Chapitre V. Gaston Paris face au théâtre médiéval si proche, si loin
p. 85-99
Texte intégral
La (petite) place du théâtre médiéval dans l’œuvre de Gaston Paris
1Le théâtre médiéval, disons-le d’emblée, ne compte pas au nombre des sujets favoris de Gaston Paris. Si ce dernier a néanmoins obtenu une certaine réputation dans ce domaine, c’est essentiellement en raison de deux éditions de texte : celle, d’un côté, des Miracles de Nostre Dame par personnages, réalisée en collaboration avec Ulysse Robert entre 1876 et 18831, et celle, de l’autre, du Mystère de la Passion d’Arnoul Gréban, publiée avec Gaston Raynaud en 18782. Pourtant, pour se faire une image quelque peu cohérente des idées de G. Paris sur le théâtre médiéval, il ne suffit pas de s’en tenir à ces deux publications, ni encore aux neuf autres titres répertoriés sous la rubrique « Théâtre » dans la Bibliographie des travaux de Gaston Paris, établie en 1904 par Joseph Bédier et Mario Roques3. En effet, le philologue aborde la production théâtrale également dans des ouvrages rangés sous d’autres rubriques, notamment dans son manuel de 1888, La Littérature française au moyen âge4, et dans l’Esquisse historique de la littérature française au moyen âge, œuvre parue à titre posthume en 19075. D’autres développements de G. Paris sur le théâtre médiéval sont dispersés dans des contributions dont les titres ne le laisseraient pas toujours deviner.
La France médiévale : une nation culturellement désunie
2Avant d’entrer dans le vif du sujet, il me semble indispensable de dresser le cadre général, de nature hautement idéologique, on le verra, dans lequel se situent les appréciations esthétiques et plus généralement culturelles du philologue quand il parle de la littérature médiévale.
3Ce qui, pour G. Paris, marque le plus profondément le Moyen Âge français est le fait que cette époque aurait connu deux clivages socioculturels se succédant dans le temps : la ségrégation, d’abord, entre le monde des clercs et celui des laïcs, et la séparation, ensuite, de l’univers des courtois de celui des vilains. Le philologue considère les cloisons entre ces différents mondes comme étant à peu près imperméables et y voit la raison principale des insuffisances et des faiblesses de la littérature française médiévale. L’extrait suivant thématise la scission entre le monde clérical et le monde laïc, et le raisonnement qui s’y fait jour conditionnera directement, ainsi que nous le verrons, la vision du théâtre médiéval qui sera celle de G. Paris :
La coexistence, dans la société médiévale, de deux mondes, le monde latin et le monde vulgaire, le monde clérical et le monde laïc, ne saurait être assez rappelée à l’attention de ceux qui veulent comprendre cette époque. [...] particulière à notre moyen âge, [cette juxtaposition de deux mondes] a été pour la littérature vulgaire de ce temps une cause de manifeste infériorité. Cette littérature ne fut pas cultivée, d’ordinaire, par les hommes qui se sentaient une valeur intellectuelle et des lumières supérieures. Puis, quand les clercs se décidèrent à y prendre part, ce fut pour y introduire des conventions, une science, des idées qui n’étaient pas, comme en Inde ou en Grèce, sorties spontanément de la nation, mais étaient empruntées telles quelles à une tradition éloignée, mécaniquement transmise et comprise très imparfaitement. C’est ainsi que l’évolution du génie poétique français fut constamment entravée, puis dérivée, qu’elle ne se déroula pas avec la même liberté, la même originalité que celle des autres poésies […]6.
4Au Moyen Âge, nous dit donc G. Paris, la nation est culturellement désunie, et c’est cette situation qui rend sa littérature incomplète, inférieure à d’autres littératures, mais aussi, et surtout, à ses propres potentialités7. Il y a, d’un côté, le monde des clercs et, de l’autre, le monde des laïcs, d’un côté la littérature cléricale et, de l’autre, la littérature vulgaire ou populaire. Or, l’intérêt principal du philologue va très nettement à la littérature des laïcs, à la littérature du peuple. Cet intérêt, toutefois, ne pourra se ramener que de façon très restreinte à une vision romantique du Moyen Âge, comme le montre à lui seul l’extrait qu’on vient de lire et qui est loin, en effet, de toute glorification de la littérature populaire. De fait, le peuple, dans le discours de G. Paris, ne se voit jamais valorisé de façon absolue, mais uniquement de façon relative, en comparaison, d’une part, avec les clercs et, d’autre part, avec les courtois. Pourquoi ? Parce que le peuple seul est, aux yeux du philologue, porteur des valeurs nationales. Ce raisonnement ne se comprend pas sans le recours direct à l’univers idéologique de G. Paris, marqué par une attitude libérale et résolument anticléricale. À l’instar des clercs modernes, cible de sa critique, les clercs médiévaux représentent pour le philologue un monde artificiel et largement réactionnaire, coupé de l’évolution naturelle de la nation française, qui se voit incarnée par les seuls laïcs. La même chose sera vraie pour les courtois, qui eux aussi créeront, aux yeux du savant, un monde factice et conventionnel dont ils excluront de façon très discourtoise les vilains, pourtant seuls véritables représentants de la nation française.
