De l’écrit imprimé aux imprimés de bibliothèque : une analyse du parcours de lecture de Francisco José de Oliveira Vianna
p. 59-77
Texte intégral
Ce texte correspond à une version condensée du chapitre trois de ma thèse de doctorat intitulée Na trama do arquivo : a trajetória de Oliveira Vianna (1883-1951), soutenue à l’Universidade Federal do Rio de Janeiro, sous la direction de la professeure Andrea Daher.
1Voici une table de travail, une vieille machine à écrire, des stylos à encre et le fameux crayon à deux mines, l’une rouge, l’autre bleue, avec laquelle Oliveira Vianna tenait à écrire ses notes de lecture sur les espaces en blanc des livres de sa collection. À côté de la table de travail, on aperçoit une petite étagère à quatre côtés, tournante, où se trouvent quelques-uns de ses instruments de travail, tels que dictionnaires et ouvrages de référence1. Dans un coin, on devine un meuble spécialement fabriqué pour ranger ses « perroquets » : notes, résumés personnels d’étude, notes bibliographiques, citations, qui constituent les premiers moments de la production des textes qu’il publiera ultérieurement.
2Les « perroquets » matérialisaient son expérience personnelle de la lecture et de l’écriture. Ils constituent la « matière première » que Vianna utilisait pour écrire ses livres, ses essais et ses travaux académiques. Le papier utilisé variait en taille et en qualité. Ce pouvait être un petit bout de papier d’emballage, le verso d’imprimés divers, des feuilles de bloc de papier journal, des feuilles de papier à lettre coupées en deux, à l’horizontale ou à la verticale, ou encore des morceaux de papier à en-tête des organismes où il travaillait. Vianna écrivait compulsivement et sur cette paperasse notait ses parcours de lecture dans un va-et-vient continu entre les étagères de sa bibliothèque. Pourquoi Vianna appelait-il ces petits papiers des « perroquets », c’est une question qui intrigue. Peut-être parce qu’ils répétaient, comme le fameux oiseau aux plumes vertes, tout ce qu’il lisait. Le vrai motif défie notre curiosité. Le dictionnaire Aurélio donne du mot « papagaio2 » 22 significations différentes dont quelques-unes se rapportent directement à l’acte d’écrire. Papagaio peut signifier un petit morceau de papier joint aux livres remis au relieur contenant quelques instructions sur la façon d’exécuter le travail, ou encore un morceau de papier que l’on fixe au bas d’une feuille pour continuer à y écrire.
3Il se peut que ce dernier sens soit à l’origine des « perroquets » d’Oliveira Vianna. Sur ces petits papiers il prenait note d’idées, de lui ou d’autres, souvent des passages de dialogues avec des amis – et même des conversations téléphoniques – quelques opinions de « matutos da Baixada3 », gardées avec le même soin que les notes sur les concepts des plus grands intellectuels européens et américains. Parfois, de petits billets pour lui-même comme on le voit sur l’un de ses « perroquets » : « Lire le livre de Marcel Prenant – Biologie et marxisme – de ma bibliothèque. Il y a une étude très récente sur les grands problèmes de biologie humaine. »
4Pratique répandue chez les lettrés4, le rangement de ces phrases, citations et annotations, prit, dans la bibliothèque de Vianna, une allure raffinée. Pour ranger tout spécialement ses « perroquets », Vianna fit fabriquer ce qu’il appela un « fichier d’idées », une armoire composée de six tiroirs divisées en six parties rectangulaires. Dans chacune d’elles, il rangeait des annotations sur un sujet particulier. Cet ordonnancement sans aucun doute, révèle quelque chose de ses habitudes de lecture et de sa pratique de l’écriture.
5Au-delà des objets décrits, le cabinet de travail de Vianna abrite également – et essentiellement – sa collection de livres. Cet espace est plus qu’un « édifice avec des étagères » où sont posés divers objets, il montre « une collection et son projet5 ». L’acte de collectionner des livres traduit peut-être le rêve d’accumuler la plus grande quantité possible de savoir, matérialisé par des pages écrites, organisées, cataloguées et accessibles en fonction de ses besoins de connaître.
6Sur l’étagère de l’un de ses rayonnages, on remarque la présence d’un buste en céramique d’Eça de Queiroz, indiqué par ses amis, ses collaborateurs et les employés des archives comme l’auteur préféré de Vianna. Sa collection de livres comprenait 15 volumes et 14 titres distincts de cet auteur6.
7Sa passion pour Eça de Queiroz était l’un des traits d’identification d’Oliveira Vianna avec les autres intellectuels de son temps. Selon Monteiro Lobato, depuis au moins la publication de Os Maias, en 1888, l’intelligentsia brésilienne semblait être atteinte d’une sorte de aecite7 : une fièvre ou une passion intense pour Eça de Queiroz. Cet enchantement pour son œuvre traversa, sans faiblir, au moins les deux premières décennies du xxe siècle, mais semble être apparue avant les années 80 du xixe siècle. Selon Paulo Franchetti, ceci découle d’un large ensemble de motifs :
« D’une part, le romancier n’était pas seulement, pour le public, l’auteur de quelques chefs-d’œuvre. C’était une présence beaucoup plus proche : un journaliste qui écrivait régulièrement dans les périodiques brésiliens, donnant son avis sur les sujets les plus divers. En effet, dans la seule Gazeta de Notícias, Eça écrivit pendant 16 ans d’affilée à partir de 1880. De plus, il avait été l’un des jeunes rebelles qui, aux côtés d’Antero de Quental et Teófilo Braga, s’étaient impliqués dans la dénonciation du retard politique, moral et scientifique des nations ibériques : c’était l’un des représentants de la déjà mythique génération de 70, iconoclaste et moderniste. C’était également l’auteur des Farpas (1871-72), où non seulement il faisait la satire de la société portugaise de son temps, mais où il ironisait aussi cruellement sur l’empereur du Brésil, D. Pedro II, au moment même où le républicanisme commençait à se fortifier dans le pays. Pour toutes ces raisons, dans un environnement imbibé de propagande républicaine dans les dernières années de l’Empire et de propagande anti-lusitanienne dans les premières années de la République, Eça pouvait être vu comme un allié progressiste : l’équivalent, pour la vie portugaise contemporaine, de ce qu’était son ami Oliveira Marins pour le passé de cette même société8. »
8La bibliothèque personnelle de Vianna reflète ses préférences de lecture, son parcours professionnel et intellectuel et ses pratiques d’écriture. Les livres laissés en héritage permettent eux-mêmes d’induire les intentions qui l’amenèrent à les rassembler, étant donné que Vianna n’a pas laissé de témoignages explicites sur la composition de sa collection. Il est certain que la création d’un espace de lecture à l’intérieur de la maison n’était pas seulement une caractéristique particulière, mais surtout un signe d’appartenance aux hommes de lettres de son temps, car « d’une façon générale, à la fin du siècle, les lettres représentaient des biens symboliques importants9 ». Collectionner des livres était une étape importante dans la formation d’un intellectuel. Posséder un cabinet de lecture, des étagères couvertes de livres, un grand nombre de raretés ou de livres respectant les canons littéraires nationaux ou étrangers symbolisait aux yeux de ses pairs son importance intellectuelle.
9Compte tenu du fait que la taille des bibliothèques était fréquemment associée au raffinement intellectuel de leurs propriétaires, posséder une grande quantité de livres signifiait être vu et respecté comme un intellectuel érudit10, celles-ci restant, bien entendu, une marque de leurs activités intellectuelles.
10Márcia Delgado, dans son étude sur les librairies et les livres dans le Minas Gerais, s’interroge sur les motifs pour lesquels se créent des bibliothèques privées. Selon elle, ces raisons « sont d’ordre arbitraire et varié, allant de l’amour de certains types de livres ou de sujets à l’intérêt marchand du livre comme base d’investissement11 ». La bibliothèque d’Oliveira Vianna obéit certainement, à son origine, à quelques-uns de ces éléments incitateurs. Peut-être l’objectif fut-il de faire étalage d’érudition ou, qui sait, cette collection n’est-elle que la trace résiduelle de ses activités professionnelles ou académiques. Comment le découvrir ? Les bibliothèques personnelles, comme tout autre objet d’analyse, présentent des aspects qui demeurent mystérieux aux yeux des chercheur. Il est toutefois possible d’affirmer que cette bibliothèque reflète une facette importante du travail intellectuel de Vianna, nous permettant ainsi d’identifier les aspects singuliers de son parcours de lecture et d’écriture.
