Censure littéraire et circulation des imprimés entre le Portugal et le Brésil (1769–1821)
p. 81-101
Texte intégral
1Dans cet article, en m’appuyant sur la documentation produite par le dispositif de censure portugais, j’analyserai, premièrement, les paramètres et les lignes d’action des organes de censure des douanes, entre 1769 et 1821, et, ensuite, quelques aspects de la circulation et du commerce des livres du Portugal vers les différentes parties du Brésil, dans la période qui s’étend de 1768 à 1800, et de divers points de l’Amérique portugaise vers différents endroits du royaume, entre 1769 et 1821. Dans l’analyse quantitative, je me concentrerai sur les chiffres concernant le volume d’expéditions faites par des libraires ou des particuliers. Enfin, je m’arrêterai sur les interventions de la censure sur la circulation et les utilisations possibles du Livro de Santa Bárbara, l’imprimé le plus présent dans le commerce Portugal-Brésil. Censure littéraire et circulation des imprimés, enfin, seront étudiées pour comprendre l’action des organes de censure pour la défense, en dernier recours, de l’unité de la nation portugaise, définie par les autorités d’alors comme l’État et ayant pour pilier le trône qui unissait autour de lui, selon les termes de Dom Rodrigo de Souza Coutinho, ministre du prince Dom João, « de vastes domaines et États », dispersés dans les « quatre parties du monde1 ».
La censure : paramètres et lignes générales de l’action des douanes2
2La censure, du début du xvie siècle jusqu’en 1768, était laissée aux soins de l’Ordinaire (juge ecclésiastique), de l’Inquisition et du Desembargo do Paço3. En 1768, Dom José I plaça la censure sous la juridiction d’un organe unique, la Real Mesa Censória4. Cette initiative est la marque d’un effort de sécularisation, défini par une série de mesures d’orientation réformiste et régalienne qui exprimaient une assimilation sélective des idées des Lumières, avec la valorisation de la Raison et des sciences et, en même temps, la condamnation de tout ce qui pourrait sonner comme une menace pour l’Ancien Régime.
3Dona Maria I substitua, en 1787, la Real Comissão Geral para o Exame e a Censura dos livros (Commission royale générale pour l’examen et la censure des livres) à la Real Mesa Censória, justifiant cette initiative par l’inefficacité de la Real MesaCensória5. Dans le cadre plus limité de la censure littéraire, suivant la tendance qui imprégnait toute son action gouvernementale, la souveraine portugaise se situait dans la continuité du règne précédent et, en même temps, corrigeait les mesures jugées condamnables : si quelques concessions furent faites à l’Église dans le domaine de la censure, la primauté de la Couronne fut maintenue6.
4En 1794, le gouvernement portugais, déjà sous la régence informelle du Prince Dom João, revint au système de la triple censure : Inquisition, Ordinaire et Desembargo do Paço se partagèrent à nouveau le développement de l’activité de censure, ce dernier exerçant le rôle principal. La justification de cette volte-face était l’inefficacité de la censure unifiée et « l’extraordinaire et redoutable Révolution Littéraire et Doctrinale » qui attentait alors « aux opinions établies », propageant de nouveaux principes politiques, philosophiques et juridiques, au péril « de la Religion, des Empires et des Sociétés7 » Cette mesure mena à un recul de la sécularisation de la censure, sans toutefois affecter la prédominance laïque, dans la mesure où le Desembargo do Paço jouait désormais un rôle central (et final) dans le processus de censure. En 1808, avec le transfert de la Cour à Rio de Janeiro et l’installation du Desembargo do Paço dans le nouveau siège de l’Empire, il appartint à ce tribunal de vérifier l’impression, le commerce et la circulation des livres8.
5La censure portugaise sous le réformisme éclairé eut pour cibles principales, d’une part, les jésuites, vus comme des alliés du « fanatisme », de « l’ignorance » et de la « débauche », jugés comme un obstacle à la modernisation conservatrice, régalienne et éclairée, et, d’autre part, les penseurs de l’Époque moderne et, surtout, les philosophes les plus radicaux des Lumières qui défendaient le déisme, le matérialisme, l’athéisme, la souveraineté populaire (ou son contraire, c’est-à-dire que le prince pouvait tout faire) et inversement, attaquaient la religion catholique et, pire encore, l’Église, touchant ainsi ce que l’on considérait comme « les fondements les plus solides du trône ». La censure préconisait les « lumières de la raison et de la vérité », fondées sur des « vrais catholiques », et cherchait à concilier la « Raison », les intérêts du catholicisme et de l’État, pour affermir « l’autorité et la protection des Souverains : assurer la soumission et l’obéissance des vassaux9 » : en un mot, défendre la monarchie et, ainsi, l’unité de la nation.
6Comment se déroula concrètement l’action de la censure dans les douanes, en ce qui concerne principalement la circulation des livres, et surtout le commerce du livre ? Avant de répondre à cette question, il convient d’identifier quelques tendances plus générales du fonctionnement des organes de censure. Les organismes chargés de la censure dans les possessions portugaises n’ont pas été capables d’empêcher l’entrée, la possession et la lecture des livres interdits. Ces mêmes organismes, cependant, ont mis des obstacles à l’impression, au commerce, à la possession des livres et à la lecture, bien que leur efficacité n’ait pas été des meilleures. Une machine bureaucratique lente, dotée de critères inégaux et constituée d’organes aux juridictions souvent superposées, chargée de plusieurs tâches – prévenir, interdire, réprimer, agissant dans le circuit qui va de la production du livre jusqu’à sa lecture –, se confrontait au dynamisme de l’édition et du commerce des livres et, de plus, à l’audace des lecteurs, pas toujours obéissants vis-à-vis des interdictions légales.
7Dans le domaine plus limité de la circulation des livres, ce qui augmentait l’inefficacité était le fait que certaines personnes puissent lire légalement certains livres et auteurs qui, inversement, étaient interdits à la majorité de la population, ce qui avait une conséquence dans le domaine commercial : cela autorisait la vente par des libraires des œuvres interdites aux lecteurs privilégiés. Cette ouverture facilitait la circulation des livres interdits qui, fréquemment, arrivaient entre les mains de ceux qui n’avaient le droit ni de les posséder ni de les lire. Dans le contexte colonial, les problèmes évoqués ci-dessus de fonctionnement des organes de censure et des brèches existantes dans la circulation, la possession et la lecture des livres interdits furent plus importants que dans le Royaume. Aux limites de l’illégalité, outre le fait d’être plus importants, il semble qu’ils varièrent en fonction de l’espace et de l’époque, dépendant en grande partie de l’implication des gouverneurs des capitaineries10 et des magistrats11 : c’est-à-dire que la tolérance aux inégalités était aussi sujette à des variations.
8Sur décision de la Real Mesa Censória, les juges des douanes se virent obligés de remettre tous les livres qu’ils détenaient à la Casa da revisão12, et les individus qui transportaient ou expédiaient des livres à des tiers devaient les inscrire sur un registre. C’est certainement suite à la Révolution Française que la Couronne adressa une disposition à tous les juges des douanes, dont ceux de São Paulo, Santos, Rio de Janeiro, Bahia, Pernambouc, Pará, Maranhão, Paraíba e Santa Catarina, en 1792, pour qu’ils « prennent un soin particulier afin que ne sorte aucun livre des navires, tant nationaux qu’étrangers, et qu’il ne soit remis à personne qui ne vous donne la preuve de l’accord de la Real Mesa et que ceux-ci soient accompagnés d’un registre signé par le Secrétariat13 ».