5L’attitude libérale et anticléricale de G. Paris est à son tour indissociable de l’approche historiciste des phénomènes humains qui domine la pensée intellectuelle de la deuxième moitié du xixe siècle non seulement en Allemagne, lieu de ses premières formulations théoriques, mais également en France, et dont les deux idées de base sont le temps et la nation. Le temps : il faut laisser libre cours aux événements. La nation : c’est elle, en effet, qui constitue l’horizon de totalité des recherches tant historiques que philologiques. Dans cette optique, les clercs sont censés freiner l’évolution naturelle de la nation alors que le peuple se voit érigé en seul garant de l’évolution organique de celle-ci.
6La catégorisation binaire « peuple-clercs », qui est donc en même temps une catégorisation axiologique dans le sens évoqué, est également opératoire, il va sans dire, dans la construction du théâtre médiéval en objet philologique. On lit ainsi dans La Littérature française au moyen âge : « [L]es monuments, malheureusement trop peu nombreux, qui nous restent du théâtre profane, sont plus intéressants que tous ceux du théâtre religieux8. » Cet a priori évaluatif – tout comme d’autres – dépend directement de la logique propre au système idéologique qui sous-tend et structure l’ensemble du discours philologique de G. Paris.
7Voici donc, encore une fois, la situation de départ : la littérature médiévale dans son ensemble est une littérature insuffisante aux yeux de G. Paris, tant au niveau de la forme qu’au niveau du contenu, en raison, principalement, de son lieu d’origine, qui est la nation culturellement désunie. À l’intérieur de la littérature médiévale, la littérature d’origine cléricale est jugée plus sévèrement encore que la littérature (prétendument) laïque, seule représentative, cette dernière, de la nation française. Tous les jugements de valeurs, fussent-ils positifs – et les éloges de tel ou tel texte, voire de tel ou tel genre ne manquent en effet pas sous la plume du philologue –, sont à comprendre à l’intérieur de ce cadre d’appréciation général, très modéré, on l’avouera.
Mystères et miracles : si seulement ils n’étaient pas religieux !
8Commençons par le théâtre religieux, par les mystères et les miracles donc, qui, étant donné leur origine cléricale, entrent en lice déjà fortement handicapés.
9Tout d’abord, il y a, bien sûr, le Jeu d’Adam, dont G. Paris fait le premier mystère en le rattachant au groupe des Prophètes du Christ, qui ferait lui-même partie du cycle de Noël9. Le Jeu d’Adam se voit jugé de façon tout à fait positive par G. Paris :
C’est une œuvre écrite en Angleterre au xiie siècle et dont l’auteur possédait un réel talent poétique : la scène de la séduction d’Eve par le serpent est un des meilleurs morceaux de la dramaturgie chrétienne ; il faut aussi signaler la variété des rythmes employés, avec une grande habileté, par le poète, à l’imitation des mystères latins10.
10Trois figures de pensée11 déterminent ce jugement positif : celle, premièrement, qui valorise ce qui est vieux – en l’occurrence, il s’agit du plus ancien drame religieux en français que nous possédions ; celle, deuxièmement, qui valorise ce qui est rare – le Jeu d’Adam nous est parvenu dans un seul manuscrit et il est le seul représentant conservé de son genre à l’époque présumée de sa naissance ; et celle, finalement, qui valorise les textes courts – en effet, ce drame, il est vrai amputé de la fin, est non seulement le plus ancien, mais certainement aussi l’un des plus courts de tous les drames religieux médiévaux que nous connaissons. Or, ce sont ces mêmes figures de pensée qui vont également motiver, à l’autre bout de l’échelle, pour ainsi dire, les jugements négatifs sur la plupart des mystères, et avant tout, sur les mystères tardifs, dont on connaît les dimensions…
11Pour ce qui est de la valorisation des mystères dans leur ensemble, il faut reparler du poids de la nation déjà évoqué. Il est tout à fait clair qu’à l’époque de G. Paris, la nation constitue pour les recherches philologiques – comme pour toute autre question – l’horizon de référence tant conceptuel qu’émotionnel. Dans la deuxième moitié du xixe siècle, tout ou presque se pense et se vit dans des catégories nationales. Il ne faudra cependant pas confondre national et nationaliste. Le nationalisme agressif dont on connaît les conséquences tragiques est essentiellement un produit de la fin du xixe siècle et ne donne guère une idée appropriée de ce qu’était la nation pour la grande majorité des philologues de la génération de G. Paris, encore fortement imprégnés de la vision cosmopolite des nations et des littératures nationales telle qu’elle avait été esquissée et rêvée par des écrivains et penseurs comme Goethe et Madame de Staël. Dans cette vision de la « Weltliteratur » (« Littérature mondiale »), une nation se voit d’autant plus valorisée qu’elle est capable de renouveler sa littérature par l’assimilation constante d’éléments étrangers12. Ce processus d’ouverture et d’assimilation ne remet cependant pas en cause le concept même de nation, qui, encore une fois, reste bien le point de référence des réflexions philologiques dans la deuxième moitié du xixe siècle.
12Dans cette optique, une matière jugée nationale comme l’est par excellence la « matière de France », c’est-à-dire les chansons de geste, dont une partie au moins seraient sorties directement des guerres nationales, est tout naturellement mise au-dessus de matières jugées étrangères comme la « matière de Bretagne » ou la « matière antique », et ceci indépendamment de l’ancrage courtois qui viendra modérer encore les jugements de valeurs sur des textes issus de ces deux traditions. Or, toujours de ce point de vue, la matière biblique, pour l’appeler ainsi, sur laquelle sont bâtis les mystères, n’est pas nationale non plus, dans la mesure où elle tire son origine du savoir clérical et que les textes qui en sortent échappent donc au critère décisif de la « spontanéité », terme clef de l’argumentation de G. Paris qui signifie absence de modèles et de sources autres que populaires dans le sens de laïco-nationaux.
