu en Chine communiste était en train de rentrer au Ghana230. Ainsi, en février 1966, un groupe de commandos bien armés quitta, dit-on, le Ghana pour le sud du Nigeria. Ils devaient aller à Katsina où ils se regrouperaient et seraient hébergés par des gens de la NEPU. Des éléments du Sawaba, libérés de la prison de Kaduna par le commandant militaire local, pourraient éventuellement les rejoindre. Vingt militants et maquisards se diviseraient en quatre groupes de cinq hommes pour infiltrer le Niger et tâcher de reconstituer des cellules démantelées. Par conséquent, à plusieurs reprises durant ce mois, des « éléments sawabistes [furent] signalés ». Le 8, on rapporta qu’une unité de 15 hommes était en activité dans la région de « Gamba » au Nigeria (sans doute Kamba, dans le Nord-Ouest, à un jet de pierre de Gaya). Bien que cinq d’entre eux aient été arrêtés par des forces nigérianes, les Nigériens étaient préoccupés et une patrouille fut envoyée dans la zone frontalière. Le 17 février, les Français rapportent que 30 commandos bien armés auraient quitté Accra pour le Niger. Issoufou Danbaro se serait rendu dans la capitale du Ghana le 21, à la tête de 55 nouvelles recrues en fin de formation231.
83Si ces chiffres sont exacts, ils montrent que les dirigeants du Sawaba restaient décidés à lancer des opérations contre l’ennemi. Le 20 février, des hommes armés étaient aperçus dans la région de Madarounfa – la zone d’intervention de Dan Koulou aux premières heures de la rébellion, pratiquement une année et demie plus tôt232. Le RDA était visiblement inquiet, d’autant que les événements survenus dans les pays voisins soulignaient la vulnérabilité des régimes alliés. Le président Yaméogo avait été renversé par l’armée voltaïque en début d’année. Quinze jours plus tard, le Nigeria était secoué par un violent coup d’État au cours duquel le Premier ministre de la Fédération, Abubakar Tafawa Balewa, et celui du Nord, le leader NPC Ahmadu Bello, furent assassinés233.
84Mais ces événements ne furent suivis d’aucune amélioration au plan stratégique, comme le montre l’arrestation de deux sawabistes, Mounkaila Albeidou et Amadou Albeidou, qui, le 22 février, tentèrent d’entrer au Niger dans un camion. Il est possible qu’ils voulaient simplement rentrer chez eux (il n’est pas fait mention d’armes), mais ils furent stoppés à Gaya par des gendarmes prévenus de leur arrivée imminente234. Deux jours plus tard, un événement dramatique eut lieu, qui devait sonner le glas de la campagne de guérilla du mouvement. Le 24 février, alors que Kwame Nkrumah se trouvait en visite d’État au Nord Vietnam, l’armée ghanéenne prit le pouvoir à Accra et, entre autres choses, mit brusquement fin à l’assistance apportée au Sawaba. À partir de là, le siège et les camps du mouvement furent démantelés (voir chapitre suivant), les infiltrations commencèrent à décliner de façon marquée, même par rapport à la situation de plus grande rareté des actions des unités à la suite de l’attentat contre Diori le printemps précédent. En juin 1966 – presque deux ans après le début des attaques – les services français notent que
« de temps à autre la population signale dans la région la présence de petits groupes de terroristes armés mais manquant d’agressivité. Ce sont certainement les restes des commandos ayant opéré dans cette région et qui à cheval sur les frontières errent entre le Mali, la Haute-Volta et le Niger235 ».
85La tragédie des maquisards du Sawaba était totale. Vaincus, tués, emprisonnés ou pourchassés au-delà des frontières du Niger, ils ne pouvaient ni rentrer chez eux, ni se réfugier dans les pays voisins. Nombre d’entre eux ne savaient plus que faire. Comme nous le verrons au chapitre suivant, d’innombrables militants et commandos durent se débrouiller et trouver un point de chute quelque part en Afrique de l’Ouest.
86C’est dans ce contexte qu’on rapporte que Djibo Bakary prit part à une rencontre avec Kwame Nkrumah à Kankan en Guinée (ils devaient tous deux vivre en exil dans ce pays) afin de planifier de nouvelles actions contre le RDA. Il fut question d’envoyer un émissaire du Sawaba avec 50 millions de francs CFA à Niamey pour qu’il soudoie quatre personnalités militaires. Si cela est vrai, la chose ressemble à des plans antérieurs (Tondibia 1961, Diallo 1963 et les contacts présumés de Dan Galadima avec des officiers en 1964), bien que rien de concret n’ait découlé de tout ceci. S’agissant des officiers que Bakary avait à l’esprit, les Français supposèrent que l’un d’entre eux pouvait être Bayéré Moussa, un lieutenant originaire de Filingué qui était déconsidéré et vivait sous surveillance. Ils pensèrent aussi que le Sawaba se montrerait désireux de libérer le capitaine Diallo qui avait eu au moins quelques rapports avec les militants du mouvement236. Nkrumah aurait écrit une lettre à Modibo Keita, affirmant de manière peu crédible que 500 Nigériens étaient en train d’être formés dans un camp non loin de Kayes, dans l’ouest du Mali, et aideraient à la réalisation du coup d’État projeté avant le 10 novembre, de concert avec des officiers des FAN et deux ministres (Léopold Kaziendé et Harou Kouka). Les Français soulignent que cette partie du renseignement était défectueuse – sans doute un exemple de dissémination de rumeurs susceptibles de perturber le RDA – tout en indiquant qu’il était possible que Sékou Touré, Nkrumah ou même Keita puissent avoir l’idée d’envoyer un tueur à gages contre Diori, ou d’essayer de s’emparer du pouvoir lors d’un voyage de ce dernier à l’étranger237.
87Quoi qu’il en soit, on n’entendit plus parler de tout ceci. Le Chameau avait finalement été neutralisé. Si les restes du Sawaba dans la région de Bosso refirent de l’opposition trois ans plus tard – en août 1969 –, il ne s’agit là que d’une réaffirmation de leur entêtement. Cette action reflétait plus l’esprit d’indépendance de la population locale qu’une initiative du leadership du Sawaba (qui ne fonctionnait plus, à ce stade). Cinq hommes auraient été impliqués, dont deux qui auraient été en train d’être formés au sabotage à Am Dam, dans l’est du Tchad, où ils auraient été hébergés par un sous-préfet du nom de Aboubakar Korey. On dit qu’ils auraient reçu leur instruction d’« un certain Brahim Abatcha dit Robert » – i. e. Ibrahima Abatcha, fondateur du mouvement du FROLINAT. Abatcha était longtemps resté à Accra où il a pu nouer contact avec des sawabistes de Bosso, tout comme il l’avait fait avec des rebelles de l’UPC du Cameroun238. Il se peut aussi que les contacts avec le FROLINAT aient été facilités par des sawabistes du Maroc. Bachir Boukary de Zinder se rappellera plus tard avoir rencontré Abba Sidick lors de sa formation en agronomie. À la mort de Abatcha en février 1968, Sidick lui succéda en tant que secrétaire général du FROLINAT239, bien que Boukary a dû le rencontrer plus tôt, puisque l’étudiant zindérois partit travailler en Guinée cette année-là240. Si les deux sawabistes du Tchad ont donc été entraînés par Abatcha, ils ont dû recevoir leur instruction auprès de subordonnés, ou avant 1968. Dans tous les cas, ils auraient promis à des compatriotes au Niger des armes (fusils, pistolets, une mitraillette). Le RDA dit aux officiers des FAN de se montrer vigilants, mais aucune action armée de sawabistes ne fut enregistrée241.
88S’il semble que cette évolution a été due aux activités des forces de la base, le chef du Sawaba lui-même essaya de nouer des liens avec les redoutables rebelles tchadiens quelques mois plus tard. En octobre 1969, on rapporte qu’il s’était rendu en Libye, où le colonel Kadhafi avait pris le pouvoir et soutenait déjà le FROLINAT. Bakary rencontra Sidick et les services français observèrent qu’ils pourraient décider d’agir en commun, y compris en reprenant des opérations au Niger242. Kadhafi aurait promis son soutien au chef du Sawaba, mais la nature de cette assistance ne fut pas spécifiée243.
89Il s’agissait là des derniers éclats de la résistance du Sawaba. La ligue franco-RDA était finalement parvenue à se consolider, mais au prix d’un pouvoir oppressif qui avait étouffé tout courant sous-jacent de mécontentement – ou presque. Soulignant l’importance de Tessaoua comme l’un des berceaux des petites gens, un activiste du cru, dénommé Koundédé et présenté comme un « extrémiste du Sawaba », avait, en juin 1969, ouvertement fait de l’agitation contre le RDA. Défiant son secrétaire local, se moquant du parti et du gouvernement et prédisant la fin de la présidence de Diori, il partagea ses vues avec les gens de Tessaoua et des villages environnants244. Le député de la région s’en inquiéta fortement, surtout étant donné l’état déplorable de la section locale du parti. Il envoya à la capitale une lettre sur ces actes audacieux, tandis que la police se chargeait de l’incorrigible personnage245.
Observations finales
90Ce qui est remarquable à propos des sawabistes, certes complètement vaincus sur le champ de bataille, c’est la ténacité avec laquelle ils persévérèrent dans leurs infiltrations. Débutant vers 1960, ces incursions – d’abord pacifiques, destinées à mobiliser la population et à mettre en place une infrastructure – se poursuivirent jusqu’à ce que les maquisards perdent leur base au Ghana (1966)246. L’invasion catastrophique de 1964 ne changea pas leur conduite, même si les opérations diminuèrent considérablement, puisque l’attaque ratée empêcha l’envoi coordonné d’effectifs larges à travers la frontière. En ce qui concerne la base, ceci peut s’expliquer par des motivations personnelles et la situation dans laquelle se sont trouvés les hommes. L’hostilité à l’égard du régime ; les contraintes du système militaire dans lequel ils évoluaient ; et le manque d’alternative, surtout après les attaques de 1964 – tout cela les poussa à continuer. De plus, une culture politique dans laquelle la violence n’était jamais bien loin du contexte de campagne politique, additionnée à un cadre idéologique mondial dans lequel le message du marxisme-léninisme posait la force comme une voie naturelle, légitime et fructueuse de recherche du changement247, faisaient qu’il n’était pas aisé de concevoir que la confrontation armée pouvait être contre-productive. Les sawabistes acquirent ainsi un point aveugle qui les empêcha de concevoir une alternative, d’autant plus que leur antagoniste adoptait à leur égard une attitude similaire.
91Si nombre des militants instruits se rendaient compte des risques liés à l’assaut, la plupart des commandos n’en apercevaient pas les conséquences248. Évoquant plus tard leurs souvenirs de l’histoire du Sawaba, les paysans qui l’avaient soutenu à Bandio diront qu’étant donné les circonstances, la rébellion était normale car elle aurait pu marcher, et si elle avait effectivement marché, il n’y aurait pas eu de problème249. Tout en reflétant le biais propre à leur univers politique, cet argument circulaire est néanmoins plus proche de la vérité historique que les témoignages des militants instruits, dont les vues sur le passé du Sawaba sont marquées par l’examen rétrospectif de la défaite du mouvement250. Cependant, dans le contexte changeant et dynamique d’un entretien, les affirmations de certains sur le fait qu’ils pensaient, avant l’invasion, être en mesure de remporter la victoire – sans quoi ils ne seraient pas passés à l’action – sont sans doute des aveux plus authentiques251. En fait, même parmi les sawabistes instruits, certains étaient fortement dévoués à la confrontation armée avec le RDA. Le vécu d’hommes comme Mounkaila Beidari, Mounkaila Albagna et Siddi Abdou révèle la profondeur de cet engagement, entretenu par les deuils familiaux, les frustrations en matière d’éducation ou la persécution politique – menant parfois au suicide. De plus, bien que la rébellion ne se soit pas limitée pas à une région spécifique, le vaste contexte géographique du Niger permit aussi à des problèmes purement locaux de générer des motifs d’action contre le régime. Le meilleur exemple à cet égard est la querelle de la chefferie de Bosso et l’importance des énergies supplémentaires qui purent être mobilisées par ce biais.