De la bibliothèque de la fazenda do Rio Secoà la bibliothèque de la maison de l’alameda São Boaventura
11Oliveria Vianna commença très tôt à constituer sa bibliothèque. Nous pouvons supposer qu’une bonne partie vint de la vieille bibliothèque qui existait dans la maison de la fazenda de Rio Seco, une propriété d’environ 155 alqueires12, située à Saquarema où Vianna passa son enfance. La bibliothèque de la fazenda, constituée par le colonel Francisco José lors de ses passages dans les librairies de Rio de Janeiro, était régulièrement visitée par le petit Francisco :
« À l’heure des jeux enfantins, il courait à la bibliothèque de son père, scrutant tout et lisant avec avidité tout ce qui lui tombait sous la main. Il lit ainsi, Gil Braz de Santilhana13, O Diabo côxo, un livre de médecine et les exemplaires de la Revista da Semana, collectionnés entre 1884 et 188514. »
12Le fait d’être né dans une famille de lettrés – sa mère l’avait initié à la lecture – contribua certainement à ce que Vianna atteignît le statut de « grand lecteur ». Lorsqu’il eut 13 ans et alla vivre à Niterói, ce fut dans la maison de l’Alameda São Boaventura, au 41, dans le quartier de Fonseca, que la famille Vianna s’installa. Comme membre d’une famille de propriétaires terriens en situation de déclin économique – lié aux difficultés de la caféiculture fluminense de la fin du xixe siècle – Vianna s’orienta vers un itinéraire professoral à l’université qui allait lui donner une nouvelle chance d’insertion sociale. Face à une situation de déséquilibre compte tenu de conditions économiques défavorables, l’investissement dans l’éducation et le choix d’un cours supérieur qui lui permettrait d’occuper un haut rang dans la société pourraient empêcher un plus grand déclassement social de la famille15.
13Le changement plongea l’enfant, élevé dans le calme de la fazenda, dans le rythme effervescent de la ville de Nirerói qui, à cette époque, subissait de profondes transformations urbaines, en particulier l’installation d’un système de trolleybus électriques. Les dizaines de lignes de trolleybus couvrirent pratiquement toute la ville et sa périphérie ; la ligne qui longeait la rivière Vicenza définira par la suite le tracé de l’Alameda São Boaventura où s’installera la famille Vianna.
14Ce fut au 41 de l’Alameda São Boaventura, dans le quartier de Fonseca à Niterói, qu’Oliveira Vianna vécut désormais avec sa famille. Quelques années plus tard, en 1911, il entreprit la transformation de la maison en y incluant une pièce spécialement dédiée à la lecture, de sorte que sa bibliothèque acquit un espace physique définitif. Mais la constitution de sa collection se prolongea, comme on peut le supposer, tout au long de sa vie. La bibliothèque de Vianna peut être considérée de grande envergure16. Aujourd’hui, son catalogue contient 12 000 exemplaires, répartis entre livres, brochures et périodiques. Ce fonds peut être divisé en deux parties distinctes : la première, composée de 4 161 livres17, fut pratiquement organisée dans sa totalité par Vianna lui-même ; seuls un ou deux exemplaires y furent inclus après sa mort. La seconde, composée de périodiques, reçut systématiquement plusieurs titres et exemplaires nouveaux après sa mort.
15La bibliothèque de Vianna était plus un cabinet de travail que la collection d’un bibliophile. À l’instar de la bibliothèque de Jacques-Auguste de Thou, décrite par Gabriel Naudé et analysée par Jacques Revel, la préférence était donnée « avant tout à la qualité des éditions et à l’importance des œuvres selon les critères des érudits plutôt qu’aux œuvres rares ou précieuses ». Vianna cherchait en premier lieu à « réunir le savoir critique élaboré au fil du temps et les commentaires des grandes œuvres » (2000, p. 222). Pour cette raison, il donnait la priorité à la production contemporaine au détriment des œuvres anciennes et des raretés.
16Le parcours professionnel de Vianna fut, sans aucun doute, un critère déterminant du contenu de sa bibliothèque. L’observation de sa collection permet de constater que la plus grande partie des titres qui la composent se rapportent aux sciences sociales.18
Classification des titres de la Bibliothèque d’Oliveira Vianna.
Type de livre |
Titres |
Pourcentage |
Sciences sociales Livres juridiques et administratifs Biographies, mémoires et autobiographies Littérature brésilienne Littérature étrangère Histoire du Brésil et Littérature de voyageurs Histoire générale Religion Autres TOTAL |
1 385 0821 0184 0171 0128 0451 0310 0039 0460 3 949 |
35 % 21 % 004,5 % 004,3 % 003,2 % 0011,4 % 08 % 01 % 0011,6 % 100 % |
17Une analyse plus minutieuse des titres et de la thématique des livres qui composent la collection de Vianna permet de distinguer cinq grandes lignes de classification. La première concerne les études de sciences sociales, la deuxième se compose de livres sur la réalité brésilienne19 ; en troisième lieu sont réunis des textes concernant la législation administrative, le droit du travail et les études juridiques ; un quatrième groupe est formé par la littérature brésilienne et étrangère et, enfin, les livres de religion20. Les études d’anthropologie, de sociologie, de géographie, d’éducation, d’économie, de philosophie et de psychologie intéressaient Oliveira Vianna en premier lieu car il cherchait à comprendre, à travers ses lectures, et à expliquer, à travers ses écrits, les principes d’organisation de la société, de la culture et de la politique nationales. En ce sens, aux livres de sciences sociales doivent être encore ajoutés les livres concernant l’histoire du Brésil et les récits des voyageurs.
18Parmi les auteurs de sciences sociales et humaines présents dans la bibliothèque de Vianna, citons Le Play, Demolins, Georges Gurvitch, Harold Laski, Gustave Le Bon, Vacher de Lapouge, Vidal de la Blache, Émile Durkheim, Georges d’Avenel, Roger Bastide et Franz Boas. S’agissant de précurseurs et de fondateurs de la sociologie en France, en Allemagne, aux États-Unis, en Grande-Bretagne et en Italie, nous constatons que la bibliothèque de Vianna était bien actualisée par rapport à ce qui se publiait en matière de sciences sociales dans ces pays. En ce qui concerne le courant français, qui apparut dans la seconde moitié du xixe siècle, Vianna possédait 3 volumes de Comte, 1 de Tocqueville, 5 de Tarde, 1 de Worms, 4 de Le Bon, 3 de Durkeim, 1 de Halbwachs et 2 de Bouglé. Le courant français de sociologie fondé par Auguste Comte à la fin des années 30 du xixe siècle reçut une grande impulsion grâce à l’action de Gabriel Tarde, René Worms et Émile Durkheim qui acquirent une hégémonie intellectuelle sur cette discipline.
19Dès le début, Gabriel Tarde acquit une renommée internationale et deux de ses livres, L’opinion et la foule et Les lois de l’imitation, furent de véritables succès de librairie. René Worms, pratiquement inconnu aujourd’hui, était à la fin du xixe siècle une grande figure de la sociologie française. Auteur du livre Organisme et société, Worms créa également la Revue Internationale de Sociologie et fonda l’Institut international de sociologie. Mais ce fut le dernier des trois, Émile Durkeim, qui réussit le mieux à réunir une équipe d’intellectuels autour de son projet. En 1896, il créa la revue L’année sociologique, à laquelle participèrent Marcel Mauss, Maurice Halbwachs, Célestin Bouglé, François Simmiand et Paul Fauconnet entre autres. Le groupe réuni autour de ce périodique fut, pendant près de 20 ans, le plus important de la sociologie française
20La bibliothèque de Vianna possédait, outre les livres des auteurs déjà cités, une collection de la revue L’année sociologique, composée des numéros 1 à 12 correspondant aux années 1896 à 1924, qui montre son suivi de l’actualité par rapport à ce qui se produisait dans les milieux intellectuels français et plus spécifiquement dans le domaine des études sociologiques. En ce qui concerne encore la sociologie française, il est important de relever l’« école de Le Play », l’un des précurseurs de la pensée sociologique française. Le Play fut l’un des premiers à tenter d’élaborer une méthode d’observation directe de la réalité sociale, en développant une approche ethnographique et comparatiste. Parmi les membres de cette école, Descamps, Demolins, Rousiers et Tourville se plaçaient parmi les pionniers de la recherche sociale et l’ensemble de leur production constituait l’une des plus grandes collections de la bibliothèque de Vianna qui considérait les monographies des disciples de Le Play comme « lumineuses et belles21 ». De Descamps, Vianna possédait 3 titres, 6 de Demolins, 6 de Roussiers et 1 de Tourville. Frédéric Le Play et ses adeptes, bien que pionniers de la sociologie empirique, furent rapidement exclus du domaine sociologique du fait de leur conservatisme catholique22.