13Radicalement différents des chansons de geste par leur origine, les mystères s’en rapprochent cependant sous un autre aspect, touchant également à la nation : aux yeux du philologue, les mystères sont en effet le seul genre dans l’histoire de la littérature médiévale française qui, après les chansons de geste, ait été capable d’unir toute la nation autour de certaines valeurs culturelles à travers des expériences d’émotions collectives :
Plus tard encore, malgré la séparation du peuple en deux [i.e. les vilains d’un côté et les courtois de l’autre], malgré l’introduction de la science des clercs dans la littérature vulgaire, il y eut une poésie qui s’adressa à toute la nation : ce fut le théâtre. Au xive et au xve siècle, les mystères furent ce qu’avaient été autrefois les chansons de geste. Leur sujet, exclusivement religieux, leur donnait des droits égaux à la sympathie et au respect de tous ; l’unité chrétienne, suppléant l’unité nationale, faisait battre un seul cœur dans la poitrine des milliers de spectateurs13.
14Cette vision des choses correspond par ailleurs tout à fait à l’opinion de chercheurs modernes. Qu’il nous suffise de citer ici la regrettée Emmanuèle Baumgartner qui parle, à propos des chansons de geste, d’une « [communication rituelle et ritualisée dont on retrouve peut-être l’équivalent au xve siècle avec les grands Mystères de la Passion14. »
15À l’instar des chansons de geste, les mystères sont donc considérés par G. Paris comme étant culturellement et émotionnellement unificateurs, ce qui contribue fortement à leur valorisation, vu l’image bipolaire et désunie de la société médiévale à la fois construite et déplorée par le philologue. Cependant, la nature respective des valeurs que véhiculent les deux genres en question ainsi que leurs (présumés) milieux d’origine suffisent à tempérer l’enthousiasme du philologue au sujet des mystères :
On a dit plus d’une fois que les mystères – on finit par appeler ainsi même les vies de saints, les épisodes de l’histoire biblique et jusqu’à des drames profanes, – furent pour le xve siècle ce qu’avaient été les chansons de geste pour le haut moyen âge ; mais ils avaient, en comparaison de celles-ci, le grand désavantage de n’être pas sortis spontanément de l’inspiration nationale, d’être puisés à des sources latines, d’être soumis au contrôle de l’Eglise, et de manquer, par suite, de liberté autant que d’originalité15.
16Venant du clergé et non pas du peuple (au sens, toujours, des laïcs, indépendamment de la question des couches sociales) et propageant des valeurs non pas nationales mais religieuses, les mystères, dans le système représentatif et interprétatif de G. Paris, sont ainsi tout de même nettement inférieurs aux chansons de geste, seul genre littéraire véritablement national qu’ait produit le Moyen Âge aux yeux du philologue. On ne saurait mieux souligner le poids de l’idéologie dans le discours scientifique, souvent dit positiviste, de G. Paris !
17Chose importante cependant : à l’intérieur de la littérature cléricale, les mystères occupent la même place – et c’est une place de choix – que les chansons de geste à l’intérieur de la littérature populaire, et l’infériorité des premiers par rapports aux seconds vient essentiellement de la nature des valeurs qu’ils propageraient et du milieu dont ils seraient sortis.
18Mais il y a d’autres critères encore qui viennent dévaloriser les mystères aux yeux de G. Paris, qui y déplore notamment, en effet, le manque de qualités esthétiques : « Si dans les épopées anciennes le style manquait, il est mauvais dans les mystères16. » Or, si l’absence de style dans les chansons de geste se voit, du moins par moments, évaluée de façon tout à fait positive par le philologue, dans la mesure où elle caractériserait une esthétique radicalement autre, barbare (avec tous les souvenirs romantiques qu’évoque ce terme)17, le mauvais style qu’il constate dans les mystères ne trouve aucune excuse à ses yeux. Bien sûr, G. Paris admire çà et là quelques traits intéressants, quelques tournures heureuses, mais son bilan reste cruel : « Ce répertoire, note-t-il en conclusion aux paragraphes consacrés aux mystères dans l’Esquisse, est une riche mine de renseignements pour l’archéologie et la philologie ; la littérature n’a presque rien à y relever18. »
19De façon générale, les jugements esthétiques de G. Paris se fondent, sans qu’il le déclare ouvertement et en dépit du souci qu’il affiche d’historiciser et donc de relativiser les valeurs et les canons esthétiques, sur une poétique moderne, de tradition classiciste, et sont donc, la plupart du temps, anachroniques. Un seul genre échappe à ce crible : les chansons de geste, genre privilégié s’il en est du philologue, et dans lequel, nous l’avons dit, le paradigme romantique semble remplacer le paradigme classiciste et venir ainsi transformer en qualités les défauts constatés dans une perspective moderniste.