9Ces décisions n’empêchèrent cependant pas l’entrée de livres défendus aussi bien dans le Royaume qu’en Amérique. Les autorités avaient conscience de la vulnérabilité des douanes. Diogo Antônio Pina Manique, l’intendant général de Police de Lisbonne considérait en 1798 que des œuvres défendues14 entraient dans le Royaume, par la voie douanière, de la Cour ou de Setúbal. L’une des manières pour contourner le contrôle des juges était de cacher qu’ils transportaient ou expédiaient des livres. Le voyageur Carl Rugers souligna que, si un Portugais ou un étranger faisait « la bêtise de déclarer à la douane les livres qu’il avait commandés », il était à craindre qu’il doive les attendre longtemps « voire même de n’en avoir aucun15 ». Cela n’échappait pas à la conscience d’autres contemporains, en particulier les experts en matière de livres, comme le marchand Pedro José Reis, de Lisbonne, qui, après avoir vendu un ouvrage au chanoine João Luiz Sayão, du diocèse de Mariana, lui conseilla, d’après la déclaration de celui-ci, de ne pas le mentionner « sur le registre de livres » qui devait être présenté à la douane « laissant ainsi entendre qu’on ne le laisserait pas passer16 ». De fait, ceux qui collaboraient avec les organes de censure, en déclarant à la douane la liste des livres qu’ils transportaient avec eux ou qu’ils envoyaient à d’autres personnes, facilitaient l’action de contrôle, en courant le risque d’en perdre quelques-uns, tant en Amérique que dans le Royaume. En outre, certains lecteurs collaboraient avec la censure en renseignant les registres et aussi en l’alertant sur le fait qu’ils ne transportaient pas de livres défendus, à l’exemple du juge Faustino da Costa Valente qui, en 1795, voyageait du Pará à Lisbonne. Si, au bas du registre de livres, il écrivait que celui-ci ne contenait « aucun livre » qui mérite d’être « réprouvé ou expurgé pour sa Doctrine », l’arrêt du tribunal reprenait ces termes en déclarant « que les livres mentionnés dans ce registre ne contiennent aucune doctrine dangereuse ou réprouvée17 ».
Les expéditions de livres Amérique-Royaume et Royaume-Amérique selon les listes
10Sur la base des registres présentés par ceux qui expédiaient ou emportaient des livres du Portugal pour l’Amérique ou de ce continent pour le Royaume, il est possible de relever quelques chiffres relatifs au mouvement de circulation des livres, comme nous pouvons l’observer sur les tableaux et les graphiques suivants. Sur le graphique 1 et les tableaux 1 et 2, nous voyons les chiffres relatifs au flux Amérique-Royaume, avec des expéditions de livres qui, entre 1769 et 1821, partant des (ou passant par les) ports de Bahia, Rio de Janeiro, Pernambouc, Pará e Maranhão, étaient envoyés vers les villes suivantes du Portugal : Lisbonne, Porto, Braga, Coimbra et Bragance. Le tableau 3 présente les chiffres correspondant au flux inverse, avec comme point de départ le Royaume du Portugal et comme destinations spécifiées au Brésil (en général), Rio de Janeiro, Maranhão, Bahia e Pará, entre 1769 et 1800.
Graphique 1. – Livraisons de livres de l’Amérique vers le Royaume (1769-1821).
11
Source : Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, Caisses 144 et 149.
Tableau 1. – Nombre d’expéditions de livres de l’Amérique vers le Portugal (1769-1821) par origine et destination finale.
12
Source : Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, Caisses 144 et 149.
Tableau 2. – Nombre d’expéditions de livres de l’Amérique vers le Portugal, par nature d’activitédes expéditeurs (1769-1821).
* Avec l’intermédiation d’un marchand, non comptabilisé dans le total.
** L’un d’eux étant militaire (1er lieutenant de la Marine).
*** Un 14e marchand peut être pris en compte car il intervint dans l’expédition de livres à un magistrat.
**** Il y a des doutes sur le fait que la navigation ait été l’activité de l’un d’eux.
Source : Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, Caisses 144 et 149.
Tableau 3. – Nombre d’expéditions de livres du Portugal vers différentes destinations du Brésil (1769-1800).
13
Source : Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisses 151, 153, 157, 159, 160, 161 et 163.
14Avant d’analyser les chiffres présentés dans le graphique 1 et les tableaux 1, 2 et 3, je voudrais faire quelques remarques. Premièrement, on ne peut pas imaginer que de tels chiffres reflètent le volume réel de la circulation de livres. Comme nous l’avons dit précédemment, tous les mouvements de livres n’étaient pas soumis à l’examen des organes de censure, par stratégie délibérée des lecteurs et des libraires qui faisaient de la contrebande une alternative pour faire circuler les livres interdits, comme l’avaient observé les autorités de l’époque. Les procès-verbaux d’enquêtes sur les dénommées Inconfidências18 de la fin du xviiie siècle, les dénonciations et les confessions adressées à l’Inquisition de Lisbonne et les inventaires post mortem de la période, dans lesquels étaient enregistrés les livres interdits qui, évidemment, passèrent d’une façon ou d’une autre par la douane, mènent à la même conclusion.
15Il faut dès lors considérer que les chiffres contenus dans le graphique 1 et dans les tableaux correspondent à peine à une partie de la circulation de livres, celle qui fut faite légalement. En deuxième lieu, il y a des variations extrêmes dans la distribution des chiffres tout au long de la période, avec des années au cours desquelles il n’y a aucun enregistrement de livres, des périodes où il y a une grande concentration ou une chute sur une année spécifique. Ces irrégularités seraient-elles le résultat d’une plus grande ou d’une moindre rigueur dans les contrôles, conformément aux orientations gouvernementales, ou seraient-elles expliquées par la non-préservation des documents ? Il est très difficile de se risquer à donner une réponse définitive. En troisième lieu, cet article est le premier essai d’interprétation des données collectées pour la recherche dans son ensemble : leur stockage dans des banques de données et leur quantification ultérieure, en fonction du volume, contiennent une marge d’erreur et, par conséquent, les analyses présentées ici ont un caractère provisoire et seront sujettes à révision dans le futur.
16La périodisation limite aussi les analyses : en ce qui concerne le flux de livres qui part de divers ports d’Amérique vers le Royaume, la recherche porte sur la période qui s’étend de 1769 à 1821, alors que le laps de temps relatif au sens inverse, c’est-à-dire du Royaume vers l’Amérique, est bien plus réduit, allant de 1769 à 1800, se terminant donc à la fin du xviiie siècle. Cette limitation a eu pour objet de rendre possible l’analyse des données relatives à toute l’Amérique Portugaise, ce qui aurait été impossible si le repère chronologique avait été étendu au xixe siècle, dans la mesure où la circulation s’intensifia à ses débuts, surtout après 1808. Il y a enfin les défauts relatifs aux difficultés de faire la différence, à l’intérieur du mouvement de circulation, entre ce qui correspond au commerce des libraires et à l’expédition de livres par leurs propriétaires eux-mêmes, sans but commercial. Le tableau I montre que la circulation légale de livres, entre l’Amérique portugaise et le Royaume, de 1769 à 1821, atteignit un total de 53 expéditions, de différents points d’origine et de destination, et comportant donc des parcours différents. Bahia se distingue comme étant la ville d’où partit le plus grand nombre d’expéditions, suivie de Rio de Janeiro, avec, respectivement, 19 et 16 chargements sur un total de 53. Pernambouc occupa la troisième place avec le chiffre de 6 expéditions, auxquelles s’ajoutent deux autres, pour lesquelles Recife apparaît comme le sommet d’une triangulation. Deux chargement partirent du Maranhão, outre le fait que São Luís ait été l’escale d’une troisième commercialisation sur le circuit Lisbonne-Maranhão-Lisbonne. Du « Brésil » et « d’Amérique », respectivement, dénominations génériques, partirent 2 expéditions (pour chaque localité). Parmi les lieux de destination Lisbonne prédominait : des 53 expéditions, 33 allaient vers la capitale de l’empire portugais. La ville de Porto fut le lieu de destination de 17 expéditions, tandis que Bragance, Braga et Coimbra reçurent chacune un envoi. Comme on peut le noter aussi dans le tableau 1, pour quatre expéditions, il y eut une sorte de triangulation dans laquelle l’Amérique fut un point de passage avec, comme point de départ, des villes du Royaume (Bragance ou Lisbonne), comme escales, Rio de Janeiro, Maranhão et Pernambouc, et s’achevant avec un retour aux villes d’origine. Avant, toutefois, d’analyser ces transactions triangulaires mises en évidence dans le tableau I, j’esquisserai le profil social des personnages impliqués dans ces expéditions de livres de l’Amérique vers le Portugal.