92Au niveau du leadership, la poursuite de la lutte au-delà de 1964 soulève d’autres questions. Bakary, et selon toute probabilité, Dan Galadima également, étaient conscients du fait que l’hinterland était peu sûr même avant l’invasion. Comme ils se sont laissés aller à lancer l’attaque de manière prématurée, ils en portent une lourde responsabilité quant aux pertes subies par le mouvement. Les tensions qui se manifestèrent au sein du leadership après l’invasion de l’automne montrent qu’ils s’en rendaient compte. L’ampleur de leur responsabilité ne fit qu’augmenter avec la décision de continuer la lutte, même s’ils n’avaient pas vraiment d’autre choix. On peut cependant interpréter la manière dont le « scorpion » avait cherché à développer une stratégie de frappe directe pouvant renverser le régime à travers un putsch (partiellement conduit par l’armée) comme une tentative d’éviter de nouvelles pertes inutiles. Mais en fin de compte la tentative de coup d’État et l’action urbaine qui devait l’accompagner furent déjouées sur la place de prière de la Grande Mosquée. Quels qu’aient été les liens noués par le « scorpion » avec les officiers des FAN, l’armée n’intervint pas. Les unités de commandos du secteur de Gouré et de l’extrême-Est n’avaient d’autre choix que de se retirer. De manière plus générale, les maquisards du Sawaba organisèrent quelques attaques supplémentaires après l’invasion de l’automne, mais l’élément de surprise avait à présent depuis longtemps disparu, et ils ne constituaient donc plus de menace pour le régime. Lorsque l’assassinat du président et le putsch qui devaient l’accompagner échouèrent, le Sawaba fut définitivement vaincu. Les attaques qui suivirent l’action de Diop n’avaient qu’une valeur de nuisance, bien que le fait qu’elles se déroulèrent à travers tout le pays témoigne de la vigueur de l’engagement du mouvement et de ses hommes.
93À travers Diop et ses compagnons, le Sawaba avait presque réussi à annihiler le cœur du régime252. Mais cela aurait-il contribué à détrôner le RDA ? Comme les militaires – stimulés surtout par des intérêts corporatistes – n’ont pas bougé, d’autres membres du parti auraient vraisemblablement pris le contrôle de la situation et le régime aurait survécu – en dehors de toute intervention française. De plus, si les opérations militaires du Sawaba ciblèrent, au printemps 1965, les centres urbains du pouvoir, elles n’avaient jamais été élaborées en vue d’attaquer exclusivement l’une des zones, urbaine ou rurale. Étant donné ses origines semi-urbaines et le fait que la population était rurale dans sa majorité, cela était peut-être inévitable, mais sa force de frappe en fut affaiblie. Ainsi, au cours des six années au cours desquelles le Sawaba organisa des infiltrations, les incursions rurales alternèrent avec des actions menées en agglomération, suivant les besoins et occasions de l’heure. Les infiltrations en campagne ne doivent pas être vues comme relevant simplement de l’inspiration algérienne ou maoïste (aussi importante qu’elle ait été), et on ne peut non plus les considérer comme une tactique secondaire résultant de difficultés à agir dans les centres du pouvoir – les villes. En pratique, les infiltrations rurales étaient importantes parce que les commandos ne pouvaient accéder aux centres urbains qu’à travers les campagnes. Cependant, comme ils ne réussirent jamais à atteindre véritablement les villes, l’aspect rural des actions de guérilla est resté plus visible.
94Rétrospectivement, la lutte armée fut, dit-on, mal organisée253. Dans une certaine mesure, il semble qu’une telle perception découle de la vision après coup et des efforts déployés par le régime pour tourner les maquisards en ridicule après leur défaite. Cependant, les commandos agirent suivant un plan d’attaque détaillé, qui montrait un niveau de préparation considérable. Leur professionnalisme est attesté par la capacité à intervenir tout le long de la frontière occidentale et méridionale du Niger dans un laps de temps de deux semaines. Les commandos ne furent pas non plus des victimes passives qui, une fois la frontière du Niger traversée, pouvaient être prises un à un. Nombre d’entre eux avaient reçu un entraînement militaire rigoureux, et, comme le montre le cas de maquisards comme Siddi Abdou dans la région de Tahoua, Mounkaila Albagna à Dargol, et Aba Kaka et Bachir Moustapha dit Moutti dans l’extrême-Est, se trouvaient en mesure d’affronter l’ennemi. Plusieurs avaient pu infiltrer le pays impunément, organiser des attaques et se replier sur leurs bases arrière. Les histoires personnelles de Baoua Souley, Amadou Diop, Aba Kaka, et sans aucun doute de nombreux autres commandos anonymes, sont des exemples parlants. Les grigris portés par nombre d’entre eux comme une part intégrante de leur équipement, loin d’être un signe d’amateurisme, relèvent foncièrement du contexte culturel de la société dans laquelle ils combattaient.
95Il reste néanmoins clair que les choses ont terriblement mal tourné et que de graves erreurs ont été commises. Le pire fut de prendre, de façon précipitée, la décision de commencer les attaques en tant que telles en septembre 1964. Les arrestations des mois précédents avaient mis le régime sur le pied de guerre sans induire une révision de la stratégie et des tactiques du Sawaba, en dépit du fait que des renseignements de grande valeur avaient été obtenus par son ennemi grâce à la capture de Hamballi. En dehors de sa tentative d’agir aussi rapidement que possible, le leadership n’a tenu aucun compte de la mobilisation de la milice, ni de la peur au sein de la population et des conséquences que ces facteurs pouvaient avoir sur l’action des commandos. Bien que l’élément de surprise ne se soit pas entièrement dissous, puisque le régime ne savait pas de quel côté les maquisards pouvaient venir, la sécurité des commandos en fut grandement compromise. Plusieurs sawabistes penseront donc – dès l’époque même, mais surtout de façon rétrospective – que la situation n’était pas mûre pour une attaque, aussi bien en termes de préparation des maquisards qu’en ce qui concernait l’état d’esprit de la population générale254. Il aurait mieux valu attendre, remettre les cellules sur les rails et établir de nouvelles caches d’arme pouvant compenser les infrastructures perdues.
96Cependant, on peut douter qu’à ce stade précis, une telle approche aurait accru les chances qu’avait le Sawaba de vaincre le régime, en particulier si l’armée avait refusé de lui porter assistance. Pendant cinq ans, le mouvement avait été occupé à se préparer pour un soulèvement, ce dont le régime était conscient. En fait, la défaite du Sawaba provient en partie des efforts de collecte de renseignements du régime. En tâchant de comprendre leur défaite, les sawabistes soulignèrent par la suite avec insistance le dommage occasionné par les espions, les taupes et les indicateurs. Ceci peut relever dans une certaine mesure d’un syndrome de la cinquième colonne – cette obsession de « l’ennemi de l’intérieur », réel ou imaginaire, qui peut servir à donner du sens à une tournure catastrophique des événements. Cependant, la ligue franco-RDA a mis en place un réseau d’espions qui s’est étendu des villes du Nord Nigeria au Ghana, et avait pénétré jusque dans les camps d’entraînement des maquisards. En évoquant le temps passé au Ghana, le chef de camp Ali Amadou déplora plus tard l’existence de nombreux indicateurs dans le pays, qui trahirent les militants du mouvement lors de la lutte au Niger, mais aussi au Ghana, à la suite de la chute de Nkrumah. Oumarou Janba aussi (bien qu’il n’ait jamais lui-même quitté le Niger) insista sur l’existence de traîtres, d’espions et de « saboteurs » au sein de la communauté du Sawaba en exil, si bien que le régime savait d’où viendraient les commandos. Bien que cette dernière assertion était évidemment inexacte, de nombreux autres militants confirment la généralité de ces observations. Le sympathisant du Sawaba Sao Marakan affirme que des gens basés à Accra, et payés par le RDA, envoyèrent des lettres à Niamey, informant les autorités de l’arrivée imminente des commandos. D’un autre côté, les migrants nigériens de retour du Ghana donnaient également des informations sur les sawabistes qui s’y trouvaient. Les unités de commandos du Nord Nigeria devaient faire face à des réseaux d’espions bien établis dans les villes de la région255.
97Mounkaila Beidari attira même l’attention sur la trahison à l’intérieur des unités, y compris la brigade de Dodo Hamballi. Mais certains des exemples ne paraissant pas convaincants, le phénomène n’a pas dû être bien répandu256. Les militants qui avancent que les rapports biaisés des cellules domestiques furent la cause de la défaite257 passent aussi à côté de l’essentiel. Le leadership décida de passer à l’attaque non pas parce que les renseignements indiquaient que le moment était arrivé, mais afin d’éviter que les choses n’empirent. Le mouvement avait réussi à mettre en place un réseau de renseignements qui couvrait l’intégralité du pays et fournissait même des informations sur les ministres, et Dan Galadima avait visité en personne les zones d’infiltration258. Il n’est pas possible que les informations aient été d’aussi mauvaise qualité. Les sawabistes qui affirment avoir su que l’invasion échouerait sont sans doute pour une bonne part sous le coup d’une perception rétrospective des événements259. De plus, Aboubakar dit Kaou, un militant de l’intérieur haut placé, avait, de son plein gré, poussé le leadership à commencer les opérations, affirmant que la situation était mûre. S’il y a assurément eu des rapports biaisés, du fait, également, des pressions de la hiérarchie militaire260, certaines des affirmations à cet égard résultent des pressions exercées par le régime sur les commandos261. Comme l’a répété à plusieurs reprises Mounkaila Beidari, le régime n’était certainement pas au courant de tout262.
98Un facteur contraignant ayant joué contre la réussite du projet se trouve naturellement dans la configuration géographique. Si la Komadougou et le Parc du W étaient favorables aux tactiques de la guérilla, ceci n’a pas suffi d’un point de vue général. Il en était d’autant plus ainsi que les commandos s’étaient dispersés à travers le territoire (la décision d’agir de cette façon avait sa propre logique, mais contribua à affaiblir la vigueur de l’action). Ils avaient aussi commencé les opérations à la fin de l’hivernage, alors que la végétation se raréfiait et la période des récoltes peuplait les champs de travailleurs. Étant donné un hinterland où les conditions naturelles étaient similaires et les autorités souvent peu fiables, l’environnement n’en était que plus dangereux. De plus, l’armement était un fatras d’armes à la qualité souvent douteuse. En grande partie, ceci est dû à la résistance des pays de l’Est de soutenir à fond la guerre du Sawaba, et en retenant les livraisons d’armes chinoises, Sékou Touré compliqua davantage les choses. Les services de renseignement occidentaux indiquent parfois que l’entraînement des commandos était de mauvaise qualité263. Dans une certaine mesure, cela a pu être vrai de l’instruction ghanéenne – qui, à en croire les ennemis de Nkrumah, aurait été médiocre – ainsi que de la formation à Nankin, qui s’est peut-être plus occupée d’idéologie que d’exercices d’entraînement. Mais en grande partie, ces observations ont été faites longtemps après les événements par des gens qui connaissaient déjà l’issue de la lutte. Les entraînements au Nord Vietnam et en Algérie étaient assez sérieux, et à plusieurs occasions, les Français et les Britanniques ont affirmé que l’état de l’entraînement des commandos était bon. Le régime du Niger n’a pas manqué de souligner le caractère professionnel de leur équipement.