20En ce qui concerne les mystères, la vision classiciste se remarque également à un autre point de l’argumentation. Il ne saurait en effet y avoir de drame, pour G. Paris, sans conflit humain, et c’est cette idée, justement, qui serait étrangère par nature aux récits bibliques mis en scène par les mystères, où tout serait joué d’avance.
Tout drame suppose une lutte. Dans le récit de la Passion, il n’y a en réalité pas de lutte, puisque le héros, d’après le dogme catholique, va volontairement au supplice et n’est même devenu homme que pour atteindre ce but : il est d’ailleurs trop au-dessus de ceux qui l’entourent et l’aiment pour que leurs sentiments, comme dans Polyeucte, osent tenter de s’opposer aux siens19.
21Les mystères se caractériseraient donc par l’absence de profondeur humaine et psychologique, mettant en scène un monde purement monologique et, par là même, plat. C’est peut-être exactement cela aussi que Renan voulait dire quand il écrivait, en 1855 : « [Le] Mystère n’arriva jamais, en France du moins, à se transformer en tragédie20. »
22Les choses pourtant se révèlent plus compliquées, dans la mesure où la vision classiciste ne domine pas l’ensemble des jugements de G. Paris sur le théâtre médiéval religieux. Cela devient évident quand on étudie la question du potentiel de renouvellement des mystères discutée à plusieurs reprises par le savant.
23Au sujet d’un éventuel impact passionnel de ces pièces sur le spectateur (ou lecteur) moderne, G. Paris reste infiniment sceptique :
Toujours intéressants pour l’histoire des mœurs, des idées et de la littérature, ils n’éveilleront jamais dans les âmes françaises, même préparées par l’étude, la chaude et filiale sympathie qu’y font si facilement naître les chansons de geste, et le mystère de la Passion ne redeviendra pas une œuvre nationale comme a pu le faire la Chanson de Roland21.
24On retrouve ici la place paradigmatique de l’épopée dans la construction de la conscience nationale sur la longue durée, en même temps qu’on mesure toute la distance qui sépare la position de G. Paris vis-à-vis du théâtre religieux du projet de « revivification » qu’essaieront de réaliser, quelques décennies plus tard, Gustave Cohen et les Théophiliens22 ! Qu’on lise encore ces phrases :
En résumé, on ne peut mieux comparer le Mystère de la Passion qu’à tel ou tel de ces vieux tableaux flamands qui représentent le même sujet, et devant lesquels nous nous arrêtons longuement avec curiosité, mais sans éprouver ni attendrissement ni extase23.
25L’attitude émotionnelle très réservée de G. Paris vis-à-vis des mystères n’est guère surprenante : elle s’explique non seulement par le système idéologique proprement dit du philologue dont nous avons vu l’impact, mais également par sa philosophie de vie, caractérisée par un athéisme décidé, qu’on ne confondra pas, cependant, avec une position agnostique24.
26Sur un autre point, en revanche, le philologue partage les idées de Gustave Cohen. Comme ce dernier, il se montre enthousiasmé par les potentialités contenues dans la mise en scène des spectacles médiévaux :
La mise en scène, le spectacle ! voilà quel fut le grand élément de cet incomparable succès des mystères. Les conditions dans lesquelles était né le drame chrétien l’avaient amené à se créer un logis à son propre usage, qui disparut probablement sans retour avec la renaissance du drame grec, et qui cependant marque une des formes les plus remarquables, peut-être susceptible de renouvellement, de l’art dramatique. Au lieu d’être successive, si l’on peut ainsi parler, la mise en scène est simultanée. Les différents lieux où se passe l’action sont tous, dès l’origine et jusqu’à la fin, sous les yeux du spectateur, garnis des personnages afférents. Tous ces lieux communiquent entre eux par le devant de la scène, terrain neutre où se passent les voyages, les marches, les actions sans lieu défini. Qu’on se figure une telle scène livrée au génie d’un Shakespeare : n’en aurait-il pas tiré d’extraordinaire parti ? et n’aurait-elle pas du moins été préférable à ces éternels changements de décors qui aujourd’hui rendent si difficile l’exacte représentation de Hamlet ou de Richard III25 ?
27On voit bien ici que le paradigme classiciste n’opère pas toujours de la même façon à l’intérieur du raisonnement de G. Paris : s’il détermine pour certains genres le plus souvent de façon implicite, voire purement inconsciente – les jugements esthétiques proprement dits, en général à la défaveur de la littérature médiévale, il est, pour ce qui est de l’évolution de la littérature nationale dans son ensemble, perçu comme un élément étranger qui aurait empêché, sinon le développement la littérature française se serait en effet épuisée d’elle-même à la fin du moyen âge –, du moins le renouement avec les traditions autochtones. En l’occurrence, le recours au théâtre antique effectué à la Renaissance et au xviie siècle aurait rendu impossible la formation d’un théâtre français original dont les germes auraient été présents dans les mystères, dans les miracles et aussi, on va le voir, dans le théâtre profane. Le théâtre français n’est pas le seul à avoir subi ce sort :
[Le théâtre italien] est d’ailleurs, comme le nôtre, un théâtre qui n’a pas atteint le terme de son évolution : dédaigné par les artistes savants de la Renaissance, il a également disparu devant l’essai d’une restauration du théâtre antique. M. d’Ancona pense, comme des critiques français l’ont souvent dit pour leur pays, que cet abandon de la forme dramatique indigène n’a peut-être pas été un bien, et que des rappresentazioni, comme des mystères, aurait pu sortir une dramaturgie plus nationale, plus souple et plus vivante que ne l’a été pendant longtemps l’imitation des tragédies latines et grecques. Mais, quoi qu’on pense de ce regret, il ne change pas l’état des choses : le théâtre religieux, né spontanément en Italie ainsi qu’en France, de la liturgie, n’a pas abouti, comme il devait logiquement le faire, à créer un théâtre profane, et il s’est évanoui, en Italie ainsi qu’en France, devant la réapparition du théâtre antique, comme, d’après les vieilles croyances, les ombres formées dans les ténèbres disparaissaient dès qu’on voyait poindre à l’orient les premiers rayons du soleil renaissant26.