17Comme on le constate dans le tableau I, une partie significative des expéditeurs de livres était constituée de libraires ou de personnes qui exerçaient probablement cette activité, ou bien qui étaient au service des marchands : 13 sur les 53 expéditeurs, soit près de 20 %. À côté des libraires d’origine française, comme Borel & Borel et Paulo Martin e Filhos/Martin e Irmãos19, figuraient des noms moins connus, comme José Joaquim de Souza Trovão et Francisco José Dias, marchands notoires, et Bernardo Ribeiro de Carvalho Braga, Francisco de Araújo Nunes, José Aniçeto Raposo, Manoel Teixeira Cabral et João Duarte Branco, dont les expéditions ont clairement les caractéristiques de transactions commerciales. Le groupe qui occupait la seconde position dans le classement des expéditeurs de livres comprenait des personnes de formation juridique qui se destinaient à la profession d’avocat ou de magistrat, soit 10 des 53 individus impliqués dans la circulation de livres de l’Amérique vers le Portugal, un peu moins de 20 % du total ; 6 étaient juges, dont l’un d’eux déjà mort (« Joze Franc. Sa. Costa Furtado, décédé dans la ville de Maranhão », dont la bibliothèque fut mise en vente, en 1820, par « Antonio Manoel Gomes, négociant, de la ville de Porto20 », à la demande de sa veuve, dona Mariana Cândida21) ; et l’un, juge, avait servi dans le Pará. Les religieux, impliqués dans 8 expéditions, arrivaient en troisième position, suivis des navigateurs, des auteurs, avec, certainement, six expéditions et, probablement, une septième, et les médecins ou les chirurgiens qui firent six expéditions. Dans trois cas il fut impossible d’identifier l’activité ou la condition de l’expéditeur. Les nobles faisaient l’objet de deux envois, situation dans laquelle se trouvaient aussi deux étudiants. Un apothicaire et un haut fonctionnaire royal participèrent une seule fois chacun à l’envoi de livres.
18En ce qui concerne la triangulation, le premier cas fut l’œuvre de l’archidiacre Manoel Álvares Leal qui emporta de Bragance, en 1820, « Des livres qui se trouvaient dans une malle », « pour Rio de Janeiro, pour sa distraction pendant le voyage et les rapporta22 ». S’agissant de la deuxième transaction triangulaire, Lisbonne-Maranhão-Lisbonne, il faut ajouter deux informations qui ne figurent pas dans le tableau 1 : les marchandises seraient parties tout d’abord de Porto, et la ville de Rio de Janeiro était la destination (première et non atteinte) finale des livres. Francisco José Dias, négociant, en 1808, essaya d’envoyer « trois cent soixante-dix livres », provenant de Porto et reçus de José Antônio da Silva Bastos, de Lisbonne à Rio de Janeiro, « entre autres marchandises », dans « trois caisses », le tout d’une « valeur de cent cinquante mille reis », mais le navire fit escale à Maranhão et les livres furent interceptés par la douane de São Luís do Maranhão. Les « caisses » furent renvoyées à Lisbonne où elles furent soumises à l’inspection du Desembargo do Paço ; le négociant demanda au tribunal que les livres soient envoyés sans avoir à payer de nouveau les droits de douane. Le Desembargo do Paço, paraît-il, accéda à cette demande et autorisa l’expédition des livres à Rio de Janeiro, avec la restriction suivante : « À livrer, sauf ceux qui sont interdits. Le 22 janvier 1812. » Dans la liste des livres, datée du 27 juin 1812, se trouvent deux titres qui entrent, probablement, dans cette catégorie : Œuvres, de Montesquieu (dans lequel pourraient être incluses les Lettres Persanes interdites et déjà supprimées certainement en 1771), et O Direito de Natureza e das Gentes, de Felice, autorisé seulement, en 1804, aux porteurs de l’autorisation de le lire23. Si cet exemple montre qu’il y avait des négociants qui commercialisaient d’autres marchandises que des livres et n’étaient donc pas spécialisés, il indique que le commerce des livres était sujet à des imprévus, comme les modifications dans l’itinéraire des voyages (et, par conséquent, la non arrivée à destination et la perte de temps dans la conclusion de l’opération), les possibles augmentations de coûts avec le fret, les nouvelles taxes douanières et, de plus, l’inspection des organes de censure (qui, comme on le voit, se produisit à São Luís et à Lisbonne, où des livres jugés interdits ont été retenus, sans que l’on en connaisse les titres). La troisième transaction triangulaire fut réalisée par José Aniceto Raposo qui, avec « l’Autorisation de la Commission Royale », abolie en 1794, avait envoyé, « à Pernambouc plusieurs livres, dont il fallut extraire quelques-uns qui furent renvoyés à la ville d’origine et se trouvent à la Douane, [en 1796] où une autorisation est nécessaire pour les en retirer24 ». À ce qu’il paraît, Raposo avait envoyé, avec l’autorisation de la Commission royale, des livres qui devaient être vendus dans la capitale du Pernambouc et, n’ayant pas réussi totalement sa transaction, il voulut retirer les exemplaires réexpédiés, ce qui exigeait alors, en 1796, une autorisation du Desembargo do Paço. Ce cas permet d’identifier d’autres mésaventures auxquelles étaient confrontés ceux qui s’engageaient dans le commerce des livres : l’immobilisation d’une partie de la marchandise, le coût du transport de retour et, de plus, la bureaucratie de la censure avec toutes ses modifications. La dernière transaction qui met en évidence un certain type de triangulation a été faite par João Duarte Branco, en 1816, lui aussi, apparemment, un commerçant malchanceux, victime du retour injustifié de livres et empêtré dans les méandres de la censure. À cette date il se plaignait à propos d’une expédition de livres pour Pernambouc : « Quelques volumes du livre intitulé “Modo de Caminhar para o Ceo’” retournèrent par erreur à la Douane de Lisbonne avec la brochure “Devoção a Chagas”, et comme la douane ne peut les remettre à leur propriétaire sans Ordre de V.A.R. », il sollicitait l’autorisation de les retirer25.
19En analysant le graphique 1, il est possible de détecter quelques tendances dans la circulation des livres de l’Amérique vers le Portugal, entre 1769 et 1821, en considérant, évidemment, que la documentation est loin de refléter le flux du commerce légal de livres. Jusqu’à l’année 1808, où le nombre d’expéditions atteignit le chiffre de 5, ce chiffre n’avait jamais dépassé un total de 3, avec des années où ne fut pas enregistrée une seule expédition comme : 1773, 1774, les 15 années qui s’étendent de 1780 à 1794, 1797, 1798, 1800, 1801 et 1804. Entre 1809 et 1811 et, ensuite, en 1814 et 1815, se répéta la même absence d’enregistrement de mouvements ; en 1816, on atteignit le chiffre le plus élevé de l’ensemble : 9 expéditions. En partant de la supposition que de tels chiffres ne reflètent pas le mouvement des affaires de livres, il est possible d’interpréter ces disparités, premièrement en prenant en considération l’histoire des troubles politiques de l’époque qui ont dû avoir des répercussions négatives sur la circulation des personnes et des livres et, spécialement, sur le commerce des livres. Il est probable qu’il y eut des problèmes de conservation des documents qui expliquent les années et les périodes où rien ne fut enregistré en terme de circulation de livres. Toutefois, il est possible que les chiffres aient un certain rapport avec les actions des organes de censure, d’une part, et celles des propriétaires de livres, commerçants ou non, d’autre part : c’est-à-dire que le meilleur contrôle de la censure et la bonne volonté des expéditeurs et des transporteurs de livres expliqueraient les chiffres les plus élevés.