21En ce qui concerne l’école allemande de sociologie, Vianna se révélait également bon connaisseur de la production la plus actuelle de l’époque ; il avait acquis 1 titre de Marx, 2 de Weber, 1 de Simmel, 3 de Tönnies et 5 de Sombart. De Spencer, précurseur des études sociologiques en Grande-Bretagne, Vianna possédait 8 volumes et de Pareto et Mosca, fondateurs de la pensée sociologique en Italie, 5 et 1 volumes respectivement. Des fondateurs de la sociologie nord-américaine, plus précisément des membres de l’École de Chicago, Vianna possédait 1 texte de Small et 1 de Robert Park. Malgré le petit nombre de volumes de ces auteurs, on ne peut sous-estimer le rapport que Vianna entretenait avec eux car dans ses archives se trouvent quelques lettres de Robert Park, dont l’une datée du 13 juillet 1933 dans laquelle il le remercie pour les livres Populações meridionais do Brasil et Raça e assimilação, envoyés par Vianna ; la deuxième, datée du 21 novembre 1934, par laquelle Park envoie un livre en cadeau pour Vianna ; et la dernière, datée du 5 février 1935, dans laquelle il recommande un ami qui allait venir étudier au Brésil.
22Parmi les « sociologues » brésiliens on note, parmi d’autres noms, 10 volumes de Gilberto Freyre23 et 4 livres de Gustavo Barroso24. Lucien Febvre et Fustel de Coulanges25, ainsi que Momsem26, Ranke27 et Henri Berr, sont quelques-uns des historiens qui figurent dans sa collection. Dans la liste des historiens brésiliens, tous les noms importants du moment sont représentés : Max Fleiuss28, Felisberto Freire29, Afonso Celso30, José Maria Bello31, Alfredo Ellis Jr.32, Pedro Calmon33, Caio Prado Jr.34 et Sérgio Buarque de Holanda35.
23La littérature de voyageurs est présente dans les œuvres de Gandavo, Debret et Saint-Hilaire. Les éducateurs sont représentés par les œuvres de Azevedo Amaral, Fernando de Azevedo et John Dewey, et la pensée psychologique apparaît dans les œuvres de Freud et Jung. Parmi les philosophes, on note les livres de Benedetto Croce, Engels et sept volumes de l’œuvre d’Henri Bergson. Au second rang, selon le nombre de titres, figurent les livres juridiques et administratifs, concernant également les activités professionnelles de Vianna. Parmi les juristes nationaux, on remarque Clóvis Bevilácqua, Achilles Bevilácqua et Rui Barbosa, et parmi les étrangers Fantini, Barassi, Baudry-Lacantinerie, entre autres.
24En additionnant les titres qui se rapportent aux sciences sociales, aux livres juridiques, à l’histoire générale et à celle du Brésil, aux biographies, aux mémoires et aux autobiographies (des grands personnages de l’histoire nationale et étrangère), on arrive à un total de 3 151, ce qui correspond à près de 80 % de sa collection. Mais la littérature brésilienne et étrangère occupe également sa place dans cet ensemble de livres. Bien que représentant quantitativement moins de 10 % des titres, des exemplaires des principales références littéraires nationales et étrangères peuvent être remarqués, tels que José de Alencar, Machado de Assis, Olavo Bilac, Alberto de Oliveira, Manuel Antonio de Almeida, Manuel Bandeira, Humberto de Campos, Casimiro de Abreu, Menotti del Picchia, Monteiro Lobato, parmi d’autres noms illustres.
25Quant aux auteurs étrangers, figurent des titres de Goethe, Balzac, Camões, Corneille, Racine, Molière, Erasme, Dante, Flaubert, Dickens, Dostoievsky, et un nombre important d’œuvres d’Alexandre Herculano dont il possédait 26 titres. Concernant la présence d’auteurs étrangers, la bibliothèque d’Oliveira Vianna semble être en accord avec les principes de qualité intellectuelle de l’époque car, selon Tania Bessone, ce sont les œuvres de ces auteurs qui circulaient le plus dans les ventes aux enchères de livres. Elle affirme en effet :
« La langue étrangère prédominante dans les œuvres figurant sur les avis de vente aux enchères était le français, surtout dans la seconde moitié du xixe siècle, avec une nette préférence pour des auteurs comme Corneille, Racine, Molière, Montesquieu, Rousseau, Benjamin Constant, Victor Hugo, Dumas, Eugène Sue. Ponson du Terrail et Chateaubriand figuraient aussi sur ces listes. Parmi les Portugais, les plus communs étaient Camilo Castelo Branco, Herculano, Garret et Camões. À partir des années 70, les œuvres en anglais et en allemand devinrent plus fréquentes : Shakespeare, Schiller, Goethe, Proudhon, Walter Scott, Dickens, Disraelli et les soeurs Brontë étaient les plus souvent mentionnés36. »
26La présence de livres de littérature étrangère révèle une autre caractéristique de cette bibliothèque : la diversité linguistique. Cinq langues y sont plus fréquemment présentes : l’espagnol, l’anglais, l’allemand, le français et l’italien, avec une prédominance des deux dernières. L’étude des langues étrangères par Oliveira Vianna peut être attestée également par la grande quantité de livres didactiques et de grammaires de langues étrangères regroupés dans notre classification sous la rubrique divers.
27Une autre caractéristique importante de cette bibliothèque est la présence de livres de religion. Leur nombre ne traduit pas, à dire vrai, leur valeur dans la collection d’Oliveira Vianna. En fait, ce n’était pas dans la bibliothèque mais dans une autre pièce de la maison que Vianna rangeait ce type de livre. Dans sa chambre, sur une étagère fixée au mur, près de son lit de jeune homme, il collectionnait ce qu’il appelait ses « livres de chevet », une collection de 78 titres dont 67 étaient des livres de religion. Selon Marcos Almir Madeira : « C’était une caractéristique d’Oliveira Vianna, dans ses rares moments libres, généralement le soir, il se consacrait à la lecture spirituelle37. »
28Il semble que cette collection – qui se forma à partir de l’héritage de la petite bibliothèque de la fazenda – fut largement alimentée par des acquisitions réalisées par Vianna lui-même.
29D’après des documents d’archives et en accord avec sa tendance à l’isolement social, on voit que l’acquisition de livres était pour Vianna une activité réalisée principalement par écrit et plus spécifiquement par des échanges épistolaires. Il fréquentait peu les librairies et préférait acheter ses livres à partir de catalogues d’entreprises nationales et étrangères. Sa correspondance, contenue dans ses archives personnelles, permet d’identifier les principales maisons d’édition et les librairies où il s’approvisionnait : Livraria Bonffoni, Livraria Civilização Brasileira, Livraria Editora Freitas Bastos, Livraria José Olympio, Livraria Suíssa Walter Roth, Livros de Portugal, W. M. Jackson inc. Livraria Globo, Les Librairies Flammarion, Foreign International Book Company, Fondo de Cultura Economica et Editora Anchieta.
30En ce qui concerne les périodiques, Vianna aimait recevoir les revues et les brochures des divers centres de recherche existants dans le pays depuis la fin du xixe siècle. Lecteur assidu des publications de ces centres scientifiques, Vianna se tenait au courant des discussions théoriques tenues dans ces instances, ce qui, pour lui, était un motif de fierté :
« De vous à moi, je dois avouer que [...] j’ai l’habitude de recevoir de tous les coins du pays, de l’extrême nord à l’extrême sud, des publications de livres et de brochures qui traitent de sujets relatifs aux problèmes historiques, ethniques, juridiques et sociaux de nos régions et États. Je peux même dire que tout ce qu’on a publié dans notre pays d’excellent et de substantiel dans ces domaines m’a été envoyé38. »
31Dans la bibliothèque de Vianna on trouve des publications du Musée Emílio Goeldi, du musée Paulista ainsi que les Annales du Musée National. En outre, pour se tenir au courant des plus récentes recherches en matière d’ethnographie, il se tenait informé non seulement par les revues, déjà citées, éditées par les musées, mais aussi par la lecture des brochures, bulletins et périodiques publiés par les divers instituts historiques existants dans le pays, car, selon, son opinion, c’était ces publications qui garantissaient la diffusion des connaissances ethnographiques au Brésil :
« En ce qui concerne la recherche historique et la recherche ethnographique, notamment l’ethnographie indigène, ces études ou ces essais réussissent à échapper à l’inévitable oubli parce qu’en règle générale ils sont consignés dans les pages des revues de plusieurs Instituts Historiques répandus aujourd’hui dans presque tous les États. Certaines de ces revues constituent des publications de valeur, riches de par les sources documentaires qu’elles révèlent et de par les monographies originales qu’elles éditent sur l’historiographie locale. Pour ne pas citer celles de l’Institut Historique et des Archives Publiques de São Paulo et celles des Archives Publiques du Minas, je rappellerai seulement celles éditées par l’Institut Historique de Pernambuco, de Bahia, du Ceará, du Rio Grande do Norte et du Rio Grande do Sul : toutes ont été consacrées comme des recueils précieux d’informations sur notre histoire, notre géographie et notre économie régionale et locale39. »
32Les thèmes se rapportant aux indigènes, ainsi que les questions relatives aux voyages et aux explorations scientifiques et les débats sur l’histoire régionale, étaient fondamentaux dans les publications des instituts historiques40.