28Si la mise en scène est de loin l’aspect du théâtre religieux le plus apprécié par le philologue, c’est donc aussi parce que sa naissance se rangerait dans la catégorie du spontané – catégorie du national et du populaire en même temps – dont nous avons souligné l’importance dans la pensée de G. Paris. L’extrait suivant est également explicite à ce sujet :
[...] Cette disposition [scénique], née, comme celle du théâtre grec, de la force des choses et non de la réflexion, pouvait présenter de sérieux avantages, donnait aux différents éléments de l’action une unité visible, et dispensait des perpétuels changements de scène qui sont si incommodes et si nuisibles à l’effet artistique dans le théâtre anglais ou espagnol, ainsi que de l’unité conventionnelle du théâtre français classique27.
29Pour terminer ce chapitre sur le théâtre religieux, passons aux miracles. Les jugements esthétiques que G. Paris porte sur ces derniers sont globalement les mêmes que pour les mystères et, cependant, les miracles sont considérés comme étant supérieurs – et de beaucoup – à ceux-là. On soupçonne les raisons de cette préférence. Elles deviennent évidentes à la lecture du passage suivant :
Ces pièces [des Miracles de Nostre Dame par personnages] n’ont d’ailleurs, sauf quelques endroits assez naïfs et touchants, qu’une très faible valeur littéraire ; elles sont construites avec une simplicité tellement dénuée d’artifice qu’elles en deviennent plates et souvent presque grotesques ; mais elles montrent de quel développement était susceptible la forme des miracles, bien supérieure, au point de vue dramatique, à celle des mystères. Ceux-ci, gênés par la sainteté même de l’action qu’ils représentaient, ne pouvaient prendre aucune liberté et étaient emprisonnés dans des données surnaturelles exclusives de tout intérêt vraiment humain ; dans les miracles, au contraire, l’action est tout humaine, et le poète est libre de la traiter comme il l’entend ; la Vierge ou le saint qui, par un miracle, doit la dénouer n’apparaît qu’à la fin, vrai deus ex machina, sans peser, pendant la durée du drame, sur la conduite des personnages. Entre les mains de poètes quelque peu habiles, le miracle aurait pu devenir le vrai drame moderne, en éliminant peu à peu l’intervention surnaturelle qui le terminait. Il n’en fut rien, grâce à l’absence de talent et surtout d’initiative personnelle chez les auteurs de miracles, et le théâtre sérieux des temps modernes trouva ses origines dans l’imitation de l’antique28.
30La supériorité des miracles tient donc essentiellement au fait que la part du surnaturel y serait réduite au profit d’actions purement humaines, au fait, donc, que l’univers platement monologique où tout serait joué d’avance ferait place à des conflits individuels, et, partant, à un monde plus complexe, plus moderne aussi. Le malaise idéologique et émotionnel qu’éprouve G. Paris face à toute cette littérature d’inspiration chrétienne devient particulièrement palpable ici. Le vocabulaire qu’il utilise est en effet révélateur : ce ne sont pas les mystères, soyons-en sûrs, qui sont « gênés » par la présence du surnaturel, mais le philologue lui-même ; et c’est évidemment encore à lui, et non pas aux spectateurs de l’époque, que « pèse » la présence de la Vierge et des saints !
Le théâtre profane : une promesse non tenue
31Le théâtre profane ne retiendra guère notre attention : G. Paris ne s’est pas beaucoup occupé de cette partie de la production théâtrale et ce qu’il en dit est moins complexe que ses développements sur le théâtre religieux.
32Pour le théâtre profane – supérieur d’emblée, on l’a dit, au théâtre religieux en raison de sa (prétendue) origine laïque, non cléricale – le philologue construit une double filiation, religieuse et profane, dont la première semble cependant purement extérieure :
Le théâtre au moyen âge est surtout religieux ; le théâtre profane lui-même est en partie, au moins par ses origines, dépendant du culte, notamment en ce que les représentations avaient lieu d’habitude la veille des fêtes des saints, et qu’elles étaient souvent le fait de confréries auxquelles ne manquait jamais, au moyen âge, un lien religieux. Cependant il s’est vite, au moins dans une certaine région, détaché plus ou moins complètement de tout rapport avec l’Église [...]. D’ailleurs, par les joculatores, qui débitaient souvent, comme nous l’avons vu, des débats […] ou des monologues [.] dans les réunions, le théâtre a aussi des origines toutes profanes, et une veine qui ne fut sans doute jamais interrompue, bien qu’elle se montre rarement aux yeux dans l’obscurité des siècles reculés, va des mimes romains aux farceurs du xve siècle29.