20Au cours de l’année agitée de 1807, où le Royaume se trouva sous les feux croisés du conflit entre l’Angleterre et la France, et fut envahi, fin novembre, par Junot, on atteignit le chiffre de 5 expéditions de livres de l’Amérique vers le Portugal. Serait-ce l’indice d’une plus grande rigueur des organes de censure sous l’impact des conflits européens ? Il est impossible de donner une réponse définitive. Cependant, un cas pittoresque qui débuta en juin de cette même année, peut être utile pour échafauder des hypothèses. Leonardo Correa da Silva, aumônier du Brigantin Sacramento débarqua à Lisbonne, en provenance de Pernambouc, avec une malle de livres et présenta une liste incomplète de titres et/ou d’auteurs des livres, déclarant qu’ils ne faisaient pas partie « des interdits » et demandant au tribunal leur libération. Les livres restèrent retenus à la douane et, le 20 juin, fut publié un arrêté visant à les envoyer au greffe du Desembargo do Paço, mais le chapelain refusa de payer pour leur transport26. L’employé de bureau José Veríssimo Serrão ordonna alors aux portefaix de prendre la malle de livres en les informant qu’ils seraient payés à la maison ou au Greffe. Les hommes lui demandèrent d’ouvrir la porte de l’entrepôt et, pendant qu’il s’en occupait, portèrent directement la malle à la maison du père Leonardo, à la demande de celui-ci. Cinq jours plus tard, l’employé de bureau, se sentant offensé et trompé, adressa un rapport au Desembargo do Paço, dénonçant l’escroquerie et suspectant que le contrôle avait été déjoué, puisque l’aumônier avait déjà pris possession des livres27. Le 26 juin, le tribunal ordonna, d’une part, qu’une perquisition soit faite au domicile du père Leonardo, pour saisir tous les livres qui s’y trouvaient et les envoyer au greffe et, d’autre part, l’arrestation des employés de la société impliqués dans le détournement des livres, sans prendre aucune mesure à l’encontre de l’aumônier. Le 3 août, le tribunal libéra les portefaix et, le 18, remit les livres à l’aumônier après que celui-ci ait complété la liste des ouvrages adressée au départ28. Si toute cette affaire suggère que le père Leonardo a agi de mauvaise foi, et que son affirmation selon laquelle il ne transportait pas de livres interdits était fausse, si, en outre, le délit ne fut enregistré que parce que l’employé de bureau s’était senti offensé dans ses attributions, on ne peut nier qu’il y eut une action énergique des agents de censure. La logique de répression des contrevenants, toutefois, exprime la même tendance plus générale par laquelle l’État réglementait la relation avec les livres : elle était régie par l’inégalité des droits (et des marges de tolérance vis-à-vis des illégalités) inhérentes à une société hiérarchisée, comme on le voit à la manière dont on n’a puni que les portefaix. Le cas particulier représenté par le père Leonardo et le chiffre de 5 expéditions de livres enregistrées par la censure, tout cela au cours de l’année 1807, permettent de supposer que la censure à Lisbonne fonctionnait avec zèle, selon la logique propre à un ordre hiérarchique : d’où la production de documents. Cependant, on ne peut pas être sûr du contraire à propos des années pour lesquelles il n’y a pas d’enregistrements, simplement parce que les documents ont peut-être disparu.
21Le pic d’enregistrement d’expéditions de livres de l’Amérique vers le Royaume, constaté en 1816, aurait-il un rapport avec une plus forte activité de la censure ? Ainsi que le cadre international plus large qui associait l’agitation révolutionnaire dans l’Amérique espagnole à la chute de Napoléon et à un nouvel ordre en Europe, après le Congrès de Vienne, permettant une circulation plus facile des personnes et des marchandises de l’Amérique vers le Portugal, celui-ci étant désormais libéré du fantasme des invasions françaises ? Il est possible que la paix européenne, d’une part, permettant une plus grande circulation et, d’autre part, les troubles révolutionnaires dans l’Amérique espagnole, causant des frayeurs aux censeurs, expliquent la subite augmentation des expéditions de livres en 1816 : circulation plus facile et vigilance accrue à Lisbonne déboucheraient sur une augmentation de l’enregistrement d’expéditions (9). La baisse du flux, en 1817, à 3 expéditions et, en 1818, à 0, est difficile à expliquer : une demande contenue dans la circulation au cours des années antérieures à 1816, aurait diminué brutalement dans les années suivantes, après avoir été satisfaite ? De plus, 1817 fut une année perturbée des deux côtés de l’Atlantique – Pernambouc et une partie du Nordeste se soulevèrent contre la Couronne et, à Porto, on réprima une conspiration dirigée par Gomes Freire de Andrade, sous l’influence de la franc-maçonnerie –, et cela aurait rendu plus difficile la circulation des personnes et des livres ? Il n’est pas possible de donner des réponses à ces questions.
22Dans le tableau 3, on examine la participation différente des ports et des villes de l’Amérique Portugaise dans la circulation des livres provenant du Portugal, entre 1769 et 1800, avec un total de 412 expéditions. Rio de Janeiro, capitale de l’État du Brésil depuis 1763 – État qui, après 1774, inclut toutes les possessions portugaises d’Amérique –, plus de 1/3 du total, atteignit le chiffre de 176 transactions. La deuxième position, comme on peut l’imaginer, fut occupée par Bahia, avec 134 expéditions, suivie de Maranhão, avec 75, le Brésil, génériquement, avec 56 et le Pará, avec 3029. La participation du Minas Gerais dans cette circulation s’inscrit dans le circuit relatif au Brésil et, surtout, à Rio de Janeiro, point d’entrée d’une bonne partie des marchandises venues de l’extérieur et destinées aux Alterosas30. Cela est illustré par le père Raymondo de Silva Cardoso, exerçant la prêtrise dans le diocèse de Mariana dans les années 1786 et décédé en 1820 alors qu’il était chanoine du diocèse : en 1796, il disait à la censure, à Lisbonne, qu’il « avait besoin de transporter [des livres] à Rio de Janeiro », lesquels sont venus intégrer la bibliothèque inventoriée31 après son décès.
23Dans le tableau 3 nous voyons les variations du nombre d’enregistrements d’expéditions, par destination, au cours de la période comprise entre 1769 et 1800. Il est possible de constater des tendances plus ou moins communes : en 1769, il y eut quelques enregistrements d’expéditions, destinées à Bahia et à Rio de Janeiro, déclinant complètement ou presque, pour ces villes et pour les autres, jusqu’en 1794 ; pour 1795, il y a un indice significatif de circulation vers Rio de Janeiro (18 expéditions), accompagné de chiffres plus modestes pour Bahia (9), « Brésil » (6) et Pará (1), et un chiffre surprenant concernant Maranhão (11), proportionnellement élevé. En 1796, le nombre d’enregistrements augmenta de façon vertigineuse : Rio de Janeiro (48), pratiquement à égalité avec Bahia (43), suivis de Maranhão (26), « Brésil » (17) et Pará (11). Au déclin général de 1797, suivi de l’absence totale d’enregistrements en 1798, succédèrent les enregistrements plus élevés de circulation en 1799 (Rio de Janeiro, 63 expéditions ; Bahia, 39 ; Maranhão, 22 ; « Brésil », 20 et Pará, 7), diminuant en 1800, à l’exception du Pará, où elles montèrent à 1032. En partant des mêmes hypothèses que celles établies pour l’analyse de la circulation des livres de l’Amérique vers le Portugal, nous pouvons, d’un côté, relier l’augmentation des chiffres aux troubles politiques contemporains et, de l’autre, aux inflexions dans l’histoire de la censure. Est-ce à dire que la Révolution française, la guerre qui l’a accompagnée et le changement intervenu dans le système de censure, avec le rétablissement de la triple censure, désormais dirigée par le Desembargo do Paço, en remplacement de la Real Mesa da Comissão Geral, amenèrent à une plus grande rigueur des contrôles dans les douanes ? Les registres sont trop peu fiables pour que l’on puisse répondre de façon affirmative. Toutefois, dans la dernière partie de l’article, il sera possible de constater que la quasi-totalité des rétentions d’ouvrages interdits par les douanes, identifiées dans les enregistrements du flux Portugal-Amérique, date des années qui s’étendent de 1795 à 1797. Ce n’est que lorsque l’on inclut le flux Amérique-Portugal que les années 1769, 1773 et 1775 se rapprochent de cette situation, sans autre concurrence que celle-là. Ces chiffres donnent une certaine consistance à l’hypothèse émise ci-dessus.
Tableau 4. – Participation des marchands dans les expéditions de livres du Portugal vers l’Amérique (1769-1800).
24
* Pour les expéditions, les destinations « Brésil » (dénomination générique sans précision) sont : Cuiabá, Goiás, Mato Grosso, Paraíba, Paranágua, Rio Grande do Sul, Rio de Janeiro, Santos e São Paulo.
** Sur 42 expéditions de livres, les expéditeurs exercent clairement une autre activité que celle de commerçant. Pour 4 sur ces 42, les expéditeurs sont associés aux libraires Viúva Bertrand & filhos. Ces expéditions aussi sont comptabilisées dans les 91 attribuées à des libraires.
Source : Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisses 151, 153, 157,159, 160, 161 et 163.