33Vianna actualisait également son fonds par l’échange de livres avec d’autres intellectuels. L’habitude d’envoyer et de recevoir des livres marqua le quotidien de Vianna et à travers cette activité se fit jour une pratique épistolaire spécifique. Recevoir un livre, envoyer un livre, remercier pour un livre envoyé et lu, remercier pour un livre envoyé et non encore lu, recevoir des remerciements pour les livres envoyés lus ou non lus par ses interlocuteurs, sont des pratiques quotidiennes connues de tous les intellectuels. En suivant le chemin tracé par ces échanges de livres, il est possible de remonter le réseau social d’un intellectuel.
34Oliveira Vianna garda dans ses archives diverses lettres d’intellectuels qui lui envoyèrent des livres en cadeau, en échange ou non de livres envoyés par lui. Recevoir un livre en cadeau, expédié par l’auteur lui-même, signifie, pour le destinataire, être reconnu comme quelqu’un capable d’en faire une lecture légitime, émettre une opinion importante et, pour l’expéditeur, être reconnu par le destinataire comme une personne ayant une production significative.
35Germano Correia, Walter Euler, Alfredo Ellis, Marcos Konder, Antero Manhães, Lúcio Mendieta y Nuñes, Walter Pompeu, Mário Sette, A. Varela, Aderbal Filho, Carlos Campos, Djalma Forjaz, Adriano Mettello, José Salgado, Mathias Gomes dos Santos, Claudio de Souza e Octávio Amadeo figurent parmi ceux qui envoyèrent à Oliveira Vianna des livres dont ils sont eux-mêmes auteurs. Les échanges de livres entre ces derniers et Vianna montrent qu’ils lui reconnaissaient des qualités suffisantes pour discuter sur les thèmes abordés, qu’ils cherchaient à échanger des idées et à lancer un débat public sur le livre en question et, peut-être même, provoquer un débat écrit dans la mesure où ses écrits futurs pourraient citer le texte lu.
36Il y a encore, parmi les personnes qui envoient des livres comme cadeaux, celles qui envoient des livres d’autres auteurs. Dans ce cas, le cadeau a une fonction assez différente. Le livre a seulement pour but de plaire au destinataire, de montrer l’importance de l’amitié de Vianna pour celui qui l’envoie. En règle générale, le livre se rapporte alors directement aux intérêts personnels et professionnels d’Oliveira Vianna. C’est ainsi que les livres envoyés par Carneiro Felipe, Ildefonso Albano, Ellis Torres, Souza Netto, Irineu Pinheiro, Al Roças, Ivan Nogueira Itagiba, Francisco Salles Vicnente de Azevedo, Joaquim Alves, José Carlos Macedo Soares, Alfred Knopf, Ribeiro Couto e Elysio de Carvalho, abordent des questions de droit du travail, des sujets concernant l’organisation sociale et politique brésilienne et la politique agricole.
37Sans nul doute, ses contacts avec d’autres intellectuels et ses échanges de livres furent, pour Vianna, une manière supplémentaire d’actualiser le fonds de sa bibliothèque.
En inspectant sa bibliothèque : des pieds de page aux dernières étagères
« La citation apparaît [...] comme un écho répercuté par la volonté de l’auteur. Citer peut avoir plusieurs sens. Dans notre langue mère, le latin, citare signifie “mettre en mouvement”, mais en espagnol, le même mot a le sens d’“accorder une entrevue” et, en français, il peut même avoir le sens très fort de “convoquer”. [...] Et pour nous lecteurs, la citation a une valeur d’index de base41. »
38Bien que l’examen des titres et de leur mode d’acquisition soit important pour l’analyse du contenu de la bibliothèque – il convient de le souligner – il n’est pas suffisant pour tracer le parcours de lecture de son propriétaire. Car la présence d’un livre dans une bibliothèque ne signifie pas nécessairement qu’il ait été lu ni, a contrario, son absence ne signifie pas qu’il ait été ignoré42. En partant du présupposé que la véritable source permettant de connaître le parcours de lecture d’un écrivain est son œuvre même et que les citations faites par un auteur représentent ce qu’il a retenu de ses lectures, l’analyse des citations contenues dans les œuvres publiées d’Oliveira Vianna permet, en confrontant ses écrits et le catalogue de sa bibliothèque, d’identifier une partie de son parcours de lecteur43. De sorte qu’il est absolument nécessaire d’inclure un croisement d’informations et d’indices présents dans ses écrits comme méthode complémentaire d’analyse de son itinéraire de lecture. Les citations intertextuelles et les notes de pied de page faites dans les ouvrages de cet auteur retracent le trajet suivi et permettent d’identifier les livres qu’Oliveira Vianna considérait comme réellement importants parmi les livres de sa collection.
39En effectuant un rapprochement entre les œuvres présentes dans sa bibliothèque et celles citées dans ses publications, il a été possible d’identifier quelques matrices intellectuelles et discursives d’Oliveira Vianna et de comprendre ainsi leur influence sur la formation, l’élaboration et la diffusion de ses idées. L’analyse des citations, à partir de leur classification – information, concepts, érudition et critique – permit de déterminer une partie de ses auteurs de référence, ses sources de travail et les origines de son « inspiration ». Ont également été observées, avec une attention particulière, les citations en épigraphe car elles ont permis d’identifier les auteurs considérés comme « exemplaires » par Oliveira Vianna et de comprendre son parcours de lecture ainsi que les éventuelles déviations et changements de trajectoire.
40L’épigraphe, au dire d’Antoine Compagnon, est « la citation par excellence44 », car elle est une icône qui permet une entrée privilégiée dans l’énonciation. C’est par l’épigraphe que l’auteur annonce son propos. En ce sens, les idées contenues dans les épigraphes ne sont pas de l’auteur mais pourraient l’être45. D’une certaine façon, l’épigraphe représente le livre, permet de l’inférer, de le résumer46. Dans les livres de Vianna, les épigraphes apparaissent aussi bien au début de l’ouvrage, isolément au centre de la page, qu’au début de certains chapitres. Certains livres contiennent un grand nombre d’épigraphes, comme c’est le cas dans Instituições políticas brasileiras qui sur ses 26 chapitres renferment 14 épigraphes, et dans Populações meridionais do Brasil qui, sur 16 chapitres, contient 14 épigraphes. D’autres, comme Direito do trabalho e democracia social ou Raça e assimilação, ne contiennent aucune épigraphe.
41Il y a encore ces livres qui ne contiennent qu’une seule épigraphe, mais qui occupent précisément la page d’ouverture, jouant le rôle de « poste avancé », selon l’expression de Compagnon47. C’est le cas dans « Evolução do povo brasileiro » qui cite en première page une phrase de Lapouge48 : « La science politique est la science de l’évolution sociale, et l’art politique celui de diriger mieux l’évolution à venir49. »
42Bien que Lapouge ne soit cité que quatre autres fois au long des 349 pages du livre et que, à partir de deux de ces citations, Vianna s’emploie à démontrer les limites de ses analyses en ce qui concerne la réalité brésilienne, le fait que cette phrase de l’auteur soit à l’ouverture du livre associe les écrits de Vianna à ses idées et les rend représentatives de ses prémisses de base50, « comme un prélude ou une confession de foi51 ». Lapouge sera encore cité par Vianna dans d’autres textes, ce qui amènera beaucoup d’auteurs à associer les idées des deux intellectuels. Silvia Pantoja, faisant allusion au rapport entre les deux, affirme :
« Dans le but d’identifier les supposés membres des élites, j’attire l’attention sur le fait qu’en cherchant un “appui scientifique” à ses élaborations sur les théories de Lapouge, Gobineau, Amon et Woltmann, alors en vogue en Europe, Oliveira Vianna, au moins jusqu’au milieu des années 30, témoigne d’une approche raciste en attribuant les caractéristiques des divers types sociaux au facteur biologique. Cette position, à mon sens, nous amène à lier les concepts de race et d’élite et à comprendre que, pour Vianna, la véritable élite est composée d’individus de “bonne hérédité”, et plus précisément de blancs, membres de la “race supérieure” : les ariens52. »
43Il se peut que l’ascendant des théories racistes du xixe siècle sur l’œuvre de Vianna, bien que vrai, soit un peu réducteur. En analysant un peu plus attentivement les notes de pied de page et les citations intertextuelles faites par Vianna au détour du livre Evolução do povo brasileiro, on trouve des indices d’autres influences moins référencées dont certaines pratiquement oubliées.