33Ce qui prime dans l’appréciation du théâtre profane par le philologue est évidemment son inspiration laïque, et il n’est peut-être pas sans intérêt de voir qu’à travers la figure du jongleur, les chansons de geste – genre de prédilection, faut-il le rappeler, de G. Paris – et le théâtre profane sont au moins partiellement liés.
34Les deux morceaux d’Adam de la Halle que nous connaissons, sont de toutes les pièces dramatiques dont il parle, celles que G. Paris préfère de loin : « [Elles] sont de beaucoup ce que le moyen âge nous a laissé de plus remarquable en fait de poésie dramatique30. » Le Jeu de la Feuillée et le Jeu de Robin et Marion réunissent en effet un faisceau de critères qui les élèvent tout naturellement au sommet de la littérature dramatique médiévale : ce sont les deux premières pièces purement profanes qui nous soient parvenues (et c’est donc la loi axio-chronologique déjà évoquée qui devient opératoire). Elles sont courtes. Et, surtout, et c’est ici, en l’occurrence, le critère le plus important, elles sont considérées comme des « œuvres uniques dans la littérature du moyen âge31 ». Or, dans le système de pensée de G. Paris, les hapax sont toujours valorisés, tant au niveau des textes individuels – on pourrait aussi alléguer, dans un autre registre, l’exemple d’Aucassin et Nicolette – qu’au niveau des genres, comme c’est notamment le cas des chansons de geste, toujours elles ! C’est le manque de terme de comparaison, précisément, qui semble rendre toutes ces œuvres incomparables au sens figuré également32.
35G. Paris voit dans le Jeu de Robin et de Marion le premier opéra comique français33, faisant sienne une comparaison qui avait déjà statut de topos à l’époque – on la trouve notamment chez Louis-Jean-Nicolas de Monmerqué et Francisque Michel dans Théâtre français au moyen âge, ouvrage pionnier paru en 183934 –, et rapproche le Jeu de la Feuillée d’Aristophane et de Shakespeare, rapprochements dont le premier au moins jouissait d’une longue tradition également, étant attesté dès 1846 sous la plume de Charles Magnin35. Lisons donc G. Paris :
Il est impossible de lire le Jeu de la Feuillée, ce mélange de satire mordante, cyniquement personnelle et follement gaie, de spectacle prestigieux et de libre et légère fantaisie, sans penser à Aristophane et à Shakespeare36.
36Si, dans La Littérature française du moyen âge et dans l’Esquisse, la référence à Shakespeare disparaîtra, celle à Aristophane se maintiendra, avec, il est vrai, quelques modalisations épistémiques37. Toutes ces références servent évidemment à rehausser le prestige des pièces en question, prestige qu’on se garderait cependant de surestimer, car plus que les valeurs esthétiques proprement dites, ce sont, ici encore, les valeurs culturelles et historiques qui sont en jeu. Cela est également vrai pour la Farce de Maître Pathelin, autre « véritable chef-d’œuvre » aux yeux du philologue et dont Renan s’était déjà fait le panégyriste, non pas inconditionnel pourtant, mais historiciste lui aussi38.
37De toutes ces pièces, nous dit G. Paris, et l’on rejoint ici ce que nous avons vu au sujet du théâtre religieux, aurait pu naître un grand théâtre comique – et même sérieux39 – vraiment national, si seulement il y avait eu des poètes doués de génie dramatique ! Et c’est ainsi qu’ici encore, le paradigme classiciste aurait définitivement étouffé les germes restants de la tradition autochtone, qui se serait finalement épuisée d’elle-même.
Transsubstantiations
38Les mystères profanes vont nous permettre de boucler ce parcours et de formuler, en guise de conclusion, une thèse – quelque peu hérétique (sic !) – d’interprétation globale. Nous avons évoqué le progrès que réalisent, aux yeux de G. Paris, les miracles par rapport aux mystères en raison d’une sorte d’humanisation et d’immanentisation des pièces, qui les rapprochent du système de valeurs du philologue. Ce processus est évidemment jugé plus avancé encore dans des pièces comme Le Siège d’Orléans ou La Destruction de Troie qui, pour cela même, sont fortement appréciées par G. Paris. Mais, à vrai dire, ces textes sont moins appréciés pour eux-mêmes, dans leur individualité poétique propre, qu’ici encore en tant que promesses d’un genre pourtant jamais réalisé :
L’originalité de Milet consiste à avoir appliqué à un sujet profane la forme des représentations religieuses : ce mystère emprunté d’une fable antique, en même temps que celui du Siège d’Orléans, tiré directement d’une réalité prochaine, ouvrait une voie ; cette double initiative eût pu conduire, semble-t-il, à un drame à la fois national, laïque et moderne ; mais Milet, bien que son œuvre ait été goûtée, n’eut pas d’imitateurs40.
39Pour G. Paris, le genre dramatique idéal aurait donc combiné la forme, i.e. la mise en scène des mystères religieux avec un contenu profane. On peut faire un pas de plus : le genre dramatique idéal aux yeux du philologue aurait combiné la forme des mystères avec le contenu véhiculé à une autre époque par les chansons de geste, à savoir un contenu non seulement humain et profane, mais historique et national. De ce point du vue, Le Siège d’Orléans jouit de toutes les faveurs de G. Paris et les Perses d’Eschyle ne sont plus loin...41
40Les deux historiens allemands Friedrich Jäger et Jörn Rüsen écrivent à propos de l’historisme au xixe siècle :
Man hat mit Recht den Historismus als letzte Religion der Gebildeten Europas bezeichnet : Die innerweltliche Entwicklung nationaler Grösse ersetzt den christlichen Gedanken von Tod und Auferstehung im Prozess der Heilsgeschichte. Das erklärt auch die Inbrunst, mit der die Vergangenheit des eigenen Volkes historio-graphisch lebendig gemacht, als Schlüssel zur kollektiven Identität vergegenwärtigt wurde42.