25La participation des négociants, dont ceux spécialisés dans le commerce des livres, à l’ensemble de cette circulation, n’est pas facilement mesurable. Les expéditeurs ne s’identifiaient pas toujours comme commerçants et, de plus, les cas d’expéditeurs désignant des libraires comme leurs mandataires étaient courants. Ainsi, José Alves Branco, en 1796, affirmait « vouloir expédier » des livres à Bahia, désignant sur sa demande, comme mandataire, la Viúva Bertrand e filhos, libraires renommés. Cette situation est identique à celle vécue par le père et puissant commerçant baiano33 Francisco Agostinho Gomes, conspirateur de 1798, qui, le 6 février 1800, « avait besoin d’embarquer » des livres qui étaient « pour son usage personnel » pour Salvador, Borel, Borel e Cia. ayant signé en tant que mandataires34. Dans d’autres cas, des tiers agirent comme intermédiaires, servant aux libraires ou faisant des achats à la demande de personnes qui habitaient en Amérique, en leur envoyant ensuite les livres achetés ; c’est l’exemple de l’expédition faite par le célèbre botaniste frère José Mariano da Conceição Velloso qui, en 1796, voulait envoyer des livres « à remettre à João Manso Pereira, Professeur Regius », personnage important dans l’histoire de la chimie au Brésil35.
26Lors d’une première analyse des enregistrements de la circulation légale de livres du Portugal vers l’Amérique, entre 1769 et 1800, il a été possible d’identifier des expéditeurs qui étaient, certainement, des commerçants ou des personnes à leur service, comme on le voit sur le tableau 4. Les chiffres comptabilisés sont certainement inférieurs à ceux de la participation effective des marchands, et sont susceptibles d’être revus à la hausse au fur et à mesure de l’avancement de la recherche. On constate, dans le tableau 4, que les marchands contrôlaient, au minimum, près de 51,7 % des expéditions (à Rio de Janeiro où elles s’élevèrent à 91 sur un total de 175), atteignant presque les 2/3 (à Bahia où elles montèrent à 87 sur 134) et, dans le flux vers les autres villes, elles tournaient autour de 80 % (au Brésil, avec 46 sur un total de 57 ; au Pará, avec 24 sur 30 et au Maranhão, avec 60 sur un total de 76). Il s’agit donc d’une participation significative, d’autant plus qu’elle est sous-estimée en raison des difficultés d’identification de l’activité des expéditeurs. Rio de Janeiro et Bahia, centres économiques et politiques les plus importants, ont été, selon toute vraisemblance, les destinations qui comptaient moins de libraires et plus de propriétaires individuels de bibliothèques.
Saisies des douanes
27Aux douanes, il y eut saisie et confiscation de livres jugés interdits, tant dans les expéditions qui sortaient du Portugal vers l’Amérique que dans celles qui faisaient le parcours inverse. Dans le sens Amérique-Portugal, il y eut des cas de rétention dans lesquels il est possible de conclure que cela s’est produit, en plus de celui mentionné ci-dessus et qui eut pour protagoniste le libraire Francisco José Dias, en 1808. Dans la transaction effectuée par Antonio Manoel Gomes avec les livres hérités par Mariana Cândida Fortes de Mello, au Maranhão, arrivés à Porto en 1820, une liste fut présentée à la douane sur laquelle figure un « x » en face de l’œuvre de Mably, ce qui suppose son identification comme livre défendu par la censure. Cependant, le dédouanement ne permet pas d’affirmer que l’ouvrage ait été retenu par la censure36. Ce doute n’existe pas à propos de ce qui se produisit avec les livres d’Antonio da Costa Agra, avocat, qui voyageait de Bahia à Porto, en 1769 : dans la demande jointe à la liste soumise à la censure, il est mentionné que les livres inscrits devaient être livrés à leur propriétaire, « à l’exception de l’œuvre de Lacroix qui devra être remise à ce Bureau37 ». José de Castro Pereira de Aguiar, père séculier, venant aussi de Bahia à Porto, en 1775, eut la même malchance, car la douane autorisa la livraison des livres qu’il avait ramenés de l’héritage de son oncle : « Sauf le Soares Luzitano et les Crizes Theologicas de Casnedi38. » Si les douanes, dans ces trois transactions, ont confisqué les livres, il y eut des cas où il fut demandé de les présenter pour examen, cela impliquant donc une rétention temporaire. En 1769, Boaventura Maciel Aranha reçut de Bahia « une caisse de livres qui étaient le reste de ceux qu’il y avait envoyés », tous de sa signature, « vingt in folio qui traitent de la vie de Saints Portugais ; quatre avec les titres Cuidados da vida, e descuidos da morte in 4°; et un autre in 8° avec le titre de Aflição, e Amor de Maria Santissima39 ». Comme les livres n’avaient pas fait l’objet d’un examen de la Real Mesa Censória – en fait celle-ci n’existait pas encore pour les censurer lors de leur impression –, il était nécessaire de le faire. Comme il ne s’agissait pas d’un simple contrôle de possession de livres, il fut ordonné audit auteur de présenter les livres « dont il était fait mention [...] pour les autoriser40 ». À la veille de son abolition au Portugal – survenue le 4 juin 1821 et étendue au Brésil le 28 août de la même année41 –, alors qu’elle semblait être dans d’autres mains que celles du Desembargo do Paço, la censure examina une transaction de Martin Irmãos, de Rio de Janeiro vers Lisbonne. Son histoire suggère que la rétention de livres, à la douane même, bien que temporaire, pouvait être longue : commencée vers le 16 mai 1816, quand fut enregistré un premier avis sur la liste42, elle « fut remise à la Commission de Censure récemment créée » pour examen, et se termina vers le 24 mai de la même année, avec l’ordre de livraison des livres aux libraires43.
28En ce qui concerne le flux Portugal-Amérique, entre 1769 et 1800, le même scénario se déroula à propos des contrôles et, par conséquent, des saisies. Les organes de censure s’agaçaient de l’imprécision des listes faites par ceux qui voulaient embarquer des livres. En 1795, Pedro José Reis tenta d’envoyer des livres de Lisbonne pour Paraíba, mais n’obtint pas l’autorisation du Desembargo do Paço qui exigea de lui un « relevé exact » des livres qu’il voulait envoyer, « avec individualisation du titre complet de chacun des livres, du nom de leurs auteurs, de la date et du lieu d’impression44 ». En 1797, on exigea de Manoel José da Costa, certainement un commerçant, la présentation de la « Liste des papiers saisis » (c’est-à-dire des imprimés interceptés par la douane), qu’il désirait envoyer de Porto au Brésil et que, de façon générique, il avait listé comme « un assortiment d’Estampes en feuilles, demi-feuille et quart de feuille, toutes de Saints, plusieurs Triptyques, des Tables [...] le tout imprimé il y a déjà plusieurs années avec autorisation45 ». À ces rétentions temporaires s’ajoutèrent les confiscations de livres, comme cela se produisit avec une expédition faite au Brésil, en 1795, par la Viúva Bertrand e Filho – à qui on demanda la remise de « l’œuvre intitulée Almeyda Restauração de Portugal46 » – et avec le père séculier Manoel de Santiago qui, en 1799, voulait aller à Rio de Janeiro et, ensuite, retourner à Lisbonne « avec les livres de son usage » – la douane retint l’un d’eux, MysticaCidade de Deos, de Maria d’Agreda47. Un ordre similaire fut envoyé à Antônio Máximo de Brito qui allait de Lisbonne à Rio de Janeiro, en 1775, à qui on demanda de remettre les livres « Arte de Furtar = L’Homme conduit par la Raison = Barrone48 » Il en alla de même avec Luís Sé de Gouveia Freire, en 1796, qui voyageait également pour Rio, en emportant avec lui « les livres de sa profession », et qui reçut une autorisation qui excluait « quelques Religieux49 », et avec José Vieira de Lemos e Sampaio, chanoine, diplômé de Cânones, qui allait à Bahia, en 1795, et dont l’autorisation excluait l’œuvre Juz Ecclesiasticum Protestantium50. Le contrôle de la censure visait parfois certaines éditions de quelques ouvrages, d’où, par exemple, l’ordre donné à Manoel de Araújo, en 1796 : « Déclarez quelles sont les œuvres de Formei, la date et le lieu de leur impression51. » Elle était également attentive à l’omission du nom des auteurs, ruse utilisée par les propriétaires de livres pour faire passer des œuvres interdites pour autorisées grâce à des homonymes. C’est pour cela que la censure demanda à Joaquim José Marques Guimarães, de Lisbonne, de déclarer le nom des auteurs qui figuraient sur la liste des livres qu’il voulait envoyer à José Fez de Matos, à Pernambouc, en 1795, n’autorisant la livraison qu’après la remise des informations52 ; elle fit de même avec Antonio Moreira Lima, dont tout indique qu’il était commerçant, qui, cette année-là, envoyait des livres à Paraíba : elle exigea de lui une « Relation exacte [...] avec individualisation du titre complet de chacun des livres, du nom de ses auteurs, de la date et du lieu d’impression53 ».