44Parmi les divers auteurs cités par Vianna, deux attirent immédiatement l’attention. Le premier est Gabriel Tarde que Vianna définit comme « penseur absolument génial » (1939, p. 31) lorsqu’il analyse la critique qu’il fait des évolutionnistes. Tarde fut l’un des grands noms de la sociologie juridique française des dernières années du xixe siècle. Il entreprit ses études de droit à Toulouse et les termina à Paris en 1866. À partir de 1880, Tarde écrivit régulièrement pour la Revue Philosophique et pour la revue Archives d’Anthropologie Criminelle. Dans ses écrits, Tarde développe l’idée d’une psychologie sociale de la pensée des individus. Selon lui, les phénomènes collectifs devraient être traités à partir des interactions et des inter-relations des consciences individuelles. Vianna garda les cinq livres de Tarde déjà cités et subit, sans doute, une grande influence théorique.
45Un autre auteur cité par Vianna dans son texte « O moderno conceito de evolução social », qui sert de chapitre d’introduction de son livre Evolução do povo brasileiro, est Lucien Febvre. En cherchant à comprendre les forces qui influencèrent l’évolution des sociétés et l’hétérogénéisation de la structure sociale, Vianna souligne le rôle du milieu géographique en se basant sur Vidal de La Blache et Lucien Febvre. À l’affirmation de Ratzel selon laquelle le sol « régule le destin des peuples avec une brutalité aveugle », La Blache opposait l’idée du « possibilisme » géographique qui, selon Vianna, fait de « l’homme une force intelligente qui réagit contre le déterminisme du milieu physique et non un simple automate, poussé aveuglément par lui53 ». Mais en terminant son analyse, Vianna conclut :
« Quoi que l’homme fasse pour se libérer des influences de l’environnement cosmique, il ne réussira jamais à s’en libérer complètement. C’est Lucien Febvre qui le dit, bien que partisan convaincu du “possibilisme” de La Blache. Et avec lui, toutes les sciences sociales contemporaines54. »
46Il y a encore dans ce texte trois citations de Febvre, toutes extraites du livre La terre et l’évolution humaine55 dont Vianna possédait un exemplaire. C’était la question du rapport entre les groupes humains et leur milieu naturel qui, à ce moment-là, marquait l’affinité entre Vianna et Febvre. Comme on le sait, dans les débuts de la revue Les Annales, l’école géographique possibiliste de Vidal de La Blache, fondée sur les rapports entre les groupes humains et leur milieu naturel, et le mouvement créé par Henri Berr autour de la Revue de Synthèse, qui associait l’histoire à la géographie, influencèrent Marc Bloch et Lucien Febvre56. Vianna cite également le livre d’Henri Berr – La synthèse en histoire, essai critique et théorique57 – dans son texte « Evolução do povo brasileiro ».
47En suivant la voie ouverte par les citations de Vianna dans ce livre, on trouve des indices qui peuvent guider l’approche de la bibliothèque. Les données empiriques qu’il utilise pour composer son analyse sont tirées de divers auteurs – Germano Correia, Loretto Couro, Diogo de Vasconcelos, Saint-Hilaire, Basílio da Gama, Pereira Lago – mais surtout d’Antonil, un auteur que Vianna admirait profondément. Son admiration pour Antonil est attestée non seulement par l’ensemble des citations trouvées dans le livre mais également par une lettre écrite par Vianna à son ami José Geraldo Bezerra de Menezes dans laquelle il affirme : « D’Antonil, j’ai tiré grand profit. Par son intermédiaire, j’ai eu connaissance de certaines particularités qui me manquaient sur ce merveilleux iiie siècle, le plus grand de notre histoire58. »
48Si l’on considère que les livres Populações meridionais do Brasil et Instituições políticas brasileiras sont, respectivement, le premier et le dernier livre de Vianna et que ce sont ceux qui renferment le plus grand nombre d’épigraphes, leur comparaison peut révéler les fonctions que ces phrases et ces insertions de texte assumaient dans ses livres. La première édition de Populações meridionais do Brasil ne contient pas d’épigraphe au début du livre. Cependant, l’édition de Paz e Terra, de 1973, commence par une phrase de José Ingenieros, médecin argentin, auteur de nombreux travaux dans le domaine de la psychiatrie et de la philosophie, et cité comme l’un des plus grands intellectuels argentins de son temps :
« De par sa méthodologie, ses idées, son érudition, il m’a semblé l’une des œuvres les plus remarquables en son genre qui, jusqu’à maintenant, ait été écrite en Amérique du Sud. Mon ignorance des problèmes ethniques, sociologiques et politiques du Brésil m’empêche de comprendre, dans le détail, le bien-fondé de beaucoup de questions ; mais dans son ensemble, et jugeant les tomes futurs sur la base de l’actuel, il s’agit d’un véritable monument qui honore la culture de tout le Continent59. »
49Cette épigraphe, contrairement à ce qui arrive habituellement, n’a pas pour fonction de permettre au lecteur d’anticiper les idées qui seront développées par l’auteur du livre, mais plutôt de ratifier la qualité du livre en poussant le lecteur à une analyse positive du texte. Plus qu’une épigraphe, la phrase de Ingenieros joue le rôle de préface. Le premier volume de Instituições politícas brasileiras n’a pas non plus d’épigraphe, tandis que le second volume a sur la première page une citation de Eça de Queiroz où cet auteur affirme :
« Ceux qui savent donner la vérité à leur patrie ne l’adulent pas, ne la trompent pas, ne lui disent pas qu’elle est grande parce qu’elle a pris Calicut ; ils lui disent qu’elle est petite parce qu’elle n’a pas d’écoles. Ils lui crient sans cesse la vérité rude et brutale. Ils lui crient : Tu es pauvre, travaille ! Tu es ignorante, étudie ! Tu es faible, arme-toi60 ! »
50L’idée que renferme cette phrase d’Eça – que les véritables patriotes sont ceux qui sont capables de montrer les problèmes et les défauts de la nation et de lui montrer le chemin – semble avoir été suivie par Vianna au long de sa production intellectuelle, comme le démontre Castro Faria dans son analyse de la préface écrite par Vianna pour son propre livre Problemas de políticas objetiva61. Dans cette préface, comme le fait remarquer Castro Faria, Vianna se présente aux élites brésiliennes comme un guide capable de mener le pays vers le progrès.
51En ce qui concerne les épigraphes, il est encore intéressant de noter qu’aucun des auteurs cités par Vianna dans Populações meridionais do Brasil ne fut également cité dans Instituições políticas brasileiras. L’espace de 29 ans qui sépare les deux livres est sans doute responsable de ce changement parmi ses auteurs « exemplaires ». Cependant, une analyse plus attentive des auteurs cités en épigraphe permet de découvrir dans Instituições políticas brasileiras, livre publié en 1949, des noms qui apparaissent dans l’œuvre de Vianna depuis ses premières publications. Dans ce dernier livre, publié de son vivant, Vianna utilise comme épigraphe des textes de Descartes, Halbwachs, Fustel de Coulanges, Henri Berr, Eça de Queiroz et Joaquim Nabucco, des auteurs qui avaient étayé quelques-unes des idées de ses premiers livres. Dans ce livre, publié au crépuscule de sa vie, Vianna semble ratifier l’idée qu’il développe dans la préface, en affirmant :
« Ces institutions sociales, si importantes, ne sont cependant pas étudiées avec toute l’attention qu’elles méritent. J’essaie maintenant de les étudier au Brésil, à la lumière de ces critères, et de reconfirmer des idées antérieures développées depuis 1920 – depuis Populações. D’où ce livre62. »
52Les références en épigraphe à des auteurs présents dans ses livres depuis son tout premier texte, permettent de réaffirmer l’idée que Vianna lui-même cherchait à véhiculer quant à la constance et à l’homogénéité de l’œuvre qu’il préparait.
53Les citations de Instituições políticas brasileiras, comparées à celles de Populações meridionais do Brasil, renferment quelques constantes et quelques différences.