99Néanmoins, étant donné le fait qu’ils étaient dispersés à travers le Niger, qu’ils n’avaient pas d’armes pour la paysannerie264 et que la population ne se mettait pas de leur côté, les hommes envoyés par le Sawaba constituaient un effectif terriblement inadapté. Il en est de même de l’armement – les unités utilisèrent surtout des pistolets et des grenades, non des mitraillettes, qu’elles ne détenaient en général qu’en petit nombre. Ceci rendit les commandos vulnérables, d’autant plus qu’ils n’étaient pas autorisés à terroriser la population. Cet élément renvoie à une cause plus profonde de la défaite. En expliquant pourquoi le Sawaba avait échoué là où le FROLINAT avait réussi, le militant zindérois Bachir Boukary affirme que les rebelles du Tchad avaient non seulement reçu plus de soutien de la part des autres pays, mais ils avaient aussi pillé la population (en réalité, ceci n’est exact que pour la période commençant à la fin des années 1970)265. Ils devinrent du coup une organisation capable de mobiliser une force égale à celle de l’ennemi auquel ils s’en prenaient266. Par contraste, les hommes de Bakary montrèrent peu d’agressivité267, ce qui avait beaucoup à voir avec la consigne de ne pas tirer sur la population, étant donné l’idée que le mouvement était son défenseur – les seules cibles étaient les représentants de l’État, tels que les agents de douane, les enseignants et les hommes du RDA.
100Ainsi, conduits par les gradés de la hiérarchie militaire, les maquisards marchèrent sur le pays avec tout ce qu’ils avaient, y compris les documents nécessaires à l’exécution des ordres et au contact avec les militants. Ceci indique qu’ils pensaient non seulement qu’ils n’allaient pas être pris, mais aussi qu’ils étaient toujours le mouvement social de jadis, non une simple force militaire. Ses agitateurs s’en allaient retrouver le peuple et le conduire, en qualité d’avant-garde, dans la marche flamberge au vent sur la capitale. Comme le peuple jouait un rôle clef dans la stratégie du mouvement, les maquisards se dispersèrent dans le pays, prêts – tout comme dans les années 1950 – à développer des liens et mobiliser la population pour une victoire rapide sur le régime. Ils rentraient dans leur terroir d’origine, et même s’ils étaient armés, une force militaire de grande dimension n’avait pas paru nécessaire – ou n’avait pas été prévue. Dandouna Aboubakar, le redoutable tribun du Sawaba, entra dans Dibissou armé jusqu’aux dents mais se laissa acculer par les habitants du village, et finit par tirer sur le représentant du régime après avoir été trahi. Les données sur la coercition et la violence, à l’intérieur comme à l’extérieur du mouvement, sont d’ordre trop accessoire pour nous permettre d’obtenir une image plus violente des pratiques militaires du Sawaba, même si les commandos avaient recours à des procédures de maintien de la discipline268. Si les armes de combats de rue, tels que les cocktails Molotov, étaient exceptionnels dans l’arsenal des maquisards269 et si les tirs en l’air se produisirent lors des dernières phases de l’invasion, marquées par le désespoir, ils montrent que, en marge des prescriptions maoïstes sur la lutte armée, la stratégie du mouvement prenait son inspiration aussi dans l’expérience du Sawaba en tant que mouvement social des années 1950, orienté vers l’agitation politique et la campagne électorale, plutôt que vers l’affrontement militaire. La rapidité avec laquelle l’ordre d’attaque fut exécuté s’inscrit dans l’atmosphère d’aspirations millénaristes qui avaient toujours motivé sa lutte. Il en est de même de l’annonce publique de l’assaut, bien que cela n’a pu que contribuer à mener le mouvement à sa perte. En prévenant le régime, cette annonce fut pratiquement une garantie de défaite.
101Mais la continuité historique entre les affrontements de 1964 et les manœuvres de campagne électorale des années 1950 ne doit pas être poussée trop loin. Les commandos ont bel et bien affronté les forces du régime, tuant des gens et attaquant des bâtiments et des installations. De plus, suivant la logique de la guérilla, ils n’arrêtèrent pas d’agir (essayant d’épuiser les forces du régime avec des opérations coup de main) : ils continuèrent les infiltrations et les attaques après l’échec de l’invasion. Enfin, pour contacter les militants d’un mouvement qui s’étendait sur tout le pays, il était inévitable que les maquisards prennent des documents avec eux. Leur réseau personnel ne comprenait pas nécessairement tous les militants et toutes les cellules.
102Si une stratégie du coup d’État, et non celle qui était fondée sur la guérilla, allait contre la mentalité des sawabistes, elle aurait peut-être marché si elle avait été mise en œuvre dès le départ, et non après l’invasion ratée qui avait mis le régime en état d’alerte maximum. Comme l’a supposé un militant zindérois270, un nombre plus important d’attaques contre les piliers du régime aurait peut-être rapproché le mouvement de ses objectifs, avant que le régime n’ait mobilisé ses forces. Il n’empêche, pour qu’une telle stratégie soit bien mise en œuvre, les maquisards avaient aussi besoin de l’aide des cellules de l’intérieur, et bien que ces dernières fonctionnaient encore au moment de l’invasion, elles avaient dû s’enfoncer davantage dans la clandestinité, ce qui limitait sérieusement leurs capacités.
103Cependant, il convient de souligner que le mouvement avait raison de penser qu’il avait des chances de vaincre le RDA. Le régime nigérien était fragile, étant marqué par de nombreuses tensions et fractures opposant le parti à l’État et l’armée aux groupes paramilitaires. Son leadership était instable, étant basé sur un triumvirat de rivaux, dont certains étaient déséquilibrés et paranoïaques. Les « Rouges » n’étaient pas enclins à la modération. Les services occidentaux de renseignement parlent de l’insécurité psychologique du régime, qui souffrait de sa création par les Français. Ces derniers eux-mêmes avaient du mal à dissimuler leur mépris pour ses représentants changeants et effarouchés. En tant qu’expression des intérêts des « commis », le régime était peu enraciné dans la société, malgré la manière dont il avait mobilisé les chefs. Il était vulnérable aux tensions intergénérationnelles et au sentiment régionaliste, et les Français notaient régulièrement ses faiblesses, estimant que Bakary et ses hommes continuaient à représenter un danger, et pouvaient rapidement mettre le régime à genoux. Si les Français n’étaient pas prêts à abandonner volontairement le régime qu’ils avaient établi, les plans d’attaque du Sawaba montrent que le Sawaba les considérait comme l’ennemi ultime. Il est, bien entendu, peu probable que le mouvement ait jamais pu être en mesure de les affronter, mais un coup d’État rapidement exécuté, qui les aurait pris par surprise, aurait peut-être marché271.
104À la suite de l’échec de l’insurrection, on rapporta que les Nigériens condamnaient les actions du Sawaba. Bien qu’il soit difficile d’évaluer la fiabilité de tels rapports272, il semble que la réaction populaire a effectivement été négative, au moins en partie. Après sa défaite, le mouvement fut accusé d’avoir attaqué son propre pays, sans parler de l’assaut mené contre un rassemblement religieux273. Il y avait beaucoup de mécontentement contre le RDA, mais la mobilisation de ses milices empêcha les gens de se rallier. Certes, certaines régions résistèrent ouvertement au gouvernement, mais cela ne suffit pas à faire pencher la balance. L’impopularité du régime ne signifiait donc pas que les temps étaient mûrs pour l’attaque. Il y eut de bonnes récoltes, au moins dans certaines zones de l’Est, et les efforts déployés par le RDA pour contrôler les marabouts274 continrent les réactions d’une population apeurée. Néanmoins, la persécution qu’ils avaient subie implique que les sawabistes n’avaient guère d’alternatives en dehors de la confrontation armée avec le régime275. Les hommes du Chameau furent éperonnés non par l’objectivité de la situation, mais par la soif de la délivrance.
Notes de bas de page
1 Comme l’a dit Abdou Adam, à travers ses souvenirs. Entretien, Niamey, 29 nov. 2003.
2 Ils dirent qu’« aussi affreux que certains de ces actes du gouvernement nous paraissent, il s’agit là du genre de choses à quoi semble s’attendre et que semble comprendre le peuple plutôt rude et primitif du Niger », (« However ugly some of these government actions appear to our eyes, they are the sort of thing that the fairly rough and primitive people of Niger seem to expect and understand »). A.J. Warren, ambassade de Grande-Bretagne Abidjan, à P.R.A. Mansfield, Foreign Office, 23 oct. 1964 ; PRO, FO 371/177.230 (« often in a rather battered state »).
3 Ibid. (« clearly had a fright »).
4 Le Niger, 19 oct. et 30 nov. 1964.
5 Document sans titre ni date, SHAT, 10 T 717/D.2 ; Bulletin mensuel de renseignements, 473.6, 20 oct.-20 nov. 1964, Téra et 417/444.4, 20/21 sept.-20 oct. 1964, Magaria ; Diamballa Y.M. à M. le commandant de Cercle de Zinder, 1.442/AI/cf.-, 7 nov. 1964 ; tous ANN, FONDS DAPA ; J. Baulin, Conseiller du Président Diori (Paris, 1986), 49 ; Le Temps du Niger : Quotidien républicain d’information, 17 et 21 oct. 1964.
6 Interviews Ali Amadou & Boubakar Djingaré, Niamey, 28 janv. et 26 oct. 2005 ; Mounkaila Beidari, Niamey, 28 nov. 2003 et 15 déc. 2009.
7 Interviews Amadou Ibrahim Diop, Zinder, 13 févr. 2003 ; Amadou Bakary Maiga, Niamey, 25 nov. 2003 ; Mounkaila Beidari, Niamey, 15 déc. 2009.
8 Comme l’a reconnu le membre du régime Abdou Adam, interview, Niamey, 29 nov. 2003.
9 Le Niger, 16 nov. 1964 (interrogatoire Djibrilla Dembélé) ; « Liste des Nigériens militants ou sympathisants du Sawaba morts dans les prisons du régime de Diori Hamani » (UDFP-Sawaba, Niamey, n. d.). UDN/Sawaba, « Liste des responsables et militants du Sawaba tombés sous le régime PPN/RDA », n. d., indique que Saley est tombé sur le champ de bataille, tout comme le fait La Voix Libérée, no 1, mars-avr. 2011, 28.
10 Ainsi que le rapportent les services français. Document sans titre ni date, SHAT, 10 T 717/D.2. « Liste des Nigériens » allègue qu’il mourut des suites de torture. Comme les services français parlent ouvertement des abus du régime, ceci est peut-être inexact. UDN/Sawaba, « Liste des responsables », assure qu’il mourut à Tahoua, sans doute des suites de sa tentative de suicide. Si le décès ne fut pas immédiat, il est possible que ceux qui l’avaient pris aient tenté de le ramener à la vie.
11 Interview Mounkaila Albagna, Niamey, 6 déc. 2003 et divers articles in Le Niger, oct.-nov. 1964.
12 Comme le souligne Ousseini Dandagoye. Interview, Zinder, 11 févr. 2003.
13 Voir par exemple Le Niger, 26 oct. et 2 nov. 1964 (interrogatoires Maman Alké, Tini Malélé, Robert Seguinikin).
14 Le Niger, 23 nov. 1964 (interrogatoire Hamballi) ; interviews Sadé Elhadji Mahaman, Ali Amadou, Mounkaila Albagna & Boubakar Djingaré, Niamey, 15 nov. 2002, 31 janv. et 6 déc. 2003 et 27 oct. 2005, et Ousmane Dan Galadima, Madaoua, 7 févr. 2003. Nombre d’entre eux furent aussi contraints d’affirmer qu’ils n’avaient pas été maltraités. Voir Le Niger, oct.-déc. 1964.