29De plus, l’absence d’autorisation pour l’envoi de livres, quand elle était détectée au port de destination, entraînait aussi la rétention. C’est ce qui arriva avec le frère José de Santana, missionnaire apostolique du Séminaire royal de Brancanes qui, bien qu’il eût obtenu l’autorisation d’expédier des livres à Bahia et qu’il les eût embarqués pour cette ville, quand les livres arrivèrent à destination, ils furent retenus, « pour n’avoir pas présenté au Capitaine du Navire [Nossa Senhora da Boa Viagem] ladite autorisation qu’il avait innocemment perdue ». Compte tenu de la situation, le prêtre demanda que les livres soient envoyés à la douane de Salvador, avec l’accord du bureau de censure qui envoya un ordre dans ce sens au juge de la douane de Bahia, en 177554. Domingos de Bastos Vianna, connut la même mésaventure quand il expédia, en juillet 1776, « avec l’Autorisation de Votre Majesté », mais comme « ladite autorisation s’est perdue et, à la douane de Bahia, on se refusait à libérer les livres sans qu’apparaisse l’ordre correspondant », il sollicita de nouveau l’autorisation, et le Bureau Royal donna instruction au juge de la douane de Bahia, le 18 juillet 1777, d’expédier les livres55 ».
30La libération de certaines œuvres listées dans les catalogues devint un motif de controverses entre les autorités gouvernementales, ce qui arriva pour deux expéditions où figurait un ouvrage de Locke : la première pour Bahia, à la demande des Bertrand, et l’autre pour le « Brésil », à la demande du père Francisco José de Gouvea e Albuquerque56. L’autorisation pour que la Viúva Bertrand exporte ce livre vers Bahia fut refusée le 16 novembre 1795, mais le père Francisco José de Gouvea Sá e Albuquerque, obtint un avis favorable le 23 juillet 1796. Le Secrétariat de la Cour suspendit la décision le 6 août 1796, en s’opposant à celle prise dans le cas de la Viúva Bertrand. À cette occasion, le Secrétariat de la Cour, bien qu’il recommandât la suppression de l’œuvre, demanda à Sa Majesté de trancher cette affaire. Dans sa justification pour l’interdiction de l’expédition du livre de Locke, le Secrétariat de la Cour argumenta que « sa Lecture » ne causerait pas « moins de dommages à la Cour que dans les Domaines d’Outremer57 » – c’est-à-dire que si ledit livre n’entrait pas à la Cour, pourquoi cela serait-il permis au Brésil ? –, pointant une incohérence dans l’action de la censure.
31La compilation des catalogues de livres remis aux tribunaux de censure pour l’obtention d’autorisations avec les manuscrits des dispositions émises par ces organes permet de constater des coïncidences et, en même temps, quelques disparités qui montrent que ce premier corpus documentaire, au centre des analyses faites dans ce chapitre, présente des lacunes, mais moins que ce que l’on pouvait attendre, entre 1769 et 1795 : sur 7 dispositions repérées sur la circulation de livres Amérique-Portugal ou Portugal-Amérique, 3 concernent desexpéditions pour lesquelles il y a des demandes et des catalogues, alors que pour 4 d’entre elles il n’est pas possible de le faire. Parmi ces quatre dispositions, trois ordonnaient la livraison de livres retenus : à la douane de Bahia, en 1776, de Antônio Ferreira Andrade et, en 1781, de João Amado da Costa (par manque d’autorisation) ; et, à Lisbonne, de l’archevêque de Bahia, en 178058. Une quatrième disposition, adressée à tous les ministres, officiers de Justice et des Finances, leur ordonnait de laisser transiter quelques livres que Bernardo Miguel de Souza avait expédiés de Porto à Goiás, en février 177759. Pour trois de ces quatre dispositions, il faut observer une chose, bien visible sur l’une d’elles et entre les lignes pour deux autres : le manque d’autorisation provoqua la rétention des livres à Salvador et à Lisbonne. Si l’autorisation n’avait pas été donnée, c’est que ni la demande, ni le catalogue n’avaient été présentés et que l’absence de tout cela avait exigé l’intervention du tribunal de la censure de Lisbonne qui adressa des ordres à la Cour elle-même et à Bahia. Ces quatre dispositions montrent donc un certain zèle de la censure à faire remplir aux propriétaires les obligations légales relatives à la circulation des livres ; elles suggèrent aussi que la documentation sur laquelle se base cet article est moins lacunaire que ce que l’on pourrait supposer, bien qu’elle ne concerne que la circulation légale de livres.
32Dans les rétentions est mise en évidence la recherche de la préservation des « fondements du Trône » et, par conséquent, de l’unité de la nation portugaise. Si la Couronne et la censure royale, dans une orientation régalienne, avaient pour cible les jésuites, les douanes, en confisquant les œuvres de Cláudio Lacroix et de Francisco Soares Lusitano, réaffirmaient cette orientation dans la mesure où celles-ci furent supprimées par la Sentence du 24 juillet 1769 qui condamnait les adeptes de la secte du sigillisme, appelés jacobéens ou beatos, pour permettre l’assouplissement du secret sacramentel, considérant les ignatiens comme des personnages atteints indirectement. La confiscation des livres de Carlos Antônio Casnedi, Crise theologica, et de Gregório de Almeida, Restauração de Portugal prodigiosa, confirmait aussi l’orientation royale : la cible ici, proche, bien que partiellement, des jésuites, était les idées qui menaient à la « prévarication contre leurs Rois, et contre leur patrie », soutenues par les théories corporatives du pouvoir de la Deuxième Scolastique60.
33Quant aux Leçons de droit de la nature et des gens, de Fortuné Barthélemy de Felice – Italien qui s’impliqua dans la publication d’une Encyclopédie, l’Encyclopédie d’Yverdon, corrigeant les « absurdités », les « lacunes » et les « erreurs » de l’Encyclopédie de Diderot et qui connut un bon accueil dans les milieux puritains de Hollande et d’Allemagne, en plus de recevoir des éloges de Voltaire61 –, et aux œuvres de John Locke et Mably, toutes retenues, elles virent les organes de censure en action, fidèles à l’instruction de combattre les présumés ennemis du Trône, en raison du radicalisme supposé de leur pensée. Enfin, Mystica cidade de Deus, de Maria d’Agreda et Arte de furtar, souvent attribué au père Antônio Vieira, correspondraient, respectivement, au front d’attaque contre le fanatisme et, peut-être, les théories corporatives du pouvoir. En ce qui concerne le dernier titre, il convient de dire que les censeurs ont extrapolé, car aucune interdiction ne retombait sur lui.
Imprimés de faible valeur mais de grande circulation dans les expéditions
34Parmi les imprimés et les livres mentionnés dans les registres de circulation de livres, certains se distinguent par la fréquence des expéditions et par le volume bizarre de leur nombre dans ces envois, ce qui s’explique par leur faible valeur économique : moins chers, leur circulation était facilitée et énorme.
35Dans la circulation entre l’Amérique et le Portugal, entre 1769 et 1821, la première place était tenue par le Regimto. de mil, e oito centos, e dezaceis, pa. os Boticarios do Reyno de Portugal e Algarves, dont 800 exemplaires furent envoyés de Rio de Janeiro à Lisbonne, à la demande de l’apothicaire de Sa Majesté, en 1817. Sur les registres des expéditions faites du Portugal vers l’Amérique se détachaient, dans l’ensemble, ce qu’on appelait Livros de Santa Bárbara : entre 1795 et 1799, on en envoya à Rio de Janeiro plus de cent mille exemplaires ; pour Bahia, le « Brésil » et pour le Maranhão, les chiffres atteignirent aussi les environs du millier, sans qu’il soit possible, au stade actuel de la recherche, de préciser la quantité exacte62. En se basant sur la première page, il est possible de déduire le contenu du Livro de Santa Bárbara : prières qui servent à protéger le fidèle (et lecteur ou propriétaire du livre) « Contre la Foudre, les Tremblements de Terre, la Peste et les Maléfices », ce qui correspond, de fait, à son contenu, dans la mesure où il propose des prières pour différents saints et occasions, répondant aux buts cités63.