41Abstraction faite de la chronologie relative des genres, les mystères, du point de vue historiciste et national qui est celui de G. Paris, sont bien, en un sens, des chansons de geste manquées et les chansons de geste, mais également le discours philologique lui-même, des mystères transformés, transsubstantiés en une nouvelle histoire du salut, de nature purement immanente (et républicaine) celle-ci.
42Le théâtre médiéval – et surtout le théâtre médiéval religieux – nous montre mieux que d’autres genres à quel point la littérature du moyen âge est, aux yeux de G. Paris, une littérature incomplète, une littérature qui ne se suffit pas à elle-même et qui, pour cette raison, est toujours transcendée vers un horizon qui n’est autre que l’univers des valeurs du philologue, enraciné dans son milieu et dans son temps.
Notes de bas de page
1 Miracles de Nostre Dame par personnages, publiés d’après le manuscrit de la Bibliothèque nationale par G. Paris et U. Robert, Paris, Firmin Didot, 1876-1903, coll. « Société des Anciens Textes Français », 8 vol. Les volumes I à VII ont paru entre 1876 et 1883. Le volume VIII, qui paraît l’année de la mort de Gaston Paris, en 1903, contient, d’après le sous-titre, un « glossaire et des tables par François Bonnardot » ; les tables comportent, plus précisément, les noms propres ainsi qu’un « relevé des citations bibliques répandues dans les sermons qui sont joints aux Miracles » (« Avertissement » du vol. VIII, p. I). Le projet d’édition est resté inachevé dans la mesure où le dernier volume annoncé (ibid., p. I-II), qui aurait contenu « une étude sur la date, la patrie et les auteurs du recueil [...], ainsi que des recherches sur les sources historiques et légendaires des Miracles, et le relevé des leçons du manuscrit [corrigées par les éditeurs] » n’a jamais paru. On lit encore, dans ce même avertissement : « Le travail considérable que représente ce volume [VIII] est entièrement dû à M. François Bonnardot. M. Gaston Paris n’a rempli ici d’autres fonctions que celles de commissaire, consistant à revoir les épreuves avant le bon à tirer. » (ibid., p. I)
2 Le Mystère de la Passion, d’Arnoul Greban, publié d’après les manuscrits de Paris, avec une introduction et un glossaire, par G. Paris et G. Raynaud, Paris, Vieweg, 1878. Pour une critique de cette édition ainsi que quelques lettres échangées par G. Paris et G. Raynaud, voir les remarques d’Omer Jodogne dans Le Mystère de la Passion, d’Arnoul Greban, édition critique par O. Jodogne, Bruxelles, Palais des Académies, Académie Royale de Belgique, Mémoires de la classe des lettres, collection in-4º, 2e série, t. XIII, fascicule II, 1983, t. II, p. 15-23.
3 J. Bédier et M. Roques, Bibliographie des travaux de Gaston Paris, Paris, Société amicale Gaston Paris, 1904, réimprimée dans U. Bähler, Gaston Paris et la philologie romane, avec une réimpression de la Bibliographie des travaux de Gaston Paris publiée par J. Bédier et M. Roques, (1904), Genève, Droz, 2004, coll. « Publications romanes et françaises » 134, p. 99-100.
4 Je cite dans l’édition suivante : G. Paris, La Littérature française au moyen âge (xie-xiv siècle), Paris, Hachette, (1888), 19094.
5 G. Paris, Esquisse historique de la littérature française au moyen âge, Paris, Armand Colin, 1907.
6 Ibid., p. 6-7.
7 Pour des développements plus amples des observations qui suivent, je me permets de renvoyer à mon ouvrage Gaston Paris et la philologie romane, op. cit.
8 G. Paris, La Littérature française au moyen âge, op. cit., p. 209.
9 Ibid., p. 261-262.
10 Ibid., p. 262.
11 Je distingue le système idéologique proprement dit de G. Paris de ce que j’appelle « figures de pensée ». Celles-ci se rattachent, il est vrai, de plusieurs façons à ce système idéologique, à l’intérieur duquel elles opèrent, mais, en même temps, elles semblent également, du moins en partie, lui échapper et avoir un statut plus général, de nature presque anthropologique (voir U. Bähler, Gaston Paris et la philologie romane, op. cit., p. 655-656).
12 Voir, pour toute cette problématique nationale, ibid., p. 375-456.
13 G. Paris, « La poésie du moyen âge » [leçon d’ouverture faite au Collège de France le 3 décembre 1866], id., La Poésie du moyen âge, leçons et lectures [première série], Paris, Hachette, 1906, p. 29.
14 E. Baumgartner, Histoire de la littérature française, Moyen Âge, 1050-1486, Paris, Bordas, 1987, coll. « Univers des lettres Bordas », p. 76.