15 Le Niger, 7 déc. 1964 ; entretien avec Abdou Adam, Niamey, 29 nov. 2003.
16 Voir notre réflexion dans le prologue.
17 Le Niger, 26 oct. et 30 nov. 1964 (interrogatoire Yacouba Issa & appel Djibo Seyni).
18 Ibid., 19 et 26 oct. 1964 ; 2, 16 et 23 nov. 1964 ; 10 mai et 21 juin 1965. Bakary fut calomnié sur l’existence luxueuse qu’il fut accusé de mener au Ghana, avec à la clef limousines et femmes, et l’oncle qui l’avait élevé se serait suicidé à la suite d’une affaire d’inceste. Ibid., 2 nov. 1964.
19 Interview Illa Salifou, Niamey, 25 nov. 2003 et Limane Kaoumi, Diffa, 12 févr. 2006. Janba parle de 700 personnes. Interview, Zinder, 10 févr. 2003.
20 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 3 févr. 1965 ; SHAT, 10 T 719/D.2.
21 Comme Janba, Dandagoye place son arrestation en 1963 (9 nov.), mais la chose se produisit sans doute un an plus tard. Voir n. 22.
22 Interviews Sao Marakan, Niamey, 16 nov. 2002 ; Maman Tchila, Zinder, 9 févr. 2003 ; Ibrahim Bawa Souley, Niamey, 5 févr. 2003 ; Tahir Moustapha & Oumarou Janba, Zinder, 10 févr. 2003 ; Ousseini Dandagoye, Zinder, 11 févr. 2003 ; Abdou Ali Tazard, Tessaoua, 9 févr. 2006 ; Monique Hadiza, Niamey, 5 nov. 2005 ; Adamou Assane Mayaki, Niamey, 29 janv. 2003. Voir aussi I.A. Mayaki (fils de Adamou Assane), La caravane passe (Paris, 1999), 7.
23 « Rapport de Fin de Commandement du Général de Division Revol. Délégué pour la Défense de la Z.O.M. du 28 juin 1963 au 28 févr. 1965 », partie I ; SHAT, 5 H 35.
24 Le Niger, 16 nov. 1964 ; Bulletin mensuel de renseignements, 1er-31 oct. 1964, no 472.3 – Konni ; 21 sept.-20 oct. et 21 oct.-20 nov. 1964, Tessaoua ; tous ANN, FONDS DAPA ; Événements survenus en Afrique francophone pendant la semaine du 8 au ? févr. 1965 ; SHAT, 10 T 210 ; Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 12 mai 1965 ; SHAT, 10 T 719/D.2 ; K. Alfari, « Mémorandum sur les fraternelles relations franco-nigériennes » (Union de la jeunesse patriotique du Niger : Niamey, 2003), 48. Zakari Bila = Zakari de la cellule de Gazaoua (chap. 10, n. 20) ?
25 Un pauvre diable pourchassé vers Dakoro s’avéra être un sourd-muet en quête d’eau. Bulletin mensuel de renseignements, no 417, 20 oct.-20 nov. 1964 – Madaoua & Dakoro ; tous deux ANN, FONDS DAPA.
26 Déclaration Amadou Darey, no 232/CSN, 25 mars 1965, Garba Bourahima dit Bazabarimi Gariba, no 216/CSN, 19 mars 1965 et Rakoumy Souley, no 215/CSN, 19 mars 1965 ; ANN, 86 MI 1 E 8.1 ; A. Salifou, Le Niger (Paris, 2002), 183.
27 Entretien avec Abdou Adam (officiel du RDA), Niamey, 29 nov. 2003. Confirmé par les entretiens avec Bachir Boukary, Zinder, 11 févr. 2003 et Monique Hadiza, Niamey, 5 nov. 2005. Maïga déconseilla les purges administratives à Konni. Rapport politique mensuel, période du 20 sept. au 20 oct. 1964, Birnin Konni, no 19 ; ANN, FONDS DAPA.
28 Ce dernier incident avait déjà eu lieu en août 1964. Note d’information, no 417-418/CSN, 4 août 1964 ; ANN, 86 MI 1 E 8.1. Salifou, Le Niger, 183.
29 Ceci est mentionné par J. Ibrahim, « Political Exclusion, Democratization and Dynamics of Ethnicity in Niger », Africa Today, 3, 1994, 24, qui, cependant, ne cite pas ses sources (sans doute orales).
30 Interviews Adamou Souna (petit frère de Bakary) et Zongo Hima (la seule sœur de Bakary encore en vie – photo 13.4), Soudouré, 27 févr. 2008.
31 Entretien avec Djibo Harouna, Gothèye, 1er nov. 2005, et Djibo Foulan, Bandio, 4 nov. 2005.
32 « Événements survenus en Afrique francophone pendant la semaine du 12 au 18 oct. 1964 » ; SHAT, 10 T 210 ; Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 7, 17 et 24 nov. 1964 ; SHAT, 10 T 719/D.2 ; British High Commission Accra à A.J. Warren, ambassade de Grande-Bretagne Abidjan, POL 23/1, 14 nov. 1964 ; PRO, FO 371/177230.
33 Télégramme Génédef Dakar à Minarmées Paris, no 8358/CH, 14 avr. 1965 ; SHAT, 10 T 717/D.2 ; interview Mounkaila Beidari, Niamey, 28 nov. 2003 et 23 févr. 2008.
34 Seeda : Mensuel nigérien d’informations générales, no 6, sept. 2002. Également, interview Mounkaila Beidari, Niamey, 28 nov. 2003 et 23 févr. 2008.
35 Le Niger, 23 nov. 1964.
36 Sawaba : Organe Central du Parti Sawaba du Niger, déc. 1964 ; Seeda, no 6, sept. 2002 ; Bulletin de renseignements, Commandement supérieur du point d’appui de Dakar, 19 juillet 1965 ; SHAT, 10 T 717/D.2 ; chap. 11, niveau n. 30-32 ; Le Niger, 23 nov. 1964.
37 Le « power wagon » renvoie sans doute au power wagon de Dodge, une voiture conçue sur la base d’un véhicule de transport militaire. Albert Tréca, ambassadeur de France au Niger, à M. le ministre de la Coopération, Niamey, 31 oct. 1964 ; télégramme MISMIL Niamey à Génédef ZOM 4 Abidjan, no 3553/4, avant le 12 oct. 1964 et Télégramme 271/4/2/S Diplomatie Paris à Ambafrance, 14 oct. 1964 ; Dévolution. Cession de matériels. SMB Niger ; SHAT, 5 H 67.
38 Bulletin de renseignements, no 1370/2/SC, Abidjan, 16 déc. 1964 ; SHAT, 10 T 717/D.2.
39 « Rapport de Fin de Commandement du Général de Division Revol », parties I et VI ; Cession de matériels. SMB Niger.
40 Le Niger, 16 nov. et 7 déc. 1964.
41 Bulletin de renseignements hebdomadaire de la ZOM 4, no 51, 14-20 déc. 1964 ; SHAT, 10 T 717/D.2 ; L. Kaziendé, Souvenirs d’un enfant de la colonisation (Porto Novo, 1998), vol. 5, 237.
42 Il s’agit de Roland Martin et du Pr Destanne de Bernis, tous deux conseillers auprès du gouvernement ; ainsi que de William Hirsch, Poulain Daudard et une certaine Mme Blanc, experts au service de la planification. Les services français affirment que de Bernis était connu pour ses opinions gauchistes et que Diori n’était pas mécontent de le voir partir, lui et les autres. Le chef du service de la planification, Robert Bayle, était du côté du régime. Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 5 nov. 1964 ; SHAT, 10 T 719/D.2 ; ibid., 7 nov. 1964.
43 Interviews Ali Amadou & Mounkaila Albagna, Niamey, 31 janv. et 6 déc. 2003. Il est question des auxiliaires de la police française (demeurés non-identifiés) dans le Bulletin de renseignements, no 1368/2/S.C, Abidjan, 16 déc. 1964 ; SHAT, 10 T 717/D.2.
44 Interviews Mounkaila Beidari, Niamey, 15 déc. 2009 et Ali Amadou, Niamey, 28 janv. 2003. L’ancien membre du régime Abdou Adam (interview, Niamey, 29 nov. 2003) et de nombreuses interviews d’autres militants du Sawaba attestent aussi de l’incarcération et de la conduite d’interrogatoires à l’intérieur du complexe présidentiel. Voir également J.-P. Ruttimann, in Afrique Nouvelle, 8-13 juin 1967, no 1.035.
45 Entretien avec Boubakar Djingaré, Niamey, 26 oct. 2005.
46 Les témoignages oraux se renforcent les uns les autres et dérivent d’interviews conduites avec différentes personnes à différentes époques : entretiens (tous à Niamey) avec Ali Amadou, 28 janv. 2003 ; Mounkaila Beidari, 28 nov. 2003 et surtout 15 déc. 2009 ; et Boubakar Djingaré, 27 oct. 2005.
47 Entretiens avec Boubakar Djingaré, Niamey, 26-27 oct. 2005. À propos du rapport sur Djingaré, voir le journal ivoirien Fraternité, 4 juin 1965 et le Rheinischer Merkur, 30 avr. 1965.
48 Entretien avec Ali Mahamane Madaouki, Zinder, 14 févr. 2003.
49 Entretien avec Mounkaila Beidari, Niamey, 28 nov. 2003.
50 Entretien avec Mounkaila Albagna, Niamey, 6 déc. 2003.
51 Entretiens avec Soumana Idrissa, Gothèye, 1er nov. 2005 et Mounkaila Beidari, Niamey, 15 déc. 2009.
52 Ibid.
53 On ne dispose pas d’autres informations en dehors de ces affirmations de Soumana Idrissa. Mais il répéta la chose quatre ans plus tard, donnant l’exemple de la torture et de la mort d’un sawabiste en 1966, époque à laquelle, cependant, les méthodes d’interrogatoire s’étaient davantage endurcies. Interviews, Gothèye, 1er nov. 2005 et 18 déc. 2009. Pour la victime de 1966 (dont le nom était Garba Sakouara), voir chapitre suivant.
54 Entretien avec Soumana Idrissa, Gothèye, 18 déc. 2009 et conversation avec Moutari (?) Dan Boula Sanda, Zinder, 15 févr. 2006. Sanda est le fils de Makamari, qui est mort en 1988.
55 Interviews Ousmane Dan Galadima, Madaoua, 7 févr. 2003 et Maman Tchila, Zinder, 9 févr. 2003. Lorsque fut amené devant lui Tchila menotté, Colombani, qui le connaissait, demanda qui en avait donné l’ordre.
56 Interview Abdou Adam, Niamey, 29 nov. 2003, qui pense que de telles choses ont pu se produire ailleurs, mais pas à Niamey !
57 Interviews Gonimi Boukar, Niamey, 5 nov. 2005 et Tahirou Ayouba Maïga, Niamey, 28 oct. 2005.
58 Le Niger, 31 mai 1965 (interrogatoire Hassane Djibo). Noga Yamba (interview, Zinder, 14 févr. 2003) dit avoir été enfermé dans une « maison banco », peut-être une maison en banco, à moins qu’il ne s’agisse du camp Bano, comme l’indiquent d’autres personnes. Interviews Mounkaila Beidari & Mounkaila Albagna, Niamey, 15 déc. 2009 ; Adamou Assane Mayaki, Niamey, 29 janv. 2003 ; Daouda Hamadou, Ayorou, 20 déc. 2009 ; Soumana Idrissa, Gothèye, 18 déc. 2009.
59 Djibo Bakary à Sallé Dan Koulou, 22 sept. 1964. Source : Bulletin de renseignements particuliers, 10 oct. 1964 ; SHAT, 10 T 717/D.2.