Reproduction, en taille réelle, de la première page du Livro de Santa Bárbara (Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisse 18).
36
37La couverture indique que, au moins l’édition examinée, date de 1766 (onze ans après le tremblement de terre qui dévasta Lisbonne), qu’elle fut réalisée avec les autorisations de la censure et, de plus, dans l’atelier de Miguel Menescal da Costa, imprimeur du Saint Office : tout cela justifie pour ce livre l’autorisation de la censure et l’approbation de l’Inquisition. À propos de la prière de Santa Bárbara, plus spécialement, le livre informe : « Cette prière [...] a une vertu spéciale contre le tonnerre, la foudre, la peste et l’air pollué. Il arriva qu’une personne qui ne portait pas cette Prière, soit tuée par la foudre qui n’a fait aucun mal à plus de vingt personnes qui la portaient avec eux, au même endroit64. » Sur Santo Anastácio, le livre dit « Avocat contre les démons et les maladies en tous genres » ; au-dessous de l’image de Santo Antônio, on trouve le texte suivant : « Remède efficace contre les esprits malins, composé et donné par Santo Antônio65. » Le livre en toile détenait donc des pouvoirs magiques (c’était une sorte de livre – amulette) transmis à ceux qui le possédaient ou qui faisaient les prières qu’il contenait, protégeant le fidèle/lecteur contre les maux naturels (certains d’entre eux à l’ordre du jour, que ce soit à cause de la catastrophe qui s’est abattue sur la Cour, ou des conditions climatiques en Amérique) et démoniaques, tout cela étant, j’insiste, autorisé par la censure, béni par l’Inquisition et, en outre, comme tout l’indique, très bien accueilli par le public. Il s’agit d’un emblème du Réformisme Éclairé portugais dans toutes ses contradictions : dans le Livro de Santa Bárbara, on trouve la limite du combat royal contre le fanatisme et l’expression de sa défense du catholicisme. Comment le public lecteur a-t-il pu faire face à ces contradictions ? Seule une analyse minutieuse – impossible dans les limites de ce chapitre – pourrait répondre. Je peux avancer, toutefois que les interprétations furent variées et également contradictoires.
Conclusion
38Les organes de censure portugais, dans le Royaume et en Amérique, essayèrent de contrôler la circulation des livres en dépendant beaucoup, dans leur action, de la bonne volonté des lecteurs à présenter des catalogues et à se plier à la bureaucratie des inspections et aux examens des douanes. La documentation produite par les organes de censure, si elle est extrêmement lacunaire par rapport à l’ensemble de la circulation de livres qui se faisait en grande partie, on peut le supposer, en contrebande, d’un côté, présente des indices montrant qu’elle est une source relativement sûre pour l’étude du flux légal de livres et, d’un autre côté, par les rares cas d’enregistrement de saisies de livres transitant illégalement, elle révèle l’inefficacité de la censure dans la répression des infractions.
39Sur le plan géographique, la circulation légale des livres indique la prééminence de Rio de Janeiro et de Bahia comme ports d’origine et de destination des livres, à l’identique, de l’autre côté de l’Atlantique, de Lisbonne et de Porto (encore que les mentions de cette ville soient rares dans la documentation relative au flux Royaume-Amérique, entre 1769 et 1800). Cette géographie de la circulation s’accordait avec l’importance économique et politique des villes concernées. Sur un plan temporel, on note une rigueur plus grande des organes de censure dans les années 1796 à 1799, pendant lesquelles on observe la plus forte présence de rétentions d’œuvres interdites, surtout dans le flux Royaume-Amérique, ce qui n’est pas le cas dans le sens inverse, où les extrêmes, 1769 et le xixe siècle, concentrent les situations de confiscation de livres. Il y a donc des indices qui montrent que la répression fut plus active, premièrement, juste après l’installation de la Real Mesa Censória et, ensuite avec le retour de la censure triple, dirigée par le Desembargo do Paço, déjà sous la regência joanina66.
40En faisant de Nation, État et Trône trois synonymes, les organes de censure, par leur fonctionnement dans le domaine de la circulation, démontrèrent enfin qu’ils suivaient l’orientation gouvernementale – et fixée dans leurs propres règles – de défendre la monarchie et le catholicisme, même dans ce qu’ils contenaient de plus contraire à la Raison, et de combattre leurs adversaires comme leurs ennemis. Conformément aux lignes directrices du Réformisme Éclairé, les organes de censure agirent dans le sens du maintien de l’unité de la nation portugaise, basée sur la soumission à un roi et sur la profession d’une unique foi, la religion catholique, apostolique et romaine.
Notes de bas de page
1 Sur la conception de la nation au Portugal et ses liens avec l’idée d’État et de monarchie, voir Jancsó I. et Pimenta J. P. G., « Peças de Um mosaico ou Apontamentos para o estudo da emergência da identidade nacional brasileira », C. G. Mota (dir.), Viagem incompleta, 1500-2000 : a Experiência Brasileira. Formação : Histórias, São Paulo, Editora Senac, 2000, p. 127-175.
2 Sur la censure au Portugal et au Brésil, voir Marques M. A. S., A Real Mesa Censória e a cultura nacional, Coimbra, Editora da Universidade de Coimbra, s. d. ; Rizzini C., O livro, o jornal e a tipografia no Brasil, 1500-1822 : com um breve estudo geral sobre a informação, São Paulo, Imprensa Oficial do Estado, 1988 ; Neves L. M. B. P., « Comércio de livros e censura de idéias no Brasil ». Ler História, Lisboa, n° 23, p. 61-78, 1992 ; Villalta L. C. « Censura literária e inventividade dos leitores no Brasil colonial », M. L. T. Carneiro (dir.), Minorias silenciadas : história da censura no Brasil, São Paulo, EDUSP, 2002, p. 45-89.
3 Tribunal suprême de justice du Portugal entre le xvie et le début du xixe siècle. (N.D.T.).
4 Tribunal créé par le marquis de Pombal dans le but de confier directement à l’État le contrôle de la censure, rôle jusqu’alors dévolu à l’Église (N.D.T.).
5 Moraes R. B., Livros e bibliotecas no brasil colonial, São Paulo, Secretaria da Cultura, Ciência e Tecnologia do Estado de São Paulo, 1979, p. 54-55.
6 Beirão C., Dona Maria I, 1777-1792 : subsídios para a revisão da história do seu reinado, 4e ed., Lisboa, Empresa Nacional de Publicidade, 1944 ; Castro Z. O., « Poder régio e os direitos da sociedade : o “absolutismo de compromisso” do reinado de D. Maria I », Ler História, Lisboa, n° 23, p. 11-15, 1992 ; Falcon F. J. C., A época pombalina : política econômica e monarquia ilustrada, São Paulo, Ática, 1982, p. 428-429.
7 Biblioteca do Palácio dos Bispos de Mariana. Carta de Lei de 17 de dezembro de 1794, in Colleção de Leis, 1792-1999, p. 89.
8 Neves L. M. B. P. et Bessone T., « O medo dos “abomináveis princípios franceses” : a censura dos livros nos inícios do século XIX no Brasil », Acervo, Rio de Janeiro, vol. 4, no 1, janvier-juin 1989, p. 113-119.
9 Cette rhétorique apparaît dans des avis des tribunaux de censure comme Instituto dos Arquivos Nacionais da Torre do Tombo (dorénavant : IANTT), Real Mesa Censória, Edital de 24 de setembro de 1770, Caixa 1, p. 1-2.
10 Forme d’administration territoriale de l’Empire colonial portugais, en vigueur jusqu’au xviiie siècle (N.D.T.)
11 Moraes R. B., op. cit., p. 59.
12 Iantt, Real Mesa Censória, Caixa 1, Ordre du 10 juin 1768.
13 Iantt, Real Mesa Censória, Registro de licenças, provisões, avisos, ordens e editais expedidos pela Mesa, Livro 18 (1775-1794), p. 396.