54Parmi les auteurs qui restent cités dans Instituições políticas brasileiras, on trouve les sociologues de l’école de Le Play – Rousiers, Descamps, Demolins et Trouville – et aussi les auteurs de théories raciales comme Lapouge et Amon, à propos desquels Oliveira Vianna émet des critiques tout au long de son texte dans le but de se débarrasser des stigmates de racisme :
« Il est clair que je suis loin du pan-racisme de Lapouge, formulé dans ce concept incisif de ses Sélections sociales et qui résume l’essence de sa doctrine et de celle de son école : – “les faits sociaux s’expliquent par la lutte entre éléments anthropologiques différents – et l’histoire n’est qu’un simple processus d’évolution biologique”. Aujourd’hui, l’école française moderne d’ethnologie déplace le champ des investigations : – du phénomène de “race” (type anthropologique) elle passe à une entité collective – “l’ethnie”. »
55En utilisant le concept d’ethnie, Vianna cherchait à échapper à l’accusation centrale de la plus grande partie des critiques négatives de son œuvre. Dans le but, toutefois, d’entretenir l’idée que ses livres formaient une œuvre homogène et cohérente, Vianna sentit le besoin de justifier ses différences avec ce qu’il appela la théorie pan-culturaliste et de réaffirmer quelques-unes de ses positions plus élémentaires :
« Je n’accepte pas le pan-culturalisme de cette école qui veut tout expliquer par la “culture”, même les phénomènes physiologiques, qui se refuse à faire intervenir, dans la formation et l’évolution des sociétés et de la civilisation, les facteurs biologiques et qui nie toute influence de l’individu ou de la race et de leur puissante hérédité63. »
56Parmi les différences, la plus importante est sans doute l’inclusion d’auteurs de l’école juridique moderne nord-américaine, Benjamin Nathan Cardoso, Aronson et Hellman. Parmi ceux-ci la bibliothèque de Vianna ne contient qu’un exemplaire du livre intitulé Benjamin N. Cardoso, american judge, publié à New York en 1940.
57Dans Instituições políticas figure aussi la citation du livre de Ralph Linton, Cultura y personalidad, publié au Mexique en 1945, et présent dans sa bibliothèque. Linton, ethnologue américain, professeur à l’Université de Columbia, développa une théorie sur les rapports entre culture et personnalité à partir principalement du concept de personnalité de base. Dans le but de combattre l’école culturaliste de Franz Boas – ce qui au Brésil revenait à critiquer l’œuvre de Gilberto Freyre si souvent déclarée moderne et brillante par opposition à la sienne, raciste et éculée – Vianna en vient à affirmer que « Linton était l’un des rares intellectuels américains à son goût [...] à cause de sa clarté d’exposition, de sa concision et de son élégance littéraires, de la souplesse et de l’impartialité de son jugement » (1987, p. 50). Les indices donnés par les citations des livres de Vianna permettent de comprendre comment, tout au long de sa vie, il sut élaborer, à partir de ses lectures, « un tissu culturel dense64 » qui servit de base à la production de son œuvre écrite.
58Le fonds de bibliothèque constitué par Vianna révèle un intellectuel érudit, au courant de l’actualité, connaisseur des dernières nouveautés en vogue dans les principaux centres de production scientifique. L’itinéraire et les pratiques de lecture inscrits dans la trame des archives de Vianna et dans les volumes de sa bibliothèque permettent d’étudier les rapports entre ses lectures et son œuvre publiée, entre ses méthodes d’écriture et son parcours de transition lecteur/auteur.
59Bien que profitable, cet itinéraire de recherche a ses limites et suggère de nouvelles investigations. L’examen de sa bibliothèque sur la base de notes et de citations relevées dans ses textes publiés rend difficile l’élucidation des matrices théoriques non explicitement exprimées ou rendues publiques dans ses œuvres. Des documents et des livres qui composent la bibliothèque d’Oliveira Vianna, émerge un vaste ensemble de propositions, d’images et de représentations. Parmi celles-ci, seules quelques-unes ont été explorées dans ce texte, beaucoup d’autres demeurent qui pourront faire l’objet de recherches futures. Les limites imposées par ce travail suggèrent une infinité d’autres investigations scientifiques qui, contrairement au caractère nécessairement fini des textes, réaffirment « le propre principe de la recherche, toujours aiguisé par le manque65 ».
Notes de bas de page
1 Luiz Carlos Villalta attire l’attention sur la présence habituelle d’outils d’écriture dans les cabinets de lecture. Selon cet auteur, depuis le xviiie siècle, « des objets destinés à la lecture, l’écriture et le rangement des livres existaient dans les résidences particulières, y compris dans celles où il n’y avait pas de livres. Certaines maisons mineiras et cariocas avaient des encriers, de la papeterie, des étagères [...] conservaient des plumes à écrire pour en vendre même [...]. Dans d’autres, on trouvait des étagères et des livres et, dans certains cas, des encriers et des cartes », Villalta L. C., « O que se fala e o que se lê : língua, instrução e leitura », F. Novais (dir.), História da vida privada no Brasil, São Paulo, Companhia das Letras, vol. 1, 1998, p. 377.
2 Le sens premier de « papagaio » est « perroquet » (N.D.T.).
3 Personnes simples de la périphérie de Rio de Janeiro.
4 Depuis la Renaissance, divers instruments destinés à recueillir des citations, des phrases et des anecdotes étaient utilisés par les érudits. Parmi ceux-ci, on distinguait les collections de pensées ; « en réunissant de façon plus ou moins systématique une masse d’informations et de citations extraites de sources les plus diverses, ces œuvres, nées initialement de la sélection et de la collection d’un auteur particulier, deviennent [...] des résumés de bibliothèques ou encore des “bibliothèques portatives” où les lettrés peuvent puiser le nécessaire pour enrichir leurs écrits ». Ces florilèges de pensées étaient rangés de façon que l’on puisse retrouver rapidement diverses informations – recueillies au cours de lectures ou par transmission orale dans les divers espaces sociaux intellectuels – susceptibles d’être utilisées ultérieurement dans différentes formes de productions telles que lettres, prières, cours et publications de toutes sortes. De là peut-être l’idée à l’origine des « perroquets » de Vianna. Voir à ce sujet Blair A., « Bibliotecas portáteis : as coletâneas de lugares-comuns na Renascença tardia », M. Baratin et C. Jacob, O poder das bibliotecas : a memória dos livros no Ocidente, Rio de Janeiro, Editora UFRJ, 2000, p. 74-75.
5 Schwarcz L., « Uma nova biblioteca : um novo espírito », A longa viagem da biblioteca dos reis : do terremoto de Lisboa à independência do Brasil, São Paulo, Companhia das Letras, 2002, p. 120.
6 Les titres de Eça de Queiroz trouvés dans la collection de Oliveira Vianna sont A cidade e as serras, Porto, Lello, 1912 ; O primo Bazílio, Porto, Chardron, 1935 ; A ilustre casa de Ramires, Porto, Lello, 1938 ; A relíquia, Porto, Lello, 1945 ; O conde d’Abranhos e a catastrophe, Porto, Chardron, 1925 ; Os Maias : episódios da vida romântica, Porto, Lello, 1935 ; O mandarim, Lisboa, Lello e irmão, 1945 ; O crime do padre Amaro, Porto, Lello, 1945 ; Prosas bárbaras, Porto, Chardron, 1917 ; Notas contemporâneas, Porto, Chardron, 1909 ; Cartas da Inglaterra, Porto, Lello, s.d. ; A correspondência de Fradique Mendes, Porto, Lello, 1932 ; Correspondência, Porto, Chardron, 1926 ; O Egyto, notas de viagem, Porto, Lello e Irmão, 1938 ; e Cartas inéditas de Fradique Mendes e mais páginas esquecidas, Porto, Lello e Irmão, 1945.
7 Franchetti P., « Febre de Eça », Folha de São Paulo, caderno Mais !, 13 août 2000.
8 Ibid.
9 Abreu R., A fabricação do imortal : memória, história e estratégia de consagração no Brasil, Rio de Janeiro, Rocco/Lapa, 1996, p. 137.
10 Dans son étude sur les bibliothèques de Minas Gerais au xviiie siècle, Luiz Carlos Villalta attire l’attention sur le rapport entre le raffinement intellectuel des propriétaires et la taille des bibliothèques. Selon lui, « la taille des bibliothèques mineiras était variable, déterminée non pas par la richesse mais par le degré de raffinement intellectuel et scolaire de leurs propriétaires. Curés, avocats et chirurgiens possédaient, en règle générale, les plus grandes bibliothèques. Il y avait, en outre, un rapport étroit entre la composition des bibliothèques et la condition sociale et professionnelle de leurs propriétaires », Villalta L. C., op. cit., p. 362.