60 Bulletin de renseignements hebdomadaire, 12-18 oct. 1964 ; SHAT, 10 T 722/D.2.
61 W.S. Bates, British High Commission Kaduna, à J.A. Pugh, Lagos, 21 oct. 1964 ; PRO, FO 371/177230, (« pretty strong stuff »).
62 T.R. Shaw, ambassade de Grande-Bretagne Abidjan, à C.M. Lequesne, Foreign Office, 2 et 15 oct. 1964 ; PRO, FO 371/177.230.
63 Bulletin mensuel de renseignements, no 417, 21 sept.-20 oct. 1964, Magaria.
64 J.A. Pugh, British High Commission, Lagos, à A.J. Warren, ambassade de Grande-Bretagne Abidjan, 11 et 12 déc. 1964 ; PRO, FO 371/177.230 ; T.R. Shaw, ambassade de Grande-Bretagne Abidjan, à C.M. Lequesne, Foreign Office, 22 oct. 1964 ; PRO, FO 371/177.230 ; Le Niger, 7 déc. 1964.
65 Une lettre d’un Nigérian mentionne spécifiquement trois Nigérians déportés au Niger : un certain Mallam Chefu Abdou de Sokoto ; Mallam Isiaku Yoruba ; et un « Mister Philip ». Bulletin mensuel de renseignements, no 417, 21 oct.-20 nov. 1964, Maradi ; ANN, FONDS DAPA. Sawaba, déc. 1964 ; T. Yakasai, The Story of a Humble Life : An Autobiography, vol. 1 (Zaria 2004), 203-205.
66 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 24 nov. 1964 ; Bulletin mensuel de renseignements, no 417, 21 oct.-20 nov. 1964, Maradi ; Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 8 déc. 1964 ; SHAT, 10 T 719/D.2. La désertion du gendarme – exceptionnelle pour cette force fidèle au régime – concerne sans doute le témoin oculaire – originaire du cru ? – des confrontations de Madarounfa. Voir chap. 12, n. 141.
67 Ibid. ; Pugh à Warren, 11 déc. 1964 ; British High Commission Lagos, à A.J. Warren, ambassade de Grande-Bretagne Abidjan, 1 POL.10/174/1, 4 nov. 1964 ; PRO, FO 371/177230 ; « Événements survenus en Afrique francophone pendant la semaine du 16 au 22 nov. 1964 » ; SHAT, 10 T 210.
68 Un certain Alhaji Mahamadu Wada de Katsina, militant, sans doute, de la NEPU, rédigea une lettre indignée, publiée dans Sawaba, déc. 1964, dénonçant le fait qu’un « convoi d’une armée étrangère » soit autorisé à « ratisser notre territoire national du Nigeria » et avançant qu’il y avait eu, à ce sujet, des plaintes en provenance de toute la région, (« convoy of a foreign army », « comb our national territory of Nigeria »).
69 Ils avaient découvert du sang, sans doute d’un commando blessé, sous une balle de sorgho. Voir note suivante.
70 Entretiens avec Kanembou Malam (ancien militaire), Diffa, 12 févr. 2006 et Aba Kaka, Bosso, 13 févr. 2006. L’opération eut probablement lieu à l’automne 1965.
71 Sawaba, déc. 1964 ; « Événements survenus… 8 au ? févr. 1965. »
72 Communiqué no 6 non daté, vers la mi-novembre 1964 ; PRO, FO 371/177218 ; Front démocratique de la patrie (Parti Sawaba) : Déclaration, 13 nov. 1964 ; SHAT, 10 T 717/D.2 ; Le Niger, 2 et 16 nov. 1964.
73 Le Niger, 16 nov. 1964 ; chap. 12, n. 245.
74 Le Sawaba avait quelques contacts avec des forces clandestines en Côte d’Ivoire, comme on peut le déduire de lettres de soutien publiées dans le numéro de décembre 1964 de Sawaba.
75 « Rapport de Fin de Commandement du Général de Division Revol », partie I ; T.R. Shaw, British Embassy Abidjan, to C.M. Lequesne, Foreign Office, 20 nov. 1964 ; E.M. Smith, ambassade de Grande-Bretagne Lomé, à P.R.A. Mansfield, Foreign Office, 21 nov. 1964 ; tous deux PRO, FO 371/177.229 ; Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 7, 17 nov., 8 déc. 1964, 21 janv. et 3 févr. 1965 ; SHAT, 10 T 719/D.2 ; Le Niger, 9 nov. 1964 et 25 janv. 1965.
76 Entretiens avec Mounkaila Albagna, Niamey, 6 déc. 2003 et Soumana Idrissa, Gothèye, 1er nov. 2005.
77 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 5 nov. 1964.
78 Entretiens avec Soumana Idrissa, Gothèye, 1er nov. 2005 et 18 déc. 2009.
79 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 22 déc. 1964 ; SHAT, 10 T 719/D.2 ; et 21 janv. 1965.
80 Bulletin de renseignements hebdomadaire… 14-20 déc. 1964, no 51.
81 Entretiens avec Daouda Hamadou, Ayorou, 20 déc. 2009 et Ali Issaka, Niamey, 29 févr. 2008.
82 Entretien avec Soumana Idrissa, Gothèye, 18 déc. 2009.
83 Warren à Mansfield, 23 oct. 1964 ; Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 21 janv. 1965.
84 « Événements survenus en Afrique francophone pendant la semaine du 22 au 28 mars 1965 » ; SHAT, 10 T 210.
85 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 17 nov. 1964. Mais il faisait peut-être partie de l’unité de maquisards de Amadou Abdou. Voir chap. 12 n. 83 et chap. 9 n. 37.
86 Warren à Mansfield, 23 oct. 1964 ; « Rapport de Fin de Commandement du Général de Division Revol » ; « Événements survenus… 12 au 18 oct. 1964 » ; ibid., « 9 au 16 nov. 1964 » ; SHAT, 10 T 210 ; Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 16 oct. 1964 ; SHAT, 10 T 719/D.2 ; ibid., 24 nov. 1964 ; « Fiche sur les événements qui se déroulent au Niger depuis le début du mois d’octobre 1964 » ; SHAT, 10 T 717/D.2 ; Le Niger, 16 et 23 nov. 1964.
87 « Rapport de Fin de Commandement du Général de Division Revol » ; Bulletin de renseignements hebdomadaire… 14-20 déc. 1964 ; Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 21 janv. et 3 févr. 1965.
88 Il y rappelait qu’ils ne devaient jamais oublier qu’ils se trouvaient en territoire ennemi (n. 59 ci-dessus). Pour la même raison, il déconseilla toute « assemblée générale » des commandos avant l’invasion (chap. 12, niveau n. 49).
89 Les entretiens présentent de nombreux exemples de ce genre. Oumarou Janba, Zinder, 10 févr. 2003 ; Saïbou Abdouramane, Dargol, 31 oct. 2005 ; Ali Amadou, chef de camp au Ghana en 1964 ; et Mounkaila Albagna, qui, par contraste, pensait, avant l’invasion, qu’elle marcherait. Niamey, 28 janv. et 29 nov. 2003.
90 Entretien avec Boubakar Djingaré (qui était dans la même unité mais fut arrêté), Niamey, 27 oct. 2005.
91 Fraternité-Hebdo, 21 mai 1965.
92 Entretien avec Mounkaila Beidari, Niamey, 28 nov. 2003. Chaffard s’est rendu au moins une fois au Niger, en 1967. G. Chaffard, Les carnets secrets de la décolonisation (Paris, 1967), vol. 2, 332.
93 Entretien avec Bachir Boukary, Zinder, 11 févr. 2003.
94 Entretien avec Ali Amadou, Niamey, 28 janv. 2003.
95 Il existe des données indiquant que les militants avaient peur de lui. Entretien avec Ali Talba, Niamey, 4 févr. 2003.
96 Comme le montre un entretien avec Mounkaila Albagna, Niamey, 6 déc. 2003.
97 Interviews Mounkaila Albagna & Mounkaila Beidari, Niamey, 6 déc. et 28 nov. 2003, 23 févr. 2008 et 15 déc. 2009 ; Soumana Idrissa, Gothèye, 1er nov. 2005 et 18 déc. 2009 ; Ali Amadou, Niamey, 28 janv. 2003 ; Afrique Nouvelles, 8-13 juin 1967, no 1.035.
98 Ceci renvoie peut-être à la question des documents sensibles que les maquisards emportèrent avec eux au moment de l’invasion. Interview, Madaoua, 7 févr. 2003.
99 Entretien avec Ousmane Dan Galadima, Madaoua, 8 févr. 2003.
100 Entretien avec Tahir Moustapha, Zinder, 10 févr. 2003.
101 Il semble que dans l’hinterland malien, cela a été en partie causé par la nécessité de les enterrer, puisque les Maliens ne permettaient pas aux hommes de porter des armes. Interview Mounkaila Albagna, Niamey, 6 déc. 2003.
102 Entretiens avec Ali Amadou, Niamey, 28 janv. 2003, et Oumarou Janba, Zinder, 10 févr. 2003.
103 Entretien avec Ousmane Dan Galadima, Madaoua, 7 févr. 2003.
104 Chaffard, Les carnets secrets, 326 et entretien avec Abdou Adam, Niamey, 29 nov. 2003.
105 Entretien avec Oumarou Janba, Zinder, 10 févr. 2003.
106 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 501, 1er juillet 1963 ; SHAT, 10 T 717/D.2.
107 Un coupé Floride (Renault) et une Peugeot 403. Chaffard, Les carnets secrets, 326.
108 Entretien avec Oumarou Janba, Zinder, 10 févr. 2003.
109 Entretien avec Noga Yamba, Zinder, 14 févr. 2003 ainsi qu’avec des gens de Soudouré, 27 févr. 2008.
110 Chaffard, Les carnets secrets, 326.
111 Entretien avec Mounkaila Beidari, Niamey, 15 déc. 2009.
112 M. Dangaladima à A.K. Barden, Bureau of African Affairs, 31 oct. 1964 ; PRO, FO 371/177230.
113 Comme nous l’avons noté au chap. 9, l’instruction reçue à Cuba était sans doute de nature politique.
114 De plus, Dan Galadima remercia le BAA pour le récent approvisionnement en fonds de 25 000 livres. Dangaladima à Barden, 31 oct. 1964.
115 Chaffard, Les carnets secrets, 326-327. Comme l’a montré cependant le voyage de Aba Kaka du Ghana au Nigeria, ce n’était pas la première fois que Ghana Airways offrait son soutien.
116 La lettre à Barden avait été aussi envoyée au nom de Bakary et de Yacouba Idrissa dit Gothèye, le représentant du Sawaba et des Nigériens du Ghana. Dangaladima à Barden, 31 oct. 1964.
117 Entretien avec Ousmane Dan Galadima, Madaoua, 7 février 2003.
118 Entretien avec Ousseini Dandagoye, Zinder, 11 févr. 2003.
119 Entretien avec Ousmane Dan Galadima, Madaoua, 7 février 2003.
120 Il donna, en 1974, une interview dans laquelle il soutenait qu’une approche plus urbaine, avec des manifestations syndicales et estudiantines à la manière de ce qui s’était produit au Congo-Brazzaville en août 1963 (événements ayant suscité des craintes au sein du régime RDA comme nous l’avons vu au chap. 11) aurait mieux marché. R. Buijtenhuijs, Revolutie in Zwart Afrika ? (Assen et Amsterdam, 1975), 111.
121 Tel que Abdoulaye Mamani, au moins de façon rétrospective : il espérait que la contestation urbaine déclencherait l’intervention de l’armée. Buijtenhuijs, Revolutie in Zwart Afrika ?, 111.
122 Dangaladima à Barden, 31 oct. 1964.
123 Il y aurait des militants du Sawaba (militants de l’intérieur, commandos ?) dans la région de Gaya, prêts à se joindre à l’action. Dangaladima à Barden, 31 oct. 1964.