14 Iantt, Intendência Geral de Polícia, Livro 5, p. 241.
15 Rugers C., apud Guedes F., O livro e a leitura em Portugal : subsídios para a sua história (séculos XVIII e XIX), Lisboa, Verbo, 1987, p. 79.
16 Apud Higgs D., « Linguagem perigosa e a defesa da religião no Brasil da segunda metade do século XVIII », M. B. N. Silva (dir.), Cultura portuguesa na Terra de Santa Cruz, Lisboa, Editorial Estampa, 1995, p. 166.
17 Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, Caixa 149.
18 Mouvements de résistance des brésiliens contre la tutelle du Portugal (N.D.T.).
19 Sur les libraires au Portugal, spécialement les Borel et les Martin, voir Guedes F., op. cit., p. 37, 83, 103-104, 112-113, passim. Sur la présence de ceux-ci dans le commerce avec le Brésil, voir Neves L. M. B. P., Corcundas e constitucionais : a cultura política da Independência (1820-1822), Rio de Janeiro, Revan/Faperj, 2003, p. 34-36.
20 C’est le 14e marchand ; il n’est pas possible de déterminer s’il ne vendait que des livres.
21 Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisse 149.
22 Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisse 149.
23 « CATALOGO dos livros defesos neste Reino, desde o dia da Criação da Real Mesa Cençoria athé ao prezente », M. A. S. Marques, A Real Mesa Censória e a cultura nacional, Coimbra, Universidade de Coimbra, s. d.
24 Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisse 149.
25 Ibid.
26 Iantt, Real Mesa Censória, caisse 149.
27 Ibid.
28 Ibid. Le 10 février 1814, à Rio de Janeiro, le marquis de Aguiar, s’adressant à Paulo Fernandes Vianna, intendant général de Police, ordonna l’incarcération du père Leonardo Correa da Silva qui semble être le même personnage que celui qui s’était frotté à la censure portugaise en 1807, alors résident à Rio de Janeiro et venant du Maranhão, au couvent de São Bento. Le père devait rester au secret pour avoir envoyé des requêtes « exagérées et pleines d’invectives » au prince régent, motif pour lequel il sera réprimandé par l’intendant général de Police (Arquivo Nacional, Registro de Avisos e Ofícios – notações dos livros da Corte, Livro 6, n° 8, IJJ1 171, p. 169V).
29 Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisses 151, 153, 157, 159, 160, 161 et 163. Les données relatives à Pernambouc, non encore dactylographiées, n’ont pas été analysées. Márcia Abreu, à l’examen de la même documentation, mais sur une période plus large (1769-1826), obtint les chiffres suivants : Rio, 700 demandes ; Bahia, 700 ; Maranhão, 350 ; Pará, 200 et Pernambouc, 700 (Abreu M., Os caminhos dos livros, Campinas/São Paulo, Mercado de Letras/ALB/Fapesp, 2003, p. 27).
30 Montagnes du Minas Gerais (N.D.T.).
31 Villalta L. C., A Torpeza Diversificada dos Vícios : celibato, concubinato e casamento no mundo dos letrados de Minas Gerais (1748-1801), Mémoire (Maîtrise) FFLCHUSP, São Paulo, 1993, p. 73-74 et 103 et Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisse 153.
32 Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisses 151, 153, 157, 159, 160,161 et 163.
33 De Bahia (N.D.T.).
34 Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisse 157.
35 Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisse 153 et Filgueiras C. A. L., « João Manso Pereira, químico empírico do Brasil colonial », Química Nova, São Paulo, vol. 16, n° 2, 1993, p. 155-160.
36 «P. Portaria na Fra. do est. [c.-à-d., dans la forme du style] » (Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisse 149).
37 Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisse 149.
38 Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisse 149.
39 Ibid.
40 Ibid.
41 Neves L. M. B. P., « Censura », M. B. N. Silva (dir.), História da colonização portuguesa no Brasil, Lisboa, Verbo, 1994, p. 159.
42 « [Les livres] peuvent être expédiés ; c’est mon vœu. Votre honneur ordonnera ce qui sera appliqué. »
43 Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisse 149.
44 Iantt, Real Mesa Censória Real Mesa da Comissão Geral, caisse 163.
45 Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisse 151.
46 Ibid.
47 Iantt, Real Mesa Censória Real Mesa da Comissão Geral, caisse 153.
48 Ibid.
49 Ibid.
50 Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisse 157.
51 Iantt, Real Mesa Censória Real Mesa da Comissão Geral, caisse 153.
52 Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisse 161.
53 Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisse 163.
54 Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisse 157 ; et Registro de licenças, provisões, avisos, ordens e editais expedidos pela Mesa, Livro 18 (1775-1794), p. 7.
55 Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisse 157 ; et Registro de licenças, provisões, avisos, ordens e editais expedidos pela Mesa, Livro 18 (1775-1794), p. 96.
56 Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisses 151 et 157.
57 Ibid.
58 De Antônio, a Oração acadêmica do padre Maciel ; pour les autres, il n’y a pas le détail des livres ; cf. Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, Registro de licenças, provisões, avisos, ordens e editais expedidos pela Mesa, Livro 18 (1775-1794), p. 43, 18, 215 et 198.
59 Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, Registro de licenças, provisões, avisos, ordens e editais expedidos pela Mesa, Livro 18 (1775-1794), p. 82.
60 Le livre de Casnedi était proscrit par l’édit du 12 décembre 1771, tandis que le livre de Gregório de Almeida fut supprimé par l’édit du 10 juillet 1768. Voir Catalogo dos livros defesos neste Reino, desde o dia da Criação da Real Mesa Cençoria athé ao prezente, op. cit.
61 Darnton R., L’aventure de l’Encyclopédie : 1775-1800, Paris, Librairie Académique Perrin, 1982, p. 44-46.
62 Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisses 153, 157 et 159. À l’examen de 911 inventaires post-mortem faits à Mariana, entre 1714 et 1822, j’ai constaté que les Livros de Santa Bárbara étaient présents en 34 exemplaires, tous entre les mains d’une seule personne, une commerçante, et occupant la première place en termes numériques, parmi les titres inventoriés. Livre de poche, il se caractérisait par une faible valeur économique, peu de durabilité et, comme tout l’indique, un usage intense chez les lecteurs.
63 Livro de Santa Bárbara, Lisboa, Miguel Menescal da Costa, 1766 (Iantt, Real Mesa Censória/Real Mesa da Comissão Geral, caisse 18, Demande de réimpression faite par José Caetano da Costa, le 24 février 1768 – annexe).
64 Ibid., s. p.
65 Ibid., s. p.
66 Période de la régence du prince Dom João (1808-1822) après l’exil de la famille royale portugaise au Brésil suite aux guerres napoléoniennes (N.D.T.).
Auteur
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Les Premiers Irlandais du Nouveau Monde
Une migration atlantique (1618-1705)
Élodie Peyrol-Kleiber
2016
Régimes nationaux d’altérité
États-nations et altérités autochtones en Amérique latine, 1810-1950
Paula López Caballero et Christophe Giudicelli (dir.)
2016
Des luttes indiennes au rêve américain
Migrations de jeunes zapatistes aux États-Unis
Alejandra Aquino Moreschi Joani Hocquenghem (trad.)
2014
Les États-Unis et Cuba au XIXe siècle
Esclavage, abolition et rivalités internationales
Rahma Jerad
2014
Entre jouissance et tabous
Les représentations des relations amoureuses et des sexualités dans les Amériques
Mariannick Guennec (dir.)
2015
Le 11 septembre chilien
Le coup d’État à l'épreuve du temps, 1973-2013
Jimena Paz Obregón Iturra et Jorge R. Muñoz (dir.)
2016
Des Indiens rebelles face à leurs juges
Espagnols et Araucans-Mapuches dans le Chili colonial, fin XVIIe siècle
Jimena Paz Obregón Iturra
2015
Capitales rêvées, capitales abandonnées
Considérations sur la mobilité des capitales dans les Amériques (XVIIe-XXe siècle)
Laurent Vidal (dir.)
2014
L’imprimé dans la construction de la vie politique
Brésil, Europe et Amériques (XVIIIe-XXe siècle)
Eleina de Freitas Dutra et Jean-Yves Mollier (dir.)
2016