11 Delgado M., Cartografia sentimental de sebos e livros, Belo Horizonte, Autêntica, 1998, p. 85.
12 1 alqueire = environ 5 hectares (N.D.T.).
13 História de Gil Braz de Santilhana, de Lesage, fut un des textes littéraires de grand succès à Rio de Janeiro au début du xixe siècle. Ce roman, un succès éditorial dans l’Europe des xviiie et xixe siècles, fut traduit en plusieurs langues, la version portugaise étant de Barbosa de Bocage et considérée comme l’une des plus importantes. Cf. Abreu M., Leituras literárias no Rio de Janeiro (1769-1807), [http://www.portcom.intercom.org.br/pdfs/6aa17541a5f391355cd303c5c2945aec.PDF, p. 3], et Neves L. M. L. B. P., Livreiros franceses no Rio de Janeiro : 1799-1824, [http://www.portcom.intercom.org.br/pdfs/bb3aea30006796253008218e5bdda0c1.pdf, p. 7].
14 Torres J. B. V., Oliveira Vianna : sua vida e sua posição nos estudos brasileiros de sociologia, Rio de Janeiro, Freitas Bastos, 1956, p. 22.
15 À propos du processus de reconversion sociale des fils de l’élite agraire décadente à la fin de l’Empire, cf. Miceli S., Poder, sexo e letras na República Velha, São Paulo, Perspectiva, 1977, p. 22 et Garcia Junior A., « Les intellectuels et la conscience nationale au Brésil », Actes de la recherches en sciences sociales, n° 98, 1993, p. 20.
16 À titre de comparaison, la bibliothèque de Machado de Assis, donnée à l’Académie brésilienne des lettres, possède 736 ouvrages. Voir Vianna G., « Revendo a biblioteca de Machado de Assis », J. L. Jobim (dir.), A biblioteca de Machado de Assis, Rio de Janeiro, Topbooks, 2001, p. 119.
17 Les livres forment un total de 4 161 exemplaires, dont 3 949 titres distincts.
18 On entend par sciences sociales, dans ce texte, les études se rapportant à l’homme en société, tels que les travaux d’anthropologie, de psychologie, d’économie, de philosophie, de géographie, de science politique, etc., vu qu’à cette période, au Brésil, la plus grande partie de ces sciences n’était pas encore passée par un processus de spécialisation et d’institutionnalisation.
19 Afrânio Garcia Jr. créa l’expression « le Brésil en représentation » pour se référer à ce type d’études. Ce sont des textes qui mettent en évidence la construction de la nation et de l’identité nationales. Voir, à ce sujet, Garcia Junior A. R., « O Brasil como representação », Comunicação, Rio de Janeiro, UFRJ/PPGAS, n° 6, 1981 et Abreu R., A fabricação do imortal : memória, história e estratégia de consagração no Brasil, Rio de Janeiro, Rocco/Lapa, 1996, p. 138.
20 La bibliothèque comptait, comme nous l’avons dit, un ensemble de 4 161 exemplaires. Le chiffre cité ici, 3 949 correspond au nombre de titres, étant donné que certains existaient en plusieurs exemplaires.
21 Vianna F. J. O., Evolução do povo brasileiro, 3e ed., São Paulo, Companhia Editora Nacional, 1938, p. 37.
22 Cabin P. et Dortier J.-F. (dir.), La sociologie : histoire et idées, Paris, Sciences Humaines Éditions, 2000, p. 44.
23 Freyre G., Sociologia, Rio de Janeiro, Jose Olimpio, 1945 ; Freyre G., Região e tradição, Rio de Janeiro, Jose Olympio, 1941 ; Freyre G., Sobrados e mucambos : decadência do patriarcado rural no Brasil, São Paulo, Comp. Ed. Nacional, 1936 ; Freyre G., Ingleses no Brasil, Rio de Janeiro, J. Olympio, 1948 ; Freyre G., Carvalho R., Cascudo L. C., Pontes C., Carneiro N., Moreira J., Ribeiro L., Berardinelli W., Brown I., Camargo Junior J. M., Pernambuco J., Andrade N., Amado J., Mello Neto J. A. G., Campello S., Raymundo J., Avila F. B., Pernambuco U., Novos estudos Afro-Brasileiros, Rio de Janeiro, Civilização Brasileira, 1937, 2 vol. ; Freyre G., Conferencias na Europa, Rio de Janeiro, Ministério da Educação e Saúde, 1938 ; Freyre G., O mundo que o português criou, Rio de Janeiro, Jose Olympio, 1940 ; Freyre G., Açúcar : algumas receitas de doces e bolos dos engenhos do Nordeste, Rio de Janeiro, Jose Olympio, 1939 ; Freyre G., Nordeste : aspectos da influencia da canna sobre a vida e a paisagem do nordeste do Brasil, Rio de Janeiro, Jose Olympio, 1937.
24 Barroso G., Historia secreta do Brasil, São Paulo, Companhia Editora Nacional, 1937 ; Barroso G., Historia militar do Brasil, São Paulo, Nacional, 1935 ; Barroso G., O Brasil na lenda e na cartografia antiga, São Paulo, Companhia Ed. Nacional, 1941 ; Barroso G., O Brasil em face do Prata, Rio de Janeiro, Imprensa Nacional, 1930.
25 Coulanges F., Histoire des institutions politiques de l’ancienne France, la monarchie franque, Paris, Hachette, 1888 ; Coulanges F., A cidade antiga, Lisboa, Classica Ed., 1929 ; Coulanges F., Leçons à l’impératrice sur les origines de la civilisation française, Paris, Hachette, 1930.
26 Momsen T., Compendio del derecho publico romano, Buenos Aires, Impulso, 1942 ; Momsen T., Histoire romaine, Paris, Flamarion, 1935.
27 Ranke L., The history of the popes, their church and state, London, Bibliolife, 2009.
28 Fleiuss M., Páginas de historia, Rio de Janeiro, Imprensa Nacional, 1930 ; Fleiuss M., História da cidade do Rio de Janeiro, São Paulo, Melhoramentos, 1928 ; Fleiuss M., Anchieta : conferências lidas no Instituto Histórico e Geográfico Brasileiro 1933-1934, Porto Alegre, Globo, 1935 ; Fleiuss M., História administrativa do Brasil, São Paulo, Melhoramentos, 1932 ; Fleiuss M., O Instituto Histórico através de sua revista, Rio de Janeiro, Imprensa Nacional, 1938.
29 Freire F. F. O., Historia da revolta de 6 de setembro. s. l., s. n., 1896 ; Freire F. F. O., Os portuguezes no Brazil, Rio de Janeiro, Typ. do Economista Brasileiro, 1907 ; Freire F. F. O., Historia de Sergipe, 1575-1855, Rio de Janeiro, Perseverança, 1891.
30 Celso A., Oito annos de parlamento : poder pessoal de D. Pedro II, São Paulo, Melhoramentos, 1928 ; Celso A., El emperador D. Pedro II y el instituto historico, Buenos Aires, Imprenta Mercatali, 1938.
31 Bello J. M., Historia da Republica, primeiro período 1889-1902, Rio de Janeiro, Civilização Brasileira, 1940.
32 De cet auteur, Oliveira Vianna possédait 12 livres : Ellis Junior A., Populações paulistas, São Paulo, Comp. Ed. Nacional, 1934 ; Ellis Junior A., O ouro e a paulistania, s. l., s. n., s. d. ; Ellis Junior A., Os primeiros troncos paulistas e o cruzamento euro-americano, São Paulo, Comp. Ed. Nacional, 1936 ; Ellis Junior A., Amador Bueno, o rei de São Paulo, São Paulo, Ed. J. Fagundes, s. d. ; Ellis Junior A., Capítulos da historia social de S. Paulo, São Paulo, Comp. Ed. Nacional, 1944 ; Ellis Junior A., A evolução da economia paulista e suas causas, São Paulo, Companhia Ed. Nacional, 1937 ; Ellis Junior A., Um parlamentar paulista da república. Subsidio para a historia da república em S. Paulo e subsidio para a historia econômica de São Paulo, São Paulo, Joao Bentivegna, 1949 ; Ellis Junior A., Feijó e a primeira metade do século XIX, São Paulo, Comp. Ed. Nacional, 1940 ; Ellis Junior A., Raposo Tavares e sua época, Rio de Janeiro, José Olympio, 1944 ; Ellis Junior A., Confederação ou separação, São Paulo, Ed. Paulista, 1934 ; Ellis Junior A., Noções elementares de geographia superior e de estatistica, Sao Paulo, Saraiva, 1932 ; Ellis Junior A., Raça de gigantes, a civilização no planalto paulista, São Paulo, Helios, 1926.