124 Ibid.
125 Boubou Hama se montra par la suite critique à l’égard de l’accord sur l’île de Lété. Front démocratique de la patrie (Parti Sawaba) : Communiqué de presse, 22 nov. 1964 ; SHAT, 10 T 717/D.2.
126 Sa lettre se conclut par la formule finale « Pour la Révolution Africaine ». Dangaladima à Barden, 31 oct. 1964.
127 Ibid. ; Le Niger, 30 nov. 1964 (appel Djibo Seyni). Seyni assure qu’il ne s’agissait pas d’un mensonge. La promesse dahoméenne aurait été faite lors d’une rencontre avec Issoufou Danbaro avant l’invasion d’automne.
128 L’importance fondamentale de la base ghanéenne a été soulignée par Soumana Idrissa. Interview, Gothèye, 1er oct. 2005.
129 Voir chap. 9, niveau n. 347.
130 Le Niger, 21 juin 1965, énumère la prise de l’automne : 48 pistolets automatiques, 25 mitraillettes, divers fusils, 45 grenades ; 8 000 cartouches. En supposant qu’il y avait au moins 35 unités constituées en moyenne de sept hommes (chap. 12, niveau n. 116), il ne doit s’agir là que d’une fraction de l’armement.
131 Nkrumah’s Subversion in Africa : Documentary Evidence of Nkrumah’s Interference in the Affairs of Other African States (Ministry of Information : Accra, sans date), 7-17 ; entretien avec Ali Amadou, Niamey, 28 janv. 2003 ; et W.S. Thompson, Ghana’s Foreign Policy 1957-1966 : Diplomacy, Ideology, and the New State (Princeton, 1969), 375. La Voix Libérée, no 1, mars-avr. 2011, 28 pense qu’en 1966, le Sawaba disposait encore de 200 à 300 hommes.
132 Interview Ousmane Dan Galadima, Madaoua, 7 févr. 2003 ; D. Laumann, « Che Guevara’s Visit to Ghana », Transactions of the Historical Society of Ghana, new series, 9 (2005), 61-74 ; W. Gálvez, Che in Africa : Che Guevara’s Congo Diary (Melbourne et New York, 1999), 32.
133 Note de renseignements, ambassade de France, Niamey, 15 déc. 1965 ; SHAT, 10 T 717/D.2.
134 Avant 1966, dans tous les cas. Interviews Zoumari Issa Seyni, Niamey, 18 nov. 2002 ; Bachir Boukary, Zinder, 11 févr. 2003 ; Surveillance du Territoire no 620/BCL : Examen de situation de Mamoudou Idé, 11 juillet 1968 ; ANN, 86 MI 1 E 8.14.
135 Chaffard, Les carnets secrets, 326.
136 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 18 janv. 1965 ; SHAT, 10 T 719/D.2. Ce même mois, Issoufou Baleri, l’agent de bureau originaire de Gothèye formé en Afrique du Nord et connu de Soumana Idrissa, se rendit en mission à Niamey. Il fut par la suite emprisonné, sans qu’on sache à quelle époque. no 879/BCL : « Étudiants et boursiers du Sawaba de retour des pays de l’Est », 18 oct. 1968 ; ANN, 86 MI 1 E 8.14 ; interview Soumana Idrissa, Gothèye, 18 déc. 2009.
137 « Événements survenus en Afrique francophone pendant la semaine du 11 au 17 janv. 1965 » ; SHAT, 10 T 210 ; ibid., « 8 au ? févr. 1965 ». Il ne semble pas s’agir ici de l’attaque dont il est question au chap. 12, au niveau des n. 224-225, puisque cette dernière semble avoir eu lieu avant l’arrestation des maquisards sur l’île de Chassa Koura, épisode sur lequel on dispose d’une date ferme, le 15 novembre 1964 (chap. 12, niveau n. 229).
138 Tels que Mounkouta ; Lawal Adia, formé en Algérie et qui était rentré à Accra ; un certain Madou Koutta ; et Oumarou Falwa. Entretiens avec Kanembou Malam, Diffa, 12 févr. 2006 ; Aba Kaka, Bosso, 13 févr. 2006 ; Mounkaila Albagna, Niamey, 6 déc. 2003.
139 Bulletin de renseignements hebdomadaire, no 4, 18-24 janv. 1965 ; SHAT, 10 T 717/D.2.
140 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 24 nov. 1964.
141 Sur la base du fait qu’à la suite du premier coup d’État militaire du Nigeria, Yakasai avait obtenu un poste dans l’administration. Yakasai, The Story of a Humble Life, chap. 17.
142 Mohammed Achimoto Garba, Leningrad, à Tanko Yakasai, Kano, 3 juillet 1967 ; ANN, 86 MI 1E 8.14 ; chap. 10, n. 76 ; Yakasai, The Story of a Humble Life, 154 ; T. Abdulraheem et A. Olukoshi, « The Left in Nigerian Politics and the Struggle for Socialism : 1945-1985 », Review of African Political Economy, 37 (déc. 1986), 69-70 ; Chaffard, Les carnets secrets, 327.
143 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 21 janv. 1965.
144 La cache, dissimulée dans une réserve de mil, consistait en six MAS 36, quatre mitraillettes de fabrication allemande, plusieurs pistolets d’origine tchèque et une boîte de 100 cartouches. Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 18 janv. 1965.
145 À Boula Kari, Kaka fut hébergé par un homme du nom de Gaptia. Le Niger, 23 nov. 1964 ; Note de renseignements, ambassade de France, Niamey, 15 mai 1965 ; SHAT, 10 T 717/D.2 ; interview Kanembou Malam, Diffa, 12 févr. 2006.
146 C’est ainsi que Amadou Diop se présenta fièrement à l’auteur. Interview, Zinder, 13 févr. 2003.
147 Entretien avec Amadou Ibrahim Diop, Zinder, 13 févr. 2003.
148 Les armes récupérées étaient deux pistolets automatiques, deux mitraillettes, un fusil Mauser et quatre grenades. Génédef Dakar à Minarmées Paris, no 8358/CH, 14 avr. 1965 ; chap. 10, niveau n. 18.
149 Entretien avec Amadou Ibrahim Diop, Zinder, 13 févr. 2003.
150 Voir chap. 12, niveau n. 170.
151 Le Niger, 16 mai 1966.
152 Interviews Ousmane Dan Galadima, Madaoua, 7 févr. 2003 ; Oumarou Janba, Zinder, 10 févr. 2003.
153 Entretien avec Amada Bachard, Niamey, 14 déc. 2009.
154 Il aurait déconseillé cette action. Interview Ousmane Dan Galadima, Madaoua, 7 févr. 2003.
155 Entretien avec Amada Bachard, Niamey, 14 déc. 2009.
156 À Maïné-Soroa. Voir chap. 11, niveau n. 139 et chap. 12, niveau n. 7-8.
157 Bachir Boukary est explicite là-dessus (interview Zinder, 11 févr. 2003), tandis que Ibrahim Bawa Souley (interview Niamey, 26 nov. 2003) pense que Diop reçut l’ordre d’exécuter quelque chose de « grand ». Harou Kouka, un proche du régime, affirme aussi que Diop agit sur ordre (interview, Niamey, 26 nov. 2003). La Voix Libérée, no 1, mars-avr. 2011, 29 avance qu’en 1965, Diop lui-même avait dit qu’il s’agissait d’un ordre du parti.
158 Interviews Mounkaila Beidari, Niamey, 28 nov. 2003 et Amadou Ibrahim Diop, Zinder, 13 févr. 2003. Ahmed Sékou Djibo Bakary (le plus jeune fils de Bakary, né en 1966) a indirectement confirmé ceci, affirmant que Diop avait agi de son propre chef et que Bakary lui avait expressément interdit de tuer Diori – ce qui montre qu’ils en ont parlé – puisqu’une telle action n’était pas dans la ligne du parti et que, par ailleurs, Diori était un parent (interview, Niamey, 1er mars 2008).
159 Entretien avec Mounkaila Albagna, Niamey, 15 déc. 2009.
160 Interview Bachir Boukary, Zinder, 11 févr. 2003 ; Ibrahim Bawa Souley, Niamey, 26 nov. 2003.
161 Génédef Dakar à Minarmées Paris, no 8358/CH, 14 avr. 1965 ; interview Ousmane Dan Galadima, Madaoua, 7 févr. 2003 ; ambassade de Ghana Niamey à Foreign Accra, 15 avr. 1965 ; GNA, SC/BAA/460, no NIA/05/1 (Niger Political Reports to Osagyefo 3/1/64 – 23/4/65).
162 Génédef Dakar à Minarmées Paris, no 8358/CH, 14 avr. 1965.
163 « Événements survenus en Afrique francophone pendant la semaine du 12 au 18 avril 1965 » ; SHAT, 10 T 210.
164 Génédef Dakar à Minarmées Paris, no 8358/CH, 14 avr. 1965 ; Le Niger, 21 juin 1965.
165 Génédef Dakar à Minarmées Paris, no 8358/CH, 14 avr. 1965 ; interview Amadou Ibrahim Diop, Zinder, 13 févr. 2003 ; Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 29 avr. 1965 ; SHAT, 10 T 719/D.2. Deux rapports affirment que chaque commando avait jusqu’à huit ou 12 grenades. Ambassade du Ghana Niamey à Foreign Accra, 15 avr. 1965 ; B.L. Placca, ambassade du Ghana Niamey, à M.F. Dei-Anang, African Affairs Secretariat Accra, 14 avr. 1965 ; GNA, SC/BAA/460, no NIA/05/1.
166 Génédef Dakar à Minarmées Paris, no 8358/CH, 14 avr. 1965. Issoufou Baleri faisait-il partie de ce groupe (voir n. 136 ci-dessus) ?
167 Entretien avec Sao Marakan, Niamey, 29 janv. 2003 ; chap. 10 niveau n. 163-164 et chap. 12, niveau n. 14-15.
168 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 17 avr. 1965 ; SHAT, 10 T 719/D.2.
169 Ibid. et confirmé par Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 29 avr. 1965.
170 Interview Mounkaila Beidari, Niamey, 15 déc. 2009.
171 Africa Research Bulletin (political series), avr. 1965, 279.
172 « Événements survenus en Afrique francophone pendant la semaine du 19 au 25 avril 1965 » ; SHAT, 10 T 210 ; Placca à Dei-Anang, 14 avr. 1965 ; ambassade du Ghana (Ghanaemb) Niamey à Ministry of Foreign Affairs (Foreign) Accra, 14 avr. 1965, NC/47 ; GNA, SC/BAA/460, no NIA/05/1, (« at all the district capitals »).
173 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 17/29 avr. 1965 ; ibid., 7 avr. 1965 ; SHAT, 10 T 719/D.2 ; Placca à Dei-Anang, 14 avr. 1965, (« their number is great »).
174 Interview Amadou Ibrahim Diop, Zinder, 13 févr. 2003.
175 Interviews Mounkaila Beidari, Niamey, 28 nov. 2003 et 15 déc. 2009.
176 Mais Diop aurait pu être connu de quelques fonctionnaires haut placés du ministère de l’Intérieur. Afrique Nouvelles, 22-28 avr. 1965, no 924 ; interviews Mounkaila Albagna, Niamey, 29 nov. 2003 ; Amadou Ibrahim Diop, Zinder, 13 févr. 2003 ; Mounkaila Beidari, Niamey, 28 nov. 2003 et 15 déc. 2009.