15 G. Paris, Esquisse historique de la littérature française au moyen âge, op. cit., p. 267.
16 G. Paris, « La poésie du moyen âge », op. cit., p. 30.
17 Voir U. Bähler, Gaston Paris et la philologie romane, op. cit., p. 525-537.
18 G. Paris, Esquisse historique de la littérature française au moyen âge, op. cit., p. 279.
19 [G. Paris et G. Raynaud], « Introduction », Le Mystère de la passion, op. cit., p. XVII ; voir également G. Paris, Esquisse historique de la littérature française au moyen âge, op. cit., p. 275-276.
20 E. Renan, « La Farce de Patelin » (1856), Œuvres complètes, t. II, éd. par H. Psichari, Paris, Calmann-Lévy, 1948, p. 210.
21 G. Paris, « La poésie française au xve siècle » [leçon d’ouverture faite au Collège de France, le 9 décembre 1885], La Poésie du moyen âge, leçons et lectures, deuxième série, Paris, Hachette, 1895, éd. de 1913, p. 247-248.
22 Voir H. Solterer, « Jouer les morts. Gustave Cohen et l’effet théophilien », Lire le Moyen Âge ?, Équinoxe, n° 16, 1996, p. 81-96.
23 [G. Paris et G. Raynaud], « Introduction », Le Mystère de la passion, op. cit., p. XVIII. Ailleurs on lit : « [Le théâtre français] fait l’effet de ces immenses tapisseries, fourmillantes de personnages en costumes invraisemblables et magnifiques, contenant pêle-mêle des scènes de tout genre, et qu’on peut regarder pendant des heures en y découvrant toujours de nouveaux détails, que fabriquaient alors nos grandes manufactures et dont plusieurs sont d’ailleurs avec les mystères dans un rapport étroit. » (G. Paris, compte rendu d’A. D’Ancona, Origini del teatro italiano. Libri tre, con due appendici sulla rappresentazione drammatica del contado toscano e sul teatro mantovano nel sec. XVI. Seconda edizione. Torino, 1891, Journal des Savants, 1892, p. 670-685).
24 Voir U. Bähler, Gaston Paris et la philologie romane, op. cit., p. 163-180 et p. 214-246.
25 [G. Paris et G. Raynaud], « Introduction », Le Mystère de la passion, op. cit., p. XIX, (je souligne).
26 G. Paris, compte rendu d’A. D’Ancona, Origini del teatro italiano, op. cit., p. 671.
27 G. Paris, La Littérature française au moyen âge, op. cit., p. 264.
28 Ibid., p. 269.
29 Ibid., p. 209.
30 Ibid., p. 210.
31 G. Paris, « Notice sur Paulin Paris, un des auteurs des tomes XX-XXVIII de l’Histoire littéraire de la France », Histoire littéraire de la France, t. XXIX, Paris, Imprimerie Nationale, 1885, p. XII.
32 Voir U. Bähler, Gaston Paris et la philologie romane, op. cit., p. 639-641.
33 G. Paris, La Littérature française au moyen âge, op. cit., p. 213.
34 Paris, Firmin Didot, p. 26.
35 Voir, ici même, la contribution d’Alain Corbellari. Quant à Paulin Paris, celui-ci se borne, en revanche, à une comparaison plus générale avec « l’ancienne comédie grecque » (P. Paris, « Adam de la Halle », Histoire littéraire de la France, t. XX, Paris, Firmin Didot, 1842, p. 650).
36 G. Paris, « Notice sur Paulin Paris, un des auteurs des tomes XX-XXVIII de l’Histoire littéraire de la France », op. cit., p. XII.
37 Voir G. Paris, La Littérature française au moyen âge, op. cit., p. 211 et G. Paris, Esquisse historique de la littérature française au moyen âge, op. cit., p. 203.
38 E. Renan, « La Farce de Patelin » [1856], op. cit.
39 « [...] Le théâtre profane, – d’ailleurs purement plaisant, – a son origine propre et se rattache sans doute à la tradition des histrions romains, devenus les joculatores. Il est probable que, si la curieuse évolution qui a tiré le drame chrétien de la liturgie ne s’était pas produite, le théâtre comique n’en serait pas moins sorti des “débats” et des dialogues facétieux des jongleurs, et on peut même croire que ce théâtre aurait à un moment quelconque engendré un théâtre sérieux, qui n’aurait pas été nécessairement religieux. » (G. Paris, compte rendu de H. Suchier, « Die ältere Zeit. Von der Urzeit bis zum 16. Jahrhundert », H. Hermann et A. Birch-Hirschfeld, Geschichte der französischen Literatur von den ältesten Zeiten bis zur Gegenwart. Leipzig/Wien, 1900, Journal des savants, 1901, p. 783).
40 G. Paris, Esquisse historique de la littérature française au moyen âge, op. cit., p. 280.
41 Ibid., p. 279.
42 Fr. Jaeger et J. Rüsen, Geschichte des Historismus. Eine Einführung, München, Beck, 1992, p. 78. « C’est à bon droit que l’on a appelé l’historisme la dernière religion de l’intelligentsia européenne : le développement immanent de la grandeur nationale remplace l’idée chrétienne de la mort et de la résurrection au cours de l’histoire sacrée. Cela explique également la ferveur avec laquelle on a vivifié, à travers l’historiographie, le passé du peuple [donc de la nation dans ce contexte] et présentifié ce passé en tant que clef de l’identité collective. » (traduction U. B.).
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