33 Calmon P., Historia de la civilizacion brasileña, Buenos Aires, Ministerio da Justica e Inst. Publico, 1937 ; Calmon P., Historia do Brasil, São Paulo, Ed. Nacional, 1939 ; Calmon P., Historia social do Brasil, São Paulo, Ed. Nacional, 1937 ; Calmon P., História da civilização brasileira, São Paulo, Comp. Ed. Nacional, 1933 ; Calmon P., A princesa Isabel, a redentora, São Paulo, Comp. Ed. Nacional, 1941 ; Calmon P., O rei filosofo, vida de D. Pedro II, São Paulo, Comp. Ed. Nacional, 1938 ; Calmon P., Historia da casa da torre, Rio de Janeiro, Jose Olympio, 1939 ; Calmon P., Historia da Bahia, São Paulo, Melhoramentos, 1928 ; Calmon P., Jose de Anchieta, o santo do brasil, São Paulo, Melhoramentos, 1930.
34 Prado Junior C., Evolução política do Brasil, São Paulo, Revista dos Tribunais, 1933 ; Prado Junior, Formação do Brasil contemporâneo, São Paulo, Martins, 1942.
35 Holanda S. B., Monções, Rio de Janeiro, Casa do Estudante do Brasil, 1945.
36 Ferreira T. B., « Biblioteca de médicos e advogados do Rio de Janeiro : dever e lazer em um só lugar », M. Abreu (dir.), Leitura, história e história da leitura, Campinas, Mercado das Letras, 2000, p. 328.
37 Marcos Almir Madeira em depoimento ao caderno « Encontro » do jornal O Fluminense.
38 Vianna F. J. O., « Intercâmbio intelectual », Ensaios inéditos, São Paulo, Editora da Unicamp, 1991, p. 380.
39 Ibid.
40 Guimarães M. L. S., « Nação e civilização nos trópicos : o Instituto Histórico e Geográfico Brasileiro e o projeto de construção de uma memória nacional », Estudos Históricos, Rio de Janeiro, n° 1, 1988, p. 20.
41 Le Moing M., « A solidão povoada : uma biografia de Pedro Nava », Rio de Janeiro, Nova Fronteira, 1996, p. 104.
42 Dans un texte intitulé « Bibliothèques d’écrivains », publié dans l’« Histoire des Bibliothèques françaises », Arbaizar affirme que l’analyse des bibliothèques d’écrivains nous donne quelques leçons qui peuvent être synthétisées en quelques points essentiels : elle est le résultat de situations qu’il est impossible de généraliser ; l’inventaire d’une bibliothèque est toujours lacunaire, la présence d’un livre ne signifie pas qu’il fut lu et son absence ne signifie pas qu’il fut ignoré ; la bibliothèque occupe une infime partie du processus créatif. Cf. Arbaizar P., « La bibliothèque de l’écrivain », Histoire des bibliothèques françaises, Paris, Promodis/Éditions du Cercle de la Librairie, 1992.
43 Dans un texte intitulé « As duas cabeças de Oliveira Vianna », José Murilo de Carvalho présente une analyse semblable à celle proposée ici. En étudiant les citations de Vianna dans son œuvre « Populações meridionais do Brasil », il chercha à comprendre les influences théoriques, méthodologiques et politiques qui placèrent ce livre sur la liste des textes indispensables à notre savoir ». Cf. Carvalho J. M., As duas cabeças de Oliveira Vianna, p. 3 (mimeo).
44 Compagnon A., O trabalho da citação, Belo Horizonte, UFMG, 1996, p. 79.
45 Le Moing M., op. cit., p. 107.
46 Compagnon A., op. cit., p. 80.
47 Ibid.
48 Lapouge était un adepte de la sélection sociale. En se basant sur le darwinisme social et sur l’idée de lutte pour la survie des espèces, il proposa la création d’une nouvelle science sociale qu’il baptisa anthropo-sociologie. Professeur à Montpellier, il se consacra à la zoologie et l’anthropologie et réalisa un travail pratique de mesure de près de 20 000 crânes. Il considérait que l’homme libre n’existe pas car tout individu est déterminé par les conditions de sa race.
49 Apud Vianna F. J. O., Evolução do povo brasileiro, op. cit., p. 19.
50 La bibliothèque de Vianna contient deux livres de Vacher de Lapouge : Les sélections sociales : cours libre de science politique, Paris, Thorin, 1896 et Race et milieu social, Paris, Marcel Rivière, 1909. Autant en raison de la citation du livre que des dates des éditions présentes dans la bibliothèque, il est possible d’affirmer que ces livres ont été lus avant la publication de Evolução do povo brasileiro.
51 Compagnon A., op. cit., p. 80.
52 Castro S. R. P. S., Da privatização do público à publicização do privado : as contribuições de Oliveira Vianna, 1990 (mimeo).
53 Vianna F. J. O., Evolução do povo brasileiro, 3e ed., São Paulo, Companhia Editora Nacional, 1938, p. 35-36.
54 Ibid.
55 Febvre L., La terre et l’évolution humaine, Paris, La Renaissance du Livre, 1922.
56 Burguière A., « Histoire d’une histoire : la naissance des Annales ». Annales ESC, 34e année, n° 6, novembre-décembre 1979, p. 1351.
57 Il existe un exemplaire du livre – La synthèse en histoire, essai critique et théorique, Paris, Felix Alcan, 1911 – dans la bibliothèque de Vianna.
58 Lettre d’Oliveira Vianna à José Geraldo Vezerra de Menezes, le 1er novembre 1920 (apud Menezes G. B., Intérpretes do Brasil, Niterói, Clube de Literatura Cromos, 1997, p. 180).
59 En fait, cette phrase écrite par Ingenieros est tirée d’une lettre à Monteiro Lobato où il commente l’œuvre de Vianna. Voir à ce sujet Torres J. B. V., Oliveira Vianna : sua vida e sua posição nos estudos brasileiros de sociologia, Rio de Janeiro, Freitas Bastos, 1956, p. 70 (apud Vianna F. J. O., Populações meridionais do Brasil, Rio de Janeiro, Paz e Terra, 1973, p. 9).
60 Apud Vianna F. J. O., « Prefácio », Instituições políticas brasileiras, Belo Horizonte/São Paulo/Niterói, Editora da Universidade de São Paulo/Itatiaia/Editora da Universidade Federal Fluminense, 1987, p. 13.
61 Faria L. C., « Problemas de política objetiva », Oliveira Vianna : de Saquarema à alameda São Boaventura, 41 – Niterói. O autor, os livros, a obra, Rio de Janeiro, Relume Dumará, 2002, p. 75-80.
62 Vianna F. J. O., Prefácio, op. cit., p. 23.
63 Vianna F. J. O., Instituições políticas brasileiras, op. cit., p. 47.
64 José Gera Expression utilisée par Le Moing M., A solidão povoada : uma biografia de Pedro Nava, Rio de Janeiro, Nova Fronteira, 1996, p. 103, pour se référer à l’œuvre de Pedro Nava.
65 Certeau M., A escrita da história, Rio de Janeiro, Forense, 1982, p. 94.
Auteur
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Les Premiers Irlandais du Nouveau Monde
Une migration atlantique (1618-1705)
Élodie Peyrol-Kleiber
2016
Régimes nationaux d’altérité
États-nations et altérités autochtones en Amérique latine, 1810-1950
Paula López Caballero et Christophe Giudicelli (dir.)
2016
Des luttes indiennes au rêve américain
Migrations de jeunes zapatistes aux États-Unis
Alejandra Aquino Moreschi Joani Hocquenghem (trad.)
2014
Les États-Unis et Cuba au XIXe siècle
Esclavage, abolition et rivalités internationales
Rahma Jerad
2014
Entre jouissance et tabous
Les représentations des relations amoureuses et des sexualités dans les Amériques
Mariannick Guennec (dir.)
2015
Le 11 septembre chilien
Le coup d’État à l'épreuve du temps, 1973-2013
Jimena Paz Obregón Iturra et Jorge R. Muñoz (dir.)
2016
Des Indiens rebelles face à leurs juges
Espagnols et Araucans-Mapuches dans le Chili colonial, fin XVIIe siècle
Jimena Paz Obregón Iturra
2015
Capitales rêvées, capitales abandonnées
Considérations sur la mobilité des capitales dans les Amériques (XVIIe-XXe siècle)
Laurent Vidal (dir.)
2014
L’imprimé dans la construction de la vie politique
Brésil, Europe et Amériques (XVIIIe-XXe siècle)
Eleina de Freitas Dutra et Jean-Yves Mollier (dir.)
2016