177 Interviews Gonimi Boukar, Niamey, 5 nov. 2005 et Mounkaila Albagna, Niamey, 29 nov. 2003.
178 À l’Hôtel du Ténéré, ou à proximité. Interviews Mounkaila Beidari, Niamey, 28 nov. 2003/15 déc. 2009. Gonimi Boukar (Niamey, 5 nov. 2005) affirme que Beidari hébergea Diop chez le gardien de sa concession. Peut-être le gardien vivait-il à côté de l’hôtel ? Pour plus de détails, voir ci-dessous, à la n. 186.
179 Diop parle aussi d’une « mine » – un explosif quelconque ? Interview, Zinder, 13 févr. 2003.
180 Interviews Amadou Ibrahim Diop, Zinder, 13 févr. 2003 ; Mounkaila Beidari, Niamey, 28 nov. 2003 ; Génédef Dakar à Minarmées Paris, no 8358/CH, 14 avr. 1965 ; ambassade du Ghana Niamey à Foreign Accra, 15 avr. 1965.
181 Interview Amadou Ibrahim Diop, Zinder, 13 févr. 2003. Il se peut que les rapports parlant d’attaques à la grenade dans les chefs-lieux administratifs le jour de la Tabaski aient été des anachronismes (niveau n. 172 ci-dessus), bien qu’il ait pu s’agir là d’une stratégie visant à accompagner le meurtre prévu à l’aéroport la veille au soir par des attaques le lendemain, jour de la Tabaski. Mounkaila Beidari dira plus tard que l’idée de tuer Diori au moment de la prière avait été envisagée comme une alternative au scénario de l’aéroport, mais il s’agit peut-être là encore d’un anachronisme inspiré par le désir de se dissocier de la chose. Beidari aurait au début rejeté l’idée d’une attaque à la mosquée, qui pourrait coûter la vie à trop de monde. Après l’échec de l’attentat de l’aéroport, cependant, il l’aurait acceptée. Interview, Niamey, 28 nov. 2003.
182 Entretien avec Adamou Assane Mayaki, Niamey, 29 janv. 2003.
183 Il soulignera plus tard encore la confiance que lui inspirait le bonnet magique. Le Niger, 16 mai 1966. Lors d’un entretien, il montra à l’auteur des marques signalant les endroits où il avait eu des grigris sous la peau, et, au cours d’un autre entretien, il parla avec Ingrid Jäger, épouse de l’auteur, des différents anneaux qu’il portait et qui l’auraient protégé lors de ses voyages en avion. Sa maison de Zinder était jonchée d’ardoises portant des textes coraniques. Entretiens avec Amadou Ibrahim Diop, Zinder, 13 févr. 2003 et 15 févr. 2006. Voir aussi chap. 9 n. 325.
184 Entretien avec Ali Talba, Niamey, 4 févr. 2003. Diop affirme avoir été très proche de Dandouna et Sallé Dan Koulou. Interview, Zinder, 13 févr. 2003.
185 Interview Amadou Ibrahim Diop, Zinder, 13 févr. 2003 et Mounkaila Beidari, Niamey, 28 nov. 2003. Cette visite de reconnaissance nocturne est aussi rapportée dans Génédef Dakar à Minarmées Paris, no 8358/CH, 14 avr. 1965.
186 Interview Amadou Ibrahim Diop, 13 févr. 2003 ; Le Niger, 19 avr. 1965. Ceci pourrait confirmer les affirmations de Gonimi Boukar mentionnées en n. 178.
187 Le Niger, 16 mai 1966 parle d’une mitraillette, non d’un pistolet. Mais étant donné sa longueur, il aurait été difficile de cacher une telle arme. Un MAT 49, par exemple, est long de 46 à 72 cm. Voir « Événements survenus en Afrique francophone pendant la semaine du 12 au 18 avril 1965 » ; Le Niger, 19 avr. 1965 ; interview Amadou Ibrahim Diop, Zinder, 13 févr. 2003 ; Génédef Dakar à Minarmées Paris, no 8358/CH, 14 avr. 1965 ; Ghanaemb Niamey à Foreign Accra, 14 avr. 1965.
188 Interview Sao Marakan, Niamey, 29 janv. 2003.
189 Interview Bachir Boukary, Zinder, 11 févr. 2003 ; Génédef Dakar à Minarmées Paris, no 8358/CH, 14 avr. 1965 ; « Événements survenus en Afrique francophone pendant la semaine du 12 au 18 avril 1965 » ; Ghanaemb à Foreign Accra, 14 avr. 1965 ; Le Niger, 19 avr. 1965. Ibrahim Bawa Souley avance de façon inexacte que Diop était seul. Souley était alors un jeune homme vivant à Dosso. Interview, Niamey, 26 nov. 2003.
190 Africa Research Bulletin, avr. 1965, 279 ; Le Niger, 19 avr. et 21 juin 1965 ; Ghanaemb Niamey à Foreign Accra, 14 avr. 1965.
191 Génédef Dakar à Minarmées Paris, no 8358/CH, 14 avr. 1965 ; Le Niger, 19 avr. 1965, dans lequel se trouve une image de l’enceinte et de la barrière de sécurité ; Afrique Nouvelles, 22-28 avr. 1965, no 924 ; Africa Research Bulletin, avr. 1965, 279 ; entretien avec Ousmane Dan Galadima, Madaoua, 7 févr. 2003.
192 Le Temps du Niger, 14 avr. 1965 ; Le Niger, 19 avr. 1965 et 16 mai 1966 ; interviews Harou Kouka, Niamey, 26 nov. 2003 et Amadou Ibrahim Diop, Zinder, 13 févr. 2003 ; Placca à Dei-Anang, 14 avr. 1965.
193 Placca à Dei-Anang, 14 avr. 1965 ; Niger. West & Central African Department, Foreign Office, 20 avr. 1965 et Abidjan à Foreign Office. En clair, FO/CRO/WHI, no 26, 14 avr. 1965 ; PRO, FO 371/182.198 ; Le Niger, 21 juin 1965 ; Le Temps du Niger, 14 avr. 1965 ; Thompson, Ghana’s Foreign Policy, 375. Le garçonnet s’appelait Hassane Garba, fils de Garba Sounakoye, fonctionnaire. Il y aurait eu cinq à sept blessés. Alioune Diouf, capitaine des sportifs maliens, fut gravement blessé, avec des fragments de grenade dans la jambe, les poumons et le foie. Un autre Malien, Mohamedine Sylla, fut légèrement blessé au visage. L’ambassadeur du Mali était aussi présent mais ne fut pas blessé. Le Niger, 19 avr. et 8 nov. 1965 ; Afrique Nouvelles, 22-28 avr. 1965, no 924 ; interview Abdou Adam, Niamey, 29 nov. 2003.
194 Ghanaemb Niamey à Foreign Accra, 14 avr. 1965 ; Placca à Dei-Anang, 14 avr. 1965 ; B.L. Placca, ambassade du Ghana Niamey, à M.F. Dei-Anang, African Affairs Secretariat Accra, 16 avr. 1965 ; GNA, SC/BAA/460, no. NIA/05/1 ; Abidjan à Foreign Office, 14 avr. 1965 ; interview Amadou Ibrahim Diop, Zinder, 13 févr. 2003. « Événements survenus en Afrique francophone pendant la semaine du 12 au 18 avril 1965 » dit qu’il était encore en possession de la grenade défensive au moment de sa capture.
195 Le Niger, 19 avr. 1965.
196 Ibid. ; Le Temps du Niger, 14 avr. 1965 ; Placca à Dei-Anang, 14 avr. 1965 ; interview Amadou Ibrahim Diop, Zinder, 13 févr. 2003.
197 De ce fait, l’idée selon laquelle Diop était quelqu’un de suicidaire, ou un « robot » mettant sa propre vie en danger – idée qui néglige le rôle joué par sa colère et sa soif de vengeance – ne tient pas debout. Placca à Dei-Anang, 14 & 16 avr. 1965 et Le Niger, 19 avr. 1965.
198 Placca à Dei-Anang, 14 avr. 1965 ; Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 29 avr. 1965 ; Le Niger, 19 avr. 1965 ; Ghanaemb Niamey à Foreign Accra, 14 avr. 1965 ; « Événements survenus en Afrique francophone pendant la semaine du 12 au 18 avril 1965 ». L’identité des commandos n’est pas connue.
199 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 17 et 29 avr. 1965.
200 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 17 avr. 1965 ; « Événements survenus en Afrique francophone pendant la semaine du 19 au 25 avril 1965 » ; SHAT, 10 T 210.
201 Comme l’a souligné Mounkaila Beidari. Interview, Niamey, 15 déc. 2009.
202 Placca à Dei-Anang, 14 avr. 1965, (« suspected points of entry »).
203 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 17 avr. 1965. Leur identité n’est pas connue.
204 Placca à Dei-Anang, 14 avr. 1965 ; Le Niger, 19 avr. 1965 ; Le Monde (Paris), 16 avr. 1965 ; Génédef Dakar à Minarmées Paris, no 8358/CH, 14 avr. 1965.
205 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 3 mai et 9 juin 1965 ; SHAT, 10 T 719/D.2.
206 Ibid., 12 mai 1965.
207 Le commando tué portait un pistolet soviétique (un MAC/50/9/m). Ibid., 9 juin 1965 ; « Événements survenus en Afrique francophone pendant la semaine du 17 au 23 mai 1965 » ; SHAT, 10 T 210.
208 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 3 mai 1965.
209 Il avait aussi des couvertures, des vêtements, des bouteilles d’eau et de l’argent (4 000 F CFA) sur lui. Ibid. ; ambassade de France, Note de renseignements, no 304/CM/NIG/SC, 22 mai 1965 ; SHAT, 10 T 717/D.2. Les affrontements de Tamou et Malbaza sont confirmés par Le Niger, 7 juin 1965, et par Mounkaila Albagna, interview, Niamey, 29 nov. 2003, en ce qui concerne ceux de Malbaza.
210 Il est peu probable que les infiltrés aient été toubou. Ils arrivèrent du Nigeria, i. e., du sud, non de la zone toubou, et ils furent présentés comme des commandos. Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 9 juin 1965 ; ibid., 8 sept. 1965 ; SHAT, 10 T 719/D.2 ; Cour de sûreté de l’État. Arrêt de condamnation no 9, 6 juin 1969 ; ANN, M 27.26.
211 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 9 et 30 juin 1965 ; SHAT, 10 T 719/D.2.
212 Ibid., 21 sept. 1965 ; SHAT, 10 T 719/D.2.
213 Nkrumah’s Subversion in Africa, 20.
214 Koyorambé s’établit dans un village du nom de Malfateri (= Malam Fatori ?). Cour de sûreté de l’État. Arrêt de condamnation no 9, 6 juin 1969 ; entretien avec Aba Kaka, Bosso, 13 févr. 2006.
215 La première cache d’armes contenait quatre MAS 36, une mitraillette et un pistolet automatique. Le membre de la NEPU avait un pistolet, deux grenades et des uniformes militaires. Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 21 sept. 1965.
216 Ibid., 17 août 1965 ; 10 T 719/D.2 ; 9 juin 1965.
217 Son identité est inconnue, mais il s’agissait sans doute de quelqu’un de haut placé dans la hiérarchie du parti. Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 30 juin 1965.
218 W.J.A. Wilberforce, ambassade de Grande-Bretagne Abidjan, à R.W. Renwick, Foreign Office, 29 juillet 1965 ; PRO, FO 371/182.198. Confirmé par Le Niger, 21 juin 1965.
219 Wilberforce à Renwick, 29 juillet 1965 ; Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 30 juin 1965.
220 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 17 août 1965 et 4 août 1965 ; SHAT, 10 T 719/D.2. Danbaro avait-il fui Niamey après l’attentat de Diop contre Diori, ou n’y était-il jamais arrivé ?
221 Ibid., 21 sept. 1965 ; Note de renseignements, ambassade de France, no 498/CM/NIG/S, 17 sept. 1965 ; SHAT, 10 T 717/D.2. L’emplacement de Kirogobou n’est pas connu.
222 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 21 sept. 1965.
223 Entretiens avec Kanembou Malam, Diffa, 12 févr. 2006 ; Aba Kaka, Bosso, 13 févr. 2006 ; Mounkaila Albagna, Niamey, 6 déc. 2003.
224 Front démocratique de la patrie : Déclaration, n. d. ; SHAT, 10 T 717/D.2. Cette déclaration répète que le Sawaba préférait une solution pacifique à la violence, souligne, cependant, que le RDA ne lui laissait pas le choix étant donné ses répressions continuelles et défend le fait de recevoir le soutien de pays étrangers en rappelant que le régime de Niamey en recevait aussi, de la part d’Israël et d’autres pays. Sur la scène diplomatique ouest-africaine dans son ensemble, voir K. van Walraven, Dreams of Power : The Role of the Organization of African Unity in the Politics of Africa 1963-1993 (Aldershot, 1999), 191 et 285.
225 Ambassade de France au Niger. Le conseiller militaire, no 241/CM/NIG/S : « Étude sur le Sawaba », Niamey, 22 juin 1966 (lt-col. Chabriais) ; SHAT, 10 T 717/D.2.
226 Étant le seul parti à se présenter aux législatives le 21 octobre, le RDA remporta 99,2 % des votes. F. Martin, Le Niger du Président Diori : Chronologie 1960-1974 (Paris, 1991), 140-142.
227 Note de renseignements, 17 sept. 1965 ; Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 21 sept. 1965.
228 Premier ministre. SDECE, 12 nov. 1965 ; SHAT, 10 T 719/D.2 ; interviews Kanembou Malam, Diffa, 12 févr. 2006 et Aba Kaka, Bosso, 13 févr. 2006. C’est Kaka lui-même qui parle de cette prise. Kanembou Malam (ancien militaire) confirme la participation de Kaka dans cette action.
229 Entretien avec Aba Kaka, Bosso, 13 févr. 2006.
230 Note de renseignements, ambassade de France, Niamey, 15 déc. 1965 et ci-dessus, niveau n. 133.
231 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 28 févr. 1966 ; Note de renseignements, ambassade de France au Niger. Le conseiller militaire, no 83/CM/NIG/S, Niamey, 24 févr. 1966 ; SHAT, 10 T 719/D.2 et 717/D.2.
232 Premier ministre. SDECE. Destinataire no 541, 28 févr. 1966.
233 Note de renseignements, ambassade de France au Niger. Le conseiller militaire, no 89/CM/NIG/S, 2 mars 1966 ; SHAT, 10 T 717/D.2.
234 Ibid., 24 févr. 1966. Mounkaila Albeidou (apparenté à Amadou Albeidou ?) put s’échapper par la suite. Surveillance du territoire (bureau de coordination), no 396/SN/ST : Organisation terroriste « Sawaba » (Recueil des dirigeants et militants actifs en fuite) ; ex. no 000148, dest. le sous-préfet de Dosso.
235 Ambassade de France au Niger : « Étude sur le Sawaba ».
236 Note de renseignements, ambassade de France au Niger, no 430/CM/NIG/S, 21 oct.1966 ; SHAT, 10 T 717/D.2 ; S. Decalo, Historical Dictionary of Niger (Metuchen, NJ et Londres, 1979), 47. Ils indiquent aussi, de façon quelque peu extravagante, que le capitaine de gendarmerie Badié, qui était alors en résidence surveillée à Bilma (voir chapitre suivant), aurait été impliqué.
237 Note de renseignements, 21 oct. 1966.
238 Rapport mensuel, août 1969 ; SHAT, 10 T 715/D.2-3 ; R. Buijtenhuijs, Le Frolinat et les révoltes populaires du Tchad, 1965-1976 (La Haye, 1978), 35 et 117.
239 Buijtenhuijs, Le Frolinat, 130 et 144.
240 Interview Bachir Boukary, Zinder, 11 févr. 2003.
241 Rapport mensuel, août 1969. De façon significative, des jeunes de la région de Bilma, qui s’étaient regroupés dans une milice du nom de Jeunesse libre du Kaouar, étaient en contact avec le chef du FROLINAT, Goukouni Weddeye. M.A. Djermakoye 15 avril 1974 : Mémoires d’un compagnon de Seyni Kountché ([www.Editions-Nathan-adamou.com], consulté le 5 août 2010). Kanembou Malam, ancien militaire, n’a pu confirmer cette connexion avec le FROLINAT et pense qu’il y en avait plutôt une avec des bandits tchadiens. Interview, Diffa, 12 févr. 2006.
242 Rapport mensuel, oct. 1969 ; SHAT, 10 T 715/D.2-3.
243 E. Grégoire, Touaregs du Niger : Le destin d’un mythe (Paris, 1999), 37.
244 Les villages concernés sont Magéni (= Majéni, à 2 km au nord de Tessaoua) ; Guidan-Maitchibi (= Guidan May Chibi, également à 2 km au nord de Tessaoua, à l’est de Magéni) ; Takagi (emplacement inconnu) ; et Magargari, au nord-ouest. Voir note suivante.
245 Sani Malam Abdou, député du Niger à Tessaoua, à M. le Secrétaire administratif du Comité national du PPN-RDA à Niamey, 25 juin 1969 ; ANN, AN I E 3.20.
246 Ce lien était aussi clairement perçu par certains commandos du Sawaba. Interview Soumana Idrissa, Gothèye, 1er nov. 2005.
247 À cet égard, voir F.D. Colburn, The Vogue of Revolution in Poor Countries (Princeton, 1994).
248 Comme indiqué par Djibo Harouna. Interview, Gothèye, 1er nov. 2005.
249 Interviews Mamane Boureïma & Djibo Foulan, Bandio, 4 nov. 2005 ; Limane Kaoumi, Diffa, 12 févr. 2006.
250 Par exemple, les interviews de Tahirou Ayouba Maïga et de Amada Bachard, Niamey, 28 oct. 2005 et 14 déc. 2009.
251 Interviews Mounkaila Albagna, Niamey, 6 déc. 2003 ; Ibrahim Bawa Souley, Niamey, 26 nov. 2003.
252 La photo des dirigeants du RDA sur la place de la prière, peut-être prise avant que Diop ne lance sa grenade, montre Diori, Boubou Hama et peut-être Maïga au premier rang. Le Niger, 19 avr. 1965.
253 Par exemple, interviews Tahir Moustapha et Oumarou Janba, Zinder, 10 févr. 2003.
254 Entretiens avec Mounkaila Albagna, Niamey, 6 déc. 2003 ; Ali Amadou, Niamey, 28 janv. 2003 ; Adamou Assane Mayaki, Niamey, 29 janv. 2003 ; Boubakar Djingaré, Niamey, 27 oct. 2005.
255 Interviews Ali Amadou, Niamey, 28 et 31 janv. 2003 ; Oumarou Janba, Zinder, 10 févr. 2003 ; Sao Marakan, Niamey, 16 nov. 2002 ; Saïbou Abdouramane, Dargol, 31 oct. 2005 ; Limane Kaoumi, Diffa, 12 févr. 2006 ; Aba Kaka, Bosso, 13 févr. 2006.
256 Beidari considère la fuite de Kiari Mai – le Photographe – lors de l’attaque de Aba Kaka sur Bosso comme de la trahison plutôt que de la lâcheté, et explique la capture de Siddi Abdou comme le résultat d’une trahison. Mounkaila Beidari, Niamey, 28 nov. et 2 déc. 2003. Sur la capture de Siddi Abdou, voir chap. 12, niveau n. 236.
257 Interview Bachir Boukary, Zinder, 11 févr. 2003.
258 On peut considérer le fait qu’il n’y ait eu qu’un membre du leadership sur le terrain (de façon occasionnelle) comme une faiblesse stratégique majeure, ainsi que cela a également été souligné dans le cas de la rébellion du FROLINAT au Tchad, et à la différence, par exemple, de la situation en Guinée portugaise (voir Buijtenhuijs, Le Frolinat, 449-450). Cependant, étant donné le peu de sûreté de l’hinterland, ce fait avait des raisons tactiques qui, il est vrai, sont aussi indicatives des problèmes militaires du Sawaba.
259 Interview Mounkaila Beidari, Niamey, 2 déc. 2003.
260 Interview Boubakar Djingaré, Niamey, 27 oct. 2005.
261 Voir le rapport d’interrogatoire sur Baro Alfari in Le Niger, 30 nov. 1964.
262 Interviews, Niamey, 2 déc. 2003 et 15 déc. 2009.
263 Bulletin de renseignement Particuliers, 10 oct. 1964 ; « Rapport de Fin de Commandement du Général de Division Revol », partie I.
264 Interview Boubakar Djingaré, Niamey, 26 oct. 2005.
265 Interview Bachir Boukary, Zinder, 11 févr. 2003 ; R. Buijtenhuijs, « Peasant Wars in Africa : Gone with the Wind ? », in D. Bryceson, C. Kay et J. Mooij (dir.), Disappearing Peasantries ? Rural Labour in Africa, Asia and Latin America (Londres, 2000), 116-117.
266 R. Buijtenhuijs souligne l’importance du soutien libyen, en plus de l’attitude intrépide du peuple toubou, habitué à son environnement désertique. « Frolinat à l’épreuve du pouvoir : L’échec d’une révolution africaine », Politique africaine, no 16, déc. 1984, 16-19.
267 Confirmé également par le « Rapport de Fin de Commandement du Général de Division Revol », partie I.
268 On pense à la menace adressée par Sallé Dan Koulou à un habitant de Rogogo, affirmant qu’il risquait sa vie s’il ne cessait de s’en prendre au Sawaba (chap. 10, niveau n. 35). Mais le rapport du régime disant que les commandos avaient programmé d’empoisonner les puits au cours de l’invasion n’a jamais été confirmé (chap. 12, niveau n. 113). Maman Alké, le commando de Gothèye entraîné en Algérie, assure avoir été une fois frappé par son chef d’unité, Dandouna Aboubakar, qui lui faisait peur et aux ordres duquel il aurait par conséquent obéi, bien qu’il aurait été en désaccord avec lui. Dandouna était sans aucun doute un rude personnage, mais Alké ne donne aucune raison à la brutalité qu’il allègue. Ladite allégation se trouve dans son rapport d’interrogatoire, dans lequel on perçoit plusieurs signes de contrainte. Le Niger, 26 oct. 1964.
269 Voir chap. 12, n. 123.
270 Interview Ousseini Dandagoye, Zinder, 11 févr. 2003.
271 Voir aussi K. van Walraven, « “Opération Somme” : la French Connection et le coup d’État de Seyni Kountché au Niger en avril 1974 », Politique africaine no 134, juin 2014, p. 133-154.
272 Bulletin mensuel de renseignements, 20 sept.-20 oct. 1964, Zinder ; ANN, FONDS DAPA. Ceci semble confirmé par La Voix Libérée, no 1, mars-avr. 2011, 28.
273 Interviews Ousseini Dandagoye, Zinder, 11 févr. 2003 et Elhadj Illa Salifou, Niamey, 25 nov. 2003 ; Djermakoye, 15 avril 1974.
274 Interviews Ousseini Dandagoye et Amadou Ibrahim Diop, Zinder, 11 et 13 févr. 2003.
275 Comme le soulignent plusieurs militants et commandos. Entretiens avec Adamou Assane Mayaki, Niamey, 29 janv. 2003 ; Ali Amadou, Niamey, 31 janv. 2003 ; Ali Mahamane Madaouki, Zinder, 14 févr. 2003 ; Soumana Idrissa, Gothèye, 1er nov. 2005 ; Limane Kaoumi, Diffa, 12 févr. 2006.
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